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Elon Musk est-il un voyageur du futur ?

Friday 14 October 2016 at 14:56

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Je viens de terminer un livre qui m’a convaincu qu’Elon Musk, le célèbre CEO de Tesla et SpaceX, est un voyageur du futur perdu dans notre époque. Que ses actions nous révèlent ce qu’il connaît de notre avenir immédiat.

Le résumé du livre

Alors qu’il se ballade tranquillement dans la rue, un homme sans histoire se retrouve brutalement ramené 1400 ans dans le passé.

Grâce à sa culture générale, il arrive à comprendre ce qui lui est arrivé et à se débrouiller dans la langue de l’époque. Préoccupé par sa survie immédiate, il va tout d’abord monter une petite affaire en utilisant ses connaissances du futur. Un produit basique, facile à réaliser qui rencontre immédiatement le succès.

Cette petite réussite permet à notre voyageur temporel de lancer d’autres entreprises. Il sait que, d’ici quelques années, le monde va connaître de grands bouleversements et tomber pour plus d’un millénaire dans un âge sombre de ténèbres, de misère, de famine et de maladie. Un millénaire dont il faudra plusieurs siècles pour s’extraire.

En tentant d’apporter le plus d’innovations possibles, notre héros va chercher à préserver l’humanité de ces ténèbres. Sans répit, sans relâche, il crée des entreprises qu’il doit toutes diriger lui-même, les artisans et les travailleurs de l’époque n’étant souvent tout simplement pas capable de suivre ses instructions à la lettre ou s’évertuant à en tirer un petit profit personnel.

Il tente également d’alerter les intellectuels sur l’imminence de la catastrophe mais elle semble bien lointaine ou irréaliste à toute une population qui trouve bien plus important de se perdre en arguties théologiques ou à comploter pour obtenir un ersatz de pouvoir déliquescent.

Souvent incompris, traité comme un fou mais respecté pour ses succès économiques, notre infatigable voyageur temporel ne prendra même plus le temps de dormir, tentera vainement d’avoir une vie amoureuse mais sera à chaque fois rattrapé par l’urgence absolue de tout tenter pour protéger l’humanité. Il aura à lutter contre l’incrédulité et les croyances absurdes d’un peuple confondant modernité et décadence.

Une coïncidence troublante

Écrit juste avant la seconde guerre mondiale par l’écrivain américain Lyon Sprague de Camp, « De peur que les ténèbres » nous fait suivre Martin Padway, jeune archéologue qui est, dès la seconde page, transporté au VIème siècle dans les derniers jours de l’empire romain.

Fin connaisseur de l’histoire, il va tenter de conjurer l’inéluctable chute de l’empire en tentant des actions à court terme, afin d’éviter les erreurs les plus flagrantes, et des actions à long terme, par l’introduction de technologies comme les chiffres arabes, le sémaphore, l’imprimerie et la presse écrite. À court terme, il cherche à éviter que l’Italie tombe dans le chaos. À long terme, il souhaite éviter l’obscurantisme religieux et l’ignorance qui mènera à un millénaire de misère.

Hormis son caractère de classique de la SF des années 30 et de précurseur de l’uchronie, « De peur que les ténèbres » n’a rien de transcendant. Si ce n’est le particulièrement troublant parallèle que je n’ai pu me retenir de faire avec la vie d’Elon Musk, fondateur de Tesla et de SpaceX.

Tout comme Martin Padway, Elon Musk semble pris par une frénésie d’entreprises, d’innovations. Rien n’est jamais assez bien à son goût et il supervise la plupart des développements importants. Tout comme Martin Padway, Elon Musk ne semble pas attiré par l’argent ou la réussite. À chaque succès, il réinvestit absolument tout dans une nouvelle aventure. Il y’a chez Elon Musk, comme chez Martin Padway, une urgence vitale, obsessionnelle.

Chaque entreprise est considérée comme folle, vouée à l’échec. Pourtant, elles finissent souvent, mais pas toujours, par se révéler des succès même si ce n’est pas immédiat.

Elon Musk serait-il, comme Martin Padway, un voyageur temporel ? Est-il un homme parfaitement banal né en 3400 ? Par sa culture générale, il sait alors que l’humanité s’apprête à vivre une catastrophe.

Cette catastrophe initiale est l’invasion de l’Italie par le général romain Bélissaire pour Martin Padway et la crise du réchauffement climatique pour Elon Musk. Cela expliquerait cette urgence de développer Tesla et Solar City. De faire sortir l’humanité du pétrole en quelques années et non en quelques générations. Car chaque mois compte dans cette course contre la montre afin de prévenir la destruction inéluctable de la planète.

Un période sombre pour l’humanité

Nos voyageurs temporels sont également convaincus que l’humanité va connaître un millénaire de disette et de misère. Pour Martin Padway, la religion et l’ignorance seront les principaux responsables de ce moyen-âge. Il introduit donc l’imprimerie, le télégraphe, les chiffres arabes, la gravitation, l’héliocentrisme. Des innovations qui devraient permettre de conjurer les ténèbres sur le long terme.

Elon Musk, lui, introduit OpenAI dont le but est d’encadrer la recherche sur l’intelligence artificielle afin de s’assurer que celle-ci ne soit pas néfaste pour l’humanité. La crainte d’une intelligence artificielle partagée par de nombreux intellectuels dont le physicien Stephen Hawking.

Si les deux hommes semblent avoir sacrifié leur sommeil et une vie amoureuse normale, ils ont néanmoins leur point faible, leur petit plaisir qui sera banal à leur époque mais est strictement impossible dans le passé où ils ont été projetés. Martin Padway veut lancer la construction de bateaux capables de rejoindre les Amériques afin de ramener du tabac. Elon Musk a lancé SpaceX afin d’aller sur Mars. Mais à quelle fin ?

Les enseignements du futur

Si l’on accepte  l’idée qu’Elon Musk soit bel et bien un voyageur du futur égaré dans notre époque, ses actions nous apprennent beaucoup sur notre avenir. Et ce n’est pas particulièrement réjouissant.

Tout d’abord, le réchauffement climatique et la consommation de pétrole vont créer très rapidement une catastrophe importante. La bonne nouvelle c’est qu’il est sans doute encore possible de l’éviter ou de la limiter mais il faut agir tout de suite. Tout comme Martin Padway, Elon Musk fait face à un déni bâti sur l’immobilisme, l’idiotie et la superstition.

En deuxième lieu, les intelligences artificielles vont asservir les humains et leur faire connaître une période terriblement difficile. La bonne nouvelle c’est que les humains vont survivre, au moins assez longtemps pour nous envoyer Elon Musk. Mais il serait sage de prendre au sérieux les avertissements sur le sujet.

Le troisième enseignement c’est qu’en 3400, il est relativement facile d’aller sur Mars et, visiblement, cela en vaut la peine. Enfin une bonne nouvelle !

Finalement, il paraît évident que pour un individu du 35ème siècle nous sommes tous des arriérés superstitieux et obtus, incapables d’avoir une compréhension globale du monde. Malgré tous les efforts que le voyageur temporel fait pour nous sauver de nous mêmes et de nos ridicules guerres religieuses ou nationalistes, nous nous évertuons à nous croire invincibles et à ne pas voir plus loin que le bout de notre nez.

Au fond, l’enseignement immédiat que nous pouvons tirer de la connaissance du futur d’Elon Musk c’est que le réchauffement climatique et les intelligences artificielles non-contrôlées sont des problèmes graves à régler bien plus rapidement que de savoir qui fait partie de quel pays et quel livre sacré est le meilleur.

Peut-être que tout ceci n’est qu’une coïncidence et qu’Elon Musk ne vient pas du futur.

Mais voulons-nous vraiment prendre ce risque ? Que pensez-vous que penseront les humains de l’an 3400 de nos actions, de nos comportements quotidiens et de notre immobilisme ?

 

Photo par Thierry Ehrmann.

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Ce texte est publié sous la licence CC-By BE.

Source: https://ploum.net/elon-musk-est-il-un-voyageur-du-futur/


L’humanité est-elle condamnée à disparaître comme les dinosaures ?

Monday 10 October 2016 at 12:41

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Depuis leur découverte, le gigantisme des dinosaures passionne les hommes. Comment la nature a-t-elle pu produire de tels monstres ? Et comment ont-ils pu disparaître massivement alors qu’ils étaient les rois de la planète ? Sommes-nous condamnés à subir le même sort ?

Trois questions qui sont étroitement liées.

Une question de taille et d’énergie

Le gigantisme des dinosaures n’est, après tout, que le résultat d’une évolution parfaitement logique.

Dans un monde où règne la loi de la jungle, manger ou être mangé, être gros est un avantage indéniable. Plus on est gros, plus on est difficile à attaquer.

Suite à cette stratégie évolutive, les sauriens sont donc devenus de plus en plus grands, de plus en plus forts. Même les herbivores sont devenus gigantesques afin de ne pas représenter une proie trop facile.

Cependant, plus un corps est grand, plus il a besoin d’énergie pour se maintenir en vie et pour se déplacer. La seule source d’énergie utilisable par les dinosaures est la nourriture. Chasser ou cueillir, afin de trouver de l’énergie, demande donc paradoxalement énormément d’énergie.

Cette croissance en taille est donc limitée par la capacité physique à extraire de l’énergie de l’environnement. Et, tout simplement, par la capacité de l’environnement à se régénérer pour fournir cette énergie.

Acculés dans les limites physiques du rendement énergétiques, condamnés à passer leur vie à extraire de l’énergie de leur environnement, les dinosaures étaient donc à la merci du moindre changement rendant l’énergie plus rare.

Si l’on explique souvent la disparition des dinosaures à cause d’une météorite, hypothèse très plausible, il faut préciser que le météorite en question n’a fait qu’accélérer un déclin qui était de toute façon inéluctable. Les dinosaures ne pouvaient pas survivre.

Remplacer le gigantisme par l’intelligence

L’évolution a donc suivi une autre stratégie. Le gigantisme physique étant un cul-de-sac, les espèces qui survécurent à la raréfaction des ressources développèrent une autre caractéristique : l’intelligence.

Avec l’intelligence, les individus pouvaient se défendre (éviter d’être mangé) et trouver à manger sans nécessiter des ressources gigantesques.

L’intelligence est-elle donc la solution ?

Les dinosaures ont régné sur la terre durant 160 millions d’années avant de disparaître. Après seulement 65 millions d’années, l’intelligence est sur le point de détruire la planète. Tout semble indiquer que l’intelligence serait donc encore pire que le gigantisme !

En effet, l’intelligence a permis très vite l’apparition de la collaboration afin d’optimiser la protection des individus et la recherche de ressources.

Les groupes d’individus suivirent la même logique évolutive que les dinosaures et il s’avéra que plus un groupe était gros, plus il était puissant. Les groupes n’eurent donc d’autres ambitions que de devenir de plus en plus gros. Pour les tribus, les empires, les pays, les religions et désormais les entreprises, la croissance était le seul moyen de survivre.

Tout comme les dinosaures, les groupes d’individus sont donc désormais devenus gigantesques, consommant des quantités incroyables de ressources uniquement pour se maintenir en vie.

Contrairement aux dinosaures, il n’a pas été nécessaire d’attendre une météorite : la consommation de ressources et la production de déchets sont telles que le cataclysme est généré par les groupes d’individus eux-mêmes !

Une extinction inéluctable

L’histoire des dinosaures illustre que ce système ne peut que s’écrouler violemment. Les dinosaures ne se sont pas adaptés en devenant plus petits, plus raisonnables. Ils ont tout simplement disparus, laissant la place à d’autres espèces.

Il est illusoire d’espérer une autre issue pour notre situation particulière.

Par ailleurs, contrairement aux dinosaures, ce ne sont pas les individus qui sont inadaptés mais les groupes d’individus.

Une question reste donc ouverte dont la réponse ne dépend que de nous : la disparition des groupes gigantesques d’être humains doit-elle entraîner la disparition des êtres humains ?

Notre système va-t-il laisser la place à une toute autre espèce qui colonisera une terre ravagée ? Ou bien les homo sapiens sapiens vont-ils évoluer afin de survivre ?

Quelques soient nos choix, la disparition du système peuplé de nations, de religions et de multinationales est désormais inéluctable.

Si nous ne nous en détachons pas rapidement, nous disparaitrons avec, comme des marins accrochés à la coque de leur navire en train de sombrer.

Notre seul espoir, en tant qu’espèce, est donc de nous distancier au plus vite de ce système. D’inventer un nouveau système qui n’est plus fait de groupes en compétition mais d’individus en collaboration. De ne plus chercher à grossir au détriment des autres mais de nous entraider.

Pour éviter de disparaître comme les dinosaures, nous devons devenir Homo Collaborans !

 

Photo par Jordan.

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Ce texte est publié sous la licence CC-By BE.

Source: https://ploum.net/lhumanite-est-elle-condamnee-a-disparaitre-comme-les-dinosaures/


Printeurs 40

Saturday 8 October 2016 at 15:50

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Ceci est le billet 40 sur 41 dans la série Printeurs

Le taxi dans lequel Nellio, Eva, Max et Junior s’enfuient est soudainement balayé par une explosion terroriste.

 

Très vite, je repère les journalistes qui filment l’événement. Les terroristes font toujours très attention de ne pas les blesser afin de donner une visibilité maximale à leur action.

— Par ici ! crié-je.

Mais les terroristes semblent de plus en plus nombreux. Tous les clients sortant du centre commercial de l’autre côté de la rue sont abattus sans pitié. Des grenades sont lancées à travers les vitrines des magasins.

— C’est pas un petit attentat de misère, murmure Junior. On n’a pas intérêt à se faire remarquer.

Trop tard ! Un terroriste isolé nous a aperçut et pointe son arme vers notre petit groupe.

— Nous sommes journalistes ! crie Eva.
— Continuez ! renchérit Junior. Vous êtes en train de devenir le hashtag top trending du jour.

Le terroriste baisse son arme, indécis, mais continue à se rapprocher de nous. Il est vêtu comme n’importe quel étudiant, il est jeune et son regard ne respire aucune haine particulière.

— On est vraiment le hashtag top trending ? demande-t-il d’une voix hésitante.
— Oui, répond Eva. Faut dire que vous avez fait du beau boulot.
— Fait voir tes chaussures ? demande Junior. Génial, c’est justement la marque qui sponsorise notre émission ! Tu peux prendre une pause un peu aggressive ? Je vais te filmer avec mes implants rétiniens.

Flatté, le terroriste obtempère. Je l’entends murmurer en pointant le doigt vers le ciel :
— Tu es vengé mon frère ! Toi dont l’attentat n’avait eu aucun retentissement médiatique, c’est à toi que je dédie ce hashtag top trending !

Prudemment, nous opérons une retraite stratégique. La voix chaude et grave de Max me parvient, comme un souffle d’été :

— Reculons progressivement. Les collègues de Junior ne vont pas tarder. Abritons-nous derrière les journalistes.
— Tiens, ajoute Junior, je n’ai jamais compris pourquoi certains blogueurs étaient appelés des journalistes et d’autres des blogueurs. Y’a une raison particulière ?
— Les journalistes reçoivent de l’argent public en plus de la publicité traditionnelle, fais-je.
— Mais pour quelle raison ?
— C’est historique. C’est pour s’assurer de leur objectivité.
— Ah ? Et ça marche ?
— À ton avis ?
— À mon avis, c’est complètement stupide.
— Ça s’appelle une tradition.
— C’est ce que je dis, c’est complètement stupide. Mais sinon, je trouve ça cool de voir un attentat autrement qu’à travers un avatar. Avec mon vrai corps !
— Ça change quelque chose ?
— Rien du tout ! C’est juste cool.
— L’euphorie de l’implant… intervient Max.

À pas prudents, nous nous sommes éloignés de l’attentat de manière suffisante pour pouvoir nous mêler aux badauds qui, à distance prudente, apprécient le spectacle.

— Bon, et bien il nous reste à trouver un moyen de rejoindre le siège du conglomérat. Le tout sans utiliser le moindre ordinateur ni appareil électronique. Ça va être du gâteau. Je ne sais même pas dans quelle direction il faut aller.
— Et si on demandait ?

Je reste un instant étonné de ne pas y avoir tout simplement pensé. Le sentiment d’être traqué m’a transformé en coupable. J’ai peur de toute interaction. Selon tous les algorithmes de surveillance, mon comportement doit être éminemment suspect pour la seule et unique raison que je sais être suspect. Prenant une profonde inspiration, je m’approche d’une des passantes qui se met sur la pointe des pieds pour tenter de filmer l’attentat et, qui sait, obtenir une vidéo qui deviendrait virale.

— Excusez-moi…
— Vous avez vu ? Vous venez de là-bas, non ? C’est dangereux ? Ça vaut la peine de filmer ?
– C’est plein de journalistes mais…
– Oh, les journalistes, vous savez ce que c’est. Ils filment tout puis ne montrent que ce qui les arrange après montage. De toutes façons, les journalistes, ils sont tous complices.
– Est-ce que vous pourriez…
– Oh, je sais ce que vous allez dire. Ils ne sont pas tous pareil, il y’en a des biens. Mais à partir du moment où ils sont payés par l’état, que voulez-vous, c’est la porte ouverte au clientélisme !
– Je cherche à…
– Alors je ne cautionne pas du tout les journalistes subventionnés mais si je pouvais faire une vidéo dont ils me rachèteraient l’exclu, ça m’arrangerait, vous comprenez ? Ou alors je la revends aux sites privés. Ils paient mieux !
— Mais…
— Je sais ce que vous allez dire : pourquoi ne pas mettre moi-même la vidéo en ligne et toucher les royalties des publicités ? J’avoue m’être posé la question mais si jamais je ne fais pas le buzz, je perds tout ! C’est un fameux risque, vous ne trouvez pas ?

Impuissant face à l’intarissable torrent de paroles de mon volubile interlocuteur, je cherche machinalement de l’aide dans le regard de sa voisine qui s’est rapprochée, interpellé par cet étrange monologue. Celle-ci réagit à mon appel silencieux en brandissant une caméra montée en bague sur son poing serré.

— Quoi ? Vous préférez donc les pseudo-journalistes publicitaires aux journalistes d’état ? Les journalistes d’état, eux au moins, n’ont pas pour métier de nous abrutir avec de la publicité !
— Ah non, répond mon premier interlocuteur ? Pourtant ils utilisent également de la publicité !
— Pas tous ! Et ce n’est qu’une aide supplémentaire.
— Donc vous voulez dire que ce sont des publicitaires sponsorisés par l’état ?
— Ils ont une éthique ! Et je préfèrerais cent fois leur vendre ma vidéo même si cela signifie en toucher un prix inférieur !
— Une éthique ? Quelle vaste blague !
— Parfaitement ! Et ils ont au moins la décence de désactiver les publicités joyeuses pour les événements dramatiques, eux ! Il y a des gens qui se font tuer à quelques mètres de nous et des charognards comme vous ne cherchent qu’à les filmer pour faire vivre des publicitaires !
— Vous faites pareil, madame !
— Non, moi je cherche à fournir du matériel à des journalistes responsables afin d’informer les citoyens, c’est complètement différent !

Je recule prudemment. Max me touche l’épaule de sa main mi-écorchée, mi-métal. Personne ne semble faire attention à lui. Tout au plus lui demande-t-on s’il a été blessé dans l’attentat.

Par gestes, il me montre une automobile semi-blindée un peu à l’écart dans laquelle Eva et Junior sont en train de s’afférer. Emboitant le pas à Max, je m’y engouffre sans poser de questions.

Une rafale retentit, suivit d’un léger bruit de réacteur. À la place où je me tenais, les deux cadavres de mes interlocuteurs gisent, déchiquetés.

— Un drone de combat, ai-je le temps de murmurer.
— Oui, m’explique Max. Ils sont programmés pour détecter les comportements pré-terroristes en se basant sur les données comportementales des individus, leurs utilisations des réseaux sociaux, etc. La conversation que ces deux là viennent d’avoir a sans doute du activer une série de mots clés.
— Mais ils n’étaient pas terroristes !
— Un faux positif… La rançon de la technologie.
— Et les terroristes eux n’ont pas été arrêtés !
— Un faux négatif…

Je ne réagis même pas. Tout cela me semble normal. Je me contente de regarder l’intérieur de la voiture dans laquelle je viens de m’asseoir.

 

Photo par Elizabeth Amore Bradley.

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Source: https://ploum.net/printeurs-40/


Repensez l’argent et expérimentez le prix libre !

Tuesday 4 October 2016 at 20:58

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Lorsqu’on entend parler des pauvres travailleurs licenciés qui perdent leur emploi, on oublie souvent de préciser que ce n’est pas l’emploi que les travailleurs souhaitent préserver : c’est le salaire qui va avec.

Mais la plupart des gens ne savent pas comment obtenir de l’argent autrement qu’avec un salaire.

Le parallèle est frappant lorsqu’on pense à la publicité sur le net : la plupart des éditeurs de contenu se plaignent des bloqueurs de publicité. Mais, au fond, ils n’ont que faire d’afficher la publicité chez leurs lecteurs, ils veulent uniquement être payés pour leur travail. Et ils ne voient pas d’autres alternatives. La publicité n’est donc qu’un intermédiaire nécessaire pour transmettre l’argent entre les producteurs et les consommateurs.

Pour certains, l’argent est la racine de tous les maux. Ils rêvent d’une société sans argent.

Mais, comme les deux exemples précédents l’illustrent, je pense que l’argent n’est pas vraiment le problème. Le réel problème c’est notre incapacité à imaginer d’autres modèles pour faire circuler l’argent que des modèles destructeurs et dans lesquels les plus pauvres sont les plus exploités.

Lors d’une rencontre à Lille, Simon, du collectif Catalyst, a utilisé une analogie que j’apprécie beaucoup : l’argent est à la société ce que le sang est au corps. Il est nécessaire, il doit pouvoir se diffuser partout. Mais le but n’est pas d’en avoir le plus possible dans un organe ou un membre, sinon on explose.

Personnellement, je promeus le prix libre : payez si vous le souhaitez, dans la mesure de vos envies et de votre capacité.

Ce système est particulièrement sain : il me pousse à me concentrer sur la qualité et non pas sur le marketing qui va vous amener à acheter mon produit, quitte à ce que vous soyez déçu par après. Il est également très équitable, permettant à tout le monde d’accéder à ce que je produis, sans restriction économique.

On pourrait croire le prix libre cantonné à la sphère internet mais je le rencontre de plus en plus fréquemment. Depuis les cours d’apnée à prix libre aux formations ouvertes avec une tirelire proposant de « contribuer en conscience ».

Pour beaucoup, le prix libre est une utopie : les gens profiteront sans payer. Mais cette manière de penser est justement ce qu’il nous faut changer. Elle provient de cette croyance que tout le monde ne cherche qu’à amasser le plus d’argent, se gonfler de sang jusqu’à éclater. C’est également cette mentalité qui est la cause de l’absurdité de notre vision de l’emploi et de la dégradation de beaucoup de services, dont seul le marketing est efficace. En effet, dans une vision traditionnelle, une fois que le client a payé, on peut se contenter de lui donner le strict minimum.

Et pourtant, la croyance en la cupidité universelle, si fermement ancrée, n’est jamais vérifiée par les faits. Pour beaucoup, y compris pour moi, le prix libre fonctionne mieux que d’autres sources de revenus pour peu qu’il soit bien expliqué et que les « clients » soient conscientisés.

Mieux ! L’équipe du développement Gratipay et le collectif Catalyst ont réalisé des expériences au cours desquelles chacun pouvait choisir son salaire en fonction de sa contribution. Il s’avère que, dans leurs expériences, les humains collaboraient naturellement et ne cherchaient pas à tirer un maximum de profit !

Tout modèle économique autre que le prix libre implique un contrôle total du produit vendu : empêcher le “client” de s’approprier le contenu, de le consulter de la manière dont il le souhaite, de le repartager. Ce contrôle est incompatible avec la vision que j’ai d’Internet et de la société d’abondance.

Je suis convaincu que nous n’aurons à termes que le choix entre une économie basée sur le prix libre ou une censure totale, un contrôle de nos comportements et de nos pensées, que ce soit pour nous faire consommer ou pour nous empêcher de “pirater”.

Il est donc temps de repenser notre rapport à l’argent. De donner l’argent aux gens qui font des choses qui nous plaisent, à des personnes plutôt que pour se procurer des produits sans âme et sans histoire. La publicité n’étant qu’un intermédiaire, elle est en train de connaître le sort qu’Internet réserve à tous les intermédiaires : l’obsolescence. Il est temps de promouvoir le prix libre en l’acceptant lors de nos contributions à la société.

Personnellement, mon blog est payant ! En sus de Flattr, qui est malheureusement en perte de vitesse, j’accepte les dons ponctuels ou réguliers sur Paypal, Liberapay et Tipeee.

Tous les 5 articles, j’activerai Tipeee. Cela signifie que si je n’écris pas, je ne reçois rien. Si j’écris beaucoup, je reçois beaucoup. À vous de décider combien valent 5 articles de ce blog et d’expérimenter concrètement le prix libre en me soutenant sur Tipeee. En mettant 2€ sur Tipeee, vous pensez que chacun de mes articles vaut, en moyenne, 40 centimes. Si vous préférez me soutenir, même symboliquement, à la semaine afin de favoriser les projets d’écriture au long cours, je vous invite à tester Liberapay.

Et si payer pour ce qu’on aime plutôt que ce qu’on nous vend était une de ces nombreuses libertés que nous avons oubliées ?

 

Photos par Pictures of Money.

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Source: https://ploum.net/repensez-largent-et-experimentez-le-prix-libre/


Laissez-moi la nuit !

Friday 16 September 2016 at 22:09

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Pour Stoyan, mon ami et lecteur de ce blog, décédé le 8 septembre 2016.

Laissez-moi la nuit !

Depuis que je suis tout petit,
J’ai été entouré et vous m’avez appris
Que le soleil est source de toute vie.
Aujourd’hui, regardez, j’ai grandi.
Alors laissez-moi la nuit.

Laissez moi ma colère contre les traditions,
Contre les religions et toutes ces règles à la con
Auxquelles on devrait obéir sans poser de question.
Laissez-moi leur hurler, leur crier mon nom
Les secouer dans un grand bruit,
Dans un tohu-bohu, un charivari,
Oui, laissez-moi la nuit.

Laissez moi la nuit
Laissez moi partir dans le noir
Laissez moi vierge de vos espoirs
Laissez moi hurler
Laissez moi choquer
Laissez-moi même si vous n’aimez pas
Laissez-moi même si vous ne comprenez pas
Laissez-moi choisir
Laissez-moi haïr
Laissez-moi être incompris
Laissez-moi la nuit

Ne cherchez pas de responsabilité
Ne vous demandez pas comment me changer
N’essayez pas de modifier le passé !
De l’amour, vous m’en apportez,
Comprenez que personne n’a failli, j’ai choisi
Alors, laissez-moi la nuit.

Lorsque s’évanouit l’illusion d’éternité,
Lorsque meurt le voile de la naïveté,
Lorsque la lumière fait place à l’obscurité,
Il ne reste plus qu’une insatiable quête de liberté.
Laissez-moi ce chemin que j’ai choisi.
Laissez-moi la liberté de la nuit.

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Source: https://ploum.net/laissez-moi-la-nuit/


Sunrise, le calendrier du futur

Thursday 1 September 2016 at 14:31

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En février 2015, Pierre Valade, co-fondateur du calendrier Sunrise, m’a demandé de collaborer avec lui à la rédaction d’un texte explorant le futur possible de notre utilisation d’un calendrier électronique. La société Sunrise a ensuite été rachetée par Microsoft et le calendrier Sunrise a malheureusement été définitivement mis hors-service ce 1er septembre 2016. Avec l’accord de Pierre, j’ai décidé de rendre ce texte public afin de célébrer, une dernier fois, Sunrise et ce qu’il aurait pu devenir : le calendrier du futur !

 

– À ce soir mon chéri !

Je hurle depuis le hall d’entrée tout en enfilant ma veste. La réponse de mon époux me parvient, lointaine.

— À ce soir ! J’ai vu que tu ne rentrais pas trop tard. Je m’occupe de nous préparer un bon petit plat.

Esquissant un sourire, je sors en refermant la porte derrière moi. La voiture est justement en train de se garer. Une légère vibration à mon poignet me confirme que je dois embarquer. La portière s’ouvre et une voix neutre me demande si je suis prêt à partir.

— Oui, confirmation de départ immédiat, annoncé-je machinalement.

Je m’étire et m’installe confortablement dans le fauteuil. Le temps estimé de trajet est inscrit sur un écran : 1h15. Mon interview du jour aura lieu en plein cœur de New York, dans le lounge d’un grand hôtel. Un hôtel que ni Pierre Valade, mon interviewé, ni moi ne connaissons. Mais qui, selon les algorithmes de Sunrise, est le plus propice à notre rendez-vous. Il faut dire que je me suis contenté d’envoyer une demande de rencontre avec quelques explications. Pierre a accepté. Nos agendas ont fait le reste.

À peine ai-je sorti ma tablette de mon sac qu’elle me propose des lectures et des vidéos qui correspondent au temps du trajet. Pratique mais, aujourd’hui, j’ai seulement envie de rêver, de regarder le paysage défiler, de méditer. Je me sens particulièrement zen.

En quelques années à peine, j’ai perdu ce réflexe de stress permanent que nous imposaient nos conventions. Peur d’être en retard, peur de rater un train ou un avion, peur de ne pas avoir le temps. Nous étions tellement obnubilé par la crainte de perdre du temps que nous en passions la majeure partie à organiser nos agendas, à arriver à l’avance à nos rendez-vous. Notre société était pauvre en temps et ceux qui ne le rentabilisaient pas étaient perçus comme des paresseux, des gaspilleurs de temps.

L’utilisation du temps relatif a, de manière surprenante, apporté une solution à ce paradoxe. Désormais, il est rare que je sache l’heure absolue. Je sais juste le temps qu’il me reste avant de me rendre quelque part. Je ne m’occupe même plus de choisir les moyens de transport : je me contente d’inviter mon mari à un week-end romantique à Paris, j’accepte une offre de voyage si elle correspond à mon budget et, après avoir fait nos bagages suite à un rappel judicieusement placé dans mon emploi du temps par Sunrise, nous embarquons dans la voiture qui nous conduit à l’aéroport.

S’arrêtant doucement, la voiture me sort de ma rêverie. Un coup d’œil à mon téléphone m’indique que Pierre vient également d’arriver. Je le repère au fond du lobby.

– Bonjour Pierre !

– Bonjour, enchanté de faire votre connaissance.

Après les présentations d’usage, je me lance directement dans l’interview.

— Pierre, comment vous est venu l’idée de fonder Sunrise ?

— Étant un grand distrait, j’avais tout simplement besoin d’un très bon calendrier.

— Qu’est-ce qui n’était pas satisfaisant avec les solutions existantes ? La plupart des entreprises étaient très satisfaites avec leur calendrier Exchange.

— Microsoft Exchange, comme la majorité des outils de cette époque, cherchait à organiser le problème, pas à le résoudre. Le but d’Exchange était de gérer un calendrier. Le but de Sunrise, c’est de vous permettre de profiter de votre temps. C’est très différent.

— Concrètement, en quoi Sunrise s’est-il démarqué ? Quelle a été l’innovation majeure ?

— Sunrise n’est pas une invention unique, soudaine. C’est un ensemble d’innovations continues, d’améliorations perpétuelles. Google, Microsoft, Facebook et Apple ne s’intéressant pas vraiment au problème, il y avait une place à prendre. Sunrise est né et nous avons acquis de l’expérience, nous sommes devenus des spécialistes, des experts. Nous étions les seuls !

— Et quel est ton rôle dans cette aventure ?

— Je suis un peu le chef d’orchestre. J’ai une vision précise et je cherche à recruter les personnes qui seront capables faire passer cette vision du rêve à la réalité.

— Pourrais-tu me donner un exemple concret de ta vision ?

— Et bien j’etais convaincu que l’optimisation du temps était un problème relativement simple pour un ordinateur alors que les outils existants étaient particulièrement laborieux à utiliser. Sunrise s’est donc concentré sur le design et l’interaction utilisateur. Pas besoin d’algorithme intelligent si personne ne peut utiliser ton application !

— En effet. Mais vous avez cependant introduit beaucoup d’intelligence par la suite…

Il acquiesce avant de jeter un coup d’œil machinal à son téléphone.

— Dîtes, je vois dans mon agenda qu’une parade musicale passe à deux rues d’ici. Ça vous dirait d’aller la voir.

— J’avais prévu de m’atteler à la rédaction de votre interview mais je pourrai faire ça durant mon retour en voiture.

— Elle viendra vous chercher là bas. Et puis, une parade musicale dans les rues de New York, c’est une occasion à ne pas manquer. Autant en profiter !

Me prenant par le bras, il m’emmène vers la sortie. Je résiste pour la forme.

— Au fait, quelle heure est-il ? me demande-t-il mystérieusement.

— Aucune idée ! fais-je, étonné.

— Parfait ! Ignorer l’heure est la meilleure façon de profiter du temps présent.

— Après tout, tant que je suis rentré pour le repas que me prépare mon mari…

— Vous utilisez Sunrise ? Alors, aucun risque ! me fait-il avec un clin d’œil complice.

Au loin, je perçois déjà les premiers échos de la fanfare.

 

Photo par Clément Cousin. Also available in English.

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Ce texte est publié sous la licence CC-By BE.

Source: https://ploum.net/sunrise-le-calendrier-du-futur/


Printeurs 39

Thursday 21 July 2016 at 16:23

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Ceci est le billet 39 sur 40 dans la série Printeurs

Nellio, Eva, Max et Junior fuient l’usine de mannequins sexuels à bord d’un taxi automatique gratuit.

Le taxi nous emmène à toute allure.
— Junior, tu es sûr que l’on ne sera pas tracé ?
— Pas si on utilise le mode gratuit. Les données sont agrégées et anonymisées. Un vieux reliquat d’une ancienne loi. Et comme le système informatique fonctionne, personne n’ose le mettre à jour ni triturer un peu trop les bases de données. Par contre, si on achète quoi que ce soit dans le tunnel, nous serons immédiatement remarqués !

Tout en répondant, il regarde avec émerveillement les doigts métalliques que Max lui a greffé.

— Waw, dire que j’ai attendu tout ce temps pour me faire greffer un implant auriculaire ! C’est génial !
— C’était nécessaire pour t’implanter le logiciel de gestions des doigts, ajoute Max. Mais l’implant auriculaire est fournit avec une légère euphorie pour atténuer la douleur.
— Au fait, Max, où va-t-on ?
— J’ai contacté FatNerdz sur le réseau. Il m’a filé les coordonnées du siège du conglomérat de la zone industrielle.
— Peut-on réellement faire confiance à ce FatNerdz que personne n’a jamais vu ni ne connait ?

Max semble hésiter un instant.

— À vrai dire, que peut-il nous arriver de pire que nous faire descendre par des drones explosifs ? Et c’est ce qui nous arrivera si nous ne faisons rien. Il y a un combat certain pour te capturer, Nellio. Autant tirer tout cela au clair une bonne fois pour toute…

Je me tourne vers Eva.

— Eva ? Parle moi ! Aide-nous !

Elle me darde d’un regard froid, cruel.

— Je pense savoir qui est FatNerdz. Je n’ai pas de preuve mais j’ai l’intime conviction que je le connais bien. Trop bien même…

Je n’ai pas le temps d’exprimer mon étonnement que la voiture ralentit soudainement. Toutes les vitres descendent et nos sièges se tournent automatiquement vers l’extérieur. Junior nous hurle un ordre avec un ton incroyablement autoritaire.

— Surtout, ne touchez rien, n’achetez rien ! Gardez les mains coincées en dessous de vos fesses.

Devant nos yeux se mettent à défiler des distributeurs nous présentant toutes sortes de produits : barres sucrées, boissons colorées, alcools, vêtements, accessoires…

— Junior, fais-je un peu honteux d’avouer mon ignorance, je n’ai jamais pris les tunnels gratuits. J’ai toujours pu me payer des courses individuelles…
— Heureux veinard ! Les tunnels gratuits n’ont de gratuit que le nom. À force de les utiliser, ils coûtent bien plus cher à l’usager que de payer directement des courses individuelles. C’est ce qui rend les pauvres encore plus pauvres : ils vendent la seule chose qui leur reste, leur personnalité et leur libre arbitre, pour une illusion de gratuité.

Des hologrammes commencent à danser devant mes yeux, des femmes et des hommes nus se trémoussent, boivent d’alléchantes boissons et me tendent langoureusement des cuillerées de yaourt ou des morceau de fruits recomposés. Je sens monter en moi un mélange d’appétit, de désir sexuel, de fringale… Instinctivement, je tends le bras vers une délicieusement rafraichissante bouteille de jus…

— Non ! me hurle Junior en me tapant violemment sur le bras. Si tu touches le moindre objet, il te sera crédité via un scan rétinien. Les transactions financières étant étroitement surveillées dans le cadre des lois anti-terroristes, nous serons pulvérisés dans la seconde ! Tiens bon !

La voiture me semble de plus en plus lente. Ce tunnel est interminable.

– Tant qu’on n’achète pas, la voiture ralentit, me souffle Junior. Mais il y a une durée maximale. Tiens bon !

Je ferme les yeux afin de soulager mes pulsions mais les phéromones de synthèse aguichent mes sens. Mes nerfs sont à fleur de peau, je me sens agressé, écorché, violé. Le désir monte en moi, j’ai envie de hurler, je me mords les mains jusqu’au sang. Je…

Lumière !

— Nous sommes sortis !

La voiture reprend de la vitesse Je respire douloureusement. De grosses gouttes de sueur perlent sur mon front. De sa main cybernétique, Junior me caresse l’épaule.

— C’est vrai que ça doit être violent si c’est la première fois. Le problème c’est que lorsqu’on y est exposé enfant, on développe une forme d’accoutumance. Les réflexes d’achats sont ceux ancrés dans la petite enfance. Les publicitaires sont donc dans une concurrence de plus en plus violente afin d’outrepasser ces habitudes.

Je me tourne vers Eva, qui semble être restée impassible.

— Eva, pourtant toi aussi tu m’avais dit ne pas avoir été exposé à la publicité. Encore moins que moi ! Tu m’as raconté que tes parents avaient fait d’énormes sacrifice pour cela.

Elle hésite. Se triture les lèvres. Un silence gêné s’installe que Max rompt.
— Eva, il est peut-être temps de lui dire la vérité.
— Je ne sais pas s’il est prêt à l’entendre…

Je hurle !

— Bon sang, je suis manipulé, pourchassé et traqué, j’ai bien le droit de savoir ce qui m’arrive ! Merde, Eva, je croyais sincèrement que je pouvais compter sur toi.
— Tu as toujours pu compter sur moi, Nellio. Toujours ! Je ne t’ai menti que sur une seule chose : mon origine.
— Alors dis moi tout !
— Je croyais que ce que tu as vu à l’usine Toy & Sex était suffisant.
— Et bien non ! Cela a rendu tout encore plus confus pour moi ! Pourquoi ces poupées gonflables nouvelle génération sont-elles à ton effigie ?

Max émet un son qui, s’il avait un larynx biologique, ressemblerait sans doute à un toussotement.

— Nellio, continue Eva doucement. Ces poupées ne sont pas à mon effigie.
— Mais…
— C’est moi qui suis…

Une formidable explosion retentit soudain. La voiture est soufflée et projetée violemment sur le flanc. Des crépitements d’armes à feu se font entendre.

— Ils nous ont repéré, hurlé-je !
— Non, me répond Junior. Si c’était le cas, nous serions mort. C’est certainement un attentat.

Nous sommes tous les quatre emmêlés, culs par dessus tête. Max tente de s’extirper du véhicule. Ses pieds et se genoux me broient les côtes mais la douleur reste supportable.

— Oh merde, un attentat, soupiré-je en portant la main à mon front ensanglanté. Encore ces foutus militants du sultanat islamique !
— Ou alors, des policiers en service commandé, ajoute Junior avec un sourire narquois.
— Hein ?
— Oui, s’il n’y a pas assez d’attentat, on en organise des petits histoire de justifier les budgets. Parfois ce sont des initiatives locales. Parfois, c’est carrément des ordres qui viennent d’en haut afin de faire passer des lois ou de prendre des mesures. Dans tous les cas, ça fait consommer de l’info, ça occupe les télépass.

La voix de Max nous parvient de l’extérieur.

— Dites, vous vous magnez le train ? Ils sont en train de descendre tout le monde de l’autre côté de la rue. Mais ils risquent bien de venir canarder les survivants de l’explosion.
— Après toi, fais-je à Junior d’un air blasé, heureux de vivre enfin une explosion dont je ne suis pas la cible prioritaire.

 

Photo par Oriolus.

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Source: https://ploum.net/printeurs-39/


Reliez Ottignies et Bruxelles en vélo grâce au VER

Friday 24 June 2016 at 14:27

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Une piste cyclable parfaitement sécurisée et sur site propre pour relier Ottignies à Bruxelles en seulement 16km ? Le tout entièrement financé par l’argent du contribuable ?

Un rêve ?

En fait, c’est déjà une réalité que vous avez déjà financé à hauteur de plusieurs milliards d’euros.

Seul petit problème à régler : les contribuables qui ont financé cette merveille sont interdits d’accès.

Car cette merveilleuse piste cyclable, c’est le tracé du futur RER. Un chantier qui a déjà englouti des milliards d’euros d’argent public pour un résultat qui serait, au mieux, utilisable en 2024. Mais les prévisions les plus réalistes tablent pour une arrivée du RER aux alentours de 2030. Si jamais il est finalement terminé et n’est pas déjà périmé avant même sa mise en service.

De Ottignies à Bruxelles (gare de Boitsfort), il existe donc une véritable route goudronnée, lisse, plate, sans aucune côte et sans aucun trafic. Cette route en parfait état ne s’approche jamais à moins de trois mètres des voies de chemin de fer et en est toujours séparé par une bordure et un écran minimal de végétation. Nous l’avons baptisé le VER, Vélo Express Régional.

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Cliquez pour voir l’animation

L’association cycliste Gracq a très récemment annoncé que certains de ses membres utilisaient certains tronçons du VER. La réaction d’Infrabel, gestionnaire des voies, ne s’est pas fait attendre : l’accès à cette route est strictement interdit voire serait dangereux.

Cette route en parfait état devrait donc rester inutilisée et se dégrader inutilement pendant au minimum une décennie.

C’est pour en avoir le cœur net que cinq cyclistes ont décidé de relier Ottignies à Boitsfort en vélo, un jour de grève générale : Stéphane, Nils, Natacha, Yves et votre serviteur.

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Preuve que l’idée est dans l’air du temps : nous préparions notre action alors qu’aucun de nous n’était au courant de l’action très similaire du Gracq.

Le résultat est sans appel : seul le tronçon entre les gares de Genval et La Hulpe (2km) n’est pas encore aménagé. Le passage est strictement impossible sans s’approcher dangereusement des voies ou en les traversant (l’aménagement étant fait de l’autre côté des voies). Il est donc impératif de quitter le VER avant la gare de Genval et de le reprendre à la gare de La Hulpe, impliquant un détour de 15 minutes.

Le reste du trajet se fait de manière entièrement sécurisée sur une route large et dégagée. Deux passages d’une centaine de mètres sont en sable et en terre mais restent praticables en VTT, le premier à Profondsart et le second dans la gare de Boitsfort même.

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Passage boueux à Profondsart

Au total ? Un VER d’un peu plus de 16km sur un terrain absolument plat. Pour un cycliste entraîné, ce trajet est réalisable en une demi-heure. Et pour ceux qui préfèrent prendre le temps et admirer le cadre très agréable, 45 à 50 minutes semble un grand maximum. Tant que la jonction Genval vers La Hulpe n’est pas finalisée, une petite heure semble un temps raisonnable, même pour un cycliste néophyte.

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Une partie du trajet est même couverte

Autre obstacle imprévu : une étendue de verre brisé dans la gare de Rixensart qui déchirera le pneu de votre serviteur, le forçant à faire demi-tour tandis que les quatre autres continuaient vers Boitsfort.

Mais rien de mieux pour vous convaincre qu’une petite vidéo (d’où il ne manque que les derniers kilomètres).

Alors, est-ce dangereux ?

Oui, clairement. Le fait de devoir faire un détour entre Genval et La Hulpe nécessitant de passer par des rues ouvertes au trafic automobile et sans pistes cyclables est certainement la partie la plus dangereuse du trajet. Un danger que les cyclistes vivent au quotidien mais qui pourrait désormais être évité grâce au VER.

En dehors du tronçon Genval/La Hulpe, les trains restant toujours à une bonne distance ne peuvent en aucun cas représenter le moindre danger.

Est-ce légal ?

Non. Bien qu’il n’y ait ni dégâts matériel, ni victimes, cette action que nous avons entreprise est illégale.

Cette illégalité est-elle justifiable ?

Suite à l’action du Gracq, la réaction d’Infrabel ne s’est pas fait attendre : des bacs de ciment ont été volontairement placés pour bloquer l’accès aux cyclistes. Cette réaction vous semble-t-elle responsable et utile ?

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Infrabel ne supporte pas la concurrence intolérable du vélo

Le pouvoir politique qui lutte pour la mobilité, la réduction des polluants peut-il légitimement décider que les cyclistes n’ont pas le droit d’être protégés et ne doivent en aucun cas bénéficier du VER ?

Ces politiciens ne seront-ils pas moralement responsables si un cycliste se fait renverser par une voiture car il a décidé de respecter l’interdiction d’utiliser le VER et roule au milieu de routes pensées pour l’automobile ?

Un état démocratique qui a financé le VER avec l’argent du contribuable a-t-il le droit d’interdir ces mêmes contribuables de l’utiliser ?

Ne devrait-on pas au contraire finaliser au plus vite la jonction Genval/La Hulpe et inaugurer une formidable voie verte sur laquelle pourrait naître une véritable économie de proximité : buvette pour cyclistes assoiffés, ateliers de réparation, salles de réunions et espaces de travail.

La créativité est sans limite. Il ne reste plus qu’à finaliser l’effort accompli.

Mesdames et Messieurs les politiciens, vous avez aujourd’hui l’opportunité de transformer le plus grand des travaux inutiles belges, véritable gabegie d’argent public (le RER) en un formidable investissement écologique et économique, le VER.

Mesdames et messieurs les politiciens, il suffit d’une impulsion pour finaliser le VER. La balle est dans votre camp !

 

Photo de couverture : départ du VER depuis le pont de Jassans à Ottignies. Photos et vidéos par Stéphane Vandeneede et moi-même.

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Source: https://ploum.net/reliez-ottignies-et-bruxelles-en-velo-grace-au-ver/


Travailler, un luxe que nous ne pouvons plus nous permettre

Thursday 23 June 2016 at 15:55

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De tous temps, la jeunesse est entrée en rébellion contre les vieillards afin de faire évoluer une société que les conservateurs, par essence, veulent figée.

La jeunesse finit toujours par gagner même s’il faut parfois plusieurs générations de jeunes pour faire admettre une idée, avec potentiellement des retours en arrière. Au final, il suffit d’être patient.

Mais aujourd’hui, il y’a un problème pour lequel nous n’avons malheureusement plus le temps d’attendre : la sauvegarde de notre planète.

Nous n’avons plus le loisir de discuter et de laisser le conservatisme accepter péniblement l’idée que, tiens, peut-être que les ressources de la planète sont limitées. Nous ne pouvons plus nous permettre de mettre quinze ans à apprendre à mettre les déchets plastiques dans des sacs bleus pour avoir l’impression de faire un geste pour l’environnement.

Il faut agir radicalement aujourd’hui et maintenant. Il faut repenser fondamentalement tout ce qui, dans notre société, détruit ou justifie la destruction de la planète.

Et l’une des principales sources de destruction est clairement identifiée : l’emploi ! Personne n’ose le dire voire le penser car il s’agit d’un pilier de notre société et de notre identité.

Car quel est le réel problème auquel nous sommes confrontés ? Nous consommons et nous produisons trop ! C’est aussi simple que cela : tout notre modèle de société est basé sur produire plus pour pouvoir consommer plus et consommer plus pour pouvoir produire plus.

Et comme nous sommes de plus en plus productifs pour produire avec moins de travail, nous n’avons d’autre choix que d’augmenter la consommation.

Les emballages biodégradables, les réductions d’émissions, l’isolation des bâtiments et même les marches pour l’environnement pleines de bons sentiments ne sont que cela : des bons sentiments, des vœux pieux.

Tous les discours, toutes les décisions politiques et toutes les technologies “vertes” ne pourront rien faire d’autre que légèrement ralentir l’inéluctable tant que nous n’aurons pas conscience que le seul et unique problème est notre relation au travail.

Car un travail n’est finalement rien d’autre que prendre une partie de ressources de la planète et la transformer en autre chose, en produisant au passage des déchets.

Tant que nous nous évertuerons à vouloir “créer des emplois”, nous consommerons, nous polluerons, nous détruirons la planète.

Or, loin de remettre en question cette cause fondamentale, nous en sommes arrivé à la suprême hypocrisie qui consiste à “créer des emplois verts”. Le discours des partis écologistes est de dire que “être écologique crée de l’emploi”.

Nous essayons de faire en sorte que les voitures polluent un peu moins par kilomètre parcouru, quitte à truquer les tests pour faire semblant, alors que l’unique problème est que nous parcourons bien trop de kilomètres pour… nous rendre au travail. Kilomètres qui nécessitent des routes de plus en plus larges afin d’attirer de plus en plus d’automobilistes qui sont de plus en plus ralentis et donc polluent encore plus.

Nous ne pouvons plus nous permettre de “polluer moins”. Nous ne pouvons plus accepter que les mentions “écologique” ou “vert” soient apposées à coté de tous ce qui est légèrement moins polluant que la concurrence. Nous devons radicalement changer notre mode de vie pour ne plus polluer du tout voir pour régénérer la planète.

La remise en question du travail génère des peurs fondamentales : plus personne ne va rien faire, les gens vont être désœuvrés, la civilisation va s’écrouler.

Mais le pire des scénarios n’est-il pas préférable à l’issue vers laquelle nous nous dirigeons inexorablement ?

Car si nous observons ce que les gens font en dehors du travail, que ce soit en bénévolat, en activité artistique, en entraide, en faisant de l’artisanat ou du sport, une tendance nette s’observe : ces activités détruisent très peu la planète (à l’exception de quelques sports moteurs ou de la chasse).

À l’opposé, le travail est une activité rarement réalisée avec plaisir qui a pour essence même de détruire la planète ou d’encourager à sa destruction à travers la consommation.

Dans le pire et le plus effrayant des futurs, une société de loisirs entraînerait des inégalités, un appauvrissement général voire un écroulement de la civilisation. Le tout potentiellement agrémenté de famines, d’épidémies, de guerre. Nous sommes d’accord que ce scénario catastrophe est improbable mais considérons le pire.

Nous constatons que, pour l’humanité, ce scénario catastrophe n’est pas mortel. Une nouvelle civilisation finira toujours pas renaître.

Tandis qu’en continuant à travailler, à créer de l’emploi et à valoriser le travail, nous détruisons peut-être définitivement notre planète.

Par peur des incertitudes, nous préférons offrir à nos enfants une quasi-certitude : celle d’être l’une des dernières générations d’êtres humains.

L’humanité peut se remettre de toutes les catastrophes. Sauf une. La perte de son unique planète.

Il est urgent de nous débarrasser de l’emploi le plus vite possible. D’arrêter d’essayer de négocier avec les conservateurs inquiets et d’agir sans tenir compte de leur avis. Nous devons unir nos forces aujourd’hui car nous n’aurons pas de seconde chance.

Alors ? Comment fait-on pour arrêter de nourrir le système ?

 

Photo par Alan Cleaver.

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Source: https://ploum.net/travailler-un-luxe-que-nous-ne-pouvons-plus-nous-permettre/


La liberté que nous avons oubliée…

Monday 6 June 2016 at 11:12

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Nous avons cru que tout était propriété, que chaque atome appartenait au premier qui le réclamerait.

Mais nous avons oublié que la matière a toujours existé, qu’elle nous a été transmise et que nous la transmettrons à notre tour, peu importe les transactions, les ventes et les achats. Nous n’en sommes que les dépositaires temporaires.

Nous avons cru que tout se vendait et tout s’achetait. Que pour subsister, il fallait acheter et donc vendre pour gagner de quoi acheter.

Mais nous avons oublié que, parfois, nous n’avons même plus de quoi acheter le minimum vital. Alors nous avons puni ceux qui étaient dans cette situation, nous les avons accusé et nous nous sommes convaincu que nous ne serions jamais comme eux. Nous avons séparé l’humanité en deux.

Nous avons cru que nous devions gagner plus afin de vivre plus et de posséder plus. Que nous n’avions pas le choix. Que nous devions vendre notre corps, notre intelligence ou bien des objets. Ou vendre des idées afin d’aider d’autres à vendre plus. Ou d’enseigner à d’autres la meilleure manière de vendre.

Mais nous avons oublié que le choix, il se prend. Qu’accepter un travail plus loin mais mieux rémunéré afin de consommer plus est un choix. Qu’accepter un travail qui pousse d’autres à consommer est un choix. Nous avons refusé de voir que nous étions chacun responsable de notre travail, de l’impact que celui-ci avait sur le monde.

Nous avons cru que le fait de posséder était notre objectif ultime, que nous devions amasser, acheter, consommer.

Mais nous avons oublié que les objets n’ont pas de maître. Qu’ils peuvent tout au plus nous procurer quelques soupçons de joie lorsque nous les utilisons durant quelques minutes ou quelques heures. Et que, le reste du temps, ils nous encombrent, nous rendent malheureux et nous convainquent d’acheter encore plus.

Nous avons cru que la propriété apportait la liberté. Que le propriétaire pouvait jouir de son bien à sa guise sans se préoccuper des conséquences.

Mais nous avons oublié que les frontières et les tracés ne sont que des délimitations virtuelles. Que nous ne possédons qu’une seule et unique planète qui souffre globalement de chacune de nos actions.

Nous avons cru que les idées étaient une propriété. Que même les semences et le génome devait être breveté. Que partager revenait à voler.

Mais nous avons oublié qu’une idée qui ne se partage pas se fige et s’oublie. Que le vivant n’a que faire de nos brevets. Qu’en tentant de contrôler la propriété, nous ne pouvions qu’arrêter de penser.

Nous avons cru jouir de la propriété.

Mais nous avons oublié que nous ne faisons qu’emprunter au futur chaque molécule, chaque journée.

Nous avons cru ne pas avoir le choix et devoir acheter la liberté.

Mais nous avons oublié que la liberté, c’est avant tout de faire des choix. Nos choix.

 

Photo par Stefano Corso.

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Source: https://ploum.net/la-liberte-que-nous-avons-oubliee/


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