Le 9 décembre 2020, Pheanith Hannuna a mis fin à ses jours. Ses parents l’ont retrouvé pendu dans sa chambre. Il avait 21 ans. Pheanith Hannuna n’était pas ce qu’on appelle un garçon à problèmes. Il se posait des questions sur le sens de la vie, comme tous les jeunes de son âge. Mais il ne broyait pas du noir, ne fréquentait pas les psys, ne souffrait pas de solitude. Il avait des tas d’amis, une copine qui l’adorait, d’excellentes relations avec ses parents, une folle passion pour le dessin et mille projets en tête.
Bien qu’ils s’en désolent, tous les commentateurs sont d’accord sur un point : c’est à une véritable humiliation qu’aurait eu droit le « haut représentant de l’UE » J. Borrell lors de sa rencontre à Moscou, le 5 février dernier, avec le ministre des Affaires étrangères Lavrov. La conférence de presse organisée à l’issue de leur entretien relèverait même, selon Le Monde[1], d’une « embuscade » organisée par un Lavrov « formé à l’école soviétique ». Pourtant, quiconque regarde in extenso cette conférence[2] peut constater qu’elle est normalement ennuyeuse, comme toutes les conférences de ce type — où il convient d’émousser en public les désaccords exprimés auparavant dans le secret des cabinets.
Un Bruxellois à Moscou
Il est vrai que cela n’a pas empêché Lavrov de s’exprimer avec franchise sur les différents points évoqués : le ministre russe a ainsi dénoncé la partialité des médias occidentaux dans le traitement de l’affaire Navalny, la politique de sanctions de l’UE à l’égard de la Russie — une tendance nouvelle, imitée des États-Unis, et contre-productive —, où l’hypocrisie occidentale à propos de la gestion policière des manifestations en Russie — systématiquement dénoncée comme violente, quand elle l’est beaucoup moins, selon Lavrov, que dans certains pays européens ou aux États-Unis…
À l’inverse, l’évocation de Cuba, à l’initiative d’un journaliste, a permis de mettre en avant une identité de vue entre l’UE et la Russie à propos de la politique états-unienne dont La Havane est victime. Le vaccin Spoutnik V a été par ailleurs présenté par le diplomate européen comme un succès russe « favorable à l’humanité entière ».
Enfin, lorsque Borrell, évoquant la dégradation des relations russo-européennes ces dernières années, a affirmé : « les choses sont plus compliquées qu’il y a vingt ou trente ans », Lavrov a eu la délicatesse de ne pas relever ce que cette sortie révélait, à savoir la nostalgie occidentale des années 1990, d’une Russie effondrée dirigée par l’impotent Eltsine…