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Conspirationnisme : la paille et la poutre, par Frédéric Lordon

Thursday 28 April 2016 at 00:11

Encore un grand billet de Frédéric Lordon. C’est un peu plus dur vers le premier tiers, mais ne manquez surtout pas la seconde moitié, qui coule très facilement et brillamment…

Le peuple est bête et méchant, le peuple est obtus. Au mieux il pense mal, le plus souvent il délire. Son délire le plus caractéristique a un nom : conspirationnisme. Le conspirationnisme est une malédiction. Pardon : c’est une bénédiction. C’est la bénédiction des élites qui ne manquent pas une occasion de renvoyer le peuple à son enfer intellectuel, à son irrémédiable minorité. Que le peuple soit mineur, c’est très bien ainsi. Surtout qu’il veille à continuer d’en produire les signes, l’élite ne s’en sent que mieux fondée à penser et gouverner à sa place.

Pour une pensée non complotiste des complots (quand ils existent)

 Il faudrait sans doute commencer par dire des complots eux-mêmes qu’ils requièrent d’éviter deux écueils symétriques, aussi faux l’un que l’autre : 1) en voir partout ; 2) n’en voir nulle part. Quand les cinq grandes firmes de Wall Street en 2004 obtiennent à force de pressions une réunion longtemps tenue secrète à la Securities and Exchange Commission (SEC), le régulateur des marchés de capitaux américains, pour obtenir de lui l’abolition de la « règle Picard » limitant à 12 le coefficient de leviérisation globale des banques d’affaires [1], il faudrait une réticence intellectuelle confinant à l’obturation pure et simple pour ne pas y voir l’action concertée et dissimulée d’un groupe d’intérêts spécialement puissants et organisés – soit un complot, d’ailleurs tout à fait couronné de succès. Comme on sait les firmes de Wall Street finiront leviérisées à 30 ou 40, stratégie financière qui fera leur profits hors du commun pendant la bulle… et nourrira une panique aussi incontrôlable que destructrice au moment du retournement. Des complots, donc, il y en a, en voilà un par exemple, et il est de très belle facture.

Sans doute ne livre-t-il pas à lui seul l’intégralité de l’analyse qu’appelle la crise financière, et c’est peut-être là l’une des faiblesses notoires du conspirationnisme, même quand il pointe des faits avérés : son monoïdéisme, la chose unique qui va tout expliquer, l’idée exclusive qui rend compte intégralement, la réunion cachée qui a décidé de tout. Exemple type de monoïdéisme conspirationniste : Bilderberg (ou la Trilatérale). Bilderberg existe ! La Trilatérale aussi. Ce n’est donc pas du côté de l’établissement de ce (ces) fait(s) que se constitue le problème (comme ça peut être le cas à propos du 11 septembre par exemple) : c’est du côté du statut causal qu’on leur accorde. Ainsi donc de Bilderberg ou de la Trilatérale érigées en organisateurs uniques et omnipotents de la mondialisation néolibérale. Pour défaire le monoïdéisme de la vision complotiste, il suffit de l’inviter à se prêter à une expérience de pensée contrefactuelle : imaginons un monde sans Bilderberg ni Trilatérale, ce monde hypothétique aurait-il évité la mondialisation néolibérale ? La réponse est évidemment non. Il s’en déduit par contraposition que ces conclaves occultes n’étaient pas les agents sine qua non du néolibéralisme, peut-être même pas les plus importants. Et pourtant ceci n’est pas une raison pour oublier de parler de Bilderberg et de la Trilatérale, qui disent incontestablement quelque chose du monde où nous vivons.

Il suffirait donc parfois d’un soupçon de charité intellectuelle pour retenir ce qu’il peut y avoir de fondé dans certaines thèses immédiatement disqualifiées sous l’étiquette désormais infamante de « conspirationnistes », écarter leurs égarements explicatifs, et conserver, quitte à les réagencer autrement, des faits d’actions concertées bien réels mais dont la doctrine néolibérale s’efforce d’opérer la dénégation – il est vrai qu’il entre constitutivement dans la vision du monde des dominants de dénier génériquement les faits de domination (salariés et employeurs, par exemple, sont des « co-contractants libres et égaux sur un marché du travail »…), à commencer bien sûr par tous les faits de ligue explicite par lesquels les intérêts dominants concourent à la production, à la reproduction et à l’approfondissement de leur domination. Dans un débat public médiatique qui n’a pas son pareil pour saloper irrémédiablement n’importe quelle question, il est donc probablement sans espoir d’imaginer définir une position intermédiaire qui tiendrait ensemble et la régulation contre certains errements extravagants (jusqu’au scandaleux) de la pensée conspirationniste, et l’idée que la domination, si elle est principalement produite dans et par des structures, est aussi affaire pour partie d’actions collectives délibérées des dominants – mais faire ce genre de distinction est sans doute trop demander, et on voit d’ici venir les commentaires épais qui feront de ce propos une défense apologétique du complotisme et des complotistes…

On pourrait arguer que l’analyse sociologique ou politologique de ces actions concertées, précisément, se déploie hors des schèmes intellectuels caractéristiques du conspirationnisme : monoïdéisme, exclusivisme, attraction sans partage pour l’occulte, ignorance corrélative pour tous les effets impersonnels de structure, etc. [2] Et ce serait parfaitement exact ! C’est bien pourquoi il serait temps de faire la part des complots – comme faits avérés, puisqu’il en existe certains – et du complotisme – comme forme générale –, soit d’en appeler, en quelque sorte, à une pensée non complotiste des complots, c’est-à-dire aussi bien : 1) reconnaître qu’il y a parfois des menées concertées et dissimulées – on pourra les appeler des complots, et 2) refuser de faire du complot le schème explicatif unique de tous les faits sociaux, ajouter même que de tous les schèmes disponibles, il est le moins intéressant, le moins souvent pertinent, celui vers lequel il faut, méthodologiquement, se tourner en dernier… et ceci quoiqu’il ait parfois sa place ! Et il faudrait surtout consolider cette position intermédiaire à l’encontre de tous ceux pour qui maintenir l’amalgame des complots et du complotisme a l’excellente propriété de jeter le bébé avec l’eau du bain, en d’autres termes de garantir l’escamotage des faits de synarchie avec la disqualification de la forme « complotisme ».

Le conspirationnisme comme symptôme politique de la dépossession

Tout ceci cependant est dire à la fois trop et trop peu quand, du conspirationnisme, il est possible de prendre une vue latérale qui vient quelque peu brouiller l’image de ses habituelles dénonciations, et puis, plus encore, celle de ses frénétiques dénonciateurs. Sans doute trouve-t-on de tout à propos du conspirationnisme : des tableaux sarcastiques de ses plus notoires délires (le fait est qu’il n’en manque pas…), des revues de ses thèmes fétiches, jusqu’à de savantes (pitoyables) analyses de la « personnalité complotiste » et de ses psychopathologies. Mais d’analyse politique, point ! La puissance des effets de disqualification, la force avec laquelle ils font le tri des locuteurs, les caractéristiques sociales associées à ce tri même, la réservation de la parole légitime à certains et l’exclusion absolue des autres, procédant là aussi par un effet d’amalgame qui confond dans l’aberration mentale, puis dans l’interdiction de parler, toute une catégorie, voire un ensemble de catégories sociales, à partir de quelques égarés isolés, ceci pour faire du discours politique l’affaire monopolistique des « représentants » assistés des experts : tous ces mécanismes devraient pourtant attirer l’attention sur les enjeux proprement politiques engagés dans le « débat sur le conspirationnisme » – au lieu de quoi il n’est matière qu’à gloussements ou cris faussement horrifiés puisque, si isolées soient-elles, les saillies conspirationnistes fournissent la meilleure raison du monde à la dépossession.

Dépossession : tel est peut-être le mot qui livre la meilleure entrée politique dans le fait social – et non pas psychique – du conspirationnisme. Car au lieu de voir en lui un délire sans cause, ou plutôt sans autre cause que l’essence arriérée de la plèbe, on pourrait y voir l’effet, sans doute aberrant, mais assez prévisible, d’une population qui ne désarme pas de comprendre ce qu’il lui arrive, mais s’en voit systématiquement refuser les moyens – accès à l’information, transparence des agendas politiques, débats publics approfondis (entendre : autre chose que les indigentes bouillies servies sous ce nom par les médias de masse) etc. Décidément l’événement politique le plus important des deux dernières décennies, le référendum sur le traité constitutionnel européen de 2005 a montré ce que peut, pourtant dans un extraordinaire climat d’adversité, un corps politique auquel on donne le temps de la réflexion et du débat : s’emparer des matières les plus complexes et se les approprier pour produire un suffrage éclairé.

Hors de ces conditions exceptionnelles, tous les moyens ou presque de faire sens des forces historiques qui l’assaillent et surtout d’avoir part aux délibérations qui décident de son destin lui sont refusés. Or, remarque Spinoza, le quant-à-soi ne saurait connaître aucune suspension : « nul ne peut céder sa faculté de juger » (Traité politique), aussi celle-ci s’exerce-t-elle comme elle peut, dans les conditions qui lui sont faites, et avec l’acharnement du désespoir quand au surplus elle n’a que son malheur à penser. Le conspirationnisme n’est pas la psychopathologie de quelques égarés, il est le symptôme nécessaire de la dépossession politique et de la confiscation du débat public. Aussi est-il de la dernière ineptie de reprocher au peuple ses errements de pensée quand on a si méthodiquement organisé sa privation de tout instrument de pensée et sa relégation hors de toute activité de pensée. Cela, nul ne le dit mieux que Spinoza : « Il n’est pas étonnant que la plèbe n’ait ni vérité ni jugement, puisque les affaires de l’Etat sont traitées à son insu, et qu’elle ne se forge un avis qu’à partir du peu qu’il est impossible de lui dissimuler. La suspension du jugement est en effet une vertu rare. Donc pouvoir tout traiter en cachette des citoyens, et vouloir qu’à partir de là ils ne portent pas de jugement, c’est le comble de la stupidité. Si la plèbe en effet pouvait se tempérer, suspendre son jugement sur ce qu’elle connaît mal, et juger correctement à partir du peu d’éléments dont elle dispose, elle serait plus digne de gouverner que d’être gouvernée » (Traité politique, VII, 27).

L’apprentissage de la majorité (à propos de la « loi de 1973 »)

Mais plus encore que de la dépossession, le conspirationnisme, dont les élites font le signe d’une irrémédiable minorité, pourrait être le signe paradoxal que le peuple, en fait, accède à la majorité puisqu’il en a soupé d’écouter avec déférence les autorités et qu’il entreprend de se figurer le monde sans elles. Il ne lui manque qu’une chose pour y entrer complètement, et s’extraire des chausse-trappes, telle celle du conspirationnisme, dont tout débat public est inévitablement parsemé : l’exercice, la pratique, l’habitude… soit tout ce que les institutions de la confiscation (représentation, médias, experts) lui refusent et qu’il s’efforce néanmoins de conquérir dans les marges (associations, éducation populaire, presse alternative, réunions publiques, etc.) – car c’est ens’exerçant que se forment les intelligences individuelles et collectives.

Le débat sur la « loi de 1973 », interdisant supposément le financement monétaire des déficits publics devrait typiquement être regardé comme l’une des étapes de cet apprentissage, avec son processus caractéristique d’essais et d’erreurs. Bien sûr la « loi de 1973 », objet dans certaines régions de l’Internet d’une activité effervescente, a connu son lot d’embardées : depuis la vidéo à ambiance complotiste de Paul Grignon,Money as Debt, portant au jour une gigantesque conspiration monétaire – ce sont les banques privées qui créent la monnaie – dont les termes pouvaient cependant être lus dans n’importe quel manuel d’économie de Première ou de Terminale SES !, jusqu’à la lourde insistance à renommer la loi, d’abord « loi Pompidou » mais pour mieux arriver à « loi Rothschild », où certains ne verront qu’une allusion aux connexions du pouvoir politique et de la haute-finance [3] quand d’autres y laisseront jouer toutes sortes d’autres sous-entendus…

Au milieu de toutes ces scories, un principe de charité politique pourrait cependant voir : 1) ce petit miracle des non-experts se saisissant d’une question à l’évidence technique mais que ses enjeux politiques destinent au débat le moins restreint possible : la monnaie, les banques ; 2) le surgissement, peut-être désordonné mais finalement salutaire, d’interrogations sur la légitimité des taux d’intérêt, le financement des déficits publics, les figures possibles de la souveraineté monétaire, la place adéquate des émetteurs de monnaie dans une société démocratique ; 3) une intense activité polémique, au meilleur sens du terme, avec production kilométrique de textes, lancement de sites ou de blogs, controverses documentées en tous sens, etc. Tout ceci, oui, au milieu d’ignorances élémentaires, de quelques dérapages notoires et de fausses routes manifestes – certains parmi les plus acharnés à dénoncer la loi de 1973 commencent à s’apercevoir qu’ils ont poursuivi un fantôme de lièvre [4] … Mais pourtant comme un exercice collectif de pensée qui vaut en soi bien mieux que toutes ses imperfections, et dans lequel, tout sarcasme suspendu, il faudrait voir un moment de ce processus d’apprentissage typique de l’entrée dans la majorité. Sans surprise, des trébuchements de l’apprentissage les élites installées tirent parti pour refuser l’apprentissage même. On les comprend : il y va précisément de la dépossession des dépossédeurs.

À conspirationniste, conspirationniste et demi !

Mais les appeler « élites », n’est-ce pas beaucoup leur accorder ? Et que valent les élites en questions à l’aune même des critères qu’elles appliquent aux autres ? Répondre complètement à cette question exigerait de reparcourir l’interminable liste des erreurs accablantes de diagnostic, de pronostic, de conseils malavisés, innombrables foirades des experts, calamités « intellectuelles » à répétition, obstination dans l’erreur, passion pour le faux : avec une systématicité qui est en soi un phénomène, tous les précepteurs de la mondialisation néolibérale se sont trompés. Mais puisqu’il est question ici du conspirationnisme, c’est bien sur ce terrain qu’il faut les prendre. Car voilà toute la chose : à conspirationniste, conspirationniste et demi… Où il apparaît que la supposée élite y tombe aussi facilement que le bas peuple ! Qui voudrait faire du conspirationnisme un dérèglement n’aurait alors pas d’autre issue que de constater combien largement il est répandu – et que les frontières sociales sont rien moins qu’hermétiques sous ce rapport.

De ce point de vue c’est peut-être l’affaire DSK qui aura le plus spectaculairement déchiré le voile. Car jamais on n’aura vu théories du complot fleurir aussi allègrement dans les plus hautes sphères du commentariat. Les politiques, surtout du PS, sont évidemment les premiers à y choir, quitte à ce que ce soit sur le mode de la prétérition, ainsi Jean-Christophe Cambadélis dans une déclaration fameuse : « Je ne suis pas un adepte des complots mais…  [5 », suivi comme il se doit par une série de conjectures dont la conspiration est la seule conclusion logique ; Jacques Attali qui d’ordinaire sait bien voir les abîmes de la pensée conspirationniste mais, quand il s’agit de DSK, évoque d’abord l’hypothèse d’une« manipulation » [6] ; François Loncle, député PS qui assure pour sa part« qu’il n’y a pas de complot » [7] mais « un coup monté » [8], c’est très différent. « La thèse du complot se répand sur le web » titre un des articles de Libération [9] – « sur le web », n’est-ce pas, en aucun cas dans les pages du papier… Mais il faut bien l’avouer, jamais on n’aura vu « thèse du complot » si amplement exposée et si aimablement relayée dans les colonnes de la grande presse, quitte à ce que ce soit pour la discuter, voire la réfuter, en tout cas sans qu’il soit jugé indigne cette fois d’en faire la mention ou de ridiculiser ceux dans la bouche de qui elle est d’abord venue.

D’un certain conspirationnisme européiste

Les illustrations les plus spectaculaires cependant ne sont pas forcément les meilleures, et si elle a fait la démonstration édifiante de ce que valent les régulations de la classe oligarchique – à savoir rien – en situation de grande tension – par exemple quand il s’agit de sauver de l’opprobre son meilleur espoir –, l’affaire DSK demeure trop exceptionnelle pour être parfaitement significative. Autrement parlantes les pulsions conspirationnistes qui émaillent à répétition le discours de la crise européenne, à plus forte raison quand elles se donnent libre cours dans l’un des journaux les plus rigoureusement donneur de leçon anti-conspirationniste, Libération, et sous la plume de son journaliste le plus attaché à traîner dans la boue – y compris pour conspirationnisme – toute position de gauche critique de l’Europe telle qu’elle est, Jean Quatremer, auteur par exemple d’un magnifique « Quand l’euroscepticisme mène au conspirationnisme » [10].

Mais voilà : depuis que son objet chéri est en crise et attaqué de toutes parts, Jean Quatremer n’en finit pas de voir des complots partout. « Presse anglo-saxonne », « marchés financiers américains », « agences de notation », « hedge funds » : la monnaie unique européenne, pourtant plus franche que l’or, est la cible de pernicieuses entreprises de déstabilisation délibérée, orchestrées qui plus est par la plus maléfique des entités : « la finance anglo-saxonne ». Pour qui douterait qu’un esprit fondamentalement sain, puisque européen, ait pu ainsi être infecté par la maladie du complot, florilège de titres : « Les agences de notation complices des spéculateurs ? » (21 septembre 2011), « Les marchés financiers américains attaquent l’euro » (6 février 2010), « Comment le Financial Times alimente la crise » (30 mai 2010), « Moody’s veut la peau du triple-A français » (21 novembre 2011), « Les banques allemandes contre la zone euro » (31 juillet 2011), « Le jeu trouble de Reuters dans la crise de la zone euro » (29 juillet 2012).

Et l’intérieur est à l’avenant de la devanture : « Il apparaît de plus en plus clair (sic) que des banques et des fonds spéculatifs américains jouent l’éclatement de la zone euro » [11] – le complot est donc d’abord anglo-saxon. C’est l’imperméabilité à tout argument rationnel qui atteste l’intention concertée de nuire : « le problème est qu’il ne sert à rien d’expliquer que la faillite de la Grèce est totalement improbable » [12], commentaire qui, au passage, prend toute sa saveur avec le recul, et plus encore après que son auteur se fut cru suffisamment clairvoyant pour décerner un « Audiard d’or » à Emmanuel Todd annonçant l’explosion de l’euro [13] – il est vrai que toute prédiction de malheur à l’encontre de l’objet chéri ne peut être, au choix, qu’une grotesque bouffonnerie ou une ignoble trahison.

En tout cas la perfidie anglo-saxonne a de puissants relais, les médias par exemple dont « le biais anti-euro (…) est difficilement contestable » [14], les agences de presse également, à l’image de Reuters et de son « jeu trouble dans la crise de la zone euro » [15]. Ainsi, par inconscience ou par malignité, on ne sait, donc par malignité, « les médias accroissent la panique des marchés ». Pour ce qui est du Financial Times en tout cas, l’explication n’est pas douteuse : « pris dans le sac du mensonge (…) il manipule l’information et colporte des rumeurs » [16] le 26 novembre 2010 – le 30 mai déjà il en était« à son second mauvais coup » [17]. Une année plus tard cependant, « les marchés financiers américains » ne sont plus les seuls agents de la cinquième colonne, ce sont les banques allemandes qui sont occupées à« mettre le feu à la zone euro » [18] – et l’ennemi est maintenant à l’intérieur. Peu importe que jusqu’ici l’Allemagne en (toutes) ses institutions ait été la figure même de la vertu, le vrai moteur de l’Europe, dont le couple avec la France patati patatère – maintenant ce sont des traîtres. La circonscription de la conspiration peut donc varier, mais pas le fait conspirationniste lui-même, puisque la construction monétaire européenne est si parfaitement conçue qu’il faut nécessairement une ligue de forces occultes pour la renverser.

Si le mal organisé est partout, il n’en a pas moins son superlatif en les agences de notation : elles sont les « complices des spéculateurs » [19].« Allons plus loin : qui a déclenché la panique sur la dette française ? Moody’s justement (…) Bref encore une fois les agences viennent donner un coup de main aux spéculateurs pour déstabiliser les marchés » [20]. Il est donc temps de poser la vraie question : « Alors complot des agences de notation qui servent ainsi leurs maîtres principaux, les banques d’affaires, les hedge funds, etc. ? (…) Laurence Parisot, la patronne du Medef en est persuadée » [21]. Bien sûr il reste des amis de l’Europe, donc de Jean Quatremer, qui n’ont pas encore complètement perdu les pédales et tentent de le rattraper. Par fidélité un peu réticente mais impressionné par l’incontestable crédit européen de son interlocuteur, Quatremer cite Jean Pisani-Ferry qui lui explique que les agences ne font jamais que ratifier avec retard des anticipations de longue date incorporées dans les positions des investisseurs… Il lui fallait au moins cette poche à glace pour se persuader que « crier au complot ne sert de toute façon à rien sinon à soulager ses nerfs » [22]. Donc Jean Quatremer a d’abord très fort envie de crier au complot – si fort que ça s’entend à longueur de billets –, puis, instruit par ses précepteurs de toujours, se convainc, mais difficilement, qu’il ne sert à rien d’y céder – moyennant quoi ses nerfs ne sont qu’à demi-soulagés, raison pour laquelle il y revient sans cesse.

Hedge Funds, médias, presse anglo-saxonne, agences de presse, marchés financiers américains, agences de notation, partout des malfaisants ligués contre l’objet chéri. De cette sorte de crumble intellectuel, les agences de notation sont peut-être l’ingrédient le plus caractéristique, boucs émissaires périphériques de toute une structure qui s’exprime par elles [23] – mais qu’évidemment on ne mettra jamais en question. Car les agences de notation, comme dans une moindre mesure la presse financière, sont les agents les plus représentatifs de la finance déréglementée comme pouvoir de l’opinion – l’opinion des investisseurs s’entend, et exclusivement celle-ci, mais opinion d’une foule traversée de croyances, très faiblement régulées par la rationalité, et pourtant base de jugements, le plus souvent mimétiquement polarisés, à partir desquels des masses immenses de capitaux sont mises en mouvement. Il faudrait donc expliquer à Jean Quatremer que la finance libéralisée, si constamment encouragée par la construction européenne, c’est cela même !, que dans cet ensemble, il entre constitutivement, et non accidentellement, rumeurs, erreurs, errances, absurdités, idées fausses, informations biaisées – Jean Quatremer s’est-il jamais ému pendant toutes les belles années qu’on voie d’incertaines start-up comme des eldorados de profit, ou bien la finance structurée comme la martingale définitive contre le risque de crédit, et l’explosion des titres adossés à l’endettement des ménages comme une géniale trouvaille ? De ce point de vue, et erreur pour erreur, les marchés sont sans doute plus près du vrai en anticipant la décapilotade de l’euro, qu’ils ne l’étaient alors…

Mais dans la vision du monde de Jean Quatremer, la finance est bonne… jusqu’à ce qu’elle s’en prenne à son talisman. On lui fera néanmoins observer qu’il y a une certaine logique, et comme une justice immanente, à ce que l’Europe modèle Maastricht-Lisbonne qui a sans relâche promu la finance périsse par la finance. Car enfin qui a fait le choix de remettre entièrement les politiques économiques entre les mains de ce pouvoir déréglé qu’est la finance libéralisée ? Qui a décidé d’instituer les marchés obligataires comme puissance disciplinaire en charge de la normalisation des politiques publiques ? Qui a voulu constitutionnaliser la liberté de circulation des capitaux qui offre à ce régime son infrastructure ?

Non pas les agents du mal mais la force des structures

En fait c’est là la chose que Jean Quatremer a visiblement du mal à comprendre – déficience par quoi d’ailleurs il verse immanquablement dans le conspirationnisme, qu’il dénonçait chez les autres à l’époque où « tout allait bien » (pour lui) –, les crises s’expliquent moins par la malignité des agents que par l’arrivée aux limites des structures. Il est vrai qu’ayant toujours postulé la perfection de son objet, donc l’impossibilité de sa crise, il n’a pas d’autre hypothèse sous la main pour en penser la décomposition : celle-ci ne peut donc être que le fait des méchants (et des irresponsables : Grecs, Portugais, Espagnols…).

Or on peut dire de la construction européenne la même chose que de n’importe quelle autre configuration institutionnelle : les comportements, même destructeurs, des agents n’y sont pas le fait d’un libre-arbitre pervers mais de leurs stratégies ordinaires telles qu’elles ont été profondément conformées par l’environnement structurel dans lequel on les a plongés… quitte à ce que ces structures, laissées à leur simple fonctionnement, produisent in fine leur propre ruine : la Deutsche Bank lâche la dette italienne, non par trahison anti-européenne [24], mais par simple fidélité à la seule chose qu’elle ait à cœur : son profit – et si l’on veut des banques qui aient à cœur d’autres choses, il va falloir se pencher sur leurs statuts autrement que par fulmination et vœux pieux interposés. De même, les spéculateurs spéculent… parce qu’on leur a aménagé un terrain de jeu spéculatif ! Rumeurs et informations incertaines y prennent des proportions gigantesques parce que ce terrain de jeu même institue le pouvoir de l’opinion financière, etc.

Sans doute, poussés comme n’importe quels médias par les forces pernicieuses de la concurrence, de la recherche effrénée du scoop et de la primeur, le FT a-t-il parfois lâché trop vite quelques informations foireuses,Reuters des confidences biaisées ou mal recoupées, mais ni plus ni moins que Libération ou Jean Quatremer lui-même qui n’hésite pas, par exemple, à donner audience à des études aux bases les plus incertaines à propos de la sortie de la Grèce, tout droit tirées des bons soins de la banque UBS [25], son fournisseur attitré, dont l’objectivité et la neutralité sont d’évidence incontestables… Qu’UBS batte la campagne, qui plus est sans doute au service de ses propres positions spéculatives, la chose lui est tout à fait négligeable, l’important est qu’UBS la batte dans le bon sens.

Le monde de la finance a pour propriété que n’importe quelle information est potentiellement porteuse d’effets terriblement déstabilisants, non parce que de machiavéliques émetteurs les ont voulues ainsi mais, en dernière analyse, parce qu’elles sont saisies par les forces immenses de la spéculation qui ont le pouvoir de faire un tsunami d’une queue de cerise. Si Jean Quatremer fantasme une finance dont tous les acteurs observeraient en toutes circonstances le grand calme olympien de la rationalité pure et parfaite, il faut lui dire qu’il fait des rêves en couleur. Encore faudrait-il, pour s’en apercevoir, qu’il daigne faire quelques lectures d’histoire économique, évidemment d’auteurs qui auraient fort le goût de lui déplaire, des gens comme Minsky, Kindleberger, Keynes ou Galbraith, lesquels, instruits des catastrophes passées, n’ont cessé de montrer que la finance de marché estpar constructionpar essence, le monde du déchaînement des passions cupides, de l’échec de la rationalité et du chaos cognitif. Et qu’en réarmer les structures, comme l’Europe l’a fait avec obstination à partir du milieu des années 1980, était le plus sûr moyen de recréer ces désastres du passé.

Entre une nouvelle, aussi factuelle soit-elle, et le mouvement subséquent des marchés, il y a toujours l’interprétation – celle des investisseurs –, et c’est par cette médiation que s’introduit la folie, particulièrement en temps de crise où la mise en échec des routines cognitives antérieures alimente les anticipations les plus désancrées. L’Europe a fait le choix de s’en remettre à cette folie-là. Et Quatremer s’étrangle de rage stupéfaite qu’elle en crève… Comme rien ne peut le conduire à remettre en cause ses objets sacrés – les traités, la règle d’or, Saint Jean-Claude et son vicaire Mario –, il ne lui reste que les explications par le mal, un équivalent fonctionnel des hérétiques ou des satanistes si l’on veut. Aussi se meut-il dans une obscurité peuplée d’agents qui fomentent des « mauvais coups » et mènent« un jeu trouble », un underworld de « complices » et d’incendiaires. Si difficile soit-il de s’y résoudre, il faudra pourtant bien admettre que la construction européenne s’effondre selon la pure et simple logique qu’elle a elle-même instituée. Elle n’est pas la proie d’une conjuration du mal : elle tombe toute seule, du fait même de ses tares structurelles congénitales et sous l’effet des forces aveugles qu’elle a elle-même installées – et s’en prendre répétitivement, comme à des incubes, aux agents variés qui n’en sont que les opérateurs (Hedge Funds, banques et agences) est le passeport pour l’asile de l’ignorance.

Mais il y a des aggiornamentos trop déchirants pour être consentis aisément, et des investissements psychiques trop lourds pour être rayés d’un trait de plume, aussi faut-il attendre l’infirmation définitive par le réel pour que se produise le premier mouvement de révision – et encore… On en connaît qui persistent à croire que la défaite de 40 est la faute du Front Populaire… Entre temps tous les moyens sont bons, y compris ceux de la stigmatisation complotiste, pour ravauder comme on peut le tissu de la croyance menacée de partir en lambeaux. Si l’euroscepticisme du peuple mène au conspirationnisme, il semble que l’eurocrétinisme des élites y conduise tout aussi sûrement…

Frédéric Lordon – 24/08/2012 – La pompe à phynance

Notes

[1] Le coefficient de leviérisation désigne le multiple de dette, par rapport à ses fonds propres, qu’une banque peut contracter pour financer ses positions sur les marchés.

[2] Lire, dans l’édition de septembre du Monde diplomatique, en kiosques le mercredi 29 août, Richard Hofstadter, « Le style paranoïaque en politique ».

[3] Puisqu’avant de devenir Premier ministre, Georges Pompidou a été banquier d’affaire chez Rothschild. On remarquera tout de même que, banquier, il cesse de l’être en 1958 quand il devient directeur de cabinet de De Gaulle et que ladite loi date de 1973…

[4] Voir à ce sujet les contributions à la journée « Création monétaire » des Economistes Atterrés du 24 mars 2012, en particulier le texte d’Alain Beitone, « Idées fausses et faux débat à propos de la monnaie. Réflexion à partir de la “loi de 1973” ».

[5] 15 mai 2011.

[6] Cité in Libération, « DSK, la thèse du complot se répand sur le web », 15 mai 2011.

[7France Info, 2 juillet 2011.

[8LCI, 3 juillet 2011.

[9Libération, 15 mai 2011.

[10Libération, blog Coulisses de Bruxelles, 24 septembre 2008. Sauf indication contraire, tous les titres qui suivent correspondent à des billets de ce blog.

[11] « Les marchés financiers américains attaquent l’euro », 6 février 2010.

[12Id.

[13] « Emmanuel Todd, Audiard d’or 2011 », 1er janvier 2012.

[14] « Comment le Financial Times alimente la crise », 30 mai 2010.

[15] « Le jeu trouble de Reuters dans la crise de la zone euro », 29 juillet 2012.

[16] « Comment les médias accroissent la panique des marchés », 26 novembre 2010.

[17] « Comment le Financial Times… », op. cit.

[18] « Les banques allemandes contre la zone euro », 31 juillet 2011.

[19] « Les agences de notation complices des spéculateurs ? », 21 septembre 2011.

[20] « Moody’s veut la peau du triple A français », 21 novembre 2011.

[21] « Les agences… », op. cit.

[22Id.

[23] Pour quelques développements sur cette question : « Extension du domaine de la régression », Le Monde Diplomatique, avril 2011 ; « Les gouvernement sont soumis au règne de l’opinion financière] », Marianne, 13 août 2011.

[24] « Les banques allemandes contre la zone euro », 31 juillet 2011.

[25] « C’est Hotel California : une fois entré dans l’euro, on ne peut plus en repartir », 3 octobre 2011.

Source: http://www.les-crises.fr/conspirationnisme-lordon/


Le chantage à 750 milliards de l’Arabie saoudite pour ne pas indemniser les victimes du 11 Septembre

Wednesday 27 April 2016 at 00:35

Article majeur dans un journal on ne peut plus mainstream : Le New York Times…

On aura tout vu…

New York Times : L’Arabie saoudite met en garde contre les retombées économiques en cas d’adoption par le Congrès du projet de loi sur le 11 Septembre

Source : The New York Times, le 16/04/2016

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WASHINGTON – L’Arabie saoudite a déclaré à l’administration Obama et aux membres du Congrès qu’elle vendrait des centaines de milliards de dollars d’actifs américains qu’elle détient si le Congrès adoptait un projet de loi qui pourrait la rendre responsable devant les tribunaux américains d’un rôle quelconque dans les attaques du 11-Septembre 2001.

L’administration Obama a fait pression sur le Congrès pour empêcher l’adoption du projet de loi, selon les responsables de l’administration et des assistants parlementaires des deux partis. Les menaces saoudiennes ont fait l’objet d’intenses discussions au cours des dernières semaines entre les législateurs, les fonctionnaires du département d’État et le Pentagone. Les fonctionnaires ont alerté les sénateurs sur les retombées diplomatiques et économiques de la loi.

Adel al-Jubeir, le ministre saoudien des Affaires étrangères lui-même, a délivré le message du royaume le mois dernier, lors d’un voyage à Washington. Il a dit aux membres du Congrès que l’Arabie saoudite serait contrainte de vendre jusqu’à 750 milliards de dollars en titres du Trésor et autres actifs aux États-Unis avant qu’ils courent le risque d’être gelés par les tribunaux américains.

Plusieurs économistes indépendants restent sceptiques quant à la poursuite de cette stratégie par les Saoudiens, en disant qu’une telle liquidation serait difficile à exécuter et finirait par paralyser l’économie du royaume. Mais la menace est un signe supplémentaire de l’escalade de la tension entre l’Arabie saoudite et les États-Unis.

L’administration, qui fait valoir que la législation mettrait les Américains en situation de risque juridique à l’étranger, a fait un lobbying tellement intense contre le projet de loi, qu’elle a rendu furieux certains députés et les familles des victimes du 11-Septembre. À leur avis, l’administration Obama a toujours pris parti pour le royaume et a contrecarré leurs efforts pour apprendre ce qu’ils croient être la vérité sur le rôle joué par des responsables saoudiens dans le complot terroriste.

« Il est stupéfiant de penser que notre gouvernement soutiendrait les Saoudiens contre ses propres citoyens » a déclaré Mindy Kleinberg, dont le mari est mort dans le World Trade Center le 11-Septembre, et qui fait partie d’un groupe de familles de victimes faisant pression pour l’adoption de la loi.

Le président Obama arrivera à Riyad mercredi pour des réunions avec le roi Salman et d’autres responsables saoudiens. Il est difficile de savoir si le différend à propos du projet de loi sur le 11-Septembre sera à l’ordre du jour des discussions.

Un porte-parole de l’ambassade saoudienne n’a pas répondu à un message lui demandant des commentaires.

Les responsables saoudiens ont longtemps nié que le royaume ait joué un rôle dans le complot du 11-Septembre et la Commission sur le 11-Septembre n’a trouvé « aucune preuve que le gouvernement saoudien en tant qu’institution, ou de hauts fonctionnaires saoudiens de manière individuelle, aient financé l’organisation. » Mais les critiques ont noté que la formulation restrictive de la commission a laissé ouverte la possibilité que d’autres fonctionnaires ou des membres du gouvernement saoudien auraient pu jouer un rôle. Des soupçons ont persisté, en partie à cause des conclusions d’une enquête du Congrès en 2002 sur les attentats qui a produit des preuves que des responsables saoudiens vivant aux États-Unis, à l’époque, avaient pris part au complot.

Ces conclusions, contenues dans 28 pages du rapport, n’ont toujours pas été rendues publiques.

Le litige arrive au moment où une critique bipartisane s’élève au Congrès à propos de l’alliance de Washington avec l’Arabie saoudite, depuis des décennies un allié indispensable de l’Amérique au Moyen-Orient et le coéquipier d’un partenariat guère examiné par le passé par les membres du Congrès. La semaine dernière, deux sénateurs ont présenté une résolution qui imposerait des restrictions sur les ventes d’armes américaines à l’Arabie saoudite, en augmentation pendant l’administration Obama.

Les familles des victimes du 11-Septembre ont utilisé les tribunaux afin d’essayer de tenir pour responsables les membres de la famille royale saoudienne, les banques saoudiennes et des organismes de bienfaisance que les plaignants ont accusé être un soutien financier saoudien au terrorisme. Ces efforts ont été largement entravés, en partie à cause d’une loi de 1976 qui donne aux nations étrangères une certaine immunité contre les poursuites devant les tribunaux américains.

Le projet de loi du Sénat vise à préciser que l’immunité accordée aux nations étrangères en vertu de la loi ne devrait pas s’appliquer quand ces nations se trouvent coupables d’attentats terroristes tuant des Américains sur le sol américain. Si le projet de loi était adopté par les deux chambres du Congrès et signé par le président, il pourrait ouvrir la voie à l’examen, au cours des procès sur le 11-Septembre, du rôle du gouvernement saoudien.

Des responsables de l’administration Obama rétorquent que l’affaiblissement des dispositions sur l’immunité souveraine mettrait le gouvernement américain, ainsi que ses citoyens et entreprises, en risque juridique à l’étranger parce que d’autres nations pourraient riposter avec leur propre législation. Le secrétaire d’État John Kerry a dit à des membres du Sénat en février que le projet de loi, dans sa forme actuelle, reviendrait à « exposer les États-Unis à des poursuites, à supprimer notre immunité souveraine et à créer un terrible précédent. »

Les partisans du projet de loi ont précisé que la loi est volontairement rédigée de façon très restrictive – en ne concernant que des attaques sur le sol américain – afin de réduire les possibilités de rétorsion de la part d’autres pays.

Pendant une séance d’information à huis clos au Capitole, le 4 mars, Anne W. Patterson, sous-secrétaire d’État en charge du Proche-Orient, et Andrew Exum, haut fonctionnaire spécialiste de la politique au Moyen-Orient au Pentagone, ont dit aux membres de la Commission des forces armées du Sénat que les troupes américaines et les civils pourraient être en danger au niveau juridique, si les autres pays décident de se venger et de dépouiller les Américains de leur immunité à l’étranger. Ils ont aussi particulièrement discuté des menaces économiques saoudiennes, s’étendant sur leurs répercussions si elles étaient réalisées.

John Kirby, un porte-parole du département d’État, a déclaré dans un communiqué que l’administration est aux côtés des victimes du terrorisme, « en particulier de ceux qui ont souffert et ont tant perdu le 11-Septembre. »

Edwin M. Truman, chercheur à l’Institut Peterson de Recherche Economique Internationale, a dit qu’il pensait que les Saoudiens ont très probablement fait une « menace en l’air ». La vente de centaines de milliards de dollars d’actifs américains serait non seulement techniquement difficile à réaliser, dit-il, mais aussi très probablement la cause de turbulences sur les marchés internationaux, qu’on reprocherait aux Saoudiens.

De plus, a-t-il déclaré, cela pourrait déstabiliser le dollar américain – la monnaie sur laquelle le riyal saoudien est indexé.

« La seule façon dont ils pourraient nous punir les punirait eux-mêmes, » a déclaré M. Truman.

Le projet de loi est une anomalie dans un Congrès déchiré par des luttes acharnées entre tendances, en particulier au cours d’une année électorale. Il est parrainé par le sénateur John Cornyn, républicain du Texas, et par le sénateur Chuck Schumer, démocrate de New York. Il a le soutien d’une coalition improbable de sénateurs libéraux et conservateurs, dont Al Franken, démocrate du Minnesota, et Ted Cruz, républicain du Texas. Il a été adopté par la commission judiciaire en janvier sans contestation.

« Puisque notre nation affronte des réseaux terroristes nouveaux et en expansion, qui visent nos citoyens, arrêter la source de financement des terroristes devient d’autant plus important » a déclaré M. Cornyn le mois dernier.

L’alliance avec l’Arabie saoudite s’est fragilisée au cours des dernières années où la Maison-Blanche a essayé de renouer avec l’Iran – ennemi exécré par l’Arabie saoudite – dans le contexte des récriminations entre responsables américains et saoudiens sur le rôle que les deux pays devraient jouer pour la stabilité du Moyen-Orient.

Mais l’administration a soutenu l’Arabie saoudite sur d’autres fronts, notamment en fournissant au pays des renseignements sur les cibles et le soutien logistique pour la guerre au Yémen. L’armée saoudienne utilise des jets et largue des bombes qu’elle a achetés aux États-Unis – une partie des milliards de dollars de transactions d’armes qui ont été négociées avec l’Arabie saoudite et d’autres pays du golfe Persique au cours de l’administration Obama.

La guerre a été un désastre humanitaire et a nourri une résurgence d’al-Qaïda au Yémen, conduisant à la résolution du Congrès d’appliquer de nouvelles restrictions aux ventes d’armes au royaume. Le sénateur Christopher S. Murphy, démocrate du Connecticut, l’un des auteurs de la résolution et membre du Comité des Affaires étrangères du Sénat, a déclaré le Congrès « irresponsable » dans ses fonctions de surveillance des ventes d’armes, en particulier celles destinées à l’Arabie saoudite.

« Mon principal désir est que notre relation avec l’Arabie saoudite en vienne à un plus grand degré de conditionnalité qu’à l’heure actuelle, » a-t-il déclaré.

Jennifer Steinhauer a contribué au reportage.

Source : The New York Times, le 16/04/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

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Je vous laisse donc comparer la couverture de cet article du New York Times avec son “équivalent” français (enfin, si on peut dire…), Le Monde :

Le projet de loi sur le 11-Septembre qui empoisonne Barack Obama avant sa visite en Arabie saoudite

Source : Le Monde, AFP, 19-04-2016

Interrogé par la chaîne CBS, lundi 18 avril, Barack Obama s’est dit opposé à un projet de loi qui permettrait de traduire les dirigeants saoudiens devant des tribunaux américains pour les attentats du 11 septembre 2001. Des déclarations qui interviennent à l’avant-veille de sa visite dans le royaume wahhabite.

Le texte, soutenu par des démocrates et des républicains, n’a pas encore été soumis à un vote au Congrès, mais il suscite déjà de vives tensions. M. Obama a d’ores et déjà annoncé qu’il y mettrait son veto. Ce sujet épineux risque de compliquer encore un peu plus la venue du président à Riyad.

Selon le New York Times, le ministre des affaires étrangères saoudien, Adel Al-Joubeir, a averti des élus, lors d’une visite à Washington le mois dernier, de possibles conséquences coûteuses si ce projet de loi était adopté. Le quotidien affirme qu’il a notamment menacé de vendre quelque 750 milliards de dollars en bons du Trésor américain et autres biens détenus aux Etats-Unis.

Principe de « l’immunité des États »

Le texte permettrait aux familles des victimes du 11-Septembre de poursuivre, notamment, Riyad pour obtenir des dédommagements. Aucune implication de l’Arabie saoudite n’a jamais été démontrée, mais 15 des 19 pirates de l’air étaient des ressortissants du pays.

« Notre inquiétude par rapport à cette loi n’est pas liée à son impact sur nos relations avec un pays en particulier, elle est liée à un principe important du droit international : l’immunité des Etats », a souligné un peu plus tôt dans la journée Josh Earnest, porte-parole de l’exécutif américain.

Remettre en cause celui-ci pourrait, en cas d’adoption de textes similaires par d’autres Etats, « représente un risque significatif pour les Etats-Unis, nos contribuables, nos militaires et nos diplomates ». Ce principe de l’immunité « permet aux pays de résoudre leurs différends grâce à la diplomatie et non pas à travers les tribunaux ».

Rôle possible de gouvernements étrangers

Barack Obama rencontrera mercredi le roi, Salman Al-Saoud, à Riyad avant de participer le lendemain à un sommet avec les pays du Conseil de coopération du Golfe − dont sont aussi membres Bahreïn, les Emirats arabes unis, le Koweït, le Qatar et Oman.

Zacarias Moussaoui, le Français condamné en lien avec les attentats du 11-Septembre et surnommé le « 20e pirate de l’air », avait assuré à des avocats américains en février que des membres de la famille royale saoudienne avaient versé des millions de dollars à Al-Qaida dans les années 1990.

Une affirmation immédiatement rejetée par l’ambassade d’Arabie saoudite, mais qui avait rouvert le débat à Washington sur la nécessité de publier une partie encore classée du rapport de la commission d’enquête américaine sur le 11-Septembre. Vingt-huit pages qui évoqueraient, selon certains, le rôle possible de gouvernements étrangers.

Source : Le Monde, AFP, 19-04-2016

Et puis c’est un seul article, hein… À comparer au New York Times :

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Source: http://www.les-crises.fr/le-chantage-a-750-milliards-de-larabie-saoudite/


La réponse de la presse new-yorkaise aux Saoudiens : Ordures royales !

Wednesday 27 April 2016 at 00:30

Le New-York Daily News est des plus grands journaux américains, tirant à 700 000 exemplaires. De positionnement plutôt centriste, a gagné dix prix Pulitzer.

“Bien qu’il soit obligé de suivre ses concurrents dans une certaine forme de sensationnalisme, le journal est toujours respecté au regard de la qualité de ses rédacteurs. On lui reconnaît également une excellente couverture médiatique de tous les événements new-yorkais, et sa rubrique du courrier des lecteurs est un bon indicateur de l’état d’esprit de la ville.” (Wikipédia)

Évidemment, au vu du scandale sur l’implication présumée des Saoudiens dans le 11 Septembre, puis de leur chantage à 750 milliards pour ne pas être poursuivis, le New-York Daily News n’a pas super bien réagi…

Voici sa Une du 17 avril 2016 : ORDURE ROYALE : les familles du 11 Septembre révoltées par le chantage à 750 Md$ de l’Arabie saoudite

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L’article : L’Arabie Saoudite nous met le révolver sur la tempe, ou C’est une Carabine saoudite

(N.B. jeu de mots intraduisible avec sawed-off shotgun = fusil à canon scié)

Le roi Salman d’Arabie saoudite a menacé le ministre des Affaires étrangères de liquider près de 750 milliards de dollars d’actifs américains, si le Congrès adopte un projet de loi qui permettrait de poursuivre son gouvernement pour le 11 Septembre.

Indignées, les familles des victimes du 11 Septembre ont accusé samedi les représentants de l’Arabie saoudite de faire chanter les Etats-Unis pour dissimuler leur rôle supposé de financiers des terroristes du World Trade Center.

De vives attaques ont suivi une information de samedi selon laquelle les Saoudiens menaçaient de liquider jusqu’à 750 milliards de dollars d’actifs américains, si le Congrès adopte un projet de loi qui permettrait de soumettre leur gouvernement à des poursuites sur le 11 Septembre.

Les familles qui ont perdu des êtres chers dans les attaques terroristes disent que le Président Obama, qui fait activement pression pour faire capoter le projet, selon le New York Times,
est dans l’erreur.

« Je suis furieux. C’est une véritable gifle pour les familles des victimes du 11 Septembre », s’exclame Jim Riches, directeur adjoint à la retraite des pompiers de New York, dont le fils Jimmy, pompier, est mort dans l’écroulement du World Trade Center.

« Qu’ils gardent leur argent. Nous ne voulons pas de leur argent. Il ne vaut pas trois mille vies humaines. On voit clair dans leur jeu. »
Riches a dénoncé Obama quelque cinq mois avant le 15e anniversaire des attaques.

« Comment en toute conscience peut-il faire ça ? » demandait Riches. « En attendant, ils nous bafouent. Nous devons défendre nos principes. »

Terry Strada, dont le mari Thomas était courtier chez Cantor Fitzgerald au 104e étage, se fait porte-parole des autres familles en exhortant l’administration Obama à défendre ses intérêts contre le chantage financier des Saoudiens.

« Pourquoi cèdent-ils au gouvernement saoudien au lieu de protéger le peuple américain ? » a-t-elle demandé. « Ils sont tout simplement en train d’essayer de dissimuler les sales petits secrets des Saoudiens. On ne les croit pas. »

Les membres des familles font actuellement appel d’une décision prise l’an dernier, qui protège l’Arabie saoudite de poursuites contre le pays qui a soutenu les terroristes du 11 Septembre. Quinze des dix-neuf pirates de l’air étaient des citoyens saoudiens.

Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Adel al-Jubeir, lors d’une visite à Washington le mois dernier, a informé les législateurs américains de l’éventualité d’une vente de titres du Trésor et d’autres actifs américains, selon le Times. Une démarche sans doute nécessaire pour éviter un éventuel gel d’actifs à la suite d’une décision d’une cour de justice américaine.

Une démarche qui pourrait se révéler déstabilisante pour le pays. […]

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Voici la Une du 21 avril 2016 : Le pétrole vous protège, sire. Au centre de la colère à cause de sa protection des Saoudiens contre des poursuites liées au 11 Septembre, Obama fait ami-ami avec le roi.

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Bon, donc, un état d’esprit qui ne mérite apparemment pas un article dans la presse chez nous…

Mais ce n’est pas grave, vu qu’on est chez les fous…

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(Bam = Obama)

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(ami ou ennemi ?)

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Source: http://www.les-crises.fr/la-reponse-de-la-presse-new-yorkaise-aux-saoudiens-ordures-royales/


Miscellanées du mercredi (Delamarche, Sapir, Béchade, Onfray, ScienceEtonnante)

Wednesday 27 April 2016 at 00:05

I. Olivier Delamarche

Un grand classique : La minute de Delamarche: Etats-Unis: “Les chiffres de création d’emplois sont grotesques” – 25/04

Olivier Delamarche VS Alexandre Baradez (1/2): Economie mondiale: le pire est-il derrière nous ? – 25/04

Olivier Delamarche VS Alexandre Baradez (2/2): L’embellie sur le marché des matières premières est-elle un signe d’amélioration de l’économie mondiale ? – 25/04

II. Philippe Béchade

Philippe Béchade VS Sébastien Korchia (1/2): Le pétrole n’est-il plus un risque systémique pour les marchés ? – 20/04

Philippe Béchade VS Sébastien Korchia (2/2): La BCE pourra-t-elle émettre une nouvelle mesure pour relancer l’inflation ? – 20/04

III. Jacques Sapir

La minute de Jacques Sapir: TAFTA: “Le gain est quasi-nul” – 26/04

Jacques Sapir VS Nicolas Doisy (1/2): La Fed haussera-t-elle deux fois ses taux directeurs d’ici fin 2016 ? – 26/04

Jacques Sapir VS Nicolas Doisy (2/2): Quel intérêt pour les Etats-Unis de garder le Royaume-Uni dans l’UE ? – 26/04

IV. Michel Onfray

Le Monde selon Michel Onfray : Samedi 23 avril 2016

V. ScienceEtonnante

Les cellules souches induites par reprogrammation — Science étonnante # 9


Petite sélection de dessins drôles – et/ou de pure propagande…

 

Images sous Copyright des auteurs. N’hésitez pas à consulter régulièrement leurs sites, comme les excellents Patrick Chappatte, Ali Dilem, Tartrais, Martin Vidberg, Grémi.

Source: http://www.les-crises.fr/miscellanees-du-mercredi-delamarche-sapir-bechade-onfray-scienceetonnante/


[SCOOP] L’explosive émission 60 Minutes sur les 28 Pages du 11 Septembre

Tuesday 26 April 2016 at 01:45

Nous vous proposons aujourd’hui la vidéo (sous-titrée par les lecteurs de ce blog)) qui a mis le feu aux poudres aux États-Unis à propos du rôle supposé de l’Arabie Saoudite dans la 11 Septembre.

Le reportage a été diffusé sur CBS dans l’émission 60 Minutes, probablement la plus prestigieuse émission de reportages aux États-Unis, sorte d’Envoyé spécial.

Il a donc été vu par un peu moins de 20 millions d’Américains

Comme nous l’avons vu, cela n’a pas intéressé les médias français. Prenons juste l’exemple du Monde :

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1 seul article…

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Pas intéressant ? “Selon certains” ? Notez bien qui sont les “certains”…

Le Monde, une publicité vivante pour le retour du pilori

À vous de juger en tous cas, vous en avez désormais les moyens… :)

L’émission 60 Minutes du 10 avril 2016 :

Pour celles et ceux qui n’ont pas vu la 1ère vidéo de notre série “28 pages”, présentant plusieurs témoignages de parlementaires les ayant lues, elle est là.

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Le texte suivant est une retranscription de « 28 pages » diffusée le 10 avril 2016. Steve Kroft est le journaliste. 

Vous pouvez retrouver le verbatim original ici.

L’ancien sénateur Bob Graham et d’autres exhortent l’administration Obama à déclassifier les pages expurgées d’un rapport contenant des secrets sur le 11-Septembre.

Dans 10 jours, le président Obama se rendra en Arabie saoudite à un moment de profonde défiance entre les deux alliés et de doutes persistants sur l’engagement saoudien dans la lutte contre l’extrémisme islamique violent.

Cela survient également à un moment où la Maison-Blanche et les responsables du renseignement examinent la possibilité de déclassifier un des documents les plus sensibles du pays – connu sous le nom de « 28 pages ». Elles concernent le 11-Septembre et l’existence éventuelle d’un réseau saoudien de soutien aux pirates de l’air lorsqu’ils étaient aux États-Unis.

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Pendant 13 ans, les 28 pages ont été enfermées dans un coffre secret. Seul un petit groupe de personnes les ont vues. Ce soir, vous entendrez quelques-unes des personnes qui les ont lues et pensent, tout comme les familles des victimes du 11-Septembre, qu’elles devraient être déclassifiées.

Bob Graham : Je pense qu’il n’est pas plausible que 19 personnes, dont la plupart ne parlaient pas anglais, dont la plupart n’avaient jamais été aux États-Unis auparavant, dont beaucoup n’avaient pas fait d’études secondaires – aient pu effectuer une tâche si compliquée sans un certain soutien à l’intérieur des États-Unis.

Steve Kroft : Et vous croyez que les 28 pages sont cruciales pour cela ? Vous comprenez…

Bob Graham : Je pense qu’elles sont un élément clé.

L’ancien sénateur américain Bob Graham a essayé d’obtenir la publication des 28 pages depuis le jour où elles ont été classifiées en 2003, lorsqu’il a joué un rôle majeur dans la première enquête du gouvernement sur le 11-Septembre.

Bob Graham : Je reste profondément troublé par la quantité de contenu qui a été censuré dans ce rapport.

À l’époque, Graham était président du Comité sénatorial sur le renseignement et coprésident de l’enquête bipartite conjointe du Congrès sur les défaillances du renseignement entourant les attaques. La Commission d’enquête mixte a examiné un demi-million de documents, a interrogé des centaines de témoins et a produit un rapport de 838 pages, moins le dernier chapitre qui a été masqué – retiré par l’administration Bush pour des raisons de sécurité nationale.

Bob Graham ne discutera pas des informations classifiées dans les 28 pages, il dira seulement qu’elles décrivent un réseau de personnes dont il pense qu’elles ont aidé les pirates de l’air lorsqu’ils étaient aux États-Unis.

Steve Kroft : Vous êtes convaincu que le soutien est venu de l’Arabie saoudite ?

Bob Graham : En grande partie.

Steve Kroft : Et quand nous disons « les Saoudiens », vous voulez dire le gouvernement, le —

Bob Graham : Je veux dire —

Steve Kroft : – des personnes riches du pays ? Des fondations —

Bob Graham : Tout cela à la fois.

Graham et d’autres pensent que le rôle des Saoudiens a été minimisé afin de protéger une relation délicate avec un royaume compliqué où dirigeants, royauté, richesse et religion s’entremêlent tous profondément dans ses institutions.

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Bob Graham | CBS NEWS

Porter Goss, républicain qui, au titre de la Chambre des représentants, coprésidait l’enquête mixte avec le sénateur Graham, et devint plus tard directeur de la CIA, estime vraiment qu’une version non censurée des 28 pages devrait être incluse dans le rapport final. Les deux hommes l’ont fait valoir au FBI et à son directeur de l’époque, Robert Mueller, lors d’une réunion en tête à tête.

Porter Goss : Et ils résistaient fermement à propos des 28 pages et disaient « Non, ça ne peut pas être déclassifié en ce moment. »

Steve Kroft : Auriez-vous demandé au directeur du FBI pourquoi c’était classifié ?

Porter Goss : Oui, nous avons demandé ça, en substance, et la réponse était : « Nous l’avons dit, ça doit être classifié. »

Goss dit qu’il ne savait pas pourquoi le dossier était alors classifié, et il ne sait pas pourquoi il l’est toujours. Les pages sont enfermées sous le Capitole dans des abris protégés appelés Centre d’informations compartimenté sécurisé, ou SCIF en jargon gouvernemental. Et c’est là le plus loin où ont pu aller nos caméras. Une zone ultra réservée où les membres du Congrès ayant les autorisations nécessaires peuvent lire les documents sous haute surveillance. Aucune prise de note n’est autorisée.

Tim Roemer : Tout va mener à ça, Steve.

Tim Roemer, un ancien élu démocrate du Congrès et ambassadeur des États-Unis en Inde, a lu les 28 pages plusieurs fois. Une première fois en tant que membre de l’enquête mixte et plus tard comme membre de la commission de sages du 11-Septembre qui reprenait les investigations quand celles du Congrès ont pris fin.

Steve Kroft : Est-il vraiment difficile de pouvoir lire les 28 pages ?

Tim Roemer : Très difficile. Il est difficile de mettre les yeux dessus.

Roemer et d’autres qui ont en effet pu lire les 28 pages les décrivent comme un document de travail similaire à un rapport de jury d’accusation ou de police comprenant des attestations perturbantes – certaines vérifiées, d’autres non. Elles exposent la possibilité d’une assistance officielle saoudienne pour deux des pirates de l’air établis en Californie du Sud. Cette information contenue dans les 28 pages a été remise à la commission du 11-Septembre pour de plus amples recherches. Il a été répondu à certaines questions dans le rapport final de la commission, mais pas à toutes.

Steve Kroft : Est-ce qu’il y a des informations dans les 28 pages qui, si elles étaient déclassifiées, surprendraient les gens ?

Tim Roemer : Évidemment, elles vont vous surprendre. Et vous allez être surpris par certaines réponses qui attendent là aujourd’hui dans le rapport de la Commission du 11-Septembre, sur ce qui s’est passé à San Diego et ce qui s’est passé à Los Angeles. Et quelle était l’implication saoudienne.

Beaucoup de ces informations surprenantes sont enfouies dans des notes en bas de page et dans des annexes du rapport du 11-Septembre, en partie dans les archives publiques officielles, mais la plupart inconnues du grand public. Voici certains faits, mais pas tous :

En janvier 2000, le premier pirate de l’air a atterri à Los Angeles après avoir assisté à un sommet d’al-Qaïda à Kuala Lumpur en Malaisie. Les deux ressortissants saoudiens, Nawaf al-Hazmi et Khalid al-Mihdhar, sont arrivés avec des compétences très limitées en langue et sans expérience de la culture occidentale. Pourtant, grâce à une incroyable série de circonstances, ils sont arrivés à obtenir tout ce dont ils avaient besoin, d’un logement à des leçons de pilotage.

Tim Roemer : L.A., San Diego, vous savez, c’est vraiment un nid de guêpes. C’est vraiment à cela que je continue à penser, presque quotidiennement.

Durant leurs premiers jours à L.A., des témoins repèrent les deux futurs pirates de l’air à la mosquée du roi Fahd en compagnie de Fahad al-Thumairy, un diplomate du consulat saoudien connu pour ses opinions extrémistes. Plus tard, les enquêteurs du 11-Septembre le jugeront menteur et suspect ; en 2003, on le soupçonnera d’avoir des liens avec une activité terroriste : on lui interdira de rentrer aux États-Unis.

Tim Roemer : C’est une personne très intéressante en ce qui concerne le volet “qui a aidé qui ?” du 11-Septembre – à Los Angeles et San Diego, avec ces deux terroristes qui se trouvaient en terre inconnue.

Des factures de téléphone montrent que Thumairy était aussi en contact régulier avec un homme : Omar al-Bayoumi, un mystérieux saoudien devenu le plus grand mécène des pirates de l’air. C’était un employé fantôme avec un travail fictif chez un sous-traitant saoudien de l’aviation, à l’extérieur de Los Angeles. En même temps, il percevait un salaire du gouvernement saoudien.

Steve Kroft : Vous pensez que Bayoumi était un agent saoudien ?

Bob Graham : Oui, et –

Steve Kroft : Qu’est-ce qui vous fait penser cela ?

Bob Graham : – Eh bien, tout d’abord, même avant le 11-Septembre, il était sur les listes du FBI comme agent saoudien.

Le matin du 1er février 2000, Bayoumi s’est rendu au bureau du consulat saoudien où travaillait Thumairy. Il est ensuite allé déjeuner dans un restaurant oriental sur Venice Boulevard où il prétendra, plus tard, avoir fait, par hasard, la connaissance des deux futurs pirates de l’air.

Tim Roemer : Hazmi et Mihdhar sont, comme par magie, tombés sur Bayoumi dans un restaurant, ce qui, comme le prétend ce dernier, est une coïncidence, et ce dans l’une des plus grandes villes des États-Unis.

Steve Kroft : Et il décide alors de les prendre sous son aile.

Tim Roemer : Il décide non seulement de les prendre sous son aile, mais aussi de les aider à déménager à San Diego et à s’y établir.

À San Diego, Bayoumi leur a trouvé un appartement dans son propre immeuble, leur a avancé la caution, et a été cosignataire de leur bail. Il a même donné une petite fête en leur honneur et les a présentés à d’autres musulmans à même d’aider les pirates à se procurer des papiers, et à s’inscrire à des cours d’anglais et à une école de pilotage. Il n’y a pas de preuve que Bayoumi ou Thumairy aient su ce que les futurs pirates envisageaient de faire, et il est possible qu’ils aient seulement essayé d’aider des coreligionnaires.

Mais le jour même où les pirates arrivaient à San Diego, accueillis par Bayoumi, on a téléphoné quatre fois du portable de ce dernier à l’imam de la mosquée de San Diego, Anwar al-Awlaki, dont le nom devrait vous être familier.

Awlaki, né en Amérique, allait avoir, une décennie plus tard, la sinistre réputation d’être responsable de la propagande d’al-Qaïda et important agent au Yémen, jusqu’à ce qu’un drone de la CIA ne l’abatte. En janvier 2001, toutefois, un an après être devenu le conseiller spirituel des pirates, il a quitté San Diego pour Falls Church, en Virginie. Quelques mois plus tard, Hazmi, Mihdhar et trois autres pirates allaient l’y rejoindre.

Tim Roemer : Ça fait beaucoup de coïncidences, et beaucoup de fumée. Est-ce que c’est assez pour qu’on se sente mal à l’aise, et pour qu’on ait envie de creuser plus profondément et de déclassifier ces 28 pages ? Absolument.

Personne, peut-être, n’est plus avide de lire ces 28 pages que les avocats Jim Kreindler et Sean Carter qui représentent les proches des victimes du 11-Septembre dans l’action en justice qu’ils intentent contre le royaume saoudien. Ils soutiennent que les institutions de ce pays ont fourni de l’argent à al-Qaïda, en sachant que ce groupe menait une guerre contre les États-Unis.

Jim Kreindler : Ce que nous faisons devant le tribunal, c’est évoquer l’histoire qui doit sortir. Mais cela a été difficile pour nous, parce que pendant de nombreuses années nous n’obtenions ni la franchise ni la coopération qu’à notre avis notre gouvernement doit au peuple américain, et surtout aux familles de ceux qui ont été tués.

Le gouvernement des États-Unis a même soutenu la position saoudienne au tribunal – ils ne peuvent être assignés en justice parce qu’ils disposent de l’immunité des États souverains. Selon le rapport de la commission du 11-Septembre, l’Arabie saoudite a depuis longtemps été considérée comme la source essentielle de financement d’al-Qaïda grâce à ses riches citoyens et au soutien substantiel du gouvernement. Cependant, quand le rapport a été publié, la phrase qui a attiré le plus l’attention est la suivante :

« Nous n’avons trouvé aucune preuve que le gouvernement saoudien en tant qu’institution, ou que de hauts fonctionnaires saoudiens à titre individuel, aient financé l’organisation. »

Selon l’avocat Sean Carter, c’est la ligne du rapport du 11-Septembre qui a été rédigée avec le plus de soin et qui a été la plus mal comprise.

Sean Carter : Quand les auteurs affirment ne pas avoir trouvé de preuve que de hauts fonctionnaires saoudiens aient individuellement financé al-Qaïda, il est remarquable qu’ils n’excluent pas que des personnes, qui étaient des responsables mais qu’ils ne considéraient pas comme de hauts fonctionnaires, aient agi dans ce sens. C’est là qu’est le fond de l’action en justice des familles : des membres du gouvernement et des responsables de niveau inférieur, qui sympathisaient avec la cause de Ben Laden, ont aidé à accomplir les attentats et contribué au soutien du réseau de l’organisation.

Pourtant, pendant plus d’une décennie, le royaume a prétendu que cette phrase-là le disculpait en ce qui concerne le 11-Septembre, sans tenir compte de ce qui pouvait bien se trouver dans les 28 pages.

Bob Kerrey : Ils ne sont pas disculpés. Nous l’avons dit, avec ce rapport, nous n’avons pas disculpé les Saoudiens.

L’ancien sénateur Bob Kerrey est un autre des dix membres de la commission du 11-Septembre à avoir lu les 28 pages, et il pense qu’on devrait en autoriser la diffusion. Il a fait une déclaration sous serment pour soutenir l’action en justice des proches des victimes du 11-Septembre.

Bob Kerrey : On ne peut pas fournir de l’argent aux terroristes et puis dire : « Je n’ai rien à voir avec ce qu’ils font. »

Steve Kroft : Pensez-vous que toutes les pistes esquissées dans les 28 pages ont trouvé des réponses dans le rapport du 11-Septembre ? Toutes les questions qui ont été posées ?

Non, non. En règle générale, la commission du 11-septembre n’est pas entrée dans chaque détail du complot. Non. On n’a pas eu le temps, on n’a pas eu les moyens. On n’est certainement pas allés jusqu’au fond de l’enquête en ce qui concerne l’Arabie saoudite.

Steve Kroft : Selon vous, peut-on attribuer à des coïncidences tout ce qui s’est passé à San Diego ?

John Lehman : Je ne crois pas aux coïncidences.

John Lehman, qui était secrétaire d’État à la Marine dans l’administration Reagan, affirme que lui et les autres anciens membres de la commission du 11-Septembre souhaitent en majorité que les 28 pages soient publiées.

John Lehman : Nous ne sommes pas une bande de ploucs venus à Washington pour la première fois, pour cette commission. Je veux dire, nous, enfin vous savez, on n’est pas nés de la dernière pluie, on en a vu des politiques de sécurité nationale. On a tous, au cours de notre carrière, traité de sujets top secret et cloisonnés relatifs aux divers aspects de la sécurité. On sait bien quand quelque chose doit rester confidentiel. Et là, franchement, ces 28 pages n’entrent absolument pas dans cette catégorie.

Lehman ne doute pas que certains hauts fonctionnaires saoudiens savaient qu’al-Qaïda recevait de l’aide, mais il ne croit pas que cela n’ait jamais été une politique officielle. Il ne croit pas non plus que cela blanchisse les Saoudiens.

John Lehman : Ce n’était pas un accident si 15 des 19 pirates étaient des Saoudiens. Ils sont tous allés dans des écoles saoudiennes. Ils ont baigné, depuis leurs premiers jours d’école, dans ce type d’islam particulièrement intolérant.

Lehman parle du wahhabisme, cette forme d’islam, ultraconservatrice et puritaine, qui est implantée ici et qui s’insinue dans tous les secteurs de la société. Il n’y a pas de séparation de l’Église et de l’État. Après le pétrole, le wahhabisme fait partie des plus grandes exportations du royaume. Les religieux saoudiens, à qui l’on confie les sanctuaires les plus sacrés de l’islam, ont un immense pouvoir et disposent de milliards de dollars pour propager leur foi. Ils construisent à travers le monde des mosquées et des écoles religieuses, qui sont devenues des terrains de recrutement pour extrémistes violents. John Lehman, membre de la Commission du 11-Septembre, affirme que tout ceci est mis en évidence dans les 28 pages.

John Lehman : Il ne va pas y avoir là de preuves irréfutables qui vont provoquer une énorme controverse. Toutefois ces pages illustrent, de façon très condensée, le genre d’événements qui ont eu lieu et elles aideraient vraiment le peuple américain à comprendre pourquoi, quoi, comment. Comment se fait-il que ces gens surgissent soudain, partout dans le monde, pour participer au djihad ?

Tim Roemer : Vous voyez, les Saoudiens ont même dit qu’ils soutenaient la publication de ces pages. Nous devrions les déclassifier. Est-ce que c’est explosif, Steve ? Est-ce que ça ne serait pas un peu comme ouvrir la boîte de Pandore, voir des serpents en sortir ? Bien sûr, mais je pense que nous avons besoin d’avoir, avec les Saoudiens, une relation où les deux pays collaborent contre le terrorisme. Ce qui n’a pas toujours été le cas.

Fin de l’émission diffusée

Bonus Internet de l’émission 60 minutes (non diffusé – source à 1’00)

Question : “D’autres noms sont-ils mentionnés ?
John Lehman : Oui… Le spectateur moyen de 60 minutes les reconnaîtrait immédiatement.

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

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APPEL : Nous aurions besoin dans les prochains jours de personnes

Nous contacter ici, merci

60 minutes 28 pages

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Source: http://www.les-crises.fr/lexplosive-emission-60-minutes-sur-les-28-pages-du-11-septembre/


Elections Américaines : Pourquoi les médias enragent, par Stephane Trano

Tuesday 26 April 2016 at 00:36

Excellent Stéphane Trano, journaliste habitant aux États-Unis, comme d’habitude

Source : Marianne, Stephane Trano, 21-04-2015

Etonnante démocratie américaine, où la somme des intérêts aboutit, malgré tous les efforts du quatrième pouvoir pour maintenir le politiquement correct, à l’expression de toutes les tendances de la population.

New York, le 19 avril 2016 - Photo: AlJazeera

New York, le 19 avril 2016 – Photo: AlJazeera

Les faiseurs d’opinion font grise mine. Dans le monde idéal souhaité par les mass médias, les journalistes ont une mission civilisatrice : eux seuls peuvent trier le bon grain de l’ivraie.

Le truculent Donald Trump dérange au plus haut point ces sociologues improvisés, ils offrent donc à son principal concurrent, l’ultra-conservateur Ted Cruz, la Une du Time, les honneurs de CNN, les caricatures anti-Trump du Boston Globe et, bien sûr, les machines de guerre du Washington Post ou du Huffington Post. Tous de grands prescripteurs de démocratie, à l’instar de nos Vincent Bolloré et Jacques Séguéla, ou de vrais penseurs comme les très distinguées Apolline de Malherbe ou Léa Salamé, en France.

Le sénateur du Texas proclame à longueur de discours sa foi évangélique et, dans la pure tradition de ces acharnés de Dieu, le principe que toute éducation, toute justice et toute action politique ne valent que si elles sont précédées par la vérité divine. Une vérité qui place au sommet de la Constitution américaine le fameux Bill of Rights, lequel, comme son nom ne l’indique pas, assure la liberté religieuse dans ses plus grandes largeurs, c’est à dire le droit de récuser l’altérité lorsque celle-ci ne suit pas à la lettre l’immaculée conception de la famille pure et propre.

Mais cela va très bien à l’empire médiatique de Ted Turner et consorts : le TorquemaCruz de la politique américaine est un homme du système, bien éduqué, au langage acéré mais poli, qui peut vous regarder droit dans les yeux pour denier votre droit à exister mais avec un sourire exquis. A l’inverse, ce Donald Trump bouffi, rougeaud, un monument de la coiffure curieuse, donne des hauts le cœur aux civilisateurs : il traite les femmes comme les hommes, quitte à s’en prendre à leur physique de fer à repasser, s’en prend aux illégaux mexicains qui font commerce de la drogue aux Etats-Unis – ce qui à l’évidence n’est pas vrai puisque CNN l’a démenti – et dit tout haut que les Arabes n’aiment pas l’Amérique, ce qui est forcément faux puisque comme chacun le sait, ils ont un amour fou pour cette terre de liberté. Ils ont trouvé l’analogie – Hitler -, et ont convaincu les médias internationaux, français compris, de se joindre à leur effort pour faire échouer ce nouveau génocide annoncé, pire, cette troisième guerre mondiale et donc la fin du monde, qui surviendra en cas d’élection du candidat Trump.

Mais voilà, les faiseurs d’opinion font quand même grise mine. Ils ont un gros problème : le peuple parle. Même New York, le farouche état dominé par les démocrates, a offert 60 pour cent de ses suffrages au milliardaire éructant, chassant Cruz de ses terres et le renvoyant à ses manœuvres de coulisses.

De Trump à Sanders, ces électeurs qui font un bras d’honneur au système

En attendant que le parti républicain ne trouve la parade pour enrayer la progression de Trump et les moyens de lui faire échec lors de la convention de Cleveland, nos amis médiatiques s’en prennent désormais à l’autre durillon qui les fait souffrir dans leurs chaussures : Bernie Sanders. Une horreur.

Un type de 74 ans qui prétend que le pouvoir de l’argent pose problème, ce qui est fort malsain au pays de Google. Un sénateur d’un état rural ouvertement socialiste – abomination – qui pousse le vice jusqu’à parler de « révolution » et entraîne de nombreux jeunes imbéciles dans son sillage, les détournant de leur devoir premier : devenir des consommateurs surendettés et respectueux du système qui leur veut du bien.

Ils ont donc décrété que la campagne aigre mené par cet « indépendant » (donc pas démocrate) contre Hillary Clinton va finir par blesser sérieusement le parti, ce qui serait fâcheux. Juif, pro-palestinien, détesté par la plupart des noirs américains, partisan de l’infâme taxe Tobin, défendant le programme le plus ambitieux pour faire basculer l’économie américaine du côté des énergies propres, ainsi que le principe inconcevable d’une assurance santé universelle (autre chose que la catastrophe de l‘Obamacare), le bonhomme pousse le bouchon franchement trop loin. Tout sauf lui. Quitte à élire Hillary Clinton, quand bien même celle-ci n’est que la réplique d’Obama – mais les Noirs, les Mexicains et les Musulmans adorent, et l’Amérique a besoin d’un lifting pour effacer les cicatrices irakiennes, syriennes, libyennes et ainsi de suite. Menteuse? Vilaine menteuse, très probablement. Mais tellement polie et sympa avec CNN.

Capture d’écran 2016-04-25 à 20.48.06

En un seul coup, le prestigieux Boston Globe explique qu’en 2017 avec Trump, les expulsions vont commencer, que les marchés s’effrondrent en vue de la guerre commerciale, que les émeutes se poursuivent dans le pays et que le couvre-feu s’étend à plusieurs villes du pays. Du Pulitzer comme il en faut.

OB : cette Une “pastiche” imprimée dans un grand journal défie l’entendement… Et devrait pouvoir relever de poursuites, pour abus de pourvoir médiatique…

Hitler et Staline vs. Les vertueux

Hitler veut donc construire un mur – déjà construit aux deux-tiers – à la frontière mexicaine, ramener les industries américaines à la maison pour éviter la propagation des canapés à deux balles et de la bouffe pour chien contaminée chinoise, rappeler aux Arabes américains qu’on émigre dans un pays parce qu’on aime y vivre sans cracher sur son drapeau, et renvoyer les immigrés illégaux, qui pourront toujours déposer une demande d’immigration légale, s’ils n’ont pas organisé un gang ou un circuit de mariages bidons dans leur quartier. De quoi frémir et imaginer l’apocalypse en 2017. Staline, lui, veut taxer les milliardaires pour financer des mesures infâmes, dont le dénominateur commun est l’égalité, une idée abracadabrante et obscène. Un affront pour les élites bienveillantes qui veillent à l’esprit de compétition, symbole de jeunesse éternelle.

Alors, vos correspondants et agences de presse espèrent que Torquemada et Obamette vont finir par ce sortir de ce bourbier. Il ne faut pas leur en vouloir: ils ne veulent pas se fâcher avec leurs puissants confrères, ils sont impressionnés de travailler en Amérique, ils ont leurs entrée à la Maison Blanche et être correspondant, cela demande de la discipline. Ce n’est pas grave, qu’un texan allumé dessine un projet à vous glacer le sang, puisqu’il parle bien et qu’il respecte le système. Ce n’est pas grave, que l’autre, secrétaire d’Etat du temps de la catastrophe syrienne, appuie un peu trop sur le bouton pour piloter les drones tueurs, c’est une femme – et comme on le sait, toute femme est pure, pacifiste et non-violente, Renaud nous l’a enseigné à l’époque de Thatcher -, et les minorités l’adorent.

Seulement le peuple parle, et il adore les emmerdeurs, alors évidemment, il y a des parasites sur la ligne. Tout ce que nos amis doivent savoir aujourd’hui sur l’élection américaine en cours est qu’elle est, malgré tout, une bouffée d’air extraordinaire et une démonstration démocratique puissante : l’Amérique se passionne pour ces élections, s’engueule, ses pouvoirs frissonnent de rage, ses élites tapent du pied, sa jeunesse s’emballe pour un vieux gaucho, ses fachos lèvent le bras la bible en main, et un bâtisseur d’immeubles affreusement kitsch et à la mèche défiant tout entendement fait rire au détriment des huiles médiatiques.

Démocratie: on aime, ou pas.

Elle est comme ça, l’Amérique: les Texans y vivent au rythme des éxécutions capitales, les Washingtoniens y fument leur pétard dans les rues, les Arizoniens vont au bordel et en Californie du Nord, la ville de Sébastopol brandit fièrement le drapeau communiste. Les gays, lesbiennes, bisexuels et transgenres – Dieu sait quoi d’autre encore – s’envoient en l’air sur les plages de South Beach et de Long Island, les vilains du Ku Klux Klan s’agitent dans leurs robes et sous leurs chapeaux pointus en brûlant des croix au find fond du Tennessee ou de l’Orégon pour impressionner les vilains nègres, on peut commander sa panoplie de SS sur Internet ou se faire livrer un fusil d’assaut, des antisémites sans tabou se tapent sur la cuisse et les partisans de la conspiration font fortune en vous assurant toujours que le coup du World Trade Center était bidon. Intenables, vous dit-on. Alors évidemment, ça fait du monde aux portillon des élections. Franchement, on a vu pire, comme démocratie, mais pour le quatrième pouvoir, c’est affreux.

Source : Marianne, Stephane Trano, 21-04-2015

Source: http://www.les-crises.fr/elections-americaines-pourquoi-les-medias-enragent-par-stephane-trano/


Peut-on parler du 11 Septembre durant l’Inquisition ?

Monday 25 April 2016 at 03:00

I. Du 11 Septembre

Nous allons consacrer le blog durant les prochains jours à une très grave affaire, tournant autour du 11 Septembre. Et plus précisément au niveau des complicités étrangères d’al-Qaïda – pour faire simple, l’Arabie Saoudite.

Nous n’avons pas traité de ce sujet jusque-ici pour différentes raisons.

La première est que d’autres sites (je parle des sérieux) ont parlé du sujet, que nous n’aurions rien eu de bien nouveau à rajouter.

La deuxième est que c’est un sujet dont, finalement, la conclusion est que de nombreuses questions sérieuses restent sans réponse, et qu’il faudrait une commission d’enquête vraiment indépendante (sans élus ou personnes en conflit d’intérêt donc) les étudie, avec pouvoir de se faire communiquer tout document secret (sans qu’elle les publie forcément). Cela calmerait les doutes du public, et clouerait le becs à des élucubrations délirantes.

La troisième est que le danger de ceci est de trop se focaliser sur le 11 Septembre, et de ne plus s’occuper de l’Histoire qui s’écrit au jour le jour, sous le poids de la propagande médiatique. Mais on y reviendra.

La quatrième est évidemment le climat de terreur intellectuelle, où les Fouquier-Tinville aux petits pieds sévissant dans les médias et sur Internet sont tout prêts de vous guillotiner pour déviationnisme intellectuel, rappelant les beaux jours des régimes totalitaires. C’est d’ailleurs cet évènement qui a véritablement fait fleurir les notions assez décevantes de “théories du complot” ou de “complotisme” – qui ne veulent en fait pas dire grand chose, et dont on ne trouve guère de définition intellectuellement satisfaisante, ou en tous cas cohérente avec la manière dont ce qualificatif infamant s’est répondu. Wikipédia indique :

Des auteurs avancent que le phénomène de la conspiration est inhérent à la politique et à l’économie dès lors que des richesses et du pouvoir sont en jeu dans un cadre d’ambitions opposées. […] Cependant, la théorie du complot, ou conspirationnisme, ne se contente pas de dire que les complots adviennent – une affirmation que personne ne conteste –, elle fait du complot la matrice interprétative de tout événement : le conspirationnisme est ainsi décrit par Pierre-André Taguieff comme « la vision du monde dominée par la croyance que tous les évènements, dans le monde humain, sont voulus, réalisés comme des projets et que, en tant que tels, ils révèlent des intentions cachées – cachées parce que mauvaises. »

Certes. Mais si on parle alors de “tenants de théories visant à dire que tout ce qui arrive est causé par un petit nombre d’individus agissant dans l’ombre et tirant toutes les ficelles – et généralement Juifs ou francs-maçons ou ce que vous voulez”, on a une définition précise, de théories (immondes) existant depuis longtemps. Mais elles se cantonnent clairement à une frange limitée de la population et d’Internet, et on voit mal en quoi ceci empêcherait des personnes cherchant simplement la vérité de poser de légitimes questions sur les actions de leur gouvernement, dont elles savent à quel point il faut le surveiller vu sa tendance à réaliser des actions immorales, mais dont elles savent aussi qu’il n’est pas composé de psychopathes prêts à tous nous assassiner… La vigilance citoyenne, intègre mais inflexible, est une base de la démocratie.

Citons ainsi par exemple quelques propos des années 1920-1930 du philosophe Émile Chartier dit « Alain » :

“La liberté est fille de la vigilance. La liberté réelle suppose une organisation constamment dirigée contre le pouvoir. La liberté meurt si elle n’agit point.”

“Tout chef sera un détestable tyran si on le laisse faire.”

“La démocratie n’est pas dans l’origine populaire du pouvoir, elle est dans son contrôle. La démocratie, c’est l’exercice du contrôle des gouvernés sur les gouvernants. Non pas une fois tous les cinq ans, ni tous les ans, mais tous les jours.”

“Tout pouvoir est méchant dès qu’on le laisse faire ; tout pouvoir est sage dès qu’il se sent jugé.”

Alors pour être clair, sur ce site :

MAIS

“Dans une société bien huilée, on ne dit pas ce que l’on sait, on dit ce qui est utile au pouvoir” [Noam Chomsky]

Quiconque ayant un peu analysé le dossier du 11 Septembre, et exerçant un esprit critique dans un démarche scientifique ou d’enquête classique ne peut que conclure, à propos des faits ayant abouti au drame que :

Rappelons ainsi que Bush a longtemps refusé qu’il y ait une Commission d’enquête (on croit rêver !) :

bush-1

avant de tenter de la saboter (en nommant Kissinger à sa tête !!), puis en ne lui accordant que 3 millions de dollars de budget, portés finalement à 15 millions de $ (c’était 40 M$ pour le scandale Clinton/Lewinsky – même s’il faut être prudent dans les comparaisons), en limitant fortement sa durée et en lui refusant l’accès à de nombreux documents majeurs (!!!).

Il est évident que de tels faits ne peuvent que faire naître de lourds soupçons envers un gouvernement.

Cependant, on ne peut aller plus loin sans une enquête, et il est erroné d’en conclure directement que le gouvernement est complice et à souhaité ces évènements.

9 fois sur 10, il cherche juste à masquer sa lourde incompétence ou celle de ses agences – qui est parfois dantesque.

Mais bien entendu, les thèses délirantes à la Thierry Meyssan ou de certain sites d’extrême-droite ont fait beaucoup beaucoup de mal à la cause de la recherche de la vérité…

11septembre1

II. Des médias

Il est évident que là encore les médias ont montré, passé le choc initial, qu’ils n’étaient en rien un quatrième pouvoir, mais la simple béquille du premier.

Au lieu de chercher à creuser les questions raisonnables qui sont apparues, la plupart sont entrés dans un fanatisme incroyable, assimilant “complotistes” (pensant que Bush a miné les tours ou simplement que peut-être l’Arabie saoudite avait pu aider les terroristes, dont juste 15 sur 19 étaient Saoudiens hein…) et nazis ou négationnistes…

kassovitz

Quand on pense à ces fabuleux “Charlie de la Liberté d’expression”, on ne peut qu’être frappé par le totalitarisme de leur vision et de leurs propos, qui illustrent bien une époque de régression de la science et de progression de la Foi (non religieuse ici). L’obscurantisme gagne vraiment du terrain.

“Plus une société s’éloigne de la vérité, plus elle hait ceux qui la disent.” [George Orwell]

inquisicion-espanola

Et le plus incroyable, c’est qu’on doit être un des pires pays au monde sur ce point. Il est impossible chez nous d’évoquer certaines questions raisonnables, alors que cela se fait sans problèmes aux États-Unis, premier pays concerné quand même !

On peut donc se demander si les “cerveaux malades” (pour reprendre leur expression), ce ne sont pas plutôt ceux qui font une confiance aveugle aux propos et actions de George W. Bush (sic.), le type qui a volé son élection et menti à propos des armes de destruction massive, causant 1 million de morts au final…

Et, je re-précise, ne pas faire confiance à George Bush, cela ne signifie pas “penser qu’il a sciemment fait tuer 3 000 Américains avec la complicité de milliers de fonctionnaires”, le panel des possibilités est très très très large, et heureusement…

Oui heureusement qu’il y a des alternatives entre :

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III. Des 28 pages, ou les médias contre la Démocratie

De façon un peu provocatrice, je dirais c’est bien beau de s’occuper de dénoncer des faux complots délirants dans la tête de quelques crétins (eh, au fait, les médias, je crois que des gens nient l’existence de Napoléon, vous avez prévu de faire un dossier spécial ? Avec mise à l’Index de la BienPensance de nouveaux sites internet ?), mais c’est quand même bien plus important de s’occuper des vrais complots des gouvernements et de leurs agences… Parce que leur bilan est vraiment catastrophique depuis des décennies…

Et voilà que surgit l’affaire des “28 pages”, que nous présentons dans ce billet.

Nous analyserons ceci plus en détail, mais, alors que, suite à un reportage de la célèbre émission américaine 60 Minutes, le sujet fait un buzz incroyable aux États-Unis, s’étale dans les journaux,

28-pages-4

on a une information quasi nulle en France, merveilleux exemple de fabrication du consentement.

Exemple : recherche sur le site du quotidien de déférence (on ne trouve guère qu’un seul article sur les “28 pages”dans les médias mainstream”, de cet acabit):

le-monde-1

Hmmm, grosse couverture de 1 billet en 1 mois, en effet… Regardons :

le-monde-1

Hmmm, un bel article copié-collé de l’AFP (on n’allait pas mettre un “journaliste” dessus, quand même), sur un sujet connexe en plus…

Ah oui, et à la toute fin de l’article :

le-monde-1
Hmmm, belle couverture, chapeau !

Et si je compare avec “Panama Papers” en 1 mois :

le-monde-panama-5

Édifiant…

Bon après, c’est sûr qu’entre savoir que le beau-frère du cousin de la concierge de l’ami d’enfance de Poutine a créé une société aux Caïmans (peut-être légale, certes), et savoir si un gouvernement “ami” (ahahahaha) a financé et aidé les pirates de l’air du 11 Septembre, il n’y a pas photo…

Mais à leur décharge, après des années de délire, comment peuvent-ils reconnaitre que :

  1. il semble extrêmement probable que de hauts dirigeants Saoudiens aient aidé les pirates
  2. que les dirigeants américains n’ont pas traité ce sujet, et ont même aidé des Saoudiens à quitter les États-Unis en septembre 2001
  3. on se doute de ceci depuis longtemps, mais les médias n’ont jamais convenablement, traité le sujet, surtout en France.

Ils vont dire quoi ? “Ah, oui, désolé, il y a bien un complot, mais bon, attention, il est quand même limité… On a oublié de vous le dire depuis 15 ans. ”

Le drame est qu’un enfant de 15 ans (non futur “journaliste”) arrive naturellement à ces conclusions, et que, de nouveau, le comparatif entre des informations de qualité sur Internet et la bouse médiatique va encore discréditer les médias, laisser à penser qu’ils sont vendus au pouvoir politique, et que celui-ci est menteur et criminel.

Et donc, comme la confiance c’est comme les allumettes, ça ne sert qu’une fois, les gens vont être capables de se mettre à croire les pires balivernes…

Ce qui est un grave danger pour une société démocratique (disons démocrate plutôt).

Car le danger, ce n’est pas les crétins, ce sont les médias qui montrent que sur certains sujets très importants, les crétins disent la vérité, et les médias mentent (ou dissimulent la vérité, pour être précis)…

Et à un niveau gravissime, qui en est assez désespérant. Pour nous qui analysons la propagande occidentale, nous avons même une inquiétude, car :

nous nous demandons s’ils arriveront à conserver ce niveau de bassesse la prochaine fois…

le-monde-4

Ah oui, probablement, donc…

IV. Épilogue

Et, au fait : le 11 Septembre, c’est évidemment un complot. 

D’al-Qaïda jusqu’à preuve du contraire, avec d’éventuels soutiens à préciser, donc… :)

N.B. Commentaires

Vous vous doutez bien que la modération des commentaires sur ce sujet va être “coton”…

Nous vous demandons donc de ne pas ouvrir un débat sur le fond du sujet (les avions, les tours, le Pentagone tout ça tout ça…) ni de poster des liens externes (nous avons autre chose à faire que de les contrôler) – de tels commentaires seront immédiatement supprimés, économisez-vous (et nous) de la fatigue. Sans cela, les commentaires seront fermés, mais ce serait dommage. Nous vous avons exposé les principes du blog sur ce sujet. L’image du blog passera ainsi en premier.

Vous avez parfaitement le droit d’être en désaccord avec les propos et visions de ce billet – ça tombe bien nous ne sommes pas un médias mainstream composé de “journalistes”. Bonne nouvelle, vous trouverez alors plein de sites sur le 11 Septembre, qui vous plairont – mais ailleurs…

Source: http://www.les-crises.fr/peut-on-parler-du-11-septembre-durant-linquisition/


[RECOMMANDÉ] L’Histoire des 28 pages – et leur contenu…

Monday 25 April 2016 at 02:55

1ère partie de la longue vidéo que nous avons réalisée pour le blog, et qui présente les fameuses 28 pages – enfin, fameuses aux États-Unis, car en France, vu nos médias…

Vous aurez demain l’émission 60 Minutes, que des millions d’Américains ont vue…

En attendant, première vidéo :

(La même sur un autre site si vous avez un souci de lecture…)

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Voici le script de la vidéo précédente, pour disposer des sources facilement.

1/ Prologue

Le 11 Septembre 2001, 3000 personnes décèdent suite aux attentats-suicides qui se produisent en plein New-York.

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« 11 Septembre 2001 : Discours de George W. Bush » (source : INA)

De 0’47 à 1’06

George W. Bush : « Les recherches sont en cours afin d’identifier ceux qui sont derrière cet Axe du Mal. J’ai demandé à toutes nos ressources de renseignement et de police de trouver les responsables et de les traduire en Justice. Nous ne ferons aucune distinction entre les terroristes qui ont commis ces faits et ceux qui les ont protégés. »


« 21 Septembre 2001 : Discours de George W. Bush » (source : YouTube)

De 0’36 à 0’50

George W. Bush : « Notre peine s’est transformée en colère, et notre colère en détermination. Que nous livrions nos ennemis à la Justice, ou que nous fassions Justice nous-mêmes, Justice sera faite. »


« Richard Clarke témoigne de la réaction du gouvernement le 12 septembre 2001. » (source : Viméo)

Richard Clarke a été le Coordinateur national pour la sécurité et le contre-terrorisme aux États-Unis de 1998 à 2003, dans les gouvernements Clinton et Bush.

De 41’49 à 42’56


« 22 juillet 2004 : Rapport officiel de la Commission du 11 Septembre »

« Il ne semble pas qu’un gouvernement autre que celui des Talibans ait soutenu Al-Qaïda financièrement avant le 11 septembre, même si des sympathisants au sein de certains gouvernements ont pu fermer les yeux sur les activités de collecte de fonds d’Al-Qaïda

L’Arabie saoudite a longtemps été considéré comme la source principale de financement d’Al-Qaïda, mais nous n’avons trouvé aucune preuve que le gouvernement saoudien en tant qu’institution, ou de hauts responsables saoudiens aient financé individuellement l’organisation. »
et

« À ce jour, le gouvernement américain n’a pas été capable de déterminer l’origine de l’argent utilisé pour commettre les attentats du 11 septembre. Mais en définitive, c’est un point qui a une faible importance pratique…. »

Ensuite :

« Ce rapport a fait l’objet de très fortes controverses dès le début, l’Administration Bush refusant de témoigner sous serment, et le public critiquant des nominations comportant de nombreux conflits d’intérêt. Beaucoup d’associations de familles des victimes ne furent pas satisfaites des conclusions. »

911Commissioners

« Cette commission n’eut qu’un budget initial de 3 millions de dollars, finalement porté tardivement à 14 millions.

À titre de comparaison, les enquêtes sur les explosions des navettes Challenger (1986) et Columbia (2004) bénéficièrent d’un budget de 75 et 50 millions de dollars, et 40 millions de dollars furent alloués à l’enquête sur l’affaire Clinton-Lewinsky.

La Maison Blanche voulait imposer un délai de 12 mois pour que la Commission finalise son enquête. Le temps imparti fut en définitive porté à 16 mois. »


« En 2006, Le vice-Président de la Commission d’enquête sur le 11/09, Lee Hamilton, se plaignit des conditions de leur enquête (source : Xenomorph)

Première moitié de la vidéo

Lee Hamilton : « Plusieurs éléments nous laissent penser que nous avons été créés pour échouer. Nous avons eu très peu de temps – et ce malgré la prolongation obtenue. Nous n’avons pas eu assez d’argent… […] Ils avaient peur qu’on pende quelqu’un, qu’on le montre du doigt… »

Dans la même interview

Lee Hamilton : « Il y avait beaucoup de sceptiques à ce moment-là, qui ne voulaient pas que la commission se crée. Les politiques n’aiment pas que quelqu’un examine le passé pour voir s’ils ont commis des erreurs. […] Beaucoup de personnes se sont fortement opposées à ce que nous faisions. Nous avons eu beaucoup de difficultés à accéder aux documents et aux personnes. Nous connaissions l’histoire des commissions ; personne n’y a prêté beaucoup d’attention. Il y avait donc toutes sortes de raisons de penser que nous avions été mis en place pour échouer. »


« Bush et la coopération avec la Commission 911 » (source : Viméo)

De 36’52 à 37’03

George W. Bush : « Nous avons apporté toute notre coopération aux Présidents Kean et Hamilton ».

Thomas Kean : « Nous avons réclamé des documents que nous n’avons pas obtenus. Et maintenant, c’est trop tard. ».


« Cependant, dès 2002, un Rapport parlementaire américain sur l’activité des services de renseignement en lien avec les attaques du 11 septembre fut publié.

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« Mais, l’administration Bush décida d’en censurer 28 pages qui traitaient du financement et de l’aide aux terroristes. »

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« Bien que 46 Sénateurs sur 100 (dont Hillary Clinton et John Kerry) aient demandé la déclassification en 2003, l’administration Bush refusa.

Les langues se délièrent donc peu à peu… »

2/ Les témoignages

1. Stephen Lynch, député démocrate du Massachusetts, 10 septembre 2015 (source : 28Pages.org)

De 1’54 à 2’17

« Ces pages donnent les noms de personnes et d’organismes qui, je crois, ont été complices des attaques du 11 septembre. Ils ont été les animateurs de ces attaques. Ils sont clairement identifiés… Comment ces gens ont été financés, où ils ont été logés, d’où venait l’argent, les filières utilisées et les connexions entre certains de ces individus.

2. Thomas Massie, député Républicain du Kentucky, 12 mars 2014 (source : 28Pages.org)

« Les familles méritent de connaitre cette information. Cela fait une décennie – plus d’une décennie en fait, 13 ans – que cet événement est arrivé, et nous avons eu un récit, une narrative, dans les médias et dans la presse, et donc dans la conscience collective américaine, de ce qui est arrivé ce jour-là. Mais je ne pense pas que nous soyons pleinement informés, et nous ne serons pas pleinement informés avant que tout le monde ne puisse lire ces 28 pages. »

« En écho aux propos du député Lynch, sachez que si je suis là pour les familles, je suis aussi là pour le futur de notre pays : nous devons décider comment empêcher qu’un autre événement du type 11 septembre ne se reproduise. Tant que vous n’aurez pas eu l’image complète de ce qui est réellement arrivé, avec la vision des services de renseignement, comment pouvez-vous participer à ce débat ? Comment pouvons-nous savoir que ce que nous faisons va bien empêcher qu’un autre 11 septembre ne se produise ? Et comment pouvons-nous savoir que des actions que, peut-être, nous aurions réalisées différemment, pourraient être des réactions excessives ? »

« Mais je veux aussi parler de l’expérience de se retrouver dans ce souterrain et de lire ces 28 pages. Cela se passe dans une pièce insonorisée, où vous êtes escorté dedans, où vous êtes escorté dehors, et où il est interdit de prendre des notes. Mais c’est vraiment quelque chose, c’est un vrai choc quand vous les lisez. Quand je les ai lues, et nous avons tous eu notre propre expérience, j’ai dû m’arrêter toutes les deux pages afin de simplement absorber, et essayer de réorganiser ma compréhension de l’histoire des 13 dernières années et des années qui ont mené à cela. Ceci vous oblige à tout repenser. Et donc, je pense que l’ensemble du pays doit passer par là ; cela va être difficile et cela pourrait être gênant, mais cela ne justifie pas de cacher la vérité au peuple américain. »

« Je veux en finir avec deux appels : je veux dire à tous les membres du Congrès qui n’ont pas lu ces 28 pages, qui ont la capacité d’aller lire ces 28 pages, de le faire pour vos électeurs. Il y a 435 circonscriptions dans ce pays ; chaque membre du Congrès a besoin de voir ces 28 pages. Puis, je les encourage à soutenir la proposition de loi de dé-classification des députés Jones et Lynch, comme je l’ai fait. »

« Et enfin, le dernier appel que je veux lancer, est à destination de ceux qui refusent de rendre publics ces documents : vous devez tenir votre propre conférence de presse, vous devez répondre aux questions, et expliquer pourquoi vous voulez garder ces 28 pages secrètes. À mon avis, aussi choquantes que soient ces 28 pages, et bien qu’elles aient notablement modifié ma compréhension de ce qui est arrivé, je ne pense pas que ce serait nuire à notre sécurité nationale que de les rendre publiques ; cela donnerait également aux familles les réponses qu’elles méritent. »

3. Walter Jones, député Républicain du Kentucky, 12 mars 2014 (source : Peter Boyles)

De 10’46 à 11’00

« Je confirme [les propos du député Massie]. Il y avait 28 pages, et il m’a probablement fallu une bonne heure et demie pour les lire, parce que j’ai dû en relire certaines parties que je n’arrivais pas à croire. »

4. Walter Jones, député Républicain de la Caroline du Nord, 12 septembre 2013 (source : International Business Times)

« J’ai été absolument choqué par ce que j’ai lu. Ce qui était surprenant c’est que ceux à qui nous pensions pouvoir faire confiance m’ont vraiment déçu. Cela n’a rien à voir avec la sécurité nationale en soi ; il s’agit plus de relations internationales. L’information est essentielle à l’amélioration de notre politique étrangère et devrait donc être disponible pour le peuple américain.

Si les pirates de l’air du 11 Septembre ont reçu une aide extérieure – en particulier d’un ou plusieurs gouvernements étrangers – la presse et le public ont le droit de savoir ce que notre gouvernement a fait ou n’a pas fait pour traduire les responsables en justice. »

5. John F. Lehman, ancien ministre de la Marine, ancien membre de la Commission d’enquête sur le 11 septembre, Témoignage sous serment, 2013

De 0’42 à 1’40

« J’ai personnellement lu les 28 pages classifiées… À mon avis, en aucun cas la publication de ces pages ne mettrait en jeu ni ne nuirait à nos intérêts de sécurité nationale. Au contraire, je crois que la divulgation de ces 28 pages du rapport d’enquête conjoint aiderait grandement les décideurs et le public à mieux comprendre un grand nombre des menaces auxquelles nous sommes confrontés aujourd’hui. »

6. Rick Nolan, député Démocrate du Minnesota, 14 avril 2016 (source : MPR News)

Journaliste : « Pourquoi ce document a-t-il été classé secret quand le rapport sur le 11 Septembre du Comité du renseignement du Congrès a été publié en 2002 ? »

Rick Nolan : « Eh bien c’est la grande question. Et honnêtement, j’estime que cela n’a rien à voir avec la sécurité nationale, mais plutôt avec le fait que cela aurait embarrassé beaucoup de personnes. Très franchement, j’ai d’abord été alerté de ce sujet par des électeurs de ma circonscription, qui l’avaient appris par Internet. Et comme je ne fais pas une confiance aveugle à Internet, j’ai décidé d’enquêter par moi-même.

Et j’ai appris que l’ensemble des 28 pages avaient été classifiées, et qu’elles détaillent qui a en réalité financé les attaques du World Trade Center et du Pentagone, et qui est responsable du financement des attaquants. J’ai en conséquence entamé le processus pour pouvoir obtenir l’autorisation de lire ces 28 pages. Et la lecture en a vraiment été dérangeante. »

De 1’56 à 3’11

« Je peux dire qu’il y a une description très détaillée de qui a financé la plupart des attaquants – et vous savez que 15 des 19 pilotes étaient saoudiens, c’est public –, et les informations dans ces 28 pages sont assez détaillées : qui leur a fourni l’argent, ce qu’étaient ces comptes, quelles quantités d’argent, qui en étaient les bénéficiaires…

Ce ne sont pas des hypothèses. Je peux confirmer qu’il n’y a aucun doute que la rhétorique qui a précédé l’attaque américaine et la guerre contre l’Irak était terriblement fausse. Le peuple américain a le droit de savoir ceci, qui pose de sérieuses questions sur la guerre et la paix, sur ce qui a couté des milliers de milliards de dollars, qui a mis en jeu la vie de soldats américains et de patriotes, c’est sérieux.

Le peuple américain ne peut pas décider ce qui est juste ou non, si on ne lui dit pas toute la vérité… »

7. Byron Dorgan, ancien sénateur démocrate du Dakota du Nord, 12 avril 2016 (source : KF Go)

De 2’08 à 2’31

« J’ai lu les 28 pages et j’ai quitté la pièce. Ces 28 pages sont vraiment très importantes pour que les Américains puissent comprendre et savoir exactement ce qui s’est passé le 11 Septembre, et qui est responsable, qui a aidé à financer, etc. Il est donc très important de publier enfin ces pages. »

De 2’41 à 3’12

Journaliste : « Pourquoi le peuple américain est-il laissé dans le noir ? Ne devrions pas avoir le droit de savoir ce qu’il y a dans ces 28 pages, afin de savoir ce qu’il s’est vraiment passé. »

Byron Dorgan : « Sans ces informations, le peuple américain ne dispose pas de toute l’histoire. Il a un rapport de la commission d’enquête sur le 11 Septembre, sur ce qui s‘est passé, mais le peuple américain n’a pas toute l’Histoire, car ces 28 pages sont classées secrètes. »

De 5’10 à 5’39

Byron Dorgan : « Rappelez-vous du film Jerry Maguire : « Suivez l’argent ». Voilà ce que fait ce rapport. En fin de compte, qui a financé, qui a aidé, qui a organisé, qui était impliqué, à quel niveau ? Mais cette partie du rapport a été rendu secret, ce qui fait que le peuple américain ne peut pas le voir. C’est dommage, car je pense que la transparence est toujours la meilleure politique… »

De 8’51 à 9’12

Byron Dorgan : « Il y a beaucoup de mystification. Cela a été classifié délibérément par ceux qui pensaient qu’il y aurait des dommages, d’une manière ou d‘une autre, si le peuple américain voyait ces 28 pages. C’est absurde. Il n’y aurait aucun dommage, il y aurait un savoir conséquent pour tout le monde afin de savoir ce qui s’est exactement passé, qui a attaqué notre pays. »

« La célèbre émission d’enquête américaine 60 minutes s’est intéressée à ces 28 pages le 10 avril 2016 (à suivre…) »

[A suivre]

Source: http://www.les-crises.fr/recommande-lhistoire-des-28-pages-et-leur-contenu/


Petite russophobie ordinaire…

Sunday 24 April 2016 at 19:25

[En passant…] C’est toujours moche la propagande, quel qu’en soit le camp…

moscou

Habile de dire Moscou, au lieu d’URSS – c’est un métier “journaliste”…

N.B. je parle du titre, pas du fond, nous sommes d’accord…

Source: http://www.les-crises.fr/un-petit-pas-pour-la-paix-un-grand-pas-pour-la-russophobie/


Uber commande 100.000 voitures semi-autonomes… pour se passer des chauffeurs ?

Sunday 24 April 2016 at 02:10

C’est beau le progrès, mais on va faire comment pour les emplois – that is the question… ?

Uber signe une méga-commande avec Mercedes … pour se passer des chauffeurs ? Par Jonathan Chelet

Source : Capital, Jonathan Chalet, 22-03/2016

© Mercedes Tous droits réservés

Uber aurait commandé 100.000 voitures semi-autonomes à Mercedes, selon le magazine allemand Manager Magazin. Un contrat à long-terme estimé à 10 milliards de dollars. L’absence de chauffeurs permettrait au service de VTC de casser les prix et d’éviter les ennuis juridiques mais pas seulement…

C’est peut-être la plus grosse commande de l’histoire de Mercedes. Selon le magazine allemand Manager Magazin, le service de VTC Uber a commandé 100.000 Mercedes Classe S au constructeur automobile allemand Daimler. A plus de 90.000 euros pièce, ce méga-contrat à long terme (jusqu’en 2020) est estimé à 10 milliards d’euros par le magazine.

Une voiture ultra-moderne et semi autonome

Uber n’a pas choisi n’importe quelle Mercedes. La Mercedes-Benz Classe S est le modèle le plus confortable et le plus moderne du constructeur de Stuttgart. En effet, depuis son lancement, cette limousine a toujours intégré les dernières technologies inventées par Mercedes comme l’ABS, l’Airbag ou encore l’ESP. Les tout derniers modèles de Classe S commandés seraient dotés du système “Intelligent Drive” de Mercedes qui rend la luxueuse voiture semi-autonome.

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Le système d’aide développé par Mercedes permet, par exemple, de respecter les distances de sécurité sur route et de suivre les véhicules qui précèdent. En d’autres termes, plus besoin de freiner ou d’accélérer, y compris dans les virages. La voiture lit aussi les panneaux, ajuste automatiquement sa vitesse, et freine en l’absence de réaction du conducteur.

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Si le pilotage de la Classe S est, pour l’instant, seulement semi-automatique, on peut imaginer que les voitures pourront conduire toutes seules dans quelques années (après une simple mise à jour comme le promet Tesla). Dans un premier temps, ces technologies permettront d’aider les chauffeurs et d’optimiser les courses mais à long terme, Uber ne cache pas vouloir développer sa propre technologie de voiture autonome.

Rendre le taxi encore moins cher

D’abord, avec des taxis autonomes, Uber réaliserait d’incroyables économies. Aujourd’hui, les chauffeurs récupèrent 75% du prix de la course. Le service pourrait alors baisser drastiquement ses prix tout en augmentant ses marges. Uber éviterait aussi les nombreuses difficultés juridiques qu’il rencontre presque partout dans le monde sur le statut de ses chauffeurs. A San Francisco, la ville de son siège, les conducteurs Uber doivent, par exemple, être considérés comme des salariés à la suite d’un procès.

Malgré son jeune âge, la start-up, fondée en 2009, est la société non cotée la plus valorisée au monde selon Forbes (62 milliards de dollars). Elle a donc les moyens de voir beaucoup plus loin : elle veut « uberiser » les transports en ville. En commençant par sortir les chauffeurs des voitures.

Et l’entreprise investit déjà dans cette optique. En 2015, Uber a racheté plusieurs sociétés de cartographie et financé deux universités américaines travaillant sur des systèmes de caméras et de capteurs indispensables aux voitures autonomes.

Une flotte totalement autonome en 2030

Le fondateur, Travis Kalanick, a déclaré vouloir une flotte totalement autonome en 2030. Des études montrent que le service de VTC sera alors si répandu et peu cher qu’il n’y aura plus d’intérêt à posséder une voiture !

Une étude de l’université de Colombia a calculé qu’avec seulement 9.000 voitures autonomes, Uber pourrait remplacer tous les taxis de New-York, avec un temps d’attente de 36 secondes pour un coût de seulement 30 centimes par kilomètre.

De son côté, la banque Barclays prédit qu’un taxi autonome pourrait remplacer neuf véhicules, ce qui aurait pour conséquence de faire plonger les ventes de voitures particulières de 40% sur les 25 prochaines années. Sauf peut-être pour les fournisseurs de belles berlines noires comme Mercedes…

Une telle commande pourrait donc marquer une étape cruciale dans la digitalisation de l’industrie automobile mais elle signifierait aussi un changement total du modèle d’Uber, qui repose aujourd’hui uniquement sur son logiciel : les chauffeurs utilisent et entretiennent leur propre véhicule, à leur charge. Que va donc devenir Uber dans 10 ans ?

Interrogé par Capital, la direction d’Uber France a démenti l’information du magazine allemand.

Jonathan Chelet

Source : Capital, Jonathan Chalet, 22-03/2016

Source: http://www.les-crises.fr/uber-commande-100-000-voitures-semi-autonomes-pour-se-passer-des-chauffeurs/