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Ukraine : les trois options de Poutine, par Zbigniew Brzezinski

Saturday 9 August 2014 at 03:09

Tribune de Zbigniew Brzezinski parue le 8 juillet. Il est important de connaitre sa vision, au vu de son influence. Incroyable de le voir parler de “fanatisme chauvin”…

 Zbigniew Brzezinski a été conseiller à la sécurité nationale des Etats -Unis de 1977 à 1981. Ce texte est extrait de la déposition qu’il doit faire devant la commission des affaires étrangères du Sénat des Etats-Unis ce mercredi [9 juillet].

Plus de trois mois se sont écoulés depuis le discours triomphaliste de Vladimir Poutine au parlement russe. Dans une débauche de chauvinisme, il se réjouissait alors de l’annexion militaire de la Crimée. Poutine savourait clairement l’enthousiasme du moment sans se préoccuper apparemment des conséquences stratégiques à long terme de ce qu’il avait déclenché.
Trois mois plus tard, au vu du coût international croissant pour la Russie et sur fond d’incertitude persistante quant à l’avenir des relations russo-ukrainiennes, Poutine est confronté à trois choix fondamentaux:
1. Il pourrait rechercher un compromis avec l’Ukraine en mettant fin aux attaques portées à sa souveraineté et à son bien-être économique. Cela requerrait de la sagesse et de la persévérance tant de la part de la Russie que de la part de l’Ukraine et de l’Occident. Un tel compromis devrait comprendre l’arrêt des efforts russes pour déstabiliser l’Ukraine de l’intérieur, mettant ainsi fin à toute menace d’invasion à plus grande échelle, et une sorte d’arrangement entre l’Est et l’Ouest conduisant la Russie à accepter tacitement de voir l’Ukraine se mettre en marche sur le long chemin menant à son éventuelle adhésion à l’Union Européenne. Dans le même temps, il devrait être précisé clairement que l’Ukraine ne recherchera pas son adhésion à l’OTAN, et que  l’Occident ne l’envisagera pas non plus. Il est compréhensible qu’une telle perspective puisse inquiéter la Russie.
De plus, il serait précisé de la même manière de façon claire que la Russie n’attendra plus de l’Ukraine qu’elle rejoigne « l’Union Eurasiatique », organisation masquant à peine la reconstruction de quelque chose se rapprochant de l’ancienne Union Soviétique ou de l’empire tsariste. Cela ne devrait toutefois pas empêcher  un accord commercial russo-ukrainien, sachant que les deux pays peuvent profiter de l’accroissement de leur coopération en matière commerciale et financière.
La communauté internationale pourrait renouveler son soutien à cette solution et au retour à des relations plus normalisées avec la Russie elle-même, incluant la levée des sanctions.
2. Poutine pourrait continuer à soutenir une intervention militaire à peine voilée destinée à déstabiliser plusieurs parties de l’Ukraine. Si la Russie venait à continuer sur cette voie, il est évident que l’Occident devrait engager des sanctions prolongées et véritablement punitives afin de reporter sur la Russie les conséquences douloureuses de sa violation de la souveraineté ukrainienne. Cette issue malheureuse ferait très probablement deux victimes en Europe de l’Est : d’une part l’Ukraine, en raison des actions destructrices de la Russie ; et d’autre part la Russie elle-même.
3. Poutine pourrait envahir l’Ukraine, en s’appuyant sur le potentiel militaire beaucoup plus important de la Russie. Une telle action, cependant, non seulement déclencherait des représailles immédiates de la part de l’Occident, mais pourrait également soulever une résistance ukrainienne. Si une telle résistance s’avérait durable et intense, il y aurait une pression croissante sur les membres de l’OTAN pour soutenir les Ukrainiens de différentes manières, rendant le conflit beaucoup plus coûteux pour l’agresseur.
Pour le Kremlin, la conséquence de cette troisième option serait non seulement l’hostilité permanente de 40 millions d’ukrainiens mais aussi une Russie isolée politiquement et économiquement, qui ferait face à un risque accru de troubles internes.
Le bon choix est évidemment de trouver un compromis, qui doit inclure l’abandon par la Russie de l’utilisation de la force contre l’Ukraine. La question de la Crimée restera  non-résolue pour le moment, mais servira à rappeler durablement que le fanatisme chauvin n’est pas le meilleur point de départ pour résoudre des problèmes complexes. C’est pourquoi les actions de Poutine sont une menace non seulement pour l’Occident mais, en fin de compte, pour la Russie elle-même .

 

Source: http://www.les-crises.fr/ukraine-les-trois-options-de-poutine-par-zbigniew-brzezinski/