Dans leur malheur, il y a quelques décennies, les Chiliens ont eu la chance (même si on peut la considérer très relative) de ne pas voir leur tragédie défigurée. Au lendemain du 11 septembre 1973 et du renversement du socialiste Salvador Allende par le général Augusto Pinochet, aucun média digne de ce nom n’aurait osé nier qu’il y ait eu un « Coup d’Etat à Santiago ». Autres temps, autre type de « golpe » (dans la mesure du possible moins sanglant), autres « professionnels » de l’information. Le 15 novembre 2019, après que le chef de l’Etat en exercice, arrivé en tête du premier tour de l’élection présidentielle, ait été contraint à abandonner le pouvoir sous la pression de la police et de l’armée, le quotidien Le Monde transformait la victime en responsable et se fendait d’un éditorial singulier : « Bolivie : les erreurs d’Evo Morales ». Et il ne fut pas le seul. En syntonie parfaite avec ceux de ses confrères qui, sur place – Pagina Siete, El Deber, La Razón, Unitel, Red Uno, Bolivisión, etc. –, ont accompagné et soutenu la défenestration du candidat du Mouvement vers le socialisme (MAS) en l’accusant de « fraudes » lors des élections du 20 octobre, la « commentocrature » hexagonale a elle aussi exécuté l’ex-chef de l’Etat.
Source : Arte, Sébastien Le Belzic, 03-03-2020
Confrontée au Coronavirus, la Chine a pris une décision radicale : mettre le pays en quarantaine. Tout l’appareil sécuritaire du régime communiste a été reconverti en appareil de contrôle sanitaire et social grâce à une masse d’agents zélés du régime.
Confrontée au coronavirus, la Chine a pris une décision radicale : mettre le pays en quarantaine. Tout l’appareil sécuritaire du régime communiste s’est reconverti en appareil de contrôle sanitaire et social, grâce à une masse d’agents zélés. Depuis la révolution maoïste, dans chaque quartier, chaque rue, chaque résidence, chaque entreprise, des agents du Parti ont pour mission d’observer, de contrôler, de rapporter, d’informer. Désormais, ils sont chargés de barricader. D’inventer chaque jour des règles plus strictes pour contraindre chacun à l’immobilité. Sébastien Le Belzic, journaliste en poste à Pékin depuis 15 ans, s’est retrouvé confiné dans son immeuble avec sa famille. Le seul moyen de s’échapper ? Par les écrans, les réseaux sociaux, où le reporter parvient à converser avec quelques blogueurs courageux qui tentent d’informer les Chinois. Mais ceux-ci voient de plus en plus réduits au silence. Car il y a un virus que le Parti craint plus que tous les autres : celui de la liberté.
Reportage de Sébastien Le Belzic (France, 2020, 24mn)