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Réponse du journaliste RFI à propos de l’article sur ELLE

Thursday 22 January 2015 at 00:01

Le journaliste de RFI dont je parlais dans le billet sur les néonazies de Elle m’a contacté pour un droit de réponse.

Comme il était ouvert au débat, je lui ai confirmé qu’il pouvait rédiger une réponse assez longue, pour nous donner le point de vue d’un journaliste – je l’en remercie…

ATTENTION : on parle bien ici du journaliste de RFI qui a rédigé le billet sur le problème ELLE – PAS du journaliste de ELLE…

Pour une de ses remarques, je précise que oui, j’aurais pu le contacter et en discuter ; cela aurait été mieux. Mais hélas, il se trouve que ce n’est pas mon métier, et que je ne peux passer 3 jours sur un petit billet comme ça. Promis, quand j’aurai 5 salariés, on le fera – mais désolé, je n’ai pas le 06 de milliardaires, et ils ont de toutes façons, je pense, peu envie de financer la liberté d’expression sur le web (juste des journaux en déficit) allez savoir pourquoi…  :)

Je suis client final du diffuseur d’information – qui est une des bases de la Démocratie – et quand je vois des choses déplaisantes, je les souligne…

Après, je ne veux pas sombrer dans le poujadisme, ce n’est pas simple d’être journaliste, primo en raison du manque de temps et des moyens, secundo en raison de l’environnement qui fait que, en général, on ne peut pas y écrire tout ce que l’on veut…

Enfin, le point principal de ma critique était justement la non critique du ton de ELLE, qui donnait dans un parti pris pro-Kiev, qui est systématique dans nos médias, entrés, comme à chaque fois, en période de propagande de guerre. (et là, c’est quand même ÉNORME : on veut nous montrer un peuple (féminin) uni, luttant courageusement contre les méchants Russes, et zou, pas de bol, on tombe sur une néonazie et une fille d’extrême droite… Mais de cela on ne tirera bien entendu aucune conclusion, c’est juste du pasdbol…)

Je conseille enfin de lire le beau livre de Halimi : L’opinion, ça se travaille – dont je ne suis pas sûr qu’il soit enseigné en école de journalisme comme il se devrait…

Merci d’abord à vous pour ce charmant savonnage pas très fairplay, ni très honnête intellectuellement, qui aura enchanté mes remontées de pistes pendant mes trop rares vacances au ski la semaine passée.

Je ne vous en tiens cependant guère rigueur car je note que vous commencez votre discours d’un enchanteur compliment à mon égard en me qualifiant de « nouvelle star du journalisme français ». Je n’oserais en revendiquer tant. Je me flatte également de votre confiance à me voir rejoindre un jour le Siècle car j’aurais autant de plaisir à dialoguer avec ces gens, qu’à venir ici débattre avec vous.

Plus sérieusement, pour en revenir à nos moutons ukrainiens, nazis et blonds, je vais répondre ici à une partie des reproches que vous et vos lecteurs m’avez adressés sur le ton pas toujours aimable de ceux qui savent tout beaucoup mieux que le con du jour, moi en l’occurrence.

 - D’abord sur le fond :

Contrairement à ce que vous laissez entendre à longueur de lignes, je ne suis pas une espèce de tir au flanc pro-Kiev avide de gagner ses émoluments à coups de moindres efforts. Je ne suis qu’un humble journaliste, indépendant, qui fait son travail du mieux qu’il le peut sans toujours avoir beaucoup de moyens.

Il ne me semble pas avoir dit ça…

Mes lecteurs ont rarement eu à se plaindre de mes travaux, que je tâche d’avoir le plus alimentés possible et le plus objectif possible, avec des sources le plus large possible. J’ai un vrai plaisir à échanger avec les individus les plus nobles comme les plus immondes, car je crois en la balance de l’homme. Je travaille ainsi régulièrement au contact de militaires de différents pays, de diplomates, de Russes, de terroristes, d’Ukrainiens, de criminels, d’islamistes, de criminels de guerre, et même de cons… Car je ne suis pas juge mais journaliste et que mon travail est de tendre mon micro aux gens qui font l’Histoire.

Cela vous étonnera peut-être mais pour faire ce boulot qui me prend 15h par jour – et pour lequel je gagne l’opportunité de me faire mépriser ici-, je gagne tout juste de quoi payer mon alcool et mes cigares. Mais je vais vous dire, je m’en cogne : je crois que parfois, des gens apprennent des choses intéressantes en me lisant, et cela me satisfait amplement.

- Erreur(s)

Malgré mes efforts, il m’arrive de commettre des erreurs. Vous en soulignez d’ailleurs une énorme : l’histoire des pseudonymes de nos charmantes néonazies. Une erreur d’autant plus inexcusable que j’avais effectivement l’information. Fatigué, biais intellectuel, connerie pure, je ne sais comment j’ai pu écrire cette bétise.

Je persiste tout de même à noter que pour les auteurs de l’article incriminé, au moment où ils ont réalisé leur reportage, cela ne change pas grand-chose : un pseudo ou un prénom, ça ne suffit pas à retrouver un compte VK. Car ils n’avaient que les prénoms et les visages de ces femmes. Oui, je crois

à leur bonne foi, car comme je le disais plus haut, je ne suis pas en mesure de les juger. Au vu de leur travail, je ne vois pas de raison de croire le contraire.

Ce type d’incidents peut arriver. Je comprends qu’ils ne demandent pas à tous les combattants ukrainiens qu’ils croisent s’ils sont des nazis. Comme je n’ai pas toujours demandé à tous les islamistes que j’ai croisés s’ils étaient des jihadistes, ou à tous les Ivoiriens croisés en 2010 s’ils étaient des Jeunes patriotes.

Font-ils l’éloge des forces de Kiev ? Je ne sais pas. Je ne crois pas. Ce type de reportage sous forme de portrait vise effectivement à donner la parole à un acteur. Il ne faut pas forcement y voir une adhésion à ses idées. Certains journalistes laissent à leurs lecteurs le choix de tirer leurs propres conclusions, apportant des pièces au puzzle avec la modestie de celui qui ne les a pas toutes. Je vous invite à regarder ce film que j’ai moi-même tourné, et dans lequel je donne la parole à des islamistes radicaux en France. Je ne crois pas que l’on puisse m’accuser de faire leur propagande. Les images me semblent parler d’elles mêmes. Au sujet des combattantes ukrainiennes, vous restez d’ailleurs parfaitement convaincues qu’elles sont des criminelles, malgré le fait que l’auteur ne le dise pas. Vous ajoutez ce reportage à votre puzzle.

Pour savoir si Elle fait la propagande de l’Ukraine d’extrême droite et des milices privées, il faudrait éplucher leur production sur la durée et avoir plusieurs exemples. Ici, on a plutôt une grosse foirade. Pour vous il est évident. Comme est évidente la culpabilité de l’autre jeune femme, Svetlana. Pourtant, un de vos lecteurs souligne une chose intéressante : quid de la chronologie des événements ? Si l’on épluche la page VK de Svetlana, elle ne poste pas grand-chose de condamnable au moment où est fait le reportage de Elle. Dans le cas de Vita, il semble que la situation soit comparable. On a découvert après coup sa vraie nature. Trop tard pour corriger le reportage. Mais suffisamment tôt pour que l’on puisse se hâter de lyncher virtuellement les auteurs de l’article. Je laisse à chacun la liberté de juger les journalistes selon ses propres convictions. Moi, je préfère comprendre.

- Désaccords ( ?)

Hormis cela, je vais me permettre de défendre le reste de mon article dans lequel je ne trouve rien à changer. Je vais tâcher de le faire de manière le plus exhaustive possible :

* Je dis à propos de « Vita » qu’elle a l’air tout juste sortie de l’enfance, presque timide, ce qui vous fait rire.

> Je persiste. Cela vous fait peut-être rire mais la posture, et donc la communication non verbale de la jeune femme, n’est pas celle d’une combattante accomplie ou encore d’une femme sure d’elle : tenue négligée, cheveux détachés, bras relâchés et croisés… Oui, elle ressemble plus sur cette photographie à une adolescente encombrée par son propre corps qu’à une guérillero. Pas besoin de voir autre chose que ce que je viens d’écrire dans ces mots, il n’y a rien à aller chercher entre les lignes.

* Vous notez dans une seconde version de votre billet (dont vous n’avez pas précisé la modification) qu’elle n’est pas la seule à poser problème et que l’autre jeune femme, Svetlana, pose problème aussi.

> Oui, sauf que cela, on l’apprend longtemps après. Vous défendez l’idée qu’Aïdar est exclusivement ou presque composé de nazis et d’extrémistes. Je respecte votre avis mais ce n’est pas ce que me disent la plupart de mes sources sur place, chercheurs, journalistes, Ukrainiens ou Français, qui les ont rencontrés. Cette approche correspond par contre effectivement à ce que disent les diplomates russes.

Je n’ai jamais dit “exclusivement”. Je ne connais pas la proportion. Maintenant, si des gens ne sont pas gênés d’aller reconquérir une partie du territoire en sécession avec des néonazies, ma foi, chacun son truc… Il y a beaucoup de communistes chez Aïdar ?

Notez, comme le journaliste qui a fait le papier, et qui connait bien la situation en Ukraine, ne les a pas détectées, je ne sais pas si vos autres sources sur place auront pu le faire mieux. (P.S. s’il y a Marie Mendras dans vos sources, enlevez d’urgence son numéro…)

* Les dérives des bataillons de volontaires

> Le mot « dérive » semble vous amuser. Mais effectivement, il s’agit de dérives puisque dans leur construction théorique, ces bataillons ont pour objectif de défendre leur patrie. Ils ne sont pas pensés en organes de rapines, de terreur et de violences. Ils ne sont pas non plus sensés être des milices privées –reproche fait à ces bataillons que vous avez oublié d’évoquer-. Mais dans les faits, ils se sont largement éloigné de cela… d’où le mot dérive. Cela valait-il débat et polémique ? Mon choix de vocabulaire vous semble-t-il si provocateur ?

Notez, “dans leur construction théorique”, les SS défendaient simplement la sûreté de l’État allemand… 1 Vous avez un bataillon, 2 il y a des néonazies dedans, en partie. 3 Il y a de graves exactions. Est-ce une dérive ou un fait inévitable, suite à la proposition 2 ?

* Apologie de la haine

> Sur ce passage comme sur d’autres, vous dites en gros que vous êtes d’accord avec moi mais que je n’en fait visiblement pas assez pour vomir ces pourritures nazies ukrainiennes. « Des soldates volontaires allant abattre leurs concitoyens », dites-vous. Et vous me reprochez de faire l’apologie d’un camp ? Pour ma part, je retiens des rapports d’Amnesty et de l’OSCE que les exécutions sont « soupçonnées » chez les pro-Kiev, qualificatif qui n’est pas accolé aux exécutions reprochées aux indépendantistes. Je ne dis pas qu’elles n’existent pas, je dis que moi, je ne peux pas avancer des choses sans en avoir la preuve. Question de rigueur intellectuelle et professionnelle.

“Des soldates volontaires allant abattre leurs concitoyens” : euh, je pense que la propagande est telle que vous ne vous rendez pas compte, que, dans les combats, elles tirent sur d’autres Ukrainiens… Cela s’appelle la guerre (civile). C’est vous qui avez interprété cette phrase comme si je parlais d’exactions, ce qui n’est pas le cas…

* Nuances de gris

> Je n’avais pas pensé à Fifty shades of grey. Non rien à voir. Le gris est la couleur de la nuance entre le blanc et le noir. Entre le bien et le mal. Car effectivement, je vois rarement des faits manichéens dans la plupart des crises et des conflits : des horreurs sont commises de chaque côté et je me refuse de résumer les situations de manière non nuancée. Comme il me semble souvent difficile de dire qui a commencé, ou qui a fait le plus de mal. Mes différentes sources me disent toutes la même chose : il y a parmi ces volontaires d’horribles raclures… mais aussi des gens courageux qui se battent pour une cause en laquelle ils croient.

Et vous avez bien raison.

Question : trouvez vous que la vision que les médias donnent de l’Ukraine ou de Poutine depuis 10 mois est tout en nuances de gris ?

* Dérives des deux côtés, extrémisme

> Vous moquez Mme Dugoin parce qu’elle affirme qu’il y a des extrémistes et des exactions dans les deux camps. Vous semblez être le seul à ne pas être au courant car c’est ce que soulignent tous les acteurs et observateurs sur place. De même vous semblez ne pas être au courant de la montée de l’extrême-droite en Russie… mais peut-être s’agit-il d’une coquille. Pourtant de nombreux ouvrages et articles s’inquiètent de la montée de formes extrêmes de nationalisme, voire d’impérialisme, en tous les cas de repli sur soit et sur son identité. Peut-être préférerez-vous parler de patriotisme. Je crois que dans tous les cas, il fait de moins en moins bon être différent dans une large bande inter-continentale incluant la Hongrie, la Roumanie, les Balkans, l’Ukraine et la Russie.

1. non, je me moque de Mme Dugoin, parce qu’elle dit “« On est en guerre, et on a toutes les réalités d’une guerre avec une vraie violence » – ce qui est profond après plsuieurs milliers de mrots (très rarement montrés, notez vous ?)

2. et car elle dit : Tous les Ukrainiens ne sont pas des nazillons non plus, mais il y en a… On va d’ailleurs avoir les mêmes dans le camp d’en face. Laisser croire qu’il y a des “nazillons” dans le Dombass est quand même énorme. On y voir aussi des députés assister à des cérémonies de ré inhumation de Waffen SS ? C’est pas de bol, car le Dombass étant le bastion communiste de l’Ukraine…

* Perte de contrôle de Kiev

> Que Kiev n’ait pas un contrôle absolu sur certains de ses pions vous semble étonnant. C’est pourtant le cas dans de nombreux conflits où la hiérarchie et le contrôle vertical sont minés par une faiblesse étatique, institutionnelle et par des phénomènes de corruption. C’est évident en Ukraine où des intérêts privés commandent, du fait de l’argent dont ils disposent –et dont manque l’Etat-, des bataillons entiers.

Donc on soutient Kiev qui a des bataillons comprenant des néonazies qu’il ne contrôle pas. Tout va bien… Mais Porochenko tétant Charlie (bien qu’interdisant les chaines russohpones), tout va bien…

* Une erreur pas évidente

> Rappelons-le, l’objet de mon article était de comprendre comment Elle a commis cette erreur. Non ce n’est pas de la propagande… croire qu’un journal comme Elle défend des néonazis… c’est ne pas avoir compris grand-chose à la culture des journalistes grand-public… qui ont tendance en général à voir des nazis partout. Et effectivement, on peut se tromper sur la nature de ses interlocuteurs dont il n’est pas écrit sur leur face qu’ils sont mauvais. Sauf si, comme vous le faites, on part du principe qu’ils sont tous, unanimement et collectivement, coupables de certains méfaits. Ce n’est pas le cas des auteurs, et ce n’est pas le mien. C’était peut-être une erreur de leur part, je ne sais pas. Notez bien le terme que j’ai employé : « erreur ». Il ne s’agit donc pas d’ « excuser » ce qu’ils ont fait (comme vous me le reprochiez dans le premier titre de votre billet, avant de remplacer par « minimiser », là encore sans préciser votre modification). Il s’agit ici de comprendre comment l’erreur a été commise. C’est moins marrant que de juste les traiter de gros cons qui ne comprennent rien à rien, mais moi, ça me semble plus intéressant. Je laisse à d’autres, très nombreux dans les médias d’ailleurs, les procès faciles et toujours menés à posteriori et souvent depuis Paris, contre les mecs qui tentent tant bien que mal d’aller démêler le vrai du faux sur le terrain.

* Propagande pro-Russe

> La définition de la propagande implique que l’on manipule volontairement une information, à des fins politiques, et souvent contre l’intérêt du public cible. Reprocher à Elle de faire de la propagande implique donc un objectif politique volontaire. Pour ce que j’en sais, ce n’est pas le cas. Cette affaire, comme je l’écris –ce qui vous amuse-, sert effectivement in fine la propagande pro-Russe. Je ne dis pas que Moscou en est à l’origine. Je dis qu’ils y trouvent une belle matière, qui servira l’argumentaire qu’ils défendent depuis de nombreux mois partout à travers le monde en insistant sur les apologies et supporters du nazisme chez les Ukrainiens… sans toujours avoir des preuves très claires. Là, ils ont un beau biscuit à exploiter en matière de guerre de l’information.

Mais pas du tout ! Vous avez lu le livre de Halimi : L’opinion, ça se travaille ? Ou Chomsky ? Ou d’Anne Morelli sur la propagande de guerre ? Ou de Michel Collon ?

* « Journalistes experts et incompétents à deux balles »

> La conclusion de votre laïus est charmante. Mais en l’occurrence, de nombreux médias –dont RFI- ont témoigné des dérives nazis de certains combattants et activistes à Maïdan, puis dans les forces pro-Kiev contre les indépendantistes. Ce sont d’ailleurs des médias aussi underground que la BBC, Channel 4, Slate, Le Figaro… Magie et charme du mainstream.

Ça, c’est l’excuse classique du journaliste (on en a parlé il y a 6 mois 12 secondes !!!) et c’est comme le pâté d’alouette : 50/50, une dose de cheval, une dose d’alouette. Si vous pensez que l’auditeur lambda a une claire conscience des dérives nazies (personnellement, le papier sur ce thème, que je suis de près, doivent représenter 10 ou 20 papiers grand maximum. A comparer au reste…)

* Articles sélectionnés sur RFI

> En conclusion de votre volée de bois verts dans mes dents de jeune dandy de l’info, vous enchaînez sur la rédaction qui m’a publié, RFI. Quelques exemples des partis pris de la radio… dont vous venez de me dire au téléphone qu’elle ne faisait pas du si mauvais travail. Bon alors c’était pour le plaisir du sport d’une bonne beigne dans la tronche ? Moi ça me va. Mais pour rétablir l’équilibre, vous auriez pu aussi mettre ce reportage d’un journaliste de RFI auprès des volontaires d’Aïdar, de leurs victimes et de leurs partisans. Il n’était pourtant pas loin, puisque le lien était dans mon article.

Je montre que des papiers de RFI sont aussi sans nuance…

Ce qui est intéressant, c’est que s’il fallait résumer mon article, on pourrait dire ceci : je raconte que Elle a commis un reportage exhibant une néo-nazie, dont je décris les frasques avec la vidéo de Vinnitsa mise très largement en évidence, et que le magazine s’excuse de la bavure. Je décris les exactions commises par Aïdar. Et effectivement, j’essaie d’expliquer comment un journaliste sur place a pu commettre cette erreur.

Y a-t-il grand-chose de si condamnable là-dedans ? Ne pas faire le procès d’Aïdar ? Désolé, mais ce n’est pas le sujet de l’article en question.

Encore une fois, je persiste à aborder les conflits et les crises à travers deux approches. Une approche analytique, dans laquelle je tâche de comprendre les enjeux globaux et transversaux. Une approche plus humaine –anecdotique ?- à travers des petites histoires, de gens, d’incidents, de drames… qui me paraissent aussi aider à la compréhension de l’incompréhensible. L’histoire de cet article de Elle en est un exemple. Visiblement, beaucoup des commentateurs de ce blog semblent convaincus de tout comprendre parfaitement à la situation. Moi, humble ignorant que je suis, je me contente de lire, d’interroger des gens et de débattre pour tâcher de démêler le fil d’une situation qui me parait sacrément complexe. Mais je confesse ne pas être d’une exceptionnelle intelligence !

Moi non plus, et, EN PLUS, je ne suis même pas journaliste :)

* Ensuite sur la forme :

Moins important mais pour le moins pas inutile, je m’étonne de votre méthode. Vous avez visiblement pris le temps d’une lecture très approfondie de mon article… et de mon CV. Vous semblez y trouver drôle que je sois doctorant et que je m’applique à développer une « expertise éclairée par des réflexions nourries par l’actualité et la connaissance ». Je ne vois pas ce qu’il y a de risible là-dedans, ma démarche me semble naïvement honnête.

Quitte à éplucher mon article et mon CV, vous auriez d’ailleurs pu me passer un coup de téléphone ou un mail. C’est par exemple ce que moi j’ai fait pour comprendre l’article de Elle : j’ai appelé les auteurs, d’autres gens connaissant le sujet, en France et en Ukraine.

Cela aurait pu être profitable à tous les deux. Moi j’aurais corrigé mon erreur à propos des pseudonymes des jeunes femmes (notez qu’après avoir apporté cette correction sur l’article, je l’ai signalé par honnêteté et parce que j’assume mes erreurs et corrections). Vous, vous auriez pu éviter ce pavé immonde qui n’apporte pas grand-chose à part nuire à ma réputation. Certains de vos lecteurs trouvent d’ailleurs l’idée de me mettre professionnellement en danger réjouissante… et j’avoue ne pas bien comprendre pourquoi.

Nous aurions pu discuter de la situation en Ukraine ou en Russie. Nous aurions pu discuter de luttes d’influences, de guerre de l’information et de propagande. Nous aurions pu discuter du travail des journalistes et de comment parfois nous nous trompons. Nous aurions pu discuter de blogs, puisque j’ai moi-même une longue expérience en la matière. Vous dites pourtant au téléphone être très enclin au débat et à l’enrichissement mutuel.

La différence entre vous et moi, Monsieur Berruyer, c’est que j’ai fait l’effort de chercher votre mail et votre téléphone pour vous contacter et vous répondre. Pas évident puisqu’il n’y a que le formulaire de contact sur votre site. Vous, Monsieur Berruyer, vous avez trouvé le formulaire sur RFI pour vous plaindre auprès de ma direction, appelant tous vos lecteurs à faire de même. Vous êtes débordé, m’avez-vous dit au téléphone, et n’avez pas pu prendre le temps de me contacter. Ce n’était pourtant pas bien compliqué à mettre en œuvre : mon téléphone et mon mail sont en évidence sur mon blog.

Vous auriez aussi pu regarder un peu mon travail. Vous auriez vu que l’on peut difficilement me faire le procès du parti pris, tant je traite de sujets divers et tant je souligne les bévues des uns et des autres, en m’acharnant à multiplier les sources divergentes.

Vous auriez pu me demander si mon appartenance à l’IPSE est aussi douteuse que vous le sous-entendez. J’aurais pu vous répondre que l’IPSE est une toute petite structure qui ne gagne pas beaucoup d’argent et qu’elle ne m’a jamais versé le moindre centime. Vous auriez pu voir en parcourant mon travail que j’interroge occasionnellement des gens de l’IPSE… mais plutôt très minoritairement, et seulement quelques uns d’entre eux, comme j’en interview dans tous les autres organismes. Vous auriez pu noter que je n’ai interviewé qu’une seule fois Mme Dugoin. Vous auriez pu du coup éviter de faire une comparaison idiote avec Fox News.

Si je suis si facilement joignable, via mon blog, mon mail, mon téléphone ou même mon Twitter, c’est parce que effectivement, j’aime discuter. J’aime me friter, m’engueuler, débattre, confronter les idées. Et oui, cela demande du temps, et de la discipline intellectuelle. Cela peut même se passer d’autant mieux lorsqu’on le fait dans le respect d’une certaine cordialité dont ni vous, ni vos lecteurs, n’avez fait preuve. Je m’en étonne d’autant plus que vous dites sur votre blog être strict en matière de modération des commentaires. Cela ne s’applique visiblement pas lorsqu’il s’agit de tirer au pigeon sur la cible du jour.

Vous m’avez proposé au téléphone d’enlever mon nom des mots clefs de votre billet. Vous avez raison, si cette affaire m’ennuie, c’est aussi que vos accusations remontent très haut sur Google.

Mais je respecte tout à fait votre avis sur ma personne. Pas la peine de faire descendre cet article dans le référencement. Pouvoir y répondre me suffit. Je répondrai dès qu’elle sera publiée aux commentaires des lecteurs.

L’un d’eux se flattait d’ailleurs de l’ambiance générale sur ce billet et sur ce blog. « On se retrouve dans une ambiance “Conseil National de la Résistance” », nous assure Krystyna le 05 janvier à 20h46. Sans me définir comme ni Gaulliste, ni communiste, l’attitude générale que vous avez dans cette discussion m’évoque plus un procès digne du War West, où l’on couvre l’accusé de goudron et de plumes, sans se soucier de ce qu’il pourrait avoir à dire. Non chers amis, l’esprit de Résistance, ce n’est pas cracher à le gueule d’un type qui tente de faire son travail le plus indépendamment et le plus sérieusement possible, pour un salaire minable au vu du temps qu’il y consacre. Non chers amis, l’esprit de Résistance, ce n’est pas d’insulter anonymement quelqu’un sans rien connaitre de son travail et de son identité. Non chers amis, l’esprit de Résistance, ce n’est pas de se baigner dans ses propres suppositions tout en méprisant ceux qui pensent différemment.

Tout cela étant dit, n’hésitez pas à ne pas suivre mon travail s’il vous parait si indécent. Dans le cas contraire, n’hésitez pas à le commenter ou à m’écrire pour en discuter. Merci, Monsieur Berruyer, d’avoir la courtoisie, finalement, de me laisser répondre après coup à tout cela. N’hésitez pas à me payer un coup à boire pour vous faire pardonner. Les lecteurs les plus agressifs sont également les bienvenus. Sans avoir mes entrées au Siècle, je bois du Talisker 18 ans et je fume des Cohibas Siglo II. Avis aux amateurs, parisiens ou de passage.

Ok pour le verre, à suivre !

R. Mielcarek, 12/01/2015

P.S. Les commentaires sont les bienvenus même critiques À CONDITION qu’ils soient constructifs et polis – on n’est pas au bistrot merci !

Source: http://www.les-crises.fr/reponse-rfi-elle/