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[Vidéo] Mélenchon à propos de France Inter

Saturday 21 January 2017 at 00:01

Je mets cette vidéo pour le début, sur les agissements de France Inter…

Source : Youtube, Jean-Luc Mélenchon, 13-01-2017

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Dans ce 14e épisode de la revue de la semaine, Jean-Luc Mélenchon évoque quatre sujets : Donald Trump et les relations américaines avec la Chine et la Russie, François Fillon qui dit qu’il n’y aurait pas internet en France sans lui, le CAC 40 qui se gave et enfin France inter qui a failli supprimer la chaîne youtube de Jean-Luc Mélenchon…

***LE SOMMAIRE***
00:00 : France Inter a failli supprimer la chaîne de Jean-Luc Mélenchon
03:15 : Pas d’internet sans François Fillon ?
04:28 : Donald Trump et les relations américaines avec la Chine et la Russie
15:35 : Le CAC 40 se gave
18:05 : Fin et conclusion

***LES LIENS***
– François Fillon contre les fonctionnaires de France Télécom: où sont VRAIMENT les compétences ? : http://www.huffingtonpost.fr/sebastie…
– Donald Trump prend le risque d’une crise avec la Chine en parlant avec Taïwan : http://www.lefigaro.fr/international/…
– Les premiers chars américains débarquent en Europe pour se déployer à l’est : http://www.rtbf.be/info/monde/detail_…
– Bourse : les dividendes records du CAC 40 : http://www.lesechos.fr/finance-marche…

Source : Youtube, Jean-Luc Mélenchon, 13-01-2017

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Source: http://www.les-crises.fr/melenchon-a-propos-de-france-inter/


Poutine : “Ils tentent de délégitimer Trump ; ils sont prêts pour un Maïdan à Washington”

Friday 20 January 2017 at 01:12

Selon le site du Kremlin, Poutine a fini par réagir aux accusations débiles, et a tenu le 17 (sans gros buzz médiatique) des propos peu convenus :

Vous savez, il y a une catégorie de gens qui partent sans dire au revoir, par respect pour la situation qui a évolué, afin de ne pas bouleverser quoi que ce soit. Et puis il y a des gens qui continuent de dire au revoir, mais ne partent pas. Je crois que l’administration sortante appartient à la deuxième catégorie.

Que voyons-nous aux États-Unis ? Nous assistons à la poursuite d’une lutte politique intérieure aiguë malgré le fait que l’élection présidentielle soit terminée et qu’elle ait abouti à la victoire convaincante de M. Trump. Néanmoins, à mon avis, plusieurs objectifs sont poursuivis dans cette lutte. Peut-être y en a-t-il plus, mais certains d’entre eux sont parfaitement évidents.

Le premier est de saper la légitimité du président élu des États-Unis. À ce propos, je tiens à souligner que, délibérément ou non, ces personnes causent d’énormes dommages aux intérêts américains. Tout simplement énormes. L’impression est que, après une séance d’entraînement à Kiev, ils sont maintenant prêts à organiser un Maïdan à Washington pour empêcher Trump de d’accéder au pouvoir.

Le deuxième objectif est de lier les mains du nouveau président alors qu’il s’efforce de remplir les promesses de campagne qu’il a faites au peuple américain, à la fois sur le plan intérieur et à l’étranger. Eh bien, réfléchissez, comment peut-on faire quelque chose pour améliorer les relations russo-américaines si des chiffons rouges tels que l’ingérence de pirates informatiques dans la campagne électorale sont agités ? Alors qu’encore une fois, les pirates informatiques – quels qu’ils soient – ne compilaient rien ; Ils n’ont rien inventé ; Ils ont seulement divulgué des faits. Ou, surtout, si les services spéciaux russes ont des faits compromettants sur le président élu.

Ecoutez, je ne connais pas M. Trump. Je ne l’ai jamais rencontré. Je ne sais pas ce qu’il va faire sur la scène internationale, donc je n’ai aucune raison de l’attaquer ou de le critiquer pour quelque raison que ce soit, ou de le défendre, quoi qu’il arrive. Nous ne demanderons même pas au Comité Nobel de lui décerner un prix Nobel pour les mathématiques, la physique ou tout autre sujet. Je ne dispose d’absolument aucun élément pour cela. Ces « fuites » sont évidemment des faux.

Lorsque M. Trump est venu à Moscou il y a quelques années – je ne me souviens pas exactement quand – il n’était pas un politicien. Nous ignorions ses ambitions politiques. Il était juste un homme d’affaires pour nous, l’un des hommes les plus riches en Amérique. Est-ce que quelqu’un pense que nos services spéciaux sont à la poursuite de chaque milliardaire américain ? Bien sûr que non. C’est n’importe quoi. C’est mon premier point.

Deuxièmement, concernant l’allégation selon laquelle Trump serait arrivé à Moscou et que la première chose qu’il aurait faite aurait été de rencontrer des prostituées moscovites. Tout d’abord, il est adulte et, deuxièmement, il a pendant de nombreuses années sponsorisé des concours de beauté et a eu la chance de rencontrer les plus belles femmes du monde. Pourquoi courrait-il à un hôtel pour rencontrer nos filles à responsabilité sociale limitée ? Bien qu’elles soient, bien sûr, les meilleurs au monde. Mais je doute que Trump succombe à cela.

Enfin, il y a une autre chose à considérer. La prostitution est un phénomène social lamentable. Entre autres choses, les jeunes femmes s’y engagent parce qu’elles ne peuvent pas vivre convenablement autrement. Dans une large mesure, la culpabilité incombe à la société et à l’État.

Les gens qui commandent ce type de falsifications, qui sont maintenant utilisées pour diffamer le président élu des États-Unis et afin de faire avancer leur ambition politique, sont pires que les prostituées. Ils n’ont aucune retenue morale du tout. Soit dit en passant, la Russie est constamment en contact avec de telles personnes, nos adversaires. Le fait que de telles méthodes soient utilisées contre le président élu des États-Unis est certainement sans précédent et n’a jamais eu lieu auparavant. Cela indique le niveau important de déréliction parmi les élites politiques de l’Ouest, y compris les États-Unis.

Mais j’espère sincèrement que le bon sens prévaudra. Cela s’applique aux relations entre les États-Unis et leurs alliés, y compris en Europe. Après tout, c’est l’administration sortante actuelle qui a impliqué de nombreux dirigeants politiques européens dans la lutte politique intérieure des États-Unis. Les problèmes d’aujourd’hui sont le résultat de ces activités.

Je suis persuadé que les grands intérêts mutuels régleront les choses. Bien sûr, il peut y avoir des nuances, et cela pourrait laisser un mauvais arrière-goût, mais finalement les choses se remettront toujours en place. De même, je suis convaincu que nous pourrons finalement revenir à des relations normales d’État à État dans l’intérêt des peuples d’Europe et des peuples de Russie et des États-Unis, ce qui contribuera à faire avancer l’économie dans son ensemble, stabiliser la situation internationale et assurer la sécurité.

Vous noterez que la presse n’a en général pas repris la principale phrase- à mon sens – en titre, s’arrêtant souvent sur le fait qu’il traite de prostitués les créateurs du rapport bidon sur Trump. Et sans sembler comprendre qu’i se foutait de la geuule de nos médias…

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Mais revenons au fond.

Alors, exagère-t-il ?

Hmm, qu’a dit Kerry le même jour à Davos ? :

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JOHN KERRY: We’ll have injured our own credibility in, conceivably, an irreparable way. Not irreparably. There’s time, and that’s just too dramatic. But we will have done great injury to ourselves. And it will hurt for the endurance of a year, two years, whatever, while the [Trump] administration is there.

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sous forme de “blague”, que l’administration Trump pourrait ne durer qu’un an ou deux…

Après, ils se plaignent qu’il y a du conspirationnisme qui se développe, les gens pouvant prendre ça au premier degré…

Bon, CNN  a du coup fait un reportage important : il se passe quoi si Trump se fait assassiner durant son investiture ?

Comme le patron de la CIA (partant) qui a remonté les bretelles de Trump, s’attirant une réponse brutale :

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Mais bon, on laissera le mot de la fin à l’ambassadrice américaine à l’ONU, partante mais toujours en poste, qui illustre le naufrage éthique d’une époque :

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Source: http://www.les-crises.fr/poutine-ils-tentent-de-delegitimer-trump-ils-sont-prets-pour-un-maidan-a-washington/


[Vidéo] Trump : le peuple a-t-il toujours raison ? C polémique

Friday 20 January 2017 at 00:59

Source : Youtube, C Polémique, 15-01-2016

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Pour en débattre, Bruce Toussaint recevait ce dimanche 15 janvier :
Emmanuel Todd, historien et essayiste.
Hubert Védrine, président de l’Institut François Mitterrand, ministre des Affaires Etrangères de 1997 à 2002 et auteur de Le monde au défi aux éditions Fayard.
Cynthia Fleury, philosophe, psychanalyste, professeur à l’American University of Paris et auteur de Les Irremplaçables aux éditions Gallimard.
Bernard Guetta, journaliste, spécialiste de géopolitique et lauréat du prix Albert Londres en 1981.
Christine Ockrent, journaliste et auteure de Clinton / Trump : l’Amérique en colère aux éditions Robert Laffont.
Thomas Snégaroff, historien spécialiste des États-Unis et auteur de Hillary et Bill Clinton. L’obsession du pouvoir aux éditions Tallandier.

Source : Youtube, C Polémique, 15-01-2016

Source: http://www.les-crises.fr/video-trump-le-peuple-a-t-il-toujours-raison-c-polemique/


Best of de Vidéos sur Trump

Friday 20 January 2017 at 00:40

Nous allons commencer par une vidéo du 19 juin 2015, qui montre comme les choses peuvent changer rapidement…

Nous sommes donc exactement 3 jours après la déclaration de candidature de Trump. Ann Coulter (célèbre polémiste républicaine américaine, connue pour son style controversé et ses idées conservatrices – elle a été souvent décrite comme « la Michael Moore du Parti Républicain ») est invitée au talk-show de Bill Maher sur le câble, “Real Time” – façon On n’est pas couché…

Admirez la réaction quand Coulter indique que Trump est pour elle le candidat qui a le plus de chances de gagner :

Splendide, non ?

L’humoriste anglais Tom Walker joue Jonathan Pie, qui explique pourquoi les Américains ont voté Trump (en anglais) :

Je Comprends Rien à l’élection de Donald Trump :

Une autre :

La campagne aux États-Unis :

Les jeunes à Sciences-Po – on sent bien l’esprit critique aiguisé et la profonde analyse géopolitique, la formation des futurs énarques et journalistes est en bonne voie … :

Enfin, je termine par le dernier clip de campagne de Trump, 8 millions de vues :

Rions un peu : la stratégie de Clinton était de… promouvoir Trump chez les Républicains, chapeau l’artiste !

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Source: http://www.les-crises.fr/videos-sur-trump/


Ceci est le journal fondé par Jean-Paul Sartre en 1973…

Friday 20 January 2017 at 00:01

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Il y a TOUT dans cette Une…

Mais bon, Sartre a démissionné du futur tabloïd dès 1974…

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Source: http://www.les-crises.fr/ceci-est-le-journal-fonde-par-jean-paul-sartre-en-1973/


[Vidéo] Fillon devant les patrons (mars 2016)

Thursday 19 January 2017 at 01:36

“Fantastique…”

«Grand oral» de François Fillon devant un panel de dirigeants d’entreprises, réunis par la Fondation Concorde, le 10 mars 2016.

Le souci de synchronisation ne relève pas d’un montage (Source complète). Transcription :

Moi ce que je veux, c’est que le 1 er juillet, les deux ou trois ministres chargés des réformes, l’économie et les finances, le travail, pour l’essentiel, arrivent avec des textes prêts, et, dans une forme de ” blitzkrieg ” fassent passer devant le parlement en utilisant d’ailleurs tous les moyens que donne la constitution de la cinquième république, les ordonnances, les votes bloqués, le 49.3, tout ce qui est nécessaire, qu’ils fassent passer en l’espace de 2 mois, sans interruption estivale, les six ou sept réformes fondamentales qui vont changer le climat de l’économie et le climat du travail dans notre pays.

C’est évidemment pour moi l’abrogation des 35 heures et la suppression de la durée légale du travail et le renvoi à la négociation dans les entreprises sans contraintes, c’est le nouveau code du travail, c’est la réforme de la fiscalité du capital, fondamentale  pour relancer l’activité économique dans notre pays, c’est la réforme de l’assurance chômage, c’est la réforme de l’apprentissage, et c’est les mesures, les premières mesures d’économies sur le budget de l’état et sur le fonctionnement de l’État.

Donc pour prolonger cette tension moi je pense qu’il faut organiser un référendum en septembre qui permet de maintenir l’état de tension électorale dans le pays et donc de rendre très très difficile la contestation sociale pendant cette période autour de deux ou trois idées fortes qui à mon sens ne font pas courir trop de risques au président de la république élu et à sa majorité, ce référendum pourrait tourner d’abord autour d’une question fondamentale :  “Est-ce que vous êtes d’accord pour qu’on inscrive dans la constitution le principe d’égalité des régimes sociaux  entre le public et le privé ?” , inscrit dans la constitution de la république française ça rendrait absolument obligatoire et nécessaire la convergence des régimes sociaux. Deuxième question ” Est-ce que vous êtes d’accord pour fusionner les départements et les régions ?”. Troisième question “Est-ce que vous êtes d’accord pour supprimer un certain nombre de parlementaires ?” , diminution du nombre de parlementaires ça peut paraître un peu démagogique, être un peu comme la cerise sur le gâteau ou la crème chantilly pour être certain que le référendum soit voté, mais je pense qu’en plus ça peut conduire à la modernisation du fonctionnement du parlement.

Voilà, si on fait tout ça, on crée un choc qui à mon sens rend très très difficile la réaction sociale que vous craignez.”

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Source : Dailymotion

Source: http://www.les-crises.fr/video-fillon-devant-les-patrons-mars-2016/


Donald Trump : un défi colossal pour l’Allemagne et l’Europe, par Romaric Godin

Thursday 19 January 2017 at 00:59

Source : La Tribune, Romaric Godin, 16/01/2017

Quelle réponse de l'Allemagne à Donald Trump ? (Crédits : FABRIZIO BENSCH)

Quelle réponse de l’Allemagne à Donald Trump ? (Crédits : FABRIZIO BENSCH)

Face à la nouvelle doctrine européenne du président élu des Etats-Unis, l’Allemagne va devoir faire un choix : ou renforcer l’Europe, ou s’adapter seule à ce nouvel ordre mondial. L’avenir du Vieux continent dépendra du choix de Berlin.

L’interview accordée par Donald Trump à Bild et au Times a fait l’effet d’un choc outre-Rhin. Après des années où Barack Obama a tant pris soin de sa relation particulière avec l’Allemagne, a visité maintes fois Berlin et n’a pas lésiné sur ses louanges à Angela Merkel lors de son dernier déplacement, le réveil est brutal. Pour la première fois depuis 70 ans, un président des Etats-Unis affiche une vraie défiance a priori face à l’Allemagne fédérale, perçue clairement comme un rival.

L’Allemagne sous le choc

La presse allemande est naturellement groggy. Que Donald Trump s’en prenne à la Chine ou au Mexique, passe encore.Qu’il menace Ford, General Motors ou Toyota, soit. Mais qu’il s’attaque à l’Allemagne, qu’il menace un joyau comme BMW… L’éditorial de la Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ) parle d’un « changement d’époque » et d’un « vent froid qui vient de l’ouest », reprenant une image souvent employée à l’époque de la guerre froide pour désigner… l’Union soviétique. « Donald Trump a clairement indiqué que nous devons économiquement et militairement sortir du confortable hôtel maternel des Etats-Unis », analyse le quotidien conservateur Die Welt. Le journal estime désormais que les Allemands vont devoir « se défendre » contre la politique agressive des Etats-Unis.

Cette prise de conscience ne semble pas encore complète outre-Rhin où l’on accuse clairement le coup. Le ministre des Affaires étrangères et sans doute prochain président fédéral Frank-Walter Steinmeier appelle à la prudence et à « voir quelle politique les Etats-Unis suivront » en matière de défense. Mais il reconnaît de « l’étonnement ». Concernant les menaces de droits de douane sur BMW, le ministre « part du principe que notre partenaire étasunien s’en tiendra encore aux obligations internationales de l’OMC ». Bref, le gouvernement de Berlin semble n’oser y croire. Son confrère de l’Economie, Sigmar Gabriel, candidat putatif de la SPD à la chancellerie, prend ces menaces de haut, et demande aux constructeurs des Etats-Unis de « faire de meilleures autos » pour se défendre. Mais là encore, il semble y avoir un manque certain de prise de conscience de la nouvelle situation. Ou du moins une sorte de détermination à espérer que tout s’arrangera avec le temps. Du reste, Angela Merkel elle-même a réclamé d’attendre avant de « voir quels types d’accords nous pourrons atteindre ». Alors que Donald Trump attaque tous azimuts, la chancelière ne cesse d’affirmer sa volonté de dialoguer avec la Maison Blanche.

Situation à risque pour l’Allemagne

Ces réactions ne doivent certes pas être prises au pied de la lettre. La stratégie d’Angela Merkel est souvent celle de l’attente. Mais la nouvelle doctrine européenne de Washington place désormais l’Allemagne dans une situation très inconfortable. Première puissance exportatrice du monde, la République fédérale est clairement en danger par le retour au protectionnisme. Confrontée à l’hostilité et au désintérêt stratégique d’un pays qu’elle a considéré pendant sept décennies comme son protecteur, elle est sommée de prendre en charge non seulement sa propre défense, mais aussi la direction de son hinterland économique. Car désormais, l’Union européenne n’est plus dans l’esprit de l’administration étasunienne un complément politique et économique de l’OTAN renforçant mutuellement une sorte de « grande alliance occidentale ». L’UE pour Donald Trump est un « instrument de puissance » de l’Allemagne qui est clairement ciblée par l’aide directe que le président élu entend donner au Royaume-Uni du Brexit.

Cette nouvelle situation contraint donc l’Allemagne à assumer une place de puissance qu’elle a toujours refusé d’assumer ouvertement et directement. Mais l’enjeu est considérable : son modèle économique est désormais en jeu, ainsi que sa sécurité. Dans une Europe fragmentée, l’Allemagne vieillissante, soumise à la double pression russo-étasunienne, privée de la solidarité des puissances militaires de l’Europe que sont le Royaume-Uni et la France, serait dans une situation fort peu enviable. Berlin va donc devoir tirer les conséquences de ce nouvel ordre mondial. Et ce ne sera pas simple.

Dans un tel contexte d’hostilité généralisée, l’Allemagne ne peut guère se passer d’un espace européen qui lui est favorable. Elle a besoin de conserver cet hinterland centre-européen qui fournit une sous-traitance peu coûteuse à son industrie, mais elle a aussi besoin d’une zone euro qui permet à l’Allemagne de neutraliser certains de ses concurrents, de bénéficier d’une monnaie sous-évaluée et de continuer ainsi à accumuler une épargne nécessaire à un pays vieillissant sans en payer le prix, c’est-à-dire une monnaie très forte. Politiquement et militairement, l’Allemagne doit aussi pouvoir compter sur un ensemble comme l’UE pour faire face à des Etats-Unis opportunistes et à une Russie qui est plus que jamais un concurrent de l’Allemagne en Europe de l’Est.

Changer de politique européenne pour répondre à Trump

Angela Merkel ne s’y est pas trompée et, en réponse à Donald Trump, elle a rappelé que « nous, Européens, avons notre destin en main ». Le message est clair : l’UE doit se défendre. Mais comment ? Pour prendre la tête du « monde libre » depuis l’UE comme l’y invite de plus en plus la presse anglo-saxonne, Angela Merkel devra changer de politique européenne. Car il est difficile de critiquer l’unilatéralisme nouveau qui s’installe à la Maison Blanche lorsque l’on pratique soi-même en Europe une certain forme d’unilatéralisme depuis 2010. L’Allemagne bloque depuis des années toute avancée vers la solidarité européenne. Son refus absolu et entêté du troisième pilier de l’union bancaire (la garantie commune des dépôts), de l’union budgétaire par la création d’Eurobonds, de tout vrai plan de relance et d’investissements en complément de la politique monétaire de l’UE, d’une vraie stratégie de défense, en sont autant de preuves. En revanche, l’Allemagne a réussi à imposer en zone euro une stratégie de convergence budgétaire forcée avec les directives Two Pack et Six Pack et le pacte budgétaire.

Le résultat est une Allemagne qui exige toujours plus de « réformes » de ses partenaires, en refusant de se réformer elle-même, notamment par la réduction de son excédent courant et par l’acceptation d’une inflation relativement plus forte que ses partenaires. Ces deux éléments permettraient de réduire les divergences et de rééquilibrer la zone euro. Mais la politique allemande reste focalisée sur son obsession budgétaire et sur celle des « réformes » qui ne sont que des moyens de renforcer la concurrence interne à l’UE et de rendre cette dernière toujours plus impopulaire, notamment parmi les victimes de la mondialisation qui pourraient être tentées par des expériences à la Trump. Si Berlin veut assurer la direction du « monde libre » face à un Trump et à un Poutine, elle doit donc rendre l’UE et la zone euro économiquement et socialement viable. Elle doit concéder plus de solidarité pour que son hégémonie soit acceptée comme bénéfique.

Accepter de payer le prix de l’Europe

Pour cela, l’Allemagne d’Angela Merkel doit cesser de penser son avenir dans le seul cadre allemand, elle doit se penser comme une puissance ayant des responsabilités et des devoirs envers l’Europe entière. Si elle poursuit sa politique actuelle, celle qui consiste à donner des leçons de « réformes » à l’Europe, à distribuer les bons et les mauvais points à ses partenaires, à faire des exemples cruels comme dans le cas de la Grèce, alors elle risque de se retrouver de plus en plus isolée et Donald Trump sera en permanence en embuscade pour l’affaiblir. L’Allemagne n’a cessé de se dire européenne, mais elle a trop tendance à ne prendre de l’Europe que les avantages. Elle doit accepter d’en payer le prix, désormais. L’arrivée de la nouvelle administration américaine en est l’occasion.

Pour répondre au protectionnisme et au dumping fiscal anglo-américain, l’UE doit abandonner sa naïveté commerciale, renforcer sa demande intérieure et investir massivement dans la qualité de sa production. Elle doit attirer les investisseurs par d’autres moyens que les coûts et s’en donner les moyens. Elle doit renforcer l’UE et la zone euro en en faisant à nouveau un moyen de développement commun et en n’hésitant pas à investir dans ce précieux hinterland.

Tentation unilatéraliste

Le pire danger serait que l’Allemagne réponde à la nouvelle politique de Washington par un nouveau cycle de baisses des coûts comme l’y invite Die Welt, le journal le plus proche de la CDU. Dans son éditorial, ce quotidien conservateur appelle l’Allemagne à « devenir plus conscient de sa puissance et à poursuivre ses propres intérêts ». Pour le quotidien conservateur, c’est l’occasion de se lancer dans une nouvelle phase de libéralisation : répondre à la baisse des impôts et au protectionnisme des Etats-Unis par la baisse des impôts et la dérégulation des marchés. Ce serait le pire scénario, celui qui déclencherait une nouvelle phase de course à la compétitivité coût au sein de l’UE. Il y a là une forme de naïveté allemande à croire que l’Europe acceptera de s’identifier toujours aux intérêts allemands et de suivre une politique fondée sur « ses propres intérêts ». Ce serait poursuivre la tentation unilatéraliste de l’Allemagne en Europe.

Rester dans le lien transatlantique

D’une certaine façon, tenir cette politique reviendrait à privilégier le lien transatlantique au lien européen. Ce serait malmener l’Europe pour lui faire accepter le nouvel ordre dicté par Donald Trump. Ce serait renoncer, donc, à une Europe capable de tenir le rang de grande puissance. In fine, ce serait l’essence même de la construction européenne qui serait abandonnée. L’Allemagne se rangerait à la vision de Wolfgang Schäuble d’une Europe d’un « petit cercle », formé de ceux capables de survivre à la compétition mondiale dictée par les Etats-Unis. Dans ce cas, Washington ne pourra plus accuser l’Allemagne d’utiliser les pays les moins compétitifs comme une façon de « manipuler » la monnaie. Et Berlin pourra espérer retrouver les grâces de Washington. Ce danger n’est pas mince. L’éditorial de l’autre grand journal conservateur allemand, la FAZ, de ce lundi explique ainsi qu’il est « ridicule » de penser que la chancelière pourrait être la « dirigeante d’un front anti-Trump » (« Gegenanführerin »). Et de conclure : « l’Europe a besoin d’un partenariat étroit avec les Etats-Unis ». Si les Européens ont leur destin en main, les Allemands vont devoir faire des choix. Reste à savoir si ces choix seront bons pour l’Europe. En cela, la réaction prudente de Berlin est assez inquiétante…

Source: http://www.les-crises.fr/donald-trump-un-defi-colossal-pour-lallemagne-et-leurope-par-romaric-godin/


Miscellanées du Jeudi (Delamarche, Sapir, Béchade, Eu?eka, DataGueule)

Thursday 19 January 2017 at 00:50

I. Olivier Delamarche

Un grand classique : La minute de Delamarche : “Il y a des grosses incohérences dans le discours de Trump” – 16/01

Olivier Delamarche VS Marc Touati (1/2): Peut-on parier sur le succès du Brexit ? – 16/01

Olivier Delamarche VS Marc Touati (2/2): Qu’attendre de l’investiture de Donald Trump ? – 16/01

II. Philippe Béchade

Philippe Béchade VS Serge Négrier (1/2): Les marchés financiers ont-ils cessé de progresser ? – 18/01

Philippe Béchade VS Serge Négrier (2/2): Confrontée à des risques politiques, comment la conjoncture européenne se porte-elle ? – 18/01

III. Jacques Sapir

Jacques Sapir VS Bruno Fine (1/2): Se dirige-t-on vers un “hard Brexit” ? – 17/01

Jacques Sapir VS Bruno Fine (2/2): Quid du décalage entre les attentes des marchés et la réalité face au programme de Donald Trump ? – 17/01

IV. Eu?eka

Le revenu de base – Heu?reka #18

V. DataGueule

Quand la surpêche, les poissons coulent #DATAGUEULE 27


 

 

 

Petite sélection de dessins drôles – et/ou de pure propagande…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Images sous Copyright des auteurs. N’hésitez pas à consulter régulièrement leurs sites, comme les excellents Patrick Chappatte, Ali Dilem, Tartrais, Martin Vidberg, Grémi.

 

Source: http://www.les-crises.fr/miscellanees-du-jeudi-delamarche-sapir-bechade-eueka-datagueule/


Démonétisation : l’Inde ouvre en fanfare le bal des QE fiscaux

Wednesday 18 January 2017 at 01:30

Source : GEAB, le 17 janvier 2016.

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Depuis le 8 novembre 2016, l’Inde réalise une révolution monétaire d’une ampleur jamais vue par la taille de la population concernée et la profondeur de la transformation induite. En démonétisant les plus grosses coupures de 500 et 1000 Rs (roupies), le gouvernement indien tente de réintégrer la gigantesque économie parallèle, ou noire, ou plus simplement archaïque, du pays dans l’économie officielle. Dans une nation où 90 % des transactions s’effectuent en liquide, une part gigantesque de l’activité échappe à la connaissance du gouvernement central, et donc aux statistiques, à l’impôt et au financement des infrastructures.

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Figure 1 – Proportion des transactions en liquide par pays (bleu : en volume ; rouge : en valeur). Source : Bloomberg.

Les signes avant-coureurs

Il n’y a rien de nouveau dans le fait que le gouvernement central tente d’obliger sa population à déclarer ses richesses. Par exemple, entre 1951 et 1997, pas moins de dix projets d’amnistie avaient été lancés, incitant les citoyens à déclarer leurs revenus non-officiels en échange d’un simple paiement de l’impôt majoré1 .

Lorsque Narendra Modi est arrivé au pouvoir le 26 mai 2014, son programme parlait de modernisation du pays selon les principes néolibéraux de privatisation et de dérégulation. Mais le ton a changé depuis de par le monde. En Inde comme partout, il est désormais bien plus question d’investissements dans les infrastructures, de keynésianisme et de fiscalité que d’assouplissement monétaire et d’endettement. C’est ainsi qu’en novembre 2015, Modi a commencé à mettre en perspective une nouvelle forme de modernisation, fondée celle-ci sur une très ambitieuse réforme fiscale (JAM2 ).

Le premier juin dernier, il a lancé son propre projet d’amnistie, ou plutôt son projet de déclaration de revenus, pour trois mois, demandant aux Indiens de profiter de cette période pour déclarer, sans encourir de peine, leurs liquidités non officielles moyennant une taxe de 45 % au lieu des 30 % habituels3 .

Le détail de l’opération de démonétisation

En revanche, l’opération de démonétisation des billets de 500 et 1000 Rs le 8 novembre (soit en pleine élection US) sur une période de 50 jours (jusqu’au 30 décembre) n’était pas annoncée, elle, et constitue un énorme choc, sachant que ces coupures représentent 86 % du liquide circulant en Inde, soit Rs 14 lakh crore (ou 14 000 milliards de roupies4 ).

Du 8 au 24 novembre, il était prévu que toute personne échangeant ou déposant des montants de plus de 250 000 roupies (Rs 2.5 lakh) sans pouvoir les justifier paierait le double de l’impôt normal (30 %) sur ces sommes ainsi qu’une amende de 200 %. Durant cette première période de la mesure, des masses de billets ont ainsi été purement et simplement brûlées. Mais dès le 29 novembre, la chambre des représentants (Lok Sabha) jugeait cette règle non fondée légalement et votait un décret d’amnistie permettant aux personnes de déclarer les sommes au-dessus de 250 000 roupies moyennant le paiement d’un impôt de 50 %. Les 50 % restants sont ainsi réintégrés dans l’économie blanche. Mais ce n’est pas tout, la moitié de cette somme blanchie (soit 25 % du total) est bloquée dans un compte bancaire sous forme de bons pendant quatre ans… au bout desquels l’argent sera récupérable avec un intérêt (contrairement au bas de laine)5 .

Il s’est ensuivi un vaste chaos. L’annonce-choc a provoqué une ruée vers les banques pour échanger ces billets ou les déposer. En une semaine, les Indiens avaient déposé 2000 milliards de roupies dans les banques6 . Mais la moitié de la population indienne, malgré de nombreuses campagnes d’incitation, ne détient pas de compte en banque7 . Ces 600 millions environ de personnes sont donc en premier lieu forcées de faire la queue aux guichets des établissements bancaires pour échanger leurs coupures, provoquant des ruptures de liquidités, engendrant fermetures d’agences et interruptions de distributeurs d’argent8 .

C’est ainsi que l’annonce a été suivie d’une période de panique qui semble commencer à se résorber, où les gens n’avaient plus de liquide pour faire leurs courses, obligeant les magasins à fermer eux aussi et empêchant les agriculteurs de vendre leurs produits9 . La consommation s’est littéralement effondrée et les plus pauvres (en zone rurale surtout) se sont retrouvés les plus touchés10 . Les financiers du monde anticipent des points de croissance et du PIB en moins. Actuellement en expansion à plus de 7 %, Goldman Sachs annonce 6,8 % au prochain trimestre, Deutsche Bank, 6,5 %, et Ambit affole tout le monde en évoquant 3,5 %11 .

L’opposition au nationaliste Modi se déchaîne. Rahul Gandhi menace de faire des révélations devant le Parlement concernant une affaire de corruption touchant le premier ministre12 . L’ancien premier ministre et architecte de la réforme économique, Manmohan Singh, parle d’« erreur monumentale de gestion », de « cas de pillage organisé et de mise à sac légalisée » et de risque de perte de 2 points de croissance13 .

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Figure 2 – Distributeurs automatiques de billets en Inde. Selon le jour de 2016, bleu clair = queue de plus de 15 minutes ; gris = pas de billets. Source : ZeroHedge.

Les États se plaignent de manque à gagner dans leurs budgets résultant de l’arrêt temporaire de l’économie et en profitent pour bloquer le grand plan de réforme fiscale qui doit faire entrer l’Inde dans le XXIe siècle, la Goods and Services Tax (GST14 ).

Le supertanker indien tangue fort, mais chacun est conscient qu’une telle mesure ne peut pas être appliquée à une nation de 1,2 milliard d’individus sans provoquer des remous.

Et si ça marchait ?

Il existe des précédents en matière d’actions de démonétisation de ce genre, dont beaucoup furent des échecs. Notamment : Nigeria (1984, raté) ; Ghana (1982, raté : les gens se tournent vers les devises étrangères et les avoirs physiques) ; Myanmar (1987, raté : a conduit à des révoltes et des répressions) ; Zaïre (1990, raté : a provoqué de l’inflation et un effondrement de la valeur de la monnaie locale face au dollar) ; Corée du Nord (2010, raté : s’est combiné à une mauvaise récolte aboutissant à des pénuries alimentaires) ; Union Soviétique (1991, raté : provoque une perte de confiance et l’éviction de Gorbatchev)15 .

Quels sont les éléments qui amènent donc notre équipe à anticiper un succès de cette opération indienne ? …

  1. Source : Economic Times of India, 10/03/2016.
  2. Jan Dhan : bank accounts ; Aadhar : Personal identification ; Mobile : mobile phones. Source : Zeenews, 06/11/2015.
  3. Source : The Indian Express, 21/07/2016.
  4. C’est l’occasion pour nous tous de nous familiariser avec les dénominations monétaires indiennes. Les Indiens n’aiment pas le zéro, bien que l’ayant inventé, et parlent donc en roupies (Rs, unité de base), en Rs Lakh (soit 100 000 roupies) et en Rs Crore (soit 10 000 000 de roupies). Au cours actuel, les billets de 500 roupies correspondent à peu près à 7 € et ceux de 1000 roupies à 14 €.
  5. Pour bien comprendre les deux temps, lire cet article. Source : BeMoneyAware, 28/11/2016.
  6. Source : India Times, 13/11/2016.
  7. Source : The Indian Express, 10/11/2016.
  8. Source : The Wire, 11/11/2016.
  9. Par exemple dans le Kerala. Source : OnManorama, 13/11/2016.
  10. Source : The Wire, 13/11/2016.
  11. Source : Quartz India, 06/12/2016.
  12. Source : NDTV, 15/12/2016.
  13. Source : The Indian Express, 24/11/2016.
  14. Source : Business Standard, 08/12/2016.
  15. Source : The Economic Times of India, 16/11/2016.

Source: http://www.les-crises.fr/demonetisation-linde-ouvre-en-fanfare-le-bal-des-qe-fiscaux/


La Syrie et les statistiques de la guerre, par Nassim Nicholas Taleb

Wednesday 18 January 2017 at 00:45

Source : Opacity, le 22/11/2016

Ne croyez rien de ce que vous entendez, une partie de ce que vous lisez, la moitié de ce que vous voyez

Quand Pasquale Cirillo et moi-même avons examiné les comptes-rendus historiques de guerres pour notre analyse statistique sur la violence, nous avons découvert d’importantes lacunes – les gens prennent les chiffres pour des vérités, bien que de nombreux rapports aient été fabriqués. De nombreux historiens, “scientifiques” politiques et autres tombent dans le piège puis en arrivent à écrire des livres. Par exemple, nous avons découvert que l’amuseur scientifique Steven Pinker basait son analyse sur la sévérité de la rébellion An Lushan sur une mauvaise surestimation – le nombre réel de pertes pourrait être abaissé d’un ordre de grandeur. La majeure partie de la thèse de Pinker sur la chute dans la violence dépend d’un passé encore plus violent ; cela a été plus tard discrédité (la thèse est bancale n’importe comment, comme les affirmations générales de Pinker entrent en conflit avec les données statistiques qu’il produit). Peter Frankopan, dans son magistral “The Silk Roads” (Les Routes de la Soie) semble cerner la question : les estimations de victimes des invasions mongoles ont été gonflées, car leurs comptes exagéraient la dévastation pour intimider les adversaires (le propos de la guerre n’est pas tant de tuer, que de soumettre). Notre principale explication technique est ici.

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Mais ce ne sont pas juste les idioties de Steven Pinker : les chiffres de nombreuses guerres semblent sortir de nulle part. Des journalistes citent quelqu’un à une conférence ; ça suit son chemin au Monde ou au New York Times et ce chiffre devient LA référence pour les prochaines générations. Dans notre tentative de bâtir une méthode rigoureuse d’historiographie quantitative, nous avons conçu des techniques de robustesse statistique : elles consistent à “bootstrapper” [https://fr.wikipedia.org/wiki/Bootstrap_(statistiques), NdT] des histoires du passé considérant le passé comme une réalisation entre l’estimation la plus basse et la plus haute possible, produisant des dizaines de milliers de “chemins historiques” et d’évaluer la “robustesse” comme un élément pour modifier le tout. Plus déprimant, nous n’avons trouvé aucun historien qui se soit préoccupé de faire un semblable travail de nettoyage ou de vérification de robustesse – cependant, voilà, l’outil statistique est là pour servir.

Cela m’a frappé que je doive examiner le nombre de réfugiés Syriens estimés au Liban – ici encore les chiffres volent dans tous les sens sans beaucoup de rigueur, se gonflant de rapport en rapport. Mais on peut évaluer le biais : ils sont potentiellement surestimés (comme Amin Maalouf l’a commenté, le mécanisme du téléphone arabe rend les gens plus enclins à augmenter le nombre pour obtenir plus d’attention). D’ailleurs, dans une commune du Liban, on m’a dit que le nombre de réfugiés réel, bien qu’important, était considérablement inférieur à celui utilisé par les bureaucrates des Nations Unies. Mon sentiment est que le vrai nombre est environ le tiers de ce qui a été publié. Alors que cela est très optimiste pour le Liban (il devrait y avoir moins de réfugiés qu’ils le prétendent, donc nous ne devons pas nous inquiéter autant pour la stabilité de la région), ce n’est pas bon pour l’économie et les financements des agences de l’ONU, et le style de vie de leurs bureaucrates.

A présent, l’estimation raisonnable des victimes de la guerre syrienne. On a parlé d’un demi-million de morts en Syrie. On a aussi entendu parler du grand nombre de “tués” par Poutine, Assad, et La Grande Catherine (qui est arrivée pour harceler les Ottomans du Levant après son invasion de la Crimée). C’est facile de vérifier que la plupart des informations que l’on a sur le “boucher” de Damas sont suspectes : des agences de communication de Washington et de Londres financées par des Saoudiens-Qataris ont montré des signes évidents d’hyperactivité. Tout comme le nombre des hôpitaux d’Alep-Est là où est basé al-Qaïda (et d’où ils bombardent les civils dans les autres parties de la ville), pareil pour le nombre d’hôpitaux par habitant ici qui me semble être plusieurs fois la moyenne par rapport au reste du monde (tous les jours on apprend que les Russes ont détruit un autre hôpital, encore que le porte-parole du Département d’État John Kirby n’a pu donner un seul nom ou adresse des cinq hôpitaux dont il parlait juste avant). Je vois les propagandistes et les apologistes d’al-Qaïda comme Charles Lister (à l’Institut du Moyen-Orient fondé par les salafistes) jeter des chiffres qui seront repris – oui, des idiots citeront des chiffres venant du propagandiste d’al-Qaïda Charles Lister, et qui finalement pourront être cités ensuite par un journal honorable, et donc rester gravés pour la postérité. J’ai une fois vu un journaliste américain sérieux (“expert de la Syrie”) poster sur un réseau social des scènes macabres comme témoignage des meurtres d’Assad : la photo des “enfants victimes d’Assad en train de mourir” a été vraisemblablement prise en Lybie quatre ans auparavant ; il apparut que cette photo a été “mise en avant” par une agence de communication financée par les Qataris. Sa réaction a été inexcusable : “Ne pensez-vous pas que Assad soit capable de tels crimes ?”

Ne croyez rien de ce que vous entendez, une partie de ce que vous lisez, la moitié de ce que vous voyez, c’est un vieil adage de commerçant. En tant que commerçant et statisticien/mathématicien, j’ai appris à prendre les données au sérieux, à ne croire les chiffres de personne, et à éviter les gens assez naïfs pour engager une politique basée sur des images de destruction épouvantables, mais discutables : la fausse image d’un enfant mourant est quelque chose que personne ne peut remettre en cause sans passer pour un salaud. En tant que citoyen, je demande que le terme de “meurtrier” soit déterminé par une cour de justice, pas par des organisations financées par les Saoudiens – une fois que quelqu’un est appelé meurtrier ou boucher, les jeux sont faits. Je ne peux pas croire que les gouvernements et les bureaucrates puissent être si stupides. Mais ils le sont.

Note: Personne ne peut prétendre que je sois un apologiste d’Assad. Assad a explosé notre maison a Amioun en 1982 quand mon grand-père, en tant que membre du parlement, a voté pour Bashir. Mais je surmonte ma rancœur personnelle pour jeter un regard scientifique et humaniste : le Jihad Islamiste Sunnite est beaucoup trop dangereux pour laisser ma rancune se mettre en travers du chemin.

PS: Il apparait que le bilan réaliste du soulèvement du Hama par les Frères Musulman en 1979-1982, habituellement accusé d’avoir causé entre 30 000 et 40 000 victimes, pourrait en avoir causé environ 2000. Plus grave, le gonflement mystérieux de l’estimation s’est installé au cours du temps sans nouvelle information. (Données des rapports déclassifiés produites par Sharmine Narwani.)

PPS: Bill Clinton, alors président, avait fait une déclaration en 1999, au sujet des victimes en Bosnie, Serbie et Croatie comme étant autour de 250 000 morts : au moins deux à trois fois le nombre total de l’estimation supérieure en cours. Mais l’inflation de Clinton devint dingue quand il fut question du Kosovo : sur les 100 000 Kosovars disparus, seulement 3000 à 5000 ont vraiment été des victimes. Pourtant il a bombardé l’endroit et diabolisé les Serbes sur la base de cette information. Il est à noter que les agences de communication financées par les Saoudiens furent  également actives sur le Kossovo.

Source : Opacity, le 22/11/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Source: http://www.les-crises.fr/la-syrie-et-les-statistiques-de-la-guerre-par-nassim-nicholas-taleb/