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[Vidéo] En direct de Mediapart : Usages et manipulations politiques de l’Histoire

Sunday 8 January 2017 at 01:10

Un sujet important…

Et au passage, un salut aux professeurs d’Histoire qui nous lisent. N’hésitez pas à régir en commentaire sur ce sujet, ou sur votre expérience quotidienne…

Source : Mediapart, Youtube, 21-12-2016

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Avec Myriam Cottias, historienne, Jean-Paul Demoule, archéologue, Laurence De Cock, professeure en lycée et Mathilde Larrère, historienne. Débat animé par Edwy Plenel.

Source : Mediapart, Youtube, 21-12-2016

Source: http://www.les-crises.fr/video-en-direct-de-mediapart-usages-et-manipulations-politiques-de-lhistoire/


[Vidéo] A visage découvert Bashar El Assad

Saturday 7 January 2017 at 04:09

Intéressant de revoir ce documentaire de 2009 du coup…

Source : Youtube, 10-01-2016

Documentaire sur Bachar El Assad “A visage découvert”, réalisé par Ludovic Frossard, diffusé pour la première fois le 22 juin 2009 sur France 5.

Source : Youtube, 10-01-2016

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Source: http://www.les-crises.fr/video-a-visage-decouvert-bashar-el-assad/


La Déclaration de Namur du 05-12-2016

Saturday 7 January 2017 at 03:03

Pétition signée…

Source : Déclaration de Namur, 05-12-2016

La Déclaration de Namur


Les vifs débats suscités en Europe par la signature du CETA/AECG (Comprehensive Economic and Trade Agreement / Accord économique et commercial global) ont révélé que la manière dont l’Union européenne négocie les traités commerciaux internationaux, et le contenu de ceux-ci, sont contestés par des pans toujours plus larges des opinions publiques. 

Les propositions formulées dans cette Déclaration visent à répondre à ces légitimes inquiétudes. Inspirées par les valeurs de solidarité, de démocratie et de progrès  qui fondent l’Union européenne, ces propositions doivent, selon ses signataires, devenir la référence de toute négociation d’un traité économique et commercial auquel l’Union européenne et ses Etats membres sont parties prenantes. Ces avancées sont amenées à faire l’objet de développements ultérieurs, à la lumière des débats qu’elles pourront susciter.

Ceci implique que l’Union européenne n’est  pas en mesure aujourd’hui de négocier un accord équilibré avec les Etats-Unis compte tenu de l’asymétrie des partenaires, notamment pour ce qui est du degré d’achèvement  de leurs marchés intérieurs respectifs, et des problèmes d’extraterritorialité de la législation américaine non résolus. 

Ceci implique aussi que l’UE devra rechercher de bonne foi, avec ses partenaires déjà engagés dans une négociation, des modalités permettant d’assurer la bonne fin des accords déjà bien avancés, a fortiori déjà signés, dans l’esprit de la présente Déclaration.

1. Respect des procédures démocratiques


Afin de  garantir que les méthodes européennes de négociation des traités commerciaux respectent les demandes légitimes de transparence exprimées par la société civile, et les procédures démocratiques de contrôle parlementaire, il convient de 

  • mener des analyses contradictoires et publiques des effets potentiels d’un nouveau traité avant d’établir un mandat de négociation, afin d’assurer qu’il contribuera au développement soutenable, à la réduction de la pauvreté et des inégalités, et à la lutte contre le réchauffement climatique ;
  • soumettre les mandats de négociation à un débat parlementaire préalable, dans les assemblées nationales et européenne (et les assemblées régionales dotées de pouvoirs équivalents) pour ce qui concerne les traités mixtes, en y associant le plus largement possible les représentants de la société civile ;
  • rendre publics les résultats intermédiaires des négociations en temps utile et de manière accessible, afin  que la société civile puisse en prendre pleinement connaissance et qu’un débat parlementaire puisse être mené avant la clôture des négociations ;
  • ne pas privilégier la méthode de « l’application provisoire », afin de conserver aux parlements leur plein et entier pouvoir de contrôle dans le cadre de la procédure d’assentiment des traités mixtes ; 

2. Respect des législations socio-économiques, sanitaires et environnementales


Afin de garantir que les traités commerciaux dits « de nouvelle génération » ne puissent en aucune manière affaiblir les législations qui protègent le modèle socioéconomique, sanitaire et environnemental de l’Union européenne et de ses Etats membres, et qu’ils contribuent au développement soutenable, à la réduction de la pauvreté et des inégalités, et à la lutte contre le réchauffement climatique, il convient de

  • faire de la ratification des principaux instruments de défense des droits de l’homme, des conventions essentielles de l’OIT, des recommandations issues du projet BEPS (érosion de la base d’imposition et transfert de bénéfices) et des Accords de Paris sur le climat, des obligations pour les parties ;
  • inclure dans de tels traités des exigences chiffrées en matière fiscale et climatique, comme par exemple des taux minimaux d’imposition des profits des sociétés et des cibles vérifiables de réduction des gaz à effets de serre;
  • exclure intégralement les services publics et les services d’intérêt général, tels que définis dans les législations respectives des Parties, du champ d’application de tels traités ;
  • exclure la méthode des « listes négatives » pour établir le champ des activités ouvert à la concurrence, et prévoir systématiquement des clauses permettant aux Parties de reprendre la propriété publique d’un secteur sans autre condition que celles imposées par la législation nationale ;
  • prévoir des clauses de standstill qui empêchent les Parties de réduire leurs normes sociales, sanitaires et environnementales pour favoriser les exportations ou attirer les investissements,  assortir ces clauses de mécanismes de sanction, et assurer que la mise en conformité des Parties avec leurs obligations en vertu de ces clauses ne pourra en aucun cas fonder une demande d’indemnisation dans le chef des investisseurs ou autres opérateurs économiques privés ;
  • inclure des mécanismes de coopération loyale et effective, notamment pour ce qui est des échanges d’informations, en ce qui concerne la fiscalité des multinationales et des sociétés offshore ;
  • mettre en place des mécanismes d’évaluation indépendante et régulière des effets socio-économiques et environnementaux de tels traités, et permettre leur suspension par les Parties (dans l’éventuelle phase d’application provisoire) et leur révision périodique afin d’assurer qu’ils contribuent au développement soutenable, à la réduction de la pauvreté et des inégalités, et à la lutte contre le réchauffement climatique ;

3. Garantie de l’intérêt public dans le cadre de la résolution des différends


Afin d’assurer que la résolution des différends entre les entreprises et les Etats ou autres Parties aux traités offre les plus hautes garanties juridictionnelles de protection de l’intérêt public, il convient de

  • privilégier le recours aux juridictions nationales et européennes compétentes, et n’instaurer un mécanisme international de règlement des différends que dans la mesure où celui-ci présente des avantages certains (sur le plan de l’application uniforme des traités, de la célérité et de la compétence des juges) et comporte un mécanisme d’appel garantissant la cohérence des décisions rendues au premier degré ; 
  • appliquer les plus hauts standards aux mécanismes internationaux de règlement des différends, en ce qui concerne notamment les conditions de nomination et de rémunération des juges, ainsi que leurs garanties d’indépendance et d’impartialité, pendant et après l’exercice de leur mandat ;
  • garantir que les juges soient pleinement qualifiés pour interpréter et appliquer les accords commerciaux en conformité avec les autres règles du droit international, notamment en matière de droits de l’homme, du travail et de l’environnement ;
  • assurer l’égalité d’accès aux mécanismes internationaux de règlement des différends, notamment par l’adoption de mesures en faveur des PME et des particuliers visant à alléger les implications financières du recours à ces mécanismes ;

Ces principes doivent permettre à l’Union européenne de démontrer que les échanges commerciaux ne servent pas les intérêts privés au détriment de l’intérêt public, mais contribuent au rapprochement entre les peuples, à la lutte contre le réchauffement climatique et au développement durable, en particulier des régions les plus défavorisées.

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Source : Déclaration de Namur, 05-12-2016

Source: http://www.les-crises.fr/la-declaration-de-namur-du-05-12-2016/


J’ai aimé Castro ! Je fais mes valises pour la CPI. Par Jacques-Marie Bourget

Saturday 7 January 2017 at 02:10

Pour avoir une vision décalée – à prendre avec recul…

Source : Jacques-Marie Bourget, 13-12-2016

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Jacques-Marie BOURGET

L’exemplaire Ignacio Romanet a déjà tout dit. Mais ce tout n’est pas assez. Convoquons les témoins pour lire nos mémoires d’outre tombe. Car sommes morts, socialement morts. Des morts vivants, des “rouges bruns” qui ont eu l’audace de briser l’esprit de la “nouvelle démocratie” -forgée à Washington- en lui mettant sous le nez le rêve et la réalité de Fidel. Quand le chemin de la liberté était le sentier de la vie.

CHRONIQUE D’UN MONSTRE.

Tant pis, à mon âge avec une vie mal faite derrière moi, je peux vous le confier au risque de me retrouver devant la Cour Pénale Internationale : j’ai admiré Castro. Admiré sans réserve. Pas comme mon ami Régis Debray qui n’a pas été nul dans l’éloge, et même émouvant. Mais qui a émis les réserves habituelles, comme les suspects arrêtés par le commandant Renault dans le film Casablanca. Des mots parachute qui vous évitent le pilori. Le problème de Régis, pourtant grand croyant et souvent grand crédule, est d’être parfois un « in-fidèle », de ne pas aller jusqu’au bout alors qu’il le devrait, de lâcher la cause en route. Comme on abandonne dans le col parce que le boyau est crevé et que soudain, coup de mou et faute de Rustines, on se demande si la vie vaut la peine d’être vécue l’humanité étant dégueulasse. L’esprit de révolution est comme la pierre ponce, il s’use. Et il use. Régis est passé à une autre pierre, un autre Pierre où Jésus a bâti son Eglise. Dommage, mais admirons le salut final du dernier des Mohicans : il a toujours le goût à la liberté et refuse la vie au caviar proposée par les petits maîtres de la sociale démocratie française. La mort du Lider maximo nous a permis de savoir qu’il y a toujours du fidèle en lui. Et je ne peux oublier une soirée heureuse, avec un retour à la case départ, celle qui précède « Révolution dans la Révolution ». Autour d’une table parisienne, dans un titre à la Alexandre Dumas nous étions réunis « Cinquante ans après ». Régis s’est retrouvé là ému, en militant prodigue rentré à la base pour honorer celui qui fût un temps son maître, Jacques Vergés. C’est l’avocat ami de Mao et rédacteur en chef, qui l’avait, pour la revue Révolutions, expédié en première patrouille sur les terres explosives de l’Amérique du Sud.

Si, parlant de Castro je vous parle de Debray c’est par commodité. Car évoquer aujourd’hui en France le suprême barbu est une entreprise impossible pour qui n’a pas d’outil, de toise, de cadran. Equipé on plonge alors dans le bazar du temps pour retrouver un étalon, un échantillon témoin. Avons-nous rêvé que nous, et des millions d’autres, aimions Castro ? Sommes-nous seuls « rouges-bruns » survivants de cette admiration devenue honteuse ? Pour nous pincer, nous réveiller, j’ai donc convoqué Régis, le vrai expert devenu plus crédible en homme du réel qui porte des costumes balzaciens. Il est notre témoin de moralité. A la barre de l’histoire il comparait pour dire aux incroyants qu’il est vrai que nous avons été fous, que nous n’étions pas seuls et avions raison de l’être.

Si dans un pays de liberté agonisante, la France où Chomsky est interdit de parole, je sonne le rassemblement de ceux qui ont accompagné Fidel, c’est par peur de ne pas être cru. Oui nous avons supporté avec lui, et portons encore l’utopie d’un monde plus juste. Une idée qui se sent maintenant seule comme une petite vieille la nuit sur un banc du Métro. Sur les écrans des télévisions on voit ces maîtres d’hôtel chargés de servir la vérité bien chaude, nous affirmer qu’avoir une émotion à l’annonce de la mort de l’ami du Che est grandement coupable. La preuve, dès qu’un politicien se montre –et nous n’en manquons pas, ce sont des gibiers de saison – il est assommé d’une question unique : « que pensez-vous des propos de Ségolène Royal sur Fidel Castro ? ». Disparu le vrai débat, l’œuvre et l’homme Fidel n’ont pas d’importance. Ne pas introduire l’idée contagieuse qu’hors le vin le rouge puisse être bon. Ce qui compte, c’est de demander à Bayrou, le Commandante du Béarn, ce qu’il pense des justes paroles sorties naturellement de la bouche innocente d’une ministre linotte : « Cuba n’est pas une dictature ».

Cette impossibilité de dire un mot positif, fut-il orphelin, sur l’œuvre de Castro – sauf à être un nouveau Faurisson – est un indicateur. Un indice scientifique comme celui qui mesure les marées. Puisqu’il est impossible de dire « Castro » sans recevoir de tomates, cela signifie que nos libertés sont mortes. Avec elles notre imaginaire et le devoir du contradictoire, du doute.

Je m’explique. Le droit de vomir Castro étant acquis et gravé dans les livres par la bande des Courtois, le gang des « Nouveaux » philosophes et autres techniciens de surface comme Enthoven, est-il possible d’introduire une nuance de Mandela dans le vert olive ? Non. L’affaire est pliée. Dire que Castro a mis un continent debout, et même un et demi en comptant l’Afrique, qu’il a rendu les frères de son île à l’état d’hommes, c’est postuler à l’opprobre. Celle d’une Cour de magistrats mondialisés qui tient open bar à La Haye. Voilà l’état de notre liberté. Et son emprisonnement dans la cellule de la pensée néo conservatrice, droit-de-l’hommiste, pourrait ne pas être grave… Il faudrait, pour un nano gramme d’optimisme, sentir pousser des lutteurs capables de cisailler ses barreaux. Bien non. Il n’y a pas grand monde. Il n’y a plus de lutteurs, ils ont rendu leurs paquetages à la globalisation. Restent des naufragés de Facebook communiquant entre eux comme des tôlards, en faisant du tam-tam dans les tuyaux, qui osent dirent les gros mots : « Fidel… je resterai fidèle ». Car, pour la pensée Pujadas, celle qui compte comme devant un guichet banque dans ce temps qui tourne le dos à l’espérance pour embrasser Wall Street, Castro avec « ses camps » est devenu un peu Hitler. Et Kissinger un Prix Nobel combattant pour la démocratie. Ainsi va la nouvelle histoire écrite par la sociale démocratie de France made in Washington. Celle qui envoie des gendarmes, à propos du contenu de son cours sur la Russie délivré en collège, poser des questions à un professeur breton.

Je pense qu’il serait souhaitable que les fabricants de jeux pour enfants nous facilitent la tâche. Qu’ils inventent une tablette sur laquelle, dès que les petits doigts pianotent l’icône Castro, ils reçoivent une petite décharge électrique. Le logiciel devra laisser de l’espace « libre » afin que cette gégène, l’enfer de l’histoire, puisse regrouper tous les monstres en une correcte haine. Ainsi notre monde deviendra juste et nos enfants heureux.

Ne dites plus « no pasaran », puisque les éradicateurs sont passés en piétinant nos raisons de vivre. Fidel tu as eu raison de mourir, ce monde n’est plus pour nous.

Jacques-Marie BOURGET

Texte à paraitre dans le magazine mensuel Afrique Asie de janvier 2017.

Source : Jacques-Marie Bourget, 13-12-2016

Source: http://www.les-crises.fr/jai-aime-castro-je-fais-mes-valises-pour-la-cpi-par-jacques-marie-bourget/


Russie : et encore une “fake news” du journal Le Monde…

Friday 6 January 2017 at 04:05

Encore du boulot sérieux du journal Le Monde

Le 31 décembre, grande nouvelle : les “hackers russes” (apparemment les plus bêtes du monde, puisqu’ils se font “identifier” facilement) ont piraté le réseau électrique américain – super crédible…

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“Information” venue de l’AFP :

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qui l’a prise sur le Washington Post, grand pourfendeur aussi des “fake news” :

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La veille, CNN avait affirmé que Vladimir Poutine avait demandé la fermeture de l’école américaine de Moscou

Bon, après, le Washington Post s’est rétracté :

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suscitant une palanquée de retours arrières :

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Ah non, le Huffinfton Post n’a pas corrigé – Groupe Le Monde oblige… ? Une fake news pour l’éternité… ?

Oui, vous avez bien lu, ce gros délire juste parce qu’un fournisseur d’électricité a trouvé un virus (soit disant russe, et qui n’avait encore rien fait) dans un PC portable non relié au réseau….

Ce qui suscité la colère de beaucoup de professionnels :

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ce à quoi l’AFP a répondu :

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L’AFP a failli présenter ses excuses – oups, et puis non…

On appréciera donc le souci de la vérification des informations, surtout sur un sujet aussi sensible (pitié, arrêtez de faire des articles obsessionnels sans preuves avec le mot Russie dedans pendant 15 jours, svp, qu’on souffle…).

Bref, encore une illustration du naufrage du journalisme en général et du Monde en particulier (incapable de temporiser pour contrôler une information et exiger des preuves), pleurant depuis deux mois sur le fait que des fake news se répandent, et qui est pris la main dans le pot de confiture comme un vulgaire site “pute à clics” prêt à tout pour insérer les mots “russe”, Poutine, Trump ou hackers…

P.S. : la réaction du gouverneur du Vermont :

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Source: http://www.les-crises.fr/russie-et-encore-une-fake-news-du-journal-le-monde/


Syrie, une victime de plus : la crédibilité médiatique, par Jean-François Kahn

Friday 6 January 2017 at 03:00

Source : Marianne, Jean-François Kahn03/01/2017

Concernant la Syrie, une vision, purement idéologique, s’est substituée à la prise en compte objective d’une situation qui échappait totalement au confort intellectuel d’un tel schématisme binaire.

Illustration. Ici, un homme agite un drapeau syrien alors que des membres de l'opposition sont évacués d'Alep dans un convoi - CHINE NOUVELLE/SIPA

Illustration. Ici, un homme agite un drapeau syrien alors que des membres de l’opposition sont évacués d’Alep dans un convoi – CHINE NOUVELLE/SIPA

Aussi respectable et même juste soit-elle, une cause justifie-t-elle que, pour la défendre, on abolisse le réel à partir du moment où il devient dérangeant, jusqu’à se construire un monde complètement imaginaire ?

Cette remarque vaut même pour les cas limites. Ainsi, il ne fait pas de doute que tout démocrate se devait, pendant la guerre d’Espagne, de se ranger aux côtés des Républicains contre le camp fascisto-franquiste. Pour autant, fallait-il s’interdire, surtout si on était journaliste, de rapporter les terribles exactions anticléricales commises par les anarchistes ou la façon dont les communistes – héroïques par ailleurs – liquidèrent, sur l’ordre de Moscou, des militants antistaliniens ?

Le cas syrien est certes moins limite. Il n’en était pas moins louable, a priori, de se déclarer solidaire d’une rébellion qui entendait lutter contre une implacable dictature. Est-ce à dire qu’il convenait de plier totalement, comme on l’a fait, le réel à une vision manichéenne que rien de dérangeant ne devait brouiller ? L’approche journalistique devait-elle à ce point se transformer en approche ultra militante ?

Car il va bien falloir, à la fin, l’admettre : la façon dont certains grands médias ont rendu compte de cette épouvantable tragédie correspondait de moins en moins à la vérité complexe de ce drame. Pour des raisons sans doute respectables, on s’est de plus en plus raconté des histoires, auto-intoxiqué. Une vision, purement idéologique, s’est substituée à la prise en compte objective d’une situation qui échappait totalement au confort intellectuel d’un tel schématisme binaire.

Récemment Le Monde rapportait, incidemment, qu’en 2013, les rebelles d’Alep-est avait bombardé l’université située à l’ouest, faisant plus de 80 morts parmi les étudiantes et les étudiants. Or, à cette époque, presque naturellement, parce que confrontée au parti du diable, la rébellion ne pouvait être qu’exemplaire. C’est donc à l’armée du régime que fut imputé ce forfait.

Récemment, lors de la destructrice reconquête d’Alep-est, l’ONU fit état, avec des réserves, de deux informations : l’une selon laquelle les forces pro-Assad avait exécuté, au cours de leur progression, 80 civils ; l’autre selon laquelle les rebelles avaient, eux, pour éviter un retournement de la population en leur défaveur, exécuté également 80 civils.

Dans les deux cas, aucune preuve, bien que ce fut a priori crédible. Dès lors, deux approches médiatiques étaient possibles : soit on donnait de l’importance aux deux informations, mais assorties, dans les deux cas, de réserves. Soit on les relativisait toutes les deux, mais on enquêtait sérieusement pour savoir ce qu’il en était. Or, on a tout simplement mis en exergue, sans recul, la première assertion et quasiment occulté la seconde.

Une fois la ville reconquise, les Syriens et les Russes ont prétendu avoir découvert des charniers, mettant ces exécutions sur le compte des rebelles. Là encore, l’affirmation ne vaut pas preuve. Et, peut-être, s’agissait-il de victimes de la soldatesque pro-Assad. Une contre-enquête s’imposait donc. Que s’est-il vraiment passé à l’est d’Alep sous contrôle de la rébellion ?

Pour l’instant, il semble que personne n’ait vraiment envie de connaître la vérité. En fonction de quoi chacun, chaque camp, impose la sienne. Et toutes les propagandes peuvent impunément se déchaîner.

Ce qui fait une victime de plus : la crédibilité médiatique.

C’est donc avec raison que Le Monde soulignait, le 3 janvier, les dangers « d’une consommation communautaire de l’information, par « bulles cognitives », où chacun s’enferme dans ses convictions ».

Source : Marianne, Jean-François Kahn03/01/2017

A lire aussi l’article du Monde dont il est fait mention : Les risques de la société « post-vérité »

Source: http://www.les-crises.fr/syrie-une-victime-de-plus-la-credibilite-mediatique-par-jean-francois-kahn/


« L’Amérique d’abord », puis le conflit mondial, par Nouriel Roubini

Friday 6 January 2017 at 02:15

Une vision éclairante sur la mentalité des élites américaines – par l’économiste Nouriel Roubini

Source : Project Syndicate, Nouriel Roubini, 02-01-2017

NEW YORK – L’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis n’est pas seulement le résultat d’une révolte populiste croissante contre la mondialisation, mais semble également annoncer la fin de la Pax Americana – cet ordre international, caractérisé par le libre-échange et la sécurité commune, que l’Amérique et ses alliés ont bâti au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.

Cet ordre mondial sous conduite américaine a produit 70 années de prospérité. Il repose sur des systèmes de libéralisation du commerce axés sur les marchés, ainsi que sur l’accroissement de la mobilité du capital et la mise en œuvre de politiques sociales judicieuses, le tout appuyé par plusieurs garanties américaines de sécurité en Europe, au Moyen-Orient et en Asie, au travers de l’OTAN et d’autres alliances.

Trump semble néanmoins décidé à appliquer des mesures populistes, protectionnistes et opposées à la mondialisation, vouées à entraver les échanges commerciaux et à limiter la circulation des capitaux et du travail. Le président élu a également semé le doute sur les garanties de sécurité existantes de la part des États-Unis, en laissant entendre qu’il contraindrait les alliés de l’Amérique à payer davantage pour leur propre défense. Si Trump entend véritablement appliquer sa philosophie de « l’Amérique d’abord », cela signifie que son administration orientera la stratégie géopolitique des États-Unis en direction de l’isolationnisme et de l’unilatéralisme, en poursuivant uniquement les intérêts nationaux du pays.

Lorsque les États-Unis ont appliqué des politiques de cette nature dans les années 1920 et 1930, le pays a contribué à semer les graines de la Seconde Guerre mondiale. Le protectionnisme alors entrepris – à commencer par la loi Smoot-Hawley sur les tarifs douaniers, qui a concerné plusieurs milliers de produits importés – a déclenché plusieurs guerres de représailles sur le plan commercial et monétaire, qui ont aggravé la Grande Dépression. Plus dramatique encore, cet isolationnisme américain – fondé sur une conception erronée selon laquelle les États-Unis se trouvaient protégés par deux océans – a permis à l’Allemagne nazie et au Japon impérialiste de mener des guerres agressives, et de menacer le monde entier. C’est seulement à l’issue de l’attaque de Pearl Harbor, en décembre 1941, que les États-Unis n’ont eu d’autre choix que de cesser leur politique de l’autruche.

De même, à l’heure actuelle, le virage isolationniste de l’Amérique et la poursuite de ses intérêts strictement nationaux risque d’aboutir en fin de compte à un conflit mondial. Sans même considérer la perspective d’un désengagement américain hors d’Europe, l’Union européenne et la zone euro apparaissent d’ores et déjà en état de désintégration, d’autant plus avancé au lendemain du vote britannique sur le Brexit au mois de juin, ainsi que de l’échec du référendum italien du mois de décembre autour de plusieurs réformes constitutionnelles. Ajoutez à cela qu’en 2017, les partis populistes anti-européens d’extrême droite comme d’extrême gauche pourraient bien accéder au pouvoir en France et en Italie, voire dans d’autres pays d’Europe.

En l’absence d’un engagement actif des États-Unis en Europe, il faut s’attendre à ce qu’une Russie revancharde et agressive s’aventure sur le continent. La Russie défie d’ores et déjà l’Amérique et l’UE sur les territoires d’Ukraine, de Syrie, dans les pays baltes ainsi que dans les Balkans, et pourrait bien profiter de l’effondrement imminent de l’UE pour réaffirmer son influence sur les pays de l’ancien bloc soviétique, et soutenir activement les mouvements pro-russes d’Europe. Si l’Europe voit disparaître peu à peu son parapluie sécuritaire américain, personne ne s’en réjouira plus que le président russe Vladimir Poutine.

Les propositions annoncées par Trump menacent par ailleurs d’aggraver la situation au Moyen-Orient. Le président élu a déclaré qu’il entendait rendre les États-Unis indépendants sur le plan énergétique, ce qui implique l’abandon des intérêts américains dans la région, ainsi qu’un recours croissant à des combustibles fossiles produits nationalement et émetteurs de gaz à effet de serre. Trump a également maintenu sa position selon laquelle l’islam en lui-même, et pas seulement l’islam radical et militant, serait une religion dangereuse. Or cette conception, partagée par le général Michael Flynn, futur conseiller à la sécurité nationale, renforce directement le propre discours des militants islamistes autour d’un choc des civilisations.

[…]

Lire la suite sur Project Syndicate, Nouriel Roubini, 02-01-2017

 US-POLITICS-TRUMP

Source: http://www.les-crises.fr/lamerique-dabord-puis-le-conflit-mondial-par-nouriel-roubini/


Chris Hedges : “Tant que l’idéologie néolibérale dominera, le populisme va progresser”

Thursday 5 January 2017 at 03:15

Chris Hedges a été correspondant de guerre pour le New York Times pendant quinze ans et honoré par un prix Pulitzer.

Comment un pays qui a voté deux fois pour le premier Président noir de l’histoire des États-Unis a-t-il pu élire le candidat le plus raciste, sexiste et violent des élections américaines modernes ?

En 2008, juste après le crash financier, Barack Obama était perçu comme un outsider dans la vie politique américaine. Il avait passé seulement trois ans au Sénat, et les électeurs lui ont donné un mandat pour réaliser les promesses qu’il avait formulées pendant sa campagne, en particulier renégocier, ou en tout cas atténuer les accords commerciaux de libre-échange signés par les Etats-Unis en 2004. Après son élection, cette promesse s’est malheureusement volatilisée. Et l’on peut dire aujourd’hui que, sur le plan économique, Obama a passé la plus grande partie de sa présidence à défendre les intérêts des pouvoirs financiers qui ont brutalisé la société américaine depuis Bill Clinton. Huit années dilapidées par les élites démocrates ! Les victimes du système ne leur ont pas pardonné la malhonnêteté d’un parti qui, dans le même temps, courtisait les classes populaires. Elles ont rejoint Trump par colère et frustration.

Une colère légitime, donc ?

Si vous n’avez pas traversé les Etats-Unis ces dernières années, vous ne pouvez pas vous faire une idée précise de l’état de délabrement de notre pays. Les villes des anciens bassins industriels sont littéralement en ruine ; les gens doivent se battre pour survivre, 50 millions d’Américains vivent sous le seuil de pauvreté (officiellement 24 500 dollars par an pour une famille de quatre personnes, mais tous les économistes vous diront que ce montant est insuffisant) ; les salaires stagnent ou déclinent, les services sociaux sont supprimés, l’Obamacare (la réforme de l’assurance santé) a surtout profité à l’industrie pharmaceutique… Cette grande trahison des élites progressistes devait un jour ou l’autre se traduire sur le terrain politique. Quand on y songe, ces élites ont finalement fait le jeu des démagogues de droite, et porté Trump au pouvoir.

Le Prix Nobel d’économie Paul Krugman, dans sa chronique du New York Times, le lendemain des élections, avouait qu’il ne connaissait sans doute pas le pays profond. Ce mea culpa arrive trop tard ?

Bien trop tard ! Où étaient-ils, ces penseurs de gauche, quand Bill Clinton a décidé de vendre la classe ouvrière américaine au grand business, avec la signature du traité Aléna (l’accord de libre-échange nord-américain conclu entre les Etats-Unis, le Canada et le Mexique) en 1994 ? Ou quand il a détruit le système de sécurité sociale de notre pays, alors que 70 % de ses bénéficiaires étaient des enfants ? Et quand il a fait exploser le nombre de prisonniers dans les maisons d’arrêt ? On ne les a pas beaucoup entendus, à l’époque. Peut-être parce qu’ils vivent dans leur bulle à Manhattan et ne voient plus rien du pays réel — comme d’autres, en d’autres temps, restaient enfermés à Versailles… Ni ces élites ni les médias ne prennent suffisamment le temps d’aller voir cette majorité « silencieuse » qui, face à l’aveuglement et à la surdité, voyant ses appels désespérés demeurer vains, est devenue l’électorat de Trump. C’est d’autant plus grave que lorsqu’elles se décident enfin à ouvrir les yeux, ces élites progressistes adoptent souvent un ton moralisateur et condescendant, comme l’a fait Hillary Clinton quand elle a qualifié les électeurs de Trump de « pitoyables ». Cette campagne présidentielle a été suivie à travers un filtre « déréalisant » : les sondages étaient à côté de la plaque depuis le début, ils ne remontaient que ce que, dans les establishments démocrate comme républicain d’ailleurs, on voulait entendre : « Trump n’a aucune chance d’être élu. »

Plusieurs livres, depuis dix ans, ont sonné l’alerte. On pense à Pourquoi les pauvres votent à droite, de Thomas Frank, et à ce que vous écriviez dans La Mort de l’élite progressiste…

Ne soyons pas naïfs : nous vivons, aux Etats-Unis, dans un pays où plus personne ne lit — en particulier dans les classes les moins aisées. Celui de mes livres qui s’est le mieux vendu — Americain Fascists — a terminé sixième sur la liste des meilleures ventes du New York Times. Autrement dit : une centaine de milliers de lecteurs l’ont acheté (je ne sais pas combien l’ont lu). Un pourcentage infime de la population. Donc oui, l’information est disponible pour ceux qui veulent comprendre la période que nous traversons, mais cette information n’a strictement aucune chance d’entrer dans les discussions « mainstream » de l’Amérique profonde. L’information dans les mass media, ici, c’est Cartoon Network [une chaîne de dessins animés, ndlr] !

Mais la carte des élections a-t-elle confirmé vos analyses ?

Absolument. Prenez un Etat comme le Wisconsin, où Hillary Clinton n’a même pas pris la peine de faire campagne. C’est un bassin industriel, avec ses populations ouvrières et ses quartiers noirs, bref une base électorale à dominante démocrate, un triomphe « garanti » pour Hillary. Sauf qu’elle a pris une claque. Comment le parti démocrate a-t-il pu sous-estimer à ce point les effets, sur les classes populaires, de la perte d’emploi ? Il lui suffisait d’aller dans le bastion de l’industrie automobile, le Michigan, pour saisir les conséquences, sur son électorat, des transferts d’emplois vers le Mexique. A ma connaissance, aucun homme politique de gauche n’a demandé aux dirigeants de ces usines de maintenir ces jobs sur le sol américain. Ce silence a une traduction dans la tête des ouvriers qui, après avoir perdu leur travail et leur maison (qu’ils n’arrivent plus à payer), voient ces dirigeants empocher des bonus de plusieurs millions de dollars. Trump, au moins, a fait semblant de s’intéresser au problème. Il a présenté à ces Américains victimes de la mondialisation un bouc émissaire — les travailleurs mexicains, les immigrés illégaux, les musulmans, peu importe — et leur a offert sur un plateau l’occasion de dire un grand « FUCK YOU ! » à l’establishment.

Comment comprenez-vous que tant de gens – beaucoup de femmes, et un nombre important de Latinos – aient voté pour Trump contre leurs intérêts ?

Tout simplement parce que le parti démocrate ne représente plus leurs intérêts ! Ces femmes et ces Latinos sont désespérés, ils l’ont d’abord fait savoir aux candidats conservateurs des primaires républicaines, puis à Hillary Clinton. En rejetant cette dernière, ils ne se trompent pas : elle n’aurait pas fait grand-chose pour eux. Mais ils se trompent durement en choisissant Trump, car ce dernier appartient à une classe qui a fait fortune sur leur dos, et il va défendre avant tout les intérêts de sa caste, entouré d’une bande de gangsters du même acabit.

Diriez-vous que l’Amérique devient fasciste ?

Non, je dirais plutôt, à la suite du philosophe politique Sheldon Wolin, qu’elle entre dans une période de ­« totalitarisme inversé ». Contrairement au totalitarisme classique, ce nouveau « régime » ne s’incarne pas dans un parti réactionnaire ou révolutionnaire clairement fasciste, mais dans l’anonymat de l’Etat-entreprise. De très puissantes organisations privées investissent leur argent dans la vie publique avec un seul objectif en ligne de mire : que l’Etat leur permette de réduire toujours plus le coût de la main-d’oeuvre — quelles qu’en soient les conséquences sur le plan social. Côté face, les candidats portés par ces entreprises montrent une loyauté absolue envers les institutions et les traditions politiques de leur pays, et deviennent des professionnels du discours patriotique ; côté pile, rien ne les « ancre » à leur pays, puisque l’horizon est à la fois unique — maximiser les profits — et mondial. Donald Trump est issu de ce monde et servira les intérêts de ces centres de décision économique. Mais je crains que lui et ses acolytes Rudy Giuliani, Chris Christie et Newt Gingrich ne versent dans l’exercice d’une véritable violence d’Etat contre ceux qui se mettront sur leur chemin.

La stabilité légendaire des institutions américaines – les contre-pouvoirs du Congrès, de la Cour suprême, etc. – ne protège-t-elle pas le citoyen américain contre les excès de l’exécutif ?

La Cour suprême est cassée. Elle est déjà au service de l’Etat-entreprise que je viens de décrire. Trois Afro-Américains sont tués chaque jour par la police dans notre pays, et la Cour suprême ne lève pas le petit doigt. Peu importent les manifestations à New York ou Baltimore exigeant que justice soit rendue aux victimes. Dans les villes désindustrialisées où se produisent la plupart de ces drames, les jobs et les aides sociales ont été remplacés par un usage massif de la répression et des incarcérations. 25 % des prisonniers dans le monde sont détenus aux Etats-Unis, alors que notre pays ne représente que 4 % de la population mondiale ! On a pu constater aussi, avec le sort réservé aux lanceurs d’alerte Snowden, Assange ou Manning, combien nos institutions sont défaillantes quand il s’agit de protéger les citoyens. En détournant l’Espionage Act de 1917 (une loi de 1917 visant à empêcher des citoyens de gêner les opérations militaires américaines), et en refusant de s’attaquer aux pratiques dénoncées par Snowden, Obama a terriblement fragilisé les droits fondamentaux. Le jour, en effet, où la population ignorera tout des actions de son gouvernement (parce que diffuser ces informations est devenu un crime), l’Etat aura carte blanche pour agir à sa guise. Et quand l’Etat a à sa tête un Donald Trump, vous pouvez être inquiet.

La victoire de Trump fait-elle peser une menace réelle sur les minorités ?

Pour certaines catégories de population, l’Amérique n’est plus un endroit très agréable à vivre. Comme en Europe, les démagogues au pouvoir vont se faire un plaisir de désigner les plus vulnérables à la vindicte populaire. Trump à la Maison-Blanche, c’est une très mauvaise nouvelle pour les travailleurs illégaux, les musulmans et les Latinos en général.

Il ne sera pas le Président de tous les Américains, comme il l’a promis ?

Bien sûr que non. Rien dans son histoire personnelle, professionnelle ou politique, ne laissait d’ailleurs présager qu’il puisse l’être. Nous parlons d’un homme qui a été poursuivi en justice pour avoir refusé de laisser des Afro-Américains vivre dans un de ses immeubles…

Dès le 9 novembre, des Américains sont descendus dans la rue, ou ont manifesté pour dire leur colère contre le nouveau Président. Doit-on s’attendre à une contestation plus large ?

J’ai été longtemps militant dans des mouvements de désobéissance civile, aussi bien sous des présidents républicains que démocrates d’ailleurs, et je continuerai sûrement à l’être sous la présidence de Trump. Mais je ne pense pas que nous ayons le choix d’accepter — ou pas — le verdict des urnes. Je m’attends simplement à ce que la réaction des nouveaux dirigeants du pays devienne plus rugueuse. Surtout quand de larges portions de la population qui ont voté pour Trump vont réaliser qu’en bon démagogue prêt à tout pour se faire élire il leur a menti.

Que vont devenir les deux partis, démocrate et républicain, après une pareille claque ?

Je ne crois pas à la capacité du parti démocrate à se réformer — même si la dynastie Clinton, elle, est morte politiquement. Bernie Sanders aurait sans doute été un candidat plus efficace — et il avait la capacité de battre Trump —, mais son propre parti lui a mis des bâtons dans les roues. En envoyant, par exemple, des électeurs indépendants voter Clinton dans les Etats où il arrivait en force…

Et côté républicain ?

L’ironie, c’est que Trump a réussi à faire gagner aux républicains le Sénat et la Chambre des représentants, qu’ils croyaient perdre — donc à faire réélire ces mêmes députés et sénateurs qui avaient fini par prendre leurs distances avec lui, de peur qu’il ne sabote leur campagne ! La vieille élite républicaine, incarnée par la famille Bush, n’a même pas caché qu’elle se ralliait à Clinton pour cette élection. On peut s’attendre à une sacrée bataille entre elle et Donald Trump dans les mois à venir…

Les idées populistes l’emportent partout ou presque, une élection après l’autre, dans les démocraties occidentales et ailleurs. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

D’abord, je suis persuadé qu’elles vont continuer à progresser. Il ne peut en être autrement tant que dominera cette idéologie néolibérale insensée, qui considère que les diktats du marché doivent déterminer comment on gouverne un pays. Or je ne prévois aucun affaiblissement de cette idéologie dans un avenir proche. Aux Etats-Unis, Donald Trump va plutôt s’empresser de réduire les impôts des plus riches, supprimer l’Obamacare, et ainsi de suite. Cela m’inspire à la fois de la tristesse et l’envie de poursuivre mes combats, pacifiquement. Depuis dix ans, je n’ai cessé de m’engager pour faire prendre conscience au plus grand nombre que nous allions droit dans le mur. J’espérais que nous apprendrions des leçons de l’Histoire et que nous parviendrions à l’éviter — mais voilà, nous venons de nous prendre ce mur en pleine figure.

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Source: http://www.les-crises.fr/chris-hedges-tant-que-lideologie-neoliberale-dominera-le-populisme-va-progresser/


Les impasses occidentales en Syrie, par Bertrand Badie

Thursday 5 January 2017 at 02:30

Une vision mainstream assez critique, par Bertrand Badie, professeur de Sciences politiques à Sciences Po

Source : The Conversation, 12-12-2016

Une vue sur Alep, le 9 décembre 2016. George Ourfalian/AFP

Une vue sur Alep, le 9 décembre 2016. George Ourfalian/AFP

Humainement, les souffrances de la population d’Alep couvrent toute autre considération. Politiquement, la déroute occidentale fait l’événement tant elle est accablante. Les vieilles puissances étaient jadis tour à tour les gendarmes, les administrateurs et les arbitres d’une région où, dès 1919, elles se considéraient chez elles.

Elles se retrouvent aujourd’hui au rang de spectateurs impuissants, badauds diplomatiques d’une des crises les plus aiguës de la scène internationale d’après-guerre. Pire encore, incapables d’agir, elles sont en partie les responsables plus ou moins conscientes du drame. Réunions au Quai d’Orsay, missions parlementaires, bons sentiments rhétoriques : tout est bon pour servir de cache-misère. Mais la débâcle est là : il va falloir la gérer…

Extrême naïveté diplomatique

Peut-être convient-il d’abord de la comprendre. Convenir que le point de départ était absurde : brandir, la main sur le cœur, qu’on ne parlerait plus jamais au dictateur incriminé. Bonne ou mauvaise sur le plan éthique, la posture relevait de l’extrême naïveté diplomatique. Elle rendait impossible toute négociation, puisqu’elle l’excluait par avance et qu’elle brandissait le résultat avant même que ne commence le débat.

Assortie de la certitude que Bachar al-Assad ne tiendrait que quelques semaines, elle devenait l’otage d’un pari risqué digne de turfistes ou de pelousards d’occasion. Le choix était même irréaliste dès lors qu’on savait que les armées occidentales ne conduiraient aucune coalition capable d’épauler une insurrection dont on ne s’assurait ni de l’identité ni des soutiens régionaux. Il devenait carrément arrogant dès lors qu’il était perçu, à tort ou à raison, comme le prolongement d’une diplomatie « transformationnelle », c’est-à-dire visant à guider les changements de régime là où on le décide.

Cette diplomatie a échoué partout tout en faisant pourtant la réputation de l’Occident : elle s’est effondrée en Afghanistan, en Irak, en Libye ; elle s’est révélée meurtrière et source de problèmes nouveaux sans cesse plus graves. Pire encore, elle a éveillé le soupçon d’un grand nombre pour s’imposer comme une aubaine chez les plus cyniques. Les islamistes radicaux s’en sont nourris avec abondance, les puissances émergentes au souverainisme sourcilleux s’en sont inquiétées jusqu’à s’éloigner de la diplomatie de l’ancien monde tandis que la Russie de Poutine y a trouvé les choux gras de sa nouvelle diplomatie : se protéger d’un interventionnisme qu’elle n’avait pas vu venir en Libye et se présenter comme la garante des pouvoirs établis, là où tant de régimes autoritaires tremblent pour leur survie.

Régime de substitution

L’équation est pourtant simple : intervenir chez l’autre pour réchauffer un pouvoir chancelant est possible, parfois gratifiant à court terme. S’immiscer pour imposer un autre pouvoir n’aboutit jamais : aucun fourgon étranger n’est assez grand pour y transporter un régime de substitution. Les puissances occidentales ont pu sauver des dictateurs, au Gabon, en République démocratique du Congo, au Tchad et ailleurs : elles ont été moins heureuses lorsqu’il s’agissait de mettre en place des formules de substitution.

Les populations civiles fuient les combats à Alep, le 12 décembre 2016. George Ourfalian/AFP

Les populations civiles fuient les combats à Alep, le 12 décembre 2016. George Ourfalian/AFP

Moscou ou Téhéran avaient trop besoin de démontrer à l’Occident que celui-ci perdait la main en la matière pour faciliter une transition politique douce en Syrie. Ils ont trop besoin de démontrer que la diplomatie occidentale a définitivement perdu cette prétention d’antan pour se prêter à une concertation ouverte sur l’évolution du régime de Damas.

L’avenir n’est réjouissant en fait pour personne. Renforcée par son succès militaire, la coalition russo-irano-assadienne n’a pas fini le travail, tant s’en faut. Quelques heures après que François Hollande se fut réjoui des « reculs » de Daech, celui-ci avançait victorieusement vers Palmyre, tandis que la bataille de Mossoul semble s’enliser. Les actions menées vers Raqqa sont le fait d’une coalition « arabo-kurde » qui risque de provoquer l’ire d’Ankara et mettre la Russie face à des soutiens occidentaux ambigus.

Les révoltes qui arrangent

Devant de telles incertitudes, les handicaps l’emportent sur les atouts. Le jeu occidental est terriblement pauvre. Les puissances qui l’orchestrent n’ont pas d’alliés dans la région, face à une Turquie incontrôlable et une Arabie saoudite des plus complexe. Elles n’ont plus de leviers, tant la méfiance des uns et l’incrédulité des autres viennent à les affaiblir. Appuyant certaines dictatures et choisissant les révoltes qui les arrangent, elles ne savent pas construire une diplomatie réellement en prise avec les réalités sociales régionales ; piégées par leurs échecs, elles ont du mal à atteindre les tables de négociation, à l’exception des États-Unis que la Russie recycle partiellement pour lui servir de faire-valoir…

La Russie, quant à elle, a mangé son pain blanc : elle a pu montrer sa force, ce dont elle rêvait pour revenir dans le jeu. Il lui faut maintenant montrer que cette force est convertible en capacité politique. Mais il ne suffit plus de faire d’Assad un nouvel Husak ou un Gomulka d’après 1956. Ce temps est terminé et cette résistance des dynamiques sociales risque bel et bien de faire le jeu du troisième larron incarné par les entrepreneurs islamistes les plus radicaux. « Voilà pourquoi votre fille est muette » et comment les impasses des uns font le bonheur des autres : il serait temps d’y penser…

Source : The Conversation, 12-12-2016

Source: http://www.les-crises.fr/les-impasses-occidentales-en-syrie-par-the-conversation/


Arrestations en Egypte après le tournage de fausses vidéos d’Alep, par RTS Info

Thursday 5 January 2017 at 02:15

Source : RTS Info, 21-12-2016

Cette photo est en réalité une mise en scène. [DR]

Cette photo est en réalité une mise en scène. [DR]

Cinq personnes accusées de réaliser avec des enfants de fausses images des combats dans la ville syrienne d’Alep ont été arrêtées à Port-Saïd, en Egypte. Un exemple des fausses informations qui accompagnent la guerre.

La robe tachée de sang, une petite fille tient son ours en peluche au milieu des décombres. Un garçon raconte ensuite la vie sous les bombes, à Alep.

A priori terribles, ces images n’ont toutefois pas été prises à Alep, en Syrie, mais en Egypte. Il s’agit d’une mise en scène sur un chantier en démolition de Port-Saïd, selon le communiqué des autorités égyptiennes relayé par The Independent.

L’équipe de tournage et les parents des deux enfants ont été arrêtés et le matériel saisi, a ajouté le ministère de l’Intérieur sur sa page Facebook. Il y a publié lundi les photos et vidéos saisies.

Voir la vidéo (ou ici)

Pour les réseaux sociaux

Quatre des cinq personnes arrêtées ont été libérées. Les charges retenues n’ont pas été précisées.

Selon les autorités égyptiennes, le vidéaste a avoué vouloir diffuser ses productions sur les réseaux sociaux en prétendant qu’il s’agissait d’Alep. Le but: dénoncer les frappes sur la ville récemment tombée entre les mains du régime.

Guerre médiatique

Ce nouvel exemple de propagande rappelle qu’en plus des violences en Syrie s’ajoute un combat médiatique. La semaine passée, lemonde.fr revenait sur plusieurs fausses informations émanant des deux camps pendant la bataille d’Alep. Et celles-ci ne se cantonnent pas aux réseaux sociaux.

Le 13 décembre, l’ambassadeur de Syrie à l’ONU Bashar Jaafari a brandi lors d’une réunion du Conseil de sécurité une photo d’une civile aidée par un “soldat syrien à Alep”. Il s’agissait en réalité d’un milicien irakien après la bataille de Falloujah, en Irak, comme l’a dévoilé BuzzFeed.

Source : RTS Info, 21-12-2016

Source: http://www.les-crises.fr/arrestations-en-egypte-apres-le-tournage-de-fausses-videos-dalep-par-rts-info/