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Revue de presse du 28 février 2017

Tuesday 28 February 2017 at 01:10

La revue du… mardi ! Merci à nos contributeurs. Pour les rejoindre nombreux… vous pouvez postuler via le formulaire de contact du blog. Bonne lecture.

Source: http://www.les-crises.fr/revue-de-presse-du-28-fevrier-2017/


[“Vote Utile” Macron…] Guénolé : Nous ne sommes pas des oies ! (4/5)

Monday 27 February 2017 at 05:30

Série : Le Phénomène Macron…

Coup de gueule sur France Culture du politologue Thomas Guénolé – qui a ô combien raison sur cette nouvelle tentative de hold-up démocratique. Le discours de Cohn-Bendit est vraiment lamentable.

Transcription

 

Valentine  : «  Aujourd’hui  : Macron,  l’attrape-tout  !  »

Benoît Bouscarel  : «  Oui la semaine a été faste, hein,  pour Emmanuel Macron, qui a engrangé de nombreux nouveaux soutiens dans la course à la présidentielle. Christophe Caresche encore ce matin, le député réformateur du PS, se dit entre les lignes dans le journal du dimanche à la pointe d’un mouvement de fond au sein du parti socialiste, qui prendrait selon lui le parti de l’ancien ministre de l’Économie. Avant lui il y avait eu François de Rugy cette semaine.  François de Rugy qui a cassé son engagement de candidat de la primaire de gauche à soutenir celui ou celle qui allait sortir des urnes.

Bien sûr il y a eu François Bayrou  mercredi, la grande et heureuse surprise de la semaine pour le candidat d’ «  En marche  », et puis ce matin la confirmation d’une sympathie qui avait déjà été exprimée, celle de Daniel Cohn-Bendit, ancien eurodéputé écolo, qui a  assez clairement, c’était sur France Inter tout à l’heure, vous allez l’entendre, appelé à voter utile, c’est-à-dire à voter Macron.  »

Daniel Cohn-Bendit  : «  Qui peut au deuxième tour, le mieux battre Marine Le Pen  ? Je crois que si c’est François Fillon qui est au deuxième tour, la gauche n’ira pas voter. Deuxièmement si c’est Benoît Hamon, la droite n’ira pas voter. Donc si vous voulez vraiment nous éviter Marine Le Pen, eh bien, Emmanuel Macron au jour d’aujourd’hui est le mieux placé.  »

Benoît Bouscarel  : «  Bonsoir Thomas Guénolé.  Décidément, Emmanuel Macron attire beaucoup en ce moment, beaucoup de soutiens, même si du côté de Jean-Louis Borloo on a fait savoir aujourd’hui que le dîner annoncé dans un premier temps entre Macron et Borloo ce soir n’aurait finalement pas lieu. Comment est-ce que vous analysez cet appel au vote utile qu’on vient d’entendre, là de la part de Daniel Cohn-Bendit  ?  »

Thomas Guénolé  : «  Moi ce qui me frappe, c’est le  deux poids deux mesures que l’on peut constater entre Daniel Cohn-Bendit en 2017 et Alain Duhamel en 2007.

Alain Duhamel avait dit dans une conférence à titre personnel  : «  je compte voter plutôt pour François Bayrou  », et du coup il avait été suspendu d’une grande partie de ses activités d’éditorialiste.

Par contre Daniel Cohn-Bendit, quand il vous dit publiquement  : «  moi,  faut voter utile, et moi je voterai Macron  ». En fait il reste en poste comme chroniqueur politique quotidien sur Europe 1 et ça ne pose aucun problème. En réalité ça pose un souci beaucoup plus large et aussi bien les auditeurs de France Culture qu’un certain nombre de citoyens, en fait tous les citoyens qui sont soucieux d’un équilibre démocratique lors de la campagne du premier tour, doivent réfléchir à ça et en parler autour d’eux, à savoir. Vous avez un problème d’interviews longues comme le bras et répétitives, d’Emmanuel Macron par le Journal du Dimanche, groupe Lagardère, accumulation de couvertures de Paris Match pour Emmanuel Macron avec ou sans son épouse, groupe Lagardère. Europe 1 vous avez Daniel Cohn-Bendit  : chronique politique quotidienne qui dit et redit et répète qu’il est pro Macron et qu’il faut voter Macron.  »

Benoît  Bouscarel  : «   Bah, il parle aussi de la hauteur de son statut d’homme politique…  »

Thomas Guénolé  :  «  Mais… c’est-à-dire… en fait, le simple fait qu’il puisse s’exprimer librement en disant qu’il faut voter Macron ce qui n’est pas une chronique d’analyse politique là pour le coup,  c’est une chronique de campagne électorale pro en faveur d’un candidat. Le simple fait qu’il puisse faire ça quotidiennement sur Europe 1 et que donc l’actionnaire d’Europe 1 le laisse faire sans considérer que, comment dire  ? que c’est un parti pris inacceptable pendant la campagne présidentielle, vous permet de conclure qu’Europe1 vote Macron. Sauf qu’Europe 1 est une grande radio privée française. Ajoutez à ça,  la situation actuelle qui est que RMC, si vous écoutez RMC, les différentes matinales, RMC nous vend du Macron. Si vous rajoutez à ça que BFM-TV (le calcul a récemment été fait par Marianne) diffuse autant de minutes de meeting de Macron tout seul, que de Fillon, Le Pen, Mélenchon et Hamon réunis. Et que ces deux médias que je viens de citer plus l’Express… l’Express  accumule les couvertures sur Macron et fait campagne assez ouvertement pour Macron. Si vous rajoutez… et ça, ces éléments-là, c’est le même groupe qui a le même actionnaire qui est M. Patrick Drahi. Ajoutez à ça, Claude Perdriel, qui est un grand actionnaire de médias, qui a dit que, lui, à titre personnel, il souhaite que Macron, qu’Emmanuel Macron soit élu président de la république. Eh bien, il est propriétaire entre autres de Challenges. Challenges  fait campagne de manière assez ouverte pour Emmanuel Macron.  »

OB : saines remarques, non ?

Benoît  Bouscarel  : «  Bon d’après vous il y a un système Macron  ?  Il y a quelque chose de l’ordre de la force occulte qui fabrique du Macron à longueur de journée dans les médias  ?   Et Cohn-Bendit est à la botte de ce système  ?  »

OB : ah, non, pour le journalisme, c’est du complotisme, pardon…

Thomas Guénolé  :  «Moi ce que je vous dis c’est que, à l’heure actuelle la campagne présidentielle de premier tour est tout simplement faussée par l’existence de grands groupes médias privés qui font campagne massivement à coups de matraquage publicitaire pour un seul des candidats.  »

Benoît  Bouscarel  : «Est-ce qu’à la lumière des arguments que vous nous donnez là ce soir on peut quand même parler de l’argument du vote utile, qui revient en force face à la  crainte d’une présence quasi certaine si on écoute les divers analystes de Marine Le Pen au second tour  ?  »

Thomas Guénolé  :  «Alors, je voudrais rappeler que, il y a eu le Brexit, il y a eu la victoire de Trump, il y a eu la victoire de Fillon à la primaire de la droite, il y a eu la victoire de Hamon à la primaire de la gauche, alors que les sondages, quels que soient les pays, multiplient les erreurs énormes sur le résultat possible des scrutins. De quel droit peut-on nous matraquer l’argument du vote utile pour quoi que ce soit  ?

J’ajoute que les électeurs sont grands, qu’ils sont souverains, qu’ils sont capables de lire des programmes et de voter en conscience, alors il faudrait dire à un certain nombre de grands actionnaires de médias privés, il faudrait leur dire très simplement, nous ne sommes pas des oies, et il faudrait donc arrêter d’essayer de nous enfoncer Macron dans la gorge à tout prix.  »

Benoît  Bouscarel  : «  Merci on vous a bien compris, Thomas Guénolé, politologue. Merci d’avoir accepté notre invitation ce soir.  »

Source: http://www.les-crises.fr/vote-utile-macron-guenole-nous-ne-sommes-pas-des-oies/


Emmanuel Macron : c’est son mentor Henry Hermand qui en parle le mieux ! (Le Figaro) (3/5)

Monday 27 February 2017 at 05:00

Très étonnante interview dans le Figaro du septembre 2016 du multimillionnaire Henry Hermand, décédé en novembre dernier, très proche ami d’Emmanuel Macron.

Cela nous permet de mieux cerner le personnage.  Bonne lecture !

Série : Le Phénomène Macron…

Le chef d’entreprise de 92 ans appellait ses amis à financer et appuyer la démarche de l’ancien ministre de l’Économie. Et donnait plusieurs conseils au probable candidat à la présidentielle. En 2012, il avait pourtant soutenu François Hollande…

Source : Le Figaro, 18/09/2016

LE FIGARO. – On vous présente souvent comme un homme qui a fait fortune dans les supermarchés. Quel est votre parcours ?

Henry HERMAND. – Ce sont des foutaises ! Je suis issu du secteur agricole, j’ai étudié à Polytechnique et été formé à l’énergie atomique. Puis, en 1964, j’ai créé un supermarché au Blanc-Mesnil, sous le nom du consortium interprofessionnel des producteurs (CIP). J’ai développé ensuite des hypermarchés et des centres commerciaux.

Vous avez rencontré Emmanuel Macron en 2002. Vous êtes cité parmi ses conseillers, ses relais influents. Concrètement, quel rôle jouez-vous auprès de lui ?

Je ne le quitte jamais! J’ai une légitimité de parcours à le conseiller sur ses grandes orientations. Je lui fais passer des notes. J’ai obtenu qu’on abandonne l’idée de sociallibéralisme, de social-réformisme, pour parler de progressisme, qui signifie l’adaptation à ce qui change. Je lui apporte mon expérience auprès de la gauche non communiste, des éléments historiques. Je demande qu’on mette en place un comité politique avec des parlementaires. Je vois d’autres personnes, j’ai déjeuné hier avec Marisol Touraine, rocardienne, même si je ne l’ai pas encore convaincue de soutenir

Macron ! Je veux, par exemple, que quelqu’un comme Pascal Lamy (ancien directeur général de l’OMC, NDLR) se rapproche de lui et le soutienne, pour lui faire part de ses connaissances sur les partis sociaux -démocrates dans le monde.

Avez-vous donné de l’argent à En marche ! et à Emmanuel Macron ?

Je vais le faire, dans le cadre légal, c’est-à-dire 7 500 euros. Je lui ai juste prêté de l’argent à titre personnel, pour qu’il s’achète un appartement à Paris. J’incite toutes mes relations d’affaires à immédiatement
aider Emmanuel Macron. Je m’inspire de la campagne d’Obama, basée sur des petits porteurs.

Avez-vous mis vos contacts à la Maison-Blanche en relation avec Emmanuel Macron?

Le fils de l’un de mes contacts rocardiens travaille dans le cabinet de Barack Obama. Le président américain a envoyé une lettre à Sylvie Rocard au moment de la disparition de Michel. Ce monsieur dans le cabinet peut nous montrer comment on fait une campagne. Emmanuel Macron pourrait d’ailleurs se rendre aux États-Unis.

Emmanuel Macron va-t -il annoncer prochainement sa candidature à l’élection présidentielle ?

J’étais l’un de ceux qui le suppliaient de ne pas tarder à démissionner de manière à ne pas entretenir la confusion avec Hollande. J’aurais aimé qu’il le fasse plus tôt. Emmanuel Macron a repris sa liberté, il ne doit pas encore parler de campagne présidentielle. Il sera candidat s’il y a un mouvement d’opinion suffisamment fort pour que ce soit bénéfique à l’intérêt général et non à son propre intérêt.

Ancien banquier, il n’a jamais été élu. Quels sont ses atouts pour se présenter à l’élection présidentielle ?

En juillet 2014, il pensait à créer une sorte de société d’études autour de la politique. n avait envisagé de faire des conférences à Londres, à Berlin. Il a fallu l’affaire Montebourg et l’appui de Valls et Jouyet, plus que celui du président, pour nommer Macron. Hollande souhaitait lui laisser seulement le secrétariat d’État au Budget. Depuis la commission Attali, Emmanuel a eu l’occasion d’avoir un réseau très important. Il apparaît aujourd’hui comme un recours. L’une de ses qualités est de s’ouvrir au monde, de comprendre ce qui se passe.

Vous avez été témoin de son mariage avec Brigitte  Trogneux, qui est de plus en plus visible auprès de lui …

Elle est très importante. Elle a orienté ses lectures, joué un rôle dans ses cercles d’amis, veillé à ce qu’il ne se disperse pas. Il a eu la chance, étant très jeune, d’être en vie commune. Il n’a pas, au contraire de la majorité des gens brillants de son âge, multiplié les copines. Cela a joué un rôle important dans son travail! ll n’a pas été sollicité, ou du moins, il a refusé.

Une partie de la gauche exècre Emmanuel Macron. A-t-il commis des erreurs politiques ?

Cette gauche est ringarde. Il a cependant fait des choses que je n’ai pas appréciées. Il a fait apparaître Chevènement comme parrain, alors qu’il était le pire ennemi de Rocard ! Emmanuel est trop jeune pour avoir connu ces périodes, il a besoin d’être recadré sur des connaissances historiques. Les couvertures de Paris Match, c’était une erreur, et je lui ai dit. C’est people, c’est médiocre, notamment la photo avec le nudiste. Même chose pour le Puy -du-Fou. ll n’avait pas besoin de s’afficher avec Villiers. Ce désir qu’il a de serrer toutes les mains, même des personnes qui ne sont pas d’accord avec lui, est regrettable. Il perd parfois son temps, c’est un peu ridicule. Avec sa femme, on lui demande d’arrêter. On veut freiner ses tentatives de trop convaincre.

En 2012, vous aviez pourtant voté pour François Hollande …

J’ai été un des premiers à soutenir financièrement Hollande dans la compétition. Son comportement m’a déçu. li a seulement oeuvré à construire une majorité qui ne fonctionnait pas avec des écolos et des gauchistes. Je l’ai vu avant l’été pendant deux heures. Je dois le choquer. Mon soutien inconditionnel à Emmanuel ne doit pas lui faire un grand plaisir.

Source: http://www.les-crises.fr/emmanuel-macron-cest-son-mentor-henry-hermand-qui-en-parle-le-mieux/


Mise à jour Macron N°1

Monday 27 February 2017 at 04:19

Dépenses somptuaires, appartement acheté trop cher, voiture peut-être aussi, travaux pharaoniques dans sa maison secondaire, etc – un gestionnaire décidément avisé cet Emmanuel Macron…

Vous pouvez retrouver la mise à jour du week-end sur le billet de M. Macron, avec de nouvelles questions à poser à M. Macron ici (cela vous emmène à la partie rajoutée seule – si vous avez déjà lu le billet ce week-end) .

Le billet complet pour les nouveaux est là – je vous en souhaite une bonne lecture…

Continuez à faire des recherches, et à nous remonter de l’information, c’est précieux.

(commentaires ouverts sur l’ancien billet svp)

Source: http://www.les-crises.fr/mise-a-jour-macron-n1/


Débat Sapir / Levy / Berruyer sur le Décodex et les Fake News

Sunday 26 February 2017 at 10:32

Enfin, un peu de débat…

P.S.  Soutenez-nous sur Twitter en vous abonnant à @OBerruyer . Je vous signale que je vais régulièrement sortir sur Twitter des informations et mises à jour sur nos dossiers Macron et Le Monde, qui ne seront pas annoncées sur le blog. Et pas plus tard qu’aujourd’hui… 😉 Merci à toutes et à tous !

Source: http://www.les-crises.fr/debat-sapir-levy-berruyer-sur-le-decodex-et-les-fake-news/


100 % Ruffin

Sunday 26 February 2017 at 04:00

Ruffin se lâche aux Césars le 25 février…

Sous les applaudissements de la salle, il monte sur scène en arborant non plus comme à l’accoutumée son fameux t-shirt “I love Bernard” mais un t-shirt à l’effigie de Vincent Bolloré “I love Vincent”. La cérémonie est, en effet diffusée sur Canal +, propriété de l’industriel breton.

“Mon film, il parle d’une usine qui part en Pologne et qui laisse derrière un paquet de misère et un paquet de détresse. Et au moment où je vous parle, c’est une usine d’Amiens, qui s’appelle Whirlpool, qui fabrique des sèche-linges, qui subit la même histoire puisque maintenant ça part là aussi en Pologne (…)  Ça fait maintenant trente ans que ça dure dans l’ameublement, dans le textile, dans la chimie, dans la métallurgie, ainsi de suite. Pourquoi ça dure depuis trente ans ? Parce que ce sont des ouvriers qui sont touchés, et donc on n’en a rien à foutre. Si c’étaient des acteurs qui étaient mis en concurrence de la même manière avec des acteurs roumains, ça poserait problème immédiatement. Si c’étaient des journalistes, quand on touche à l’avance fiscale des journalistes, ça fait des débats, il y’a des tribunes dans les journaux. Mais imaginons que ce soient les députés, qu’on dise que les députés ne sont pas assez compétitifs. Un député français coûte 7610 euros par mois, un député polonais coûte 2000 euros par mois (…) Mais imaginons qu’on dise : demain, il faut délocaliser l’hémicycle à Varsovie.

Donc dans ce pays, il y’a peut-être des sans-dents, il y’a surtout des dirigeants sans cran. Donc François Hollande, maintenant, il a l’occasion de montrer sur le dernier fil que son adversaire, c’est la finance, qu’il peut faire des réquisitions, qu’il peut interdire les produits Whirlpool sur le territoire français. Qu’il puisse sortir de l’impuissance et se bouger le cul.”

Lors de ce discours, le caméraman de Canal finit par ne plus faire de plan large sur le rédacteur en chef de “Fakir” mais se contente d’un plan resserré afin de cacher son t-shirt.

Vidéo ouverte à mes élus pleurnicheurs : crétins ou hypocrites ? (8 février)

Source: https://www.les-crises.fr/100-ruffin/


ENTRAIDE : Bilingue anglais, Monteur vidéo

Saturday 25 February 2017 at 14:51

Bonjour

Nous avons des besoins importants et très urgents pour différents projets ce week end

Nous comptons donc vraiment sur vous…

Bilingue anglais

Nous avons aussi besoin de 1 ou 2 personnes bilingues en anglais, ayant du temps ce week-end et/ou dans la semaine

Monteur Vidéo

Nous avons aussi besoin de 1 ou 2 personnes à l’aise avec du montage vidéo, imaginatifs, créatifs pour monter une petite vidéo…

=> Contact

Contactez-nous ici en indiquant en objet le sujet sur lequel vous vous proposez…

Merci d’avance aux volontaires ! 🙂

(ne m’en veuillez pas si je ne réponds pas tout de suite, vos propositions sont enregistrées et utilisées en fonction des besoins, merci !)

P.S. si on ne répond pas tout de suite, excusez-nous, n’hésitez pas à re-proposer une 2e fois, c’est très dur niveau temps pour moi…

Merci encore à tous (vos soutiens sont vraiment très précieux)

On les aura !

Source: http://www.les-crises.fr/entraide-bilingue-anglais-monteur-video/


La couverture médiatique du patrimoine de Macron : la fabrication d’une “No News” (2/5)

Friday 24 February 2017 at 16:00

Suite de notre quadrilogie sur le patrimoine d’Emmanuel Macron  – je compte sur vous pour diffuser largement cette série sur les réseaux sociaux…

Série : Le Phénomène Macron…

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Plan de ce billet :

 

Nous allons donc nous intéresser à la couverture de la presse du sujet Patrimoine de Macron

I. Les informations du JDD : la fabrication d’une “No News”

Le 12 février, ENFIN, un journal, le JDD,  interroge donc Macron sur son patrimoine – et nous promet à grands coups de trompettes la Vérité (Merci Lagardère !) avec cet article mythique :

macron

macron

Ce qui est intéressant, c’est qu’on a ici une fantastique illustration de la propagande dans le monde occidental.

On voit ici qu’en gros, ils ne mentent pas (bon, ils se trompent, le PEA de 54 520 € est celui de Mme Macron ; je ne sais pas comment ils tombent sur 227 772 €, je suis à 213 244 €…), toutes les informations y sont.

macron

Il n’y aucune “Fake news”, on ne peut attaquer l’article sur les faits, tous y sont.

Mais ce qu’il n’y a pas, c’est la conclusion logique :

macron

macron

Mais est-ce si compliqué ?

macron

Il manque dès lors la mise en valeur de ce fait majeur, avec un titre en relation, etc.

Mais pas du tout, au contraire, on a du beau “On vous a tout dit, circulez, il n’y a rien à voir !”

Bon, il semble que des lecteurs un peu moins naïfs aient réagi – puisqu’ils remettent ça la semaine suivante :

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“On vous a tout dit, circulez, il n’y a rien à voir !” – on verra dimanche après cette étude ! 🙂

macron

Les-crises.fr : les questions qui dérangent VRAIMENT Macron…

P.S. en bonus, la page suivante du JDD du 12/02 dit ça :

macron

Rappel :

macron

#BonneChance
<h2>II. Les informations de l’AFP : la propagation d’une “No News”

Et l’AFP embraye : tout y est dit, même encore plus clairement, mais rien ne percute (lisez l’article en entier ici) :

macron

“On vous a tout dit, circulez, il n’y a rien à voir !” – d’ailleurs, ça vous était bien arrivé clairement aux oreilles, hein ? #ObligationDeRésultatDeLaPresse

III. Les “informations” du Monde : encore du travail de BuzzFeed !

Et c’est là que ça devient stupéfiant !

Le 8 février, mon article de juin buzzant, je me suis dit – et c’est vrai – que j’allais sûrement recevoir la visite de la police du Monde, les Décodeurs, et donc j’avais prévenu mes lecteurs de la situation :

macron

Avec au passage un rappel de ma diffamation dans le Décodex du Monde, reconnue par la suite ; liste qui avait été faite par Adrien Sénécat, des Décodeurs du Monde, ancien de chez BuzzFeed :

Samuel Laurent et Adrien Sénécat présentent le Decodex (Vidéo Facebook à voir ici)

dont j’avais montré le remarquable travail à l’époque de journaliste d’investigation (archive – sans démenti à ce jour) :

decodex

Eh bien, je vous le donne en mille : après le succès du Décodex, quel fin limier Le Monde a-t-il envoyé pour enquêter sérieusement sur le patrimoine d’Emmanuel Macron ? Si, si : Magic Andrien Sénécat ! (archive de l’article ici) :

macron

C’est vrai que c’est bizarre d’oser s’interroger : “conspirationniste” va !

Et Sénécat attaque bille en tête :

macron

Notez comme il mélangent sciemment ce blog avec l’extrême-droite (que je combats régulièrement), et en rajoute dans la diffamation. #ÀBientôt

Notez aussi comme, incidemment, il fait un hyperlien de mon site vers leur Décodex (www.lemonde.fr/verification/source, c’est l’adresse orwellienne du Décodex).

Mieux, il laisse penser que je suis à l’origine d’une “rumeur”, alors que les premiers mots de mon billet sont :

macron

et donc que c’est le Canard enchaîné qui a levé le lièvre, pas moi…

Notez aussi le choix des coupes de la dernière phrase me citant

« Il joue ou quoi ? S’il a tout donné aux bonnes oeuvres, je veux bien revoir un peu mon jugement sur lui… (…) Un esprit mal intentionné pourrait même le soupçonner d’avoir un compte à l’étranger… Après, il y a sans doute une bonne explication, parfaitement légale, surtout que c’est certifié par Macron », ironise Olivier Berruyer, auteur du blog Les Crises.

et jugez avec l’original :

macron

(notez le smiley ; c’est super rare d’avoir un compte en Suisse pour planquer de grosses sommes d’argent que vous avez DÉCLARÉES au fisc !!!)

#MerciPourCeMoment

Tout ceci n’a pas laissé des lecteurs du Monde indifférents (merci à eux) :

macron

macron

macron

Réactions qui les ont obligés à faire machine arrière, et à effacer le paragraphe du début, et à faire leur boulot normal : traiter du patrimoine de Macron sans citer de sources extérieures :

macron

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Retour au reste de l’article original, sur le fond du problème Macron :

macron

OK, belle recopie de mon billet. (on note que lui non plus n’a pas trouvé les déclarations de 2014 – il n’a pas osé citer mon blog comme source je pense… 🙂 )

HÉLAS, il n’a pas eu la présence d’esprit d’aller sur le site de la HATVP pour prendre la dernière déclaration de M. Macron, celle de sortie du gouvernement, sortie fin janvier (trop de travail tue le travail) pour faire un travail de qualité.

macron

N.B. 1 : Ce n’est pas de sa faute, mais M. Sénécat a semble-t-il recopié une erreur de ma part (ou il a fait la même erreur que moi dirons-nous) : il faut défalquer la quote-part de Mme Macron sur l’appartement commun, qu’on ne connait pas, et que j’ai estimée ce jour à 10 %…

macron

N.B. 2 : ce n’est pas une “assurance vie” les 500 000 €, c’est l’assurance décès du prêt immobilier ; elle ne devrait pas être mentionnée à mon sens, n’étant pas patrimoniale.

macron

OK, belle recopie de mon billet – avec simplement le rajout sur l’information Hermand postérieure.

Conclusion du Monde :

macron

macron

Ah, donc il n’en sait rien le gars… Mais on a tort de se poser des questions. Ok…

C’est pourtant la seule question que les gens sérieux se posent depuis 8 mois, mais ce n’est pas grave…

Valeur ajoutée du Monde / Blogueur = 0.

Mais il essaye au moins :

macron

Mais il faut croire qu’Adrien Sénécat n’a pas beaucoup impressionné Emmanuel Macron…

Bref, dans mon article, je concluais en appelant de mes vœux le travail d’un journaliste d’investigation :

macron

Hélas, ce sont les Décodeurs du Monde qui s’en occupèrent… #PasD’Bol  😉

Et ils concluent leur brillant article par un grandiose :

macron

Alors que notre principal souci, ce n’est pas d’éviter les fausses informations, mais de bien avoir toutes les vraies !

P.S. Soutenez-nous sur Twitter en vous abonnant à @OBerruyer – il y a encore des choses croustillantes à venir ce week-end et la semaine prochaine…

P.P.S: désolé pour les coquilles, elles seront corrigées ce soir…

Source: http://www.les-crises.fr/la-couverture-mediatique-du-patrimoine-de-macron-la-fabrication-d-une-no-news/


Charlot ministre de la vérité, par Frédéric Lordon

Friday 24 February 2017 at 00:55

Source : Le Monde diplomatique, Frédéric Lordon, 22-02-2017

One of the best toy traffic lights ever manufactured (l’un des plus beaux jouets représentant un feu de circulation jamais fabriqué).
cc tomovox

Admettons-le : au début on n’a pas voulu y croire. Lorsque le 3 janvier on a entendu Samuel Laurent, « décodeur » en chef au Monde, annoncer « une innovation technologique (1) »conçue pour défaire la post-vérité, on s’est dit que c’était trop beau pour être vrai. Mais l’époque dispense sans compter, et il faut désormais tenir pour acquis qu’elle est capable de tout. La suite a prouvé combien. Il y a d’abord ce nom grotesque, Decodex, qui fait surtout penser aux collants bleus de Fantômas ou bien au manteau noir de Judex — et donne irrésistiblement envie d’avoir accès aux minutes du brainstorming, qu’on imagine quelque part entre Veritator, Orthofact et Rectifias. Il y a surtout une trouvaille dont on ne sait plus s’il faut l’assimiler au geste d’une performance artistique ou au comique du cinéma muet. Construire la machine à gifles et s’y attacher la tête dans l’ouverture, Buster Keaton ou Charlot n’auraient sans doute pas fait mieux. C’est que les génies du décodage se sont fabriqué pour longtemps des journées difficiles. Comme de juste, pas une des (nombreuses) traces de pneu de la presse « crédible » labellisée « vert » ne leur sera épargnée, immanquable avalanche dont les effets sur la santé nerveuse du chef décodeur sont déjà constatables sur les réseaux sociaux. Et chaque fois que le ministère de la vérité proteste de ses justifications doctrinales, c’est derechef pour faire tourner à plein régime la turbine à claques.

L’hôpital, la charité

Pour son malheur en effet, il n’est pas une de ses phrases qui ne puisse aussitôt lui être retournée. On se souvient de Katherine Viner, éditorialiste-philosophe de la post-vérité au Guardian qui, voulant faire porter le chapeau à Facebook, « conceptualisait » les « bulles de filtre » sans s’apercevoir que la définition qu’elle en donnait s’appliquait à merveille à la presse mainstream : un univers clos qui ne se nourrit que de pensée confirmante sans jamais ni accueillir ni faire entendre le moindre bruit contradictoire sérieux. Si Samuel Laurent est visiblement plus à son affaire dans le code que dans la théorie, ça ne l’empêche pas d’essayer lui aussi. Il aurait eu tort de se gêner, les produits de la ferme sont de première qualité : « Plus on est dans le domaine de la croyance et du religieux, plus c’est difficile de faire changer d’avis quelqu’un, parce qu’il y croit, il a basé sa structure mentale là-dessus (…) C’est compliqué de se battre contre des gens qui sont déjà convaincus (2) ». Et c’est tellement vrai.

La neutralité journalistique est au choix une ânerie sans nom ou une parfaite hypocrisie.

Par exemple, le type qui déclare avec un regard fixe un peu inquiétant que « Jean-Claude Juncker s’efforce de taxer les multinationales, de faire la chasse aux paradis fiscaux et d’avoir une gestion politique — comprendre de gauche — des politiques budgétaires » est clairement à jour de sa cotisation aux Raëliens ou bien s’est fait refiler du gâteau au shit par des Hare Krishna. Ici les analyses de Samuel Laurent n’ont jamais été si éclairantes : nous avons en effet à faire à quelqu’un « qui est dans le domaine du religieux, qui y croit, qui a basé sa structure mentale là-dessus ». Et il est bien certain qu’il ne va pas être facile de le ravoir, parce que celui-là, c’est peu dire qu’« il y croit ». Le problème est que le sujet à pupilles dilatées est directeur éditorial au journal Le Monde (3) qui lui tamponne régulièrement son bon de sortie — à vignette verte. Problème d’autant plus sérieux que le directeur de la maison de repos, en campagne pour les dragées Decodex, dit lui-même des choses à fort retour de manivelle : « Un site d’extrême-droite peut reprendre des vraies informations ou alors peut colporter de fausses informations, ou peut donner des visions extrêmement tendancieuses des faits (4». Ma foi c’est très vrai également, attention toutefois à la malice du jokari. Bien sûr on ne va pas assimiler le journal de référence à un site complotiste, mais enfin, littéralement parlant, « reprendre des vraies informations, en colporter de fausses, donner des faits des présentations extrêmement tendancieuses » est un énoncé susceptible d’un champ d’application passablement plus large que ne l’imagine le directeur du Monde.

Quand les autorités ne font plus autorité

Qu’un discours devienne à ce point instable par autoréférence devrait normalement inquiéter ses propres auteurs. Que la chose les laisse à ce point de marbre, et comme inconscients de la ruine qu’ils opèrent eux-mêmes de leur propre position a en tout cas valeur de symptôme. Mais symptôme de quoi sinon de ces époques finissantes qu’on reconnaît à l’enfermement de ceux qui prétendaient en être les guides, et ne mesurent plus ni à quel point ils ont rompu avec le reste de la société ni la portée de leurs propres paroles. De ce point de vue, il y aurait certainement lieu de mettre en rapport le geste involontairement comique du Decodex et la vomissure des économistes Cahuc et Zylberberg (5), l’un comme l’autre exprimant ce mélange d’incompréhension et de fureur des institutions de la doxa quand, médusées, elles contemplent pour la première fois la crise qui menace de les emporter. Spasme réactionnel commun des autorités qui découvrent qu’elles ne font plus autorité, le ministère journalistique de l’information vraie est mitoyen de la maison de correction épistémologique pour « négationnistes économiques ». Et dans l’un et l’autre cas, la même incompréhension stupéfaite du processus d’effondrement de leur légitimité, la même réaction à la fois autistique et autoritaire — précisément parce que les institutions de pouvoir ne connaissent pas d’autre conception qu’autoritaire de l’autorité. C’est pourquoi, exposées à la contestation, elles cèdent spontanément à une crispation fulminante accompagnée d’un serrage de vis pour tenter de reprendre en main ce qui est en train d’échapper. Ici nous vous apprendrons ce qu’est la vraie science, là la bonne information — et, croyez-nous, vous finirez par penser droit.

Le ministère journalistique de l’information vraie est mitoyen de la maison de correction épistémologique pour « négationnistes économiques »

On pourrait même pousser l’homologie plus loin car l’antinomie épistémologiquement indigente de la science et de l’idéologie, qui obsède les deux économistes partis, est formellement semblable à celle du journaliste et du militant dont le « décodage » fait l’axe de sa vision du monde. De même qu’aux uns il faudrait expliquer qu’il y a finalement trois sortes d’économistes : ceux qui ne s’aperçoivent même pas que leur « science » est de part en part imbibée de politique, ceux qui en ont conscience mais décident de camper dans la dénégation pour ne pas gâcher les profits symboliques de la science, ceux enfin qui aperçoivent que la présence de la politique dans la science sociale est sa condition nécessaire et qui cherchent au grand jour comment réguler les effets de cette présence, de même il faudrait expliquer aux autres que la neutralité journalistique est au choix une ânerie sans nom ou une parfaite hypocrisie.

Autant la discussion épistémologique, toujours dominée par le boulet de la « neutralité axiologique », est loin d’être close, autant on pensait en avoir fini depuis longtemps avec l’« objectivité du journalisme ». Il faut croire que non. Une heure d’émission (6), et presque de supplications, ne suffira pas pour obtenir de Samuel Laurent un début de vacillement sur ce sujet. Par exemple : pourquoi Fakir doit-il être en orange ? Parce qu’il « a un point de vue » : « Je suis désolé, Fakir parle d’un point de vue ».

« Dieu, le Monde, et moi »

Leibniz nomme « géométral » de toutes les perspectives le point de vue sur tous les points de vue, le point de vue suprême qui cesse d’être un point de vue particulier parce qu’il les synthétise tous. Le géométral, c’est le point de vue de Dieu. Ou, donc, du Monde. C’est bien connu : Le Monde n’a pas de point de vue. Il n’est pas l’organe officiel de la mondialisation, de l’Europe libérale, de la réforme indéfinie, et de l’entreprise-qui-crée-l’emploi — ou s’il l’est, il n’est que le porte-parole de la nature des choses. Et quand, de temps à autre, admettons-le, des « opinions » s’y font entendre, c’est dans les pages spéciales des éditoriaux, des chroniques et des tribunes, hermétiquement séparées du reste du journal voué, lui, aux faits vrais et à l’information neutre.

Aussi bien Daniel Schneidermann que François Ruffin (7) s’essayent à faire comprendre à Samuel Laurent que c’est le propre du point de vue dominant que de pouvoir se nier comme point de vue particulier, de même, par exemple, qu’en matière de langue il n’y a d’accent qu’en référence à un accent particulier mais qui a réussi le coup de force de se poser comme le neutre, le sans-accent, ou bien dans un autre genre que le refus de l’idéologie est la posture suprêmement idéologique, puisque inconsciente de l’idéologie dans laquelle elle baigne entièrement, etc., des choses assez simples normalement. Formidable citation de la documentariste de Paroles de Bibs : « quand un patron parle, c’est de l’économie, quand un syndicaliste parle, c’est du militantisme (8) ». Normalement, dans ce raccourci coup de poing, qui dit absolument tout, il devrait y avoir de quoi réveiller jusqu’à un esprit végétatif. Mais là non, rien, autant apprendre la règle de trois à une théière.

Si, comme le disait Marx, les structures sociales se réalisent dans des personnes particulières, il n’est pas interdit de prendre la mesure du fait général de la labellisation de l’information, non seulement par ce qu’en dit l’un de ses plus signalés représentants, mais aussi par ce qu’il dit de lui-même, l’accord parfait d’une complexion singulière à la structure d’ensemble permettant d’éclairer la structure d’ensemble par la complexion singulière. On touche donc probablement au fond des choses (et peut-être en les deux sens du terme) lorsque, interrogé sur les ressorts de sa vocation journalistique, le chef décodeur hésite un instant avant de répondre finalement qu’elle doit tout à « la passion des faits (9) ». La passion des faits… Des faits en général, sans autre précision. Des faits en tant que faits. Réponse philosophiquement vertigineuse, porteuse de tout un rapport au monde social et à la politique (peut-être au monde tout court d’ailleurs), qui laisse aussi dans un grand désarroi car on voit bien que, même en prenant le sujet avec patience et longueur de temps, on n’y arrivera pas, on ne lui fera pas lâcher, puisque tout s’en suit avec une parfaite logique : il y a « les journalistes » (qui n’ont pas de point de vue) et il y a « les militants » (qui en ont un). Les premiers sont donc par essence respectueux des faits et les seconds portés à les distordre. Au Monde, on n’est pas des militants, d’ailleurs — textuellement — « je n’ai pas de démarche militante ». Et puis encore : « Je ne suis pas militant, je suis journaliste. Et être journaliste, c’est expliquer le monde tel qu’il va ». Sentiment de vertige au spectacle de cet abysse. On se rattrape en imaginant qu’il suffirait, par amusement, de suggérer au « journaliste » qu’il est « un militant des faits » pour qu’une erreur-système de force 7 lui grille aussitôt tous les circuits.

À l’intersection de l’évaluation et de la démocratie pastorale

Il y a comme une loi de proportionnalité du monde social qui justifie la critique en rapport avec l’importance des positions de pouvoir et des prétentions qui s’y expriment. C’est que la détention d’un pouvoir exorbitant conduit nécessairement à questionner la légitimité des détenteurs, et qu’en l’espèce on est conduit à se demander comment des pouvoirs aussi considérables se sont trouvés remis à des individus aussi insuffisants. La pédagogie généralisée de l’information vraie ne pouvait donc manquer de faire revenir la bonne vieille question de Marx de savoir qui éduque les éducateurs. On se dit d’abord que la croyance forcenée en un journalisme vierge de point de vue et riche seulement de faits devrait suffire à interdire l’accès à la profession. On se demande ensuite ce qui se passe dans les écoles de journalisme pour qu’on en laisse sortir des « diplômés » dans cet état. Sont-elles toutes sinistrées à ce point (ou n’y en a-t-il pas une ou deux qui résistent) ? À quel effondrement président-elles ? La dégradation intellectuelle du journalisme est-elle si avancée que le laisse entrevoir l’aval enthousiaste donné à la philosophie du Decodex jusqu’au plus haut niveau du « quotidien de référence » ?

« Quand un patron parle, c’est de l’économie, quand un syndicaliste parle, c’est du militantisme »

« Nous proposons de l’aide, nous n’imposons rien à personne, on est là pour aider » murmure doucereusement M. Fenoglio, directeur du Monde (10), dont on se demande s’il y croit vraiment — le pire étant qu’on ne peut pas l’exclure —, ou s’il ne fait que retourner à ce lieu commun de la réponse médiatique à la critique des médias : la dénégation, spécialement celle de tout magistère. « On n’est pas là pour dire le journalisme qu’il faut faire (11) » n’hésite pas à surenchérir son Décodeur en chef… dans le moment même où il distribue souverainement les labels de bon et de mauvais journalisme.

La dénégation du magistère médiatique, dont on ne sait plus si elle procède d’une parfaite hypocrisie ou d’une inconséquence sans fond, va cependant devenir une gageure avec le déploiement de procédés aussi épais que le Decodex. C’est que la machine à gommettes occupe pile ce lieu monstrueux où se rencontrent la pathologie néolibérale du rating et la conception tutélaire de la démocratie. Il y aurait beaucoup à dire sur le geste qui conduit, sans visiblement qu’il en ait conscience, Le Monde à épouser cette pratique néolibérale entre toutes de l’évaluation généralisée — des autres. Comme on sait, née dans la finance, la pratique de l’évaluation est en voie de coloniser toutes les sphères de la vie sociale, organisant par là leur soumission à la logique d’une société de marché de part en part régie par le principe de concurrence. On évalue les chauffeurs de VTC, les appartements de location, les toilettes d’aéroport, et sans doute bientôt les dîners entre amis — le « code couleur », cette tragédie de la couleur que même la plus fertile imagination dystopique n’aurait pas pu anticiper. Voilà donc que Le Monde distribue des couleurs à l’information comme d’autres aux apports nutritionnels ou aux pots d’échappement. Le Monde est bien le journal de ce monde.

Il l’est par tous les bouts, spécialement par celui qui conçoit la démocratie comme le préceptorat éclairé des « élites », heureusement présentes pour indiquer aux sujets la juste couleur des choses. Dans cette conception pastorale de la démocratie, les bons bergers conduisent le troupeau du peuple. Ils lui montrent la bonne herbe à brouter (la verte) et puis le bon chemin du retour à l’enclos. Les pouvoirs du néolibéralisme croient se rendre acceptables en se donnant la forme de la pédagogie généralisée. Mais c’est une grave erreur. Prétendre dicter aux gens ce qu’ils doivent considérer, et puis ce qu’il leur faut en penser, devient rapidement odieux même assisté de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel.

Normalisation de fer

Et cependant, la rubrique Décodeurs n’en finit plus de proliférer : d’abord une parmi d’autres, puis devenue le joyau de la couronne, elle s’est maintenant assurée la participation au magistère général du Monde puisqu’il lui est permis d’engager toute l’autorité du titre pour déclarer ce que vaut l’information des autres (on a compris qu’au jeu de l’évaluation, le truc est de se situer toujours du côté des évaluateurs).

Qui ne voit qu’elle conquerra le journal en son entier, destiné à devenir une gigantesque entreprise de labellisation politique, terminus dont l’étape décisive a déjà été franchie en fait, comme l’atteste cet article sidérant, intitulé « 20 propositions répétées par les candidats de gauche et (quasiment) inapplicables » (12), les parenthèses témoignant d’un ultime reliquat de décence, sur la longévité duquel on ne parierait pas un kopeck. On y voit sous la plume de trois décodeurs émérites, dont un venu de BuzzFeed, un analyste de première force connu pour son aptitude à fact-checker les sous-vêtements abandonnés dans les jardins de l’Assemblée (13), on y voit donc les propositions des candidats de la primaire de gauche étiquetées les unes après les autres : « compliqué », « flou », « contradictoire », « incertain », « risqué », « pas très utile », « douteux », « improbable », toutes mentions accompagnées comme il se doit de leurs cartouches-couleurs.

Pourra-t-on faire comprendre que le problème ici n’est pas tant de livrer des jugements sur les propositions politiques — c’est peut-être là la fonction première de la presse —, mais de les livrer dans une rubrique supposément consacrée aux vérités de faits et sous la forme du rating en couleur, ceci pour ne pas même parler du sentiment qu’inspirent ces géants de la pensée faisant tomber leurs verdicts souverains en quelques phrases lapidaires du haut de leur Olympe intellectuel. Il est d’ailleurs préférable de mettre ce sentiment de côté, et les envies concrètes qu’il inspire aussitôt, pour regarder plutôt la disposition politique révélée par ces avis autorisés.

Par exemple, la proposition « Refaire les traités européens » s’attire la mention : « compliqué »… Ce qui n’est pas faux en un sens. Malheureusement, c’est tellement vrai que c’en est complètement idiot. Et c’est tout un rapport à la politique qui s’exprime dans cette parfaite idiotie. Il est exact en effet, mais trivialement, que faire pour de bon de la politique, c’est-à-dire entreprendre de modifier l’ordre des choses en ses structures, celles de la finance, du commerce international ou de l’Europe, c’est « compliqué »…, sans qu’on voie très bien ce que ce commentaire d’expert ajoute sinon de révéler le fond grumeleux de sa vision politique qui est de dissuader. Dissuader de rien changer, dissuader de faire de la politique, c’est le lieu naturel de la dépolitisation par le fact-checking, qui croit d’abord pouvoir s’aménager son domaine propre, celui des faits purs, mais finira par y dissoudre toute politique, labellisée selon sa conformité ou sa distance au « réel des faits ». Toute politique transformatrice y recevra donc, mais par définition, le rouge, à l’image de la proposition d’établir la parité hommes-femmes à l’Assemblée, déclarée par les experts… « contradictoire » ! Contradictoire pourquoi ? Parce qu’elle supposerait (en effet) de modifier le mode de scrutin — et par là « contredit » l’état actuel du mode de scrutin. Et voilà toute la question : comment penser l’idée de modification, dans une ontologie politique des faits qui, par définition cherche à ramener toute politique au règne de la « réalité vraie » conçue comme l’inaltérable ? De là, « logiquement », que toute entreprise politique de modifier soit par nature « contradictoire ».

La vérité du Decodex

On se plaît cependant à imaginer quels labels auraient reçus des propositions comme « fluidifier le marché du travail », « alléger une fiscalité excessive », ou « ramener la dette sous les 60 % du PIB »… « Nécessaire » ? « Réaliste » ? « Pragmatique » ? « Urgent » ? Et c’est alors un autre visage du Decodex qui apparaît, non plus bouffon mais grimaçant. Pour savoir où finissent les entreprises de ce type il suffit d’observer la trajectoire des précurseurs. En décembre 2016, le Washington Post propose déjà un plug-in, mais lui destiné seulement à colorier les tweets de Donald Trump (14). Courageux mais pas téméraire, le Washington Post s’en tient aux tweets de la Bête — du gâteau —, mais laisse faire le reste du sale boulot par des officines qu’il se contente d’encourager à distance.

Dans un article de novembre 2016, il apporte ainsi tout son appui aux « révélations » d’un site anonyme — PropOrNot — auto-missionné pour traquer l’infestation par la propagande russe (15). Pas moyen d’avoir la moindre information sur l’identité de ces éradicateurs qui opèrent avec la transparence d’une flaque de mazout. Rien pourtant qui puisse effrayer le Post, l’essentiel n’est-il pas que les propagateurs de désinformation russe soient mis à l’index — la transparence, c’est pour les autres. Mais la liste de PropOrNot n’est qu’en apparence un enfer russomane, dont Glenn Greenwald, effaré, donne le véritable principe (16) : marquer d’un sceau d’infamie tout ce qui sort, par quelque côté, de l’intervalle du raisonnable, délimité d’un côté par Hillary Clinton, de l’autre par Jeb Bush, toute dissidence étant alors présentée, sans la moindre preuve sérieuse, comme émanation des intérêts russes. On y trouve des sites de gauche critique comme Naked capitalism, et d’autres de la droite ultra ou libertarienne aussi bien, dont il est peu probable que Greenwald partage leurs vues mais qu’il n’accepte pas de voir blacklistés selon des procédés dont il n’hésite pas à dire qu’ils sont ceux du maccarthysme même. Voilà à quelle entreprise d’épuration le rédacteur en chef du Post, Marty Baron, donne aussitôt son aval enthousiaste sur Twitter… avant de faire machine arrière devant la levée de boucliers et d’ajouter une note de distanciation alambiquée en tête de l’article originel.

Improved Lifting and Spanking Machine
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Nous avons donc la séquence-type : étiquetage à la truelle idéologique en espérant que ça passera, éventuel scandale sur les réseaux sociaux, possibilité du rétropédalage. Cas Fakir  : « En regardant un peu mieux… on aurait pu le mettre en vert… (17) ». « En regardant un peu mieux », voilà comment Decodex exerce son pouvoir de labellisation : d’un œil parfois distrait. Il n’est pas requis d’endosser intégralement le blog Les Crises d’Olivier Berruyer pour trouver indigne, et surtout symptomatique, le traitement qui lui a été réservé — lui n’aura pas droit aux mêmes indulgences. Tiré de justesse de l’enfer (rouge), dans un geste d’ostensible mauvais-vouloir et consenti sous pression, il n’est pas près de sortir du purgatoire (orange), et pour des queues de cerise avec lesquelles Le Monde et son Decodex pourraient peut-être redouter la comparaison. Au demeurant, on voit très bien pourquoi : il coche toutes les mauvaises cases : contre la finance, pour la sortie de l’euro, pas décidé à gober sans examen les discours sur la Syrie, donnant la parole à Todd, pour qui le journal Le Monde est devenu de longue date un problème pour la démocratie — il a raison.

Reconduit à une suspicion d’idéologie, Samuel Laurent proteste avec le sentiment de la dignité scandalisée : « Nous ? On a une idéologie ? C’est quoi notre idéologie ? (18) ». Et c’est toute l’ambivalence du Decodex qui apparaît alors, objet hybride aux facettes formidablement contrastées, par-là malaisé à saisir, entre normalisation idéologique de fer et sous-doués en liberté — Charlot ministre de la vérité. On rit beaucoup d’un côté, mais de l’autre c’est assez sérieux, et en fait très inquiétant.

Côté sous-doués en tout cas, on comprend que ces gens-là sont perdus, et que les conditions d’un commencement de dessillement n’existent même pas. Dans un ultime retournement involontaire contre elle-même, la philosophie du Decodex révèle ce qu’elle est… en vérité, et pousse l’ironie jusqu’à permettre de le dire dans ses propres termes : un enfermement dans la croyance. La croyance au géométral suprême, la croyance d’un en-dehors de l’idéologie, c’est-à-dire finalement d’une idée possible de la politique hors de la politique — pour le coup : « contradictoire ». C’est tellement consternant qu’on est tenté de se demander s’il ne reste pas dans un coin au Monde quelques personnes qui n’ont pas complètement oublié ce que c’est que la politique, et qui n’ont pas secrètement un peu honte de ce qui est en train de se passer dans leur propre journal, de ce naufrage intellectuel, avalisé jusqu’au sommet de la direction : le règne des data et de l’algorithme, de la politique abandonnée à des illettrés politiques, où le néant de pensée se trouve le remplissage de substitution des lignes de code.

La presse, contre-contre-pouvoir ?

Et l’on s’étonne après ça que le trumpisme prolifère. C’est que lui au moins fait de la politique. De la politique folle, assurément, mais de la politique, que ses électeurs perçoivent d’ailleurs parfaitement comme telle, raison pour quoi ils la sollicitent avec véhémence. Et c’est cette politique puissamment assertive que l’anti-politique du Decodex imagine rectifier ? Plaise au Ciel qu’elle n’accélère pas tous les processus, ce qu’il y a en fait tout lieu de craindre puisque, envahie par la pensée décodeuse, la presse de référence se condamne non seulement à ne rien comprendre des problèmes de l’époque mais, quand elle les entrevoit, à y apporter la pire des réponses : la réponse du rehaussement magistral à ceux qui n’en peuvent plus des magistères, et de la dépolitisation à ceux qui réclament à cors et à cris qu’on refasse de la politique — ceci pour faire faire encore quelques tours de roue à la carriole de la politique unique. Aussi le déploiement à grand fracas du barnum anti-fake news, anti-post-vérité et pro-nunc-vérité, a-t-il pour fonction première de maintenir, en temps de contestation, le balisage idéologique du champ, le contrôle des accès, la disqualification de toute différence politique (de gauche), c’est-à-dire la ligne de fer : celle de la non-idéologie, gardiennée, la casquette au ras du sourcil, par les factionnaires du Decodex.

Que le journalisme commence avec l’établissement de faits et la dénonciation des contre-vérités flagrantes, c’est une telle évidence qu’on se demande comment des titres ont cru y voir le motif d’une rubrique spéciale, en excès de leur habitude ordinaire qui prescrit pourtant depuis des lustres cette exigence presque constitutive de procéder à des vérifications élémentaires. Ceci d’ailleurs pour des raisons qui sont vieilles comme la politique : sitôt qu’ils ne sont plus surveillés comme le lait sur le feu les pouvoirs mentent, les institutions mentent, l’État ment. Le mensonge leur est constitutionnel, comme à toutes les institutions autonomisées, toujours tendanciellement portées à oublier ce qu’était leur fonction première, pour ne plus vivre que pour elles-mêmes. Hormis quelques incertaines régulations institutionnelles, seule la coercition de l’information publique peut les tenir à un minimum de respect de la vérité. Que le procureur de Pontoise trouve d’abord à dire qu’Adama Traoré est mort de complications infectieuses, ou l’IGPN que le viol de Théo n’en est pas un mais une inadvertance, ceci n’est pas un accident mais la vérité des pouvoirs institués. Et c’est bien dans le rapport de force, contraints par l’opiniâtreté d’une volonté de dévoilement, que les pouvoirs finissent par cracher le morceau, et là seulement.

La presse est en principe le lieu de cette volonté — en principe car elle-même, devenue pouvoir institutionnel, entretient (mais depuis si longtemps…) des liens troubles avec les autres pouvoirs institutionnels, ceux du capital et de l’État notamment, dont elle passe souvent les plats avec une étonnante décontraction, employant maintenant surtout son énergie à contrer les contre-pouvoirs (et pensant se refaire une virginité de temps en temps avec un Lux Leaks ou une affaire Fillon, péripéties à grand spectacle, opportunément venues pour mieux faire oublier l’ombre dans laquelle on laisse d’habitude les fonctionnements réguliers du système). Au passage, Pierre Rimbert rappelle dans « Les chauffards du bobard » (19) que quand la presse officielle fait dans le fake, elle n’y va pas avec le dos de la pelle, ni ne mollit à la taille des enjeux : au bout du mensonge, il y a parfois des guerres, des bombes et des morts par milliers.

Toujours plus du même !

Que débusquer les contre-vérités soit d’une urgence particulière dans une époque de dérèglement où certains hommes politiques commencent à tenir des discours dont la qualification hésite entre le mensonge hors de proportion et l’accès délirant quasi-clinique, c’est aussi une évidence, mais qui aurait dû appeler de tout autres réactions que le magistère, ou le ministère, de la vérité. Non pas tant, on l’a vu, parce que les instances décodeuses bobardent aussi souvent qu’à leur tour, mais parce qu’il est rigoureusement impossible que pareille situation passe par le seul effet des sermons de vérité et sans l’analyse des causes politiques qui l’ont fait advenir.

Il n’est pas certain d’abord que les engouements de la crédulité, et leur résistance même aux infirmations les plus éclatantes, soient une nouveauté historique. La survivance du monde en 2013 n’a pas désarmé les apocalyptiques qui annonçaient sa fin en 2012, et n’était que le prolongement d’une série qu’on ne saurait où faire remonter. Et si la rumeur de la pizzeria Comet Ping Pong à Washington (20) a prospéré sur les réseaux sociaux, celle d’Orléans, de cinquante ans antérieure, s’en est fort bien passée. Plutôt que dans l’égarement essentiel du bas peuple, où les élites le situent spontanément, il se pourrait donc que le dérèglement contemporain trouve l’une de ses origines dans l’effet de légitimation, et par suite de libération, que lui donne l’engagement sans frein de certains hommes politiques dans le discours de l’énormité — on pense à Trump évidemment, mais nous aurons bientôt les mêmes à la maison, si nous ne les avons pas déjà.

Mais comment cette irruption de l’énormité au sommet même de la politique est-elle devenue « d’un coup » possible ? Si brutal soit-il, il n’y a pas d’événement qui n’ait été préparé de longue date. Il faudra bien alors que la presse officielle, la presse qui n’a pas d’idéologie, s’interroge sur sa contribution aux cumuls de longue période qui ont fait déjanter des groupes sociaux entiers et aménagé une place pour un « parler énorme », une place que nécessairement quelqu’un viendrait occuper. En réalité, non pas pour un « parler énorme » en soi, mais simplement pour un « parler autre », à qui, du seul fait qu’il soit autre, on ne tiendrait pas rigueur que par ailleurs il soit énorme.

Sitôt qu’ils ne sont plus surveillés comme le lait sur le feu les pouvoirs mentent, les institutions mentent, l’État ment. Seule la coercition de l’information publique peut les tenir à un minimum de respect de la vérité

On ne sait plus comment dire sans radoter qu’il n’y a plus de démocratie là où il n’y a plus de différence significative, là où se trouve proclamée une one best way sans alternative, telle qu’on peut alors, par exemple, l’inscrire dans des traités européens inamovibles, ou telle que des labellisateurs-sans-point-de-vue viennent la certifier « sans point de vue ». La politique sans point de vue étant l’équivalent dans son ordre de l’immaculée conception, il est fatal que vienne tôt ou tard quelqu’un qui rappelle que même pour faire Jésus il faut papa dans maman, c’est-à-dire qui réaffirme un point de vue, et par là s’obtienne une reconnaissance immédiate, presque un immense soulagement, de pans entiers de la population qui suffoquaient d’avoir été si longtemps privés de respiration politique. C’est sans doute un air chargé de miasmes qu’ils respirent à nouveau, mais à leurs yeux c’est au moins de l’air, et pas le gaz inerte des zombies du fact-checking et de leurs chefs.

Les responsables du désastre qui vient, ce sont eux. Ils avaient pour mission de faire vivre la différence et ils ont organisé le règne du même, l’empire labellisé de l’unique. Maintenant que la forteresse est attaquée par tous les bouts, plutôt que de commencer à réfléchir, ils se sont payé des épagneuls. Et pendant que les cabots aboient, les maîtres, croyant avoir la paix, mouillent leur linge de bonheur à l’idée de Macron, mieux encore : d’un deuxième tour Macron-Le Pen — dont ils sont tellement sûrs que le têtard sortirait vainqueur qu’on peut bien pousser les feux pour le plaisir du spectacle. Pendant ce temps l’illuminé qui a dû prendre la foudre en passant la porte de la banque Rothschild, un autre Jésus mais à moitié cuit celui-là, les enchante avec ses évangiles Harlequin « ni droite ni gauche » ou bien « et droite et gauche », la formule même de l’asphyxie politique. Voguons donc avec entrain vers un deuxième tour tant espéré, qui ne nous laissera que le choix de la candidate de l’extrême-droite et du candidat qui fera nécessairement advenir l’extrême-droite — avec les compliments de la presse de la vérité.

Frédéric Lordon

Source : Le Monde diplomatique, Frédéric Lordon, 22-02-2017

Source: http://www.les-crises.fr/charlot-ministre-de-la-verite-par-frederic-lordon/


Les russes arrivent, par Oliver Stone

Thursday 23 February 2017 at 02:47

Source : Oliver Stone, Facebook, le 29/12/2016

Oliver Stone, Facebook, 29 décembre 2016

Alors que 2016 touche à sa fin, notre nation se trouve dans une situation profondément instable. Nous sommes incapables de tracer les grandes lignes de notre intérêt national. Est-ce que c’est l’emploi et l’économie, est-ce que c’est la sécurité nationale, ou bien est-ce d’assurer la sécurité mondiale, en d’autres termes d’agir en tant que gendarmes du monde ?

Le New York Times “défaillant” (pour citer Trump) dégénère en une organisation style Washington Post avec sa vision stagnante de Guerre froide d’un monde des années 50 où l’on blâme les Russes à propos de presque tout : l’échec d’Hillary, la plupart des agressions et des désordres dans le monde, le désir de déstabiliser l’Europe, etc. En plus, le Times a introduit le problème des “fausses nouvelles” pour réaffirmer son rôle problématique en tant que voix dominante de l’establishment de Washington. Cela est certainement vrai pour le cas du “piratage” par la Russie dans l’élection de 2016 et pour l’installation de son “candidat mandchou” Donald Trump. Apparemment la CIA (à travers divers fonctionnaires du renseignement restés anonymes), le FBI , la NSA, le Directeur du Renseignement National James Clapper (qui a menti notoirement au Congrès sur l’affaire Snowden), le Président Obama, le DNC (Comité national démocrate), Hillary Clinton, et le Congrès s’accordent tous à dire que la Russie, et principalement M. Poutine, est responsable.

Le Sénateur John McCain, psychotique et amoureux de la guerre, est certainement derrière ces patriotes, désignant le Président Poutine comme “un voyou, une brute et un meurtrier et tous ceux qui le décrivent comme autre chose sont des menteurs.” Il a réellement dit ceci – l’homme qui a sciemment choisi Sarah Palin comme vice-présidente en 2008. Et le Times suit en publiant l’histoire dans toute sa splendeur en page une, clairement en accord avec le point de vue de McCain. Je ne me souviens pas des présidents Eisenhower, Nixon, ou Reagan, dans les jours les plus sombres des années 50 à 80, ayant jamais pointé du doigt un président russe comme cela. Les invectives visaient le régime russe, mais jamais Khrouchtchev ou Brejnev ne reçurent un tel jet de fiel. Je suppose que c’est une nouvelle forme de diplomatie américaine. Si un jeune noir dans nos cités était tué ou si toute une noce pakistanaise était assassinée par nos drones, est-ce que le président Obama serait désigné comme un meurtrier, une brute, un voyou ? Une telle personnalisation est le signe que notre pensée est malade et se situe bien en dessous de ce que devraient être nos standards.

L’association des vétérans du renseignement US met en doute les allégations de piratage par la Russie (voir le lien en fin du présent article : “US Intel Vets Dispute Russia Hacking Claims”). Cette association comprend l’ex-réformateur de la NSA Bill Binney, un génie des maths qui a inspiré le personnage joué par Nick Cage dans “Snowden”). Il parle là de ce que signifie vraiment “piratage”, par opposition à “fuite”. Le Times et d’autres médias dominants ont curieusement éludé tout élément contraire à leur théorie, comme ceux présentés par Craig Murray, ex-ambassadeur et porte-parole de Wikileaks, qui dit qu’il a reçu l’information dans un parc de Washington par une personne du parti démocrate qui était dégoutée du comportement du DNC ; Murray l’a ensuite passée à Wikileaks. C’était une “fuite”, pas un “piratage”, et cela me paraît toujours être la source probable de ce scandale (comme je pense que l’était aussi la fuite “Sony” faussement attribuée à la Corée du Nord, mais c’est une autre question). Et s’il devait y avoir une véritable enquête, elle pourrait très bien mener à la découverte d’un “moment Nixon” d’Hillary Clinton. Les bureaux du DNC n’y étaient manifestement pour rien de bon. Ironiquement, Mme Clinton s’est d’abord fait un nom comme enquêteuse sur le Watergate. Regardez l’article de Mark Ames, “Le Site Derrière la Liste Noire maccarthyste”, traquant cette malhonnêteté jusqu’au journaliste du Washington Post Craig Timber.

Je me souviens bien des années 50, quand les Russes étaient supposés être dans nos écoles, au Congrès, au Département d’État : selon beaucoup de supporters de Eisenhower/Nixon, ils étaient sur le point d’envahir notre pays sans sérieuse opposition (et on me dit paranoïaque !). Ce furent ces mêmes médias qui insistèrent sur notre nécessité d’aller au Vietnam défendre nos libertés contre les communistes, à plus de 9000 kms. Et après que la Peur Rouge eut finalement disparu pour de bon en 1991, rappelons-nous que cela ne s’est jamais terminé. Cela devint Hussein en Irak, avec ses armes de destruction massive, et le discours sur le “champignon atomique”. Cela devint le Démon, aussi vrai que le procès des sorcières de Salem. Cela fut Kadhafi en Lybie, et puis Assad en Syrie. En d’autres termes, comme une prophétie orwellienne, c’est sans fin, et je vous garantis que cela ne finira jamais – à moins que nous, le peuple, nous qui pensons encore par nous-mêmes dans cette question essentielle, puissions dire “Assez” de cette diabolisation. “Assez, partez,” et que nous puissions leur rire au nez.

Bien sûr, le noyau dur NYT/WaPo publie rarement nos sérieuses contestations et donc nous trouvons refuge dans les médias alternatifs comme The Nation, Consortiumnews, The Intercept, Naked Capitalism, Counterpunch, Zero Hedge, Antiwar.com, Truthdig, Common Dreams, etc. Je pense alors que nous avons été tout-à-fait choqués (mais pas surpris) quand nous avons vu récemment 200 sites web listés comme outils du Kremlin (WaPo, 24 novembre, “L’effort de propagande russe a aidé à répandre des “fausses nouvelles” durant les élections”).

Mon dieu, le fantôme d’Izzy Stone est de retour depuis les années 50 [Izzy Stone était un journaliste américain des années 50 connu pour sa rigueur et son professionnalisme, NdT] et aussi celui de Tom Clancy depuis les années 80 ! De faux thrillers sont maintenant écrits sur les Russes piratant les élections. Ça fera du fric et des séries TV. Je n’avais jamais lu de telles saletés hystériques dans le New York Times (appelez ça “fausses nouvelles”), dans lequel les éditoriaux sont devenus de dangereuses diatribes sur les supposés crimes russes, beaucoup d’eux supposément écrits par Serge Schmemann, un de ces idéologues qui cherchent encore des russes sous son lit la nuit ; on les appelait “les Russes blancs” dans le temps et comme les Cubains de droite à Miami, ils étaient incapables de vivre sans ces vieilles rancœurs. Schmemann est de toute évidence au sommet du bureau d’édition du NYT. Ce type de pensée a clairement influencé le Pentagone et beaucoup de déclarations de nos généraux, puis a envahi les reportages des MSM [Mainstream Medias, médias dominants, NdT]. Quand une pensée de groupe unique contrôle le débat national, cela devient vraiment dangereux. Dans cet esprit, je donne des liens vers un nouveau groupe de textes cruciaux et de qualité, qui démontrent bien la médiocrité actuelle des médias dominants.

Autant je peux être en désaccord avec Donald Trump (et je le suis), autant il est désormais la cible numéro un de la propagande des médias dominants – jusqu’à ce qu’il se jette sur la piste anti-Kremlin à cause de faux renseignements ou de malentendus concoctés par la CIA. Puis je crains qu’il commence à se battre contre les Russes avec son impétuosité habituelle, et il ne faudrait pas longtemps avant qu’une situation de guerre contre la Russie soit déclarée. Je n’ai alors aucun doute que notre armée sur-financée (10$ investis pour 1 seul en Russie) n’aura AUCUN sens contre un pays qui croit maintenant (avec le plus grand arsenal de l’OTAN à ses frontières depuis Hitler et la Seconde Guerre mondiale) que les États-Unis sont assez fous pour préparer une attaque préventive. Dans son analyse intitulée “Le Besoin de Tenir l’Arabie saoudite Responsable”, Robert Parry souligne que ce conflit a ironiquement débuté au cours des années 1980 avec les néoconservateurs qui ont défini l’Iran comme le premier parrain du terrorisme mondial. La manière dont cela nous a conduits au chaos présent est une analyse brillante qui est inconnue du public américain.

Je vous incite vivement à lire les articles suivants et rester calme dans vos pensées. Cependant, faites en usage d’une certaine manière. Je crois à ce que le Dalaï-lama affirme : chacun d’entre nous, et même simplement par la prière, peut apporter quelque chose pour améliorer ce monde. Je n’aurais jamais pensé me trouver moi-même en train de prier pour le sang-froid d’un Donald Trump. Vous souvenez-vous de l’Iliade ? Comme Homère le raconte, les dieux planeraient chaque jour au-dessus des batailles et décideraient du résultat, des morts et des survivants. Les dieux écoutent-ils encore ?

“La fabrication de la Russie comme l’Ennemi” de Robert Parry, Consortiumnews

http://bit.ly/2hz4jTI

“Un autre échec des médias: l’histoire des hackers russes” de Joe Lauria, Consortiumnews

http://bit.ly/2hmndK4

“Arrêtons le coup d’État de la CIA” de Justin Raimondo, Antiwar.com

http://bit.ly/2hgka9c

“Le Besoin de Tenir l’Arabie saoudite Responsable” de Robert Parry, Consortiumnews

http://bit.ly/2ifNRZ3

“Les vétérans du renseignement américain contestent les déclarations sur les hackers russes” de Ray McGovern, Consortiumnews

http://bit.ly/2gB2yWo

“Le site derrière la liste noire maccarthyste du Washington Post” de Mark Ames, Naked Capitalism

http://bit.ly/2goUVT5

“Un été amer pour les Néocons” de Robert Parry, Consortiumnews

http://bit.ly/2imXXVb

Source : Oliver Stone, Facebook, le 29/12/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Source: http://www.les-crises.fr/les-russes-arrivent-par-oliver-stone/