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Russes et Occidentaux s’affrontent à Munich

Tuesday 16 February 2016 at 01:15

Encore un grandiôse travail du Monde.

Comparez les extraits des propos russes, systématiquement coupés, par rapport au travail des deux autres médias.

À ce stade, et même si je n’aime pas ça, la bonne foi n’est plus accordable…

[Le Monde] Russes et Occidentaux s’affrontent à Munich

Source : Le Monde, Frédéric Lemaître, 13-02-2016

Lors du discours de John Kerry au sommet sur la sécurité de Munich. CHRISTOF STACHE / AFP

Le ton est monté entre dirigeants russes et occidentaux, samedi 13 février à la conférence sur la sécurité de Munich, à propos de la Syrie, de l’Ukraine et de la crise migratoire, au cours d’échanges dont la dureté fait douter des chances de réussite de l’accord conclu vendredi dans la même ville, en vue d’une trêve temporaire en Syrie.

Le premier ministre russe, Dmitri Medvedev, a d’ailleurs reconnu que « le tableau était encore plus sombre qu’en 2007 », l’année où le président Poutine était intervenu devant la même conférence. Juste avant son arrivée à Munich, M. Medvedev avait d’ailleurs mis en garde les Américains et leurs alliés arabes en Syrie contre une « nouvelle guerre mondiale », dans un entretien accordé au quotidien allemand Handelsblatt, où il qualifiait aussi la Russie de « plus grande puissance nucléaire mondiale ».

A la tribune, qu’il partageait avec Manuel Valls, il a accusé l’OTAN d’être « toujours aussi inamicale et opaque » et demandé à son secrétaire général, qui avait pris la parole juste avant pour défendre les mérites de la dissuasion nucléaire, si l’on était « en 2016 ou en 1962 ». Le premier ministre russe a dressé un catalogue apocalyptique des crises auxquelles fait face la communauté internationale, attribuant la responsabilité du terrorisme, de la crise migratoire, de la crise ukrainienne et du printemps arabe aux « tentatives infructueuses d’imposer une démocratie à l’occidentale ». Et pour faire bonne mesure, il a ajouté une crise qui n’est peut-être pas encore sur l’écran radar des Occidentaux : la Moldavie, plongée dans une grave crise politique, et où l’armée russe entretient encore des troupes.

Aux orateurs français et américain – Jean-Yves Le Drian et Manuel Valls, puis le chef de la diplomatie américaine John Kerry – qui demandaient à la Russie de cesser les bombardements de civils et de l’opposition modérée en Syrie, M. Medvedev a répondu en démentant catégoriquement que son pays prenne des civils pour cible : « Il n’en existe aucune preuve », a-t-il assuré.

« Cet accord de Munich sera impossible à réaliser, et ce sera la faute des Américains »

Mais c’est peut-être son ministre des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, qui a été le plus dur en douchant brutalement, à la fin d’un débat avec plusieurs de ses collègues européens, les espoirs de réussite de l’accord conclu le 12 février à Munich sur la Syrie. Alors que l’Allemand Frantz-Walter Steinmeier venait d’évaluer « à 51 % » les chances de succès de cet accord, M. Lavrov a accusé le Pentagone de dire le contraire du département d’Etat. En réalité, a-t-il conclu, « tout cela veut dire que les Etats-Unis ne vont pas cesser leurs frappes aériennes mais que la Russie doit arrêter les siennes. C’est malheureux, mais ça signifie que cet accord de Munich sera impossible à réaliser, et ce sera la faute des Américains ». Le secrétaire au Foreign Office, Philippe Hammond, a jugé possible le déblocage de l’aide humanitaire mais s’est montré plus sceptique sur la cessation des hostilités.

John Kerry, le secrétaire d’Etat américain, n’a pas repris à son compte la thématique de la guerre froide mais « la recherche de la paix et de la liberté restent aussi importantes qu’il y a cinquante ans », a-t-il fait remarquer. De plus, « jamais dans l’histoire, les crises n’ont été si nombreuses et si importantes ». Alors que Dmitri Medvedev venait de dénoncer les sanctions occidentales contre Moscou, l’Américain a renvoyé la balle dans le camp russe : « La Russie a le choix : appliquer les accords de Minsk ou subir les sanctions. » Même si Washington n’est manifestement pas totalement satisfait de la politique suivie par Kiev. « 2016 est l’année où l’Ukraine peut prouver que la corruption peut être vaincue », a-t-il indiqué, quelques jours après la démission du ministre de l’économie qui entendait ainsi protester contre la corruption. Signe de l’engagement des Américains en Europe : les Etats-Unis vont quadrupler le budget de leurs dépenses militaires destinées à renforcer la présence de l’OTAN en Europe de l’Est. Le renforcement de l’Alliance atlantique en Europe fera l’objet d’un important sommet de l’OTAN en juillet à Varsovie.

La Russie contre tous

Sur la Syrie, John Kerry s’est montré peu optimiste. « On ne voit pas encore de signes positifs qui annoncent la fin de la guerre », a-t-il dit, déplorant que « la majorité des attaques russes soient dirigées contre des groupes de l’opposition ». Une thématique reprise par Manuel Valls. « Bombarder les villes où se trouve l’opposition modérée ne peut pas contribuer au dialogue », a résumé le premier ministre, qui a appelé la communauté internationale à se mobiliser contre « l’hyper-terrorisme ». Selon Manuel Valls, le terrorisme a fait, en 2014, « 40 000 morts dans 93 pays ».

SI, malgré tout, John Kerry a voulu remonter le moral des Européens en leur assurant que « cette période n’est pas aussi désastreuse que les gens le pensent » et que, ensemble, Américains et Européens avaient su par le passé « résister aux nombreuses tentatives de division », la plupart des intervenants à la conférence de Munich ont été nettement plus sombres. « Les aspirations impériales de la Russie sont un problème pour le flanc Est de l’OTAN. L’Alliance doit y renforcer sa présence », juge Andrzej Duda, le président polonais. « La guerre froide ? Elle est déjà très chaude en fait », constate Dalia Grybauskaité, présidente de la Lituanie. « Y a-t-il une différence entre la Syrie et l’Ukraine ? C’est de l’agression. Du terrorisme », a-t-elle dit, déplorant que l’Occident « répète la même erreur », en « s’inclinant » devant la Russie. Le président ukrainien n’a pas dit autre chose en accusant la Russie de promouvoir une « Europe alternative », celle de « l’isolationnisme, de l’intolérance, de la négation des droits de l’homme, du fanatisme religieux et de l’homophobie » : « Cette Europe a un chef, Poutine, et des troupes, les partis pro-russes dans toute l’Europe. » A Munich samedi, c’était la Russie contre tous.

Source : Le Monde, Frédéric Lemaître, 13-02-2016

1/ Ce serait bien que Porochenko fasse voter le mariage homosexuel, qu’on rigole un peu…

2/ récente vidéo sur chef des services de sécurité Ukrainien, le SBU : enfin des informations sur l’armée russe en Ukraine

Pour Moscou, le monde a “glissé dans une nouvelle guerre froide”

Source : France 24, 13-02-2016

© Mandel Ngan, AFP | Le président américain Barack Obama et son homologue russe Vladimir Poutine lors d’une rencontre en marge de l’assemblée générale des Nations unies, le 28 septembre 2015.

Le Premier ministre russe Dmitri Medvedev a dénoncé samedi un climat de “nouvelle guerre froide” après la décision de l’Otan de renforcer sa présence dans plusieurs ex-Républiques soviétiques, sur fonds de conflit en Ukraine et en Syrie.

Le constat du Premier ministre russe Dmitri Medvedev est sans appel : les relations internationales ont “glissé dans une période de nouvelle guerre froide”, a-t-il estimé samedi 13 février, lors de la Conférence de sécurité de Munich, évoquant une “politique inamicale de l’Otan vis-à-vis de La Russie”. Et d’enfoncer le clou : “A-t-on vraiment besoin d’un troisième séisme mondial pour comprendre qu’il faut de la coopération plutôt que la confrontation ?” Le chef de la diplomatie russe, Serguei Lavrov a adopté, lui, un vocabulaire moins martial, mais a dénoncé la même “mode de la russophilie” en réclamant un “retour à la culture du dialogue”.

L’objet de leur courroux : la décision de l’Otan de renforcer la “présence avancée” de l’Alliance atlantique en Europe de l’Est, notamment grâce au déploiement d’équipements lourds par les États-Unis. Cette mesure vient compléter les efforts entrepris depuis 18 mois pour rendre les forces de l’Otan plus réactives et plus dissuasives en réponse à l’annexion de la Crimée par la Russie en mars 2014 et à l’offensive des rebelles pro-russes dans l’Est de l’Ukraine. Cependant, Moscou ne doit pas y voir une “attitude escalatoire, provoquante vis-à-vis de la Russie”, a assuré le secrétaire général de l’Otan Jens Stoltenberg.

Mais les autorités russes n’ont guère apprécié et le font savoir. L’Occident boucle ainsi “la ceinture d’exclusion” de la Russie, a dénoncé Dmitri Medvedev avec véhémence, qualifiant la mesure de l’Otan de “plus grand renforcement de [la] défense collective depuis des décennies”.

L’Ukraine au cœur des tensions

Ces tensions entre la Russie et l’Union européenne – et par extension, l’Otan – trouvent en partie leur origine en Ukraine. Kiev s’était engagé en 2013 dans un projet d’accord avec l’UE et envisageait un rapprochement avec l’Otan, au grand dam de Moscou. Ce partenariat est aux origines du conflit ukrainien qui a entraîné les profondes tensions russo-occidentales, les sanctions contre la Russie et le gel de nombreux espaces de dialogue.

Aujourd’hui, la question ukrainienne est toujours au cœur du problème : le secrétaire d’État américain, John Kerry, lui aussi présent à Munich, a exclu toute levée des sanctions alors que certains pays européens comme la France visent leur suppression cet été. “Le choix pour la Russie est simple: appliquer pleinement l’accord de Minsk [encadrant le processus de paix en Ukraine] ou continuer à faire face à des sanctions pénalisantes économiquement”, a-t-il dit.

En retour, Sergueï Lavrov a de nouveau accusé Kiev de “trouver sans arrêt des excuses pour échapper à ses engagements”, l’Ukraine tardant à adopter une réforme devant accorder plus d’autonomie aux régions orientales. Si les Occidentaux estiment aussi que les Ukrainiens pourraient faire plus, ils jugent que le soutien militaire russe aux rebelles de l’Est est le principal frein au règlement du conflit ukrainien.

Second point de discorde avec Moscou : la Syrie, où les Occidentaux et en premier lieu les États-Unis reprochent à la Russie de bombarder de façon indiscriminée les rebelles syriens modérés et les jihadistes les plus durs. Le Premier ministre russe a insisté sur l’engagement de son pays à mettre en œuvre la trêve annoncée pour la semaine prochaine par les grandes puissances, jugeant crucial d’établir des contacts militaires entre Américains et Russes pour faire réussir la trêve. Sans cela, “nous ne serons pas en mesure de mettre en œuvre quoi que ce soit”, a averti son ministère des Affaires étrangères.

Avec AFP

Source : France 24, 13-02-2016

C’est déjà mieux, et pourtant c’est pas des flèches hein :

Mais bon, on ne va pas demander des lettrés….

Pour la Russie, le monde est entré dans une nouvelle guerre froide

Source : La Depêche, AFP, 13-02-2016

Le Premier ministre russe Dmitri Medvedev à Munich. Christof STACHE / AFP
Zoomer

Le Premier ministre russe, Dmitri Medvedev, a dressé samedi un constat sombre des relations russo-occidentales, minées par la crise en Ukraine et le conflit en Syrie, estimant qu’elles étaient entrées dans une nouvelle guerre froide, tout en appelant au dialogue.

Ce qui reste c’est une politique inamicale (…) de l’Otan vis-à-vis de la Russie. On peut dire les choses plus clairement : nous avons glissé dans une période de nouvelle guerre froide“, a-t-il déclaré à la Conférence de sécurité de Munich, un forum annuel de décideurs politiques.

A-t-on vraiment besoin d’un troisième séisme mondial pour comprendre qu’il faut de la coopération plutôt que la confrontation ?“, a-t-il martelé.

Revenant sur la politique de l’Union européenne de renforcement du partenariat avec d’ex-républiques soviétiques, M. Medvedev a estimé que l’Occident avait créé une “ceinture d’exclusion” de la Russie.

‘Russophobie’

Le partenariat avec l’UE est aux origines du conflit ukrainien qui a entraîné les profondes tensions russo-occidentales, les sanctions contre la Russie et le gel de nombreux espaces de dialogue.

Créer la confiance c’est difficile (…) mais nous devons commencer“, a insisté M. Medvedev, tandis que son ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, réclamait un “retour à la culture du dialogue” et dénonçait “la mode de la russophobie dans certaines capitales”.

Le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, a lui affirmé que l’alliance “ne cherche pas la confrontation” et ne veut pas “une nouvelle guerre froide” mais que la Russie “déstabilise l’ordre régional européen”.

En réaction, les alliés au sein de l’Otan ont décidé mercredi du “plus grand renforcement de (la) défense collective depuis des décennies” via des équipements lourds et des troupes alliées envoyées “par rotations” dans les pays de l’Est, selon lui.

Le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, lui aussi présent à Munich, a dressé une litanie de reproches à la Russie.

Il a ainsi exclu toute levée des sanctions imposées à la Russie en raison de la crise ukrainienne, alors que certains pays européens comme la France visent leur suppression cet été.

“Le choix pour la Russie est simple: appliquer pleinement l’accord de Minsk (encadrant le processus de paix en Ukraine) ou continuer à faire face à des sanctions pénalisantes économiquement”, a-t-il dit.

En retour, Sergueï Lavrov a de nouveau accusé Kiev de “trouver sans arrêt des excuses pour échapper à ses engagements”, l’Ukraine tardant à adopter une réforme devant accorder plus d’autonomie aux régions orientales.

Si les Occidentaux estiment aussi que les Ukrainiens pourraient faire plus, ils jugent que le soutien militaire russe aux rebelles de l’Est est le principal frein au règlement du conflit ukrainien.

A Munich, le président ukrainien Petro Porochenko a lancé une nouvelle salve contre son homologue Vladimir Poutine : “Monsieur Poutine, ce n’est pas une guerre civile en Ukraine, c’est votre agression !”.

Malgré ces vifs échanges, une nouvelle rencontre entre représentants russe, allemand, français et ukrainien a eu lieu pour tenter de débloquer le processus de paix.

Le ministre allemand des Affaires étrangères, Franz-Walter Steinmeier, a dit espérer qu’il était “clair pour les responsables à Kiev et Moscou que nous n’avons plus beaucoup de temps”.

Reproches sur la Syrie

Revenant sur la Syrie, M. Medvedev a insisté sur l’engagement russe à faire réussir la trêve annoncée pour la semaine prochaine par les grandes puissances : “C’est difficile mais il n’y a pas d’alternative”.

MM. Lavrov et Medvedev ont jugé crucial d’établir des contacts militaires entre Américains et Russes pour faire réussir la trêve.

“S’il n’y a pas de contact quotidien entre les militaires (…) nous ne serons pas en mesure de mettre en oeuvre quoi que ce soit”, a averti M. Lavrov.

Les Etats-Unis, qui reprochent à Moscou de bombarder les rebelles syriens modérés plutôt que les jihadistes les plus durs, se sont dit prêts à établir avec les Russes des listes d’objectifs pour des bombardements.

Il est essentiel que la Russie change de cibles (..) Nous déterminerons (ensemble) ce qui doit être visé, ce qui ne devrait pas l’être (..) parce que, de toute évidence, si ceux qui sont prêts à participer au processus politique sont bombardés, on n’aura pas beaucoup de conversation”, a insisté John Kerry.

© 2016 AFP

Source : La Depêche, AFP, 13-02-2016

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Lost in translation, mais récupération par la narrative-FT

Source : Dedefensa, 14-02-2016

Lost in translation, mais récupération par la narrative-FT

Le Premier ministre russe Dmitri Medvedev a donné une interview au journal allemand Handelsblatt, qui a paru vendredi. Horreur : le doux et libéral Medvedev ne nous promettait pas moins que la grande Guerre mondiale si des opérations terrestres étaient engagées en Syrie par une puissance quelconque (aussi bien la Turquie et l’Arabie que la Russie elle-même). Protestation faite et texte vérifié, il s’est avéré que le traducteur du journal allemand s’était trompé : il avait traduit “guerre permanente” dit en russe par “guerre mondiale“ écrit en allemand. Les grands réseaux russes ont aussitôt mis la faute en évidence, et cela donne notamment cette explication de RI-français, le 12 février :

« Le Premier ministre russe Dmitri Medvedev a donné une interview au journal allemand Handelsblatt. Dans celui-ci, il parle de guerre “permanente” et la traduction [a modifié le sens pour nous donner] guerre “mondiale”, affolant ainsi tous les médias. Dans son entretien, Dmitri Medvedev explique que la Russie ne souhaite pas voir menées d’opérations terrestres en Syrie et veut engager des négociations. “Toute opération terrestre a pour conséquence de transformer la guerre en une guerre permanente”. Mais ces propos ont été déformés par la traduction et l’adjectif “permanente” est devenu “mondiale”.

» Cette faute reprise par tous les médias y compris par l’agence de presse AFP a engendré des articles aux titres inquiétant ! Le Journal de Montréal [La Presse] titre “une troisième guerre mondiale ?” et Reuters intitule sa dépêche “La Russie fait planer la menace d’une guerre mondiale si les négociations échouent en Syrie”. Reuters décline toute responsabilité et assure n’avoir fait que traduire les propos [en allemand du Premier ministre russe] et rejette donc la faute sur la traduction allemande. »

On doit remarquer que le passage incriminé de l’interview de Medvedev, telle qu’il apparaît sur le site du Premier ministre et qui était retranscrit par le texte anglais de RT sur l’affaire, donne, dans sa traduction anglaise par RT, une version encore un peu plus divergente, d’où toute idée plus ou moins approchante du concept de “guerre mondiale“ est exclue : « What is necessary is to use strong measures, including those taken by Russia, by the Americans and even under certain provisions those that the Turks are trying to take, to sit at the negotiating table, instead of unleashing yet another war on Earth. We know all too well the scenarios leading to that. »

Quoi qu’il en soit le propos-“guerre mondiale” a effectivement fait florès, d’ailleurs de façon différente : du « Syrie: Medvedev évoque un risque de “guerre mondiale” » de L’Express au « La Russie agite la menace “d’une guerre mondiale” » du site suisse 20 minutes qui n’est pourtant pas particulièrement antirusse. Même les Iraniens de PressTV, plutôt amis des Russes, ont repris la nouvelle, d’ailleurs sous une formulation assez neutre : « Syrie: risque de “guerre mondiale” en cas d’offensive terrestre étrangère (Medvedev) ». Il semble donc acquis qu’il s’agit d’une erreur de traduction, qui a fourni une occasion de plus d’exposer l’aspect à la fois extrêmement délicat, potentiellement faussaire et aux immenses effets psychologiques et de jugement, de tout ce qui concerne la communication, jusqu’aux erreurs de traduction.

Un autre incident, également dans le domaine de la communication et de la transcription d’une déclaration officielle, est cité par RT (dans la même dépêche en anglais sur Medvedev), cette fois dans le chef du Financial Times (FT). Au contraire du cas Medvedev, il s’agit d’une véritable fraude, une action délibérée de transformation faussaire du sens d’une déclaration officielle faite au prestigieux et hautement professionnel journal britannique. Cela concerne une interview du secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon au FT, dont le sens est délibérément modifiée, par le biais de citations tronquées ou de citations accompagnée de membres de phrase qui se voudraient synthétiques, pour en faire une quasi-condamnation de la Russie par le SG de l’ONU. Le texte de RT est accompagné d’un fac-similé de la lettre de deux pages du 9 février que le cabinet du SG de l’ONU a envoyée au FT pour demander une rectification. La lettre relève trois cas de transformation du sens, d’une façon assez grossière d’ailleurs puisqu’à chaque fois la Russie est nommément désignée par le FT alors qu’elle ne l’est jamais dans la transcription des propos de Ban Ki-moon.

Le même 12 février, Sputnik-français a également développé l’affaire à partir de la même lettre dont cet autre réseau russe a également reçu une copie. (Belle action de communication de la lettre.) Ce texte permet de relater plus en détails certaines des interventions du journaliste du FT et la réaction du cabinet du Secrétaire Général de l’ONU (la lettre est signée du porte-parole du SG, Stéphane Dujarric).

« Le porte-parole du secrétaire général des Nations unies a démenti l’information diffusée par le Financial Times (FT) et selon laquelle Ban Ki-moon aurait jugé la Russie responsable “de l’échec des négociations entre Damas et l’opposition à Genève”.

» En lisant l’article paru dans le journal britannique Financial Times, on apprend que le Secrétaire général des Nations unies aurait affirmé de manière explicite que les “raids aériens russes destructeurs de la semaine dernière en Syrie ont entraîné l’échec des négociations à Genève”. “Dès que la réunion de Genève a été convoquée, des bombardements et une opération terrestre ont commencé à Alep… Il était extrêmement difficile pour Staffan de Mistura de poursuivre les négociations dans de telles circonstances” a déclaré Ban Ki-moon dans un entretien accordé au Financial Times.

» L’auteur de l’article [le journaliste Sam Jones, du FT] a surtout souligné que M. Ban Ki-moon “avait averti, dans des termes bien choisis, que les agissements de la Russie et de la Syrie n’étaient pas ‘conformes’ à la résolution 2254 du Conseil de sécurité des Nations unies adoptée en décembre.” Il apparaît pourtant que le Secrétaire Général n’est pas le seul à savoir “choisir soigneusement” ses mots. Stéphane Dujarric, porte-parole du Secrétaire général, a déclaré dans une lettre officielle adressée au FT, que bien que la plupart des citations attribuées à M. Ban Ki-moon dans l’article soient “techniquement correctes”, “elles sont replacées dans un contexte qui fausse leur interprétation.” Par exemple, M. Dujarric explique que la réponse exacte donnée par Ban Ki-moon à propos de la résolution 2254 a été “je pense sincèrement que les parties devraient agir de manière plus conforme à la mise en œuvre de cette résolution.” “Il est bien connu qu’il y a beaucoup de parties dans ce conflit. Le Secrétaire général ne faisait pas référence spécifiquement ‘à la Russie et à la Syrie’. Le Secrétaire général sait parfaitement choisir ses mots. S’il avait voulu se référer uniquement à ces deux parties il l’aurait fait”, souligne M. Dujarric.

» Et d’ajouter que ni le journaliste ni le Secrétaire général n’avaient mentionné la Russie par son nom en évoquant la question liée à l’impact des événements militaires sur les pourparlers de Genève. Il cite également une autre partie de l’article qui stipule que “l’augmentation du soutien militaire de la Russie au régime d’Assad a ‘un impact très négatif’ sur la résolution du Conseil de sécurité mise en route, selon M. Ban Ki-moon”. Apparemment, ce paragraphe a également fait l’objet d’une interprétation imaginative des paroles de Ban Ki-moon. »

Ces divers épisodes, avec les erreurs, les effets, les tromperies-dissimulation (dans le chef du FT pour celles-ci, le seul coupable assuré, le journal le plus prestigieux du Système), donnent une mesure de l’importance phénoménale du système de la communication. La déclaration de Medvedev telle que retranscrite (faussement) dans sa version initiale a eu un grand écho pour rendre cette semaine qui se termine avec ses nombreux points de tension crisique encore plus dramatique ; il est par exemple très probable que cette déclaration de Medvedev selon la traduction fausse du journal allemand a eu son rôle dans le dernier épisode en date du krach-sans-fin du système financier mondial. On doit par ailleurs, en acceptant l’hypothèse très probable d’une simple erreur de traduction “de bonne foi”, faire l’observation que cette erreur a dû être d’autant plus aisément commise que l’image née du déterminisme-narrativiste désignant la Russie comme fauteuse de guerre impénitente et menaçante devait certainement cohabiter dans l’esprit du traducteur avec sa recherche du mot juste ; un peu de psychologie sommaire nous convaincrait aisément de la justesse de l’hypothèse.

On notera d’ailleurs que tout le monde en est resté à Medvedev nous menaçant d’une Troisième Guerre mondiale car bien peu de rectifications ont été publiée. (Nous n’en avons repéré qu’une, d’après Google à qui l’on peut faire une confiance aveugle : celle du site Le nouveau Paradigme, le 13 février, avec la simple reprise du texte RT-français ; peut-être y en a-t-il d’autres mais, comme l’on sait, l’effet d’un démenti est toujours beaucoup moins fort que l’effet de l’information fausse initialement publiée.) Cela n’est d’ailleurs pas, tout bien considéré et selon une vision réaliste sinon cynique, une si mauvais chose : il est bon que les Russes, de toutes les façons discrédités à hauteur de la diablerie de l’enfer par tous les esprits penseurs des élites-Système, apparaissent parfois d’une façon un peu plus effrayante qu’ils ne voudraient, — ils sont extrêmement prudents, eux, – de façon à inquiéter, sinon à terroriser le plus possible le bloc-BAO et le Système. Au point de tension et de déni des vérités-de-situation où l’on se trouve, la politique de la menace, même involontaire, n’est pas plus mauvaise contre un bloc qui a perdu toute capacité de se battre, qui ne sait plus rien ni de l’héroïsme ni du sacrifice, et qui est donc d’autant plus sensible à la menace pour venir à composition ou pour s’engager dans quelque sottise inédite. Malheureusement, – ou bien ironiquement pourrait-on dire, toujours dans le genre cynique, – le plus marri dans cette affaire c’est la pauvre Medvedev, dont on sait qu’il représente une tendance assez libérale, pro-occidentaliste, dans la direction russe.

L’aventure nous permet également d’avoir un peu plus de lumière sur les pratiques du FT, répétons-le le quotidien le plus prestigieux de l’anglosphère, donc du monde civilisé. Ces pratiques sont remarquables d’impudence et, éventuellement, d’imprudence du point de vue de la réputation journalistique dont ce journal fait son miel. Après tout, le SG de l’ONU n’est pas vraiment n’importe qui, ni même un simple président russe qu’on peut insulter à souhait, mais une personnalité importante du Système avec laquelle il est convenu d’avoir certains égards. D’une certaine façon, le sans-gêne du faussaire (FT) équivaut à l’amateurisme du traducteur (Handelsblatt) pour nous faire découvrir à la fois la vigueur de la guerre de la communication et la décrépitude, sinon la bassesse que cet affrontement entraîne, directement ou indirectement, sur les capacités et les mœurs des acteurs, principalement sinon exclusivement ceux du bloc BAO et de sa presse-Système.

Bien, – ainsi est-il acté, ou simplement confirmé une fois de plus que la guerre de la communication constitue sans aucun doute, aujourd’hui, le véritable champ de la bataille du Système et autour du Système ; par conséquent, les barbares s’en donnent à cœur joie. Mais comme dans toutes les évolutions à la fois confuses et déstructurées qui marquent cette période, les effets peuvent avoir des aspects intéressants, éventuellement antiSystème par inadvertance. Ainsi est-il possible que la lettre du cabinet de Ban Ki-moon au FT, qui semblait devoir rester privée bien qu’elle fût complètement officielle puisqu’elle est à en-tête du cabinet du Secrétariat Général de l’ONU, est-elle parvenue aux Russes sans que cela déplaise nécessairement au Secrétaire Général des Nations-Unies.

Source : Dedefensa, 14-02-2016

Source: http://www.les-crises.fr/russes-et-occidentaux-saffrontent-a-munich/