les-crises.fr

Ce site n'est pas le site officiel.
C'est un blog automatisé qui réplique les articles automatiquement

Actu’Ukraine, 18 septembre, par Nicolas

Thursday 18 September 2014 at 00:30

Nicolas est citoyen franco-américain, a vécu au Japon, en Allemagne, en Russie, et en Italie et est actuellement traducteur et consultant export freelance.

Je lui ai proposé de développer ses commentaires dans des billets réguliers.

Commençons par la situation militaire dans le Donbass.

La situation militaire a dans l’ensemble peu changé. Actuellement, kot-ivanov ne met plus sa carte à jour, un autre blogueur a pris le relais

carte au 15/09

carte au 15/09

RPD

Kiev continue de bombarder Donetsk, Makeevka, Gorlovka, Marinka et plusieurs autres villes de RPD (Oktyabrskiy, Azotniy…). Des centaines de soldats de Kiev sont toujours dans l’aéroport de Donetsk, encerclés, et seraient responsables de nombreux bombardements de Donetsk et Makeevka. Il reste le 16 septembre des centaines de soldats de Kiev (y compris de nombreux mercenaires étrangers d’après les rebelles) disposant de dizaines de blindés à déloger de cette position stratégique. De nombreux combats ont lieu sur le territoire de l’aéroport, et la RPD doit repousser des tentatives de Kiev pour entrer dans l’aéroport avec des blindés et briser l’encerclement. Les troupes de RPD continuent de progresser dans l’aéroport et annoncent (encore une fois) que l’aéroport sera bientôt sous leur contrôle. La population de Donetsk subit les bombardements les plus lourds, avec notamment 20 civils tués pour la seule journée du 14 septembre.

À Gorlovka, les rebelles ont repoussé une tentative de percer vers Konstantinovka. (14/09)

Un groupes de soldats de Kiev est encerclé un peu au sud de Debaltsevo (Jdanovka), les rebelles ont repoussé une tentative de briser leur encerclement (14/09). Des renforts à destination de Debaltsevo sont bloqués par les rebelles, certains affirment donc que Debaltsevo est encerclé ce qui est un peu exagéré pour l’instant : les rebelles n’ont pas encore de positions renforcées ni de blindés au nord de Debaltsevo. Les Cosaques du Don et les “Fantômes” (Prizrak) de Mozgovoï sont dans les environs de Debaltsevo.

Des affrontements ont lieu un peu partout sur le front, notamment à Telmanovo (village clé sur la route vers le bout de côte tenu par les rebelles) et Volnovakha (à mi-chemin entre Donetsk et Marioupol), mais aussi Yassinovataya, Novotroïtskoyé, Nijnaya Krynka. Au sud de Donetsk, Starabechevo et ses environs sont sous le contrôle de Motorola et ses hommes, et des rebelles notent sarcastiquement que les soldats ennemis le savent et évitent activement les affrontements avec eux.

Les rebelles continuent de détruire ou récupérer du matériel ennemi, mais à un rythme très réduit : chaque jour, une pièce d’artillerie, un tank, etc, pas plus de 10 “unités” en tout par jour. Un rare tank T-72-M, a été obtenu en très bon état. Cocorico, il est équipé d’électronique Thales ! Merci la France.

T-72-M-Thales

T-72-M-Thales, modèle rare… espérons.

Pas de changement du côté de Marioupol où l’on continue de construire des tranchées. Les rebelles tiennent toujours plusieurs banlieues côté est et sont bombardés par l’artillerie de Kiev. Un couvre-feu très strict est en place à Marioupol. Après la destruction d’un pont au nord de Marioupol, on signale qu’un autre a été miné.

RPL

La situation y est dans l’ensemble plus calme qu’en RPL. Des affrontements sont toutefois signalés à Schastyé (ville clé au nord de Lougansk, aux mains de Kiev), Zolotoyé, Kamychevakha. Ces combats n’ont pas empêché les habitants de Lougansk de fêter le jour de la ville. (14/09)

Notons la présence visible du groupe de bikers “Les loups de la nuit”. Ce club a été créé en 1989 et est connu notamment pour ses relations amicales avec le président russe. Notons au passage que Vladimir Poutine a également d’excellentes relations avec les Cosaques du Don, qui a récemment prêté serment puis défilé à Perevalsk.

Nous constatons donc que tous ces amis qui semblaient un peu folkloriques à la plupart des occidentaux (surtout à ceux qui savent tout mais ne comprennent pas trop ce qui se passe au-delà du périph’ parisien) sont aujourd’hui en première ligne pour défendre les russophones du Donbass, qui ont demandé leur indépendance par référendum, contre l’invasion de Kiev.

Sur la vidéo de la fête de Lougansk, on peut aussi constater qu’un camion porte à la fois le drapeau de l’URSS (athéiste donc, a priori) et un drapeau montrant un visage christique, ce qui rappelle qu’athées et chrétiens combattent ensemble, ainsi que de nombreux musulmans du monde russe (Tchétchènes, Ossètes etc), et probablement des bouddhistes puisque des Kalmouks sont présents (la Kalmoukie est la seule région bouddhiste d’Europe). De même, communistes tsaristes et nationalistes se battent contre l’ennemi commun. Nous aurons le temps de revenir sur ce sujet. Signalons quand même le plus évident : La grande majorité des rebelles sont citoyens de l’Ukraine, beaucoup sont ukrainiens ethniques, et personne ne leur interdit de parler ukrainien (d’ailleurs l’ukrainien est langue officielle de la RPD, selon sa Constitution).

Le 16 septembre, les armées de RPD et RPL ont été unies en armée de Novorossie.

Côté Kiev

Oleg Lyashko, député nationaliste, affirme que 8 000 soldats sont morts, que le gouvernement cache les pertes réelles, et utilise même un crematorium allemand pour faire disparaître les corps des soldats.

crematorium Lyachko

Selon Lyachko, ceci est la photo satellite d’un crématorium utilisé pour brûler les corps de soldats. On n’est pas obligé d’y croire.

Il y a même une photo satellite pour illustrer ses propos. Cette histoire de crématorium est difficile à prendre au sérieux, mais le chiffre de 8 000 soldats tués est plus réaliste que les ~900 annoncés par Kiev. Un indice concernant cette annonce : la page du site du Parti Radical de Lyashko qui parlait de ce crématorium a été effacée. On voit surtout que les adversaires de Porochenko sont prêts à tout pour le discréditer.
La 3e vague de mobilisation s’est très mal passée selon de nombreux observateurs. Kiev continue cependant d’annoncer des bonnes nouvelles, avec la réparation depuis le début de la trêve de 67 “unités” dont 30 tanks et 20 blindés (juste avant la trêve, les rebelles détruisaient ou capturaient près de 30 blindés par jours, tanks compris. Dans la foulée de l’annonce de Kiev, les rebelles ont annoncé avoir 200 “unités” en cours de réparation, avec 50 réparations effectuées par semaine. Une fois n’est pas coutume, les chiffres annoncés d’un côté comme de l’autre ne sont pas invraisemblables.

Comme annoncé précédemment, l’Ukraine a indiqué qu’elle se défendra contre l’invasion russe, et elle se défend. Avec un mur. Ah, un fossé, en fait.

L’idée est de faire une nouvelle ligne Mannerheim, qui a permis à la Finlande de résister à l’URSS de Iossif Djougachvilivi pendant un certain temps lors de la Guerre d’Hiver. Elle était très largement plus faible que la ligne Maginot. Il semble que l’idée soit de dépenser autant d’argent que possible de la façon la plus inutile possible.

Ci-dessus, des tanks russes s’entraînent à passer des fossés. Démonstration est donc faite que le Grand Fossé d’Ukraine en cours de construction n’a strictement aucun intérêt. La vidéo précédente affirme aussi que le Fossé pourrait arrêter des rebelles à pied, difficile de comprendre comment. Ils vont enduire les parois de savon ? À noter que le “mur”, c’est-à-dire le Fossé, sera aussi creusé le long de la frontière avec la Crimée, qui selon Kiev est ukrainienne et qu’ils reprendront bientôt. L’objectif est donc d’empêcher leur propres tanks de reprendre la Crimée ? Tout cela est difficile à comprendre.

Le ministère de la défense ukrainien a officiellement confirmé que les pays de l’OTAN ont commencé leurs livraisons d’armes et de blindés.

Les élections législatives s’approchent dans le territoire contrôlé par Kiev. Il en sera question dans le prochain billet, ainsi que du statut spécial du Donbass promis par Kiev pour 3 ans qui a été voté le 16 septembre. A priori, c’est trop pour Svoboda, Secteur Droit etc, mais pas assez pour le Donbass qui veut simplement l’indépendance.

Échange de prisonniers

Plusieurs échanges de prisonniers ont eu lieu, c’est le point le plus positif de la trêve. Notons que lorsque Porochenko a annoncé que 1200 soldats de Kiev avaient déjà été libérés, il s’agissait simplement de dire n’importe quoi pour annoncer une bonne nouvelle, il en a grand besoin. Il y avait alors simplement un accord pour libérer les prisonniers “tous contre tous”, et une petite vingtaine de soldats de Kiev seulement avaient à ce moment-là été libérés. Depuis, les échanges se succèdent, sous supervision de l’OSCE. Lors d’un premier échange, 36 (37?) soldats de chaque camp devaient rentrer chez eux, Kiev en a relâché 31, contre 36 en échange. Le 14 septembre, 73 soldats de Kiev auraient été libéré contre 68 rebelles (l’accord était 73 contre 73). Les rebelles libérés racontent leur captivité, et l’on apprend qu’il n’y a pas de torture ni même de mauvais traitements systématiques, y compris par le bataillon Aïdar. Cela est rassurant, puisqu’on connaissait jusqu’à présent plusieurs cas de tortures de rebelles prisonniers, dont 2 avaient été battus pratiquement à mort (Strelkov avait annoncé qu’ils n’avaient aucune chance de survivre), et plus récemment les restes de 8 prisonniers du groupe Prizrak (Fantôme) de Mozgovoï ont été retrouvés en très mauvais état, abattus après avoir été torturés par la garde nationale, qui avait promis d’échanger ces prisonniers contre leurs hommes faits prisonniers par Prizrak. Une vidéo montrant les restes de ces hommes, est disponible sur Youtube.

D’autres échanges auront lieu dans les prochains jours, des centaines de soldats restent prisonniers de chaque côté. Zakhartchenko, le premier ministre de la RPD, affirme qu’une quinzaine de soldats de Kiev sont faits prisonniers chaque jour, en grande partie de leur propre volonté.

Situation humanitaire

Les armées de Kiev ont détruit d’innombrables objets d’infrastructure civile, que les autorités de RPL et RPD s’efforcent de réparer. Parmi tant d’autres exemples, le déminage de la voie ferrée d’Ilovaïsk :

Ilovaïsk avait été le théâtre de très lourds combats, au cours desquels des centaines de soldats de Kiev sont morts. Il resterait encore plus de 100 corps de soldats à récupérer. On voit ici que la voie ferrée a été minée. Son déminage permettra à la Novorossie de rétablir un lien ferroviaire avec la Russie. On peut voir sur cette vidéo quelques dégâts causés à Ilovaïsk. Et sur celle-ci, les habitants parlent des bombardements : les dégâts sur leurs maisons, les blessés, les morts, l’absence de matériaux pour réparer, les enterrements à la va-vite, etc. La première habitante remercie notamment les rebelles, qui aident les blessés. À propos du cessez-le-feu : “Après ce à quoi nous avons survécu, on ne peut plus les croire”.

Toujours concernant les réparations d’infrastructures, le 11/09 2 travailleurs réparant les voies ferrées vers Volnovakha ont été blessés, ils auraient été visés par des obus de mortier. En RPL, une ligne électrique a été tirée de la Russie vers Krasnodon, ville frontalière. La ligne devrait arriver jusqu’à Lougansk, ce qui serait une grande amélioration pour les habitants, et permettrait à Lougansk de ne pas être privée d’électricité si les volontaires de Kiev mettent à exécution leur menace de faire exploser la centrale électrique de Schastié (menace évoquée dans un billet antérieur). Dans la foulée, une conduite de gaz pourrait amener du gaz russe, ce qui permettrait à la population novorusse de continuer à vivre plus ou moins normalement pendant que le territoire contrôlé par les oligarques de Kiev (qui n’auront pas froid cet hiver) manque d’énergie et achète du charbon en Afrique du Sud, en Australie et ailleurs. D’ailleurs, l’affaire du “reverse” polonais est tout à fait remarquable en ce qu’elle illustre l’incompétence et l’infantilisme du gouvernement de Kiev : Kiev avait commencé à recevoir du gaz prélevé sur les achats polonais. Ce n’est qu’après que Yatsenyuk s’est vanté de cette opération illégale (contraire au contrat avec Gazprom) que Gazprom a réduit ses envois vers la Pologne. Il aurait suffi que Yatsnyuk évite de publier un message que l’on peut traduire assez précisément par “na na na na na-nère!” pour que Gazprom continue de livrer les mêmes quantités et pour que des dizaines de millions de personnes puissent passer l’hiver presque correctement. Difficile de savoir si le gouvernement ukrainien a déjà touché le fin fond de la bêtise humaine, mais ils creusent !

Dernier point sur la situation humanitaire, 2 000 tonnes d’aide humanitaire sont arrivées à Lougansk le 13, la distribution de cette aide a commencé le 15. Cette aide dont Kiev a essayé d’empêcher l’arrivée est indispensables à une grande part de la population qui est sans ressources depuis des mois, du fait que Kiev a cessé de payer les retraites, les aides sociales, les frais de fonctionnement des mairies, etc. Le 16 septembre, le ministre ukrainien des affaires étrangères a exigé des Russes qu’ils arrêtent leur provocations sous la formes de convois humanitaires. Apparemment, aider la population du Donbass à survivre est une provocation.

Pendant ce temps en Russie

En Crimée et à Sébastopol, comme dans de nombreuses régions de Russie, les enfants ont le choix de la langue de scolarisation. Plus de 2 000 écoles font les cours en tatar, tchétchène, oudmourte etc., c’est ce qu’on appelle le respect des droits des minorités, un concept difficile à expliquer en France dont l’Éducation nationale a eu pour mission pendant des décennies d’éradiquer les langues régionales (le corse, par exemple, n’est toujours pas langue d’enseignement mais seulement enseignée en option, comme une langue étrangère, le breton a quasiment disparu…). Sur une population de 2 million d’habitants, l’ukrainien a été choisi par 230 écoliers. Il y aura donc un seul lycée pour toute la Crimée, à Simféropol, qui proposera une éducation en ukrainien. Les chiffres ne sont pas donnés pour le tatar de Crimée, qui reste une langue d’enseignement dans plusieurs villes à forte population crimo-tatare, sans changement notable par rapport aux années précédentes. Tous les ukrainiens ethniques ne sont pas de langue maternelle ukrainienne, loin de là. En effet il y a près de 500 000 ukrainiens ethniques en Crimée.  Ceci rappelle ce qui a déjà été expliqué dans le passé dans ce blog : On peut comparer dans ce billet la carte indiquant les proportions de russes ethniques à la carte indiquant la proportion d’habitants de langue maternelle russe (25% contre 48% en région de Zaporojié par exemple). Et cela rejoint l’expérience d’un russe vivant aux É-U qui explique pourquoi il donne 100 000 dollars à l’armée novorusse : lorsqu’il était scolarisé en Ukraine, juste après la chute de l’URSS, un sondage a été fait auprès des parents d’élèves pour savoir s’ils voulaient que l’enseignement se fasse en russe ou en ukrainien. La majorité des parents voulaient un enseignement en russe, l’école est passé officiellement en ukrainien (avec des enseignants qui continuaient alors à parler russe). Ainsi, l’ukrainien est clairement moins populaire lorsqu’on ne cherche pas à l’imposer à la population.

Pour compléter, un mot pour signaler la conférence de presse d’Igor Strelkov, stratège qui a retourné la situation militaire en faveur de la Novorossie puis a quitté son poste de ministre de la défense de la RPD pour aller à Moscou, où il affirme être plus utile. Notons au passage que le drapeau qui est sur la table est le drapeau de l’Empire russe. Strelkov étant loin d’être un poutinophile, certains pensaient qu’il serait de leur côté pour renverser Poutine. Malgré les désaccords de Strelkov avec Poutine, ils ont en commun d’être des patriotes et d’êtres confrontés à ceux qui veulent affaiblir et piller la Russie, comme au temps du “bon démocrate” Eltsine. Eltsine était considéré par les dirigeants occidentaux comme un “bon démocrate” parce qu’il vendait les avoirs de l’État à 2% de leur valeur réelle, et Poutine est considéré comme un dictateur essentiellement parce qu’il a mis un terme à ce pillage. Strelkov se range donc du côté de la Russie contre les tentatives de la 5e colonne et de l’Occident de renverser Poutine.

Strelkov parle de sabotage au sein de l’État russe par des agents d’influence qui ont empêché l’intervention russe au moment où elle aurait pu arrêter le conflit avant que les massacres ne commencent (c’est-à-dire en avril). Il ajoute que ces agents d’influence ont manœuvré avec les oligarques ukrainiens pour diviser les rebelles. Il parle aussi de la programmation neuro-linguistique en Ukraine, qui rend la population incapable de distinguer le vrai du faux.

Source: http://www.les-crises.fr/actu-ukraine-18-septembre/