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[Archive] Charlie Hebdo : La nouvelle guerre mondiale menace la liberté en Europe

Friday 10 April 2015 at 00:01

Un vieil article du 8/1/2045, au moement où on ne savait pas grand chose des auteurs de l’attentat. Mais le papier est intéressant en termes de raisonnement / questions posées, par rapport à nos medias mainstream.

J’avais oublié de le sortir ; je le mets simplement pour archive sur ce dossier – ne vous excitez pas trop dessus :)

La question essentielle pour élucider l’attentat contre Charlie Hebdo est : qui sont les commanditaires des tueurs ? Qui sont les hommes de l’ombre ? À qui profite cet acte symbolique ? Quel est le but visé par ceux qui tirent les ficelles ? Ce n’est pas en faisant des discours empreints d’émotion que les gouvernements européens trouveront la réponse à ces interrogations, mais en menant une politique sobre et pragmatique : ils doivent vraiment tirer cette affaire au clair. Sinon L’Europe deviendra, à son insu, le prochain théâtre d’une guerre mondiale qui sévit/existe depuis des années et qui pourrait conduire à la destruction de la société libérale.

Avec le meurtre de sang-froid de 12 personnes dans les bureaux de la rédaction de la revue satirique Charlie Hebdo, la nouvelle guerre mondiale a atteint l’Europe. Les caractéristiques de cette guerre la distinguent des guerres traditionnelles. La tactique employée est dite asymétrique ; car ce ne sont plus des armées traditionnelles qui se font face, mais des commandos-tueurs qui sont de plus en plus composés de mercenaires rémunérés.

Dans le cas de l’attentat à Paris, la question la plus importante est : Qui sont les commanditaires ? Quelles sont leurs motivations ? Qui veut déstabiliser l’Europe – pour quelles raisons et par-dessus tout : dans quel but ?

Dès à présent, l’opinion publique attribue l’attentat aux cercles islamistes, bien qu’on ne sache rien sur les auteurs. On en sait encore moins sur les cerveaux et les hommes de l’ombre. La nouvelle guerre mondiale a lieu sans aucune déclaration de guerre et sans Convention de La Haye. Elle se cherche des cibles symboliques et tue sans se soucier des pertes civiles. Quand la fin justifie les moyens, on cherche des victimes, comme dans le cas de Charlie Hebdo, dont l’assassinat suscite particulièrement l’horreur ; parce que d’un côté ils sont – en tant qu’artistes – particulièrement non violents, mais que d’un autre côté ils représentent – de par les outils à leur disposition – une certaine culture anarchiste, qui représente toujours aux yeux des idéologies totalitaires, un défi déroutant.

La religion joue dans ce contexte un rôle secondaire : deux des victimes à Paris étaient musulmanes. Selon le journal « Le Monde », il s’agit de l’agent de police Ahmed Merabet et du correcteur de Charlie Hebdo, Mustapha Ourad. L’attentat s’inscrit évidemment dans un schéma bien connu ces dernières années, chaque fois qu’un acte s’inscrit dans une « toile de fond islamique » : Le New Yorker rappelle les assassinats des collaborateurs de Salman Rushdie et celui du réalisateur néerlandais Theo van Gogh. Ces assassinats avaient ,eux aussi, une dimension symbolique forte, eux aussi visaient des artistes.

Pourtant ce ne sont ni des émissions télévisées consacrées au conditionnement religieux de quelques cas de musulmans isolés, ni des manifestations de protestation passionnées qui permettront d’éclaircir l’attentat de Charlie Hebdo. L’Islam, en tant que religion, pourrait avoir joué un rôle − bien que l’on n’en sache encore rien − en cela qu’elle aurait permis aux instigateurs d’amener les tueurs, après lavage de cerveau, endoctrinement, ou bien en utilisant un fanatisme préexistant, à surmonter les dernières inhibitions avant le passage à l’acte. Si tel est le cas, on doit se poser les questions suivantes : Qui sont les groupes qui utilisent ce genre de méthodes ? Qui utilise ailleurs des méthodes semblables ? Quels sont les réseaux ? Avec qui les tueurs avaient-ils des contacts ?

L’attentat parisien comporte cependant une différence essentielle par rapport aux attentats suicides classiques : dans ces cas les tueurs sont drogués ou conditionnés pour être aussi eux-mêmes prêts à mourir. Dans le cas de l’attentat parisien, ce n’était apparemment pas le cas : les tueurs se sont enfuis – et n’ont donc pas pensé aux fameuses vierges de l’au-delà vers lesquelles leurs actes les menaient. Leur idée était de continuer à vivre sur terre, et elle se manifesta également par le fait que l’un des complices se serait manifestement rendu à la police.

L’enquête criminelle sur l’affaire Charlie Hebdo doit être menée à froid, de façon lucide, comme tout autre meurtre. Cela comprend la conservation de l’ensemble des preuves, une enquête systématique concernant les auteurs et une traque sans relâche des commanditaires de ce crime organisé. Le fait que les auteurs auraient oublié leurs cartes d’identité dans le véhicule ayant servi à leur fuite intrigue. En faisant parvenir des bribes d’informations aux médias, les autorités assouvissent certes le voyeurisme, mais empêchent cependant éventuellement l’éclaircissement de l’affaire et éveillent le soupçon de se satisfaire d’actes symboliques.

Il ne devrait pas en être ainsi, si nous voulons mettre fin à ce genre de terrorisme moderne.

À Paris, les assassins ont effectivement agi différemment des fanatiques religieux classiques. Sur les vidéos disponibles, ils ont plutôt un profil de tueurs à gages. Des experts en terrorisme, qui sont souvent étonnamment rapides à proposer une explication – comme c’est le cas pour Rolf Tophoven dans Focus – estiment que les assassins auraient agi comme un « commando d’exécution parfaitement organisé ».

Autant l’affirmation qu’ il s’agit de personnes avec une formation militaire semble pertinente, autant la référence à la perfection laisse à désirer : selon des informations médiatiques concordantes, les tueurs ont attendu d’être dans l’immeuble pour demander où se trouvait la rédaction. Une designer a été obligée d’entrer le code de la porte afin de permettre l’accès des meurtriers à leurs victimes.

Ceci dénote une action de commando ciblée, mais plutôt médiocrement préparée. Même en tenant compte des témoignages rapportant les invocations par les attaquants au Prophète, à Al Qaida et d’Alah Akbar, on ne peut y déceler aucune motivation religieuse. Contrairement à l’attentat parisien, l’assassinat de juifs dans un musée bruxellois était clairement un attentat islamique, dès lors que son auteur s’est finalement révélé être revenu de Syrie. En revanche, les auteurs de l’attentat à Paris pourraient être des mercenaires qui n’arrivent cependant pas à la hauteur de tueurs professionnels.

Impossible de dire si les auteurs ont un lien avec la guerre en Syrie, comme le suppose la revue Le Point. À la lumière des informations précédentes, tout ce que l’on peut affirmer avec une quasi-certitude est le fait qu’il s’agit de tueurs à gages ; aussi bien le déroulement de cet acte criminel que le choix des victimes étayent le soupçon.

Un sondage du Point indique que 90 pour cent des Français s’attendent à de nouveaux attentats. Ces craintes pourraient être justifiées. Car les tueurs gagnent leur vie en participant à cette guerre confuse et transfrontalière.

Il suffit de regarder les nombreuses interventions sur tout le globe de troupes n’opérant sous aucun drapeau national pour démontrer à quel point le statut de mercenaire est devenu courant.

En Syrie, des mercenaires venus du monde entier se battent aussi bien du côté du gouvernement que de « l’opposition armée ». En Arabie Saoudite, des dons provenant de cheikhs fortunés ont été collectés pour financer la guerre contre le régime de Bachar El-Assad. L’Etat islamique (EI) est constitué de 7 000 à 12 000 hommes. Parmi eux, il y aurait 3 000 étrangers. Beaucoup d’entre eux viendraient d’Europe, rapporte The Telegraph.

En 2013, le régime de Bachar el-Assad a, de la même façon, enrôlé 267 soldats de l’unité paramilitaire russe « Corps Slave » afin de combattre les forces islamistes armées ainsi que celles de l’armée syrienne libre. Leur zone d’intervention s’étend à Homs et Deir ez-Zor, rapporte le Huffington Post. Les combattants russes sont incorporés sous contrat au sein d’armées privées.

Cependant, la ligne de front en Syrie et en Iraq est souvent opaque, car de nombreuses armées privées internationales participent aux conflits en y envoyant des soldats sous contrat. Ces derniers ne sont motivés par aucune considération religieuse ou politique ; leur métier est d’être mercenaire. David Isenberg, un vétéran de la marine US et analyste à la société de conseil géopolitique Wikistrat, rapporte dans son site web que ces soldats privés sont majoritairement originaires des USA, du Canada, d’Allemagne, d’Australie, du Danemark, du Royaume-Uni et parfois des Pays-Bas.

Dans le livre Big Boy Rules de Steve Fainaru, il est question du soldat Chris Jackson. Il était employé en Irak par Crescent Security. « La seule chose à laquelle tu penses, c’est l’argent. On a 50 000 dollars US sur un compte et un mois plus tard s’y trouvent 57 000 dollars US », tels sont ses mots rapportés par Fainaru à la page 51.

L’Etat Islamique attire aussi des combattants potentiels avec de l’argent. « Ils me donnaient 1 500 dollars US chaque mois (cinq fois le revenu moyen syrien) ainsi qu’une auto, une maison et toutes les caméras dont j’avais besoin (…) L’équipement dont ils disposaient là-bas était étonnant », disait dans le Financial Times un ancien combattant de l’Etat Islamique.

L’argent nécessaire à l’État islamique pour financer ses combattants proviendrait des états pétroliers du Golfe, rapporte The Daily Beast. L’ancien secrétaire général de la sécurité nationale d’Arabie Saoudite, Bandar Ibn Sultan, est considéré comme un des plus importants soutiens de l’État Islamique. Son intérêt principal est de faire reculer l’influence de l’Iran et des chiites au Proche-Orient, rapportait The Independent. Cependant, la domination des pro-iraniens et des chiites dans le gouvernement central irakien est également un problème pour les états du Golfe.

En outre, les raisons de la politique énergétique jouent aussi un rôle important. Selon des informations du service secret US privé Stratfor, le gouvernement de l’Iran est le plus important concurrent de l’Arabie Saoudite au niveau de la politique énergétique. Ces derniers jours, une tentative d’attentat suicide est survenue à la frontière saoudienne. L’Arabie Saoudite est elle-même une monarchie marquée par le droit coutumier islamique dans laquelle les minorités religieuses sont opprimées, en particulier si elles appartiennent à un autre courant de l’Islam.

En Ukraine également, des mercenaires se battent des deux côtés : les uns financés par l’Ouest, les autres par la Russie. Ce sont souvent des Tchétchènes qui en fin de compte luttent les uns contre les autres pour gagner leur vie.

Cela fait des années que le journal Foreign Affairs a mis en garde le gouvernement des USA : ne pas sous-estimer la situation économique qui a poussé de nombreux Syriens et Irakiens à se mettre au service de l’État Islamique. La raison est simple : L’EI rémunère mieux que les autres organisations politiques.

Pour faire toute la lumière sur la frappe contre Charlie Hebdo, il est donc primordial de ne pas se focaliser sur le seul caractère “islamiste” des exécutants. Le rôle de bouc émissaire que l’on attribue habituellement aux musulmans arrange pas mal de monde : les politiciens d’extrême-droite peuvent en tirer parti. Dans un discours prononcé après l’attaque, la chef du Front National Marine Le Pen a indiqué que la France devait se protéger de l’islamisme militant de toutes les manières possibles, pour insister sur le fait que son parti était le mieux à même de le faire. Le président russe Vladimir Poutine lui aussi met depuis longtemps en garde contre les islamistes tout en restant sur ce point au niveau des généralités.

Dans cet ordre d’idée, la remarque de l’ancien membre de haut rang des services secrets turcs Mahir Kaynak récemment parue dans le journal turc Stargazete est particulièrement intéressante : la Russie veut que l’Ouest prenne conscience de la dangerosité des groupes islamistes et par conséquent souligne à chaque occasion que la Russie est plus à même de tenir en échec les sociétés islamiques sous son contrôle – notamment afin d’empêcher que les européens n’étendent leur influence aux états islamiques voisins de la Russie.

L’Arabie Saoudite ne manque pas une occasion de réaffirmer que l’Islam ne constitue pas un danger lorsqu’il est encadré par le droit et par la loi. Dans l’acception saoudienne, ceci ne correspond toutefois point aux lois libérales des sociétés occidentales, mais à son système totalitaire dans lequel les droits de l’homme n’ont de validité que dans la mesure où la dynastie régnante considère la chose comme opportune.

Les sociétés occidentales ne pourront se protéger contre d’autres commandos de tueurs que si elles parviennent à retrouver ceux qui tirent les ficelles, si elles stoppent toute relation de connivence avec eux et arrêtent de les financer ; elles devront renoncer à des profits probablement importants générés par les ventes d’armes et les importations de matières premières.

Il ne s’agit pas là d’une question de culture, encore moins de religion. Ce problème ne peut pas être résolu par des discours emphatiques, ni par des appels à l’unité nationale. Les services secrets ne peuvent pas non plus le résoudre en restreignant davantage les droits des citoyens. Et l’on résoudra encore moins le problème en laissant planer un soupçon généralisé sur tous les musulmans.

Si tant est que cela soit possible, on ne mettra fin aux agissements d’assassins comme ceux qui ont décimé Charlie Hebdo que par une enquête policière approfondie et par une politique réaliste, dans laquelle les gouvernements ne tiennent pas de beaux discours du dimanche, mais retrouvent les commanditaires, les désignent nommément et les isolent.

Dans ce domaine, la communauté internationale des états doit accepter de se voir reprocher que des actes terroristes commis en Europe n’aient toujours pas été élucidés, bien que cela ait été à chaque fois promis dès le premier choc émotionnel. Jusqu’à aujourd’hui, il n’y a pas d’explication au massacre du Maïdan de Kiev, jusqu’à aujourd’hui on ne sait pas qui a tiré sur l’avion MH17. Dans aucun de ces deux cas on n’a appréhendé les coupables, sans même parler de punir les commanditaires.

Les gouvernements européens sont maintenant confrontés à la question suivante : de quelle manière empêcher une guerre civile à caractère religieux ? La nouvelle guerre mondiale ne peut être évitée qu’en faisant tomber les masques des instigateurs de ces commandos suicides. Le New Yorker qualifie les meurtriers de « soldats dans une guerre contre la liberté de pensée et d’expression, contre la tolérance et le pluralisme ». Pour gagner cette guerre, l’Europe doit tout d’abord trouver les chefs de guerre et les capturer. Faute de quoi, la guerre contre le terrorisme se transformera en guerre idéologique et la sécurité intérieure en fantôme.

Ce n’est que lorsque les gouvernements européens entreprendront la recherche des instigateurs sans considération de personne qu’ils pourront le mieux empêcher la propagation de la guerre en Europe. Tout le reste n’est qu’illusion, car, dans une société libre, on ne peut arrêter des tueurs professionnels que si l’on met la main sur ceux qui émettent les chèques pour ces meurtriers.

Source : Deutsche Wirtschafts Nachrichten, le 08/01/2015

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Des experts médico-légaux de la police française fouillent durant la nuit un appartement à Reims. La question cruciale est de savoir : qui a envoyé les tueurs au bureau de Charlie Hebdo ? (Photo : dpa)

Source: http://www.les-crises.fr/charlie-hebdo-la-nouvelle-guerre-mondiale-menace-la-liberte-en-europe/