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Les communs anticapitalistes comme stratégie de décroissance ?

Saturday 31 December 2022 at 06:55

La décroissance, comme cadre conceptuel et instrument politique, est devenue de plus en plus motivante tant pour la recherche intellectuelle que pour de nouvelles pratiques militantes en imagiant et mettant en œuvre des façons nouvelle pour articuler les liens entre société, économie et nature. Aujourd’hui, le concept est entré dans la littérature scientifique (1), le vocabulaire des mouvements sociaux (2), le débat public sur l’élaboration des politiques, et même au Parlement européen (3) dans un périmètre allant de l’ajustement des infrastructures à la réorganisation du travail, en passant par les économies solidaires, le plafonnement des ressources et les alternatives au PIB.

Source : Academia, Bengi Akbulut
Traduit par les lecteurs du site Les-Crises

Bien qu’elle soit généralement perçue comme une réduction d’échelle sur le plan matériel, on peut utiliser la décroissance, et on le fait, pour envisager et exiger une transformation beaucoup plus globale (et radicale) des sociétés et des économies. La décroissance est en effet une proposition de réduction (et de stabilisation) volontaire, équitable et démocratique, de la production matérielle et énergétique par laquelle la société extrait, transforme, transporte et distribue aux fins de consommation mais aussi élimine en tant que déchet (4). Il ne s’agit pas seulement d’une question de durabilité environnementale : et c’est là un aspect important de cette réduction d’échelle, souvent négligé, il s’agit aussi d’une perspective inséparable de la justice sociale. La réduction d’échelle de la production et de la consommation est en soi une exigence de justice ; celle-ci passe par la décroissance, dans la mesure où les effets négatifs de l’utilisation croissante des ressources et de l’élimination des déchets ne sont jamais répartis de manière égale au sein des sociétés ou entre elles.

Pourtant, la décroissance n’est pas seulement une question quantitative consistant à faire moins de la même chose (5), beaucoup plus fondamentalement, il s’agit d’un appel à rompre radicalement avec l’impératif de croissance et à détrôner la croissance économique en tant qu’objectif sociétal. La décroissance lance un défi plus large à l’économisme, c’est-à-dire à la logique économique qui colonise notre imagination (6) et à la rationalité économique qui domine toutes les autres rationalités, objectifs et représentations sociales. Elle cherche à déconstruire et à s’opposer à l’inévitabilité de l’impératif de croissance et à son association automatique avec la notion de progrès, et vise à éluder l’économie en tant que système de représentation. (7) Cela implique une nouvelle conception des relations, des identités et des activités économiques dans des termes différents (non économiques), dissociés des représentations économiques ; une remise en question radicale des objectifs d’efficacité et de maximisation du profit (ou de l’utilité) (8) ; et une (re)politisation de l’économie en mettant l’accent sur la démocratie dans son élaboration (9). En ce sens, la décroissance est porteuse d’un énorme potentiel de reconstruction et de réinvention de la sphère économique en tant que domaine où des décisions éthiques et politiques peuvent être prises.

Dans une optique connexe, la décroissance ne signifie pas seulement moins mais également différent : elle demande une réorientation des rapports économiques selon des principes différents, vers une structure différente, afin de remplir des fonctions différentes (10). C’est une proposition pour aller vers une société où l’économie et, partant, le métabolisme social – comment les sociétés organisent leur interaction avec les flux de matières et d’énergie – sont organisés différemment. Parmi les principes et notions évoqués dans ce cadre figurent la prise en charge, le soin, le partage, l’autonomie, la solidarité, la justice, la démocratie et la convivialité. Ainsi, la mise en place et le développement d’économies alternatives, c’est-à-dire de processus de production, d’échange, de travail/rémunération, de finance et de consommation qui diffèrent sciemment de l’activité économique dominante (capitaliste), sont fréquemment identifiés comme une des facettes de la décroissance.

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