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[Scandale BNP] Le festival des déclarations ridicules ou odieuses

Thursday 10 July 2014 at 04:14

Je vous recommande de lire d’abord ce billet sur l’affaire avant celui-ci…

L’Élysée

Dans un article du Monde intitulé « Pourquoi BNP Paribas a été prise au piège soudanais » (02/07/2014 Par Christophe Ayad), on peut lire :

“Même l’Elysée en convient : « La BNP ne méritait probablement pas une telle sanction, ni un tel montant d’amende, mais il est clair qu’elle a fait des bêtises, notamment au Soudan. » Ce commentaire, lâché par l’entourage du président François Hollande, illustre un aspect relativement méconnu du contentieux entre BNP Paribas et l’Etat américain.”

OK : donc financer des islamistes génocidaires (lire ce billet), c’est seulement une “bêtise”…

Le Monde, 5 juin :

“François Hollande a écrit au président américain, Barack Obama, dès le 7 avril pour l’alerter sur le « caractère disproportionné des sanctions envisagées ».”

C’est quoi la bonne proportion pour financer des islamistes génocidaires – puisque 1 an de profits, c’est disproportionné ?

Il a remis ça le 5 juin. Et évidemment Obama a expliqué un principe méconnu dit “séparation des pouvoirs”.

Vous imaginez : la Justice française s’en prend à Goldman Sachs, mets 15 personnes en prison, et Obama appellerait Hollande pour lui demander d’intervenir ? Bref, encore du grand Hollande…

D’ailleurs, ça l’est tellement que le PDG de BNP a indiqué (accrochez-vous bien) le “maintien d’un dividende de 1,50 € au titre de l’exercice 2014, soit un niveau équivalent à celui de 2013″. C’est nouveau, ça vient de sortir : tout le profit disparait, mais on distribue le même dividende – bienvenu dans le financiarise !

Bercy

Michel Sapin, le Monde, 5 juin :

“Si le montant avancé par la presse américaine est exact, à un tel niveau d’amende, il y aurait disproportion manifeste.”

La seconde guerre mondiale fit environ 350 000 morts (civils et militaires) en France, soit environ 1,35 % de la population (41,7 millions d’habitants).

Faute de recensements précis, on ne connaît pas précisément le nombre de victimes au Darfour de 2003 à fin 2007. Les chiffres les plus fiables évoquent 400 000 morts, soit, pour une population de 6 millions d’habitants, plus de 6 % de la population. Quand bien même il n’y aurait eu que 200 000 victimes, cela représente encore plus de 3 % de la population.

Manifestement disproportionné ?

Le Quai d’Orsay

Laurent Fabius, Le Figaro, 3 juin :

“S’il y a eu une faute ou une infraction, il est normal qu’il y ait une sanction. La sanction doit être proportionné et raisonnable. Ces chiffres-là ne sont pas raisonnables.”

La moitié de la sanction maximale légale, avec une appréciation très raisonnable, pour des récidivistes : ce n’est pas raisonnable ?

Oups, ah oui, j’oublie toujours – si c’est pour aider un ami pas dans le besoin…

Le contrôle (sic.)

Christian Noyer, Le Monde, 23 mai :

« Nous avons vérifié que toutes les transactions incriminées étaient conformes aux règles, lois, réglementations, aux niveaux européen et français », a déclaré Christian Noyer, vendredi, lors d’une conférence de presse. Il n’y avait « aucune contravention à ces règles ni d’ailleurs aux règles édictées par les Nations unies », a-t-il ajouté.

Ah, petit souci…

La réglementation française n’imposait pas de sanctions financières généralisées au Soudan.

MAIS elle imposait de respecter la réglementation des pays des filiales (comme le rappelle fort justement Emmanuel Levy dans Marianne) !

Or l’article 11-5 du Règlement n° 97-02 du 21 février 1997 relatif au contrôle interne des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, règlement que Christian Noyer est précisément chargé de faire appliquer, explique clairement que « les entreprises assujetties s’assurent que leurs filiales et succursales à l’étranger mettent en place des dispositifs de contrôle de la conformité de leurs opérations. Les dispositifs contrôlent le respect des règles locales applicables à l’activité de leurs filiales et succursales ainsi que l’application du présent règlement. Lorsque les dispositions locales sont plus contraignantes que les dispositions du présent règlement, leur respect est réputé satisfaire aux obligations prévues par le présent règlement au niveau des implantations locales. »

Le DG de BNP

Il a décidé de cramer quelques millions d’euros de plus en écrivant à chaque client – la lettre est ici. Extraits :

“Des dysfonctionnements et des pratiques contraires à l’éthique de la banque ont été constatés au sein de cette activité spécifique de financement du négoce international de pétrole et de gaz (qui représente moins de 1% de l’activité totale de la banque).

Des défaillances individuelles ont en effet été mises en évidence dans cette activité. Certains collaborateurs ont notamment contourné délibérément les règles américaines et n’ont pas respecté les décisions de la Direction Générale qui interdisaient, des 2007, la poursuite de ces activités dans les pays concernés. Au-delà de ces défaillances individuelles, il y a eu également certains défauts de vigilance et de réactivité.

Ces problèmes n’auraient pas dû se produire. Au nom de BNP Paribas, je voudrais exprimer nos regrets à votre égard.

Nous avons bien sûr tiré les enseignements de ces dysfonctionnements contraires à nos valeurs et à notre politique de banque responsable. Nous avons renforcé très significativement nos dispositifs de contrôle et de sécurité et avons pris les sanctions disciplinaires qui s’imposaient.

Ces décisions ont été mises en œuvre pour que ces problèmes ne se reproduisent plus. Vous pouvez compter sur moi pour y veiller personnellement.”

Le résumé est simple : ou je suis un escroc complice, ou je ne maitrise rien et on ne m’obéit pas.

Je rappelle qu’on parle ici de SIMPLES opérations de paiements en dollars avec de sales personnes. C’est simple à comprendre, c’est simple à contrôler… Et donc, la direction n’y est pas arrivée…

Mais pas de souci : “ayez confiance : je reste en place !” (en route vers “d’autres victoires” comme dirait l’autre)

Et il faut donc les croire, lui et ses DGA, quand ils nous expliquent qu’ils maitrisent tous les produits dérivés, compréhensibles seulement pas des groupes de 15 polytechniciens ? Que tout ceci est géré prudemment ? Vaste blague…

Il conclut :

“BNP Paribas fait partie des banques les plus solides au monde. Notre raison d’être demeure intacte : être une banque responsable et innovante, déterminée à vous servir, pour vous accompagner dans un monde qui change.”

Ben non, elle innove quand même plus pour accompagner les pires crapules à l’évidence…

Michel Rocard

Bon diagnostic général (rôle du dollar, SMI, etc), mais erroné sur l’affaire BNP :

Affaire BNP : les Etats-Unis coupables d’abus de pouvoir, par Michel Rocard

Dans un monde où la nouvelle économie américaine s’est construite sur le pillage, par les Etats-Unis, des droits incorporels et des données personnelles en Europe et où l’antienne n’était pas ennemie de pratiques corruptives, les Etats-Unis de la manifest destiny (« destinée manifeste » qui prête une mission civilisatrice à l’Amérique) et du puritanisme (cette version anglo-saxonne du protestantisme revu par les hommes de loi), prodiguent les sanctions aux entreprises européennes d’une façon de plus en plus effrénée.

Sur le mode du « moi aussi moi aussi », les politiciens locaux jouent des coudes pour montrer à leurs électeurs qu’ils ont leur part du gâteau et qu’on ne plaisante pas avec les nouveaux cives romani. A cet assaut de démagogie BNP Paribas doit payer 2 milliards de dollarsde plus [que ce que l’on escomptait] pour des infractions, qui, essentiellement fédérales, ont été tordues en tout sens pour en faire émerger un délit de droit commun permettant de satisfaire un Benjamin Lawsky [à la tête du Département des services financiers de l’Etat de New York, qui à lancé la charge contre BNP], jusqu’alors inconnu.

Pour extraire l’impôt des victimes, deux armes de poing sont utilisées : le Foreign Corrupt Practices Act (« loi anti-corruption »), l’International Emergency Economic Powers Act et le Trading with the Enemy Act (« législations sur l’embargo »), toutes deux avec la même dose de mauvaise foi.

Nul n’osera s’opposer à la lutte contre la corruption. Il faut donc du courage, dans ce concert de tartufferie, pour dire ce qui relève néanmoins de l’évidence : dans un système asymétrique où les Etats-Unis disposent de tous les moyens politico-militaires (le « parapluie américain ») pour faire prévaloir leurs entreprises, l’idée qu’il fallait un traité anticorruption pour restaurer une égalité (leveling the playing field) qui aurait disparu au détriment de celles-ci relevait de la farce. Lorsque, sous les prétextes les plus futiles (ainsi un e-mail passé entre le Monténégro et l’Allemagne par un réseau de fibres américaines), Washington prétend déférer à sa justice des affaires de corruption internationale sans le moindre rapport avec les Etats-Unis, les bornes sont dépassées.

LE DOLLAR, COURROIE DE TRANSMISSION AMÉRICAINE

Il en va de même en matière d’embargos. Les Etats-Unis financent leurs déficits aux frais de la planète et utilisent de surcroît la prétendue « monnaie universelle » comme la courroie de transmission de toutes leurs politiques, voire de leurs aversions (Cuba, etc.), qu’ils imposent au reste de la planète. Un embargo est fait pour interdire les contacts entre deux économies : Washington, par ce qui relève d’un véritable détournement de pouvoir international, utilise l’embargo pour empêcher les contacts entre les économies des tiers et celles de ses ennemis. C’est ce qu’ils reprochaient à l’Angleterre de leur faire subir durant la guerre de 1812.

Jour funèbre parce que, quelle que soit la dette de 1944, c’est une autre forme d’occupation que nous voyons se développer. Les moyens de la puissance sont plus subtils à Washington qu’à Moscou (l’économie et non les territoires), mais la finalité n’est pas la défense d’un backyard(« arrière-cour »), somme toute pluriséculaire (l’Ukraine), mais une sorte d’empire universel façon Habsbourg : Americae est imperare orbi universo (« la destinée de l’Amérique est de diriger le monde »).

Funèbre aussi parce que l’Europe n’a pas de Richelieu. Depuis une décennie que ce terrorisme a commencé, pas un homme politique européen n’a élevé la voix. L’Union européenne et la France, sous ses ministres successifs des affaires étrangères, en ont au contraire rajouté sur Washington. Là où la législation américaine laisse au président la flexibilité requise pour accorder des exemptions à tous les entrepreneurs américains qui veulent exporter à Cuba ou en Iran, l’Europe, tombée dans le piège, durcit les embargos à qui mieux mieux, et n’a pas jugé utile d’incorporer cette indispensable soupape de sécurité à son dispositif. Les exportations américaines vers l’Iran n’ont donc cessé de croître tandis que Washington obligeait les Européens à couper les relations économiques et financières avec ce grand pays.

DANS L’AFFAIRE BNP PARIBAS, PARIS TEND L’AUTRE JOUE

Ce qui vient de se passer sonne à terme le glas de l’universalité du dollar. Nous en sommes cependant encore loin et l’urgence du moment est de rappeler les Etats-Unis, au besoin fermement, à la raison. A cet égard, le traitement politique de l’affaire BNP Paribas a donné le spectacle de tout ce qu’il ne fallait pas faire.

Se réveillant au dernier moment (c’était il y a des années qu’il fallait agir), les autorités françaises ont enfourché le mauvais cheval, appelant à la modération, là où c’est pour le principe qu’il fallait se battre. Comment un président des Etats-Unis aussi indifférent à l’Europe que Barack Obama aurait-il senti une contrainte là où le président François Hollande a pu l’entendre, à Washington, menacer les entreprises françaises prospectant l’Iran sans élever la moindre protestation ?

Pis, la France, tendant l’autre joue, a dans l’affaire BNP Paribas mis ses moyens judiciaires à la disposition des Etats-Unis, là où la nature politique des poursuites lui aurait permis de ne pas le faire. Bruxelles, où les Etats-Unis ont compris que le droit est un instrument de pouvoir, a négocié des traités d’entraide empreints d’angélisme et dont les Américains ne conçoivent du reste le fonctionnement qu’à sens unique. Il faut remettre en question ces traités. Il faut se mettre en situation de rendre coup pour coup.

Mais au-delà de la riposte que Washington rend hélas inévitable, c’est aussi notre droit international qu’il faut revoir. Un droit, celui des années 1920 (c’est l’arrêt Lotus), qui laisse chaque Etat libre de définir comme il l’entend sa compétence pénale internationale et de l’asseoir sur le rattachement le plus infime, n’est plus adapté à un monde globalisé où, par les circuits swift ou par Internet, tout transite en permanence à travers les frontières.

Mais, de toute façon, l’essentiel est acquis. Les Etats-Unis viennent de choisir la voie juridique pour annoncer au monde que, dans leur gestion du dollar, ils renonçaient à la priorité « monnaie de transaction internationale assurant la sécurité des opérations de tous ceux qui l’utilisent » au profit de la priorité « monnaie américaine au service des intérêts géopolitiques des Etats-Unis ». Plus de cent nations ont là de quoi s’inquiéter.

Il est donc de toute première urgence de trouver un substitut, une monnaie internationale de transaction garantissant la sécurité absolue de tous les opérateurs qui l’utilisent. Le franc suisse est trop petit, le yen est disqualifié par la crise japonaise. Le yuan chinois n’est manifestement pas prêt. Il n’en est qu’une de possible, l’euro. Il peut jouer ce rôle. Il doit le jouer, c’est une urgence et une nécessité absolues. Il ne le peut que s’il est couvert et garanti par les autorités de l’Union. Ce sera la première tâche de Jean-Claude Juncker et d’Herman Van Rompuy que d’ouvrir ce chantier.

Mais la City est tellement l’alliée de Wall Street dans ces affaires que ce ne sera possible que si la Grande-Bretagne est partie…

Source : Le Monde

Mark Roe

C’est un professeur de droit financier et de gouvernance d’entreprise d’Harvard – qui donne le fin mot de l’histoire avec Brio :

Pourquoi s’en prend-on à BNP Paribas ?

CAMBRIDGE – Aux yeux des Européens avec qui je parle, l’amende de 8,9 milliards de dollars imposée à la société de services financiers française BNP Paribas pour avoir violé les sanctions américaines contre Cuba, l’Iran et le Soudan semble excessive. Certes, BNP a fait quelque chose de grave. Mais 8,9 milliards de dollar ? N’est-ce pas extrêmement disproportionné pour une banque par ailleurs très responsable ? Le président français François Hollande a demandé au président américain Barack Obama d’intervenir en vue d’une réduction de l’amende, tout comme le commissaire de l’Union européenne pour le marché intérieur et les services, Michel Barnier.

L’amende est en effet beaucoup plus élevée que celles imposées précédemment. Il n’est pas neuf que de lourdes amendes existent pour des violations de commerce de devises (HSBC, par exemple, a été frappée d’une amende de 1,9 milliards de dollars en 2012); mais une amende de près de 10 milliards de dollars est du jamais vu.

Trois facteurs, qui ne sont pas tous présents dans les discussions actuelles, semblent expliquer la taille de la peine. Tout d’abord, l’infraction de BNP faisait partie d’un modèle de comportement délibéré et répété. Deuxièmement, le règlement est intervenu à un moment où les autorités américaines faisaient face à de vives critiques pour avoir été trop mou face aux grandes banques pendant et après la crise financière de 2008. Enfin, et de manière plus spéculative, l’effort des États-Unis pour faire de la finance un outil de politique étrangère plus efficace aurait pu influencer le traitement réservé à la BNP.

Concernant le premier point, les hommes et femmes d’affaires européens ainsi que les médias doivent apprécier pleinement la manière de penser des procureurs américains en charge des crimes financiers. Une fois que l’enquête montre clairement que des actes répréhensibles ont eu lieu, les autorités s’attendent à ce que les auteurs avouent leurs méfaits, coopèrent et restructurent l’entreprise pour s’assurer que les infractions ne se reproduisent pas. Or, BNP a poursuivi les opérations interdites et sciemment cherché à brouiller les pistes. La documentation des transferts était régulièrement dépouillée de détails clés tels que la destination des transferts électroniques, de sorte que l’opération soit plus difficile à enquêter et moins susceptible de fournir des preuves de malversation.

Dans les procédures pénales contre des entreprises américaines, la firme américaine ciblée demande souvent à un personnage important – un ancien procureur ou juge – d’étudier le comportement et les personnes impliqués et de faire rapport au conseil d’administration de l’entreprise. Le dernier exemple de cette pratique dans l’actualité récente est General Motors, qui a embauché Anton Valukas, un ancien procureur de premier plan qui a examiné et fait rapport sur les agissements de l’ex-banque d’investissement Lehman Brothers à la cour des faillites. La tâche de Valukas pour GM était d’enquêter et de faire rapport sur les commutateurs d’allumage défectueux de la société, qui ont été liés à 13 décès.

En général, l’entreprise ciblée licencie ensuite les malfaiteurs les plus flagrants et met en place une gestion des systèmes de contrôle pour réduire le risque que des problèmes similaires se reproduisent à l’avenir. Certes, il est possible que l’enquête interprète les aspects ambigus de la manière la plus favorable à l’organisation et sa direction, mais il est entendu que l’enquête permettra effectivement de mettre à jour les problèmes principaux et de conduire à des réformes efficaces.

Certains pourraient voir cette façon de procéder comme du moralisme, bien qu’elle résulte en partie d’une politique d’économie des procureurs face au manque d’effectifs et de financement. L’entreprise incriminée paie pour sa propre enquête. BNP ne semblait pas mettre en œuvre tout cela avec brio ; son enquête n’a pas été à la hauteur des efforts faits, par exemple, par GM. Elle n’a pas empêché les infractions ultérieures grâce à la mise en œuvre de contrôles efficaces pour détecter les problèmes.

Le deuxième facteur est que le cas de BNP a culminé à un moment où les procureurs américains étaient accusés de traiter les banques comme « trop importantes pour mettre en prison », de peur que pousser des accusations à leur encontre les affaiblirait trop et porterait donc atteinte à l’économie réelle. BNP est simplement l’une des prochaines banques en lice pour faire face à des poursuites et s’est donc retrouvée dans le collimateur des procureurs.

BNP a bien tenté de faire pression sur les autorités européennes pour plaider un argument de type « trop importante pour être mise en prison » face aux autorités américaines. Et les autorités européennes se sont effectivement lancées dans un plaidoyer, faisant valoir que l’énorme amende paralyserait BNP ; cela n’a pas fonctionné.

Enfin, gardez à l’esprit que l’affaire a coïncidé avec la crise en Ukraine et ailleurs, où la plus grande mesure coercitive menée par les États-Unis a été des sanctions financières et économiques sur la Russie, dont les plus importantes sont encore l’objet de menaces. Rappelons les transgressions de la BNP : les Etats-Unis interdisent toute transaction financière avec le Soudan, l’Iran et Cuba pour les banques qui ont touché le sol américain (ou le dollar américain) dans leurs relations. La plupart des banques ont respecté cet interdit. Ce n’est pas le cas de BNP, qui a réalisé des opérations secrètes impliquant les trois pays.

À une époque où les États-Unis sont réticents ou incapables d’utiliser la puissance militaire pour soutenir ses objectifs de politique étrangère, le pays cherche à utiliser la puissance financière comme substitut. L’effort pourrait induire une contre-réaction financière à l’avenir, mais les problèmes de BNP ont émergé lorsque l’imposition de sanctions efficaces était ce préoccupait le plus les décideurs – et, on s’en doute, était également présent à l’esprit des procureurs.

Si les États-Unis entendent faire de leur arsenal financier un outil efficace de politique étrangère, les grandes banques ne peuvent allègrement continuer à faire ce que les autorités américaines ont interdit. Il suffirait de seulement quelques banques non conformes pour rendre les sanctions financières inefficaces. Et il est difficile de détecter quelles sont les banques qui ne respectent pas les règles et dans quelle mesure.

Par conséquent, quand un mécréant est découvert, les autorités de contrôle frappent dur, pour signaler aux autres que, même si elles pourraient ne pas se faire prendre, les sanctions financières dépassent largement les avantages limités de désobéir aux édits de politique étrangère du gouvernement. Ce mouvement général pour l’application des peines – des peines plus sévères pour tenir compte des difficultés de détection – est un changement dans les pratiques de poursuites judiciaires qui est en train de devenir la norme aux États-Unis et dans le monde.

Ainsi, les critiques européens de l’amende infligée à BNP Paribas ont raison de souligner son caractère disproportionné. Ce qu’ils oublient, c’est que c’est précisément l’objectif.

Source : Project Syndicate

Source: http://www.les-crises.fr/bnp-les-declarations-ridicules/