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Une paix westphalienne pour le Moyen-Orient, par Michael Axworthy et Patrick Milton

Sunday 20 November 2016 at 03:20

Source : Foreign Affairs, le 10/10/2016

Pourquoi un vieux système pourrait fonctionner

Par Michael Axworthy et Patrick Milton

Entre 1618 et 1648, l’Europe centrale, et le Saint Empire Romain en particulier, était dévastée par une série de conflits causés par des visions politiques antagonistes, des grandes puissances et des rivalités dynastiques, qui ont été exacerbés par les différences religieuses. C’est ce qui a vite été appelé “La Guerre de 30 Ans”. Mais la paix de Westphalie, qui a achevé avec succès la phase allemande du conflit, a été largement incomprise.

L’accord de 1648 est largement perçu comme ayant inauguré un système moderne d’indépendance souveraine des États-nations en Europe (souvent cité comme le système westphalien). Et alors que la discussion continue, quand ce concept a été appliqué plus tard au Moyen-Orient après la chute de l’Empire ottoman, il contribua en fait largement au disfonctionnement actuel de la région. Mais en réalité, l’accord westphalien a produit quelque chose de tout à fait différent de ce qui fut communément pensé. Il s’est installé un système de souveraineté limité pour les nombreux États du Saint Empire Romain (connu officiellement comme États Impériaux, qui étaient les territoires composant l’empire, gouvernés par les princes et des conseils de cités). Il a aussi créé des mécanismes légaux pour régler les conflits et offrir une garantie mutuelle de maintien des termes du traité, qui vus tous ensemble forment un système de sécurité collective.

La correction de cette qualification erronée n’est pas seulement importante pour notre compréhension des conflits modernes au Moyen-Orient, mais aussi pour trouver un moyen d’y mettre fin. [Le traité de] Westphalie peut être utilisé, non pas comme plan pour un nouveau traité dans cette région, mais plutôt comme guide et boite à outil d’idées et techniques pour négocier une paix future.

LA VRAIE WESTPHALIE

La Guerre de 30 Ans a commencé avec la rébellion des nobles protestants dans la Bohême des Habsbourg (à présent la République tchèque) contre la politique de centralisation de l’empereur Habsbourg Ferdinand II (qui régna de 1619 à 1637), qui désavantageait les non-catholiques. La guerre dépassa des terres des Habsbourg et s’engouffra dans une grande partie de l’Allemagne après que l’Electeur Palatin (qui gouvernait un état territorial en substance protestant et était aussi sujet vassal de l’empereur), décida d’accepter la couronne de Bohême, que les rebelles avaient arraché à Ferdinand. Ce dernier devant faire face à cette révolte plus grave et de large ampleur qui menaçait la stabilité de l’Empire en entier, reçut de l’aide des puissances allemandes aussi bien catholiques que protestantes comme la Bavière, la Saxe, et également de ses cousins les Habsbourg d’Espagne. Ses opposants protestants dans l’Empire, en même temps, ont obtenu le soutien des puissances étrangères des deux religions, le Danemark, la Suède, et la France catholique. Ces interventions étrangères successives ont fait durer la guerre et l’ont rendue bien plus destructive.

Le problème fondamental derrière la guerre était les visions antagonistes de l’équilibre constitutionnel, qui se passait sur deux niveaux : entre les prérogatives de l’empereur et celles des princes, de même entre les prérogatives des princes (y compris l’empereur Habsbourg en tant qu’État impérial) et celles de leurs populations assujetties respectives au sein de leurs territoires. La question de l’équilibre confessionnel, et comment les divisions causées par la Réforme devraient être gérées et adaptées par la constitution impériale, était imbriquée dans ces deux problèmes.

L’accord final de Westphalie consistait en trois éléments principaux : une réforme du système impérial constitutionnel et politique ; en fonction de cela, un agrément religieux modernisé ; et un traité de paix international entre le Saint Empire Romain et les principaux belligérants européens, France et Suède. Bien qu’il ait fallu cinq ans, le succès final des négociations de paix au congrès des villes de Westphalie, Münster et Osnabrück, était dû pour une bonne partie à la participation de la plupart des États impériaux. Un sommet global de cette ampleur était sans précédent à l’époque, et c’était la volonté des participants d’explorer un terrain diplomatique inconnu qui a aidé à son succès. Cela en a fait un congrès “universel” qui a permis un accord qui satisfit tous les membres de l’empire. Le rôle des discussions informelles entre les envoyés et les dignitaires sur le sujet de développer des structures plus formelles, et finalement, les dispositions du traité, a été d’importance pour le succès de Westphalie. L’arrivée tardive sur la scène d’un groupe essentiel de princes des deux religions a aussi été vitale, ils étaient prêts à faire des compromis et ont agi comme des médiateurs informels entre l’empereur et les couronnes étrangères. Un tel groupe de diverses confessions fut sans précédent et a grandement poussé le processus de paix vers sa phase finale. La participation des princes impériaux dans le processus de paix en 1647-48 a eu pour résultat un ultimatum lancé à l’empereur Ferdinand III qui régna de 1637 à 1657, le forçant à rechercher un accord ou risquer de perdre entièrement leur soutien. Cette intervention arriva à un moment crucial quand le congrès risquait de s’effondrer complètement et qu’il était clair que l’accord de paix franco-espagnol, qui était aussi en négociation, n’aurait pu se conclure à Münster. (Il a seulement pu être conclu beaucoup plus tard, en 1659.) L’intervention de cette “tierce partie” assura ainsi cela, bien qu’un accord de paix universel ait été inatteignable, la paix aurait été sécurisée dans le centre crucial européen de l’Empire.

L’inclusion des États impériaux dans le processus de paix a aussi modifié l’équilibre constitutionnel du pouvoir entre l’empereur et les princes dans le texte du traité. L’un des compromis du traité impliquait la confirmation de la “supériorité territoriale” des princes, ou autonomie politique, aussi bien que leurs droits à participer aux décisions des principaux domaines politiques, conclure des alliances avec d’autres États de l’empire et puissances étrangères, entretenir des armées, financer la guerre, et faire la paix. Mais ils ont reçu un avertissement d’importance, les princes ne pourraient pas forger d’alliances directement dirigées contre l’empereur, l’empire, ou l’accord de paix. Les princes restent sujets de l’empereur, qui garde son pouvoir en tant que suzerain féodal et judiciaire. De même, l’empire et ses cours suprêmes détiennent la supervision judiciaire et la juridiction sur les territoires des princes. L’opinion commune qui admet que Westphalie a créé un système d’États souverains et égaux est donc fausse – d’autant plus que le traité a enlevé la prérogative étendue des princes sur les affaires religieuses, et le droit garanti à Westphalie à l’intervention de garants extérieurs à l’empire.

Le vrai coup de maître diplomatique de l’accord de paix a été sa constitution religieuse ajustée qui améliorait la “juridification” du conflit sectaire — en d’autres mots, qui apportait des moyens légaux plutôt que militaires pour résoudre les conflits. Les clauses religieuses développaient une trame basique existant dans l’empire depuis 1555, qui essayait de gérer la co-existence religieuse légalement et politiquement, tout en mettant entre parenthèses les questions litigieuses et insolubles de la vérité théologique. Le traité de Westphalie a étendu la protection légale des Calvinistes identifiés comme troisième religion, et en réduisant l’autorité des princes sur leur sujets en matière de religion, et par ce moyen répondant aux préoccupations de leurs sujets. Après de longues négociations et marchandages, les parties choisirent l’année 1624 comme “année normative”. A cette date, les propriétés religieuses (églises et  terres monastiques, par exemple), les droits de culte public, et le statut confessionnel de chaque territoire ont été verrouillés. Ce qui signifiait que les princes ne pouvaient plus imposer leur foi à leurs sujets et ceux qui s’étaient convertis à une confession différente ne pouvaient plus changer le statut confessionnel de leur territoire. C’était un moyen innovant pour rétablir la confiance entre protestants et catholiques. Comme les États impériaux catholiques étaient plus nombreux que les protestants, il fut décidé que le vote à la majorité ne serait plus décisif dans les corps représentatifs tels que le Reichstag (Diète Impériale) sur les questions confessionnelles. A la place, les représentants des princes devaient se séparer en partis religieux et chercher un accord par des négociations directes. Ce principe de parité confessionnelle a aussi été appliqué à la justice impériale, où les membres protestants des deux cours suprêmes ont été assurés d’avoir, de facto, le droit de veto.

ACCOMPLIR LA PAIX

Naturellement, l’analogie entre l’Europe du 17ème siècle et le Moyen-Orient contemporain exige un bond imaginatif, compte tenu des quatre siècles passés et des différences politiques, socio-culturelles, et des contextes économiques. Il y a néanmoins de remarquables similitudes entre de nombreux points de base. Pour commencer, on a la longueur et l’intensité du conflit, la complexité déconcertante des raisons de la discorde, le rôle des rebellions internes aggravant largement les conflits, et l’implication de puissances étrangères. Il y a aussi l’intensité des animosités religieuses entre les militants, la pluri-polarité de la scène internationale, la rivalité de nombreuses dynasties princières, et la fusion (et confusion) des motifs religieux et politico-constitutionnels. Les deux conflits ont vu de grandes puissances utiliser de plus petits groupes locaux pour se battre à leur place ; l’exaspération des peurs sécuritaires plus ou moins paranoïdes à travers des préjudices religieux ; et l’arrivée de nouvelles puissances dans le conflit, craignant que leurs propre sécurité et leurs intérêts soient touchés s’ils restaient inactifs. Les deux conflits ont vu l’exploitation de nouvelles formes d’information technologique pour exacerber les sectarismes (l’imprimerie au 17ème siècle et internet de nos jours), et les deux ont entrainé un niveau horrible de souffrance humaine. (On pense que l’Allemagne a perdu 1/3 de sa population entre 1618 et 1648, et une grande partie de la population a été déplacée, devenant des réfugiés.) Bien que le sectarisme ait été exploité à des fins politiques dans les deux contextes, il a aussi été un facteur déstabilisant en soi. Avant la Guerre de 30 Ans, il y avait un compromis qui fonctionnait entre les Catholiques et les princes luthériens, mais la politique impériale redevint plus agressive et confessionnelle à la fin du XVIe siècle. Pareillement, les relations sectaires dans le Moyen-Orient entre les Chiites et les Sunnites se sont détériorées à la fin des années 30, et les forces laïques précédentes dans les politiques régionales ont été repoussées et marginalisées.

La principale leçon donnée par l’expérience européenne est que, pour atteindre la paix, un accord effectif doit être initié par une conférence ou un congrès multilatéral auquel participeraient ensemble toutes les parties dans le but de négocier. La participation doit être la plus large possible ; cependant, certains éléments perturbateurs et autrement plus dérangeants pourraient être exclus. Les exilés qui se sont rebellés contre les Habsbourg ont été empêchés de participer au congrès de Westphalie, juste comme l’EI (ISIS) le serait aujourd’hui. Les participants devraient être prêts à travailler souplement et atteindre un nouveau degré diplomatique. Avec les encouragements du congrès, et en tant qu’élément de la progression, les participants doivent être préparés, comme le dit le ministre des Affaires étrangères allemand Frank-Walter Steinmeier dans un discours récent à Hambourg, à s’ouvrir de manière transparente sur leurs problèmes de sécurité, et à faire quelques sacrifices et compromis pour atteindre la paix. Si le Moyen-Orient n’est pas encore prêt à cela, l’expérience de la Guerre de 30 Ans suggère aussi que la région devra endurer plus de sang versé avant de finalement être amené à adopter les attitudes coopératives et positives nécessaires pour construire la paix. M. Steinmeier suggéra aussi qu’à des tournants cruciaux le rôle d’une “tierce partie” de plus petites puissances puisse être décisif pour donner un élan important à l’achèvement du processus de paix, ainsi que cela s’est passé en 1647-48. Il nota que les États d’Europe pourraient jouer un tel rôle dans le Moyen-Orient. Il est important d’ajouter ici que les négociateurs de Westphalie n’insistèrent pas sur un cessez-le-feu durable avant d’avoir commencé les discussions. Les négociations commencèrent et continuèrent alors que les combats faisaient rage, et furent influencées par les revers de fortunes de guerre. Durant les négociations de Westphalie, il fut nécessaire pour les participants de développer un certain degré de confiance mutuelle, pour faciliter une plus grande transparence entre eux à propos de leurs problèmes de sécurité et de nourrir un sens d’un objectif commun pour une paix durable. Ce n’a pas été facile alors, et ne sera pas facile à présent, mais c’est possible. Cela prend du temps.

Maison des Habsbourg (en mauve) ; Maison des Hohenzollern (en bleu) ; l'empire de Suède ; La monarchie danoise ; les îles britanniques ; la France (en rouge) ; l'Allemagne ; les républiques de Pologne ; La frontière ouest de la Russie.

Maison des Habsbourg (en mauve) ; Maison des Hohenzollern (en bleu) ; l’empire de Suède ; La monarchie danoise ; les îles britanniques ; la France (en rouge) ; l’Allemagne ; les républiques de Pologne ; La frontière ouest de la Russie.

La rivalité Arabie saoudite-Iran est aujourd’hui un problème central. Si le Moyen-Orient doit accomplir sa propre paix westphalienne, les représentants de ces deux régions ennemies, Arabie saoudite et Iran, doivent participer activement et constructivement aux négociations. Dans cette veine, il est utile d’étudier les parallèles entre le gouvernement d’Arabie saoudite, étant donné sa suprématie sunnite dans le Moyen-Orient contemporain, et l’empereur Habsbourg, qui avait un rôle similaire dans le Saint Empire Romain et l’accord de Westphalie. Il y a de nombreux points similaires entre la famille al-Saud et les Habsbourg du 17ème siècle. Les Saoudiens ont eu des difficultés à surmonter avec le fait qu’ils étaient en position d’autorité et de protecteurs des places sacrées de La Mecque et Medina, et le fait qu’ils n’étaient pas Califes ; les Habsbourg autrichiens ont eu fort à faire avec leur prééminence théorique en tant qu’empereurs du Saint Empire, et la réalité géopolitique. Les Habsbourg craignaient et souffraient de l’érosion de la suprématie régionale dont ils jouissaient avant, comme le font les Saoudiens à présent. A la place du pétrole saoudien, il y avait l’or et l’argent des Amériques qui finançait le soutien militaire apporté à l’empereur par ses cousins Habsbourg d’Espagne. A la place du wahhabisme sponsorisé par les Saoudiens et sa haine du chiisme, il y avait la contre-réforme catholique, qui cherchait à faire reculer les progrès protestants par une étroite interprétation catholique des lois impériales, illustré par l’Édit de Restitution de 1629. La contention (au moins) du wahhabisme saoudien devra être une partie majeure de tout accord dans le futur Moyen-Orient. Mais l’Arabie saoudite devra être choyée quelque-soit le processus de négociation, exactement comme les autres partis à Westphalie ont pris grand soin des intérêts de l’empereur.

ASSURER LA PAIX

N’importe quel accord au Moyen-Orient doit être construit sur des traditions religieuses, légales et autres structures propres à la région, juste comme Westphalie était rigoureusement basé sur le système impérial préexistant, mais négocié. Imposer un modèle européen est hors de question ; l’idée est plutôt d’appliquer les principes sous-jacents et l’expérience de Westphalie au Moyen-Orient.

Le premier principe implique de limiter la souveraineté de la plupart des États ou gouvernements de la région en donnant un niveau de protection aux citoyens contre leurs propres gouvernants, et en donnant aux sujets et citoyens le droit d’en appeler à une plus haute autorité légale. Cela pourrait être sous forme d’un tribunal, comme ce fut le cas dans le Saint Empire Romain, où il fut crucial de désamorcé des tensions et prévenir des conflits.

Les deux tribunaux suprêmes juridictionnels du Saint Empire Romain étaient essentiels pour la défense des termes et des droits de Westphalie. Les tribunaux réglaient souvent les conflits entre les princes plus qu’ils ne donnaient de verdicts après un procès, mais c’était un bon exemple pour montrer comment les mécanismes informels de résolution d’un conflit marchaient mieux que les jugements formels.

En acceptant les appels de la part des sujets qui auraient pu poursuivre en justice leurs gouvernants, le système judiciaire impérial a servi de soupape de sécurité contre le mécontentement larvé du peuple. Les tribunaux ont aidé à maintenir le statu quo, et en particulier la souveraineté conditionnelle qui limitait le pouvoir des princes impériaux en supervisant et réglant leur conduite, y compris la façon dont ils traitaient leurs sujets. Le Moyen-Orient n’a jamais eu de telle structure juridique supra-nationale, mais les Nations Unies en tant qu’institution possèdent un système de cours internationales et des mécanismes de résolution de conflits qui pourraient être adaptés dans ce but. Certaines nations pourraient être réticentes à accepter des limites à leur souveraineté, mais si de telles limites devaient arriver avec la marque des Nations Unies, elles seraient alors plus acceptables, spécialement s’il devient clair que cela soit la seule alternative à une violence sans fin.

Un second principe est de reconnaître que cette paix durera seulement si des garants extérieurs renforcent collectivement, au sein des États, le droit fondamental des peuples en matière de religion, propriété et procédure. Un des héritages clé du système westphalien était son innovant système de garants, qui a permis aux signataires de renforcer les dispositions de l’accord et d’installer un système de sécurité collectif englobant à la fois les garants internes (empereur et princes) et les garants externes (France et Suède). Ces derniers ont intégrés ce système dans un ordre international plus large dans l’Europe moderne naissante.

La garantie était plus évidente quand l’intégrité et la balance constitutionnelle de l’empire étaient menacées, menace qui dans certains cas venait d’un ou plusieurs garants eux-mêmes – notablement du roi français Louis XIV, dans la dernière partie du 17ème siècle. Les garants qui n’étaient pas partie prenante du conflit devaient normalement se manifester et défendre l’ordre westphalien – soit par conviction sur le principe, ou intérêt géopolitique en soi, soit par la combinaison des deux.

Comme aucun des mécanismes judiciaires internes ne pouvait contraindre l’empereur à adhérer à la loi impériale, la garantie externe était un complément nécessaire ; cela a encouragé la retenue de la part des princes et de l’empereur, dissuadé les brèches évidentes dans l’agrément de paix et dans la loi, et incité le respect des droits confessionnaux et des prérogatives princières qui avaient été confirmés à Westphalie. Le système de garants a aussi pu évoluer et s’accroître en réponse à l’évolution des courants internationaux : le déclin géopolitique de la Suède durant le 18ème siècle l’a rendue moins capable d’exercer de manière efficace son rôle de garant (même si en termes formels, elle a gardé son plein statut jusqu’à la chute de l’empire en 1806), alors que la puissance croissante de la Russie l’a propulsé au rang de garant en 1779. Un système de garantie pour le Moyen-Orient devrait être aussi souple.

Bien que Louis XIV et d’autres monarques essayent de tirer avantage de leur statut de garants pour faire avancer leur pouvoir et leurs intérêts politiques, les normes établies à Westphalie ont servi à limiter les brèches. Par exemple, la question de la violation a été discutée, y compris par le roi lui-même, en termes de normes westphaliennes, avec un préjudice inhérent pour la paix. Finalement, les aventures géopolitiques de Louis XIV se sont soldées par un échec et les règles de comportement établies par Westphalie ont joué une grande part en faisant obstacle à ses ambitions et en rassemblant les autres États européens en alliance contre lui. Le succès du système des garants était en partie dû à une large acceptation normative d’une intervention extérieure pour protéger les droits et les libertés. Il y avait aussi une tradition similaire, enracinée dans l’empire, de rechercher l’assistance de l’étranger. Ceci, avec la nature décentralisée de l’empire, a aidé à rendre le système de garantie extérieur efficace.

Dans le but de trouver des garants extérieurs appropriés pour un future accord en Moyen-Orient, on aura besoin d’établir des mécanismes qui reflètent la distribution de l’importance des puissances, mais aussi ayant des légitimités régionales. Certains ont suggéré que le système européen de l’Europe moderne naissante avait un plus grand niveau d’homogénéité culturelle que le Moyen-Orient a de nos jours. Dans ce sens, la France et la Suède comme garants ne semblait pas aussi “externe” que les USA et l’Union européenne le seraient pour le Moyen-Orient, par exemple. Les Nations Unies pourraient être le seul garant externe potentiel avec une vraie légitimité depuis qu’elles incluent une représentation moyen-orientale, mais sa légitimité est obtenue au coût de son efficacité, d’une certaine manière.

Pour qu’un système externe de garantie soit efficace, il a besoin d’être soutenu par une force militaire, même si cette force n’est jamais utilisée. Même si les USA et l’UE étaient réticents à s’engager dans un tel arrangement, des puissances régionales comme l’Arabie saoudite et l’Iran seraient plus intéressées. La Turquie également pourrait être tentée de jouer un rôle plus important. Dans ce contexte, on devrait faire face au risque que des interventions de garants exacerbent les tensions existantes sur le terrain, et aussi d’être perçues comme guidées par des intérêts personnels, comme ce fût le cas avec la France sous Louis XIV. Il serait donc préférable de concilier les intérêts des garants avec ce qui est nécessaire pour maintenir le système, quand on établira ce système des garants. Pour l’Arabie saoudite, il est important de maintenir la position du régime en tant qu’État prééminent de l’Islam Sunnite, renforcé par son rôle de gardien des places sacrées de la Mecque et Medina. Les leaders iraniens se sentent certainement en devoir de parler pour les minorités Chiites plus ou moins opprimées de cette région.

Un troisième principe ou élément, dérivé de Westphalie, pourrait être que le Moyen-Orient détermine sa propre “année normative” pour réinstaller les droits de culte publics et l’équilibre intercommunautaire des États et des acteurs locaux à une date passée équitable convenue. Aucun sujet ou citoyen ne pourrait être exclu d’une administration sous prétexte de religion. A l’intérieur de chaque État, un niveau minimum de droits et de protection des groupes minoritaires serait garanti. Cette disposition implique aussi que les frontières établies entre les états seraient gardées et maintenues comme partie de l’accord, comme cela a été le cas à Westphalie. Sélectionner une date pour l’année normative serait sujet à contentieux, et il pourrait être utile de le faire dans certains contextes plutôt que d’autres. Mais ce serait un outil très utile dans le processus de paix, si appliqué judicieusement et souplement (dans le traité de Westphalie, cette question était à géométrie variable, avec la date générale normative en 1624, mais en 1618 pour certains cas particuliers). A la place d’un conflit confessionnel éradiqué par Westphalie, il a été transformé en procédé légal – autre exemple de la “juridification” du conflit, caractéristique du Saint Empire Romain. Le litige, la négociation et la diplomatie devinrent cruciales pour désamorcer les tensions et transformer un conflit brulant en tension diplomatique, notablement durant la crise confessionnelle allemande de 1719. Cela a été déclenché par les tentatives de quelques princes catholiques du Rhin de miner les droits de leurs sujets protestants. En réponse, les puissances protestantes d’Allemagne du Nord ont menacé d’intervenir avec une armée. Un conflit armé a été évité grâce à l’implication des parties en accord avec les mandats politico-judiciaires de Vienne pour restaurer les États dans leurs conditions d’avant-crise.

C’est presque une sagesse conventionnelle que l’hétérogénéité des acteurs dans le Moyen-Orient sape les chances d’atteindre un accord général comme celui de Westphalie. Mais le Saint Empire Romain contenait aussi un ensemble d’acteurs et d’intérêts divers, traumatisés et divisés par la guerre et les atrocités. Même si c’est impossible (et peut-être indésirable) d’essayer de transposer des solutions globales comme des plans ou modèles d’une région à l’autre, l’expérience de Westphalie est précieuse. Elle montre de manière importante que la paix peut toujours être négociée — sans tenir compte de la complexité, de la durée et de l’intensité du conflit — avec l’aide de négociateurs diplomatiques autoritaires discrets, et expérimentés, comme le ministre des Affaires étrangères allemand Steinmeier le déclarait. Et, des siècles plus tard, le traité de Westphalie nous montre comment une telle paix peut être trouvée.

Source : Foreign Affairs, le 10/10/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Source: http://www.les-crises.fr/une-paix-westphalienne-pour-le-moyen-orient-par-michael-axworthy-et-patrick-milton/


Obama réimpose le néolibéralisme en Amérique latine, par Ted Snider

Sunday 20 November 2016 at 03:10

Source : Consortiumnews.com, le 13/10/2016

Le 13 octobre 2016

La principale réussite du président Obama en Amérique latine n’a pas été de restaurer des relations diplomatiques avec Cuba ; mais plutôt la stratégie de son administration du «changement de régime», permettant la ré-institution d’une économie « néolibérale » orthodoxe sur la région, comme l’explique Ted Snider.

Par Ted Snider

Peu de temps après sa prise de fonctions, le président Barack Obama a promis de changer la façon dont l’Amérique fait des affaires avec l’Amérique latine, en signe de reconnaissance de l’histoire effroyable des interférences et du changement de régime datant du XIXe siècle, de l’hostilité de Thomas Jefferson envers la rébellion des esclaves d’Haïti à la trahison de William McKinley de Cuba après sa « libération » de l’Espagne.

Il y a eu ensuite le cas de Théodore Roosevelt qui a séparé le Panama de la Colombie en 1903 dans le but de construire le canal de Panama. Et un autre cas en 1908 lorsque le gouvernement des États-Unis a coopéré à l’éviction du président vénézuélien Juan Vicente Gómez. Et en 1909, lorsque William Taft a enlevé José Santos Zelaya au Nicaragua parce qu’il insistait pour que les entreprises américaines au Nicaragua honorent leurs accords, et qu’il essayait de rendre son pays moins dépendant des États-Unis en empruntant aux banques européennes, plutôt qu’américaines.

Le président Barack Obama revient à la Maison-Blanche, le 17 janvier 2013. (Photo officielle de la Maison-Blanche par Pete Souza)

Le président Barack Obama revient à la Maison-Blanche, le 17 janvier 2013. (Photo officielle de la Maison-Blanche par Pete Souza)

Dans l’époque moderne, Dwight Eisenhower avec la CIA a renversé Jacobo Arbenz au Guatemala en 1954. Avant de quitter ses fonctions, il a initié les mesures secrètes visant à éliminer le leader de Cuba Fidel Castro, un processus qui a continué sous John Kennedy avec l’invasion de la Baie des Cochons et ses suites. Puis il y a eu le coup d’État de 1964 au Brésil pour renverser Joao Goulart ; la même année a été entreprise l’action politique pour éliminer Chedi Jagan de Guyane.

En 1971, Richard Nixon a déstabilisé le Chili en suscitant un coup d’État sanglant contre Salvador Allende. Ronald Reagan a financé une guerre secrète pour évincer le gouvernement sandiniste du Nicaragua, tout en apportant un soutien militaire à divers régimes brutaux et répressifs en Amérique centrale. George H.W. Bush a détruit des quartiers civils de Panama City lors d’une invasion qui avait pour but d’arrêter le chef panaméen Manuel Noriega.

Et la pauvre Haïti s’est régulièrement trouvée dans le collimateur de Washington. Avec le soutien des administrations Bush-41 et Bush-43 [41e et 43e président, NdT], un complot a renversé, par deux fois, le leader populaire Jean-Bertrand Aristide en Haïti. George W. Bush a également soutenu un coup d’État éphémère en 2002 pour évincer le président vénézuélien Hugo Chavez. Et ceci n’est qu’une liste partielle des interventions américaines menées dans leur “arrière-cour”.

Ainsi, il est important d’évaluer les résultats de la promesse d’Obama de changer cette histoire tragique et honteuse. Pourtant, il n’a pas fallu longtemps pour voir que rien n’avait vraiment changé. Il semble que l’administration Obama ait adopté une stratégie de huit ans pour faire reculer ce qui a été appelé la marée rose des dirigeants progressistes ou socialistes qui osaient défier le modèle économique néolibéral de Washington pour cet hémisphère.

L’administration Obama a favorisé plutôt une approche plus subtile du changement de régime que ses prédécesseurs. Contrairement aux coups d’État militaires parrainés par les administrations antérieures, les coups d’État d’Obama n’ont pas nécessité de chars dans les rues. Au contraire, ils ont été déguisés en affrontements politiques internes, à commencer par des troubles civils et des accusations par les médias de violations commises par le chef visé, suivies par voie parlementaire où les tribunaux utilisent la destitution ou autre moyen « constitutionnel » pour réaliser le changement de régime. Il s’agissait de coups d’État silencieux ou « feutrés » réalisés sous déguisement démocratique.

Nous en avons un exemple précoce le 28 juin 2009, lorsque le président libéral du Honduras démocratiquement élu Manuel Zelaya a été accusé d’avoir fomenté un amendement constitutionnel qui autorisait plus d’un mandat pour le président. Sur les directives de ses adversaires politiques à la Cour suprême, l’armée l’a enlevé et emmené dans un avion qui s’est ravitaillé sur une base militaire américaine.

Cela aurait pu être l’occasion pour Obama de montrer qu’il ne plaisantait pas, qu’il plaçait la démocratie et le progrès social au centre de son agenda régional. Au lieu de cela, il a permis à son département d’État de signaler que les États-Unis étaient secrètement ravis de l’éviction de Zelaya.

Après le coup d’État, l’ambassadeur américain n’a pas été rappelé, les États-Unis ont refusé de se joindre à la demande de l’assemblée générale des Nations Unies et de l’Organisation des États Américains (OAS) pour le retour du président élu, et le mot “coup” a été banni du lexique du département d’État.

Bien que l’OAS refuse de reconnaitre le nouveau président amené au pouvoir par le coup d’État, le département d’État sous Hillary Clinton alla dans la direction opposée, en reconnaissant le coup d’État du gouvernement comme gagnant des nouvelles élections controversées. Le soutien militaire des États-Unis s’est également accru.

Pourtant, en dépit des contorsions linguistiques de l’administration Obama pour ne pas appeler publiquement l’enlèvement de Zelaya un coup d’État, la Maison-Blanche d’Obama savait que c’en était un. Le 24 juillet 2009, moins d’un mois après, la Maison-Blanche recevait un télégramme de l’ambassade des États-Unis au Honduras informant le Président Obama des faits.

Par un manque de subtilité quasi-comique qui n’était pas censé être publié, le télégramme s’appelait « Ouvert et fermé : l’affaire du coup d’État au Honduras. » Dans ce document, l’ambassade a écrit: « Il ne fait aucun doute que les militaires, la cour suprême et le Congrès national ont conspiré dans ce qui constitue un coup d’État illégal et anticonstitutionnel. »

L'ancien président du Honduras Manuel Zelaya.

L’ancien président du Honduras Manuel Zelaya.

La conclusion ne pouvait être plus claire. Mais au cas où il y aurait encore des doutes, le câble ajoutait que « aucun des… arguments [des défenseurs du coup d’État] n’ont la moindre validité au regard de la constitution du Honduras. »

Dans l’interprétation la plus généreuse de l’action ou de l’inaction d’Obama, on pourrait dire qu’il a permis le succès du coup d’État tout en restant silencieux. Cependant, il est plus probable que son administration l’ait soutenu, en dialoguant avec les militaires honduriens jusqu’au jour du coup d’État et en reconnaissant peu après le gouvernement qui a suivi comme légitime. Zelaya a toujours insisté sur le fait que « le coup est venu du Nord, des États-Unis. »

Dans le feu de l’action, l’avion qui transportait le président kidnappé a atterri sur la base militaire américaine de Palmerola pendant 15 à 20 minutes pour se ravitailler. Les États-Unis ont choisi de ne pas intervenir.

Dans ses mémoires, Hard Choices, Clinton a admis qu’elle avait aidé la nouvelle direction en court-circuitant tous les efforts pour restaurer Zelaya au pouvoir. « Dans les jours suivants [le coup], j’ai parlé avec mes homologues de l’hémisphère, y compris la Secrétaire [Patricia] Espinosa au Mexique. Nous avons étudié un plan stratégique destiné à rétablir l’ordre au Honduras et veiller à ce que des élections libres et équitables soient organisées rapidement et légitimement, ce qui rendrait le problème de Zelaya nul et non avenu, » écrit-elle.

L’Équateur en ligne de mire

Après le coup d’État contre Zelaya, le Président populaire élu de l’Équateur, Rafael Correa, affirmait : « Nous avons des rapports des services de renseignement qui disent qu’après Zelaya je suis le prochain. » Il avait probablement raison, car l’année suivant le coup d’État du Honduras, il y eut une tentative de coup d’État contre Correa qui a échouée. L’expert latino-américain Mark Weisbrot a déclaré que c’était clairement une tentative de coup d’État destinée à renverser le gouvernement Correa.

Correa avait renégocié les contrats pétroliers et demandé une plus grande part du chiffre d’affaire des grandes compagnies pétrolières pour le peuple d’Équateur. Il était également opposé à un traité de libre-échange avec les États-Unis et a fermé une base militaire américaine en Équateur. Et il rejoignit le Venezuela, Cuba, la Bolivie et l’Équateur dans la Bolivarian Alliance for the Peoples of Our America (ALBA) et il fit défaut avec succès sur plus de 3 milliards de dollars de dette extérieure qui fut illégitimement contractée par des dirigeants équatoriens dont Correa disait qu’ils étaient des dictateurs soutenus par la CIA.

Les États Unis ont commencé leur action contre Correa durant la présidence de George W. Bush. En octobre 2005, un télégramme de l’ambassade envoyé par l’ambassadeur américain Linda Jewell décrivait l’action comme “un changement politique et économique souhaitable en Équateur.” En 2006, elle télégraphia que l’élection de Correa ferait dérailler les espoirs américains tout comme l’ambassade s’attendait à ce que Correa se joigne à Chavez ainsi que d’autres dirigeants nationalistes sud-Américains. Dans le même télégramme, (06QUITO2150), Jewell disait que les États Unis avaient « activement découragé les alliances potentielles » avec Correa. Elle a admis (06QUITO2991) « travailler de concert avec les autres équatoriens et groupes qui partagent notre vision. »

Durant les années d’Obama, les États-Unis continuèrent à intervenir en Équateur. En mars 2009, l’Équateur a expulsé Mark Sullivan, un responsable américain qui était accusé d’être le chef de la CIA à Quito et qui a joué un rôle dans la suspension de l’aide des États Unis à une unité de police spéciale d’enquête, lorsque l’Équateur a nommé un nouveau chef que les États Unis n’approuvaient pas.

Le 30 octobre 2010 eut lieu la tentative de coup d’État que Correa attendait. Le leader du coup d’État était diplômé de l’École des Amériques. Une commission nommée par le gouvernement a constaté que des “acteurs étrangers” y avaient participé. Un des membres de la commission a annoncé sa conviction que le département d’État américain et la CIA étaient impliqués dans la tentative avortée de renverser Correa.

Haïti, une fois de plus

En 2010, Obama a échoué à un autre test lorsque Washington finança les élections haïtiennes à hauteur de 14 millions de dollars, un prix affiché qui donnait vraisemblablement à l’Amérique un avantage significatif. Pourtant, le Conseil électoral provisoire d’Haïti (CEP) a interdit à 14 partis de concourir, y compris Fanmi Lavalas, le parti de Jean-Bertrand Aristide, qui avait été par deux fois destitué par des coups d’État appuyés par les Américains.

L'ancien président haïtien Jean-Bertrand Aristide.

L’ancien président haïtien Jean-Bertrand Aristide.

Le plus grand et le plus populaire des partis d’Haïti, Fanmi Lavalas, a remporté toutes les élections où il avait été autorisé à participer. Mais dans cette élection sous patronage américain, Fanmi Lavalas n’a pas été autorisé à concourir. En d’autres termes, l’administration Obama a financé une élection qui excluait spécifiquement le parti que les gens voulaient élire.

L’indicateur suivant de l’action déplorable d’Obama est advenu au Paraguay, où, en juin 2012, Fernando Lugo, le dirigeant démocratiquement élu du Paraguay, a été éliminé par un coup d’État. L’opposition de droite capitalisa de façon opportuniste sur une escarmouche dans le territoire disputé qui fit au moins 11 morts en reprochant injustement leur mort au président Lugo. Ils l’ont ensuite destitué après lui avoir donné seulement 24 heures pour préparer sa défense et seulement deux heures pour la plaider.

Les organisations latino-américaines UNASUR et MERCASUR ont suspendu le nouveau gouvernement paraguayen, mais le gouvernement des États-Unis a passé la journée du coup d’État à négocier une nouvelle base militaire au Paraguay. Comme avec le Honduras, les responsables américains évitaient d’utiliser publiquement le mot « coup d’État ».

Pourtant, dès 2009, un câble de l’ambassade américaine a reconnu que l’opposition politique de Lugo a pour objectif de « capitaliser sur tout faux pas de Lugo » et de « destituer Lugo et assurer leur propre suprématie politique. » Le câble a noté que, pour atteindre cet objectif, l’opposition était prête à destituer « légalement » Lugo, « même sous des motifs fallacieux »; un soi-disant « coup d’État feutré. »

Focus sur le Venezuela

L’année suivante, en 2013, l’attention s’est reportée sur le Venezuela à la suite de la mort d’Hugo Chavez d’un cancer. Contre la volonté des États-Unis, le successeur d’Hugo Chavez, Nicolás Maduro, a gagné le droit de poursuivre la révolution bolivarienne en remportant l’élection nationale suivante. Les États Unis ont été le seul pays au monde à ne pas reconnaître les résultats des élections, bien que 150 observateurs électoraux du monde entier aient suivi l’élection du Venezuela, y compris les délégations de l’Union des Nations sud-américaines et le Centre Carter.

Le défunt président vénézuélien Hugo Chavez.

Le défunt président vénézuélien Hugo Chavez.

La pression de l’administration d’Obama sur le gouvernement du Venezuela a été implacable. De l’argent américain, totalisant au moins 90 millions de dollars depuis 2000, a été injecté dans le Venezuela afin de financer des groupes opposés au mouvement chaviste, avec le soutien américain en 2015 à une nouvelle tentative de coup d’État, de laquelle Maduro a accusé le gouvernement américain.

Bien que méprisée par le gouvernement américain et par les médias grand public américains, l’accusation n’était pas infondée. Des fonctionnaires du Venezuela ont accumulé une somme importante de preuves que les évènements constituaient un coup d’État manqué avec le soutien des États-Unis, y compris l’enregistrement d’un communiqué qui devait être publié après que le gouvernement Maduro aurait été écarté du pouvoir. Le gouvernement Maduro a également montré les aveux de militaires, ainsi qu’une conversation téléphonique entre les dirigeants de l’opposition discutant du coup d’État, impliquant le maire de Caracas Antonio Ledezma connu pour avoir passé des appels vers un numéro de téléphone américain.

Lucas Koerner de Venezuelanalysis.com a ajouté que l’avion devant être utilisé dans le cadre du coup d’État manqué a des liens avec la célèbre firme américaine de sécurité Academi (anciennement Blackwater). Et il a été rapporté qu’un certain nombre de leaders du coup d’État avaient obtenu des visas de l’ambassade américaine pour faciliter leur évasion en cas d’échec.

Et en mai dernier, le président Maduro a déclaré l’état d’urgence, accusant les États-Unis de conspirer une nouvelle fois avec des groupes d’extrême-droite au Venezuela pour renverser son gouvernement. Maduro a déclaré que « Washington est en train de prendre des mesures à la demande de la droite fasciste du Venezuela. »

Le reflux de la Marée Rose

L’effet cumulatif de toute cette pression sur les dirigeants progressistes en Amérique latine a provoqué un reflux notable du mouvement Marée Rose (Pink Tide), qui avait à son actif une amélioration significative des conditions de vie des citoyens les plus pauvres de la région, bien que beaucoup de ces gains soient maintenant perdus.

L'ancienne présidente du Brésil Dilma Rousseff devant l'Assemblée générale des Nations Unies. (Photo ONU par Marco Castro)

L’ancienne présidente du Brésil Dilma Rousseff devant l’Assemblée générale des Nations Unies. (Photo ONU par Marco Castro)

Le coup, peut-être le plus fort, porté aux tentatives de l’Amérique latine pour réduire la pauvreté et structurer l’économie au bénéfice des gens ordinaires, et non des riches, n’est venu que cette année au Brésil quand un autre « coup d’État feutré » a été organisé pour écarter la présidente brésilienne Dilma Rousseff de sa fonction, et la remplacer par un pouvoir de droite.

Une fois de plus la preuve d’un coup d’État était évidente avec les partis de l’opposition se saisissant d’un différend budgétaire pour renverser la volonté des électeurs dans le plus grand pays et la plus grande économie d’Amérique du Sud. La preuve comprenait la publication d’un compte rendu de l’appel téléphonique entre Romero Jucá, qui était sénateur au moment de l’appel, et l’ancien directeur exécutif des hydrocarbures Sergio Machado, évoquant « un pacte national » pour supprimer Rousseff et installer Michel Temer comme président. Jucá a révélé que non seulement les politiciens de l’opposition, mais les membres de l’armée et de la Cour suprême étaient dans le complot.

En ce qui concerne le rôle de l’armée, Jucá a dit : « Je parle avec les généraux, le commandement militaire. Ils sont d’accord avec ça, ils ont dit qu’ils vont le soutenir. » Et, comme pour la Cour suprême, Jucá a admis qu’il « a parlé et assuré la participation de nombreux juges de la Cour suprême du Brésil, » selon le journaliste Glenn Greenwald basé au Brésil. Jucá s’est en outre vanté que « il y a seulement un petit nombre » de juges de la Cour suprême avec qui il n’a pas parlé. (Jucá est depuis devenu ministre de la planification dans le nouveau gouvernement Temer.)

Michel Temer était si confiant du soutien des États-Unis pour son coup d’État qu’il pouvait s’en vanter ouvertement à New York, devant un public de dirigeants d’affaires et de politique étrangère, en septembre. Temer a confirmé à son auditoire américain que Rousseff a été écartée du pouvoir parce qu’elle a refusé de mettre en œuvre un plan économique pro-business, qui comportait des réductions pour la santé, l’éducation et les dépenses sociales, et mettait davantage l’accent sur la privatisation et la dérèglementation.

Temer a déclaré : « Il y a plusieurs mois, alors que j’étais encore vice-président, nous avons publié un document intitulé “Un pont vers l’avenir”, parce que nous savions que ce serait impossible pour le gouvernement [Rousseff] de continuer sur cette voie. Nous avons suggéré que le gouvernement devrait adopter les thèses présentées dans ce document. Mais comme cela n’a pas fonctionné, le plan n’a pas été adopté et un processus a été établi qui a culminé avec mon installation comme président de la république. »

Comme Inacio Vieira l’a signalé pour The Intercept, « L’argumentaire de vente de Temer était farci d’euphémismes du jargon néo-libéral standard, y compris l’universalisation du marché brésilien, le rétablissement de la confiance, une stabilité politique extraordinaire, un partenariat public-privé, et la mise en œuvre de réformes fondamentales dans des domaines comme le droit du travail, la sécurité sociale et les dépenses publiques. »

Et s’il reste un doute sur la motivation de ce gouvernement pour ce coup d’État – ostensiblement son indignation au sujet de la manœuvre budgétaire de Rousseff – il y a le fait que l’un des premiers actes du gouvernement issu du coup d’État fut de légaliser explicitement l’acte budgétaire pour lequel ils avaient mis en accusation Rousseff deux jours plus tôt.

Satisfaction américaine

Bien que la participation directe américaine dans le coup d’État au Brésil n’ait pas été établie, le silence d’Obama au sujet du renversement d’un gouvernement démocratique supplémentaire, se produisant dans le pays économiquement le plus important d’Amérique latine, démontre clairement sa satisfaction à l’égard du coup d’État.

Le Président Barack Obama

Le Président Barack Obama

Considérant la façon dont son administration dénonce les développements prétendument anti-démocratiques, par exemple la Russie, la réticence d’Obama à protester contre un autre coup sévère à la démocratie dans l’hémisphère occidental suggère une satisfaction de l’imposition d’un nouvel agenda économique néolibéral au Brésil.

C’est également la conclusion de nombreux analystes proches de la scène brésilienne. « Il ne fait aucun doute que les plus grands acteurs de cette tentative de coup d’État – des gens comme les anciens candidats à la présidentielle José Serra et Aécio Neves – sont des alliés du gouvernement américain, » selon l’expert latino-américain Mark Weisbrot.

Et Boaventura de Sousa Santos, professeur de sociologie à l’Université de Coimbra au Portugal et éminent juriste à l’Université de Wisconsin-Madison, a déclaré que le Brésil est inondé de financements américains, y compris des « organisations liées à la CIA. »

Le lendemain du vote de destitution, le sénateur Aloysio Nunes, un acteur important du coup d’État, a entamé une visite de trois jours à Washington. Nunes prévoyait des réunions avec entre autres, le président et un membre éminent du Comité des relations étrangères du Sénat, Bob Corker et Ben Cardin, ainsi qu’avec le secrétaire d’État et ancien ambassadeur au Brésil Thomas Shannon.

En dépit des dénégations de Nunes, des rapports indiquent que son voyage à Washington a été commandé par Michel Temer. La volonté de poursuivre les réunions prévues avec Nunes juste après le vote de destitution a démontré, une fois de plus, au moins l’approbation tacite de Washington. Si le gouvernement américain avait voulu envoyer un message de désapprobation, le voyage aurait été annulé.

L’impact cumulé de la présidence d’Obama sur l’Amérique latine a été le reflux constant de la Marée Rose alors que les gouvernements socialement progressistes de l’hémisphère ont été soit écartés par des « coups d’État feutrés » ou placés sous une énorme pression économique, inversant la plupart des gains sociaux qui se sont produits dans la décennie précédente.

Ironie du sort, les gouvernements progressistes d’Amérique latine ont fait plus de progrès lorsque le prédécesseur d’Obama, George W. Bush, était au pouvoir parce que son administration a été davantage axée sur le Moyen-Orient et la « guerre contre le terrorisme. »

Ainsi, la présidence d’Obama représentait moins une nouvelle page dans l’histoire des relations des États-Unis à l’égard de ses voisins latins que la répétition de vieux chapitres dans lesquels le gouvernement américain a fait équipe avec les oligarques locaux et les idéologues de droite pour créer un climat économique favorable aux investisseurs extérieurs et aux élites locales traditionnelles.

L’approche d’Obama a peut-être été plus subtile que celle des précédents présidents américains – en utilisant des « coups d’État feutrés » plutôt que le déploiement de chars dans les rues – mais l’effet a été le même, imposer la domination économique et politique des États-Unis sur la région et écarter les gouvernements démocratiques qui ont osé mettre les intérêts de leur peuple en premier.

Ted Snider écrit sur l’analyse des tendances dans la politique étrangère et l’histoire des États-Unis.

Source : Consortiumnews.com, le 13/10/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Source: http://www.les-crises.fr/obama-reimpose-le-neoliberalisme-en-amerique-latine-par-par-ted-snider/


Le Parisien censure le DVD de Merci Patron !

Sunday 20 November 2016 at 02:52

Source : Fakir, 08/11/2016

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Que Le Parisien ne parle de pas de notre film, au printemps, on comprend. Mais même quand on se propose d’aligner les billets pour une publicité, la porte reste fermée !

Noël approche, et pour la promotion de notre DVD dans les rayons des supermarchés, on a décidé de prendre une pub dans Le Parisien, le quotidien populaire de Bernard Arnault.
Et on y a cru.
Ça a presque marché !

La régie du Parisien l’avait validé : notre publicité devait passer dans les pages politiques, le mercredi 9 novembre. Nous avions, de notre côté, accepté la facture : 4 000 €, plus cinquante DVD de Merci Patron ! adressés au quotidien. On venait d’ailleurs de verser 30 % de la facture, soit 1 200 euros. Et le carton de DVD était prêt, dans notre salle à manger, avec des petits cœurs dessinés dessus. Il ne nous restait qu’à envoyer le visuel, comme convenu, le vendredi 4 novembre.
Mais la veille, le jeudi 3, patatras !

Le « directeur de la clientèle » nous appelle : « Je suis allé un peu vite dans la confirmation… euh… Puisqu’on avait des directives en fait en période préélectorale de… euh… de refuser en fait tout ce qui est communication polémique. Or, la vôtre en fait partie… »
Nous voilà bien surpris : il s’agit d’une banale promo, sans caractère ni polémique ni électoral.

Fakir : Si vous voulez, la seule polémique possible, elle est avec votre propriétaire… Bernard Arnault.
Long silence.
Le directeur : Bah sans doute… mais ça reste politisé.
Fakir : Non, non ! A moins que vous ne me révéliez maintenant que Bernard Arnault a des ambitions pour la prochaine élection…
(Long silence.)
Le directeur : On peut pas se permettre de… de laisser la parole libre comme ça à des personnalités ou à… Y a une indépendance de la rédaction et ils restent maîtres de leurs contenus. Ils veulent une autonomie, ils veulent une clarté de l’information… et ça passe par ce type de choix… ça peut être difficile…

Formidable logique : censurer la publicité de Merci Patron ! garantit l’indépendance de la rédaction !

Fakir : Je suis désolée que ça tombe sur vous… Vous avez l’air très sympathique… Je préférerais être en contact directement avec le donneur d’ordre, avec la personne qui vous a demandé de prendre cette décision…
Le directeur : Je peux prendre un message.
Fakir : Je préférerais être directement en contact avec le propriétaire du journal… qui est le personnage principal de mon film… Vous voyez ?
Le directeur :  Il n’est même pas au courant de notre conversation… 
Fakir : Non, je n’en doute pas, il n’a même pas besoin d’être au courant. Il a des serviteurs dociles qui devancent ses ordres… et vous en êtes un des rouages…

C’est la deuxième fois, tout de même, que cette censure invisible nous joue des tours. Au printemps déjà, alors que l’aventure Merci patron ! remplissait les colonnes de tous les journaux nationaux et locaux, Le Parisien excellait par son silence. 
Jusqu’à la sortie d’un communiqué signé des trois syndicats et de la Société des journalistes de la rédaction :

Stéphane (le directeur de la rédaction) assure qu’il n’y a eu aucune pression ni consigne venue d’en haut. Nous le croyons volontiers. C’est justement le principe de l’autocensure que de rendre inutile les pressions, en anticipant la conduite supposément attendue.
Se pose alors la question de la confiance dans la direction de la rédaction à garantir notre liberté éditoriale et notre capacité à faire notre métier de journaliste, au risque de déplaire à notre puissant actionnaire.

Les « serviteurs dociles », tout de même, ça les titille ce silence. Martine Chevalet, journaliste dans le canard du compère Arnault, confirme :

On se dit : qu’est-ce qu’il se passe derrière… Est-ce que c’est impossible de parler de Bernard Arnault, est-ce que c’est impossible de parler de LVMH autrement en terme laudateur ? Est-ce que c’est impossible de parler d’aucune de ses marques ? Est-ce que par exemple, demain on aura la possibilité de décrire euh … un événement social chez Carrefour par exemple ? Tout le monde dans la rédaction s’est interrogé sur la… la marge de liberté qui restait… pour les uns et pour les autres.
Il y a quelques jours Le Parisien fait une UNE avec « Osons l’optimisme ». Osons l’optimisme c’est la thématique de campagne de communication de Carrefour. LVMH est actionnaire de Carrefour et on a un papier qui commence par : « …. Comme le dit la campagne d’une grande surface… »… Voila « osons l’optimisme ». C’est choisi à dessein ou est-ce que c’est complètement le fait du hasard ?

Naïvement, on y a cru, vraiment, à l’indépendance de la presse.
Mais même avec le carnet de chèques, c’est toujours « non merci, patron ! ».

 Source : Fakir, 08/11/2016

Source: http://www.les-crises.fr/le-parisien-censure-le-dvd-de-merci-patron/


Critiqués après l’élection américaine, Google et Facebook s’attaquent aux faux sites d’informations, par AFP

Saturday 19 November 2016 at 01:59

J’adore la notion de “informations sensationnelles et souvent fausses.” – ça concerne plus de monde qu’ils ne le pensent à mon avis, et ça va être dur pour les finances du Monde et de Libé…  🙂

Source : France TV, AFP, 16/11/2016

Un employé de Facebook circule dans les couloirs du siège à Menlo Park, en Californie (Etats-Unis), le 15 mars 2013. (JEFF CHIU / AP / SIPA)

Un employé de Facebook circule dans les couloirs du siège à Menlo Park, en Californie (Etats-Unis), le 15 mars 2013. (JEFF CHIU / AP / SIPA)

Ils sont épinglés pour leur rôle supposé dans l’élection de Donald Trump et leur influence générale sur l’opinion publique lors de la présidentielle américaine. Les géants internet américains Google et Facebook ont pris des mesures, mardi 15 novembre, pour couper les revenus publicitaires des faux sites d’informations en ligne. Franceinfo vous en dit plus.

Que comptent faire les deux géants ?

L’initiative des deux groupes, qui s’adjugent le plus gros du marché mondial de la publicité en ligne grâce à leurs régies publicitaires, vise à priver de financements une industrie alimentée par des informations sensationnelles et souvent fausses.

Chez Google. “Nous allons commencer à interdire les publicités de Google sur les contenus trompeurs, de la même manière que nous interdisons les publicités mensongères”, a indiqué Google dans un communiqué. “A l’avenir nous allons restreindre les publicités sur les pages qui dénaturent ou masquent les informations sur l’éditeur, ses contenus ou le but premier du propriétaire du site”, ajoute le groupe.

Chez Facebook. Le réseau social créé par Mark Zuckerberg va mettre en place une politique identique. “Nous n’intégrons pas ou ne montrons pas de publicités dans des applications ou des sites dont le contenu est illégal, trompeur ou mensonger, ce qui inclut les fausses informations”, a souligné Facebook dans un communiqué. “C’était jusqu’à présent sous-entendu, mais nous avons mis à jour notre politique pour clairement exprimer que cela concerne les fausses nouvelles.”

Que reproche-t-on à Google et Facebook ?

La victoire de Donald Trump à l’élection présidentielle américaine, le 8 novembre, a déclenché un débat sur la quantité et l’influence des informations fantaisistes circulant en ligne. Certaines affirmaient par exemple qu’Hillary Clinton appelait “à la guerre civile si Trump était élu” ou que le pape François “soutenait Donald Trump”.

Lundi encore, les internautes cherchant les résultats du scrutin sur Google tombaient sur une fausse information d’un blog baptisé 70News selon laquelle Donald Trump avait remporté le vote populaire en plus de sa victoire chez les grands électeurs. Or, il a effectivement gagné chez ces derniers, mais Hillary Clinton a recueilli davantage de suffrages populaires.

Comment les deux géants réagissent-ils ?

Chez Google. Dans une interview à la BBC (en anglais), le patron de Google, Sundar Pichai, a reconnu qu’il y avait “eu plusieurs incidents” dans lesquels de fausses informations avaient été signalées “et nous n’avons pas pris les bonnes décisions”“C’est donc un moment d’apprentissage pour nous et nous allons vraiment travailler pour régler ça”, a-t-il ajouté.

Interrogé sur la possibilité que les faux sites d’informations aient pu influencer le vote de certains électeurs à la présidentielle américaine, il a répondu “bien sûr”“De notre point de vue, les fausses informations ne devraient pas être distribuées, donc nous sommes tous d’accord qu’il faut que les choses s’améliorent”, a-t-il reconnu.

Chez Facebook. Du côté du réseau social, le mea culpa s’avère plus compliqué. Son PDG-fondateur, Mark Zuckerberg, a réfuté l’idée “assez dingue” selon laquelle le réseau social aurait laissé circuler de fausses informations. Il a toutefois promis de faire des efforts pour filtrer davantage les contenus bidons ou désinformant.

Le groupe a également démenti les informations du site Gizmodo (en anglais) qui a affirmé, lundi, que Facebook disposait d’un outil pour faire la chasse aux fausses informations, mais avait renoncé à s’en servir avant l’élection par crainte de s’attirer les foudres des conservateurs. “Identifier la vérité est compliqué, a encore prévenu Mark Zuckerberg. Si certains canulars peuvent être totalement démontés, un grand nombre de contenus, y compris provenant de sources grand public, ont souvent la bonne idée de base mais avec des détails faux ou omis.”

Certains appellent aujourd’hui à considérer Facebook comme une entreprise de médias, et pas comme une plateforme neutre, afin que le réseau social prenne des décisions éditoriales sur les articles qu’il diffuse.

Source : France TV, AFP, 16/11/2016

Source: http://www.les-crises.fr/critiques-apres-lelection-americaine-google-et-facebook-sattaquent-aux-faux-sites-dinformations-par-afp/


[2013] Entretien avec Ammar Bagdash, secrétaire du Parti communiste syrien

Saturday 19 November 2016 at 01:45

Une intéressante interview ancienne…

Source : Le PCF, 13-08-2013

Lors d’une rencontre publique à Rome avec le secrétaire du Parti communiste syrien, Ammar Bagdash et une interview collective pour connaître les causes, le déroulement et les conséquences de la guerre civile en Syrie. Ou autrement dit de la tentative de déstabilisation d’un pays qui ne fait pas partie des plans pour le contrôle impérialiste du Moyen-Orient.

Entretien réalisé par Sergio Cararo, Marinella Correggia, Maurizio Musolino


Pourquoi cette attaque contre la Syrie ?

La Syrie constitue une digue contre l’expansionnisme nord-américain au Moyen-orient, surtout après l’occupation de l’Irak. Mais le véritable protagoniste de ce projet se trouve être en réalité le président israélien Peres, qui poursuit cet objectif depuis les années 1980. Les communistes syriens ont donné un nom à ce projet : la grande Sion. La Syrie a refusé tous les diktats des Etats-unis et d’Israel au Moyen-orient, a soutenu la résistance irakienne, celle libanaise et le droit national du peuple palestinien.

Mais comment est née la révolte, la crise et la guerre civile en Syrie ?

Dans l’analyse des communistes syriens, les conditions ont été posées également par les mesures libérales adoptées en 2005. Cette politique a eu trois effets négatifs : une augmentation des inégalités sociales ; l’exclusion sociale de plus en plus diffuse dans les banlieues de Damas ; la dégradation des conditions de vie de la population. Cela a favorisé les forces réactionnaires, comme les Frères musulmans, qui se sont appuyées sur le sous-prolétariat, surtout rural. Quand nous avons dénoncé tout cela jusqu’au Parlement, on nous a accusé d’adopter une posture idéologique et d’être des idiots.

En Syrie, ils veulent refaire ce qui s’est passé en Égypte et en Tunisie. Mais là il s’agissait de deux pays philo-impérialistes. Dans le cas de la Syrie, c’était différent. Ils ont commencé par des manifestations populaires dans les régions rurales de Daraa et d’Idleb. Mais dans les villes, il y eut immédiatement de grandes manifestations populaires de soutien à Assad. Par ailleurs, au début, la police ne tirait pas, ce sont certains éléments parmi les manifestants qui ont commencé les actions violentes. Dans les sept premiers mois, il y eut plus de morts du côté de la police et de l’armée que dans l’autre camp. Quand la méthode des manifestations ne marchait plus, ils sont passés au terrorisme avec des assassinats ciblés de personnes en vue (dirigeants, hauts fonctionnaires, journalistes), attentats et sabotages d’infrastructures civiles. Le gouvernement a réagi en adoptant certaines réformes comme celle sur le multi-partisme et sur la liberté de la presse, réformes que nous avons soutenu. Mais les forces réactionnaires ont rejeté ces réformes. Communistes, nous avons réalisé cette équation : les discours et les actes doivent être confrontés aux discours et aux actes. Mais le terrorisme doit être confronté par la souveraineté de la loi, en rétablissant l’ordre.

Ensuite, on est passé à la troisième phase. La véritable révolte armée. Attentats et assassinats ciblés étaient le signal pour commencer l’attaque contre Damas. Puis les attaques se sont concentrées contre Alep, qui par sa position géographique rend plus facile le trafic et le ravitaillement depuis l’étranger. Le gouvernement a réagi en imposant l’hégémonie de la loi. Il convient de dire que l’intervention de l’armée et les bombardements aériens se sont produits dans une zone où l’essentiel des civils avaient déjà fui. A la contre-offensive de l’armée syrienne, les rebelles ont réagi de façon barbare, y compris dans les zones où il n’y avait pas de combattants. Et puis ils ont assiégé Alep.

Pourquoi la Syrie résiste, que cela signifie-t-il ?

Ces dix dernières années au Moyen-orient, l’Irak a été occupé, la Libye a dû capituler, la Syrie au contraire non. Par sa plus grande cohésion interne, ses forces armées plus puissantes, des alliances internationales plus solides ou parce qu’il n’y a pas encore eu d’intervention militaire directe des puissances impérialistes ?

En Syrie, à la différence de l’Irak et de la Libye, il y a toujours eu une forte alliance nationale. Les communistes travaillent avec le gouvernement depuis 1966, sans interruption. La Syrie n’aurait pas pu résister en comptant seulement sur l’armée. Elle a résisté parce qu’elle a pu compter sur une base populaire. En outre, elle a pu compter sur l’alliance avec l’Iran, la Chine, la Russie. Et si la Syrie reste debout, des trônes vont tomber parce qu’il deviendra clair qu’il existe d’autres voies. Notre lutte est internationaliste. Un expert russe m’a dit : « Le rôle de la Syrie ressemble à celui de l’Espagne contre le fascisme ».

Quels effets peuvent avoir les événements en Égypte sur la situation actuelle en Syrie ?

Il y a un rapport dialectique entre ce qui s’est passé en Égypte et ce qui se passe en Syrie. La base commune, c’est le mécontentement populaire, mais la résistance syrienne a accéléré la chute du régime des Frères musulmans en Égypte et cela aidera beaucoup la Syrie car cela montre que les Frères musulmans ont été rejetés par le peuple.

Dans un entretien récent, la président syrien Assad a affirmé : « En Syrie, nous avons mis en échec l’offensive de l’islamisme politique ». Qu’en pensez-vous ?

Nous, communistes syriens, n’utilisons pas la catégorie d’Islam politique. L’Islam connaît une certaine diversité en son sein. Il y a des réactionnaires pro-impérialistes comme les Frères musulmans et des progressistes comme le Hezbollah et même l’Iran. Je ne suis pas un admirateur du modèle iranien mais ce sont nos alliés dans la lutte contre l’impérialisme. Depuis notre V ème Congrès, nous avons jugé l’Iran sur la base de sa position sur l’impérialisme. Notre mot d’ordre est : pour un Front international contre l’impérialisme.

En Italie, une grande partie de la gauche pense que les rebelles combattent un régime fasciste, celui d’Assad. Que pouvez-vous répondre à cette position ?

Si nous partons de la définition du fascisme – un mouvement réactionnaire qui use de moyens violents dans les intérêts du capitalisme monopoliste – en Syrie, ce n’est pas le capitalisme monopoliste qui domine. Ce sont plutôt les rebelles qui représentent les intérêts du grand capital. Les révoltes, comme nous l’enseigne l’histoire, ne sont pas toujours des révolutions. Pensons aux Contra au Nicaragua, aux franquistes en Espagne et il y en a d’autres.

Mais l’opposition à Assad est-elle toute réactionnaire ? Ou, comme le démontrent les affrontements internes entre Armée libre syrienne et militants djihadistes, ou ces derniers jours entre kurdes et djihadistes, existent-ils des éléments progressistes avec qui on peut entamer un dialogue ?

Parmi les opposants, certains ont passé plusieurs années dans les prisons syriennes et nous avons réclamé et nous sommes battus pour leur libération. Ces opposants à Assad sont toutefois contre toute ingérence, intervention étrangère. Certains vivent à Damas et nous travaillons ensemble pour le dialogue national. Même Haytham Menaa de la Coordination démocratique condamne l’usage de la violence de la part de l’opposition armée ainsi que les ingérences extérieures. D’autres comme Michel Kilo viennent de la gauche, mais ont trahi ces idées mais ils ne peuvent de toute façon pas changer la nature réactionnaire de la rébellion.

Comment expliquez-vous l’intensification des divergences entre Arabie saoudite et Qatar, et qui se répercute également dans les divisions au sein des milices rebelles ?

C’est vrai, l’influence et le rôle du Qatar diminuent, ceux de l’Arabie saoudite augmentent. L’affaire des affrontements avec les kurdes, c’est une autre histoire. Il y a eu des affrontements entre kurdes de l’Union démocratique kurde et les militants djihadistes d’Al Nusra, mais il y a eu également des affrontements entre divers groupes kurdes.

Que se passe-t-il pour les Palestiniens qui vivent dans les camps de réfugiés en Syrie ?

J’ai rencontre récemment le responsable de l’OLP et il m’a dit : « Si la Syrie tombe, adieu la Palestine ». Le Hamas a agi parfois dans la précipitation, il a fait beaucoup d’erreurs et a causé des problèmes. Nous pouvons dire que l’organisation, qui appartient au monde des Frères musulmans, est revenue à ses origines et elle est désormais sous l’aile du Qatar. Mais c’est dangereux également pour eux. Maintenant, après ce qui s’est passé en Egypte, que se passera-t-il à Gaza ? La majorité des militants qui sont entrés dans les camps de réfugiés palestiniens en Syrie n’étaient pas palestiniens. La majorité des Palestiniens est totalement contre toute ingérence dans les affaires syriennes.

A Yarmouk, 70% des habitants sont syriens car les camps de réfugiés en Syrie ne sont pas des ghettos comme dans les autres pays. Il y a encore des combats à Yarmouk mais la population syrienne est partie. Le Comité exécutif de l’OLP s’est rendu deux fois en Syrie pour poser la question de la protection des camps de réfugiés. Yarmouk a été assiégé par Al Nusra avec l’aide du Hamas qui a cherché à provoquer l’armée, laquelle a reçu l’ordre de ne pas réagir.

On en parle peu, mais quel rôle joue la Jordanie dans la crise et la guerre civile en Syrie ?

La monarchie jordanienne a toujours collaboré avec l’impérialisme et il y a une intense activité des Frères musulmans. La Jordanie a accepté la présence de militaires états-uniens sur son territoire et la quatrième attaque contre Damas est partie justement du territoire jordanien.

Et quel jeu joue Israel en Syrie ?

Israel soutient les rebelles armés, mais quand ils n’arrivent pas à toucher leurs objectifs, ce sont les avions de combat israéliens qui prennent le relais. Cela s’est passé à Damas mais aussi il y a quelques jours à Latakia.

Comment sortir de la tragédie ?

On ne peut réaliser aucun progrès social, ou la démocratie, si on est soumis à des forces extérieures. Le mot d’ordre est de défendre la souveraineté nationale et les conditions de vie de notre peuple. Comme je l’ai déclaré à l’ANSA, le principal moyen de sortir du massacre syrien passe d’abord par un arrêt des aides à l’opposition armée de la part des pays réactionnaires et impérialistes. Une fois que les aides extérieures seront arrêtées, on pourra mettre un terme à toutes les opérations militaires, y compris de la part du gouvernement syrien. Et relancer un processus démocratique avec des élections législatives et des réformes politiques, ce qui n’est évidemment pas possible dans cette phase de la lutte armée. L’avenir politique de la Syrie se décidera par les élections, notamment celles présidentielles de 2014.

Source : Le PCF, 13-08-2013

ammar-bagdache

Source: http://www.les-crises.fr/2013-entretien-avec-ammar-bagdash-secretaire-du-parti-communiste-syrien/


[Vidéos] Ziad Takieddine affirme avoir remis 5 millions d’euros à Sarkozy et Guéant pour la campagne de 2007

Friday 18 November 2016 at 01:00

Un scandale incroyable, qui ne fait incroyablement pas la une de nos gazettes…

Qui, elles, font par contre la leçon à Trump qui n’est même pas encore en fonction au lieu de s’occuper de notre ancien Président…

Source : Le Figaro, Paul Louis, 15/11/2016

Ziad Takieddine Crédits photos : Jacques Demarthon/AFP

Ziad Takieddine Crédits photos : Jacques Demarthon/AFP

Dans un entretien vidéo diffusé par Mediapart, l’homme d’affaires franco-libanais explique avoir remis trois valises remplies d’argent liquide au ministère de l’Intérieur entre 2006 et 2007. Les avocats de Claude Guéant et de Nicolas Sarkozy annoncent des poursuites.

À quelques jours du premier tour de la primaire de la droite et du centre, ce n’est pas une bonne nouvelle pour Nicolas Sarkozy. Dans un entretien réalisé et enregistré par le site d’investigation Mediapart et l’agence Premières Lignes, Ziad Takieddine passe aux aveux. L’homme d’affaires, proche du régime de Mouammar Kadhafi, reconnaît avoir servi d’intermédiaire en transportant à trois reprises de l’argent liquide libyen jusqu’au ministère de l’Intérieur français, place Beauvau, entre novembre 2006 et janvier 2007. Le Franco-Libanais affirme avoir remis au total la somme de 5 millions d’euros destinée au ministre de l’Intérieur de l’époque, Nicolas Sarkozy, dans le cadre du financement de sa campagne présidentielle.

Ce n’est pas la première fois que Ziad Takieddine porte des accusations sur un éventuel financement libyen. En mai 2012, alors qu’il était entendu par un juge dans le volet financier du dossier de l’affaire Karachi, dans lequel il est mis en examen, il déclare que «les informations révélées par la presse au sujet du financement de la campagne de Nicolas Sarkozy de 2007» étaient «tout à fait crédibles». Mediapart avait notamment rendu public une note témoignant d’un versement d’environ 50 millions d’euros. La plainte de Nicolas Sarkozy s’était soldée par un non-lieu.

S’agissant des 5 millions d’euros, Ziad Takieddine livre les détails du transfert. Transportant à chaque fois une valise pleine de «billets de cinq cent» et quelques «liasses de deux cent», il aurait personnellement effectué trois voyages entre Tripoli et Paris via des vols classiques de la compagnie Afriqiyah. Comme il l’a affirmé en 2012 dans le cadre de poursuites de la Cour pénale internationale, Abdallah Senoussi, l’un des chefs des services libyens et beau-frère par alliance de Mouammar Kadhafi, a «personnellement supervisé» les remises d’argent.

«Un jour, M.Senoussi me demande si je veux être celui qui transporte ces sommes à Claude Guéant, de l’Intérieur. À ce moment-là, je dis “si c’est bon, c’est bon”», raconte Takieddine. Inquiet d’une possible arrestation par les autorités françaises à son arrivée, Senoussi lui répond: «Ne vous inquiétez pas, de toute manière les services sont prévenus… Vous rentrez avec, vous le livrez à M.Guéant et vous nous confirmez quand c’est reçu!».

«Dénoncer l’État mafieux dans lequel on est en train de vivre»

Fin 2006, Claude Guéant, directeur de cabinet du ministère de l’Intérieur, aurait ainsi reçu deux valises dans son bureau des mains de Takieddine, la première contenant environ 1,5 million d’euros contre 2 millions pour la deuxième. La «livraison», attendue par Claude Guéant, est expéditive et ne suscite aucun commentaire: «Il (Claude Guéant) sort de derrière son bureau. On parle un tout petit peu. Il voit où j’ai laissé la valise. Et voilà», témoigne Ziad Takieddine. En janvier 2007, la troisième valise, d’un montant de 1,5 million d’euros, est remise à Nicolas Sarkozy en personne, dans l’appartement privé du ministre de l’Intérieur.

L’homme d’affaires affirme aujourd’hui que Nicolas Sarkozy était parfaitement au courant du contenu des valises. S’il le prenait pour un «champion» en 2006-2007, il présente désormais l’ex-président comme quelqu’un «de faux» et souhaite «dénoncer l’État mafieux dans lequel on est en train de vivre». «J’ai découvert des choses qui ne méritent plus d’être cachées», ajoute-t-il.

Contacté par Mediapart, Claude Guéant a démenti les révélations de Ziad Takieddine: «Je n’ai jamais reçu d’espèces du gouvernement libyen, non plus de quiconque d’autre du reste. Je n’en ai pas davantage vu passer. Le prétendre est mensonger et diffamatoire».

«Il est tout de même étrange qu’il avance ses allégations à quelques jours de la primaire de la droite. S’il avait des preuves, pourquoi ne pas les avoir fournies avant?» a relevé l’avocat de Claude Guéant, Philippe Bouchez-El Ghozi, qui a annoncé une plainte en diffamation allait être déposée. Claude Guéant «n’a jamais entendu parler du moindre centime libyen qui aurait pu servir à financer la campagne de 2007 et, malgré les nombreuses investigations diligentées, il n’a jamais été mis en cause à ce titre», a souligné l’avocat.

Dans un communiqué, Me Thierry Herzog, l’avocat de Nicolas Sarkozy, accuse le site Mediapart de tenter de «salir» son client à quelques jours du premier tour de la primaire de la droite et ajoute que «l’absence de crédibilité» de Ziad Takieddine a été «maintes fois démontrée». «M. Nicolas Sarkozy oppose un démenti formel à ces nouvelles allégations», déclare-t-il. «Des poursuites judiciaires seront donc engagées en réponse à cette manipulation grossière.»

Une procédure judiciaire a été ouverte en 2013 par le parquet de Paris qui doit investiguer l’hypothèse d’un financement libyen de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007. Elle porte sur des charges de corruption active et passive, trafic d’influence, faux et usage de faux, abus de biens sociaux, blanchiment, complicité et recel de ces délits. Pour l’heure, malgré les multiples témoignages d’ex-hauts responsables du régime libyen dont dispose la justice, aucune preuve ne vient confirmer ces accusations.

Source : Le Figaro, Paul Louis, 15/11/2016

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Ziad Takieddine: « J’ai remis trois valises d’argent libyen à Guéant et Sarkozy »

Source : Youtube, Mediapart, 16-11-2016

Ziad Takieddine, l’homme qui a introduit Nicolas Sarkozy auprès de Mouammar Kadhafi, avoue avoir apporté au ministère de l’intérieur, fin 2006 et début 2007, plusieurs valises d’argent liquide préparées par le régime libyen, pour un montant total de 5 millions d’euros. « J’ai découvert des choses qui ne méritent plus d’être cachées », déclare-t-il, en annonçant son intention de « raconter exactement les faits à la justice ».

Tourné le 12 novembre 2016, à Paris.
Entretien par Nicolas Vescovacci.
Mediapart (Fabrice Arfi et Karl Laske), production Premières Lignes.

Source : Youtube, Mediapart, 16-11-2016

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Comment Ziad Takieddine a parlé à Mediapart

Source : France Inter16/11/2016

Sonia Devillers reçoit Nicolas Vescovacci dans L’Instant M pour son interview exclusive de Ziad Takieddine dans Mediapart

Trois valises avec zip en cuir marron. Cinq millions d’euros en coupures neuves. Dans un entretien filmé, diffusé sur le site d’info Médiapart, Ziad Takieddine balance, les livraisons d’argent en provenance de Lybie et à destination de Nicolas Sarkozy entre 2006 et 2007. Révélation choc dans une enquête que le Monde qualifiait récemment « d’impossible ». Quand, comment et pourquoi cette interview a-t-elle lieu ?L”Instant M pose la question à Nicolas Vescavacci, journaliste d’investigation.
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TAKIEDDINE : SILENCE !

par Daniel Schneidermann, @si, 17/11/2016
Soyons clair. Aucun media n’est jamais obligé de “reprendre” les révélations d’un autre media. Il peut y avoir toutes sortes de raisons de ne pas les reprendre. Soit qu’on ne les estime pas fiables, soit (si si, ça arrive) qu’on ne souhaite pas, par vilaine jalousie, faire de la pub à un media concurrent. Et Mediapart n’échappe pas à la règle. Aucun confrère n’est obligé de reprendre les révélations de Mediapart. A fortiori, sur l’affaire du financement libyen de la campagne de Sarkozy, affaire sur laquelle, personnellement, j’ai toujours estimé que Mediapart, à la différence des affaires Bettencourt ou Cahuzac, n’avait pas fourni dès le départ la preuve irréfutable de l’existence de ces financements. Des témoins à la sincérité invérifiable, des documents contestés : le doute pouvait subsister.

Ça, c’était jusqu’à avant-hier, mardi 15 novembre. Avant-hier, Mediapart a mis en ligne une interview de l’intermédiaire franco-libanais Ziad Takieddine, racontant dans le détail comment il apporté à trois reprises, en 2006 et 2007, trois mallettes de billets de 500 et 200 euros au ministère de l’Intérieur, alors dirigé par Sarkozy (pour un total de cinq millions d’euros). Peut-être Takieddine fabule-t-il. Peut-être a-t-il tout inventé. Toujours est-il que ce témoignage existe. Qu’il est précis. Que Takieddine s’est mis dans la situation de devoir en répondre à la Justice (il a d’ailleurs été, le soir même, entendu par la police).

Il est donc tout simplement incompréhensible qu’un journal comme le 20 Heures de Field et Pujadas, entre autres, n’en ait soufflé mot ni mardi, ni mercredi soir. On peut présenter ce témoignage avec toutes les précautions possibles. On peut simplement le citer sans rien en diffuser. On peut, comme Le Monde, estimer ce témoignage tardif, douteux, estimer que les mobiles de ces versements sont imprécis. Mais le passer purement et simplement sous silence, c’est commettre, aux yeux de la France entière, une erreur qui sera longtemps reprochée aux medias taiseux. Que croient-ils ? Qu’on ne les voit pas ? Qu’on ne se rend compte de rien ? Mais leur silence, sur cet enième épisode du feuilleton français “les politiques et les mallettes”, qui rappellera aux plus anciens la belle époque de la “cassette Méry” éclate tous les soirs, comme une insulte à des millions de citoyens.

D’autant que l’événement survient à quelques jours du dernier débat de la primaire de la Droite. Dans lequel on guettera évidemment toute allusion à “la” question. On imagine la nervosité en coulisse, dont témoignent les préparatifs. A en croire Le Parisien, tout a été fait pour que le débat ne déborde pas : d’abord, la chaîne de Field a préféré s’associer à Europe 1 qu’à France Inter. Effets collatéraux : les potentiels (et relatifs) incontrôlables ont été écartés : le sûr Elkabbach a été préféré au jeune Sotto (qui avait asticoté Sarkozy sur Bygmalion), Et Nathalie Saint-Cricq préférée à Léa (“c’est une plaisanterie”) Salamé, officiellement, défense de rire, parce que Europe 1 ne souhaitait pas qu’on entende Salamé sur son antenne. Les boulons sont serrés. Mais le sont-ils jamais assez ?

par Daniel Schneidermann, @si, 17/11/2016

Source: http://www.les-crises.fr/videos-ziad-takieddine-affirme-avoir-remis-5-millions-deuros-a-sarkozy-et-gueant-pour-la-campagne-de-2007/


[France à fric] Guinée / François de Combret / Corruption à 11 M $ ? – un autre scandale présumé qui passe inaperçu

Friday 18 November 2016 at 00:30

Je note qu’un scandale qui éclabousse (encore) la France et dont on parle beaucoup dans plusieurs pays étrangers (Australie, Guinée…) passe totalement sous les écrans radars de notre presse.

Elle éclabousse une huile énarchique française, ancien Secrétaire Général Adjoint de l’Élysée sous Giscard – excusez du peu. Je signale bien que les accusations et interrogations sont à prendre au conditionnel, M. Combret n’ayant ni été condamné ni même poursuivi. Il est donc totalement présumé innocent. Il a refusé tout commentaire. Je me contente de reprendre des extraits des grands journaux financiers mondiaux qui s’interrogent sur ce grand serviteur de l’État de lui-même…

L’affaire est intéressante car elle met en lumière des réseaux de la Françafrique, de nos grands énarques, et des pratiques du marché minier…

Qui est François Polge de Combret ?

Major de sa promotion au concours d’entrée à l’ENA (1963), François Polge de Combret devient en 1967 magistrat à la Cour des comptes, dont il est conseiller référendaire honoraire.

En 1971, il est appelé comme conseiller au Cabinet de Valéry Giscard d’Estaing, Ministre de l’Économie et des Finances, qu’il suit à la Présidence de la République en 1974.

Il demeure auprès du Président pendant toute la durée du septennat, d’abord en tant que conseiller pour les affaires économiques et industrielles puis en tant que Secrétaire Général Adjoint de l’Élysée.

Après l’élection présidentielle de 1981, François de Combret est recruté par la banque Lazard. Il passe trois années à New York (1982-1985), au cours desquelles il rencontre Bernard Arnault, futur président de LVMH, qu’il introduit auprès de Lazard pour la prise de contrôle du groupe Boussac. Il est ensuite nommé associé-gérant de Lazard à Paris, fonctions qu’il exercera pendant plus de 20 ans (1985-2005).

Au cours de cette période, il est chargé notamment de conseiller France Télécom, Renault et Aérospatiale pour leur privatisation, et il participe à de nombreuses opérations de fusions-acquisitions telles que la création de EADS et de Safran, l’alliance Renault-Nissan ou l’acquisition de YSL par PPR.

En 2005, lors de la vente et de la mise en bourse de Lazard, François de Combret quitte Lazard pour UBS (2006-2009), puis pour Crédit Agricole Corporate and Investment Bank (2010-2011) ,avant de créer la société de conseil financier FC Finance dont il est “managing director”.

Depuis 2011, il exerce, avec Tony Blair et George Soros, les fonctions de conseiller personnel du Président de la République de Guinée, Alpha Condé, dont il était condisciple à Sciences-Po.

François de Combret est ou a été administrateur notamment de Sanofi, Aérospatiale, Sagem, Renault, Bouygues Telecom, Nexans, Safran. (Source : Wikipédia)

[Financial Times] Rio Tinto face à une nouvelle controverse sur un paiement minier de 10,5 millions de dollars

Des avocats ont trouvé des e-mails concernant les honoraires d’un consultant sur un projet d’extraction en Guinée il y a plus d’un an.

Par Tom Burgis et Neil Hume à Londres, Financial Times, 16/11/2016

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Les avocats de Rio Tinto ont découvert il y a plus d’un an des e-mails internes à propos du versement douteux de 10,5 millions de dollars à un consultant, mais la société minière n’a alerté les autorités judiciaires et les investisseurs sur le sujet qu’il y a une semaine.

Le groupe anglo-australien a déclaré le 9 novembre qu’il avait informé les autorités après avoir découvert des e-mails datant de 2011 concernant un versement au consultant qui a aidé à neutraliser une menace aux droits de Rio Tinto sur le projet gigantesque d’extraction de minerai de fer à Simandou en Guinée.

Dans les e-mails auxquels a eu accès le Financial Times, Alan Davies, directeur chargé de Simandou discute avec Tom Albanese, alors directeur général, et Sam Walsh, alors chef du minerai de fer, du versement de 10,5 millions de dollars d’honoraires à François Polge de Combret, un ancien banquier d’affaires français et ancien camarade de classe du président guinéen.

À la suite d’une enquête interne commencée en août, Rio Tinto a déclaré la semaine dernière qu’il avait informé les autorités judiciaires du Royaume-Uni, des États-Unis et d’Australie. L’entreprise s’expose à des années d’examen et au risque de lourdes sanctions s’il est conclu qu’elle a enfreint les lois anti-corruption.

Rio Tinto a suspendu M. Davies, le seul des trois directeurs de la conversation par e-mail à être toujours dans l’entreprise. Il n’a pas répondu à nos demandes de commentaire.

Rio Tinto a déclaré la semaine dernière qu’il avait découvert les e-mails en août après qu’ils ont été postés anonymement en ligne.

Mais deux personnes connaissant le sujet ont expliqué au Financial Times que les e-mails ont été découverts l’an dernier par des avocats travaillant pour la compagnie sur un litige concernant le projet de Simandou.

Le cabinet juridique, Quinn Emanuel, a refusé de commenter. Il rendait compte au département de Debra Valentine, la directrice en charge des questions juridiques et réglementaires.

Mme Valentine devait prendre sa retraite en mai prochain mais elle a démissionné prématurément suite aux révélations de la semaine dernière. Elle n’a pas pu être jointe pour commenter.

Le conflit au sujet de Simandou remonte à 2008, lorsque le dictateur guinéen du jour a retiré ses droits à Rio Tinto sur la moitié nord du projet d’exploitation et les a transférés à BSG Resources, le bras minier du conglomérat familial de Beny Steinmetz, le magnat israélien du diamant. BSGR a ensuite signé un partenariat de 2,5 milliards de dollars avec le brésilien Vale.

En 2011, Rio Tinto a sécurisé ses droits sur la moitié restante de Simandou grâce à un versement de 700 millions de dollars au nouveau président Alpha Condé – une transaction que M. Combret a aidé à faciliter, selon les e-mails. L’ancien banquier de Lazard a refusé tout commentaire.

En 2014, une enquête lancée par le gouvernement de Condé a conclu que BSGR avait acquis ses droits sur la moitié de Simandou à travers un système de corruption. Le gouvernement a annulé ces droits et ne les a pas à nouveau délivrés.

Rio Tinto a réagi en avril 2014 en saisissant la justice de New York pour racket, à laquelle il a affirmé que BSGR, M. Steinmetz, Vale et d’autres s’étaient entendus pour voler ses droits sur Simandou.

L’affaire a été rejetée sur un point technique en novembre 2015, mais pas avant l’instruction in futurum, processus où les plaignants et les défendeurs échangent des documents avant un procès.

Un dossier déposé en octobre 2014 au tribunal par les avocats de Vale spécifiait les informations qu’il voulait que Rio Tinto transmette. Une rubrique exigeait « tous les documents concernant ou constituant des communications entre Rio Tinto et toute autre tierce partie en rapport avec les droits sur les blocs 1 et 2 de Simandou. »

Cela faisait référence à la moitié du gisement qui avait été prise à Rio Tinto et donnée à BSGR.

Les e-mails de 2011 qui ont déclenché l’enquête interne de Rio Tinto en août semblent être pleinement concernés par la demande de divulgation de Vale.

Par exemple, M. Davies écrit dans l’un de ses e-mails que, grâce aux efforts de Combret, « il y a désormais aussi une lueur qui nous permet d’espérer prendre une position utile en rapport avec les [blocs] 1 et 2 ».

Des personnes connaissant le dossier ont affirmé que les avocats de Rio Tinto étaient tombés sur les e-mails en compilant des documents à divulguer lors du processus d’instruction.

Il n’apparaît pas clairement, après que Quinn Emanuel a trouvé les e-mails, si les services de Mme Valentine ont pris ou pas des mesures ou s’ils ont contacté M. Walsh qui a succédé en 2013 à M. Albanese comme directeur général.

M. Walsh, qui a renoncé à ses fonctions de directeur général de Rio Tinto en juillet, a refusé tout commentaire, tout comme M. Albanese.

Suite aux révélations de Rio Tinto la semaine dernière, le gouvernement guinéen a affirmé qu’il « n’avait pas connaissance, à l’époque en 2011, du fait que M. Polge de Combret avait la capacité d’agi pour le compte de Rio Tinto ».

Il a ajouté qu’il n’a « reçu aucune allégation de corruption » mais qu’il « suivrait de près l’évolution des procédures d’auto-vérification initiées par Rio Tinto et conduirait toutes les enquêtes qui seraient nécessaires pour assister les autorités compétentes dans leur mission ».

Jean-Sébastien Jacques, actuel directeur général de Rio Tinto, a déclaré cette semaine à ses collaborateurs que l’entreprise ne prenait pas « à la légère » une décision de contacter les régulateurs à propos du versement de 10,5 millions de dollars à M. Combret. Il a ajouté que l’entreprise prenait la situation « très au sérieux ».

BSGR a toujours soutenu qu’elle n’avait rien fait de mal en Guinée et qu’elle avait été victime d’un coup monté par le gouvernement et ses alliés pour confisquer ses droits illégalement.

Le groupe a saisi les récentes allégations de corruption contre le gouvernement de Condé dans une action distincte en justice, ainsi que les divulgations de Rio Tinto la semaine dernière pour faire valoir son innocence.

Source : Financial Times, 16/11/2016

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Découvrez l’homme mystérieux qui a transformé le rêve africain de Rio Tinto en cauchemar

Lors de la réunion du conseil d’administration de Rio Tinto ce lundi, le principal point de discussion devrait être l’enquête de Rio Tinto. 

Par James Chessell, Matthew Stevens, Peter Ker, The Australian Financial Review Magazine, 11/11/2016

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Si vous voulez faire des affaires en Guinée en Afrique de l’Ouest, vous avez de fortes chances de croiser François de Combret.

Dans le cas de Beny Steinmetz, le milliardaire israélien de haut vol qui a fait fortune en vendant des diamants entre autres à Tiffany & Co., c’est arrivé en mars et avril 2013, au cours de l’un de ses nombreux séjours dans le petit État d’Afrique de l’Ouest.

Steinmetz avait besoin qu’on l’aide avec le président guinéen Alpha Condé, qui menaçait de révoquer ses droits sur la moitié nord de Simandou, l’un des plus importants gisements inexploités de minerai de fer au monde, au sud-est du pays. Le magnat des affaires avait obtenu les droits cinq ans auparavant dans des circonstances sensationnelles lorsque le prédécesseur de Condé avait dépouillé le géant minier Rio Tinto de ses licences exclusives d’exploration parce qu’il développait la mine « trop lentement », et les a données pour rien à Beny Steinmez Group Resources. Deux ans plus tard, après n’avoir investi que 160 millions de dollars dans une étude de faisabilité de l’exploitation, Steinmetz a vendu 51 % de ses droits au leader du minerai de fer, le brésilien Vale, pour 2,5 milliards de dollars.

La transaction a sidéré l’industrie minière, dont Rio Tinto, furieux que la moitié de Simandou se soit retrouvée dans les mains d’un concurrent féroce. Les propos de Mo Ibrahim, un milliardaire des télécommunications africaines, ont largement été relayés. Lors d’une conférence à Dakar il a posé la question : « Est-ce que les Guinéens qui ont conclu cet accord sont idiots, criminels, ou les deux ? »

Le président guinéen Alpha Condé menaçait de révoquer les droits de Beny Steinmetz sur la moitié nord de Simandou, l’un des plus importants gisements inexploités de minerai de fer au sud-est du pays.

Dans une tentative manifeste d’aller au fond de l’une des opérations les plus controversées de l’histoire de l’activité minière africaine, Condé a ordonné une enquête gouvernementale de deux ans sur la transaction. BSGR faisait face à la réelle possibilité de perdre le restant de ses droits sur les dépôts gigantesques de minerai de fer de Simandou si l’enquête découvrait des preuves de corruption. C’est dans ces circonstances que Steinmetz s’est retrouvé face-à-face avec Combret.

Selon Steinmetz, un intermédiaire qu’il n’a pas nommé lui a présenté le français pour « étudier si une entente avec le président Condé était possible ». Steinmetz affirme qu’il aurait volontiers conseillé à BSGR de verser une commission à Combret si ses efforts « avaient permis de remettre le projet sur les rails ».

« Sa contribution aurait été très précieuse, » a-t-il ajouté. « Toutefois, rien n’a véritablement été discuté, encore moins approuvé. Nous avons convenu d’en discuter le jour éventuel où il y aurait une solution. »

Au final, aucune solution n’a été trouvée. L’enquête gouvernementale a déclaré que BSGR avait versé des pots-de-vin pour obtenir les droits sur Simandou et les avait rapidement révoqués. Steinmetz, qui nie les accusations de malversation, a répondu en lançant des poursuites judiciaires à l’encontre du gouvernement de Guinée, là où se trouve une déposition dans laquelle il témoigne de sa rencontre avec Combret.

Ce petit incident dans l’histoire sombre de Simandou aurait pu passer largement inaperçu si Rio Tinto n’avait pas pris la décision extraordinaire cette semaine de révéler qu’il avait informé les régulateurs d’Australie, de Grande-Bretagne et des États-Unis d’une enquête interne concernant un versement de 10,5 millions de dollars à Combret pour avoir aidé à apaiser ses relations avec le président Condé.

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L’enquête de Rio Tinto a été déclenchée par la fuite d’une conversation par e-mail qui s’est déroulée en 2011 entre le directeur général de Rio Tinto de l’époque, Tom Albanese, et son successeur, Sam Walsh (en photo), alors directeur du département minerai de fer. Bloomberg

L’expérience de Steinmetz laisse entendre que Rio Tinto n’était pas le mieux placé. Lorsque les compagnies minières étaient en conflit avec le gouvernement guinéen, c’est François Aldebert Gabriel Christian Polge de Combret qu’il fallait appeler.

Conseiller de l’ancien président français Valéry Giscard d’Estaing, Combret est ensuite devenu associé-gérant de la banque d’investissement Lazard, où il a travaillé sur un certain nombre de grosses opérations, dont la privatisation du constructeur automobile Renault. Il a ensuite fondé son propre cabinet de conseil basé à Paris, FC Finance, en 2004. Le résident Suisse de 75 ans a siégé aux conseils d’administration de certaines des plus grandes entreprises d’Europe dont le groupe de défense Safran et Bouygues Telecom.

Mais ce qui le rend réellement important aux yeux notamment de Rio Tinto, c’est qu’il est un ancien camarade de classe de Condé, avec qui il était au lycée et à l’université à Paris.

Une proximité avec le président préoccupante

Tom Albanese était PDG de Rio Tinto CEO en 2011.

Selon une analyse de la Banque mondiale du secteur minier guinéen, la proximité de Combret et du président était préoccupante. L’investisseur milliardaire George Soros, qui jouait le rôle de conseiller de Condé, « n’aime pas François de Combret et a tenté de le mettre sur le banc de touche pour qu’il n’influence pas le président sur les affaires de l’État ou sur l’activité minière », a relevé l’analyse.

Une source proche de Rio Tinto affirme que la bonne foi de Combret a été sujette à un examen interne avant son recrutement et que son contrat a été préparé par Phil Edmands, alors directeur juridique de Rio Tinto et qui travaille aujourd’hui dans les bureaux du cabinet juridique Gilbert + Tobin à Perth. Comparant son recrutement à la décision de Rio Tinto d’engager l’ancien secrétaire d’État des États-Unis Henry Kissinger comme conseiller sur le commerce avec la Chine et le Premier ministre britannique Tony Blair pour faciliter à une occasion les échanges avec le gouvernement de Mongolie, la source soutient que Combret a été choisi pour ses « connaissances de la région et ses contacts ».

Il semblerait que le cabinet juridique Kirkland & Ellis assiste l’enquête de Rio Tinto, qui sera le principal point de discussion d’une réunion du conseil d’administration de Rio Tinto ce lundi. Elle a été déclenchée par la fuite d’une conversation par e-mail qui s’est déroulée en 2011 entre le directeur général de Rio Tinto de l’époque, Tom Albanese, et son successeur, Sam Walsh, alors directeur du département minerai de fer, et Alan Davies, ancien directeur financier de Walsh qui avait été nommé président des opérations internationales de Rio Tinto pour le minerai de fer.

Davies a été suspendu après la révélation, et la directrice des affaires juridiques et reglementaires de Rio Tinto, Debra Valentine, s’est aussi retirée. Albanese et Walsh ne travaillent plus pour Rio Tinto.

Tom Albanese et Sam Walsh ont tous les deux reçu des e-mails liés au versement de 10,5 millions de dollars à un consultant à propos du gisement de minerai de fer de Simondou en Guinée.

Walsh, Combret et Davies n’ont pas répondu aux tentatives de les contacter. Albanese s’est refusé à tout commentaire. Diffusés brièvement sur un site web public de partage de fichiers et porté à l’attention de Rio Tinto en août, les e-mails montrent que Davies a demandé que le paiement soit fait à Combret quelques jours après que Rio Tinto a annoncé qu’il paierait 700 millions de dollars au gouvernement de Guinée pour résoudre un litige exceptionnel concernant la partie sud du projet de Simandou connus sous les noms de blocs 3 et 4. Dans son e-mail d’introduction à Walsh, Davies a écrit que « la contribution de François, ses services uniques et irremplaçables ainsi que sa proximité avec le président ont significativement amélioré le résultat auquel nous sommes parvenus ».

« Nous a aidé à nous rapprocher »

« Il s’est porté garant de notre intégrité quand il l’a fallu et il a aidé à nous rapprocher lorsque les choses s’annonçaient extrêmement difficiles, » a continué Davies.

« Ces services étaient de la nature la plus unique et nous ne serons jamais pleinement en mesure de juger de l’issue potentielle s’il ne nous avait pas assistés. »

Le directeur renvoyé de l’énergie et du minerai Alan Davies a promis de prendre « les actions légales les plus fortes possibles » contre Rio Tinto. Mathias Magg

Walsh avait aussi été averti qu’on n’avait laissé à Davies « absolument aucun doute sur le fait que François n’agirait pas en tant qu’ami de Rio Tinto » dans le cas où le versement ne serait pas effectué.

Dans le contexte actuel du marché des matières premières, qui se remet tout juste de sa pire chute depuis des dizaines d’années, le ton des e-mails est troublant.

Pourquoi trois des dirigeants les plus expérimentés de l’un des plus grands groupes miniers du monde se sont-ils empressés de faire un versement qui, au premier abord, ne semblait pas passer le test olfactif ? Pourquoi leur seule préoccupation concernait-elle la viabilité du projet plutôt que la pertinence de ces honoraires ? Et qu’est-ce que les « services uniques et irremplaçables et la proximité avec le président » de Combret avaient exactement qui le rendaient si important ?

Pour répondre à ces questions, il est important de se rappeler que l’industrie minière en était à un point très différent du cycle il y a cinq ans. Le minerai de fer, qui constitue le gros des gains de Rio Tinto, s’échangeait à un niveau proche du record de 177 $ la tonne, comparé avec les 74 $ la tonne d’aujourd’hui. Les producteurs bon marché comme Rio Tinto, BHP Billiton et le brésilien Vale n’ont pas pu en extraire assez vite et de nouveaux acteurs tels que la Fortescue Metals d’Andrew Forrest et la Roy Hill de Gina Rinehart entraient dans le Pilbara [NdT : région minière d’Australie].

Garder la cadence ne suffisait pas

Rio Tinto augmentait aussi sa production en Australie-Occidentale, mais pour une entreprise fière d’être le plus gros producteur de minerai de fer du monde, garder la cadence n’aurait jamais suffi.

Un mois seulement avant que Davies ne clique sur le bouton « envoyer » de son e-mail à Walsh, Rio Tinto avait élargi ses intérêts à travers l’acquisition pour un montant de 3,7 milliards de dollars de deux importants projets au Mozambique détenus par l’australien Riversdale Mining. Riversdale s’avérera être un désastre complet et coûtera son poste à Albanese, mais c’était bien avant que l’opération ne vienne symboliser les processus internationaux laxistes et les vérifications préalables inappropriées qui ont handicapé Rio Tinto pendant le boom minier.

Dans ce contexte, il est plus facile de comprendre pourquoi Davies était si désireux de garder Combret de son côté.

Les projets d’exploitation de la taille et de la qualité qui intéressent un leader tel que Rio Tinto sont rares, ce qui a rendu tout à fait attrayante la proposition de Simandou dans les hauteurs du sud de la Guinée. Non seulement Simandou avait suffisamment de réserves pour soutenir une mine pendant au moins 40 ans, mais le minerai était d’une « haute teneur » suffisante pour alimenter des hauts fourneaux avec peu de transformation.

Pour Davies, Simandou était toute sa vie professionnelle et il avait fait de nombreux déplacements depuis sa base à Londres jusqu’à la capitale guinéenne de Conakry pour négocier avec les représentants du gouvernement.

Pourtant, Davies avait peu de raisons de croire que les discussions se passeraient sans heurt. La décision de dépouiller Rio Tinto de ses blocs du nord en 2008 et de les transmettre à Beny Steinmetz Group Resources a déstabilisé la direction de Rio Tinto. Et en plus l’entreprise payait 700 millions de dollars pour sécuriser ses intérêts restants à Simandou – des actifs que Rio Tinto pensait déjà posséder en totalité. Entre les lignes de ses e-mails, Davies s’inquiétait de perdre le projet pour de bon. Ce n’est pas étonnant qu’il ait comparé Combret à une « assurance ».

Paiement de facilitation

Le souci évident au sein de la direction actuelle de Rio Tinto est que les frais représentent un paiement de facilitation pour lequel le représentant d’un gouvernement (ou un intermédiaire) reçoit de l’argent pour mener (ou accélérer) une mission existante. Les paiements de facilitation sont considérés comme une forme de pot-de-vin. Les règles au Royaume-Uni sont particulièrement strictes.

Étant donné que les régulateurs sur trois continents commencent tout juste à mordre à pleines dents dans les opérations avec Combret, les prochains mois promettent d’être gênants pour Albanese, Walsh, Davies et Valentine. Il est probable que les e-mails qui ont trouvé leur chemin jusqu’à la sphère publique ne racontent pas toute l’histoire.

Des sources proches de Rio Tinto affirment que le recrutement de Combret a été fait de manière convenable et que son contrat de consultant contenait une obligation pour Combret de suivre le code de conduite de Rio Tinto, « notre façon de travailler ». D’autres défendent l’idée que l’entreprise n’aurait pas révélé l’existence d’une enquête interne cette semaine à moins que l’examen par Kirkland & Ellis ait soulevé des raisons valables d’inquiétude.

La direction de Rio Tinto essaie aussi de comprendre comment les e-mails ont pu fuiter avant toute chose. Parmi les théories qui circulent au siège londonien de l’entreprise, il y a le soupçon que des pirates chinois aient accédé aux serveurs d’e-mails de Rio Tinto, ou que les e-mails aient atterri dans les mains de personnes hostiles au cours d’un processus de découverte lié aux nombreuses actions légales concernant Simandou.

Plus tôt cette année, le nouveau directeur général de Rio Tinto Jean-Sébastien Jacques a reconnu la défaite en Guinée en annonçant la vente de ses intérêts à Simandou au chinois Chinalco à hauteur de 1,3 milliards de dollars.

Rio Tinto a justifié sa décision par les coûts énormes de développement du projet dans un environnement plus faible des matières premières. Mais il y a aussi le sentiment que des problèmes légaux et politiques répétés ont simplement rendu le projet trop difficile.

Source : The Australian Financial Review Magazine, 11/11/2016 (c’est le plus important quotidien économique d’Australie)

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La réaction officielle du gouvernement de Guinée :

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La réaction des médias français (elle dort l’AFP ?) : rien…

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Ils se bougent plus en Guinée :

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Source: http://www.les-crises.fr/guinee-corruption-un-autre-scandale-qui-passe-inapercu/


Etats-Unis : pourquoi Donald Trump mise tout sur la finance dérégulée, par Romaric Godin

Friday 18 November 2016 at 00:01

Source : La Tribune, Romaric Godin, 14/11/2016

Donald Trump veut déréguler la finance. Une façon utile de faire de la croissance, mais un jeu dangereux. (Crédits : MIKE SEGAR)

Donald Trump veut déréguler la finance. Une façon utile de faire de la croissance, mais un jeu dangereux. (Crédits : MIKE SEGAR)

En faisant de la dérégulation financière et de son complément les baisses d’impôts sa priorité, le nouveau président des Etats-Unis veut doper rapidement la croissance. Mais c’est un jeu risqué qui pourrait préparer la prochaine crise en oubliant de régler les questions essentielles des inégalités sociales et territoriales et de la baisse de la productivité.

Le président élu des Etats-Unis, Donald Trump, a donc désormais une priorité : la dérégulation bancaire. C’est du moins ce qu’il a affirmé vendredi 11 novembre dans un entretien au Wall Street Journal en évoquant des modifications substantielles à la loi Dodd-Frank, cette loi qui a établi des régulations en 2010 au secteur financier pour tirer les leçons de la crise de 2007-2008. Les valeurs bancaires ne s’y sont pas trompées et ont fortement progressé en Bourse depuis l’élection du milliardaire à la Maison Blanche le 8 novembre dernier.

Se réconcilier avec le parti Républicain

Il peut sembler pour le moins paradoxal que celui qui avait fustigé durant la campagne les liens entre Hillary Clinton et Wall Street devienne, à peine élu, le champion de la finance. Mais, en réalité, Donald Trump ne s’est jamais caché de vouloir en finir avec la régulation financière. En réalité, il n’a guère le choix. Elu du parti républicain, mais choisi de facto contre le parti républicain et sur un programme qui tranchait avec la majorité de ce parti, il va devoir construire dans les premiers mois de son mandat l’unité de ce parti afin de pouvoir compter sur la majorité du Congrès. Or, un des points essentiels de la paix avec le pouvoir législatif sera la question budgétaire. Si Donald Trump a pu, pour convaincre les populations fragilisées de la Rust Belt, tenir un message keynésien de relance, ce message ne reflète nullement le rapport de force au sein du parti républicain.

Un plan de relance très incertain

Donald Trump aura clairement du mal à financer par le déficit des dépenses publiques supplémentaires. Les seuls dérapages budgétaires que les Républicains accepteront seront ceux finançant les baisses d’impôts. Ce seront donc ces baisses d’impôts qui auront la priorité et, partant, les dépenses publiques seront nécessairement serrées. Le plan de relance des infrastructures de 1.000 milliards de dollars devra donc attendre. Le programme de Donald Trump ne s’en est jamais caché : ce programme doit être financé par les recettes supplémentaires récoltées par l’accélération des forages pétroliers et par la réduction fiscale accordée aux entreprises qui rapatrient leurs bénéfices aux Etats-Unis. Tout ceci incite à la prudence sur la réalité d’un tel plan qui, de surcroît, à l’image du fantomatique plan Juncker en Europe, doit s’appuyer sur l’investissement privé. Le plan de relance à la Trump promet donc d’être lent et pas forcément utile : dans ce type de plan, les investissements se concentrent sur les projets les plus rentables qui auraient pu être financées par l’argent privé.

Tout miser sur la croissance

L’impact sur la croissance de ce plan s’annonce donc faible, du moins en début de mandat. Or, Donald Trump a besoin de croissance pour remplir les caisses de l’Etat et asseoir son pouvoir sur le Congrès et dans l’opinion. Son modèle de ce point de vue doit être George Bush Junior, lui aussi élu en 2000 malgré une majorité relative de voix face à Al Gore, mais qui a gagné (dans le contexte très particulier néanmoins de l’après-11 septembre) une large popularité par la suite. Or, pour créer rapidement de la croissance, la formule utilisée pourrait être la même que dans les années 2000 : déréguler la finance. Donald Trump explique qu’en amendant la loi Dodd-Frank, il favorisera le crédit, notamment envers les plus fragiles. C’est exactement la logique qui a conduit à la crise des subprimes. Le crédit a été utilisé comme levier de croissance de substitution au creusement des inégalités.

Revenir à l’avant-crise

En baissant les impôts et en dérégulant la finance, Donald Trump espère revenir à l’avant-crise en termes de croissance. Les baisses d’impôts viendront alimenter encore les flux financiers et la spéculations et doper les bénéfices des banques.Son idée serait alors que les recettes issues de cette croissance portée par la finance viennent remplir les caisses de l’Etat fédéral pour financer le plan de relance des infrastructures. La logique est belle sur le papier et on comprend l’engouement des opérateurs boursiers qui rêvent tous d’un retour au printemps 2007, lorsque la bulle financière était à son apogée et qui correspond à leur âge d’or. Mais est-elle réaliste ? Rien n’est moins sûr. L’histoire montre que le développement tiré par le secteur financier ne réduit guère les inégalités, tant sociales que géographiques. Surtout, elle ne conduit guère à des investissements raisonnés, mais souvent au contraire à un sous-investissement dans le domaine productif. L’essor de la dérégulation financière dans les pays développés s’est accompagné d’un ralentissement de l’investissement et de la productivité.

La logique du parti Républicain plutôt que la régulation financière

Un protectionnisme possible en comptant sur la finance ?

Fuite en avant

Leçons pour l’Europe

Lire la suite sur : La Tribune, Romaric Godin, 14/11/2016

Source: http://www.les-crises.fr/etats-unis-pourquoi-donald-trump-mise-tout-sur-la-finance-deregulee-par-romaric-godin/


Lundi 28 novembre : Rencontre sur le thème “Quel avenir dans le monde de Trump ?”

Thursday 17 November 2016 at 20:55

Vu le succès des premiers Afterworks, et pour échanger par exemple sur le Brexit, je propose aux Franciliens de nous retrouver pour prendre un verre le lundi 28 novembre à partir de 19h30, dans le quartier des Halles.

L’idée est de faire connaissance, de discuter du blog et de l’actualité – en particulier sur l’actualité américaine… -, de répondre à vos questions, et surtout de faire se rencontrer la communauté qui s’est créée, pleine de gens sympathiques…

 

Les inscriptions, c’est ici. 

 

Rendez-vous donc de nouveau au Café Paris Halles – Adresse : 41 Boulevard de Sébastopol, 75001 Paris – Métro Châtelet/Les Halles, ou bus 69 – Téléphone : 01 40 26 49 19 (1 conso obligatoire pour le bar svp)

En espérant vous y croiser…

Amitiés

Olivier Berruyer

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Source: http://www.les-crises.fr/lundi-28-novembre-rencontre-sur-le-theme-quel-avenir-dans-le-monde-de-trump/


[Présidentielle USA] Comment l’argent a voté

Thursday 17 November 2016 at 01:00

Après l’analyse de l’orientation des médias durant la campagne, voici aujourd’hui l’analyse de… l’argent.

Nous allons nous intéresser aux dons reçus par Trump et Clinton pour la campagne.

Pour mémoire, suite à une décision de la Cour suprême, les dons des personnes physiques et des entreprises ont été déplafonnés (au nom de la “Liberté d’expression”…).

Comme il y a une grande transparence aux États-Unis, on dispose d’informations publiques assez détaillées sur les donateurs (synthétisées par exemple par le site OpenSecrets.org)

Voici donc la synthèse partielle :

dons-2

Clinton a donc eu 70 % du financement total, dont 76 % du financement des entreprises, et 87 % de celui des riches…

Je remets :

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Pour être précis, voici le détail :

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On notera au passage que Trump a mis 56 M$ de sa poche, et Hillary 1 M$.

Rappelons que c’est ce qu’Hillary Clinton a touché en 5 conférences à des banquiers, et sachant que les Clinton ont gagné en “conférences” 140 millions d’euros en 14 ans dont 25 millions depuis 2014…

Voici rapidement ce que cela donne pour les dépenses :

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125 M$ pour les médias pour Clinton, 30 M$ pour Trump…

Voici ce que cela donne pour les entreprises (qui financent souvent par une association dédiée appelée Super-PAC) :

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Le seul gros don, 15 M$, vient du PDG du fonds d’investissement Renaissance Technologies (le plus rentable du monde), James Simons, 24e fortune mondiale – mais cela compte peu, car Simons indique que c’est une responsabilité des milliardaires de financer la vie politique… et il a donné exactement la même chose à Hillary Clinton… Dont voici le détail :

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Éloquent, non ?

Source: http://www.les-crises.fr/presidentielle-usa-comment-largent-a-vote/