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[Reprise] Marina Silva, nouvelle droite sud-américaine

Saturday 25 October 2014 at 02:03

Rétrospective amusante…

1er octobre 2014

Le premier tour de la présidentielle au Brésil aura lieu le 5 octobre. Les deux candidates, Marina Silva et Dilma Rousseff, la présidente actuelle, sont au coude à coude dans les sondages. Mais qui est vraiment Marina Silva ? Un décryptage de Vadim Kamenka pour l’Humanité Dimanche HD430.

La course à la présidentielle au Brésil se polarise autour de l’affrontement entre Dilma Rousseff et Marina Silva. Mais l’enjeu demeure le même qu’au Venezuela, en Bolivie, en Équateur et en Argentine  : la continuité d’une politique progressiste ou le retour à un projet néolibéral déguisé. L’échec de Dilma Rousseff signifierait le retour triomphal de la droite dans un des plus importants pays d’Amérique du Sud (1). Car « Là où le Brésil va, l’Amérique latine ira », affirmait, en son temps, le président Richard Nixon en 1971. Il ne faut surtout pas se tromper sur la victoire de Marina Silva  : c’est « l’annulation de tous les progrès réalisés depuis 12 ans », affirme Samuel Pinheiro Guimaraes, ancien secrétaire général du ministère des Affaires étrangères du Brésil.

Derrière la candidate du Parti socialiste brésilien (PSB, centre-droit), qui se présente comme une figure nouvelle, il y a des grands groupes privés opposés aux intérêts publics et aux droits sociaux obtenus au fil des années. Baisse du chômage, hausse du salaire minimum et des budgets de l’éducation et de la santé  : Lula et Dilma ont permis d’accroître le niveau de vie de la population. « Il faut bien se rendre compte que 40 millions de Brésiliens ont pu sortir de la pauvreté depuis 2002. Bien sûr que le projet du Parti des travailleurs (PT) n’est pas révolutionnaire et d’importantes inégalités sociales et régionales demeurent. Mais c’est dû au régime constitutionnel qui est un présidentialisme de coalition », rappelle le chercheur Jean Ortiz.

Dilma Rousseff, faute de réforme, applique une politique de conciliation, qui ne rogne pas sur les profits des entreprises, et ne bouscule pas les privilèges des puissants. « Cette politique est causée par la dépendance du PT vis-à-vis du Parti du mouvement démocratique brésilien (PMDB) au Parlement qui limite sa marge de manœuvre et aux nombreux liens des parlementaires avec des grands groupes. Toute possibilité de changement politique avec le Congrès actuel est impossible », analysait le dirigeant du Mouvement des sans terre (MST), João Pedro Stedile (1).

Du coup, les tensions sociales sont palpables depuis les grandes mobilisations en juin 2013. Pour Frédéric Louault, professeur à Sciences-Po et auteur de livres sur le Brésil, « Cette colère des Brésiliens n’était pas dirigée contre la politique de Dilma. Les frustrations étaient locales comme à Sao Paulo, un État dirigé par le PMDB ». Ces mouvements ont trouvé une place importante dans les médias. À l’instar des autres pays sud-américains, ces derniers sont concentrés entre les mains de familles puissantes et sont une arme clé dans la bataille idéologique. Ces médias soutiennent clairement la candidate Marina Silva qui joue sur son histoire personnelle pour se poser en candidate écologiste, qui entend dépasser le clivage droite-gauche…

Son programme ne laisse pourtant guère de doute sur son orientation néolibérale  : indépendance de la Banque centrale, réduction de l’investissement du pays dans le secteur énergétique (« présal »), sortie du Mercosur pour le remplacer par des accords bilatéraux et aucune opposition aux cultures transgéniques. Le sociologue brésilien Emir Sader explique  : « L’autonomie de la Banque centrale est l’un des dogmes les plus fondamentaux du néolibéralisme. Cette autonomie provoque l’affaiblissement de l’État et le renforcement de la centralité du marché. La maîtrise de la politique monétaire doit servir le renforcement d’un modèle de développement économique recherchant une meilleure répartition du revenu national. Enlever cette capacité affaiblit toute la politique distributive. »

La candidate écologiste incarne donc cette « nouvelle droite » sud-américaine. Elle s’attaque aux alliances régionales (UNASUR, CELAC) en voulant relancer le traité de libre-échange avec les États-Unis – bloqué par la victoire de Lula en 2002 – et son équipe de campagne regroupe des anciens ministres des gouvernements de droite, comme Andre Lara Resenda, Giannetti da Fonseca ou Neca Setubal, l’héritière de la banque Itaú, une des plus grandes banques privées brésiliennes.

Source : Investig’Action

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Brésil : Marina Silva ne laisse aucun doute sur son projet

Emir SADER, 6 septembre 2014

(Marina Silva est ex-membre du Parti des travailleurs (PT) et a été sénatrice avant de devenir ministre de l’Environnement du gouvernement Lula de 2003 à 2008. Candidate à l’élection présidentielle de 2010 pour le Parti vert du Brésil, elle arrive troisième avec près de 20% des voix. Après avoir échoué à créer son propre parti, elle rejoint en 2013 le Parti socialiste brésilien (PSB) et aurait occupé le poste de vice-présidente en cas de victoire du candidat Eduardo Campos pour l’élection présidentielle de 2014. Après la mort de ce dernier dans un accident d’avion le 13 août 2014, elle est désignée candidate du PSB.)

Il y a quelques semaines, Marina Silva a lancé sa candidature à la présidence du Brésil. Dans son programme, trois points se distinguent par leur importance : l’indépendance de la Banque centrale, une importance moindre donnée au Pré-sal et au Mercosur, ce dernier étant remplacé par des accords bilatéraux. Ces trois points ne sauraient être plus plus significatifs, car ils entrent directement en conflit avec les orientations des gouvernements de Lula et de Dilma. Les trois, ensemble, pointent sur un projet d’orientation nettement néolibérale.

L’autonomie de la Banque centrale est l’une des thèses les plus préconisées par les recettes néolibérales. Elle provoque l’affaiblissement de l’État et le renforcement du centralisme du marché, alors que cette indépendance de la politique monétaire est normalement l’oeuvre du gouvernement, qu’il applique à un modèle de développement économique inextricablement lié à la répartition du revenu. Retirer au gouvernement son contrôle de la politique monétaire et la laisser soumise à l’influence directe des acteurs du marché – en particulier du système bancaire privé – revient à déplacer la capacité de ce modèle à soumettre l’équilibre budgétaire à des politiques distributives, en se soumettant, au contraire, à la centralité de l’ajustement fiscal, recherché par le néolibéralisme.

Diminuer l’exploration du Pré-sal revient à jeter par-dessus bord la capacité du Brésil à s’affranchir en termes de politique énergétique, de disposer d’une grande quantité de ressources provenant de l’exportation, ainsi que de consacrer 7,5 % de ces ressources à l’éducation et 2,5% à la santé, conformément à une décision déjà adoptée par le Congrès.

Ce serait aussi une politique suicidaire en termes de développement technologique du Brésil, et diminuerait l’impulsion économique obtenue par les immenses demandes exigées par l’exploration du Pré-sal.

Ces positions se complètent – et gagnent leur plein sens – lorsqu’on examine ce que peut vouloir dire diminuer l’importance du Mercosur et développer des accords bilatéraux. Le MERCOSUR a signifié jusqu’ici la politique de priorité des accords régionaux face au Traité de libre-échange avec les États-Unis, prêché par le gouvernement de Fernando Henrique Cardoso et bloqué par la victoire de Lula en 2002.

Minimiser l’importance du Mercosur, en réalité, signifierait nier l’importance de toute la gamme des instances d’intégration développées et créées ces dernières années : la Banque du Sud, le Conseil sud-américain de la défense, l’Unasur, la Celac, ainsi que les Brics et leurs accords nouvellement établis, qui comprennent la Banque de développement et le Fonds de réserves de soutien aux pays ayant des problèmes de devises.

Le programme ne dit pas clairement de quel type d’accord bilatéral il s’agit, mais il est à craindre que ce soit, surtout, des accords avec les États-Unis et les pays centraux du capitalisme. Il sera alors impossible au Brésil de continuer dans le Mercosur, et aboutira, peut-être, à une rupture totale du pays avec tous ces organismes et une réinsertion radicale et subordonnée à la sphère des États-Unis, avec toutes les conséquences régionales et mondiales que cela suppose.

Il ne fait aucun doute que la forme de l’affrontement électoral a changé, avec la polarisation autour de Marina Silva et de Dilma Rousseff, mais le contenu reste le même : continuité du gouvernement postnéoliberal du PT ou retour à un projet néolibéral, maintenant déguisé de quelques – assez peu – oripaux et déclarations écolos (Marina a déjà déclaré qu’elle n’a jamais été contre les cultures transgéniques) ou un prétendu renouvellement de la politique, au-dessus des partis et de la polarisation gauche-droite, tout en regroupant à droite toute derrière elle.

C’est un vrai cadeau pour la droite brésilienne et pour les États-Unis, qui étaient près de voir leurs candidats et ses thèses éliminées une fois de plus. Le monopole privé des moyens de communication – le véritable parti de la droite – sans doute obtiendrait une grande victoire, dans le cas où sa nouvelle candidate parviendrait à vaincre le gouvernement du PT – objectif unique, par n’importe quel moyen, de la droite brésilienne et de Washington. C’est ce qui est en jeu maintenant au Brésil.

Marine indique clairement la nature de son projet par ses positions, mais également en regroupant dans la coordination de sa campagne électorale des noms connus du néolibéralisme : Andre Lara Resenda, ancien ministre des gouvernements Collor de Melo et Cardoso ; Giannetti da Fonseca, notoire idéologue néolibéral, et Neca Setubal, héritière de la Banque Itaú, l’une des plus grandes banques privées brésiliennes. Avec ces positions et cette équipe, l’ex-leader écologiste Marina Silva se convertit pleinement au néolibéralisme.

Emir Sader

Source : Le Grand Soir

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Épilogue :

“La candidate écologiste brésilienne Marina Silva a officiellement apporté son soutien, dimanche, au candidat social-démocrate [Traduction : de droite] Aécio Neves, qui affrontera la présidente sortante Dilma Rousseff au second tour du scrutin le 26 octobre.” (Source : France24)

Source: http://www.les-crises.fr/marina-silva-nouvelle-droite-sud-americaine/