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Actu’Ukraine 01/07/2015

Wednesday 1 July 2015 at 00:24

Merci à toutes celles et tous ceux qui ont participé à cette Actu’Ukraine !

 

ACTU’UKRAINE DU 22 AU 28 JUIN 2015

 

 PREMIER FOCUS DE LA SEMAINE : LA GUERRE UKRAINIENNE CONTRE LES ENFANTS

Attention certaines images sont difficiles à supporter. 

 

• En Novorussie. Quelques images et vidéos qui se suffisent à elles-mêmes.

 

11 juin 2015 :  Enfants du Donbass et mort de Minsk 2  (Attention certaines images sont dures à supporter : youtube)

 

9 juin 2015 : Donbass.  La plus importante vidéo  [sous-titres français] (youtube, video originale : youtube)

 

Ce qui renvoit pour les russes, biélorusses et ukrainiens à cette photo iconique de la seconde guerre mondiale, prise fin juin 1941, quelque part dans le sud-ouest de l’URSS, peu après le début de l’invasion nazie (pravmir.ru).

 

Et les Cyber Berkut de faire le parallèle entre les massacres de Volhynie et la guerre civile au Donbass (Attention, image dure : cyber-berkut.ru)

 

Le 1er juin, jour des enfants, des réquiems ont été célébrés dans toutes les églises relevant de l’église orthodoxe d’Ukraine (orthodoxie.com).

EXTRAIT D’ACTU’UKRAINE DU 9 JUIN 2015  (les-crises.fr)

• Le jour international des enfants à Donetsk.  Minute de silence en mémoire des enfants morts au Donbass sur l’Avenue des Anges  (ridus.ru à 15 h 35).

 

• En Ukraine. L’endoctrinement systématique des enfants a commencé quasiment tout de suite après le changement de régime en février 2014. En septembre 2014, les enfants des écoles de Slaviansk reconquis par l’armée ukrainienne étaient obligés de chanter chaque jour l’hymne ukrainien (27 09 2014  ridus.ru, news de 10 h 46) : “A Slaviansk, qui était récemment encore le principal symbole de la résistance du Donbass, on poursuit une “ukrainisation” active. Dans les rues du centre défilent sans arrêt les participants de ce qu’on appelle “L’assemblée du peuple”. On pousse les enfants à se rendre à l’école vêtus de la “wishiwanka”, la chemise traditionnelle décorée“. En octobre 2014, sortait un livre destiné aux enfants entre 4 et 6 ans. Il s’appelle  «Histoire de Maïdan» , publié à Lviv / Lvov aux éditions du Vieux Lion (Издательствo Старого Льва) (Histoire de Maïdan, par Khristina Loukashcchouk, 2014 36 pages). En novembre 2014, les députés du Conseil de l’oblast de Ternopol avaient proposé de rendre obligatoire dans les écoles une discipline nommée “Gestion de l’Ukraine” (22 11  2014  ridus.ru/ à 16 h 16, ukranews.com) :  “Nous estimons que les Ukrainien, sur la terre de leur patrie, ont le droit à une éducation ukrainienne nationalisée – mais cela signifie avoir un droit sur l’avenir du gouvernement du pays”, est-il dit dans leur déclaration. Les députés proposent de faire entrer dans les établissements scolaires l’obligation d’enseigner une discipline nommée “Gestion ukrainienne”, pour apprendre à se connaître soi-même et prendre une place d’honneur parmi ceux qui comptent dans la civilisation mondiale.”

Sans compter les défilés avec ou sans salut nazi dans les cours d’école (youtube)  ou les jeux style “si tu sautes pas sur place tu es un russe !”… ou encore les séances d’intimidation musclée d’adolescents (youtube).

 

6 octobre 2014 : Ukraine – Bataillon d’enfants ? (youtube)

 

30 juin 2014 : Deputy of Ukraine Pavel Kirilenko torture Streamer Vlad 16 years (youtube)

 

Plus près de nous, une vidéo tournée sans doute par des parents  où une toute petite fille, un vrai couteau à la main, crie “Sieg Heil et dit qu’elle va poignarder les russes (fortruss, dnr-news.com, youtube)…

22 juin 2015 :  Полный п…..ц ,малышка зигует и собирается резать русню!!!! (une fillette fait le salut nazi en disant “Sieg Heil” et fait le geste de donner un coup de poignard)  (youtube)

 

- (In Russian) Marianochka, will you stab the Russians?

(in Ukrainian) What will you do?

- (In Russian)  Yes! I will stab the Russians! I will stab the Russians! Zig Heil! Zig  Heil! I will stab the Russians! I will stab the Russians!

 

• Dans l’UE.  L’art des caricatures politiques d’avant la première guerre mondiale ne s’est pas éteint. Voilà ce qu’on trouve dans un livre de classe pour lycéens, de nos jours, aux Pays-Bas (rt.com, russia-insider.com).

 

L’image en elle-même date de janvier 2014, donc en pleine opposition Russie contre UE/Etats-Unis/OTAN avant le coup d’état de février 2014 (nrc.nl).

 

 

Dans le même livre, on trouve une carte du monde où on apprend que l’Ukraine est plus démocratique que la Russie et autant que l’Inde ou l’Afrique du Sud.

 

24 juin 2015 : Dutch textbooks teach schoolchildren Russia is a monster (youtube)

 

 

SECOND FOCUS DE LA SEMAINE : CONTACTS DIPLOMATIQUES TÉLÉPHONIQUES ET LES CURIEUSES PRIORITES JOURNALISTIQUES DE LA BBC

• La diplomatie du téléphone.  Cette semaine, lundi 22 juin, Poutine, Merkel et Hollande se sont parlés au téléphone sans que grand chose ne filtre (kremlin.ru).

 Telephone conversation with Angela Merkel and Francois Hollande (http://en.kremlin.ru/events/president/news/49749)

Vladimir  Putin had a telephone conversation with Federal Chancellor of Germany  Angela Merkel and President of France Francois Hollande.

June 22, 2015   17:20

The three  leaders exchanged views on the crisis in southeast Ukraine and the implementation of the Minsk Agreements of February 12, 2015.  In particular, they shared their thoughts in light of the upcoming Normandy Format  (Russia, Germany, France and Ukraine) foreign ministers’ meeting in Paris  on June 23, and the latest meetings of the Contact Group and its working sub-groups  in Minsk.

Mr  Putin stressed once again the need for the Ukrainian forces  to immediately end their firing against settlements in the Donbass  region, and for activation of the political settlement process,  resolution of constitutional reform issues, and rebuilding the social sector and the economy  in the southeast regions.

 The three leaders agreed to continue their personal contacts.

 

Le lendemain, une réunion au format “Normandie” (Franc, Allemagne, Ukraine et Russie) avait lieu à Paris sur fond de scandale des écoutes américaines des présidents français. Lavrov a fait une déclaration à l’issue de cette rencontre (mid.ru).

Sergey  Lavrov’s comments and answers to media questions after the Normandy  format foreign ministers meeting in Paris, June 23, 2015 (http://www.mid.ru/brp_4.nsf/0/462CC1AB706C3E8343257E6E00351233)

We have held a new round of  the Normandy format talks between the foreign ministers of Russia,  Germany, France and Ukraine. We discussed the implementation of the  Minsk Agreements. Also, the Russian President had a telephone  conversation with the French President and the German Chancellor  yesterday, during which they talked about the key aspects of our work at  this point. As you probably know, meetings of the majority of  Trilateral Contact Group’s working subgroups were held in Minsk today. 

The most important thing we  noted was that the Package of Measures approved in Minsk on February 12  remains valid as a package, and that we need to implement all of its  provisions, though not necessarily based onthe implementation of each  other, but working towards progress on each of the provisions of the  Package of Measures.

Second and very  important as well, we spent a long time discussing an issue on which our  leaders also focus, specifically, the development of direct dialogue  between Kiev, Lugansk and Donetsk on the implementation of all the  provisions of the Minsk Agreements without exception. This concerns the  military-political sphere, security, the economy and humanitarian  issues, and, last but not the least, political reforms. 

We pointed out that  although it is very important to keep moving in all areas, the current  crucial task is to bring about military stability, stability in  security. Unfortunately the number of ceasefire violations has  increased. The sides are also violating the commitment on the withdrawal  of heavy weaponry. In this regard we agreed that the working subgroup  on security, which was created in the framework of the Minsk process,  should adopt decisions without delay to demilitariseShirokino, to  preclude ceasefire violations, to strengthen monitoring along the entire  length of the line of contact, and to coordinate an agreement to  withdraw not only weapons over 100mm in calibre, as was agreed to in  Minsk, but also weapons of less than 100mm from the line of contact. 

We believe that we must  support the achievements reached in this area at the Joint Centre for  Control and Coordination (JCCC). The JCCC was created at the request of  the Ukrainian President and includes Russian and Ukrainian military  personnel and also Donetsk and Lugansk representatives. The coordination  of these achievements has reached the final stage, with only  sometechnical issues to beagreed upon. We proposed that these agreements  be approved at the next meeting of the working subgroup on security.  The idea is that OSCE observers should cooperate with JCCC  representatives to monitor the proposed demilitarisationof Shirokino and  the enhanced monitoring of the entire length of the line of contact,  which means that the OSCE will work with the military representatives  fromRussia, Ukraine, Donetsk and Lugansk.

I want to talk about  our shared resolve to prevent apossible failure to implement the Minsk  Agreements. Our meeting today clearly indicated the participants’  understanding of the danger of certain forces attempting to push the  situation towards a military scenario. The Normandy format foreign  ministers have firmly spoken in favour of strengthening efforts to  implement the Minsk-2 agreements and to prevent a military scenario. 

We also agreed that the  Contact Group and its working subgroups should redouble efforts and  coordinated a schedule fortheir future meetings. Heidi Tagliavini ceded  her duties of coordinating the Minsk process on behalf of the OSCE to  Austrian diplomat Martin Sajdik, who was appointed to this position  yesterday by the OSCE Chairperson-in-Office, Ivica Dacic. Russia  welcomes this appointment and has expressed hope that Mr Sajdik will  take over from Ms Tagliavini and will work consistently towards full and  strict compliance with the Package of Measures coordinated in Minsk on  February 12.

Question:Recently  it looks like Minsk-2 has beenfalling apart because of the increased  military confrontation in eastern Ukraine. Did the ministers think  Minsk-2 was unravelling before their very eyes?

Sergey Lavrov:As  I said, it appears that certain forces are trying to undermine this  process. I will not name names, but theseforces do exist. Many people  would prefer a military scenario for a number of reasons. Many people  don’t want the situation to stabilise;they want the instability to  increase [in Ukraine]. I can tell you responsibly that today the four  ministers have firmly spoken against these attempts and for keeping  Minsk-2 as the foundationof our efforts in Ukraine. My colleagues from  Germany and France pointed out that there is no alternative to Minsk-2.

Question:Have you reached a practical agreement?

Sergey Lavrov:The  Normandy format was not created to settle the Ukrainian crisis. It was  created to support, as the February 12 Minsk Agreements say, the  implementation of these agreements signed by Kiev, Donetsk, Lugansk, the  OSCE and Russia. The Normandy format cannot do what the conflicting  sides must do. We can only send political signals, considering the  combined political weight of the four countries and our ability to  influence developments. But the sides on the ground should take these  signals into account. 

I hope we’ll use all  opportunities at our disposal to convince the sides to strictly comply  with the Minsk Agreements, primarily to stop shelling populated areas  and to refrain from other actions that can result in the death of  civilians and the destruction of civilian infrastructure, as well as to  implement the Minsk Agreements as a package. President Vladimir Putin  spoke about this with Chancellor Angela Merkel and President  FranсoisHollande over the phone yesterday. The necessary atmospherefor  thefull and honest implementation of the Minsk Agreements cannot be  created without political reform, which includes amending the  constitution, without coordinating a model for local elections with  Donetsk and Lugansk and without giving them special status, without  implementing Kiev’s commitment to adopt a law on amnesty, to defreeze  economic relations with Donetsk and Lugansk, to settle the humanitarian  issues, pension payments and social benefits. 

Question:What was the focus of your meeting withLaurent Fabius? Did you talk about the seizure of Russian accounts in France?

Sergey Lavrov:Yes,  we discussed this issue, among other things. We also talked about the  joint projects that provide for exchanging exhibits. We pointed out that  the illegal attempts to seize Russian state property would not  strengthen bilateral relations. I thought that our French colleague  shared this view. Anyway, we saw a desire to avoid making moves that  could complicate our relations. 

But we mostly focused  on the Middle East, with an emphasis on Syria. We emphasisedthe need to  accelerate the search for a political solution based on the Geneva  Communique of June 30, 2012, which says that the crisis must be settled  by the Syrians themselves on the basis of mutual consent. We also  discussed the Middle East settlement in view of the Palestinian-Israeli  conflict and taking into account French Foreign Minister Laurent  Fabius’s visit to the region several days ago. We also share the belief  that this decades-old conflict must not be left unsettled, because itis  fostering extremist sentiments and helps terrorists recruit new  supporters. We agreed that the political process in the region must  resume as soon as possible. 

Question:WikiLeaks wrote today that the United States tapped the phones of three French presidents. 

Sergey Lavrov:I  haven’t seen these reports yet, but I wouldn’t be surprised. And then, I  can tell you that microphones in the French Foreign Ministry  unexpectedly went off and on several times today.

 

Plus tard dans la semaine, le vendredi 26 juin, Poutine a appelé Obama (kremlin.ru). Là aussi, pas grand chose n’a filtré, mais cela a eu des retombées médiatiques :

 

En plus des dossiers en cours (Daech, Syrie, Irak, Iran, Arménie, Grèce, Ukraine,…), deux raisons potentielles pour ce coup de fil particulier et inattendu sont le déploiement d’armes lourdes américaines en Europe de l’Est et les rumeurs d’armes nucléaires en Ukraine.

Un peu avant dans la semaine, le mardi 23 juin, le jour de la réunion “Normandie”, les Etats-Unis avaient décidé de déployer des armes lourdes dans sept pays d’Europe de l’Est. De manière temporaire bien sûr (lemonde.fr)… Sans surprise, la Russie n”était pas “contente” (zerohedge) et l’avait fait savoir en annonçant le déploiement de batteries de missiles anti-aériens S-400 le long de sa frontière ouest (sputniknews)… Et  le lancement de 672 satellites de géo-localisation entre 2017 et 2019 (sputniknews). Là, ce sont les Etats-Unis qui ne sont pas “contents” (zerohedge). Une pure logique de guerre froide et de course aux armements des deux côtés en somme…

Le 25 juin, les services secrets allemands tirent la sonnette d’alarme sur une possible stratégie ukrainienne d’acquérir des armes nucléaires (fortruss). De son côté, l’ambassadrice américaine, Bonnie D. Jenkins (state.gov), coordinatrice des programmes de réduction des menaces (Threat Reduction Programs : state.gov) se rend à Kiev les 25 et 26 juin 2015 pour discuter “de la façon d’éviter la prolifération des armes de destruction massive” (sputniknews).

En prime, il y a aussi l’accumulation en cours de troupes et d’armes lourdes ukrainiennes le long de la frontière avec la Transnistrie (sputniknews).

 

Telephone conversation with President of the United States Barack Obama (http://en.kremlin.ru/events/president/news/49768)

Vladimir Putin had a telephone conversation with President of the United States of America Barack Obama.

June 26, 2015   01:20

In particular,  the two leaders discussed the Ukrainian crisis and the fulfilment  of the Minsk Agreements. The Presidents agreed that US Assistant Secretary of State Victoria Nuland and Russian Deputy Foreign Minister  Grigory Karasin will be in contact to discuss implementation of these  agreements.

Significant attention was given to a set of issues pertaining to counter-terrorism efforts, particularly the spread of the Islamic State’s influence in the Middle East. Vladimir Putin and Barack Obama agreed to instruct Russian Foreign Minister Sergei Lavrov and US Secretary of State John Kerry to hold a meeting to discuss this issue.

 In addition, the presidents of Russia and the United States had an extensive discussion of current issues in bilateral relations. They also engaged in a detailed exchange of opinions concerning the situation in Syria and touched on settling the issue of the Iranian nuclear programme.

 

19 janvier 2015 : Infographie des commandes d’armement russe en 2015 (tassgraphics.ru)

 

• Les curieuses priorités journalistiques de la BBC : l’interview de l’ex président Yanukovich. La BBC a interviewé l’ex-président ukrainien le 22 juin 2015 (bbc). Il en ressort que Yanukovich “accepte une part de responsabilité” dans les morts du Maidan et qu’il aime les autruches… La presse russe a scruté l’intégralité de l’interview publiée uniquement en russe sur le site de la BBC, comme ce fut le cas avec celle de Porochenko (bbc).

22 juin 2015 : Viktor Yanukovych on Kiev, Crimea and Putin (en russe) (bbc)

Cliquez sur l’image pour voir la video:


Sputnik News en particulier s’amuse des coupes et des priorités journalistiques de la BBC (russia-insider, sputniknews, sputniknews), ce à quoi la BBC essaye de se défendre en disant que les propos sur la Crimée et le Donbass ne sont pas “journalistiquement intéressants” (sputniknews). En voici tout de même quelques uns :

“In the last year and a half there has been war. In the last  year and a half Ukraine lost Crimea and Donbass and thousands of human  lives. They’ve broken up our country. They’ve drawn the whole world  into this conflict: Europe, Russia and the United States.”

 “The Maidan scared Crimea and Donbass and the southeast of Ukraine  with its right-wing radical outlook. That was the main issue which  forced the population of Crimea to build up the units of self-defense  and defend themselves. And the Supreme Council of the republic made a  decision to hold a referendum,” 

 “If I hadn’t done it then, quite likely we  would have had in Crimea something very similar to what we now have  in Donbass,” he said. “Probably, in some other regions as well; we would  have had a full scale civil war.” “What is better for the population of Crimea? War or Peace?”

 “In any country, in any part of the world  population would choose peace. That is why when Crimea was holding a  referendum, people were scared for their future, for the future of their  children. And Crimea did not want to take up the rightwing radical  ideology Maidan was bringing onto them.”

“What is going on now in Donbass is a genocide. Genocide of the  population of Donbass. And it is being committed by those who brought  in tanks and guns to shoot at the peaceful civilians,”

 A ces propos, la BBC a préféré ceci :

Si le but était de rendre internationalement Yanukovich ridicule, c’est gagné. Les shows comiques américains ne l’ont pas raté (youtube)…

29 juin 2015 : John Oliver – Yanukovych’s Ostriches (youtube)

Cliquez sur l’image pour voir la video:

 

RETOUR SUR LA SEMAINE DERNIERE

• Retour sur la semaine dernière : les crimes du Bataillon Tornado. Vidéo de synthèse de Vincent Parlier (youtube).

23 juin 2015 : Révélations choc TV ukrainienne – Barbares utiles devenus gênants (+16)  (https://www.youtube.com/watch?v=iP3DaGfPnFg).

 

• Retour sur la semaine dernière : Les sanctions. Comme il fallait s’y attendre, l’UE a décidé, le 22 juin, de prolonger les sanctions de six mois (lesechos.fr, lefigaro.fr, rferl.org, tdg.ch, lavoixdunord.fr, sputniknews, sputniknews, reuters, rt.com). Cette date du 22 juin n’est pas anodine. Il s’agit de la date anniversaire du déclenchement de l’opération Barbarossa wikipedia), l’invasion de l’URSS par les armées nazies en 1941, une des pires guerres, sinon la pire que l’URSS (et par extension la Russie) ait jamais connu (fortruss) ! Soit l’UE fait preuve en la matière d’une très subtile intelligence dans le maniement des symboles, soit elle est incroyablement inconsciente et dramatiquement maladroite dans sa diplomatie… En tout cas, cette date n’a pas échappé aux Russes (fortruss). Ce qui n’a pas non plus échappé aux Russes et à Alekseï Pouchkov, président de la commission des Affaires étrangères à la Douma (wikipedia) en particulier est que l’UE a prolongé les sanctions mais elle ne les a pas durcies, contrairement à ce que voulaient plusieurs pays (vz.ru). Aux Etats-Unis, la Chambre de Commerce n’envisage pas non plus de durcissement des sanctions anti-russes (sputniknews).

Le 24 juin, la Russie prolonge d’un an, comme elle l’avait annoncé,  les sanctions économiques qu’elle avait décidées en réponse à celles imposées par les Etats-Unis et certains pays de l’UE  (lb.ua, (lb.ua/).  LB.ua titre : “Президент РФ распорядился продлить продуктовое эмбарго” (“The President of the Russian Federation has ordered to extend food embargo”), par “food” il faut comprendre les produits issus de la production agro-alimentaire de l’UE.

Un dessinateur humoristique russe a exprimé ce que la Russie en pense (ria.ru, ria.ru). Sur ce sujet, RT a interviewé la député de Die Linke, Sahra Wagenknecht (youtube via russia-insider).

 

22 juin 2015 : ‘Sanctions show no positive results, they harm Russia, EU economies’ – Germany Left Party VP  (youtube)

 

• Retour sur la semaine dernière : Porochenko contre le SBU.  Samedi 27 juin, un responsable du SBU est arrêté pour trahison (vzgliad.ru). Le fils du directeur du SBU par intérim, Vasyl Hrytsak, a mené des interrogatoires contre des activistes de Maidan du temps de Yanoukovitch et n’a pas été inquiété par la justice du nouveau régime (kyivpost, youtube).

 

25 janvier 2014 : Суд над автомайданівцями: 17 арештували – 2 під домашній арешт   (youtube)

 

L’ex chef du SBU ayant menacé de sortir le dossier de la réunion de Vienne, la réponse de Porochenko est de saisir 86 biens immobiliers/industriels en Ukraine appartenant à l’oligarque Firtash et organisateur de la dite réunion de Vienne (unian.net).

 

• Retour sur la semaine dernière : Porochenko contre le SBU : les assassins de Oles Buzina. Sur les trois suspects arrêtés la semaine dernière, l’un d’eux a été lavé de tout soupçon, un second (Andriy Medevko) est maintenu en détention et le troisième a été relâché sous caution (russia-insider, kyivpost). Cette caution s’élève à 5 millions UAH (230 000 USD) payée par Oleksiy Tamrazov, propriétaire du conglomérat Média Group et l’un des hommes d’affaires les plus riches du secteur pétrolier et gazier en Ukraine (unian.ua). Le bénéficiaire, Denys Polischuk, a été accueilli en héros à sa sortie de prison (colonelcassad, sputniknews)

 

• Retour sur la semaine dernière : Porochenko contre l’Ukraine.  Le Président de la Cour d’appel est notamment accusé d’avoir interféré dans la répartition des dossiers entre les juges (unian.net). Et cela continue ! Vendredi, le Parquet prépare des demandes de levée d’immunité parlementaire pour de nombreux députés (gordonua.com) et Porochenko déclare qu’”il est nécessaire de limoger plus de 300 juges” (gordonua.com).

 

• Retour sur la semaine dernière : Le blocus ukrainien contre le Donbass. Les autorités des deux Républiques populaires de Lougansk et de Donetsk se veulent rassurantes. Selon le ministre de l’économie de la DNR/RPD, Evgueni Samokhinoï, le blocus de Kiev a eu pour conséquence le développement de la production de saucisson, de conserves de viande, de pâtes, de gruau (graines de céréales grossièrement moulues et sans enveloppe, qui permet de préparer la kacha, l’alimentation de base des paysans russes d’autrefois -généralement à base de sarrasin grillé- qui est principalement consommée au petit-déjeuner) et d’eau minérale (ria.ru). Difficile de savoir s’il s’agit de fait ou de propagande…

 

• Retour sur la semaine dernière : Les observateurs de l’OSCE interviewés sur le lieu d’un bombardement ukrainien promettent de le signaler dans le prochain rapport (youtube)

20 juin 2015 : Donbass,  Krasnoarmeiskoe , OSCE ENFIN piégée..? [sous-titres français]   (youtube)

Donc, à l’arrivée dans le rapport “Latest from OSCE Special Monitoring Mission (SMM) to Ukraine based on information received as of 19:30 (Kyiv time), 21 June 2015 “ (osce.org), cela donne ça : “In “DPR”-controlled Krasnoarmiiske (32km north-east of Mariupol), the  SMM analysed seven impact craters. The SMM assessed that the craters  were consistent with mortar fire (152mm) originating from a  west-north-westerly direction. “. Krasnoarmisske ressemble à cela (google.ru).

 

 

 

D’autres observateurs de l’OSCE avaient été pris à parti en mai 2015 par la population d’un village situé au sud de Krasnoarmisske, Sakhanka, au sujet de bombardements également (actu’Ukraine du 19 mai 2015 :  les-crises.fr).

 

EXTRAIT DE L’ACTU’UKRAINE DU 19 MAI 2015  (http://www.les-crises.fr/actu-ukraine-19-05/)

• Scène de vie ordinaire sur la ligne de front : Les habitants de Sakhanka. Azov les bombarde avec des armes lourdes (qui auraient dû être retirées selon les accords de Minsk) et l’OSCE se borne à constater la taille des cratères et a écrire des rapports (osce.org). Les habitants craquent. La routine d’une guerre où la population est la cible principale pour les bataillons nationalistes ukrainiens (youtube). Sakhanka est située près de Marioupol.

 

Dans le rapport correspondant de l’OSCE cela donne ça (osce.org) :



 

 • D’ailleurs, Sakhanka a été de nouveau fortement bombardée le 24 juin par l’artillerie (mortiers et obusiers). L’OSCE a constaté l’origine des tirs comme venant du sud-ouest, où sont basés les bataillons “Azov” et “Donbass”. Un civil a été tué, sa femme a été blessée. Extrait du rapport  de l’OSCE daté du 25 juin :The SMM travelled to Sakhanka (“DPR”-controlled, 24km east-north-east of Mariupol) to verify media reports of shelling having occurred on 24 June. On Mira Street and 60 years of October Street, the SMM analysed 19 craters based on which it assessed that the impacts were caused by long range 82mm mortars fired from a south-westerly direction. The SMM observed three private houses destroyed as a result of direct impacts and an additional six damaged. The SMM observed blood marks in a courtyard and later confirmed with the Novoazovsk hospital that one man had died and one woman was wounded in the shelling.(osce.org).

 

 

LUNDI 22  JUIN  2015

• Il y a un an en Ukraine : Le siège de Slavyansk.

1 – 9 juin 2014 :  Roses Have Thorns (Part 12) The Siege of Slavyansk I   (youtube)

9 – 17 juin 2014 : Roses Have Thorns (Part 13) The Siege of Slavyansk II  (youtube)

18 – 28 juin 2014 : Roses Have Thorns (Part 14) The Siege of Slavyansk III   (youtube)

29 juin – 7 juillet 2014  : Roses Have Thorns (Part 15) The Fall of Slavyansk   (youtube)

 

• Un haut-gradé ukrainien à la retraite passe du côté des Novorusses.  Je suis le Major General Aleksandr Kolomiyets de l’armée ukrainienne. Mes derniers postes était chef analyste de l’armée ukrainienne et assistant du ministre de la défense ukrainien”. Ces postes remontent à 2012, donc sous l’ancien régime. Le gouvernement ukrainien affirme d’ailleurs que Kolomoiéts a été viré pour incompétence en août 2012 (interfax.ru).

Kolomiyets est donc passé du côté novorusse (sputniknews, fortruss, russia-insider, colonelcassad). Il donne une conférence de presse (youtube) et déclare en substance que, dans sa majorité, le haut commandement de l’armée de Kiev ne soutient pas la poursuite de l’opération dans le Donbass. Selon lui le moral de l’armée ukrainienne est très faible (vz.ru). Selon lui également des centaines de soldats ukrainiens sont déjà passés du côté des insurgés lors de l’ATO (vz.ru). Enfin, il indique que Porochenko se méfie des bataillons de volontaires style Praviy Sektor ou Azov qu’il voit plus comme des rivaux politiques que des alliés (vz.ru).

22 juin 2015 : Ukrainian Defense Ministry official and major-general has defected to the Donetsk (DPR) armed forces   (youtube)

 

“I am Aleksandr Kolomiyets, a major-general of the Ukrainian Armed Force, and my latest position was that of a chief military analyst and aide to  the Ukrainian defense minister,” Kolomiyets told at a press-conference  in Donetsk. He added that he had been the regional military commissar of  the Donetsk Region for the last 19 years.

Kolomiyets also told that he had to evacuate his family from Kiev for fear of persecution by the Ukrainian authorities.

Many of his former fellow servicemen, too, were ready and willing to join the republics, he said.

He  declared his intention to work for the benefit of DPR and shared his opinion of the Ukrainian army’s condition. “The potential of the  Ukrainian army is very low. Mostly, from the standpoint of morale. All  generals and officers who are aware the authorities’ actions are  criminal have no wish to fight the war”. 

Since Kiev launched the  military operation in the southeast of the country hundreds of soldiers  and officers had joined the forces of the Donetsk republic. “I keep no  statistics, but during the operation hundreds of men and officers have  taken the Donetsk Republic’s side and are defending it at the moment. I  can say this with full certainty,” Kolomiyets declared.

He is not  the first senior official of Ukrainian military and law enforcement  agencies who has defected to the militias. Earlier, the former chief of  the Lugansk Customs, Oleg Chernousov and two officers of Ukraine’s  foreign intelligence, and staff members of the Ukrainian embassy in  Paris: the Miroshnichenko brothers (Aleksei and Yuri) returned to  Lugansk to declare their disagreement with Kiev’s policies.

Translation courtesy of Russian Spring (https://www.youtube.com/channel/UCG_P)

 

22 juin 2015 : Пресс-конференция бывших военнослужащих ВСУ перешедших на сторону ДНР   (youtube)

 

Dans cette version complète de la conférence de presse, Kolomiets s’embrouille un peu. Il dit que ça fait déjà 2 ans que dure le conflit (2’23″). Il voulait sûrement dire que c’était déjà la deuxième année de conflit. Effectivement l’article de VZ cité plus haut soulève des points intéressants (vz.ru). Kolomiets n’est pas l’officier actif de super-haut niveau présenté initialement, mais bon, c’est un général-major qui passe côté rebelle ce qui reste très significatif. Selon le wiki russe, un général-major a typiquement 15000 hommes sous ses ordres, ça fait beaucoup d’anciens subordonnés à qui il montre l’exemple.

Kolomiéts parle de plus de 6500 morts depuis le début du conflit (~7′), ce qui est un chiffre officiel mais est loin des 50000 morts évoqués par les services de renseignement allemands.

 

• Parlons au passage des civils disparus.  On parle rarement des quelques 1500 disparus des villes occupées du Donbass (1592 exactement) sur lesquels Lenta a fait un article il y a une semaine (lenta.ru) :  1592 disparus donc, dont 208 depuis le début de l’année. Difficile de savoir s’il s’agit d’arrestations arbitraires, d’exécutions sommaires, de fuite en Novorussie ou de personnes se cachant pour éviter la mobilisation. L’article donne aussi le chiffre officiel de soldats ukrainiens morts : 1675. Encore un autre chiffre différent de celui donné par Kviy Post la semaine dernière.

 

• Début de semaine fracassant à Kiev.  Dans la nuit de dimanche à lundi, une puissante explosion a endommagé un bureau de la banque Sberbank à Kiev (rian.com.ua). La vidéo illustrant l’article montre seulement les policiers examinant les débris. En revanche une vidéo de surveillance montre la dépose de l’engin et l’explosion (youtube). La bombe était puissante, mais elle n’a pas laissé de fragment, il sera donc impossible d’en découvrir la provenance. Selon un activiste, Sergueï Melnichenko. Sberbank est une grosse banque russe, la troisième banque en Europe en capitalisation (wikipedia., sberbank.ru).

 

 21 juin 2015 : Взрыв Сбербанка России в Киеве  22.06.2015 (Explosion of Sberbank Russia in Kiev Ukraine)   (youtube)

 

• Combats fratricides ?  Selon VzGliad, des mercenaires géorgiens du bataillon Azov auraient tué des soldats ukrainiens (vz.ru).

 

• Le Monde selon Nikolaï Patrouchev, secrétaire du Conseil de sécurité russe.  Nikolaï Patrouchev déclare dans une interview à Kommersant : “Les Etats-Unis souhaitent que la Russie n’existe pas en tant que pays car à leur avis elle bénéficie de façon non fondée d’énormes richesses” (vz.ru). VzGliad cite Patrouchev sur le Donbass : “La Russie ne peut pas fermer la frontière avec le Donbass car cela conduirait au blocus de la région” (vzgliad.ru).

 

• Le monde selon Saakashvili. Saakakchvili est étonné par la pauvreté de l’Ukraine qui selon lui est “contraire aux lois de la nature” (unian.net). Saakachvili se plaint du fait que les habitants de l’oblast d’Odessa regardent seulement les Chaînes TV russes et accuse la Russie d’avoir un plan “Bessarabie” dans la région (vz.ru, sputniknews). Plus fort encore, Saakashvili a expliqué que si l’Ukraine suivait une croissance de 4% par an, elle atteindrait le niveau qu’elle avait sous Yanukovich… dans 20 ans (rian.com.ua, youtube, sputniknews, liveleak). En 2014, l’Ukraine a eu une “croissance” de -6,5% contre environ 0 en 2012-2013 (lesechos.fr).

 

 

 15 juin 2015: Саакашвили: через 20 лет по экономическим показателям мы вернёмся к Украине Януковича   (youtube)

Cliquez sur l’image pour voir la video :

 

 

Côté finances, Saakashvili a d’étranges stratégies. Il laisse tomber un poste à  200 000 USD par an aux Etats-Unis pour le poste de gouverneur de la région d’Odessa royalement payé 267 USD par mois (3204 USD par an) (sputniknews) ! Ceci dit, le penthouse qu’il occupait à Kiev est maintenant à vendre pour 1,2 millions USD ou à louer pour 6 500 USD par mois (vesti-ukr.com)…

• Les comptes pas “justes” de Yatseniouk.  Le premier-ministre d’Ukraine, Arseni Yatseniouk, “fait” son Caliméro. Ayant sorti sa calculette, il a déclaré le 21 juin, lors de l’émission hebdomadaire “10 minutes avec le premier-ministre” de la chaîne 112  : “En 2014, les créditeurs privés ont versé à l’Ukraine 9 milliards de dollars, mais l’Ukraine a dû rembourser 14 milliards… Les créditeurs privés ont versé 40 milliards de dollars en trois ans (Ndlr: au régime précédent), mais à nous, le monde a promis 25 milliards de dollars pour les quatre années à venir.” (112.ua). Il fait de plus une drôle de comparaison avec la Géorgie : “En Géorgie, durant les deux années après le changement de gouvernement, ils n’ont pas eu de chauffage”. Sous-entendu : Vous avez de la chance de nous avoir, parce que vous avez eu du chauffage !

 

Design des nouveaux uniformes ukrainiens. Le nouvel uniforme des soldats des FAU (Forces armées ukrainiennes) sera prêt dans trois semaines, a déclaré sur sa page Facebook Youri Birioukov, conseiller du président ukrainien. Du moins, sur le papier. On en est aux galons (facebook, facebook, facebook).

 

 

On voit sur la seconde photo une certaine influence américaine dans les designs.

Il faut espérer que la question du matériau a été cette fois mieux étudiée. En effet, il semble que le matériau des uniformes que reçoivent les appelés actuellement ait une fâcheuse tendance à fondre sur l’homme en cas de contact avec une forte source de chaleur, comme le déclare cette volontaire ukrainienne (elle aussi sur sa page facebook). Selon Elena Mokrentchouk, les appelés reçoivent un uniforme bon marché, et de mauvaise qualité. Résultat : il y a peu de temps, deux soldats ont été brûlés dans leur abri de combat tout simplement parce qu’ils s’étaient assis trop près du poêle de fortune. Des étincelles ont mis le feu à l’uniforme en toile cirée fourni par le ministère de la défense, qui a alors brûlé en grande partie (ridus.ru).

 

 

Il y avait eu des problèmes analogues dès le mois d’août 2014, avec des gilets pare-balles : “Du 21.03.2014 au 30.05.2014, les anciens fonctionnaires haut placés du ministère de la Défense ont organisé l’achat de 17 080 gilets pare-balles de fabrication légère pour la somme de plus de 71 millions de hryvnias”  “Suite à la non-conformité des gilets aux normes de sécurité, au moins 67 militaires des forces armées de l’Ukraine ont reçu des blessures au cou et à l’aine, dont certaines mortelles”, indique le Parquet. Sur un autre sujet, le même parquet a ouvert une enquête criminelle contre des fonctionnaires du ministère de la Défense et de l’état-major général qui avaient retardé la livraison de casques et de gilets pare-balle pour  les militaires participant à l’opération spéciale dans l’est de l’Ukraine. Près de 200 militaires ukrainiens ont été blessés à la tête suite à ce retard de 2,5 mois.” (ridus.ru le 25/09/2014).

 

• “L’économie de l’ombre” en Ukraine…La porte-parole du ministère des finances, Elena Makeevka déclare : “A l’heure actuelle, certains paient des impôts, certains n’en paient pas. Et le nombre de ceux qui n’en paient pas est très élevé. D’après les données du ministère de l’économie, en 2014 (en pourcentage) l’économie de l’ombre s’élevait à 42%. D’après nos estimations, elle est de 67%” (mignews.com.ua, telegraf.com.ua).

 

• La guerre des drones : Vidéo d’un drone ukrainien abattu. Voici la vidéo que les Novorusses ont trouvée dans un drone ukrainien qu’ils ont abattu (youtuberidus.ru à 20 h 34 le 22 06 2013).

 

22 juin 2015 : Видео со сбитого украинского беспилотника    (youtube).

 

• Petite remarque en passant sur l’usage de la langue russe en Ukraine.  Juste un petit détail qui veut tout dire. A la télévision ukrainienne la langue russe est largement majoritaire, y compris sur les chaînes de Porochenko. Certes, la plupart des journalistes parlent ukrainien, mais pas tous, comme le célèbre Schuster. D’un autre côté, les gens qu’ils interrogent, qu’ils soient simples gens ou hommes/femmes politiques répondent en russe, parce que c’est naturel pour eux… On peut aussi citer ce journaliste qui suivait l’incendie du dépôt de produits pétroliers près de Kiev le 9 juin. Il parle en ukrainien pour faire son reportage, une explosion intervient derrière lui et il passe au russe pour faire reculer son équipe…

 

• Rétropédalage lituanien. Le Premier ministre de Lituanie, Algirdas Butkavicius, déclare que l’ambassadeur de Lituanie à Kiev a outrepassé ses pouvoirs en annonçant hier que son pays allait livrer des armes à l’Ukraine (vz.ru).

 

• Entrées en Mer Noire. Deux navires militaires, l’un américain et l’autre français sont entrés hier soir en Mer Noire (vz.ru).

 

• Interview de Xavier Moreau : l’Ukraine est morte (youtube via agoravox.tv)

 

19 juin 2015 : TVL : Xavier Moreau : “L”Ukraine est morte !” (youtube)

 

 

MARDI 23 JUIN 2015

• Un rêve ukrainien qui s’éloigne de plus en plus. Porochenko était revenu du sommet du partenariat oriental les mains vides. La mise en place d’un régime sans visa vers l’UE promis par lui aux Ukrainiens était repoussée. Loin de les alléger, l’UE a décidé de durcir les procédures. A partir d’aujourd’hui, mardi 23 juin, l’obtention des visas Schengen devient donc plus difficile pour les Ukrainiens. Ces visas ne pourront plus être obtenus “par contumace”, c’est-à-dire en fournissant à un tour operator ou à une officine la liasse des documents nécessaires. Le touriste devra se présenter en personne au consulat ou au centre d’établissement des visas et fournir des données biométriques : empreintes digitales et photographie numérisée. Seuls les enfants de moins de 12 ans sont exemptés de la prise d’empreintes digitales (unian.net, unian.info).

 

• Iryna Gerashchenko contre les convois humanitaires russes. La députée Iryna Gerashchenko (parti Oudar, celui de Klitshko, le boxeur et maire de Kiev) s’est à nouveau insurgée contre les convois humanitaires russes, dont le prochain devrait arriver au Donbass en fin de semaine. Elle a participé aujourd’hui à une vidéo-conférence par Skype avec les membres du groupe de contact tripartite créé dans le cadre des accords de Minsk : “Nous avons aussi soulevé la question de la violation par la Russie du droit international avec ses convois humanitaires illégaux….La Fédération de Russie prépare pour la fin de la semaine un trente-et-unième convoi. Nous attendons une réaction du monde à cela. Chaque jour, chaque fois, nous n’oublions pas de clamer ces violations, nous les documentons. Nous parlons de ces violations aussi bien à Minsk qu’à Strasbourg” (unian.net).

D’un autre côté, elle a officiellement déclaré que “l’Ukraine est intéressée à élargir l’aide humanitaire au Donbass et facilitera l’activité de toutes les organisations internationales” (president.gov.ua). Apparemment, tout le monde n’est pas d’accord en Ukraine, puisque le 26 juin, un convoi de la Croix-Rouge a été pris pour cible par des militaires ukrainiens (novorossia.today) : “When the convoy, having already unloaded the cargo, was moving in  the area of  locality Berezovoye, Ukrainian troopers from the block-post  in 4-km distance from the convoy’s route, opened sporadic machine-gun  fire”. 

Sur les convois russes, il convient de noter que UNIAN publiait en mai un article qui expliquait qu’aucune arme n’avait été trouvé dans les quelques 25 ou 30 convois précédents, fait que relatait le service gouvernemental des garde-frontières (unian.net). Le tout premier convoi avait donné lieu à une tension diplomatique inédite depuis des dizaines d’années entre les USA et la Russie. Pourtant, un article du Spiegel avait remis les pendules à l’heure : “Entre-temps, les journalistes ont pu se rendre compte que, derrière les bâches blanches, il n’y a réellement que de la nourriture pour enfants, de l’eau et des sacs de couchage. Et que les hommes en uniforme kaki sont vraiment des chauffeurs routiers qui se soucient avant tout de revenir sains et saufs à la maison. Il était à prévoir que les Russes, en cas de doute, amèneraient le convoi jusqu’à Louhansk sans accompagnement de la Croix Rouge et sans contrôle par les douaniers ukrainiens – tout comme la réaction hystérique du côté ukrainien. Les mots exagérés de “invasion directe” démontrent l’impuissance : Kiev comprend qu’elle ne peut pas stopper ce convoi. Et qu’elle a perdu cette bataille de propagande avec la Russie.” (spiegel.de).

 

• Scène de brutalité policière ukrainienne ordinaire. Video tirée d’un téléphone d’un policier ukrainien (youtube). Vidéo originale par Anatoly Shariy  “О бойце-освободителе” : youtube).

 

23 juin 2015 : Fascistes en Ukraine?? Mais vous rêvez!… [avertissement: images et scènes choquantes]   (youtube)

 

• Le monde selon Yatseniouk. Yatseniouk propose de liquider la police fiscale (vesti-ukr.com), de confier certains services des douanes à des entreprises étrangères spécialisées (gordonua.com) et de légaliser l’industrie des jeux (vesti-ukr.com).

 

• Retour sur la bataille de Debaltsevo : la hauteur 307.5. Témoignage d’un combattant sur les combats pour cette hauteur (colonelcassad).

 

• Interview avec un prisonnier de guerre ukrainien à Lougansk (youtube).

23 juin 2015 : INTERVIEW WITH THE UKRAINIAN WAR PRISONER IN LUGANSK ENG SUBS (youtube)

 

 

MERCREDI 24 JUIN 2015

• Interview de Pavel Goubarev, gouverneur populaire de la région de Donetsk. Texte intéressant qui parle du projet “Novorossia” et de son évolution actuelle (traduction française : novorossia.today).

 

• Le ministre ukrainien de l’écologie,  Igor Shevtchenko, se rebiffe. Igor Shevtchenko, ministre de l’écologie et des ressources naturelles au gouvernement de Kiev, a publié sur le net une déclaration à l’intention du peuple ukrainien, déclaration dans laquelle il dénonce l’attitude de Porochenko à son égard : “Moi, Igor Shevtchenko, j’ai fait mes études à Harvard et Yale, actuellement je suis ministre de l’écologie et des ressources naturelles de l’Ukraine. Je n’appartiens à aucun parti parlementaire. Maintenant je m’adresse au peuple ukrainien. La cause de ce discours, ce sont les représailles politiques exercées contre moi par le gouvernement.

Moi, comme nous tous, je croyais et je crois à l’avenir fort de mon pays, c’est pour cela que je suis venu travailler au gouvernement, qui a été formé, selon l’accord de coalition, sans aucun quota politique. Justement, ce principe sans quota a été annoncé par le premier ministre au moment de ma nomination. Je le souligne : je suis arrivé en tant que professionnel et représentant du public, d’ailleurs, aucun ministre dans le gouvernement actuel n’est arrivé par les quotas.

 En croyant dans les idées de Maidan, en tant que ministre, j’ai commencé la lutte contre la corruption et j’ai ramené à l’état 22 gisements de pétrole et de gaz,qui ont été volés au peuple par la famille de Yanoukovitch. Mais je faisais cela contre la position du gouvernement qui, lui, a des liaisons avec tous les clans ukrainiens et qui protège leurs intérêts !

 Plusieurs fois, les membres de l’équipe de Yatsenuk, les représentants de “Front populaire” se sont adressés à moi avec les propositions de nommer aux postes du ministère des gens corrompus. C’est ainsi que, contrairement à la loi et contre mon avis, le responsable de Service de Géologie a été nommé. Par rapport à moi le gouvernement agit de la même façon que par rapport à Sacha Borovik, Pavlo Sheremet et Oleg Mousiy. Arseniy Yatsenuk a le droit moral de demander ma demission, mais uniquement après avoir exclu du “Front populaire” et ôté le mandat de député à son ami, Mykola Martynenko, celui qui est responsable de corruption à “Energoatom”, et contre qui une enquête judiciaire a été ouverte en Suisse; ainsi qu’à son camarade de parti, Sergiy Pashinskiy, celui qui,  selon les médias, est impliqué dans le vol à l’état de produits pétroliers pour 1,5 milliards UAH, des produits destinés à l’armée. J’ai l”intention de continuer la lutte contre le système de corruption et continuer les réformes dans le domaine dont je suis responsable en tant que ministre.”  (youtube).

 

• Et le cabinet des ministres décide de le limoger.  Auparavant,  le cabinet des ministres l’avait mis sous contrôle pour corruption suite à l’utilisation de l’avion privé du député et propriétaire de business dans l’industrie pétrolière, Alexandre Onischenko. Le ministre est accusé également d’avoir été absent lors de l’incendie du dépôt pétrolier à Kiev (il était en vacances à Nice et Monaco)  (vesti-ukr.com). Lors de la réunion de cabinet des ministres le 24 juin, Arseniy Yatsenuk a proposé à I. Shevtchenko de donner sa démission, ce qu’il a refusé catégoriquement. Alors, Yatsenuk lui a demandé de quitter la réunion. Sur sa page facebook, Igor Shevtchenko qualifie tout cela de “farce politique” et “antre de la justice de moyen âge”. “Toutes les accusations ont été basées sur des suppositions et des avis subjectifs, aucune preuve n’a été présentée aux membres du gouvernement.” ajoute-t-il.

Chevchenko aurait fait 8 voyages a l’étranger en 2015 (youtube). Il travaillerait pour un oligarque ukrainien du nom d’Alexander Onishchenko (glavred.info) et ferait pression en faveur de Akhmetov (informator.su), ce qui est, du point de vue de Porochenko, une bonne raison de le virer.

 

• Un expert américain doute.  Patrick Buchanan ne croit pas que les Etats-Unis soient épaulés par beaucoup de pays membres de l’OTAN dans une éventuelle opération militaire contre la Russie (buchanan.org). Après avoir rappelé les diverses crises dans lesquelles les Etats-Unis ont laissé la Russie faire ce qu’elle voulait dans sa sphère d’influence, Patrick Buchanan – ex-collaborateur à la Maison-Blanche sous Nixon, puis sous Reagan – résume son avis sur les présidents d’alors : “Aucun de ces présidents (Ndlr : Eisenhower, Kennedy, Johnson) n’était enclin à l’apaisement, mais tous respectaient la réalité géophysique que tout défi militaire lancé à Moscou au-delà de la ligne rouge de l’OTAN en Allemagne portait en lui le risque d’une guerre calamiteuse pour des causes qui ne justifiaient pas un tel risque.

Cependant, aujourd’hui, nous sommes en train de risquer un choc avec la Russie dans les Pays baltes et l’Ukraine, là où il n’a jamais existé aucun intérêt vital pour les Etats-Unis, et où notre adversaire possède une supériorité militaire.”

Et plus loin : “A Washington, les faucons du Congrès sont toujours prêts à montrer à Poutine qui est vraiment coriace. Mais en livrant des armes en Ukraine et en envoyant des troupes et des blindés dans les pays baltes, ils ont derrière eux une nation divisée et une alliance atlantique qui ne veut pas prendre part à cette confrontation. A la différence de la crise de Cuba, là c’est la Russie qui possède la supériorité militaire, et un leader qui semble préparé à sauter le pas pour nous doubler. Sommes-nous certains que cette fois, ce sont les Russes qui vont vaciller ?

 

• C’est toujours ça que les habitants du Donbass ne recevront pas sur la tête. Un camion chargé de munitions destiné à l’OAT explose à Poltava (sud-est de Kiev) (glavred.info). Ceci permet de parler à nouveau des arsenaux ukrainiens et donc novorusses. L’immense majorité des armes et munitions employées sont puisées dans les arsenaux positionnés du temps de l’URSS dans les années 60. Les munitions ont donc plus de 50 ans ! Et peuvent se révéler instables (comme peut-être avec ce camion) ou juste non fonctionnelles.

 

• Une info en passant sur les “vieilles” armes. La Russie a saisi des pièces détachées de contrebande pour MiG 21 dans le train allant de Moscou à Odessa (sputniknews). Ces pièces ne sont apparemment pas destinées à l’armée de l’air ukrainienne puisque n’ayant plus de MiG 21 en activité. Pour trouver le destinataire potentiel de cette contrebande, il faut étudier la liste des pays encore utilisateurs de cet avion de combat des années 60 : Angola, Azerbaïdjan, Bulgarie, Cambodge, Corée du Nord, Croatie, Cuba, Égypte, Inde, Libye, Mali, Ouganda, Roumanie, Serbie, Syrie, Viêt Nam, Yémen et Zambie (wikipedia).

 

• Les dépenses de l’OTAN en deux slides. 

 

 

JEUDI 25 JUIN 2015

• Goldman Sachs prévoit le défaut de paiement de l’Ukraine pour juillet (russia-insider, sputniknews). Natalia Yaresko, ministre des finances d’Ukraine, confirme d’ailleurs que le pays se déclarera en défaut de paiement en juillet (pravda.com.ua, leblogfinance.com). Ce qui n’a rien de très étonnant, puisque la dette publique de l’état a atteint fin mai 66,67 milliards de dollars et dépasse les 100% de PIB…

 

• Promenade dans les colonnes des médias ukrainiens :  Oukraïnskaïa Pravda (pravda.com.ua)  :

Mercredi, Zorian Shkiriak, conseiller du ministre de l’intérieur, a annoncé que les forces de Novorussie auraient subi de lourdes pertes dans le secteur de Marinka. Il en a profité pour dire que les combattants de Novorussie étaient obligés de se renforcer avec des cadres russes. Par téléphone à l’antenne de “Kanal 5″, la chaîne télévisée contrôlée par Porochenko, il déclare : “Aujourd’hui, les terroristes ont un sérieux problème avec leur effectif, du fait qu’après la raclée prise à Marinka et dans d’autres secteurs, on leur a descendu ces derniers temps plus de 400 tués et environ 800 blessés, selon les informations données par l’état-major de l’OAT”  (pravda.com.ua).

Porochenko a signé la loi autorisant la venue en Ukraine de forces armées étrangères pour une mission internationale de maintien de la paix (pravda.com.ua). Info donnée également par UNIAN (unian.info).

L’administration de l’oblast de Dniepropetrovsk déclare avoir terminé les travaux de fortifications militaires (pravda.com.ua). Cette région n’est pas directement sur la ligne de front. Ceci semblerait corroborer la préparation d’une “guerre totale” avec la Russie, dont parlent les autorités de Kiev depuis quelques temps déjà.

 

• Le Conseil de l’Europe réfléchit à la possibilité d’exclure la Russie de l’organisation. Mais le président du Conseil se pose la question : exclure la Russie, c’est possible. Mais quelles en seront les conséquences ? On constate, dans les déclarations rapportées dans l’article, une confusion dans les mots. Il est écrit : “Le monde entier a reconnu l’agression de la Russie contre l’Ukraine, mercredi le Conseil de l’Europe a réexaminé les actes de la Russie et a confirmé les sanctions.” Par “agression contre l’Ukraine”, il faut sans doute comprendre “Annexion de la Crimée”. Cette confusion permet de faire passer comme agression contre l’Ukraine celle du gouvernement ukrainien contre le Donbass sécessionniste. Pour peu que les lecteurs aient “gobé” toutes les accusations de présence militaire russe au Donbass, l’affaire est dans le sac : “La Russie est l’agresseur”. Principe de base de la propagande de guerre (eurointegration.com.ua).

 

Manifestation devant l’ambassade des Etats-Unis à Kiev le 25 juin 2015. Très symbolique, très peu de monde, mais inventive (youtube) : Après qu’un homme a exprimé au mégaphone les reproches que l’on peut faire aux Américains, un autre, vêtu d’un uniforme de soldat américain (en tout cas avec l’insigne américain) s’est aspergé de sang, puis il a sorti des morceaux de viande sanglants apportés dans divers bocaux et les a dispersés et piétinés pour symboliser les “résultats” concrets des actes américains.

25 juin 2015 : 25.06.15 Посольство США в Киеве забросали окровавленным мясом (youtube)

 

• En contrepoint, manifestation à Moscou contre la guerre en Ukraine.  Elle a eu lieu quelques jours plus tard, le 28 juin. Très peu de manifestants, juste piqués là (c’est le mot, puisque ce genre de manifestation s’appelle “piket” en russe) avec drapeau ukrainien et pancartes (unian.net).

 

• Situation militaire au Donbass. L’OSCE détecte des mouvements d’artillerie lourde ukrainienne autour de Marioupol (novorossia.today). Pour le porte-parole de la DPR, Andrey Purgin, la situation est de nouveau explosive le long de la ligne de front  : “The situation right now is very complicated, it is heating up. Heavy  artillery is being used; residential areas of Donetsk, Gorlovka and  Yenakiyevo have been shelled. The military situation is aggravating, and  we are balancing on the verge of full-scale hostilities resumption” (novorossia.today). La DPR/DNR aurait repoussé une nouvelle attaque ukrainienne dans le secteur de Maryinka (novorossia.today) : “Yesterday shelling from heavy mortar-guns started, then, at dusk, in  the course of two hours the enemy carried out artillery fire, attempting  to enter Trudovskiye (a settlement in composition of Petrovskiy  district of Donetsk — DNA); the attack was rebuffed by 5 AM  approximately; the enemy was forced to retreat” dixit Zakharchenko.

 

 

 • Situation militaire au Donbass : interview de Dejan Beric, sniper serbe combattant pour les Novorusses (youtube, page facebook)

25 juin 2015 : [eng subs] Dejan Beric interview on situation in DPR  (youtube)

 

• Petites colères de Saakashvili. Le procureur de l’oblast d’ivano-Frankovsk a été limogé pour avoir critiqué Saakashvili (vz.ru). Selon VzGliad, ce procureur s’était contenté de se demander comment fonctionnerait la police d’Odessa avec un chef de la police, Guia Lorkipanidze, invité à ce poste par Saakashvili, ne parlant pas un mot d’ukrainien et ne connaissant pas les normes juridiques locales… La nouvelle du limogeage du procureur a été donnée sur sa page FB par le Vice Procureur général d’Ukraine, David Sakvarelidze. Vzgliad rappelle que Saakashvili a aussi l’intention d’inviter l’ancien Procureur général de Georgie, Zurab Adeichvili, pour “lutter contre la corruption” dans l’oblast’ d’Odessa.

Un nouveau chef du service des douanes a été nommé à Odessa le 22, et le 26 Saakachvili exige qu’il soit viré (timer-odessa.net, gordonua.com). Vendredi 26 juin, au cours de l’émission télévisée Schuster Live, Saakachvili a déclaré : “Ce type n’a rien à faire là – il est un membre ordinaire d’un énième clan de Kiev, il est là pour régler les flux (Notre commentaire : parlerait-il des flux d’argent souterrain ?). Cela ne peut pas être, lui et moi ne pouvons pas travailler ensemble. Je réglerai cette question face à face avec le chef du service des douanes et avec le Premier Ministre.”

Saakachvili veut également le limogeage de tous les policiers et gardiens de l’ordre en Ukraine, selon Vesti ua et veut déposer une proposition de loi en ce sens à la Rada (vesti-ukr.com). Si l’on fait un parallèle avec l’Irak, les Etats-Unis avaient viré tous les officiers de l’armée de Saddam Hussein, ce qui a gonflé les rangs de l’insurrection sunnite. S’ils virent les officiers de la police d’Ukraine, ils passeront en Novorossie, parce qu’ils n’auront pas vraiment d’autre choix…

Plus fort encore. Saakashvili s’intéresse aux liaisons aériennes d’Odessa et a eu une discussion assez violente avec les responsables des services d’aviation (ren.tv, gordonua.com, youtube). Pour ceux qui n’auraient pas deviné tout seuls, la compagnie d’aviation opérant à Odessa (et dans le reste de l’Ukraine) appartient à Kolomoïski. Donc l’épisode de Saakashvili avec le directeur de l’aviation civile, Denis Antoniouk,  ne devait pas être très spontané (kyivpost). D’ailleurs, dans la foulée, Porochenko suspend le directeur de l’aviation civile (actualnews.org)…

 

26 juin 2015 : Саакашвили и глава Госавиаслужбы  (youtube)

 

 

• Saakashvili backslash. Le procureur général d’Ukraine, Viktor Shokin, n’a pas “apprécié” que saakashvili critique Tatyana Gornostaeva, sa belle fille, procureure également (unian.net, glavpost.com, patrioty.org.ua, nv.ua).

 

• L’OTAN va ouvrir un centre d’entraînement conjoint en Géorgie (1tv.ge)

Cliquer sur l’image pour voir la vidéo :

 

 

VENDREDI 26 JUIN 2015

• Le pire ennemi des “punisseurs” ukrainiens au Donbass.  C’est le “serpent vert”, c’est-à-dire l’alcool. Il y a encore eu un énième incident dû à l’ébriété. Des soldats des FAU (Forces armées ukrainiennes), saoûls, n’ont pas su maîtriser la direction de leur BMP (blindé transport de fantassins) et sont tombés d’un pont surplombant une voie ferrée.

 

 

Ceci s’ajoute à une liste de faits plus graves dans les derniers mois. Par exemple, des soldats saoûls circulant à Konstantinovka (oblast de Donetsk sous contrôle ukrainien) ont provoqué en mars 2015 un accident avec leur BMP le 16 mars, tuant deux enfants et blessant leur mère. Des manifestations des habitants de la ville ont dégénéré en émeutes (youtube), tant et si bien que le chef de la milice de l’oblast a dû venir en personne promettre aux habitants que les FAU ne circuleraient plus dans la ville (unian.net, youtube). Ou encore, les révélations des Cyber-Berkuts sur le comportement de soldats de bataillons de “volontaires”, entre autres ceux du bataillon Aïdar, avec les innombrables plaintes déposées contre eux par les civils (plus de 3.000 en novembre 2014 après seulement 6 mois de guerre mais aussi sur le fait qu’ils s’entretuaient parfois parce que saoûls (ukrhome.net). Ou encore cyber-berkut.ru sous le titre “08.11.2014 Punishers’ outrage evidence found on Ukrainian Prosecutor-General’s PC” : “Le 22 octobre 2014, deux militaires d’une unité combattante – unité postale de campagne B0095, qui se trouvaient sous l’emprise de boissons alcoolisées, ont maltraité puis tué deux civils.” Si l’on en croit les faits qui ont été rapportés à Iaréma, ce dont les participants de l’ATO ont surtout à se protéger, c’est en premier lieu d’eux-mêmes. “Le 18 octobre, aux environs de 21 heure, deux soldats de l’unité combattante PP V3217, se trouvant sous l’emprise de boissons alcoolisées, se sont mis à tirer au fusil automatique AK 74, à la suite de quoi 4 soldats ont été tués et 1 a reçu des blessures par balles.” Comme le souligne le procureur général, les crimes signalés ne sont pas des faits isolés.

 

• Evacuation de civils. Les autorités de Donetsk prévoient pour la semaine prochaine d’évacuer 240 personnes de la localité d’Oktiabrski, qui est régulièrement soumise à des bombardements, a communiqué vendredi 26 le chef de l’administration municipale Igor Martinov. “Nous avons déjà déplacé 60 personnes. Maintenant nous préparons les points de chute pour y déplacer les personnes qui restent. Deux étages d’un foyer sont prêts, 120 places sont prêtes et nous allons en préparer 120 autres. Au total, ce sont 240 personnes d’Oktiabrski qui ont exprimé le souhait d’être évacuées” (e-news.su).

 

• Blocus économique de la Crimée. Après avoir coupé en avril 2014 le canal d’irrigation qui amenait l’eau en Crimée (quotidienne-agora.fr, reseauinternational.net) et en novembre 2014 les lignes à haute tension :  La compagnie nationale de l’énergie ukrainienne “Ukrenergo” a coupé à partir d’aujourd’hui les lignes à haute tension qui apportent l’énergie électrique en Crimée.” (26 11 2014   ridus.ru à 17 h 54, c-inform.info), Kiev a entamé le 26 juin un nouveau blocus économique contre la presqu’île : tous les camions sortant d’Ukraine pour aller en Crimée sont bloqués à la frontière (news-front.info). L’opération a débuté le 25 juin, les garde-frontières ukrainiens ont déjà bloqué plus de 250 camions.

 

• Humour russe (fortruss).

 “Senya let’s talk about something beautiful. Did Europe take you in?”

“No…”

“That’s beautiful!”

“…”

 

Match Dieu (réponse de gauche) contre Poutine (réponse de droite)

Tout-puissant : Oui/Oui

Miséricordieux : Oui/Oui

Sacré : Oui/Oui

Sait piloter un avion : Non/Oui

Combat le chaos : Oui/Oui

Vous aime : Oui/Oui

A des lunettes de soleil cool : Non/Oui

 

“Happiness is when they hate you but can do nothing about it.” “Le bonheur, c’est quand ils te haïssent mais qu’ils ne peuvent rien faire.

 

 

“I am a native Armenian girl from Yerevan! Nobody wants into the Eurasian Union, everybody wants into EU and NATO.”

 

Et pour finir dans le peu subtil. Du papier hygiénique double épaisseur est mis en vente en Russie  par rouleaux de 29 mètres sur lesquels est imprimé le texte officiel des sanctions qui ont été instaurées par l’UE le 12 septembre 2014 et publié au Official Journal of the European Union (eurointegration.com.ua).

 

• Humour ukrainien involontaire.  Porochenko a offert à Yanukovych, l’ex président, de revenir en Ukraine et de ‘prouver son innocence devant un tribunal” (sputniknews). La même semaine, selon Vzgliad, le député du Bloc Petro Porochenko Serguei Kapline a introduit à la Rada une proposition de loi suggérant d’introduire la peine de mort pour les crimes liés à la corruption (vzgliad.ru)… Et quelques autres député préparent une proposition de loi demandant également le rétablissement de la peine de mort, mais seulement pendant les périodes de conflit militaire (vzgliad.ru).

 

Humour ukrainien involontaire ou pas. Lors de son émission du 27 juin 2015, Savik Schuster a commis un lapsus bizarre et révélateur, dont les internautes se sont bien évidemment emparé. Présentant son invité Mikhail Saakachvili, il a laissé échapper, entre “Mikhail” et “Saakachvili”, les deux syllabes “soupa” (c’est du moins ce qu’on entend). Le mot a été immédiatement transformé en “souka”, injure très grossière et abondamment employée par Russes et Ukrainiens indistinctement, qui signifie “sal..pe” ou “enc..é”, selon la cible. Et Saakachvili ayant salué d’un hochement de tête l’annonce de son nom, il n’en fallait pas plus pour obtenir un montage viral (youtube.com).

 

27 juin 2015 : Михаил сука Саакашвили – оговорка  по Фрейду от Савика Шустера! 27.06.2015 (youtube)

 

• Humour ukrainien involontaire qui date un peu (11 novembre 2014).  Un journaliste écrit un article intitulé “Quand l’Ukraine pourra répéter le miracle économique chinois” (kp.uaridus.ru news de 08 h 30).

 

 

SAMEDI 27 JUIN 2015

• Sauvage agression contre la rédactrice en chef du journal de la LNR/RPL (République populaire de Lougansk). L’agression a eu lieu le 21 juin, mais n’a été rendue publique qu’aujourd’hui par  les proches de la victime . Ce sont eux qui ont communiqué la nouvelle. “C’est seulement aujourd’hui que les proches de Korsakova ont fait connaître la terrible agression qu’elle a subie. Quant à Korsakova elle-même, elle se trouve actuellement hospitalisée à Novotcherkassk, dans un état grave.

 Deux hommes ont attaqué Korsakova au moment où elle sortait de la maison qu’elle occupe ces derniers temps. Auparavant, cette femme est arrivée en Russie après avoir quitté la localité de Chastié, dans l’oblast de Lougansk. Sa maison de là-bas avait été détruite au cours des opérations militaires. Les agresseurs l’ont assommée d’un violent coup sur l’occiput, puis l’ont rouée de coups. Les médecins ont diagnostiqué chez la blessée une fracture avec déplacement osseux, un traumatisme crânien, une commotion cérébrale, de nombreux oedèmes et contusions, un visage massacré (ils ont essayé de lui démolir la cavité buccale).  La blessée a perdu la vue à un oeil.” (ridus.ru).

 

 

• (Pré)Menaces sur le régime de Kiev. Aujourd’hui 27 juin, arrestation à Kiev du chef d’une unité des FAU. Il est soupçonné d’avoir voulu organiser un putsch (pravda.com.ua). Rappelons que Porochenko est sous le coup d’un ultimatum de Praviy Sektor qui exige la reprise de la guerre au Donbass pour le 3 juillet et menace en cas contraire de renverser le régime.

 

• Fait divers à Odessa. Pendant que tous les dirigeants de l’oblast faisaient leur petite promotion sur le plateau du show télévisé Schuster Live, un tireur inconnu a tiré à bout portant sur des hommes en patrouille. Cela a été annoncé en direct par le chef de la délégation du ministère de l’intérieur pour l’oblast d’Odessa, Georgiy Lortkipanidzé. les policiers avaient arrêté un véhicule suspect dans le secteur des loisirs de la ville, et un homme leur a tiré dessus depuis la voiture. Tous les deux ont été blessés au ventre. Pour un des policiers, la balle a été mortelle, le second se trouve à l’hôpital, dans un état grave. (unian.net, pravda.com.ua, timer-odessa.net, antifashist.com, pravda.com.ua). Rien d’étonnant malheureusement dans cette agression. La ville est en proie à des luttes d’influences entre Azov et des mafias et est submergée d’armes en provenance de la zone de l’OAT. Première conséquence : la mise en place de mesures de sécurité supplémentaires à Odessa (newson.com.ua).

 

• Chiffres ONU des réfugiés ukrainiens.  Selon l’ONU, plus de 900 000 Ukrainiens demandent le statut de réfugiés à l’étranger (dont un peu moins de 750 000 en Russie et 81 000 en Biélorussie) (unian.net)

 

• Fait divers à Marioupol : Des soldats d’Azov, saoûls, ont provoqué un accident de la circulation à Marioupol. Il y a un mort, qui était militaire dans l’opération OAT, et plusieurs blessés dans deux véhicules, dont un véhicule de premiers secours. L’accident s’est produit le 21 juin dans le secteur de la gare routière, mais n’est relaté qu’aujourd’hui (0629.com.ua).

 

 

• Le bataillon Azov exclu de l’entraînement prévu par les instructeurs de l’armée canadienne. Le Canada , pourtant farouche support de Kiev, se distance de ces prétendus “héros de l’Ukraine” qui commencent enfin à être reconnus internationalement comme ce qu’ils sont : des néo-nazis (dofiga.net), des bandits, voire des barbares. Hélas, pour ceux qui sont passés entre leurs mains, il est trop tard. Quant aux explications alambiquées que donne l’article, elles ne sont pas très convaincantes sur les motifs réels de cette exclusion (lapresse.ca).

 

 

DIMANCHE 28 JUIN 2015

• L’Autriche va fermer ses ambassades dans les pays baltes et Malte.  Les fermetures seront effectives en 2018 pour des raisons d’économie budgétaire (sputniknews).

 

• La Russie propose un statut spécial aux descendants de la famille impériale russe. La Russie incite les héritiers des Romanov à revenir (fortruss). Noblesse et Royautés écrit :  “Vladimir Poutine a fait une proposition à la Grande-Duchesse Maria de Russie et au prince Dimitri Romanovich, membres de la famille impériale de Russie  pour qu’ils viennent s’installer en Russie où ils bénéficieraient d’un  statut particulier (non encore défini), rapporte le journal « The  express ». Ils pourraient en outre récupérer le palais de Ropshinsky ou de Pavlovsky près de Saint-Petersbourg ou encore le palais de Livadia en Crimée(noblesseetroyautes.com).

 

 

• Message d’Alexander Zakharchenko aux jeunes du sud-est de l’Ukraine. Message diffusé dans le cadre de la journée de la jeunesse, les 27-28 juin 2015 (novorossia.today, novorossia.today).

 

Official message of  Alexander Zakharchenko, Head of the Donetsk People’s Republic  to the  young people of the South-East of Ukraine (novorossia.today)

 “Friends!

I heartily greet my young fellow countrymen, residents of the  South-East on the Day of Youth! For my part, in fact, for all the  Donbass, you’re like relatives and family. Dnepropetrovsk and Odessa,  Kharkov and Nikolayev, Kherson and Zaporozhye – these are beautiful  Russian cities, true sister cities of Donetsk and Lugansk.

However, today, everyone in the southeast, but especially young  people, are living through hard times. To maintain their grip on power,  the Ukrainian oligarchs allied themselves with fascists, the worst enemy  of our people. When you raised up your voices against extremism, when  you openly protested against their alien ideology, the criminal regime  in Kiev declared war on our people. Their actions led to the burning,  imprisonment, and disappearance of thousands of people. They sicced  their forces on the Donbass, but we repulsed the aggressors; with guns  in our hands, we won our freedom. It was hard, but we survived; today,  we’re building our independent and fair state.

I urge you, the young people of the southeast, to cast aside all your  fears, to unite your efforts, and present a united front against the  occupation regime.

Free yourselves, be masters in your own land; stand up to defend your culture, traditions, and mother tongue!

Today, you’re young, strong, and courageous; on you alone depends the  future of your country, the welfare of your family and friends, and our  common peace and prosperity!”

 

 

• Porochenko s’adresse aussi à la jeunesse. Lors de la même journée de la jeunesse, Porochenko a remercié les jeunes d’Ukraine de former l’essentiel des bataillons de volontaires et d’être la force principale des changements révolutionnaires dans le pays depuis les années 1990 (sputniknews).

 

• Amorce d’un pivot français vers la Russie ? Après la sortie de François Fillon sur les USA qui détruisent l’Europe, Nadine Morano, “agacée par l’hostilité ambiante contre Moscou au Parlement européen”, crée un groupe de travail pour établir «un nouveau dialogue avec la Russie» (lefigaro.fr).

 

• Et des agacements allemands. Oscar Lafontaine entonne le même discours que Fillon sur les USA :  “Nuland says ‘F*ck the EU’. We need need an EU foreign policy that stops warmongering US imperialism… F*ck US imperialism!” (zerohedge)

 

• Malgré la guerre civile et l’hostilité envers la Russie, celle-ci est toujours le premier partenaire économique de l’Ukraine. Avec 14% du commerce international ukrainien (contre 27% en 2013), la Russie est toujours le premier pays comptant pour 3,4 milliards USD au premier trimestre 2015 et ce malgré 16 mois de guerre et d’hostilité diplomatique. Les parts de marché russes sont prises par l’UE et la Chine (kyivpost).

 

• Les véhicules militaires ukrainiens sont de mauvaise qualité. Un grand nombre de véhicules militaires ukrainiens ont des défauts de fabrication qui les fait tomber en panne. Par exemple, le blindage des chars construits en ukraine est défectueux ce qui le rend très vulnérable aux tirs et fait souvent sauter la tourelle (vesti-ukr.com, sputniknews, sputniknews).

 

• Les manifestations en Arménie semblent se calmer. L’Arménie a connu un mini Maidan cette semaine comme la Macédoine quelques temps avant. Après des concessions du gouvernement, les choses semblaient se calmer. A noter cependant que la police arménienne a arrété dimanche un activiste qui, malgré l’apaisement, appelait à des “actions armées” (sputniknews).

 

 

• L’obsession anti russe de Donald 1er Tusk.  Donald Tusk, le président polonais du Conseil Européen, a déclaré aujourd’hui lors de la séance de présentation du nouveau premier ministre danois,  Lars Lokke Rasmussen, qu’il convenait de mettre à égalité la menace que représente la Russie envers l’Europe et celle du terrorisme (eurointegration.com.ua).

 

• Et le candide ou hypocrite étonnement américain. L’ex-ambassadeur des Etats-Unis en Russie, Michael McFaul s’est adressé aux Russes via Tweeter en leur disant qu’il était inutile de déployer des S400, car l’OTAN n’avait aucune intention d’attaquer la Russie : “Michael McFaul @McFaul No need to overhype Deployment of S-400 on Russia’s borders. NATO will never invade Russia. 03:02 – 28 июня 2015“.

Petit extrait :

Un tweeter russe :  “Est-ce que 250 chars d’assaut sont des armes défensives (en référence au déploiement américain d’armes lourdes en Europe de l’Est)”

Réponse de Michael McFaul :  “Oui, Seul un fou complet voudrait envahir la Russie. Heureusement aucun pays de l’OTAN n’est dirigé par des fous

Réponse du tweeter russe :  “Vous faites rigoler mes pantoufles !… Vous racontez des stupidités, Michaël !”

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Source: http://www.les-crises.fr/actuukraine-01072015/


L’euro, ou la haine de la démocratie, par Frédéric Lordon

Tuesday 30 June 2015 at 02:53

Forcément, ça leur a coupé la chique. Qu’on puisse jouer la carte de la démocratie, c’est la chose qui est maintenant tellement hors de leur entendement qu’elle les laisse toujours sidérés, pantois et démunis. Vraiment, à cet instant, on aurait voulu voir leurs têtes, mâchoires décrochées comme des tiroirs de commodes fraîchement cambriolées : Sapin, Hollande, Moscovici, leurs experts organiques, leurs journalistes de propagande, tous ceux qui n’ayant que la « modernité » à la bouche se sont si constamment efforcés d’en finir avec le peuple, pénible démos, et pénible démocratie quand il lui vient à l’idée de ne pas se contenter de valider ce qui a été décidé pour elle. Mais c’est une némésis et personne n’y pourra rien : il vient toujours un moment où la politique chassée par la porte revient par la fenêtre. Plus elle a été chassée obstinément d’ailleurs, et plus ses retours sont fracassants.

Le référendum, ou le retour du refoulé

Et c’est vraiment le retour du refoulé sous tous les rapports : celui de la mauvaise conscience notamment. C’est qu’on peut difficilement porter la démocratie en bandoulière, en faire des chartes à enluminures ou des hymnes à la joie, un modèle offert au monde (éventuellement à coup de frappes aériennes), et la bafouer à ce point à domicile.

Prononcer le mot « référendum », c’est en effet immanquablement faire resurgir le spectre du Traité constitutionnel de 2005, celui de l’acharnement jusqu’à ce que ça dise oui, ou du contournement si ça persiste à dire non. Celui du putsch également, à l’image du débarquement en 2011 de Georges Papandréou, ordinaire socialiste de droite qui n’avait rien de bien méchant, mais avait fini par s’apercevoir qu’on approchait des seuils où férule macroéconomique et tyrannie politique deviennent dangereusement indistinctes, et éprouvé le besoin d’un mandat légitime en soumettant le mémorandum à son peuple… par référendum. Appliquant une doctrine en fait formée de longue date puisqu’elle est intrinsèque à l’Union monétaire même, mais dont la formulation pleinement explicite attendra 2015 et l’inénarrable Juncker – « il n’y a pas de choix démocratiques contre les Traités européens »… –, il avait suffi aux institutions européennes de quelques pressions de coulisses pour obtenir le renversement de l’imprudent, et nommer directement le banquier central Papademos premier ministre ! – c’est tellement plus simple –, qui plus est à la tête d’une coalition faisant, pour la première fois depuis les colonels, entrer au gouvernement un parti ouvertement d’extrême-droite (Laos), particularité qui n’avait pas davantage ému le journalisme d’accompagnement à l’époque (il n’a pas manqué depuis de pousser des cris de putois quand Syriza a fait alliance avec la droite souverainiste d’Anel).

C’est tout ce lourd passé, et même ce lourd passif, qui se trouve replié dans le mot « référendum », le sale petit secret de toute une construction institutionnelle qui ne se sent pas d’autre devoir vis-à-vis de la démocratie que celui du simple oblat verbal, de la célébration en mots, et en réalité n’a pas d’autre projet la concernant que d’extinction méthodique.

Comme on trouve encore des gens suffisamment acharnés pour contester que les Traités donnent à l’Europe le caractère d’une entité néolibérale, on en trouve de suffisamment bêtes pour nier qu’ils entraînent la moindre perte de souveraineté – expérience récemment faite au contact, tout à fait fortuit, d’un député socialiste dont, par charité chrétienne on ne dira pas le nom. Comme la chose est inhérente aux traités mêmes dont, rappelons-le, la caractéristique première tient au fait (monstrueux) d’avoir constitutionnalisé des contenus substantiels de politique économique, comme la chose est inhérente aux traités, donc, et qu’ils ne l’ont pas vue, ils ne doivent pas avoir davantage connaissance de la manière dont se déroulent les négociations depuis 2011, et particulièrement celles de ces dernières semaines. Car la Troïka ne se contente pas d’imposer un cadrage macroéconomique délirant, elle entend également en imposer le détail – et décider elle-même, dans le menu, des augmentations d’impôt et des baisses de dépenses, c’est-à-dire prendre en mains directement l’intégralité des commandes.

Que le gouvernement Syriza, à l’encontre de ses propres engagements électoraux, ait accepté de se couler dans la logique du mémorandum et de jouer le jeu de l’ajustement budgétaire n’était pas encore assez : car la Troïka ne demande pas qu’un objectif global, mais aussi la manière. Il n’est pas suffisant que la Grèce s’impose une restriction supplémentaire de 1,7 point de PIB, il faut qu’elle la compose comme il faut. Par exemple l’augmentation du taux d’imposition sur les sociétés de 26% à 29%, ainsi que la taxe exceptionnelle de 12% sur les profits supérieurs à 500 000 euros ont été refusées par la Troïka au motif qu’elles étaient… de nature à tuer la croissance ! – ou quand l’étrangleur déconseille à ses victimes le port du foulard. En revanche la Troïka tient beaucoup à ce qu’on en finisse avec la petite allocation de solidarité servie sur les retraites les plus pauvres – le décile inférieur a perdu jusqu’à 86 % de revenu disponible de 2008 à 2012 [1] … c’est donc qu’il reste 14 bons pourcents : du gras ! Elle refuse la proposition grecque de taxer les jeux en ligne, mais demande la fin du subventionnement du diesel pour les agriculteurs – des nantis. Et tout à l’avenant.

Les institutions de la haine politique

On pourrait se perdre à l’infini dans ces détails qui disent tous le délire idéologique additionné d’instincts sociaux meurtriers – au sens presque littéral du terme, car rompre avec le fléau du gouvernement par abstractions macroéconomiques demande de prendre connaissance du tableau des conditions concrètes d’existence de la population grecque à l’époque de l’austérité, entre baisse de l’espérance de vie, explosion du taux de suicide, effondrement de la qualité des soins, etc [2]. On pourrait dire tout ça, donc, mais on n’aurait pas dit l’essentiel, qui tient à une forme de haine politique, comme il y avait jadis des haines religieuses, mais, fait inédit, une haine politique institutionnelle, une haine portée par des institutions. Depuis le premier jour, les institutions européennes n’ont pas eu d’autre projet que de faire mordre la poussière au gouvernement Syriza, d’en faire, par un châtiment exemplaire, une leçon à méditer par tous les autres pays qui pourraient avoir à l’idée eux aussi de ne pas plier, comme s’il fallait annuler l’événement de la première authentique alternance politique en Europe depuis des décennies.

Chaque régime politique, même celui qui a de la démocratie plein la bouche, a ses points d’impensable, ses interdictions formelles et ses exclusions catégoriques. La dite « démocratie parlementaire », qui fait vœu de débattre de tout, s’est en fait constituée comme le régime politique de défense de la propriété privée du capital (et de toutes les prérogatives qui y sont attachées), c’est pourquoi elle accepte qu’on débatte de tout sauf de la propriété privée du capital (et de toutes les prérogatives qui y sont attachées) [3] – et l’histoire a suffisamment montré de quoi la « démocratie » était capable quand le peuple des manants avait l’idée de s’en prendre au règne du capital. Pour autant, dans ce périmètre-là, il restait un peu de marge à explorer. C’était encore trop pour une construction néolibérale comme l’Union européenne qui a saisi la fenêtre d’une époque pour réduire autant qu’elle le pouvait le cercle du discutable : les formes de la concurrence intérieure, le statut de la banque centrale, la nature et les cibles de la politique monétaire, les orientations de la politique budgétaire, le rapport aux marchés financiers : toutes ces choses ont été irrévocablement tranchées par inscription constitutionnelle dans les traités, à la fin expresse qu’à leur sujet le débat soit clos.

Comment s’étonner qu’une construction aussi congénitalement libérale se soit donné des institutions qui suintent à ce point la haine de tout ce qui est progressiste ? Syriza ne pouvait pas être un partenaire : elle a été d’emblée, et en fait très logiquement, considérée comme un ennemi. L’ennemi ici, c’est celui qui veut vous forcer à rediscuter de ce que vous avez décrété soustrait à toute discussion. Aussi bien le référendum (à supposer qu’il ne devienne pas sans objet d’ici dimanche) que l’imminente sortie de l’euro sont des affirmations du droit de rediscuter – des affirmations du principe démocratique.

Le droit de rediscuter se paye cher en Union européenne. Dans un mouvement misérable qui ajoute à la considération qu’on peut lui porter, l’Eurogroupe, entité informelle à la consistance juridique d’ailleurs incertaine, met tous ses efforts à ce qu’il soit le plus coûteux possible. Mais en réalité c’est toute la construction institutionnelle qui porte la responsabilité de ce qui est en train de se passer : car, à la fin des fins, c’est bien la Banque centrale européenne (BCE) qui donnera le coup de grâce en interrompant le refinancement des banques grecques.

Faut-il qu’elle soit grande la détestation de la souveraineté populaire pour ne pas même accorder l’extension du plan d’aide à l’échéance du référendum… Tout est dit d’une passion anti-démocratique européenne devenue si écumante qu’elle ne parvient même pas à se tenir à son propre ordre légal : c’est que le refinancement des banques, grecques ou autres, est une mission de la BCE, assignée par les traités, et dont l’accomplissement est sans rapport avec les vicissitudes latérales de tel ou tel ordre, fussent-elles celles d’un plan de sauvetage. Que la terminaison du plan de sauvetage mardi 30 juin s’accompagne, comme il en est lourdement question, de la fermeture du guichet ELA (Emergency Liquidity Assistance), où la totalité du système bancaire grec est vitalement suspendu, est une connexion dont la légalité est plus que douteuse eu égard à l’autonomie des missions de refinancement de la BCE. [Il faut vraiment convoquer les aruspices pour avoir le fin mot du communiqué publié dimanche 28 juin par la BCE, car l’annonce du maintien du programme ELA pour les banques grecques n’est accompagnée d’aucune mention d’échéance… de sorte qu’il peut bien se trouver interrompu à tout moment. Cependant, contre la menace lourdement sous-entendue de fermer l’ELA en conséquence de l’arrêt du plan de sauvetage le 30 juin, il pourrait être politiquement rationnel pour la BCE de ne pas aller jusqu’à se faire l’exécuteur anticipé des basses œuvres, et de maintenir son guichet ouvert jusqu’à l’échéance du référendum : c’est qu’on doit beaucoup compter dans les institutions européennes sur le fait que le contrôle des capitaux mis en place lundi 29 juin est un repoussoir électoral, et que la restriction de l’accès des déposants à leurs encaisses monétaires est le plus sûr moyen d’aiguillonner le vote « oui ».]

En tout cas, on le sait bien, le simple fait d’avoir exclu les banques grecques des procédures ordinaires de refinancement pour les cantonner au guichet d’urgence de l’ELA n’avait d’autre propos que de leur faire sentir leur état de dépendance extrême, et de leur faire connaître le pouvoir discrétionnaire auprès duquel leur survie se renégocie quasi-quotidiennement – c’est-à-dire la possibilité qu’à tout moment le pouce s’abaisse. Comme toujours, c’est aux limites, et dans les situations de crise extrême, que les ordres institutionnels révèlent leur vérité. Ici toute la sophistication juridique de la construction européenne se ramène à un pouce levé ou bien baissé. Et la comédie du droit laisse voir à nu les rapports de force qu’elle cache ordinairement.

Le moment du chaos

Techniquement parlant en tout cas, il est bien certain que la fermeture du refinancement auprès de la BCE, qu’elle survienne mardi 30 ou plus tard, effondrera le système bancaire grec dans la journée, et forcera, de fait, au réarmement de la Banque centrale grecque comme prêteur en dernier ressort, c’est-à-dire émetteur d’une liquidité qui ne sera pas reconnue par le SEBC (Système européen de banques centrales). On l’appellera de la drachme.

Effectuée dans une pareille urgence, la sortie grecque de l’euro ne pourra pas éviter le moment du chaos, et pour des raisons dont Syriza porte une part. Il est à craindre que le refus d’envisager dès le début la sortie de la monnaie unique, et d’en faire une menace crédibilisant d’ailleurs la position grecque dans le rapport de force, laisse aujourd’hui le gouvernement dans un état de totale impréparation. Le sens stratégique possible de l’accord de prolongation passé avec l’Eurogroupe le 21 février dernier aurait dû être de mettre à profit les quatre mois gagnés pour préparer logistiquement et politiquement la sortie.

Celle-ci est vouée à présent à s’opérer dans les plus mauvaises conditions. Il est même impossible que se fassent aussi vite l’ajustement technique du système des paiements et la conversion des espèces monétaires. Si bien qu’il y aura vraisemblablement un moment bizarre de double circulation monétaire pendant lequel des espèces émises par le système bancaire grec auront toutes les apparences de l’euro mais n’en seront pas moins des drachmes… qui en principe ne seront pas reconnues comme euros à l’extérieur alors même qu’elles leur ressembleront comme deux gouttes d’eau !

Rien de tout ça ne sera fait pour décourager le run bancaire, en fait déjà bien entamé puisqu’on évalue à 130 milliards d’euros les retraits opérés depuis janvier. Que les gens retirent des espèces si ça peut les tranquilliser, ça n’est pas le problème, en tout cas pour le système bancaire [4] : dès que la situation se stabilisera, ces fonds effectueront le mouvement inverse, et entre temps c’est la Banque de Grèce qui prendra le relais de la BCE pour maintenir les banques dans la liquidité. C’est que cet argent prenne le large qui est un problème. Aussi un drastique contrôle des capitaux, avec contingentement des retraits, sera la mesure à prendre dès les toutes premières heures (elle est déjà prise au moment où ce texte est publié). Avec la dévaluation carabinée de la drachme qui suivra sa réintroduction, les Grecs y perdront du pouvoir d’achat international ? Oui, et ça sera comme ça. Par définition, la conversion est une opération purement nominale qui laisse invariant le pouvoir d’achat interne… à l’inflation importée près. Or vu la dégringolade anticipée de la drachme, celle-ci sera conséquente. La couronne islandaise qui a initialement perdu près des trois quarts de sa valeur contre euro a laissé derrière elle une inflation de 18 % en 2008. Mais les premières fluctuations sont toujours d’une ampleur extravagante, et vouées à s’ajuster plus raisonnablement à moyen terme : la couronne a été rapidement stabilisée 40 % en dessous de sa valeur de 2008, l’inflation est d’ailleurs redescendue en dessous des 5 % dès la mi-2009, elle est désormais proche de 0. Il en ira vraisemblablement de même avec la drachme.

Dans l’intervalle il faudra peut-être ajouter au contrôle des capitaux un dispositif de protectionnisme ciblé dans les marchés de biens et services. C’est que la balance courante grecque à très court terme va devenir déficitaire. Or l’interruption de tout flux financier entrant interdira de la financer par la partie « compte de capital » de la balance globale, et la position extérieure nette de la Grèce va se détériorer. Il faudra donc réduire la flambée des importations, alors que l’effet de renchérissement de leur prix devrait d’abord l’emporter sur celui de contraction des volumes. Evidemment il est vital que les entreprises continuent d’avoir librement accès aux biens étrangers d’équipement ou de consommation intermédiaire. Le dispositif protectionniste devra donc être ciblé sur les (certains) biens de consommation (hors énergie notamment), et ceci jusqu’à ce que les exportations « réagissent » à la dévaluation de la drachme – en général dans un délai de 12 à 18 mois (de ce point de vue, la sortie de l’euro se passe au plus mauvais moment possible de l’année puisqu’il est trop tard pour que le tourisme, qui est le secteur le plus dynamique du commerce international grec, en enregistre l’effet, et qu’il faudra attendre la saison prochaine pour en recueillir les bénéfices). L’énorme incertitude achèvera de mettre en carafe le peu d’investissement qui restait (le taux d’investissement est tombé à 12 % en 2014 [5]…). Tous ces effets ajoutés à la désorganisation initiale promettent à la croissance grecque de plonger. Il faut avoir le courage de le dire : le début va être une épreuve.

Cette épreuve n’a de sens, économiquement parlant, que parce qu’elle ouvre par ailleurs de nouvelles opportunités et restaure de nombreux degrés de liberté absolument fermés dans le cadre des institutions de l’euro. En premier lieu elle permet d’en finir avec l’austérité, dont les nouvelles mesures ne relâchaient rien : la Grèce se trouvait enjointe de dégager un excédent primaire de 1 point de PIB cette année même, puis de 2 en 2016, puis de 3 en 2017, puis de 3,5 en 2018 ! Elle se trouve également soulagée des 26 milliards d’euros dus d’ici la fin 2015 à ses créanciers de toute sorte qu’elle va envoyer élégamment se faire foutre – 26 milliards d’euros [6], ça n’est pas loin de… 15 points de PIB ! Voilà à quoi la Grèce se saigne depuis tant d’années : à payer une dette que tout le monde sait insoutenable en dépit de tous ses rééchelonnements et, plus encore,dont elle ne porte pas la responsabilité ! Car les 80 points de PIB de dette pris depuis 2008 ne sont pas, comme le répète l’éditorialisme en pilotage automatique, « la dette de la Grèce » : c’est la dette de l’impéritie européenne, la dette de la plus gigantesque erreur de politique économique de l’histoire du capitalisme, la dette de l’acharnement idéologique, dit plus brièvement : la dette de la zone euro – et par conséquent la dette dont il n’est que justice que la zone euro se la carre dans le train.

Le vrai visage des « amis de l’Europe »

En écrivant en janvier que l’alternative de Syriza était de passer sous la table ou de la renverser[7] et qu’il n’y aurait pas de tiers terme, en particulier que l’idée d’obtenir quoi que ce soit des institutions européennes, ou pire encore d’engager leur transformation de l’intérieur, était un rêve de singe, il faut bien avouer qu’on n’était pas prêt à parier grand-chose sur l’hypothèse du renversement. Hic Rhodus hic salta [8] comme dit l’adage latin. Et c’est là qu’on voit les vrais hommes politiques. Pour toutes les erreurs stratégiques qu’il a commises jusqu’ici, il se pourrait bien que Tsipras en soit un. C’est qu’il faut une sacrée consistance pour faire face à ce mélange de périls et de chances qui s’offre à lui aujourd’hui – qui s’offre à lui ? non, qu’il a fait advenir en se tenant au plus près de l’essence de la politique : la proposition faite au peuple de décider souverainement.

Comme Roosevelt se déclarait fier en 1936 d’être devenu objet de haine de l’oligarchie capitaliste qu’il avait décidé de défier carrément, Tsipras peut s’enorgueillir des tombereaux d’injures que lui réserve une oligarchie d’un autre type, le ramassis des supplétifs d’une époque finissante, et qui connaitront le même destin qu’elle, la honte de l’histoire. La première chose que Jean Quatremer a cru bon de tweeter consiste en photos de queues devant les distributeurs à billets. Et d’annoncer avec une joie mauvaise : « La Grèce sera donc en faillite mardi à minuit. Accrochez-vous ! ».

On voudrait que quelque archiviste de talent, conscient de ce qui se joue d’historique ces jours-ci, s’attache à collecter tout ce qui va se dire et qui méritera de rester, tout ce que pense et dit l’oligarchie quand, à l’épreuve d’un moment critique, elle jette enfin le masque – car cette fois-ci le masque est bel et bien jeté. « La Grèce, c’est fini »titre le JDD du 28 juin, dirigé par Denis Olivennes, l’un des Gracques à qui l’on doit cette tribune à valeur de document quasi-psychiatrique publiée dans Les Echos, où l’on apprenait qu’il était urgent de « ne [pas laisser] Monsieur Tsipras braquer les banques » [9], textuellement, alors que le refus de restructurer la dette grecque jusqu’en 2012 n’a pas eu d’autres finalités que de sauver les banques allemandes, françaises, etc., ces banques où, précisément, prolifère la racaille Gracque, en effet la vraie racaille dans la société française – pas celle de Sarkozy –, ces « anciens hauts fonctionnaires socialistes » comme ils aiment à se présenter eux-mêmes, et qui en disent assez long sur l’état réel du « socialisme » français – pour ceux qui ne s’en seraient pas encore aperçus.

Bloomberg fait déjà des gorges chaudes de ce qu’on puisse envisager « sur les documents hautement techniques » de la Troïka de demander leur avis « aux mamies grecques » [10]. Mais c’est vrai, quelle idée ! La vraie démocratie est bien celle qui se contente de l’avis des économistes et des journalistes spécialisés de Bloomberg. Ou de Libération. Comme toujours les événements historiques, la sortie grecque sera un test de Rorschach en vraie grandeur, un bain photographique surpuissant. On peut le dire dès maintenant puisque la grande vidange est déjà à l’œuvre : l’oligarchie dégondée va montrer son vrai visage, et parler son vrai langage. Jean-Louis Bourlanges sur France Culture traite Tsipras de « terroriste révolutionnaire » [11] (sic), Quatremer relaie, écumant, les errances de Kathimerini, quotidien de droite qui qualifie le référendum de « coup d’Etat de bolcheviks », formidable moment de vérité où l’on va voir sans fard qui est qui et qui dit quoi. Oui, on voudrait vraiment que tout ceci soit méticuleusement consigné, pour qu’on sache ce qu’il en aura été de la « démocratie » en Europe à l’époque de la monnaie unique. Et pour que cette belle accumulation produise l’effet qu’elle est vouée à produire : celui du ridicule mêlé d’ignominie.

Et nous ?

Par un paradoxe qui doit tout aux coups de fouet de l’adversité, il se pourrait que cette avalanche de haine, car il n’y a désormais plus d’autre mot, soit le meilleur ciment des gauches européennes, et leur plus puissant moteur. Car la guerre idéologique est déclarée. Et il faudra bien cet état de mobilisation et de colère pour supporter ce qu’il va falloir supporter. Il ne faut pas s’y tromper : sauf à ce que tout l’euro parte en morceaux à son tour, hypothèse qui n’est certainement pas à exclure mais qui n’est pas non plus la plus probable, les yeux injectés de sang d’aujourd’hui laisseront bientôt la place à l’écœurant rire triomphateur des Versaillais quand la Grèce passera par le fond du trou. Car elle y passera. Elle y passera au pire moment d’ailleurs, quand Espagnols et Portugais, sur le point de voter, se verront offrir le spectacle du « désastre grec » comme figure de leur propre destin s’ils osaient à leur tour contester l’ordre de la monnaie unique. Ce sera un moment transitoire mais terrible, où, sauf capacité à embrasser un horizon de moyen terme, les données économiques de la situation n’offriront nul secours, et où l’on ne pourra plus compter que sur la colère et l’indignation pour dominer toutes les promesses de malheur. En attendant que se manifestent les bénéfices économiques, et plus encore politiques, du geste souverain.

Que faire entre temps pour échapper à la rage impuissante lorsqu’on n’est pas grec ? Depuis février, on a vu fleurir des initiatives de solidarité où le réconfortant le dispute au dérisoire : c’est que la version KissKiss BankBank des Brigades internationales a surtout pour effet de dire quelque chose de l’époque… En réalité l’événement offre peut-être la meilleure occasion de redécouvrir, et pour certains de découvrir tout court, que l’internationalisme réel consiste moins dans le dépassement imaginaire des nations que dans la solidarité internationale des luttes nationales. Et dans leurs inductions mutuelles. Les Grecs sont sur le point de défier l’ordre néolibéral en son institution principale : la monnaie unique européenne. Pour nous qui souffrons des pouvoirs entièrement vendus à cet ordre, être à la hauteur de l’éclaireur grec ne réclame pas moins que de nous retourner contre nos gouvernements.

Notes
[1] Philippe Légé, « Ne laissons pas l’Europe écrire sa tragédie grecque », Note des Economistes Atterrés, 30 avril 2015.

[2] Sanjay Basu et David Stuckler, « Quand l’austérité tue », Le Monde diplomatique, octobre 2014.

[3] Inutile d’arguer des épisodes de « nationalisation » qui ont toujours été très partiels et n’ont jamais remis en cause l’essentiel, à savoir les rapports sociaux de production, inchangés même dans les enclaves de capitalisme d’Etat.

[4] C’est un problème si cet argent retiré de la circulation monétaire cesse d’animer les échanges marchands.

[5] Il était à 26 % en 2008…

[6] Dont un accord avec l’Eurogroupe n’aurait couvert que 15 milliards d’euros, et encore sans compter le déblocage fractionné, par tranches de 7,5 milliards, bien fait pour activer à chaque fois une clause de revoyure.

[7] « L’alternative de Syriza : passer sous la table ou la renverser », 19 janvier 2015.

[8] « C’est ici qu’il faut sauter ».

[9] Les Gracques, « Grèce : ne laissons pas Monsieur Tsipras braquer les banques », Les Echos, 15 juin 2015.

[10] « Tsipras Asking Grandma to Figure Out if Debt Deal is Fair », Bloomberg, 28 juin 2015.

[11] « L’esprit public », France Culture, 28 juin 2015.

Source : Frédéric Lordon, pour son blog La Pompe à phynances, le 29 juin 2015.

Source: http://www.les-crises.fr/leuro-ou-la-haine-de-la-democratie-par-frederic-lordon/


Un coup d’État financier contre Athènes, par Vicky Skoumbi (+ Entraide)

Tuesday 30 June 2015 at 01:25

ENTRAIDE : je cherche désespérément l’historique du taux annuel des emprunts d’États grecs (genre le 10 ans – ou autre) – en particulier 1980-2000.

Vous pourriez m’aider svp ? Me contacter ici si vous avez trouvé (si vous parlez grec, ce sera un plus…).

Article du 29/06 de cette invitée grecque des économistes atterrés

Un plan de déstabilisation financière et politique de la Grèce est en cours depuis quelques semaines. À vrai dire, c’est bien avant l’élection de Syriza que le processus a été mis en route, mais son accélération intensive ces derniers jours jette une lumière vive sur celui-ci. Il ne s’agirait de rien moins qu’une tentative de renverser le gouvernement Syriza, pour que celui-ci soit enfin remplacé par une coalition à la convenance des créanciers. Le chantage odieux exercé sur le gouvernement grec, par le biais d’une incitation ouverte à un bank run, ne laisse aucun doute sur la volonté des créanciers d’en finir une fois pour toutes avec un gouvernement qui ose contester leurs diktats et refuse de faire boire au peuple grec jusqu’à la lie la potion létale que Bruxelles, la Banque centrale européenne (BCE) et le Fonds monétaire international (FMI) ont savamment concoctée pour lui. Doit-on rappeler ici que les programmes de « sauvetage », qui n’ont sauvé personne à l’exception notoire de banques européennes, grecques comprises, n’ont pas manqué de produire une telle chute du PIB, une telle baisse du niveau de vie que même une guerre menée par des moyens militaires n’aurait su les produire. La nouveauté aujourd’hui consiste au fait que le trio infernal de la Troïka a décidé de mettre délibérément en danger le système bancaire grec afin de faire tomber un gouvernement qui, malgré des pressions terrifiantes, a osé lui tenir tête pendant cinq mois. Après tout, il n’est pas interdit de mettre en danger quelques petites banques périphériques si c’est pour rafler la mise sur le plan politique et économique. Ces affirmations qui pourraient, aux yeux de certains, paraître exagérées, voire gratuites, s’appuient sur des faits.

Déstabilisation économique

Le lendemain de l’Eurogroupe du 18 juin, Donald Tusk a su trouver la bonne formule pour résumer la situation : la Grèce aura à choisir entre, ou bien le projet que proposent les créanciers, ou bien la faillite, a-t-il déclaré. Mais ces messieurs, qui sont censés veiller sur la sauvegarde des intérêts des peuples européens, ne se sont pas contentés de placer un gouvernement élu devant ce choix forcé. La faillite, ils ne se bornent pas à l’évoquer, ils l’organisent sournoisement et méthodiquement par des rumeurs, de vraies fausses annonces aux médias, des fuites savamment orchestrées, qui toutes laissent planer depuis plusieurs jours la menace d’un scénario à la chypriote. Par un jeu calculé de déclarations alarmantes, ils préviennent de l’imminence d’un « capital control » en Grèce et poussent délibérément les épargnants grecs à faire des retraits massifs, qui n’ont pas manqué de conduire les banques au bord du gouffre. Dresser ici un inventaire exhaustif des faits et gestes incitant à la panique bancaire n’est pas possible ; je vous renvoie à l’excellent compte rendu qu’en fait  Romaric Godin dansLa Tribune, ainsi qu’à l’analyse de Martine Orange dansMediapart.

Je mentionne juste deux exemples : le refus de  la Commission de démentir l’article du Süddeutsche Zeitung qui évoquait la possibilité d’un contrôle des capitaux et la vraie fausse rumeur lancée par les soins de Benoît Cœuré, selon laquelle les banques grecques ne devaient pas ouvrir lundi dernier. Une fois cette prévision catastrophique démentie par les faits, le spectre de la fermeture bancaire s’est savamment déplacé vers… mardi ! Que faudrait-il de plus pour que les épargnants se ruent vers les agences les plus proches ? La très honorable institution qui se doit d’assurer la stabilité du système financier européen n’accorde chaque jour qu’une somme « insuffisamment suffisante », pour maintenir les banques grecques tout juste à flot, mais toujours au bord du gouffre. Bref, les responsables européens, avec l’aide de leurs amis du FMI, recourent ici au bon vieux schéma de la prophétie apocalyptique, qui, en semant la panique, finit par s’accomplir, du fait de sa seule énonciation publique. Le but de l’opération étant d’obliger le gouvernement Tsipras à décider ses prochains mouvements, sous la menace imminente d’un « accident » bancaire. Ce qui pourrait expliquer les concessions supplémentaires que le gouvernement grec a faites en acceptant une hausse de la TVA et une augmentation des cotisations des retraités au système de santé. Pour compléter le tableau, juste avant la réunion du 24 juin, un dignitaire européen a jugé bon de rappeler à notre mémoire le scénario à la chypriote, dont la répétition pourrait intervenir à tout moment.

Mais cela n’a pas suffi, la preuve, la nouvelle proposition des trois institutions, qui en fait ne diffère que très peu de la précédente, exige de nouvelles baisses des retraites et des salaires, dans le but évident mais non avoué d’enfoncer encore plus la Grèce dans une misère économique et sociale la plus totale. Prenons juste un exemple parmi les mesures préconisées : le taux d’imposition des agriculteurs passe de 13 % à 26 %, voire à 33 %, et la réduction des taxes sur le pétrole destiné aux travaux agricoles est diminuée de moitié. Pareilles mesures, si elles venaient à s’appliquer à une agriculture à l’agonie, pousseraient la grande majorité des cultivateurs à renoncer à leur métier et à brader leurs champs pour moins que rien. Sous prétexte de multiplier les recettes de l’État, ce qui n’est tout simplement pas envisageable car on ne peut rien tirer de gens ruinés, la terre arable grecque changerait de mains. J’ajoute que, selon Wolfgang Münchau, l’avant-dernière proposition de ceux qui prétendent parler au nom de l’Europe, et qui diffère très peu de celle actuellement sur la table, produirait certainement un effet récessif de 12,6 % sur quatre ans, et que la dette risquerait d’atteindre 200 % du PIB en 2019. Avoir mis sous tutelle un pays dont la dette s’élevait à 120 % en 2009 pour le sauver de la faillite, et le conduire grâce aux conditionnalités de l’ « aide » accordée, à 200 %, c’est un brillant exercice de destruction massive, qui pourrait servir d’exemple à tous ceux et celles en Europe qui trouvent que l’austérité est un remède qui tue. À ce propos, on aimerait bien savoir sur  quelle logique Pierre Moscovici s’appuie pour affirmer qu’un paquet de 11 milliards d’économies étalées sur 18 mois, imposé à un pays en dépression, ne constitue point un plan d’austérité.

 Des acolytes bien commodes

Il est à noter que les déclarations catastrophistes les plus redoutables venaient de l’intérieur même du pays. Le bal fut ouvert par Dóra Bakoyánni, qui, dès le 24 mai déjà, avait affirmé l’imminence d’un capital control qui pourrait intervenir dans le long week-end de la Pentecôte. Adonis Georgiadis, transfuge de l’extrême droite au sein du gouvernement précédent et vendeur de pamphlets antisémites, n’a pas manqué d’apporter sa propre touche à l’édifice. Cependant, celui qui a vraiment donné le coup de grâce fut le directeur de la Banque de Grèce, Ioánnis Stournáras. Celui-ci, en outrepassant abusivement les limites de sa fonction en tant que garant de la stabilité financière grecque, a jugé bon de publier, la veille de l’Eurogroupe du 18 juin, un rapport qui prévoyait des catastrophes cataclysmiques, si jamais un accord avec les créanciers n’était pas signé tout de suite.

Terrorisme financier

Mais la BCE n’en est pas à son premier coup. En matière de chantage aux liquidités et d’ultimatums, Jean-Claude Trichet s’était avéré un maître à la tête de la BCE. Les Irlandais en ont goûté la saveur, lorsqu’en novembre 2010 et sous la menace du tarissement de liquidités, ils furent forcés de signer un mémorandum qu’ils s’obstinaient jusqu’alors à rejeter. On peut également évoquer l’éviction de Geórgios Papandréou de son poste de Premier ministre, une fois qu’il avait eu la très mauvaise idée de proposer en novembre 2011 un référendum. Quant au « bail in » chypriote, on aurait tort d’oublier le chantage ouvert qu’a exercé encore une fois la BCE, en menaçant de couper les liquidités aux banques chypriotes. Cet exercice de haut vol de terrorisme financier a prouvé encore une fois en Chypre son efficacité : il a obligé le parlement chypriote à revenir sur sa décision initiale et à accepter le 22 mars 2013 le même bail in qu’il avait rejeté trois jours avant.

Cependant, l’exemple le plus instructif reste celui qui concerne la fuite de capitaux « téléguidée », pendant la période entre les élections de mai et celles de juin 2012 en Grèce. Une étude du Peterson Institute, datée de mai 2012, sous le titre parlant « Comment un bank run peut faire partie de la solution » décrit en détail de quelle manière une panique bancaire en période électorale pourrait s’avérer fort opportune pour pousser les électeurs à se détourner de Syriza. Son auteur, Jacob Funk Kirkegaard, ne mâche pas ses mots : « Un bank run accéléré en Grèce pourrait offrir quelques opportunités. Nous ne devons donc nous attendre à aucun répit sur le front des menaces de la part des dirigeants de l’Eurozone. En effet, ces dirigeants peuvent encourager secrètement la panique bancaire, une stratégie qui révèlerait aux yeux de tous le caractère fallacieux et trompeur du programme électoral de Syriza. Si les déposants des banques grecques ne peuvent pas faire confiance aux promesses d’Alexis Tsipras concernant leur argent propre, pourquoi voteraient-ils pour lui ? » Et l’excellent homme pousse son raisonnement jusqu’à dire : « tout un chacun qui veut maintenir la Grèce dans l’Eurozone se doit de retirer de l’argent des banques ». On ne peut pas être plus clair, je crois. Il ne faut surtout pas imaginer que ce scénario-là était resté lettre morte à l’époque. Entre mai et juin 2012, résonnaient sans cesse à nos oreilles les paroles des dignitaires européens du plus haut rang, qui n’avaient de cesse  de nous prévenir des catastrophes apocalyptiques qui se produiraient si jamais Syriza gagnait les élections (voir ici un article relatif à cet épisode et l’appel que, à l’époque, Etienne Balibar, Michel Vakaloulis et moi-même avions lancé). Tout au long de cette période électorale, on a pu constater une fuite considérable de capitaux vers l’étranger, dont une grande partie fut rapatriée juste après la formation du gouvernement Samaras. Une véritable campagne d’intimidation avait été lancée en interne et en externe, afin de terroriser les électeurs par la perspective de la perte de leur épargne et d’une fermeture imminente des grandes entreprises, si, par malheur, Syriza l’emportait. Une grande banque systémique grecque, Eurobank, pour ne pas la nommer, avait même donné la consigne à ses employés de bien prévenir la clientèle de la fermeture certaine de la banque, si Syriza l’emportait, après quoi leurs économies seraient parties en fumée.

Mais nul besoin de remonter si loin pour trouver des précédents. Début février 2015, la BCE avait annoncé la suppression de lignes de financement des banques grecques, qu’elle acceptait depuis 2010. « Les responsables de la banque centrale ont annoncé que l’institut monétaire mettait un terme à partir du 28 février – dans les faits, la mesure devrait prendre effet dès le 11 février pour des raisons techniques – à la clause qui lui permettait d’accepter les titres grecs, classés aujourd’hui en « junk bonds », que les banques grecques placent en dépôt de garantie pour obtenir un refinancement bancaire. Pour les banques grecques, privées de tout accès aux financements interbancaires, ce dispositif est essentiel pour assurer leur financement », écrivait Martine Orange. Après avoir accepté pendant plusieurs années d’acheter des titres qui étaient classés très bas dans l’échelle d’évaluation, subitement la BCE a commencé à se poser des questions sur la qualité de ces titres, en se souvenant tout d’un coup que son règlement lui interdit d’acheter des titres qui ne sont pas dotés du fameux AAA. Il va de soi que le moment ne fut pas choisi au hasard : Syriza venait de remporter les élections du 25 janvier et les négociations avec les créanciers venaient juste de commencer.

Toutefois, la sortie systématique de la BCE de ses prérogatives ne s’arrête pas là. L’honorable institution refuse de rendre à la Grèce les gains qu’elle a faits sur les obligations grecques achetées dans le cadre du programme SMP (Securities Market Program, un programme d’achat des obligations les plus attaquées sur les marchés, afin de faire baisser les taux d’intérêt). Ces gains, pour la seule année 2014, s’élèvent à 1,9 milliard. Bref, la BCE, au même titre que n’importe quel spéculateur, profite allègrement de taux d’intérêt très élevés de cette catégorie de titres, et, en ce moment critique où l’économie grecque est à l’asphyxie, elle refuse de payer à la Grèce son dû, si celle-ci ne cède pas aux exigences extravagantes de ses créanciers. Car, à partir du 1er janvier 2013, les intérêts perçus sur ces titres doivent obligatoirement être rétrocédés aux banques centrales nationales, qui elles-mêmes les mettront à la  disposition du pays émetteur du titre. Mais l’« exception » grecque autorise quelques écarts par rapport aux accords que les institutions ont signés avec la Grèce. Non pas que cela ne se fasse pas également au détriment d’autres pays comme le Portugal. Quoi qu’il en soit, dans le cas de la Grèce, ce type de pratiques constitue plutôt la règle que l’exception.

Un scénario assez semblable au bank run de mai 2012 est en cours aujourd’hui, sauf que, maintenant, l’implication des institutions européennes se fait ouvertement et non plus à mots couverts. Comme l’a révélé Martine Orange dans son article « Grèce : les créanciers instaurent la stratégie de la terreur », une étude de la très honorable Goldman Sachs avait déjà tout prévu depuis le mois de décembre : « Cette volonté de semer l’inquiétude ressemble tant au scénario de Goldman Sachs, établi dès décembre, où s’enchaînaient panique bancaire, fermeture des banques, contrôle des capitaux, capitulation politique, mise sous tutelle économique et nouvelles élections, que cela en devient troublant. » Pour sa part,Romaric Godin remarquait : « Tout au long de la semaine, les créanciers et la BCE ont tout fait pour déstabiliser les déposants grecs. Et placer le gouvernement grec devant un choix impossible. » Faudrait-il rappeler ici que M. Mario Draghi fut pendant de longues années le représentant attitré de Goldman Sachs en Europe ?

Déstabilisation politique

Mais Goldman Sachs n’en était pas à son dernier coup. Le site économique grec capital.gr relate que la très honorable maison prévoit un défaut imminent de la Grèce dans l’euro, accompagné d’un capital control. Goldman Sachs précise que la période chaotique qui pourrait suivre comporte tout de même « le risque d’une sortie de l’euro au lieu de conduire au changement politique qui permettrait d’arriver à un accord » (c’est moi qui souligne). Au cas où nous n’aurions pas compris quel est le changement politique que l’honorable maison appelle de ses vœux, elle en dresse les contours d’une façon on ne peut plus claire. Le capital controlruinerait la confiance des électeurs dans le gouvernement, de sorte que la voie vers « un nouvel équilibre politique interne » serait enfin ouverte. Par « nouvel équilibre politique », il faut entendre une nouvelle configuration de la carte politique grecque entre les partis, qui permettrait d’arriver finalement à la conclusion d’un accord. Cette recomposition de la scène politique grecque, qui serait atteinte grâce aux turbulences d’une période trouble de transition, implique nécessairement de nouvelles élections ainsi que la formation de coalitions inédites, nous verrons lesquelles par la suite. Le tout rendra possible le maintien de la Grèce dans la zone euro sous un gouvernement suffisamment docile envers les diktats des créanciers.

Si ce qui vient d’être décrit n’est pas un scénario de déstabilisation méthodiquement planifiée d’un gouvernement élu, qu’est-ce que c’est ? En provoquant un bank run, en ouvrant la voie vers lecapital control qui dressera la population contre le gouvernement actuel, certains espèrent  avoir raison de Syriza. Qui plus est, un accord en contrepied du programme électoral de Syriza, que les créanciers veulent imposer manu militari, constituerait l’occasion rêvée pour que la coalition de gauche radicale  qu’est Syriza vole en éclats. Une scission au sein de Syriza permettrait d’isoler le bon grain de l’ivraie et ouvrirait la voie à un autre gouvernement de coalition. Remarquons que la dernière mouture de la proposition des créanciers comporte une coupe de 400 millions dans le budget de la défense. Pareille baisse dans le budget de la défense aurait pu être la bienvenue, si elle ne comportait pas une certaine arrière-pensée. ANEL, la droite souverainiste qui est l’alliée actuelle de Syriza, est particulièrement attachée au maintien d’un budget militaire considérable. Certes, dans les programmes précédents, il y a eu quelques coupes dans le budget de la défense, mais, que je sache du moins, jamais de cette ampleur. Alors on ne peut que s’étonner de voir comment ceux qui, au début du programme de « sauvetage », avaient exigé que la Grèce honore les contrats signés pour l’achat d’armements au grand profit de la France et de l’Allemagne, tout d’un coup, par une illumination divine, exigent non seulement des coupes, mais des baisses d’effectifs, c’est-à-dire des licenciements de militaires professionnels. Scission donc de Syriza, éclatement de la coalition avec ANEL, voici quelques éléments ouvrant une voie royale vers un autre gouvernement plus commode.

Stavros Théodorakis, un présentateur télévisuel, qui se trouve actuellement à la tête de Potami, réputé pour ses accointances avec le cercle des créanciers, est appelé à jouer un rôle clef dans ce processus. Précisons qu’il prône ouvertement la nécessité de coupes budgétaires avec baisse des retraites, et s’oppose à toute idée de restructuration de la dette, ainsi qu’à toute augmentation d’impôts des couches supérieures de la société. Ce dirigeant d’une formation qui n’a pas fait plus de 6 % aux dernières élections est, dans le contexte actuel, l’interlocuteur privilégié de Bruxelles. Il multiplie les rencontres avec M.M. Juncker, Sapin, Moscovici et Schulz, ce dernier ne manquant pas une occasion d’affirmer que c’est bien avec Potami que Syriza aurait dû former un gouvernement de coalition. Stavros Théodorakis participe même à des dîners avec des chefs d’État ! Comble de l’affaire, ce chantre des intérêts des créanciers se présente en Grèce comme un porte-parole officieux de Bruxelles, faisant part aux Grecs du mécontentement de M. Juncker devant l’« intransigeance »  supposée du Premier ministre grec.

Si par malheur ces manœuvres ne réussissent pas à le faire plier, on peut compter sur l’usure qui pourrait saper la popularité de Tsipras auprès d’une population qui, jusqu’à maintenant, continue contre vents et marées à lui accorder son soutien. Cette usure sera assurée si Tsipras est amené à appliquer des mesures d’austérité, imposées par les créanciers.  La chose pourrait être facilitée par un coup de main opportun et un bank run organisé ferait bien l’affaire. Les créanciers seraient même disposés à conduire la Grèce au défaut, tout en faisant porter la responsabilité de celui-ci à Syriza. Il s’ensuivrait nécessairement une première période confuse sinon chaotique, particulièrement propice à des manifestations dites « de casseroles », dans la veine de celles organisées au Chili d’Allende, qui contribueraient à faire tomber le gouvernement. Je dois ajouter ici que chaque fois que les négociations se trouvent à un point crucial, des groupes qui se disent anarchistes créent des incidents violents aux alentours de l’École polytechnique, en brûlant des voitures, cassant des vitrines, etc. Il se peut qu’il s’agisse effectivement d’anarchistes, mais la coïncidence avec les réunions de l’Eurogroupe aussi bien que l’attitude tolérante de la police à leur égard laissent songeur.

Pour ceux qui pourraient voir l’analyse qui précède comme une énième théorie du complot, je propose de prêter l’oreille à un économiste peu suspect de verser dans le complotisme, à savoirRomaric Godin : « L’Europe doit donc de toute urgence abandonner ses buts politiques et accepter enfin le résultat de l’élection du 25 janvier. Elle doit aussi respecter sa propre parole, celle qui, le 20 février, affirmait que la Grèce devait décider de ses propres réformes dans le cadre du programme. » (souligné par moi).

Des amis qui vous veulent du bien

J’en viens aux faits et gestes politiques qui permettent d’affirmer qu’un plan de renversement du gouvernement Tsipras est lancé par Bruxelles. Stavros Théodorakis, encore lui, fut invité par la Commission et reçu par M. Juncker le jour même où le Premier ministre était convoqué à Bruxelles. Notons qu’il ne fut pas le seul à se rendre à Bruxelles le mercredi 24 juin, mais s’y sont précipités tous ceux qui vont être appelés à former un gouvernement obéissant, une fois Tsipras évincé. On y a vu Antónis Samarás, dont les déclarations étaient plus qu’explicites : il propose un gouvernement d’unité nationale sans Alexis Tsipras, en faisant quand même la concession de s’abstenir de toute participation personnelle au schéma proposé. En même temps, le nom de Konstantínos Karamanlís commence à circuler ; celui-ci pourrait en effet se présenter comme un recours possible, dans la mesure où il n’a occupé aucun poste gouvernemental depuis septembre 2009 ; il est moins usé que ceux qui se sont compromis dans la gestion des memoranda. Quant à Stavros Théodorakis, toujours lui, du haut de ses 6 % de voix et de sa science économique, il vient de donner une interview au Financial Times, où il précise qu’il est à la disposition de qui veut l’entendre pour un remaniement gouvernemental. Mais, le 24 juin, a également été reçue à Bruxelles Fofi Gennimata, qui vient de succéder à Evangelos Venizelos à la tête du Pasok, forte des 289 482 voix que celui-ci avait récoltées aux dernières élections. J’invite le lecteur à réfléchir un instant pour se poser la question suivante : que pouvait faire tout ce beau monde à Bruxelles, au moment où les négociations avec les créanciers se trouvaient à leur point critique,  sinon se présenter comme une alternative « sérieuse » au gouvernement actuel, qui ne serait composée que « de personnes responsables et d’adultes » (dixit Mme Lagarde) ?

Coup d’État financier

Deux scénarios se dessinent : ou bien il faut obliger le gouvernement Tsipras à la capitulation totale en lui faisant accepter des mesures exceptionnellement dures, auxquelles il faudrait éventuellement ajouter l’arme majeure du capital control, ce qui le discréditerait aux yeux de l’opinion, ou bien il faudrait provoquer une scission opportune au sein de Syriza pour introniser ensuite un gouvernement de coalition avec la soi-disant bonne partie de Syriza, où M. Théodorakis jouerait un rôle de premier ordre. Une combinaison des deux scénarios reste bien entendu possible. Le tout dans une perspective de défaut. Pour éviter les malentendus, je précise que j’appelle de mes vœux une cessation de paiement, même si cela se traduit par un défaut, à la condition qu’il soit soigneusement préparé et encadré. Sans cela, il pourrait déclencher un enchaînement d’événements incontrôlables qui mèneraient à la chute du gouvernement.

Ce qui vient d’être décrit ici porte un nom, ce n’est rien d’autre qu’un coup d’État financier où, à la place des tanks, on fait appel aux banks ! Un coup d’État fomenté par les institutions européennes, voilà le visage de l’Europe que les dirigeants européens souhaitent donner à voir à leurs peuples. Je ne saurais dire si ceux-ci tolèreront ces agissements. Les trois de l’ex-Troïka, malgré leurs dissensions internes, font tout pour dresser les citoyens européens contre les Grecs en leur faisant croire qu’ils ont payé et continueront à payer pour le sauvetage de la Grèce. Ce que l’on oublie de dire, c’est que le programme qui fut présenté en 2010 comme un plan d’ « aide »  à la Grèce, n’était en réalité qu’un généreux plan de sauvetage de banques européennes exposées à la dette grecque. Tous les économistes qui se respectent s’accordent aujourd’hui sur ce point : à l’époque, il aurait fallu faire une restructuration importante de la dette grecque qui l’aurait rendue viable, avant d’entreprendre n’importe quelle mesure pour la suite. Or, une telle restructuration aurait pu faire perdre 30 milliards à peu près aux banques européennes, au premier rang desquelles se trouvaient BNP Paribas, la Société générale et la Deutsche Bank. Et, pour que celles-ci n’accusent pas une perte qui aurait nécessité leur recapitalisation aux frais du contribuable, un sauvetage qui l’a ruinée a été imposé à la Grèce. Bref, ce qui fut présenté comme un plan d’aide à la Grèce n’a été qu’une recapitalisation indirecte des banques, qui ont eu toutes leurs aises pour se débarrasser à temps des obligations grecques avant la restructuration de 2012 ; ainsi, la patate chaude est passée du secteur privé aux États. Le fait est confirmé par la toute récente déposition de Panayotis Rouméliotis à la Commission parlementaire « Vérité sur la dette ». Rouméliotis, qui représentait à l’époque la Grèce au sein du FMI, a révélé que des représentants de grandes banques européennes furent reçus à plusieurs reprises par l’équipe du FMI à Athènes afin d’éviter une restructuration qui les prendrait de court. Force est de constater que l’appel « Sauvons le peuple grec de ses sauveurs » que nous avions lancé en février 2012 n’a malheureusement rien perdu de sa pertinence.

Négociations ?

J’espère que cette stratégie des créanciers qui met en danger, non seulement la Grèce mais l’Europe dans son ensemble, soulèvera un vent de protestations sans précédent partout dans le monde. Car, si les créanciers arrivent à leurs fins, si ce coup d’État financier monté par les institutions européennes et le FMI réussit, il ne restera plus rien de l’idée européenne. Des cendres calcinées de celle-ci émergera non pas le visage « complaisant » du chef de Potami, mais celui, odieux, de l’Aube Dorée. À qui d’autre pourrait profiter le sentiment d’une impuissance totale et enragée qui résultera inévitablement devant le spectacle des manœuvres qui ne vous laissent aucune prise sur votre propre destin ? Faire preuve de tant d’aveuglement au moment où partout en Europe des partis d’extrême droite et des formations ultranationalistes ouvertement racistes prennent le pas, c’est dire jusqu’où les dirigeants européens sont disposés à aller pour imposer le dogme néolibéral. Ou bien il ne s’agit point d’aveuglement, mais d’un choix délibéré ? Certes, il y en a quelques-uns parmi le cénacle de dirigeants qui, face à ce danger, optent pour un scénario plus soft, celui non pas de l’éviction immédiate, mais de la prolongation de six mois du programme sans restructuration de la dette, six mois pendant lesquels Syriza sera sommé d’appliquer les contre-réformes préconisées partout en Europe comme un remède miracle à la crise. Un tel scénario présente l’avantage de compromettre les chances de Podemos et d’autres formations affines. Mais il n’empêchera point la montée en force de l’Aube Dorée, qui serait en droit dans ce cas d’affirmer que les politiciens sont tous « les mêmes ». À qui d’autre pourrait profiter la conviction que les politiques sont « tous vendus », qui ne manquera pas de s’imposer alors à l’opinion ?

Le dernier rebondissement, avec le durcissement maximal des créanciers qui se sont réglés sur les positions libérales à outrance de Mme Lagarde, ne fait que confirmer l’hypothèse d’une stratégie de déstabilisation. Il est à noter que cette nouvelle provocation intervient juste deux jours après que les représentants des trois institutions aient accepté comme une bonne base de discussion les positions grecques, tandis que, deux jours plus tard, le texte présenté par les créanciers tordait le cou à l’esprit initial du texte grec, qui, de son côté, consistait à faire porter le maximum de charges aux entreprises bien portantes et non pas uniquement aux plus faibles, très fragilisées par les coupes successives de revenus. En somme, les propositions du FMI adoptées par les créanciers dans leur ensemble sont si extrêmes qu’elles ne sauraient qu’être rejetées. Si par bonheur Tsipras, sous la menace de la faillite, signait un accord plus dur que celui proposé à Samaras, quelle aubaine ! Les  peuples européens comprendraient une bonne fois pour toutes que celui qui sort du droit chemin paie le prix fort.

Les institutions européennes se sont avérées de véritables maîtres ès manipulation et vraies fausses négociations. Un mécanisme médiatique s’est mis au service de cette stratégie. De faux bonds en retournements de veste, de déclarations qui étaient faites pour s’annuler un jour après, d’engagements pris et cyniquement et ouvertement non tenus, depuis cinq mois, ils n’avaient que fait semblant de négocier, afin de repousser la chose jusqu’au mois de juin, à la fin duquel la Grèce, sans prolongation du programme, ne touchera pas la dernière tranche d’aide. Pour que ces ajournements incessants passent auprès de l’opinion, les créanciers ont sans cesse dénoncé l’« intransigeance »  irresponsable du gouvernement grec. Et ils l’ont fait au moment où ils l’obligeaient, par le tarissement des liquidités, à reculer considérablement par rapport à ses positions initiales. Tout avait bien commencé par un coup tordu : comme l’a révélé Paul Mason, journaliste au Channel 4, Varoufakis était arrivé à l’Eurogroupe du 16 février avec une des propositions de Moscovici en mains, pour découvrir que ce n’était point sur celle-ci que portait la discussion, mais sur un texte beaucoup plus dur que Dijsselbloem allait sortir pendant la réunion. En faisant circuler des contre-vérités, en traitant comme nulle et non avenue la proposition de 47 pages déposée par Syriza début juin. Ce texte ne reprenait point les positions propres du gouvernement grec, mais bel et bien celles issues de quatre mois de pourparlers inutiles. Ainsi, les institutions européennes ont réussi à repousser les vraies négociations vers une période critique où le gouvernement grec est obligé d’effectuer plusieurs remboursements. Mais les dignitaires de Bruxelles ont voulu y voir un document irrecevable, puisque non conforme à leurs  diktats. Fin juin, ils croyaient réussir à coller Tsipras dos au mur et escomptaient rafler ainsi la mise. C’est à ce moment que, pour gagner encore du terrain sur l’adversaire, ils ont sorti le bazooka dubank run orchestré, comme arme de destruction massive. Mais Tsipras, tant bien que mal, continue à résister. Certes, il a fait des concessions, dont plusieurs sont inacceptables, comme les privatisations, mais il continue à ne pas accepter une capitulation totale et sans conditions. Et sur ce point, même si l’on n’est pas d’accord sur sa stratégie, il faudrait lui rendre un hommage appuyé ; tenir bon lorsqu’on est seul dans la fosse aux lions demande un certain courage, voire un courage certain.

Devant tant de mauvaise foi, tant d’arrogance, tant de perfidie liées à une stratégie de déstabilisation d’un gouvernement qui dérange, j’aimerais inviter le Premier ministre grec à suspendre les paiements des créanciers jusqu’à ce que la croissance revienne en Grèce. Il serait utile de rappeler ici que, selon le rapport provisoire de l’audit de la dette grecque, celle-ci a explosé entre 1980 et 2010, non pas à cause de dépenses licencieuses, mais par l’effet conjugué de taux d’intérêt très élevés et de la course aux armements.

Tous égaux devant la loi ?

Mme Merkel ne cesse de demander plus d’efforts aux Grecs. On ne saurait que lui donner raison. C’est vrai qu’une hausse de 45 % de mortalité infantile, de 42 % du taux de suicides, accompagnées d’une baisse de trois ans de l’espérance de vie ne lui donnent pas entière satisfaction. De même, le taux de retraités qui vivent en dessous du seuil de pauvreté (44,6 %) est sans doute scandaleusement bas. Encore un effort doit donc être fait par ce ramassis de « privilégiés », qui passent leur temps à bronzer au soleil, pour atteindre un chiffre qui témoignerait de leur volonté de se mettre enfin au travail. Ce qui voudrait dire, pour les plus vulnérables parmi eux, qu’ils se décident enfin à apporter leur contribution à la réussite des programmes d’« aide », en ayant la politesse de se laisser mourir. Si l’on ajoute à cela que le plus grand hôpital du pays, Evangélismos, n’a de quoi continuer à fonctionner que jusqu’à la fin juillet, il devient on ne peut plus clair que l’effort qui est demandé aux Grecs n’est autre qu’une accélération intensive du travail de la mort. Force est de constater que l’Europe, telle qu’elle fonctionne aujourd’hui, s’avère être un mécanisme redoutable de thanatopolitique, tant à l’endroit des migrants à qui elle offre une place dans les fonds marins, qu’à l’endroit des populations vulnérables, considérées comme superflues, qui sont invitées à presser le pas vers la paix éternelle.

Pour ceux qui pourraient trouver que ces affirmations sont gratuites, je voudrais rappeler la réponse du commissaire aux affaires économiques et monétaires de l’époque, à une question d’eurodéputés de Syriza qui, en en septembre dernier, dénonçaient la violation systématique des droits sociaux, économiques et humains de la population grecque pendant les quatre dernières années, en s’appuyant sur un rapport relatif aux droits humains des Nations unies présenté par Cephas Lumina. L’excellent M. Jyrki Kataïnen n’a pas hésité un instant à dire que « la validité de la Charte des droits fondamentaux de l’UE est suspendue en Grèce mais aussi dans tous les pays sous programme », dans la mesure où les memoranda n’ont pas à être soumis au droit communautaire. Une bévue d’un ultra ? Voyons ce qu’en décembre dernier, son successeur, le très socialiste  M. Moscovici, avait répondu à une question d’eurodéputés de Syriza sur le non-respect du droit de travail en Grèce. Selon lui, les memoranda ne sont que des accords intergouvernementaux et en tant que tels se soustraient au droit communautaire. Bref, ce qui est affirmé sans ambages ici est le fait que le principe fondateur de la démocratie depuis Solon, à savoir l’isonomie, n’est plus valable, ni pour les Grecs, ni pour les autre pays sous la tutelle de la Troïka. En somme, ce dont il s’agit, c’est de l’instauration de véritables zones de non-droit au sein de l’Europe, qui fonctionneront comme hauts lieux d’une exploitation extensive, d’autant plus que, du droit du travail, il ne reste presque rien. Un presque rien que les créanciers trouvent encore excessif et s’efforcent de rendre équivalent à zéro. Cettecréation des zones économiques spécialisées, régies par la seule loi du plus fort, ne sert pas uniquement la maximisation de profits sur place, mais l’intimidation de ceux qui ailleurs en Europe se mettront à résister à l’offensive néolibérale. Si jamais vous vous mettez en tête que c’est à vous de changer quoi que ce soit, voilà quel sort vous attend. Il est largement temps de se poser la question : quel est le régime où les droits fondamentaux d’un texte fondateur de l’UE sont valables – même si ce n’est qu’en théorie – pour les uns, et non pas pour les autres, en fonction de leur pays de résidence et de leur appartenance ethnique ? Je laisse au lecteur le soin d’en tirer les conclusions qui s’imposent.

De nos responsabilités

De tout ce qui précède, on peut conclure que l’Europe de M.M. Juncker, Schulz, Moscovici et Dijsselbloem n’est qu’une structure de pouvoir techno-financier dont la seule raison d’être est le sauvetage à tout prix des banques, quitte à en sacrifier quelques-unes de la périphérie pourvu que le résultat politique soit là. Car cette technostructure européenne, dotée d’un mécanisme qui peut semer la terreur sur les marchés, et pourvue d’un dispositif thanatopolitique, a pour but de « neutraliser la démocratie », lorsque celle-ci comporte un risque de rupture. Et tout moyen est bon, même la faillite du système bancaire grec, si c’est pour arriver à ses fins, c’est-à-dire faire tomber un gouvernement élu, non point révolutionnaire, mais qui se bat tant bien que mal pour défendre les droits du peuple dont il est le représentant.

Devant cette attaque sans précédent de la notion d’isonomie, devant cette mise à mort de la démocratie dans le pays même qui l’a vue naître, pourrions-nous rester muets ? Plusieurs d’entre vous ont déjà entrepris des initiatives, des textes, des actions de solidarité avec les Grecs, ce dont je les remercie de tout cœur. Mais, aujourd’hui, un seuil a été franchi. Il ne s’agit plus ni du sort des Grecs ni de celui de l’Europe. Ce qui est en danger est cette infime marge de démocratie que nos dirigeants daignent bien nous laisser encore. Un coup d’État est en train d’avoir lieu sous nos yeux, et il n’est pas possible de se taire. Faisons entendre nos voix partout dans le monde. Il y va de notre responsabilité.

Athènes, le 25 juin 2015

Annexe 

 Du paquet Juncker pour la Grèce, du respect de règles européennes, et d’autres histoires à dormir débout 

Les dirigeants européens rivalisent à qui mieux mieux en double langage et contre-vérités ; le prétendu « ami » des Grecs au sein des institutions européennes qui faisait jusqu’à récemment étalage d’amabilités à l’endroit de Tsipras, M. Juncker pour ne pas le nommer, veut nous faire croire qu’il offre à la Grèce un généreux paquet de 35 milliards, étalé sur cinq ans et destiné aux investissements. Certains se sont empressés de le nommer « paquet Juncker ». Mais des journalistes qui honorent leur  profession sont allés voir de plus près quel est ce paquet que le président de la Commission offrirait en cadeau à la Grèce. Or, il ne s’agit de rien d’autre que des fonds structurels faisant partie d’un « repackaging » de fonds non utilisés. La Grèce, en tant que membre à part entière de l’UE, y a droit au même titre que les autres pays membres, indépendamment de toute conditionnalité et certainement pas en fonction de l’issue des négociations. Cependant, M. Juncker ne se contente pas de présenter comme un «  plan pour la Grèce » ces fonds, que l’UE doit à la Grèce par la redistribution proportionnelle parmi les pays membres de fonds qui sont restés dans les tiroirs, mais, en pleine contradiction avec ses prérogatives, il met une conditionnalité politique à son versement. Bref un chantage on ne peut plus cynique, où la Commission se croit en droit de retenir une somme due à un pays en état de nécessité et fait dépendre son versement de l’issue de discussions. « Il est assez étonnant de penser que la Grèce, membre jusqu’à nouvel ordre à part entière de l’Union européenne, serait « moins bien servie » dans le cadre de la répartition des fonds européens si elle ne parvenait pas à s’entendre avec les créanciers. La Commission a donc commencé à mettre en place cette « zone euro à deux vitesses »  qu’Alexis Tsipras évoquait ? », écrit Romaric Godin.

Mais il y a plus. Selon des informations provenant des étudiants italiens, la Commission aurait suspendu pour des raisons de procédure le programme Erasmus pour la Grèce ! Si cette exclusion, contraire non seulement aux règlements mais à la notion même de l’isonomie, s’avère fondée, elle serait la preuve supplémentaire que ceux qui s’échinent à exiger de la Grèce le respect des règlements sont disposés à les violer sans hésitation, lorsqu’il s’agit d’exercer un chantage politico-économique à un gouvernement réfractaire. En d’autres termes, la Commission traite d’ores et déjà la Grèce comme un non-membre de l’UE, en suspendant les aides auxquelles elle a droit, jusqu’à ce qu’à ce que la Grèce cède sur tous les fronts.

Comme quoi il n’y pas à s’étonner que M. Juncker ait été Premier ministre du Luxembourg pendant la glorieuse période qui a transformé celui-ci en un paradis fiscal. Il serait intéressant de savoir à combien de manque à gagner pour les autres pays européens s’est traduite cette politique. Combien de manque à gagner pour la Grèce, qui aujourd’hui manque des fonds suffisants pour couvrir les besoins les plus élémentaires d’un système de santé en ruines ? Selon Eva Joly, il se peut que le montant s’élève à plusieurs milliards.

M. Juncker ne manque pas de dénoncer à qui veut l’entendre le mépris des règles européennes dont ferait preuve Tsipras. Le président de la Commission, si attaché au respect des règles, saurait-il nous dire quelle règle européenne permet à l’Allemagne de dépasser pendant cinq années consécutives le 6 % réglementaire d’excédents commerciaux, sans être le moindre du monde inquiétée par aucune instance européenne ? Si j’y fais mention, c’est parce que, comme le dit Ambrose Evans-Pritchard dans le Daily Telegraph, un excédent de l’ordre de 7,9 % comme celui qu’affiche actuellement  l’Allemagne, a comme effet moins de croissance et plus de chômage pour les autres pays européens. Bref, l’Allemagne n’exporte pas que ses produits, mais a trouvé moyen d’exporter du chômage à ses partenaires européens, sans qu’aucun d’entre eux ne trouve à y redire.

Enfin, last but not least, jusqu’à quand les économistes de la BCE continueront-ils à cacher sous le tapis l’état pas franchement rassurant de la Deutsche Bank ? La situation délicate de ce géant aux pieds d’argile, embourbé dans une série de scandales et soupçonné de blanchiment d’argent, représente un danger considérable non seulement pour l’Europe mais pour l’économie mondiale. La Deutsche Bank vient d’écoper d’une amende de 2 milliards pour falsification du Libor, et est actuellement « aux prises avec quelque 6 000 litiges » juridiques ! À la mi-mars, ses filiales américaines ont été les seules, avec celles de Stantander, à ne pas passer les Stress Tests de la Fed. Mais le plus inquiétant est que le géant allemand, poursuivi outre-Atlantique pour évasion fiscale, détiendrait dans son portefeuille une bombe de plusieurs gigatonnes. Rien de moins que quelques trillions de produits à très haut risque, voire toxiques. Sur leur montant exact, les chiffres les plus fous circulent. Il y en a qui parlent de 3 à 4 trillions, d’autres de quelques dizaines. Peut-être que le très pointilleux M. Draghi daignerait nous informer de ce qu’il en est au juste. Car lorsque cette bulle-là éclatera, le krach qui suivra, fera paraître celui de 1929 comme une partie de plaisir. C’est bien commode de présenter la Grèce, dont la dette ne représente même pas 2 % du PIB de la zone euro, comme le danger qui menacerait l’économie européenne, mais en tant que citoyens européens, nous avons tout de même le droit d’en savoir un peu plus long sur les pratiques plus que douteuses et surtout sur l’état de santé de la DB. Certes, le niveau de la TVA sur les pâtes à Athènes est un sujet d’importance cruciale, qui suscite à juste titre un intérêt mondial. Néanmoins, on ne peut s’empêcher de penser qu’il pourrait s’agir là d’une manœuvre de diversion bien commode, destinée à détourner l’attention de ce qui pose vraiment problème.

Texte proposé par Vicky Skoumbi, invitée des atterrés, rédactrice en chef de la revue grecque de philosophie “αληthεια” , 29/06/2015

Source: http://www.les-crises.fr/un-coup-detat-financier-contre-athenes-par-vicky-skoumbi/


Grèce : défense de la démocratie, par Jacques Sapir

Tuesday 30 June 2015 at 00:44

La décision d’exclure la Grèce d’une réunion qualifiée après coup d’informelle de l’Eurogroupe le samedi 27 juin représente l’équivalent d’un coup de force de la part du Président de l’Eurogroupe, M. Jeroen Dijsselbloem. Il s’agit d’un acte inouï qui viole tant l’esprit que la lettre des traités de l’Union européenne. L’absence de réaction des autres participants est tout aussi grave. Ce jour fut un jour très noir pour la démocratie. Ce dimanche 28 juin les pressions sur la Grèce ont reprises. Les jours qui viennent pourraient, eux aussi, s’avérer des jours sombres pour la démocratie en Europe comme en Grèce. Il faut en mesurer la portée et les conséquences.

Les faits

La réalité des faits est que M. Dijsselbloem a demandé, lors de la réunion de samedi 27, au Ministre grec des finances, M. Yanis Varoufakis de sortir de la salle. L’Eurogroupe a publié un communiqué sans l’accord du Ministre grec, que l’on trouvera ici.

Communiqué de l’Eurogroupe, publié au Journal Officiel de l’UE

A - Eurogroup Statement

Ce communiqué porte en note que le texte représente l’avis de tous les membres sauf la partie grecque. La position de la partie grecque n’est nullement évoquée comme cela se pratique (ce que l’on appelle une « position minoritaire »). On doit ici faire plusieurs remarques :

  1. Si la réunion était, comme l’a dit M. Dijsselbloem une réunion « informelle », pourquoi a-t-elle fait l’objet d’un communiqué ?
  2. Si cette réunion n’était pas informelle, de quel droit le Ministre grec en a-t-il été exclu, et de quel droit sa position n’est pas mentionnée dans le communiqué ?
  3. L’Eurogroupe est un « groupe informelle » dans le cadre des institutions de l’Union européenne. Mais, il agit par délégation du Conseil européen, dont il reprend une partie des attributions. De ce point de vue, il est tenu par les règles, tant explicites que tacites qui sont celles du Conseil.

La décision de M. Dijsselbloem constitue donc un abus de pouvoir caractérisé, un acte qui pourrait être jugé comme illégal, que ce soit devant la Cour Européenne de Justice ou devant la Cour Internationale de La Haye. Il est donc inouï que M. Dijsselbloem ait pris cette décision. Mais, il est tout aussi inouï que les autres Ministres présents n’aient pas réagis. De ce point de vue, la position de Michel Sapin, Ministre français des finances est parfaitement incompréhensible. Il ne peut à la fois prétendre que « la Grèce fait toujours partie de l’Union Economique et Monétaire » et assister, comme il le fit ce samedi 27 juin, à une réunion dont le Ministre grec était exclu. Il y a là une contradiction irrémédiable. Rappelons que, au cas où la décision de M. Dijsselbloem serait condamnée en justice, tous les Ministres qui ont assisté à cette réunion pourraient être poursuivis pour complicité dans un abus de pouvoir.

La position de Yanis Varoufakis.

Sur son blog[1], le Ministre des finances grec donne très clairement les raisons pour lesquelles il n’a pas accepté les propositions de l’Eurogroupe ainsi que les raisons qui le conduisent à penser que ces propositions constituaient en réalité un ultimatum. Le texte de sa déclaration, qui n’a pas été contestée par les autres membres de l’Eurogroupe et que l’on peut considérer comme authentique, montre que l’on a été en présence d’un raisonnement économique parfaitement articulé. Les arguments avancés par M. Varoufakis sont des plus sérieux, et il a reçu le soutien de plusieurs économistes de réputation internationale (comme Paul Krugman ou Joseph Stiglitz).

Il est toujours possible de contester des éléments de la logique de Varoufakis. Mais il faut alors se situer au même niveau que lui. Force est de constater que ce n’est pas le cas avec les soi-disant « propositions » formulées par l’Eurogroupe. En réalité, ce dernier n’a nullement abordé la question du développement économique de la Grèce, mais uniquement par quels moyens et quelles procédures continuer d’extorquer de ce pays des paiements qu’il ne peut fournir. L’Eurogroupe a bien poursuivi une logique politique et non une logique économique. Dès lors, la rupture entre la Grèce et l’Eurogroupe prend une toute autre dimension qu’un conflit entre un débiteur et ses créanciers. Ce qui était en cause est la souveraineté du peuple grec. La rupture ne s’est donc pas faite sur des questions économiques mais sur le constat que l’Union européenne applique désormais l’équivalent de la « doctrine Brejnev » de souveraineté limitée, qui avait été exprimée lors de l’intervention des pays du « Pacte de Varsovie » en Tchécoslovaquie en août 1968.

Il est un comble qu’alors que l’Union européenne se drape dans une « défense de la démocratie » par exemple en Ukraine (en oubliant opportunément le rôle des milices fascistes qui aident le gouvernement de Kiev) elle piétine de la manière la plus froide et la plus claire cette dite démocratie en ce qui concerne la Grèce. Cette leçon devra être retenue. Le 27 juin 2015 pourrait bien être dans l’esprit de beaucoup l’équivalent pour l’Union européenne de l’intervention soviétique en Tchécoslovaquie, qui aida beaucoup à décrédibiliser le régime soviétique et précipita sa chute 20 ans après.

Le rôle de la BCE

Dans ce contexte, la décision de la Banque Centrale Européenne de maintenir au même niveau l’aide à la liquidité qu’elle fournissait à la Grèce (ce que l’on appelle l’ELA) a été le déclencheur des événements de dimanche 29 juin au soir. Confrontées à des sorties importantes de capitaux depuis le mois de janvier dernier, les banques grecques sont en effet vitalement dépendantes du programme d’aide de la BCE. Les sorties se sont accélérées depuis ces derniers jours. L’annonce du maintien de l’ELA mais à son même niveau équivalait à menacer les banques d’une pénurie de liquidité à court terme.

Déclaration de la BCE sur sa coopération avec la Grèce

A - BCE

Le gouvernement grec a donc été contraint contre sa volonté de mettre en place un contrôle des capitaux et de mettre les banques en sommeil pour une semaine. C’est une décision extrêmement grave, et elle pourrait rendre la tenue du référendum sans effet si elle aboutissait, de fait, à acter le défaut et une expulsion hors de la zone Euro de la Grèce. Il semble que le gouvernement grec se soit résigné à cette logique, en dépit des déclarations qu’il a faites tant samedi que dimanche.

Mais, c’est aussi une décision qui révèle la violence du chantage exercé sur la Grèce par les pays créanciers. Il conviendra de s’en souvenir le moment voulu.

[1] http://yanisvaroufakis.eu/2015/06/28/as-it-happened-yanis-varoufakis-intervention-during-the-27th-june-2015-eurogroup-meeting/

Source : Jacques Sapir, pour son blog RussEurope, le 29 juin 2015.

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Grèce : la BCE et la Commission changent la nature du référendum, par Romaric Godin

Les institutions européennes s’engagent, avec des menaces et des pressions, en faveur du “oui” au 5 juillet. Une politique contestable.

La décision de la BCE de geler dimanche 28 juin le plafond de l’accès des banques grecques à la liquidité d’urgence (le programme ELA) a modifié entièrement la nature du référendum qui se tiendra dimanche 5 juillet en Grèce. En théorie, la question posée aux électeurs grecs sera de savoir s’ils acceptent ou non les dernières propositions soumises officiellement par les créanciers le 25 juin dernier. Mais ce gel du programme ELA a rendu inévitable l’instauration de restrictions bancaires importantes. Et depuis que ce lundi 29 juin, les banques helléniques sont fermées et que les rues de Grèce se sont couvertes de longues queues devant les distributeurs de monnaie, la vraie question à laquelle l’électeur grec devra répondre est très différente.

La BCE fait campagne pour le « oui »

La manœuvre est subtile de la part de la BCE. En choisissant de mettre la pression sur les banques grecques durant la campagne référendaire, elle prévient implicitement que l’électeur aura le choix entre la réouverture des banques le 7 juillet ou la poursuite de leur fermeture. Elle inquiète naturellement une partie des déposants grecs qui se souviennent du sort des comptes chypriotes en 2013 et qui savent que, pour eux, la limite de 100.000 euros appliquée à Chypre ne sera sans doute pas valable. Elle crée aussi une tension qui, ce lundi, était de plus en plus palpable à Athènes. Tout ceci a évidemment un but politique : arracher un « oui » à la population.

Certes, la BCE peut se dissimuler derrière des arguments solides : l’ELA est conditionné à la perspective d’un accord car si l’Etat grec fait faillite, les banques deviennent insolvables. Mardi, le plan « d’aide » deviendra caduc, aucun accord n’est donc possible. Mais, dans ce cas, pourquoi ne pas avoir, comme le demandait le président de la Buba Jens Weidmann, couper l’ELA purement et simplement ? Si la BCE estime que le référendum apporte encore l’espoir d’un accord grâce à un « oui », elle aurait dû fournir aux banques grecques les liquidités suffisantes jusqu’au vote, pour ne pas l’influencer. Elle a préféré un jeu plus subtil qui lui permet, en réalité, de peser lourdement dans la campagne. En faveur du « oui », bien sûr. De ce point de vue, la BCE sort de son rôle purement monétaire et devient un acteur politique de l’affaire grecque. Elle tente de maintenir la Grèce dans la zone euro en se débarrassant du gouvernement Tsipras.

Jean-Claude Juncker s’engage

Le but des dirigeants européens est évidemment le même. Et pour le satisfaire, ils ont été plus francs dans leurs déclarations. Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, lundi midi, n’a pas caché qu’il en faisait un vote pour ou contre le maintien dans la zone euro et dans l’Union européenne :

« Si le peuple grec, responsable, conscient du rôle et national et européen qu’il joue, votait “oui”, le message tel qu’il serait reçu dans les autres pays membres de la zone euro, et au-delà de l’Union européenne, et au-delà de la société mondiale, voudrait dire que la Grèce veut rester ensemble avec les autres pays membres de la zone euro et de l’Union européenne », a déclaré le président de la Commission.

Un peu plus tard, Matteo Renzi, a twitté en anglais que l’enjeu du vote était « euro vs Dracma (sic). C’est cela le choix. »

The point is: greek referendum won’t be a derby EU Commission vs Tsipras, but euro vs dracma. This is the choice.

— Matteo Renzi (@matteorenzi) 29 Juin 2015

 Menaces européennes

Le but des créanciers est donc clairement de dramatiser l’enjeu du referendum pour faire entendre au people grec qu’il ne peut être question de poursuivre les négociations avec le gouvernement en cas de « non. » Or, c’est un des arguments d’Alexis Tsipras : en cas de « non », le premier ministre grec promet que la Grèce sera en position renforcée pour engager de nouvelles discussions sur la base du même programme que celui de Syriza : réduire l’austérité en se maintenant dans la zone euro. Un argument que les dirigeants européens qui, ce lundi, sont entrés en campagne pour le « oui » s’acharnent à démonter en faisant croire qu’ils sont prêts à provoquer le Grexit en cas de vote contraire. Pire, Jean-Claude Juncker indique que la place de la Grèce dans l’UE serait en jeu, ce qui n’a guère de sens.

Peur européenne du « non »

Cette position pose problème. D’abord, il s’agit d’une ingérence dans la vie politique d’un Etat membre, ce qui est assez contestable. Il en résulte une radicalisation visible des positions au sein de la population entre les forces pro-institutions et les autres qui se révèle déjà palpable sur les réseaux sociaux et dans les média. Cela présente un risque élevé dans un pays rongé par la crise et soumis à une fermeture des banques.

Surtout, il cache une peur certaine du « non ». La BCE a montré encore dimanche que si elle était un adversaire d’Alexis Tsipras, elle rechignait encore nettement à engager la mécanique du Grexit en coupant l’ELA. Or, elle seule peut provoquer la sortie de la Grèce de la zone euro. Les chefs d’Etats et de gouvernements de la zone, quoi qu’ils en disent, ne peuvent pas provoquer le Grexit, ils ne peuvent que provoquer le défaut de la Grèce. La question reste donc la même : la BCE est-elle prête à exclure un membre de la zone euro en créant un précédent dangereux ? Et : les gouvernements sont-ils prêts à accepter de prendre des pertes sur les prêts à la Grèce ? La réponse semble encore être non. Et la meilleure preuve en est précisément cette campagne agressive pour le « oui » au référendum, afin de ne pas se trouver dans la possibilité de devoir faire face à un « non », donc à un choix désagréable : engager le Grexit ou de nouvelles négociations ? Jean-Claude Juncker ce lundi a exhorté les Grecs à ne pas « choisir le suicide par peur de la mort. » Mais cette peur de la mort semble aussi partagée par les institutions européennes. D’où cette campagne très vive pour le « oui. »

Le « oui » serait-il une solution à la crise ?

L’ennui, c’est que le « oui » sera peut-être un piège aussi redoutable que le « non » pour les créanciers. Alexis Tsipras peut respecter ce vote comme il l’a laissé entendre et s’engager à appliquer le plan des créanciers. Mais les relations avec la troïka seront forcément exécrables et le gouvernement ne manquera sans doute pas une occasion de contester ce plan pendant sa durée. Surtout, le gouvernement grec pourrait se montrer moins coopératif dans d’autres domaines de la politique de l’UE, on pense notamment aux relations avec la Russie.

Mais le scénario le plus probable est celui d’une démission du gouvernement Tsipras. Selon une source grecque, « tous les ministres, même les plus modérés, sont décidés à ne pas appliquer le plan des créanciers. » Les créanciers auront alors réussi leur pari : se débarrasser de ce gouvernement. Mais ensuite ? Un mois après, de nouvelles élections risquent de replonger la Grèce dans une crise politique. Syriza reste très populaire en Grèce, pour des raisons indépendantes des négociations, qui sont son « innocence » dans le système clientéliste grec. Tout peut changer après le 5 juillet. Mais il est possible que Syriza gagne à nouveau ces élections. Les dernières enquêtes indiquent que même en se regroupant, les partis « pro-mémorandum » (Nouvelle Démocratie, Potami et Pasok) ne passeraient pas devant Syriza (36 % contre 39 % dans le dernier sondage Alco). Cette réélection serait une impasse politique pour la Grèce. Reste le scénario rêvé par les Européens : une victoire des forces « pro-européennes » précitées. Dans ce cas, il est à souhaiter que la médication européenne permettent à la Grèce de disposer d’une croissance forte et bien redistribuée (mais on peut en douter).

Car Alexis Tsipras pourrait autrement rapidement jouer le rôle de recours en s’auréolant du statut de celui qui a résisté pendant six mois à la troïka, victime d’un « coup d’Etat financier. » Il pourrait alors tenir le rôle du « grand homme » grec du 20e siècle, Eleftherios Venizélos, qui a, plusieurs fois, quitté la vie politique pour être rappelé en héros dans les années 1920 et 1930. A moyen terme, la stratégie des Européens apparaît d’autant plus risquée que cette ingérence et les humiliations subies par le pays durant les négociationsne vont pas manquer dans l’avenir de peser lourd dans les relations entre la Grèce et l’Europe. On pourra le cacher quelque temps, mais les plaies resteront longtemps ouvertes.

Source : Romaric Godin, La Tribune, 29/06/2015

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DES ECONOMISTES et des PRATICIENS EN FAVEUR DE LA DRACHME

PAR  · 29 JUIN 2015

Une fois n’est pas coutume, je publie ici un appel d’économistes, soit universitaires soit praticiens, qui se prononcent en faveur du retour de la Grèce à une monnaie nationale .

DES ECONOMISTES et des PRATICIENS EN FAVEUR DE LA DRACHME, 21.06.2015

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Après 6 années environ de sacrifices inhumains “demandés” à la population, la dette de la Grèce a grimpé et représente aujourd’hui 180 % du PIB (au début de la crise elle était de 120 %), et il est évident qu’elle n’est pas viable. Ce désastre est dû au plan imposé par la troïka et dont l’échec est complet, puisqu’il a fait chuter notre PIB, entre 2008 et 2015, de 26 %. Aucun pays n’a jamais subi un désastre d’une telle ampleur en temps de paix : le chômage officiel touche 27 % de la population active, l’austérité excessive, idée fixe des dirigeants de l’UE et qui vise directement la stabilité de l’euro, a détruit l’économie et a plongé en même temps l’Europe tout entière dans une récession permanente et un équilibre de sous-emploi. La Grèce, c’est malheureux, est utilisée comme premier animal de laboratoire. Ces lignes sont écrites à un moment où la négociation est en cours, entre le nouveau gouvernement grec du SYRIZA et les créanciers.

L’obsession de la troïka, qui demande des mesures encore plus inhumaines sans pour autant garantir le remboursement de la dette, intensifiant l’appauvrissement de la population, est absolument inacceptable, criminelle et tout compte fait, sans aucun contenu. Car, à partir du moment où les mesures imposées à l’économie sont totalement inefficaces et qu’elles se traduisent par une baisse continue du PIB, l’augmentation du chômage et l’intolérable ‒dans ces conditions‒ écroulement des recettes publiques, il est clair que ce plan fou de l’austérité asphyxiante devrait être abandonné, sans la moindre hésitation. À savoir que, en dépit des risques et des complications liées à la sortie ‒événement sans précédent‒ de la zone euro, y rester n’offre aucune solution. L’économie de la Grèce est ravagée et il est urgentissime de recourir à un plan de reconstruction et de développement.

La mise en œuvre d’un tel plan n’est pas possible avec les liquidités fournies au compte-goutte par la BCE. En effet, aucune économie ne s’est jamais développée dans le passé sans liquidité confortable et sans une inflation contrôlée. Par conséquent, seul un retour à sa monnaie nationale pourrait, dans certaines conditions, assurer à l’économie de la Grèce ravagée sa reconstruction et un développement rapide, nécessaire pour lui permettre de rembourser cette part de la dette qui n’est pas onéreuse et honteuse.

 

*Alain Cotta , Professeur des Universités

*Jean-Pierre  Gérard, Président de l’Institut Pomone

* Jean Hernandez Président de chambre honoraire à la cour des comptes, Ancien Dr Adjoint du cabinet de Philippe Seguin, VP du G21

* Roland Hureaux membre   de l’Institut Pomone

*Theodoros Katsanevas, Professeur à l’Université du Pirée, Président du parti en faveur de la drachme

*Gérard Lafay, Professeur émérite des Universités, Vice-Président de l’Institut POMONE

* Maria Negreponti-Delivanis, Ex Recteur et Professeur à l’Université Macédonienne

*Michel Robatel fondateur de l’Institut  Pomone

*Jacques Sapir, Directeur d’études à l’Ecole des Hautes Études en Sciences Sociales
Directeur du CEMI-EHESS

*Ilias Stamboliadis, Professeur à l’Ecole Polytechnique de Hania-Crète

*Jean-Claude Werrebrouck, Professeur à l’Université de Lille 2, membre  du G21

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Communiqués

Zone euro: 19 moins un?

28 Juin 2015 – 18:37 par Les Économistes Atterrés

Samedi 27 juin 2015, dix-huit ministres des finances de la zone euro ont pris la scandaleuse décision d’exclure leur homologue grec, Yanis Varoufakis, de leur réunion et de publier un communiqué annonçant que le programme d’assistance financière de la Grèce prendra fin le 30 juin. Ils n’ont pas supporté que le gouvernement grec préfère obtenir un excédent budgétaire primaire en augmentant les impôts sur les plus riches plutôt qu’en supprimant la prime de solidarité pour les petites retraites inférieures à 700 euros. Ils n’ont pas supporté que Yanis Varoufakis explique depuis des mois que contrairement à ses prédécesseurs, il ne voulait pas seulement attendre « sa tranche de prêt comme un drogué sa dose », mais reconstruire l’économie de son pays et négocier une restructuration de la dette. Ils n’ont pas supporté – après leurs multiples manœuvres et menaces pour imposer un  plan inepte – que le Premier ministre grec, Alexis Tsipras, leur donne une leçon de démocratie en organisant un référendum pour savoir si le peuple grec accepterait ou rejetterait la proposition des institutions européennes.

Le fond de la question est que, sur un plan démocratique, ce n’est pas aux créanciers d’arbitrer entre différentes mesures budgétairement équivalentes. Accepter cette intrusion et s’y soumettre, c’est  accepter qu’un débiteur – aujourd’hui la Grèce, demain n’importe quel autre pays – se transforme, au nom de la dette, en colonie d’une armée de technocrates appointés.  Et il est atterrant d’entendre le président de l’Eurogroupe reprocher au gouvernement grec d’avoir « envoyé un message négatif aux Grecs » en organisant un référendum ! Alexis Tsipras n’a fait que constater qu’il n’avait pas le mandat pour signer l’accord que lui soumettaient les créanciers. Si l’Eurogroupe – qui s’est rangé aux positions les plus intransigeantes et les plus brutales du FMI – est si convaincu de la justesse et du bien-fondé de ses positions, que craint-il de la consultation du peuple ?

Pour leur part, les dirigeants grecs ont toujours indiqué qu’un accord ne traitant pas la question de la soutenabilité de la dette, ni celle de la reconstruction de l’appareil productif grec, ne résoudrait rien. Les dirigeants européens ont systématiquement refusé d’inclure dans les négociations la perspective d’une restructuration de la dette publique grecque, alors même qu’ils savent celle-ci inévitable. Dès 2012, ils s’étaient engagés – mais n’ont pas respecté cet engagement – à remettre la question de la dette grecque sur le métier. De fait, aucun économiste sérieux ne conteste le caractère insoutenable de la dette grecque mais la nouvelle Troïka cherche avant tout à montrer – en dépit de toutes les évidences – qu’il n’y a pas d’alternative aux politiques déflationnistes qui ont « si bien marché » en Europe depuis 2010, comme déjà dans les années 1930…

Le communiqué de l’Eurogroupe signifie aussi que nul n’a tenté de s’opposer à la création d’une procédure de mise à l’écart visant à pousser un pays hors de la zone euro. Contrairement à ses déclarations, le gouvernement français n’a jamais fait le « trait d’union » entre l’Eurogroupe et le gouvernement Tsipras. Les conséquences de son inaction sont désormais dramatiques.

Nous, Économistes atterrés, dénonçons le coup de force en cours contre la Grèce et son peuple. Il est plus que temps de mettre fin aux menaces où l’UE jusqu’ici s’est complu. Les peuples européens ont tout à y perdre et rien à y gagner. L’UE a entre les mains une proposition d’Alexis Tsipras, résultat de longues négociations et de compromis multiples. En outre, un moratoire de quelques années sur sa dette publique permettrait au gouvernement grec de mettre en œuvre une politique industrielle et de prendre le temps de discuter des modalités de la restructuration de cette dette. Poursuivre dans le déni et les ultimatums conduira l’Europe à une crise majeure. Il reste peu de temps pour la prévenir.

Source: http://www.les-crises.fr/grece-defense-de-la-democratie-par-jacques-sapir/


Grèce : les banques seront fermées pendant une semaine

Monday 29 June 2015 at 02:37

Le point par Romaric Godin (désolé au passage, je manque de temps pour produire plus moi-même en ce moment, c’est la folie de tout suivre…)

On voit bien que l’Europe fait tout pour saboter la référendum en paniquant les électeurs. MAIS ceci peut aussi être une stratégie de Syriza pour arracher un meilleur accord et le faire accepter ce we.

Bref, cela devient n’importe quoi, par la nullité de nos gouvernants (cela ne vous rappelle pas l’Ukraine d’ailleurs ?)

Le gouvernement grec devrait décider de fermer les banques jusqu’au 7 juillet. Les retraits autorisés aux distributeurs seront limités à 60 euros par jour et par carte bancaire, un contrôle des capitaux sera en place.

Article écrit le 28 juin à 19h49, mis à jour le 29 juin à 0h11.

Les banques grecques resteront fermées lundi 29 juin et jusqu’au 7 juillet. La décision a été prise à l’issue d’un conseil de stabilité financière tenu à Athènes dimanche 28 juin au soir avec plusieurs membres du gouvernement et le gouverneur de la Banque de Grèce (BoG) Yannis Stournaras. C’est la conséquence directe de la décision de la BCE ce dimanche de maintenir le plafond de la liquidité d’urgence (le programme ELA) disponible pour le système financier grec à son niveau de vendredi.

OB : La presse mainstream loue la magnanimité de la BCE, MAIS en faisant cela elle étrangle évidemment la Grèce, et joue la pourrissement pour le scrutin, même si elle aurait pu faire encore pire…

Durant la fermeture des banques, il sera possible de retirer des petites sommes d’argent, on évoque des retraits jusqu’à 60 euros par jour et par carte bancaire, ce qui est cinq fois moins qu’à Chypre en 2013. Un contrôle des mouvements de capitaux a également été décidé. Tous les transferts à l’étranger devront être approuvés par le ministère des Finances. La Bourse d’Athènes restera également fermée ce lundi. Dimanche soir, les Grecs se sont précipités vers les distributeurs d’argent pour retirer ce qu’ils pouvaient. Dans le centre d’Athènes, la plupart des appareils étaient vides vers 23 heures.

Pas assez de liquidités disponibles

Durant tout le week-end, les retraits se sont accélérés en Grèce. Des queues se sont formées, surtout samedi matin, devant les distributeurs automatiques de billets et certains étaient vides dans l’après-midi. Depuis vendredi soir, 1,3 milliards d’euros ont été retirées des comptes grecs. Compte tenu de l’annonce du référendum sur les dernières propositions des créanciers et de l’annonce de la fin du programme d’aide au pays mardi prochain par l’Eurogroupe, La plupart des Grecs ont préféré prendre leurs précaution. Incapables de se refinancer davantage que vendredi dernier auprès de la BCE, les banques grecques risquaient de se retrouver rapidement à court de liquidités. Les mesures annoncées visent donc à stopper l’accélération des retraits. En théorie, les Grecs, qui détiennent 14 millions de cartes bancaires, pourraient retirer jusqu’à 840 millions d’euros par jour, ce qui est encore beaucoup trop pour les banques grecques. Mais on peut imaginer que cette possibilité ne sera pas utilisée à plein. Le contrôle des capitaux empêchera la fuite de l’épargne des comptes helléniques.

Les conséquences

Ces mesures vont sans doute frapper les plus faibles, notamment les retraités qui devaient toucher leurs pensions à la fin de ce mois et qui, souvent, ne disposent guère d’une carte de retrait. Beaucoup de factures sont aussi payables aux guichets des banques en Grèce, même s’il n’y a pas de restrictions pour les virements nationaux. Pour une grande partie de la population, par ailleurs, il faudra peut-être puiser dans les réserves d’argent liquide qui ont été constituées aux cours de ces derniers mois par les retraits. Pas de panique, donc, dans l’immédiat. Concernant les touristes présents en Grèce, leur capacité de retrait pourrait ne pas être impactée. Le conseil de stabilité financière a demandé que les détenteurs de comptes étrangers puissent retirer de l’argent dans les limites fixées par leur banque. Il s’agit de préserver la saison touristique en Grèce et la BCE est tenue de fournir ces liquidités entrant en Grèce via des banques solvables.  Néanmoins, les ministères des affaires étrangères britannique, néerlandais et allemand, ont invité dimanche les voyageurs se rendant en Grèce à se munir de « suffisamment d’argent liquide. »

Le précédent chypriote

Pour la deuxième fois dans l’histoire de la zone euro, après Chypre en 2013, un pays est donc coupé du reste de l’union monétaire par un système de contrôle des capitaux et de restrictions des comptes bancaires. Un euro déposé dans une banque grec aujourd’hui n’a pas la même valeur qu’un euro déposé dans une autre banque. Son usage est limité et sa détention est risquée. Le précédent chypriote a en effet de quoi inquiéter les Grecs. Dans l’île, les banques avaient été renflouées par les déposants eux-mêmes. Le contrôle des capitaux à Chypre a été entièrement levé après deux ans, en avril dernier.

Parade provisoire contre le Grexit

En théorie, ces mesures visent à conserver la Grèce dans la zone euro. La BCE n’a pas levé l’utilisation du programme ELA par les banques grecques et n’a pas rendu plus difficile cet usage en appliquant une décote supplémentaire aux garanties nécessaires pour obtenir ces liquidités. La banque centrale maintient donc une source minimale d’euros qui devraient être provisoirement suffisante aux banques grecques grâce aux mesures de restrictions des retraits mis en place. Mais il ne s’agit que d’une parade provisoire. D’abord parce que les banques ne pourront pas rester fermées indéfiniment. Ensuite, parce que la BCE risque de couper les vannes à tout moment si elle estime que les banques grecques ne sont plus viables.

Comment sauver les banques grecques ?

Les banques vont donc devoir être renflouées d’une manière ou d’une autre. Première solution : un accord est trouvé entre Athènes et ses créanciers et la BCE permet de nouveau aux banques grecques d’utiliser la dette publique hellénique pour se refinancer normalement auprès d’elle. Deuxième possibilité : la BCE impose un renflouement des banques par les dépôts, comme à Chypre. Troisième solution : la Grèce sort de la zone euro. On le voit, cette dernière option devient de plus en plus probable.

Faire tomber le gouvernement grec

Reste une dernière option, qui est peut-être celle que la BCE a en tête : le gouvernement grec pourrait sous la pression d’une fermeture continuelle des banques ne pas être en mesure d’organiser le référendum du 5 juillet (mais le décret vient d’être publié au journal officiel). Ou, s’il le fait, il pourrait être fortement sanctionné par un « oui » claire aux propositions des créanciers afin d’obtenir la réouverture des banques. Dans ces deux cas, le gouvernement Tsipras devra signer en urgence un accord avec ses créanciers afin d’obtenir un retour rapide à la normale. Politiquement, il serait alors sans doute discrédité et il tomberait. Acculé par la BCE, sa seule parade serait alors un Grexit dont la population ne veut guère. Le Grexit est exclu pour la BCE, mais le maintien de ce gouvernement l’est sans doute tout autant. On le voit : si la BCE n’a pas voulu couper directement l’ELA et pousser la Grèce hors de la zone euro, elle joue clairement le jeu de l’Eurogroupe en poussant le gouvernement grec à nouer la corde qui l’étranglera. Ceci semble fonctionner : un premier sondage estime que deux tiers des électeurs voteront en faveur du “oui.” Dimanche soir dans un discours, Alexis Tsipras a, cependant, dénoncé le “chantage” de la BCE contraire, selon lui, aux “traditions démocratiques” de l’Europe. Et il a espéré que cette attitude conduirait les électeurs à voter “non” le 5 juillet prochain.

Source : La Tribune, 28/06/2015

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Tiens, je ressors un papier prémonitoire de Sapir du 14 mai dernier, contre un référendum sur la sortie de l’euro (qui n’est pas le thème ici)

L’Euro, la Grèce et le référendum

PAR  · 14 MAI 2015

On parle beaucoup d’un possible référendum sur le maintien de Grèce dans la zone Euro actuellement. Même le Ministre allemand des finances, M. Schäuble, s’est prononcé en faveur d’une telle consultation. Cette soudaine passion pour les référendums, survenant pratiquement dix années après le référendum français sur le projet de traité constitutionnel, est touchante. Les mêmes qui avaient tout fait pour que la parole du peuple français (55% de « non » ne l’oublions pas) soit oubliée se découvrent subitement une âme référendaire. S’il n’y allait pas du sort de la Grèce, et des principes démocratiques, que l’Union européenne ne cesse de fouler aux pieds, il y aurait de quoi rire aux éclats. Et d’ajouter, à l’encontre de tous ces partisans nouveaux de la pratique référendaire, de ces hommes politiques qui viennent avec un grand sourire nous présenter leur nouvelles bonnes résolutions, « pas ça, pas vous ». Car, cette question des référendums est sérieuse. Il convient d’en clarifier les tenants et aboutissants.

Une option inapplicable.

En réalité, l’option d’un référendum sur une sortie de l’Euro est inapplicable. Dans un texte posté sur un site de la gauche américaine, Stathis Kouvelakis écrit ainsi « Le temps est venu d’expliciter le contenu et d’expliquer la viabilité de la stratégie alternative, qui commence avec la double initiative de la suspension des remboursements de la dette et de la nationalisation des banques, et qui se poursuit, si nécessaire avec le choix d’une monnaie nationale approuvée par le public au cours d’un référendum populaire »[1]. De fait, c’est aussi, entre autres, la position de Schäuble. Mais il convient de considérer deux facteurs qui – dans le cas de la Grèce – rendent justement le recours à une procédure référendaire inapplicable :

  1. Un référendum exige un minimum de campagne, d’une durée de 6 semaines (au plus juste) et plus probablement de 12 semaines. Or, les mécanismes de la spéculation monétaire se déclenchent à l’horizon de minutes, voire d’heures. La temporalité d’élections, aussi souhaitables soient elles, n’est tout simplement pas compatible avec le spéculation monétaire. Cette spéculation se manifestera avec une force extrême, sauf si l’on décide de fermer les marchés financiers grecs, et pas seulement les marchés obligataires mais aussi les marchés d’action. On est en présence d’un cas extrême de la spéculation, qui ne pourra être réduit par l’application d’un simple contrôle des capitaux. Il faudra fermer les marchés financiers. Mais, si la fermeture de tous ces marchés est possible, elle ne l’est que pour quelques jours ou l’on change progressivement de système économique. Si la Grèce (et n’importe quel autre pays) devaient laisser l’ensemble des marchés financiers fermés pour plusieurs semaines, on prend le risque de voire l’économie changer de nature, et les investisseurs déserter le pays. La conclusion s’impose alors d’elle-même : il n’est pas possible de tenir un référendum sans déclencher un spéculation massive, et cette spéculation non seulement sera très destructrice pour l’économie ou alors impliquera que le gouvernement ait recours à des modes de contrôles allant bien au-delà d’u simple contrôle des capitaux. Mais, cela aura alors des conséquences politiques importantes, qui sont de nature à fausser le résultat d’un tel référendum.
  2. Un référendum ne fait sens que dans la mesure où il permet une validation démocratique. Mais, un référendum qui se tiendrait en plein milieu d’une spéculation déchaînée ne permettrait pas aux règles de la démocratie de s’appliquer. On serait loin du débat ouvert que l’on est en droit d’attendre avant un référendum, et qui eut lieu dans le cas des deux référendums de 1993 (Maastricht) et de 2005 (sur le projet de traité constitutionnel). Dès lors, privé du débat serein (même s’il est passionné) un référendum n’est plus une procédure démocratique. Cette dernière nait de la combinaison du débat (dans le cadre de la campagne) et du vote. Or, il faut craindre que dans cette campagne, qui sera par nécessité relativement courte, s’expriment non pas des idées mais des pressions, sous la forme justement de la spéculation. Les conséquences politiques de cette dernière vont fausser le débat, et par voie de conséquences vicier l’ensemble de la nature démocratique de la procédure référendaire.

On le constate, un tel référendum n’est pas praticable sauf à considérer que le référendum n’est là que pour légitimer une décision déjà prise. Mais, l’argument d’impraticabilité du référendum n’est pas le seul que l’on puisse invoquer. Il est douteux que, sur une telle question (la Grèce, ou un autre pays, doit elle rester dans l’Euro ou quitter la zone Euro) un référendum soit la procédure adaptée.

La logique des procédures référendaires et l’action gouvernementale.

Les procédures référendaires sont destinées à redonner de la légitimité à un système démocratique en mobilisant une forme directe de souveraineté populaire. En cela, elles sont un instrument irremplaçable des systèmes démocratique. Mais, la souveraineté populaire doit être mobilisée pour trancher de questions politiques et non des questions techniques ou des questions de société. Sinon, on transforme une procédure de légitimation démocratique en un instrument politique divisant profondément la société et visant en réalité à introduire des normes techniques (ou morales) dans l’espace politique.

La tradition tant française qu’internationale fait du référendum l’instrument pour trancher des questions de souveraineté (comme l’indépendance) ou des traités. Or, la question de l’Euro est en partie une question de souveraineté, mais en partie aussi une question technique, qui est susceptible de connaître de multiples réponses. De ce point de vue, si la question de l’appartenance ou non à l’Union européenne peut parfaitement être tranchée par un référendum, il est douteux qu’il en soit ainsi sur la question de l’Euro. Car, à quelles questions les citoyens auraient-ils à répondre ? Faudrait-il dire « êtes-vous pour ou contre l’Euro », ou « êtes-vous pour l’Euro au prix de politiques d’austérité renforcées ou contre ces politiques », ou enfin « êtes vous pour un Euro avec un mécanisme de solidarité et de transfert entre les pays membres ou contre l’Euro » ? On ne peut multiplier les questions posées sous peine de vider la procédure référendaire de son sens et de son esprit.

En fait, il faut reconnaître la légitimité de l’action gouvernementale à traiter de problèmes qui peuvent être très fortement contextualisés. La question qui se pose en Grèce (ou qui se poserait dans un autre pays) n’est pas celle de l’Euro en général mais celle de l’Eurodans le contexte de la logique de l’austérité et plus précisément de l’affrontement entre l’Eurogroupe et le gouvernement grec. Nous sommes ici dans une situation qui peut être assimilée à un état de guerre économique, qui empêche le fonctionnement normal des institutions dans le cadre normal. En cela, cette question relève de la décision exceptionnelle, celle que le gouvernement peut prendre dans le cas d’un état d’exceptionet où il peut s’affranchir temporairement du respect de la lettre de la loi et des traités afin d’assurer la survie de la Nation et de reconstituer le cour normal des événements. De ce point de vue, il faut reconnaître que l’état d’exception se caractérise par la suspension de certaines normes de la légalité dans le but de reconstruire les conditions d’exercices de ces mêmes normes. Le fait de prendre des mesures ditesexceptionnelles traduit le fait que le gouvernement est bien souverain.

Ainsi, ce serait une erreur d’abdiquer la responsabilité gouvernementale et de se réfugier derrière l’argument du « choix démocratique » (qui n’en serait pas un) à travers la mise en place d’une procédure référendaire. La situation de la Grèce (mais ceci pourrait être transposable dans d’autres pays) est celle d’une urgence économique qui interrompt le cours normal des règles et des lois. Pour rétablir ce cours, ce qui est l’essence même de la démocratie, on ne peut agir suivant les règles et les lois mais il faut avoir recours à desmesures d’exception dont la finalité sera de ramener la situation à la normale. Ceci, dans l’esprit même de la démocratie, est le propre de l’action du gouvernement, et qui plus est d’un gouvernement récemment élu de manière parfaitement démocratique, qui est censé être le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. Ce gouvernement doit, maintenant, assumer ses responsabilités.

[1] www.jacobinmag.com/2015/05/kouvelakis-syriza-ecb-grexit/(http://www.jacobinmag.com/2015/05/kouvelakis-syriza-ecb-grexit/)

 

Source: http://www.les-crises.fr/grece-les-banques-seront-fermees-pendant-une-semaine/


[Décryptage] La propagande européiste de Jean Quatremer en temps de crise

Monday 29 June 2015 at 02:17

Je rappelle que Jean Quatremer est LE journaliste spécial Europe de Libération.

Celui qui avait dit :

« On me demande souvent : “Est-il bien normal qu’on envoie à Bruxelles un journaliste aussi europhile que vous ?” C’est comme si on posait la question : est-il normal que l’on envoie un journaliste pas anti-américain à Washington ? Pourquoi pas aussi demander à ce que l’on envoie un journaliste antisémite à JérusalemC’est du grand n’importe quoi !» [Jean Quatremer, France Culture, 05/2014]

Bref une source neutre et fiable…

Voici donc son analyse de la situation.

C’est très intéressant car on voit :

1/ les techniques manipulatoires de “fabrication du consentement” (cf. Chomsky) pour distordre la réalité

2/ et le fait que c’est essentiellement un mécanisme peu conscient – ces personnes, très engagées, se pensant sincèrement honnêtes et n’étant généralement pas en “mission commandée” (réfléchissez, si c’était le cas, cela serait fait autrement, et il n’y aurait pas de grossières erreurs et contradictions dans les textes mêmes). On a juste le zéle du zélateur fervent croyant, ici faisant office de religieux de la religion européiste à défendre à tout prix, perdant tout esprit critique (comme un politicard défendant son parti sans limite etc.). Non, un zélote religieux n’est acheté par personne, il y croit…

Comme d”habitude mes commentaires sont apparents.

P.S. (à l’américaine :) “Jean Quatremer n’approuve (apparemment) pas cet article” :)

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Le “Grexit” au bout de la semaine ?

Si Alexis Tsipras pensait faire plier ses partenaires de la zone euro, ou au moins les diviser, en annonçant, dans la nuit de vendredi à samedi, un référendum (le 5 juillet) sur un compromis qui n’existe pas, c’est totalement loupé.

Donc les fanatiques européens continuent de ne pas plier, cool ! Ça c’est de la négociation bien menée… Merci pour mon épargne les gars.

Mais c’est vrai qu’attendre deux sous de bon sens de leur part, c’était en effet de la folie.

Ils ont encore quelques jours pour “plier”, notez…

Notez aussi le choix des 2 verbes, tous à connotation négative

C’est exactement le contraire qui s’est passé au cours de l’Eurogroupe (les dix-neuf ministres des Finances) convoqué samedi dans l’espoir de boucler un accord avec la Grèce destiné à lui assurer une nouvelle aide financière de plus de 15 milliards d’euros,

Ici, on soulignera comme toujours la générosité européenne qui “aide la Grèce”.

Bien entendu, on ne demandera comment on a pu passer d’une situation où la Grèce devait 300 Md€ à des banques privées et comment elle les doit désormais aux contribuables européens – ce qui cause quelques difficultés sachant que l’État ne peut rembourser et ne le pourra jamais. Et que l’opération a donc consisté à des transferts de pertes privées vers des pertes publiques (moyennant quand même des pertes partielles pour le privé)

Pas plus qu’on n’informera clairement le lecteur que, dans les fameux plan d’aide passés, la Grèce est engagée à rembourser CHAQUE CENTIME prêté plus les intérêts, de sorte qu’au final l’aide européenne à la Grèce devrait avoir été rigoureusement nulle, zéro euro de coût. C’est aussi la valeur de notre solidarité – une simple avance de trésorerie.

Enfin, on n’expliquera qu’on propose à la Grèce 15 Md€ pour qu’elle rembourse 15 Md€ au FMI et à la BCE… Mais qu’on ne les lui donnera que si elle baisse ses retraites et augmente sa TVA. Sachant que, sans le service de la dette, l’État grec est à l’équilibre et n’a pas besoin d’emprunter. C’est le meilleur élève de l’Europe la Grèce sur ce point majeur… (mais chut…)

Bref, les Européens sont des gens SUPER COOLS et TRES TRES GENTILS

un plan d’investissement de 30 à 35 milliards d’euros,

On ne précisera pas que c’est sur 7 ans, que ce sont des fonds structurels de l’UE déjà budgétés, dont une part lui est déjà due, et qui sont sans aucun lien avec les négociations en cours (mais juste liés à appartenance à l’UE) – et certain sous forme… de prêts ! (elle manque de dettes la Grèce) (voir ici)

le tout assorti d’un calendrier de renégociation de la dette grecque en échange de réformes structurelles, de hausses d’impôt et de coupes dans les dépenses publiques. Ce référendum « ferme la porte à la poursuite des discussions », a tranché le Néerlandais Jeroen Dijsselbloem et patron de l’Eurogroupe. La Vouli, le parlement monocaméral grec, a adopté la loi autorisant le référendum dans la nuit de samedi par une très large majorité de 178 voix contre 120 (sur 300 sièges).

“ce qui montre bien le caractère totalement antidémocrati…” – aïe non, on ne peut pas la placer ici celle-là…

Le Grexit redouté est désormais au bout de la semaine, voire avant, sauf rebondissement en Grèce.

• Que s’est-il passé ?

Personne ne comprend le brutal raidissement d’Alexis Tsipras :

Un classique : comme on transforme la réalité de façon délirante, on ne retrouve de la logique qu’en faisant passer “l’ennemi” pour un fou, incompréhensible (façon “mais où s’arrêtera Poutine ???”) et donc dangereux.

En tous cas, moi, je le comprends bien – merci de corriger M. Quatremer (“A part Olivier Berruyer, personne ne comprend le brutal…”)

« on était à deux doigts d’un accord », affirme une source proche des négociations. «Tout le monde pensait qu’on allait conclure. À la demande des Grecs, on a convoqué, lundi, un Eurogroupe et un sommet de la zone euro, puis un nouvel Eurogroupe mercredi, puis jeudi. Le Conseil européen de jeudi et vendredi a aussi permis de progresser et c’est pour ça qu’on a convoqué un nouvel Eurogroupe samedi ». 

Ils sont vraiment cons et fous ces Grecs, ON ÉTAIT JUSTE A 3 MM DE L’ACCORD !!!!!!!!!!!!!!! Crétiiiiiiiiiiiiiiiiiiiins crie le lecteur de Libération.

Mais gardez ça en tête, on va y revenir

Mais, à la surprise générale,

Bis repetita. Surtout ne pas blâmer l’imbécilités de nos dirigeants qui n’ont pas vu venir le coup pourtant largement annoncé (cf le billet de Sapir du 15 mai dans le billet suivant)

Tsipras a annoncé au milieu de la nuit de vendredi à samedi la tenue d’un référendum sur le texte de compromis tel qu’il existait jeudi, après avoir prévenu quelques minutes auparavant François Hollande et Angela Merkel, (Jean-Claude Juncker, lui, plongé dans un profond sommeil, n’ayant pas décroché)

Énorme.

Traduction très probable pour les initiés (sinon on ne comprend pas cette bizarre remarque… Enfin, c’est mon hypothèse…) : il cuvait étant à 3 grammes.

“Juncker the Drunker”, c’est de notoriété publique locale, comme le problème de DSK avec les femmes – mais le journaliste mainstream se gardera bien d’informer le lecteur de ce genre de problème légèrement important (si un jour Juncker monte sur la table et se fout à poil, vous ne serez donc pas étonné…)

« Or, ce texte a changé vendredi pour tenir compte des demandes grecques. Ce référendum est sans objet », ajoute cette même source. Pire : « les Grecs sont partis au pire moment,

Le Grec, outre qu’il fraude et ne paye pas ses impôts (bon, ok, son État n’a que 3,5 % de déficit total, et le nôtre 4 %, mais on ne va quand même pas comparer, hein…), est très très con, on vous l’a dit. Ces types de gauche : des i-res-pon-sables on vous l’a dit  !!!!

avant qu’on parle de la soutenabilité de la dette, de l’extension du programme (au-delà du 30 juin) » et du plan d’investissement, s’est étonné Jeroen Dijsselbloem.

Comme la phrase est COLLECTOR, on va bien tout reprendre, façon sujet du bas, option “critique des médias”.

La Grèce est désormais un des pays du monde les plus endettés (si ce n’est LE PLUS). Son État est après des années d’efforts (et de souffrance inutiles et contre productives) à l’équilibre primaire (avant le paiement de la dette). C’est donc un État désormais bien géré, mais plombé par la dette.

Comme il est totalement impossible qu’il la rembourse, il se contente de la rouler, emprunter 1,05 Md€ pour rembourser 1 Md€ d’échéance de dette et 50 M€ d’intérêts.

Bref, il n’a qu’une solution : faire défaut sur une partie de sa dette, sinon, c’est de la cavalerie qui empire la situation.

On a vécu 5 mois de négociations avec l’Eurogroupe, et une claire limite au 30 juin et une demande claire de la Grèce.

Les négociations ont porté sur de nouveaux efforts délirants (car récessifs et diminuant probablement les recettes de l’État) que doit faire la Grèce pour recevoir de nouveaux des prêts (pour rembourser les prêts aux mêmes prêteurs – vous suivez ?).

Bon, il me semble que même Quatremer ne puisse contester ce résumé.

Donc, il nous dit :

« on était à deux doigts d’un accord », affirme une source proche des négociations. «Tout le monde pensait qu’on allait conclure

et quelques lignes plus loin, on lit :

« les Grecs sont partis au pire moment (le 26 juin !), avant qu’on parle de la soutenabilité de la dette, de l’extension du programme (au-delà du 30 juin) » et du plan d’investissement, 

DONC : on était à deux doigts d’un accord après 5 mois de palabres, mais on n’avait juste pas commencé à parler du stock de dette 4 jours avant la dead line.

Sérieusement, avouez, c’est drôle non ?

Le seul sujet important, qui est en plus la seule contrepartie que pourrait revendiquer la partie grecque dans la négociation : ON N’EN AVAIT JUSTE PAS PARLÉ !!!!!!!!!!

Mais c’est Daffy Duck qui négocie ou quoi ?

Parce que Tsipras a toujours dit (et c’est logique, un enfant de 15 ans comprend) qu’il pourrait peut être accepter de nouvelles mesures autoritaires (les précédentes ayant saigné le pays), mais seulement si les créanciers réduisaient la dette !!!!!

Non mais allô quoi !!!!

En effet, si le texte est négocié par le « groupe de Bruxelles » (les représentants de la Commission européenne, de la Banque centrale européenne (BCE) et du Fonds monétaire international (FMI)), seuls les ministres des Finances sont habilités à parler des autres questions. « Tout était sur la table de négociation » afin « d’aboutir à un accord global et durable », insiste Michel Sapin : « mais le gouvernement grec n’a pas souhaité que la négociation continue ».

Incroyables : les types ont pourtant tous dit “pas touche aux montants de dette” !!!

Au cours de la réunion à haute tension qui a débuté en début d’après-midi, aucun pays de la zone euro, mis à part la France, n’a plaidé pour une poursuite du programme d’assistance financière au-delà du 30 juin, la date convenue lors d’un premier accord conclu avec la Grèce le 24 février.

Saluons pour une fois la France…

Tsipras l’avait pourtant demandé afin de permettre à son pays de tenir jusqu’au référendum : sans ce cadre – qui est une promesse que la Grèce acceptera de procéder à des réformes afin d’équilibrer son budget-, la BCE ne peut pas continuer à alimenter les banques grecques en liquidités (ELA ou ligne de liquidités d’urgence dont le plafond approche désormais les 100 milliards d’euros).

Les Européens, lassés par cinq mois de vaines négociations, ont refusé de lui faire ce cadeau.

Laisser un peuple voter, ce n’est pas une obligation, c’est un “cadeau” notez bien

Il fera son référendum, mais l’Europe ne lui tendra pas la main, ce qui risque de précipiter son pays dans une crise bancaire et économique

À quoi bon continuer la discussion dès lors que le gouvernement grec a décidé de soumettre à référendum un texte datant de jeudi et auquel il a décidé d’appeler à voter non ? « On ne peut pas étendre un programme dont un pays ne veut pas puisque le gouvernement grec a d’ores et déjà décidé d’appeler à voter non », s’est justifié le ministre des Finances français, Michel Sapin.

La journaliste endosse le catéchisme du ministre comme vous le voyez. Le gouvernement grec a pourtant dit qu’il pourrait appeler à voter oui si un accord honorable était trouvé dans la semaine…

La rupture a donc été rapidement consommée. L’Eurogroupe a été suspendu, le temps que Yanis Varoufakis, le ministre grec, quitte la salle, et la réunion a ensuite continué pour évoquer les conséquences d’un défaut grec, désormais inéluctable, et les mesures à prendre pour éviter une contagion au reste de la zone euro. Pour la première fois, un communiqué de l’Eurogroupe, qui signe la fin du programme d’assistance à la Grèce, a été adopté par seulement dix-huit ministres des Finances qui, au passage, rappelle « les importants transferts financiers et l’aide apportée à la Grèce au cours des dernières années ». 

Toujours rappeler le catéchisme sans analyse critique ni même un commentaire #JournalismeDuXXIeSiecle

Le Grexit, souhaité par plusieurs ministres, dont l’Allemand Wolfgang Schäuble, est désormais dans toutes les têtes.

• Que va-t-il se passer la semaine prochaine ?

La BCE va se réunir dimanche. Selon toute probabilité et en l’absence de programme, elle va décider (à la majorité des deux tiers de ses 25 membres) d’interrompre l’alimentation des banques grecques en liquidités : « poursuivre cette aide, c’est encourager le bank run, c’est-à-dire le retrait d’argent par les Grecs, aux frais des contribuables européens. Rien que cette semaine, les 1,6 milliard d’euros prêtés aux banques grecques ont été immédiatement retirés par les épargnants. C’est un puits sans fond », nous confie une source européenne. Si la Grèce adopte une loi ce dimanche prévoyant la fermeture des banques dès lundi et la mise en place d’un strict contrôle des capitaux, la BCE pourrait de nouveau intervenir pour éviter les faillites bancaires que la Grèce seule n’a pas les moyens d’éviter faute d’argent (elle n’a pas accès aux marchés et les caisses sont vides). Mais cela n’est pas certain, les durs de la BCE pouvant faire valoir que l’attitude de Tsipras exclut un retour à la normale avant longtemps. Surtout, les banques grecques ne sont plus solvables à la suite du retrait massif d’argent de ces derniers mois.

Si jamais la Grèce n’adopte pas un contrôle des capitaux, la zone euro va se couper de tous les canaux la reliant au système financier grec pour éviter la contagion d’un effondrement du système financier grec. En clair, si la Grèce ne s’isole pas elle-même, c’est la zone euro qui l’isolera. Dans le second cas, le système bancaire grec va vite s’effondrer faute d’argent frais. Selon plusieurs experts, ce sera une affaire de jours et non de semaines… Ce qui aura un effet immédiat sur le tissu économique grec, alors que le pays est déjà retombé en récession (on attendait 3 % de croissance cette année): les faillites d’entreprises vont se multiplier, faute de crédit, et les Grecs ne pourront plus retirer d’argent. Cette asphyxie programmée du système bancaire risque aussi d’affecter la saison touristique qui a déjà commencé. On imagine le marasme et la panique dans lequel va se dérouler le référendum.

Cela étant, la zone euro insiste sur le fait que les négociations peuvent reprendre à chaque instant : « les portes sont ouvertes », a martelé Jeroen Dijsselbloem, « ce ne sont pas les institutions qui ont quitté la table de négociations la nuit dernière, c’est le gouvernement grec ». Tous les gouvernements ont tenu le même discours : l’accord est proche, il suffirait de quelques heures pour le boucler.

Repeat After Me : “NOS gouvernements disent toujours la vérité – Les critiquer c’est faire le jeu du populisme de sinistre mémoire”

• Sur quoi va porter le référendum ?

Il semble que la question portera sur le projet de compromis dans sa version de jeudi. Le problème est que ce texte est déjà dépassé (par exemple, vendredi, les créanciers ont accepté de limiter l’augmentation de la TVA sur l’hôtellerie à 13 % au lieu de 23 %). Surtout, ce texte n’a plus aucune existence légale depuis samedi, puisque le programme prend fin le 30 juin, ce qui signifie que l’offre des créanciers est caduque. Même si le résultat est positif, il faudra reprendre les négociations sans garantie que le texte final sera identique à celui de vendredi. Surtout, les Grecs vont se prononcer sur un texte qui ne porte ni sur la restructuration de la dette, ni sur le plan d’investissement promis, ni sur l’extension du programme (avec un doublement de la somme de 7,2 milliards promise). Ce référendum est donc un tantinet surréaliste. La seule question qui vaille, en réalité, devrait porter sur l’appartenance de la Grèce à la zone euro.

On pourrait la poser en France aussi M. Quatremer, dites… ?

• Le « oui » peut-il l’emporter ?

Même si les Grecs sont massivement attachés à l’euro (entre 70 % et 80 %), le résultat ne fait guère de doute. « Si j’étais Grec, je voterais non à ce texte », confie un diplomate d’un grand pays, « puisqu’il ne comporte que des hausses d’impôts et des coupes dans les dépenses publiques. En soi, il ne veut rien dire, puisqu’il n’est pas accompagné des mesures qui donnent un horizon au pays. Mais le gouvernement grec se gardera bien de le dire et ça n’est pas à la zone euro de faire campagne ». Si par miracle le « oui » l’emportait, Tsipras serait dans une situation inconfortable et devrait sans doute convoquer de nouvelles élections après un tel désaveu. Et là, tout est possible.

Pas évident, le oui peut l’emporter si l’Europe terrorise les Grecs comme aujourd’hui…

• Vers le Grexit ?

« Il n’y a pas de mode d’emploi pour une sortie de la zone euro, car personne n’avait prévu une telle situation. On est dans les figures libres », confie une source européenne. On peut donc très bien imaginer que la Grèce reste formellement dans la zone euro, mais ne dispose plus d’euros fournis par la BCE. Il faudra donc qu’elle émette en parallèle une nouvelle monnaie (après avoir repris le contrôle de sa banque centrale, ce qui l’exclura de facto de la BCE) afin de payer les salaires des fonctionnaires et les retraites. Mais cette nouvelle drachme, qui circulera parallèlement à l’euro, n’aura de valeur que pour les biens et les services produits par la Grèce, ce qui limitera considérablement son pouvoir d’achat : tous les produits importés (ou comportant une part d’imports) devront être payés en euros sonnants et trébuchants. Et la Grèce importe beaucoup, des produits agricoles aux produits technologiques en passant par les médicaments. La Grèce serait dans la situation de Cuba

et de l’Afghanistan aussi, je pense, mais avec le cannibalisme en plus…

qui connaît aussi une double circulation monétaire, le peso local qui ne vaut rien et le peso convertible (CUC) dont la valeur est proche de celle du dollar qui permet seul l’accès aux produits de « luxe »… La Grèce, privée d’accès à l’euro, peut aussi choisir de partir d’elle-même. Dans les deux cas, sa situation ne sera guère brillante, car elle n’aura pas accès avant longtemps aux marchés financiers : elle devra vivre avec ce qu’elle produit.

Le chantage à l’autarcie et à l’Albanie. Bien entendu c’est totalement faux. Elle devra vivre avec ses propres ressources budgétaires – et on a vu que c’est parfaitement possible, vu qu’elle est en équilibre primaire…

• Un risque de contagion ?

C’est la question à mille euros.

6559,57 francs svp…

Jeroen Dijsselbloem a insisté sur la solidité de la zone euro qui disposerait désormais des moyens de « préserver son intégrité ».

En fait, un  journaliste au XXIe siècle, ça se contente de recopier poliment les déclarations de son gouvernement.

“Jeroen Dijsselbloem a insisté sur la solidité de Lehman Brothers qui disposerait désormais des moyens de « préserver son intégrité ».”

En particulier, le Mécanisme européen de stabilité (MES), doté d’une capacité d’emprunt de 750 milliards d’euros, pourra intervenir pour venir en aide à un pays attaqué par les marchés et la BCE est lancée dans un programme de rachat massif des dettes d’État de 60 milliards par mois qui permettra de juguler une éventuelle panique des marchés.

Tous va très bien. On est en pleine crise du sur-endettement. N’ayez crainte, en cas de problème, on peut encore essayer de s’endetter, et imprimer de la monnaie. Tout va bien !

« Ils ont intégré depuis longtemps le risque d’un Grexit, mais on ne peut jamais savoir comment ils réagiront », confie une source européenne.

Néanmoins inquiet, l’Eurogroupe a décidé d’accélérer son intégration en suivant les recommandations du rapport des cinq présidents (Commission, Parlement européen, Eurogroupe, BCE, Conseil européen) dont les chefs d’État et de gouvernement ont pris connaissance vendredi. Un mal pour un bien ? C’est l’espoir auquel on se raccrochait à Bruxelles, samedi soir.

Je vous mets le lien complet vers le projet délirant (Trésor européen, encore plus de contrôle des États etc).

Pas de souci, ce projet est donc conforme aux attentes de 14 % de la population…

Et là, n’ayez crainte, aucun référendum en vue chez nous

Source : Jean Quatremer (avec les commentaires, recommandé !), 28/06/2015

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Bonus : commentaire et réponse de Quatremer sur ce billet (regardez, il y en a plein de collectors aussi)

Bonus 2 :

Hmm, ça dépend si le résultat est respecté par le gouvernement ou pas…

C’est drôoooole le sujet de la Démocratie dans un pays qui a perdu 25 % du PIB et qui a un parti néo-nazi bien implanté dans l’armée…

Mon préféré :

EDIT : mon nouveau préféré (rapport à la capacité d’autocritique :) )

Source: http://www.les-crises.fr/la-propagande-europeiste-de-jean-quatremer-en-temps-de-crise/


[Référendum Kaput ?] Tyrannie européenne ?

Sunday 28 June 2015 at 02:14

 En résumé :

  1. vendredi, l’Eurogroupe a soumis la Grèce à un ultimatum : vous acceptez nos demandes, oui ou non ! Ce point évidemment central.
  2. suite à quoi, Tsipras a dit : “cela excède largement mon mandat, je vais demander aux Grecs de se prononcer. Merci de bien vouloir prolonger le plan actuel (expirant mardi) de seulement 1 semaine, pour qu’ils puissent voter sur votre proposition”.
  3. samedi, l’Eurogroupe a dit “Non” au délai (apparemment, seule la France a voté Oui…), puis s’est réuni sans la Grèce

Du coup, on voit mal sur quoi les électeurs voteront dimanche, sauf si un accord est trouvé d’ici mardi (pas gagné…)

Merci à tous ces “Démocrates”, animés des “valeurs de la République”…

A confirmer :

Tyrannie européenne – par Jacques Sapir

Alexis Tsipras avait décidé de convoquer un référendum le 5 juillet, demandant au peuple souverain de trancher dans le différent qui l’oppose aux créanciers de la Grèce. Il avait pris cette décision devant les menaces, les pressions, et les ultimatums auxquels il avait été confronté durant les derniers jours de la négociation avec ce que l’on appelle la « Troïka », soit la Banque Centrale Européenne, la Commission Européenne et le Fond Monétaire International. Ce faisant, et dans un geste que l’on peut qualifier de « gaullien », il avait délibérément renvoyé au domaine politique une négociation que les partenaires de la « Troïka » voulaient maintenir dans le domaine technique et comptable. Ce geste à provoqué une réaction de l’Eurogroupe d’une extrême gravité. Nous sommes en présence d’un véritable abus de pouvoir qui a été commis ce 27 juin dans l’après-midi, quand l’Eurogroupe a décidé de tenir une réunion sans la Grèce. Ce qui se joue désormais n’est plus seulement la question du devenir économique de la Grèce. C’est la question de l’Union européenne, et de la tyrannie de la Commission et du Conseil, qui est ouvertement posée.

La déclaration d’Alexis Tsipras

Le texte de la déclaration faite par Alexis Tsipras dans la nuit du 26 au 27 juin sur la télévision d’Etat grecque (ERT), est de ce point de vue extrêmement clair :

« Après cinq mois de négociations, nos partenaires en sont venus à nous poser un ultimatum, ce qui contrevient aux principes de l’UE et sape la relance de la société et de l’économie grecque. Ces propositions violent absolument les acquis européens. Leur but est l’humiliation de tout un peuple, et elles manifestent avant tout l’obsession du FMI pour une politique d’extrême austérité. (…) Notre responsabilité dans l’affirmation de la démocratie et de la souveraineté nationale est historique en ce jour, et cette responsabilité nous oblige à répondre à l’ultimatum en nous fondant sur la volonté du peuple grec. J’ai proposé au conseil des ministres l’organisation d’un référendum, et cette proposition a été adoptée à l’unanimité »[1].

Ce texte court, empli de gravité et de détermination, entrera vraisemblablement dans l’Histoire. Ce texte est prononcé par un homme jeune, qui a été confronté à la mauvaise fois, aux manipulations, à ce qu’il faut bien appeler toutes les bassesses de la politique, depuis 5 mois. Il dit aussi sa colère, froide et déterminée. Et c’est peut-être là l’échec principal de l’Eurogroupe et des institutions européennes : avoir transformé un partisan de l’Europe en un adversaire résolu des institutions européennes. Tsipras n’était pas il y a cinq mois de cela un opposant à l’idée européenne. Mais, la multiplication des humiliations, des tentatives de coup de force, l’ont obligé à réviser nombre de ses positions, qui pour certaines d’entre-elles relevaient de l’illusion. Tsipras et Varoufakis sont aujourd’hui sur une trajectoire de collision avec l’Eurogroupe et l’UE non pas de leur fait, mais de celui des « institutions européennes ». Ceci est d’une immense importance pour la suite.

Les leçons de la déclaration de Tsipras

On peut découvrir dans cette courte déclaration trois points importants.

Le premier est que le désaccord entre le gouvernement grec et ses partenaires a été d’emblée politique. La BCE et la Commission Européenne n’ont eu de cesse que de rechercher une capitulation du gouvernement grec, ce que Tsipras appelle «l’humiliation de tout un peuple ». Ce qu’a cherché l’Union européenne, par le biais de l’Eurogroupe, c’est à cautériser le précédent ouvert par l’élection de janvier 2015 en Grèce. Il s’agit de faire la démonstration non seulement en Grèce, mais ce qui est en fait bien plus important en Espagne, en Italie et en France, qu’on ne peut « sortir du cadre de l’austérité » tel qu’il a été organisé par les traités. Il faut ici se souvenir de la déclaration de Jean-Claude Juncker pour qui il ne peut y avoir de choix démocratique allant contre les traités.

Le deuxième point important de cette déclaration est que, pour la première fois un dirigeant légalement élu et en fonction déclare que les institutions européennes font des propositions qui, dans leur fond comme dans leur forme «violent absolument les acquis européens ». C’est une accusation très grave. Elle revient à dire que les institutions européennes qui sont censées être des garants de la démocratie agissent au contraire de celle-ci. Elle revient aussi à dire que ces mêmes institutions, dont la légitimité n’existe quepar délégation de la légitimité des Etats membres ont des comportements qui violent la légitimité et la souveraineté de l’un des dits Etats membres. Cela revient donc à dire que les institutions de l’Union européennes se sont constituées en Tyrannus ab exercitio soit en un pouvoir qui, quoi qu’issu de procédures légitimes, se conduit néanmoins en Tyran. Cela revient à contester radicalement toute légitimité aux instances de l’Union européenne.

Le troisième point se déduit des deux premiers. Il est contenu dans la partie du texte qui dit : «Notre responsabilité dans l’affirmation de la démocratie et de la souveraineté nationale est historique en ce jour, et cette responsabilité nous oblige à répondre à l’ultimatum en nous fondant sur la volonté du peuple grec ». Il place désormais les enjeux non plus au niveau de la dette mais à celui des principes, de la démocratie comme de la souveraineté nationale. Et c’est en cela que l’on peut parler d’un véritable « moment gaullien » chez Alexis Tsipras. Si l’on veut pousser l’analogie historique jusqu’à son terme, alors que Paul Raynaud en 1940 ne soumet pas au Conseil des Ministres la question de faut-il continuer la guerre, Alexis Tsipras a osé poser la question de l’austérité et du référendum, et a reçu un soutien unanime, y compris des membres de l’ANEL, le petit parti souverainiste allié à SYRIZA. Il s’est ainsi réellement hissé à la stature d’un dirigeant historique de son pays.

La réaction de l’Eurogroupe, qui avait qualifié de nouvelle « triste » (sad) ce référendum[2], confirme bien les options antidémocratiques qui ont cours aujourd’hui au sein de l’Union européenne. Mais, cette réaction a elle-même était dépassée par une décision d’une importance réellement dramatique.

Le coup de force de l’Eurogroupe et la Tyrannie européenne

La réaction de l’Eurogroupe, qui se réunissait ce samedi à Bruxelles, a en effet consisté en un acte qui conjugue l’illégalité la plus criante avec la volonté d’imposer ses vues à un Etat souverain. En décidant de tenir une réunion en l’absence d’un représentant de l’Etat grec l’Eurogroupe vient de décider d’exclure de fait la Grèce de l’Euro. Ceci constitue à l’évidence un abus de pouvoir. Et il faut ici rappeler plusieurs points qui ne sont pas sans conséquences tant juridiquement que politiquement.

  1. Aucune procédure permettant d’exclure un pays de l’Union Economique et Monétaire (non réel de la « zone Euro ») n’existe actuellement. S’il peut y avoir une séparation, elle ne peut avoir lieu que d’un commun accord et à l’amiable.
  2. L’Eurogroupe n’a pas d’existence légale. Ce n’est qu’un « club » qui opère sous couvert de la Commission Européenne et du Conseil européen. Cela signifie que si l’Eurogroupe a commis un acte illégal – et il semble bien qu’il en soit ainsi – la responsabilité en incombe à ces deux institutions. Le gouvernement grec serait donc fondé d’attaquer la Commission et le Conseil à la fois devant la Cour Européenne de Justice mais aussi devant la Cour Internationale siégeant à La Haye. En effet, l’Union européenne est à la base une organisation internationale. On le constate par exemple dans le statut, et les exemptions fiscales, des fonctionnaires européens. Or, la règle dans toute organisation internationale est celle de l’unanimité. Le traité de Lisbonne a bien prévu des mécanismes de majorité qualifiée, mais ces mécanismes ne s’appliquent pas à l’Euro ni aux questions des relations fondamentales entre les Etats.
  3. Le coup de force, car il faut l’appeler par son nom, que vient de faire l’Eurogroupe ne concerne pas seulement la Grèce. D’autres pays membres de l’Union européenne, et l’on pense au Royaume-Uni ou à l’Autriche, pourraient eux-aussi attaquer devant la justice tant européenne qu’internationale la décision de fait prise par l’Eurogroupe. En effet, l’Union européenne repose sur des règles de droit qui s’appliquent à tous. Toute décision de violer ces règles contre un pays particulier constitue une menace pour l’ensemble des membres de l’Union européenne.
  4. Il faut donc ici être clair. La décision prise par l’Eurogroupe pourrait bien signifier, à terme, la mort de l’Union européenne. Soit les dirigeants européens, mesurant l’abus de pouvoir qui vient d’être commis, se décident à l’annuler soit, s’ils persévèrent dans cette direction ils doivent s’attendre à une insurrection des peuples mais aussi des gouvernants de certains Etats contre l’Union européenne. On voit ainsi mal comment des Etats qui ont juste recouvré leur souveraineté, comme la Hongrie, la République Tchèque ou la Slovaquie, vont accepter de telles pratiques.

Il est alors symptomatique que la crise induite par un pays ne représentant pas plus de 2% du PIB de l’UE ait pris cette tournure. En fait, cela révèle au grand jour la nature fondamentalement antidémocratique des institutions de l’UE et le fait que cette dernière soit en train de se constituer en Tyrannie.

Le spectre de la démocratie dans les couloirs de Bruxelles

On ne peut, et on ne doit, préjuger du résultat de ce référendum. Il est même possible que, devenu sans objet, il ne se tienne pas. Mais on doit souligner qu’il représente le retour de la démocratie dans un espace européen dont elle était absente. De ce point de vue, l’initiative prise par Alexis Tsipras représentait la dernière chance d’introduire de la démocratie dans le système européen.

Il est aussi probable que les partis d’opposition, que ce soit Nouvelle Démocratie ainsi que le Parti de centre-gauche La Rivière (To Potami) protestent et cherchent à empêcher par divers recours légaux ce référendum d’avoir lieu. On ne peut plus exclure le fait que ces partis, avec l’aide des nervis fascistes d’Aube Dorée, ne tentent de déstabiliser le gouvernement grec. Ces réactions sont exemplaires des comportements antidémocratiques qui s’épanouissent aujourd’hui en Europe. Ils apportent de l’eau au moulin d’Alexis Tsipras. On sent comment les acteurs européistes de ce drame sont aujourd’hui terrorisés par le spectre de la démocratie.

En France même, on ressent très distinctement le malaise que provoque l’initiative d’Alexis Tsipras. Que ce soit au Parti Socialistes ou chez les « Républicains », on ne peut ouvertement s’opposer à une telle décision sans contredire immédiatement et brutalement tous les discours qui ont été tenu sur la démocratie. Mais, en réalité, le référendum grec fait planer le spectre d’un autre référendum, celui de 2005 sur le projet de traité constitutionnel en Europe. La manière dont la classe politique française, dans sa large majorité, de Nicolas Sarkozy à François Hollande, de l’UMP au PS, avait été désavouée par la victoire du « Non », mais avait fait passer en contrebande à peu de choses près le même texte lors du Traité de Lisbonne qui fut ratifié par le Congrès à Versailles, est l’un des épisodes les plus honteux et les plus infamants de la vie politique française. Les acteurs de cette tragique mascarade sont toujours parmi nous. Il y a une continuité de projet, si ce n’est une continuité d’action, entre la décision de ne pas respecter un vote, celui des électeurs français mais aussi néerlandais, et le coup de force inouï de l’exclusion de la Grèce de l’Eurogroupe.

Tsipras ne doit ainsi pas s’attendre à un quelconque soutien de la part de François Hollande, renvoyé sans ménagement à sa propre médiocrité et à ses basses compromissions, ni de celle d’Angela Merkel dont la politique est la véritable cause de cette crise. Mais il peut s’attendre au soutien de tous ceux qui, en Europe, se battent pour la démocratie et la souveraineté.

[1] Traduction de Vassiliki Papadaki, sur le site de SYRIZA-France, Syriza France

[2] Déclaration du Président de l’Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, samedi 27 juin,France 24

Source : Jacques Sapir, pour son blog RussEurope, le 27 juin 2015.

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Grèce : la victoire à la Pyrrhus de Wolfgang Schäuble – par Romaric Godin

En choisissant de ne pas laisser les Grecs voter, l’Eurogroupe a choisi la voie tracée par le ministre allemand des Finances. Une voie qui n’exclut pas le Grexit. Mais l’euro en sortira-t-il renforcé ?

 

Dans son discours prononcé dans la nuit de vendredi à samedi, le premier ministre grec avait affirmé que les « institutions » (Eurogroupe, FMI et BCE) cherchaient à « humilier tout un peuple. » Il semble que l’Eurogroupe l’ait pris au mot et ait voulu rendre plus éclatante encore ce samedi 27 juin cette humiliation. Après avoir ignoré la demande de prolongation du programme de 2012 pour permettre aux électeurs grecs de se prononcer sur leurs propres propositions, les ministres des Finances de la zone euro ont demandé à Yanis Varoufakis, leur collègue grec, de signer ces mêmes propositions. Sur son refus, ils lui ont signifié la fin du programme à la date prévue, le 30 juin.

Exclusion de la Grèce

A ce moment s’est produit un fait inouï jusqu’ici en zone euro : l’Eurogroupe a de facto exclu la Grèce. Le président de cette instance, le Néerlandais Jeroen Dijsselbloem, a pris la responsabilité de publier un communiqué de l’Eurogroupe approuvé par seulement 18 des 19 ministres des Finances. Mieux encore, il a demandé à Yanis Varoufakis de quitter la séance qui a repris sans donc le représentant de la Grèce afin « d’examiner les conséquences de la situation. » Un véritable coup de force dont la légalité reste incertaine. Jeroen Dijsselbloem a prétendu que l’Eurogroupe étant un « organe informel », il n’avait pas besoin d’unanimité en son sein.

Victoire de Wolfgang Schäuble

Au-delà des arguties légalistes, cette décision revient à tenter d’organiser l’exclusion de la zone euro de la Grèce, le fameux Grexit, en mettant en scène son exclusion de l’Eurogroupe. La ligne de Wolfgang Schäuble qui, vendredi encore, a répété que la « crédibilité de la zone euro » était plus importante que son « intégrité », l’a emporté. Sans surprise, il est vrai, tant cette ligne est dominante au sein des ministres des Finances. Nul n’aura au sein des 17 autres pays, tenté de s’opposer à cette création de facto d’une procédure d’exclusion d’un pays de la zone euro, procédure absolument absente des traités. La France, par la voix de Michel Sapin, prétend vouloir garder la Grèce dans la zone euro, mais de tels propos ne sont pas cohérents avec l’humiliation subie à nouveau par l’Hellade ce soir.

La BCE fera-t-elle la « sale besogne » de l’Eurogroupe ?

C’est la BCE qui va devoir désormais se charger de la basse besogne commandée par l’Eurogroupe. Constatant l’impossibilité d’un accord, la BCE ne pourra que cesser d’une façon ou d’une autre, de fournir des liquidités d’urgence aux banques grecques. Elle qui a tenté depuis des mois d’agir de façon détournée sur les négociations en évitant toute rupture, va donc réaliser concrètement le Grexit. Ce samedi soir, elle a publié un court communiqué annonçant une réunion dimanche. Mais désormais sa position est intenable : continuer à fournir le programme ELA aux banques grecques serait contraire aux traités, le cesser mettrait fin à la promesse de sauver l’euro « quoi qu’il en coûte » (whatever it takes) de Mario Draghi, prononcé en juillet 2012 et qui avait apaisé la crise de la dette. Ce serait ouvrir la boîte de Pandore des exclusions dans une zone monétaire qui n’est unifiée par aucune unité politique réelle.

La responsabilité d’Angela Merkel

La responsabilité de cette situation revient principalement à Angela Merkel. En refusant de prendre la responsabilité d’un accord politique avec la Grèce parce qu’elle ne voulait pas accepter de restructurer la dette grecque, elle a laissé les discussions dans l’impasse de l’Eurogroupe. Refusant de déjuger son ministre des Finances, elle a laissé la voie libre à son propre plan : la concentration de la zone euro autour des « bons élèves. » Encore une fois l’électeur allemand a eu un poids décisif dans l’avenir de la zone euro. Rappelons que dans le choc entre Athènes et Berlin, le gouvernement grec était allé jusqu’au point où il avait accepté, par sa proposition du lundi 22 juin, de renoncer à l’essentiel des promesses de janvier. Il avait alors, pour complaire à l’électeur allemand, oublié en grande partie le désir des électeurs de son propre pays. Mais l’humiliation du refus de cette proposition par un FMI prenant acte de la position de l’Allemagne de ne pas réviser la dette, a conduit Alexis Tsipras à vouloir renouveler son mandat populaire.

Pourquoi l’Eurogroupe a-t-il alors refusé le référendum grec ? En théorie, un « oui » aux propositions des créanciers était possible, surtout si l’opposition en faisait une condition du maintien dans la zone euro. C’eût alors été une bonne nouvelle pour l’Eurogroupe : Alexis Tsipras aurait été discrédité par son échec et les « réformes » auraient été mises en place. Mais Jeroen Dijsselbloem a prétendu qu’il refusait de mettre en place ces « réformes » avec un gouvernement ayant appelé à voter « non. » Etrange justification, car en cas de « oui », le gouvernement Tsipras était dans une position intenable et la Grèce aurait dû trouver une autre formule politique plus « pro-européenne. » Les Européens, auteurs de coups de force en Grèce et en Italie en 2011, savent parfaitement gérer ces situations.

Pourquoi l’Eurogroupe n’a pas voulu d’un référendum

La réalité est différente. D’abord, l’Eurogroupe n’a pas voulu prendre le risque d’un refus par le peuple grec de ses propositions. Il a refusé que ces dernières, qui sont les seules « rationnelles » à ses yeux, soient soumises aux « passions » d’un peuple que l’on ne respecte guère à Bruxelles. Puisque ces propositions sont bonnes par natures pour l’Eurogroupe, elles n’ont pas à être soumises au peuple, elles doivent simplement être acceptées. D’où la « surprise désagréable » de Jeroen Dijsselbloem ce samedi. Ensuite, l’Eurogroupe veut se débarrasser une bonne fois pour toutes du gouvernement Tsipras qui est un corps étranger en son sein. En le mettant en position d’être exclu de la zone euro alors même que la majorité des Grecs veulent rester dans l’euro, ils tentent de le pousser à la démission. Et pour l’obtenir, ils sont prêts à sacrifier la Grèce et à l’exclure de la zone euro.

Quelle réponse d’Athènes ?

Que va-t-il se passer à présent ? Le projet de référendum semble très compromis. La question ne peut plus être celle de propositions des créanciers qui n’existeront plus le 1er juillet. Par ailleurs, le leader de l’opposition conservatrice, Antonis Samaras, qui avait rencontré mercredi les responsables européens, a sans doute décidé de déposer une motion de confiance contre le gouvernement, repoussant la possibilité pour le parlement de convoquer un référendum le 5 juillet. Officiellement, la Grèce maintient pourtant le référendum. Mais Alexis Tsipras doit désormais trouver une parade. Et ses options sont peu nombreuses. Il peut encore, et jusqu’au 30 juin, capituler et accepter, sans en appeler au peuple, les conditions des créanciers. Il n’y résistera certainement pas politiquement. Il peut prendre l’Eurogroupe au mot et préparer la sortie de l’euro, mettant Angela Merkel devant une responsabilité historique. C’est un risque à prendre, mais, clairement, on ne peut désormais plus exclure que Berlin laisse partir Athènes. Dès lors, la situation politique d’Alexis Tsipras sera délicate. Le choix est donc cornélien. Il semble, pour le moment, avoir choisi la seconde option par une passivité qui place les Européens face au risque de Grexit.

Une zone euro plus forte ?

Reste une question : ce soir, la zone euro a changé de  nature. Elle est clairement devenu une « zone euro à deux vitesses » comme le craignait Alexis Tsipras. Un pays faible ne peut, en son sein, disposer d’aucune autonomie politique. Le contribuable et électeur de ce pays aura toujours tort face à son homologue allemand. Le refus du principe du référendum qui a provoqué des cris d’orfraies à Bruxelles ajoute encore à son caractère peu démocratique. Un caractère qui est une aubaine pour les mouvements eurosceptiques de tous bords qui vont pouvoir tirer à boulets rouges désormais sur la tyrannie de ces institutions. La logique de Wolfgang Schäuble affaiblit la zone euro en l’exposant à ces critiques.

Si le Grexit a lieu, les opposants à l’euro y verront un précédent qu’ils utiliseront. Si la situation se dégrade en Grèce, ils dénonceront l’inhumanité de la zone euro, si elle s’améliore, ils y verront la preuve qu’il faut sortir de l’euro. Surtout, désormais, nul ne pourra leur opposer un argument légal pour contester cette sortie, alors même que la BCE et l’Eurogroupe auront participé à l’exclusion de la Grèce. La zone euro n’est plus ce soir la « monnaie » de l’UE, comme l’indiquent les traités. Elle n’est plus le fruit d’une volonté politique. Elle est une zone de changes fixes dont on peut sortir à volonté.

Ceci convient parfaitement à Wolfgang Schäuble qui a pour but de faire de l’euro une monnaie forte. Mais la force d’une monnaie ne tient pas qu’à sa valeur et cette force nouvelle de la zone euro comme la conçoit Wolfgang Schäuble sera vite mise à l’épreuve. La zone euro va devoir désormais tester ses « pare-feu » pour contenir toute contagion. Seront-ils suffisants ? Oui si la contagion est limitée au Portugal. Non, si l’Italie, l’Espagne ou la France sont attaqués. Faudra-t-il alors expulser à la fin aussi ces pays ? Ce soir, l’euro est plus faible qu’hier politiquement et structurellement. Valdis Dombrovskis, vice-président de la Commission européenne le sait puisque ce samedi soir il s’est empressé de rappeler que la “Grèce est encore membre de la zone euro.” Oui, mais la rupture est évidente.

Source : Romaric Godin, LA Tribune, 27/05/2015

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La vision de DSK

(pas inintéressante, vu que c’est lui qui a prêté l’argent du FMI…)

DSK sur la Grèce 27/06/2015 publié par les-crises

Source: http://www.les-crises.fr/referendum-kaput-tyrannie-europeenne/


Miscellanées du dimanche (Delamarche, Sapir, Béchade, Gave)

Sunday 28 June 2015 at 01:01

I. Olivier Delamarche

Un grand classique : La minute d’Olivier Delamarche : “L’euro est une aberration !” – 22/06

Olivier Delamarche VS Thibault Prébay (1/2): Peut-on espérer un accord sur le dossier grec ? – 22/06

Olivier Delamarche VS Thibault Prébay (2/2): “On est dans un monde où, malheureusement, la croissance n’est pas là” – 22/06

II. Philippe Béchade

La minute de Philippe Béchade : La Grèce, courtisée en cas de Grexit ? – 17/06

Philippe Béchade VS Thomas Vlieghe (1/2): Marchés: Doit-on s’attendre à un scénario catastrophe en Grèce et en zone euro ? – 24/06

Philippe Béchade VS Thomas Vlieghe (2/2): Peut-on espérer une amélioration des résultats d’entreprises cet été ? – 24/06

III. Jacques Sapir

La minute de Jacques Sapir : Dette grecque et effet de contamination, des enjeux “philosophiques”

Jacques Sapir: Crise grecque: les négociations vont-elles aboutir sur un accord ? – 23/06

IV. Charles Gave

Gave: “Nous sommes dans un système de marché communiste dominé par des créationnistes religieux”


Petite sélection de dessins drôles – et/ou de pure propagande…

 

 

 

 

 

 

 

Images sous Copyright des auteurs. N’hésitez pas à consulter régulièrement leurs sites, comme les excellents Patrick Chappatte, Ali Dilem, Tartrais, Martin Vidberg, Grémi.

Source: http://www.les-crises.fr/miscellanees-du-dimanche-delamarche-sapir-bechade-gave/


Revue de presse internationale du 28/06/2014

Sunday 28 June 2015 at 00:45

Bonne lecture !

Source: http://www.les-crises.fr/revue-de-presse-internationale-du-28062014/


[HISTORIQUE] Tsipras convoque un référendum le 5 juillet pour rejeter les demandes des créanciers !

Saturday 27 June 2015 at 00:52

On apprend ce soir qu’Alexis Trispras a indiqué à l’instant à la télévision qu’il convoquait un référendum le 5 juillet à propos du plan d’aide en cours de discussion.

Le référendum portera sur “l’offre en forme d’ultimatum” des créanciers du pays. De fait Tsipras appelle a voter non.

Verbatim de ce message historique :

“Nous avons livré un combat dans des conditions d’asphyxie financière inouïes pour aboutir à un accord viable qui mènerait à terme le mandat que nous avons reçu du peuple.

Or on nous a demandé d’appliquer les politiques issues des mémorandums [de la Troïka] comme l’avaient fait nos prédécesseurs.

Après cinq mois de négociations, nos partenaires en sont venus à nous poser un ultimatum, [Lire ici], ce qui contrevient aux principes de l’UE et sape la relance de la société et de l’économie grecque. Ces propositions violent absolument les acquis européens.

Leur but est l’humiliation de tout un peuple, et elles manifestent avant tout l’obsession du FMI pour une politique d’extrême austérité. L’objectif aujourd’hui est de mettre fin à la crise grecque de la dette publique.

Notre responsabilité dans l’affirmation de la démocratie et de la souveraineté nationale est historique en ce jour, et cette responsabilité nous oblige à répondre à l’ultimatum en nous fondant sur la volonté du peuple grec.

J’ai proposé au conseil des ministres l’organisation d’un référendum, et cette proposition a été adoptée à l’unanimité.

La question qui sera posée au référendum ce dimanche prochain sera de savoir si nous acceptons ou rejetons la proposition des institutions européennes. Je demanderai une prolongation du programme de quelques jours afin que le peuple grec prenne sa décision.

Je vous invite à prendre cette décision souverainement et avec la fierté que nous enseigne l’histoire de la Grèce. La Grèce, qui a vu naître la démocratie, doit envoyer un message de démocratie retentissant. Je m’engage à en respecter le résultat quel qu’il soit.

La Grèce est et restera une partie indissoluble de l’Europe. Mais une Europe sans démocratie est une Europe qui a perdu sa boussole. L’Europe est la maison commune de nos peuple, une maison qui n’a ni propriétaires ni locataires. La Grèce est une partie indissoluble de l’Europe, et je vous invite toutes et tous à prendre, dans un même élan national, les décisions qui concernent notre peuple.” (Traduction:Vassiliki Papadaki)

Cela ne sera donc pas un référendum sur l’euro.

Par ailleurs, un officiel grec a indiqué qu’aucun contrôle des capitaux n’était prévu – et comprenez bien que, plus les capitaux sortent de Grèce, plus ils sont protégés d’une future dévaluation, et plus la dette de la Grèce envers la BCE augmente (et donc son risque augmente aussi)… Bonne nuit Super Mario !

Finalement, voilà ce qu’est un démocrate. Pensée, par exemple, à Pierre Moscovici, qui a reçu cette semaine un membre de l’opposition grecque (on se demande bien pour quoi – à 7 % des voix…) – comme l’a également fait Juncker…

Désolé Pierre, la révolution orange place Maidankratia, il faudra attendre encore un peu…

Pensée émue aussi pour tous les autres nains européens – qui auront au moins montré une chose : qu’ils étaient prêt à sacrifier à leur veau d’or leurs propres citoyens – retraités grecs comme les épargnants français.

Allez, Angela, fais aussi ton référendum, et l’issue va vite être trouvée…

A suivre – je remettrai à jour ce billet… (suivez bien les réactions demain, ça va être drôle sur le “populiste irresponsable qui fait un referendum”)

P.S. le résultat devrait être NON signant la victoire de Tsipras (et de la Démocratie, mais tout le monde s’en fout en Europe – et puis si c’est oui, eh bien ce seront les Grecs qui l’auront décidé !). Partant de là :

élections grece 2012 parlement

Edit : On note que LeMonde.fr a une saine vision des enjeux du moment sur sa Une (quand je vous dis que les seuls “terroristes”, ce sont les médias – les assassins sont des criminels barbares)

Edit 2 : L’analyse de Romaric Godin :

Le premier ministre hellénique a décidé de demander aux Grecs leur opinion sur les dernières propositions des créanciers. Et il s’est engagé pour le “non”.

Alexis Tsipras a donc finalement tranché dans le vif. A une heure du matin ce samedi 27 juin, dans une déclaration télévisée, le premier ministre grec a annoncé qu’il convoquait les électeurs helléniques à se prononcer par référendum le 5 juillet prochain sur les dernières propositions des créanciers. Ce samedi, le parlement grec, la Vouli, sera convoquée pour donner son feu vert à la procédure.

Alexis Tsipras et Syriza pour le non

Alexis Tsipras n’a pas caché qu’il considérait que les propositions des créanciers étaient pour lui inacceptables. Il avait refusé vendredi soir ce qu’Angela Merkel appelait “une offre généreuse.” « Les créanciers ont semblé vouloir chercher à humilier l’ensemble du peuple grec », a-t-il affirmé. Il a fustigé le « chantage » de ce qu’il a considéré comme un ultimatum des créanciers. Il n’a pas réellement dissimulé que ces propositions n’avaient pas son soutien puisqu’elle « violent les droits fondamentaux de l’Europe. » Un peu plus tard, sept ministres du gouvernement ont annoncé qu’ils appelaient à voter « non. » Syriza va donc sans doute faire campagne pour le rejet des propositions.

Des négociations interminables et une humiliation de trop

Pourquoi un référendum maintenant ? Certes, les négociations n’étaient pas terminées. L’Eurogroupe de ce samedi était considéré comme une énième « réunion de la dernière chance » et les positions semblaient encore pouvoir se rapprocher. Mais en réalité, Alexis Tsipras ne reconnaissait plus son programme dans ces propositions et les discussions interminables sur les détails ne devaient pas dissimuler que les créanciers avaient réussi à imposer une logique que les électeurs grecs avaient, en janvier, rejetée. Le refus de la proposition grecque du 22 juin, pourtant très avancée déjà, par le FMI, a sans doute été perçue par le premier ministre grec comme l’humiliation de trop. La réception par la Commission européenne de l’opposition grecque mercredi 24 juin lui a confirmé le caractère politique des buts des créanciers. Ces derniers ont cherché à imposer à Alexis Tsipras l’inacceptable, soit pour le faire tomber, soit pour le discréditer aux yeux du peuple grec.

Non ?

Le référendum est une réponse à cette tentative des créanciers. Alexis Tsipras a fait la preuve que la lutte contre l’austérité était une tâche impossible dans la zone euro pour un pays comme la Grèce. Son programme de janvier est donc désormais caduc. C’est maintenant au peuple de décider s’il veut accepter les conditions de maintien dans la zone euro posées par les créanciers. Le ministre de l’Energie, Panagiotis Lafazanis, leader de la gauche de Syriza, a indiqué qu’il appellerait à voter non et que ce « non » n’était pas un « non à l’euro. » Certes, mais si les créanciers continuent à ignorer son mandat populaire, un non donnera à Alexis Tsipras la capacité d’en tirer les conséquences. S’il n’obtient pas de meilleures conditions après ce non, alors il disposera du mandat populaire pour préparer un Grexit. Ce que cherche donc le gouvernement grec, c’est une nouvelle force dans les négociations. Officiellement toujours pour imposer son programme.

Oui ?

Mais si les Grecs acceptent les conditions des créanciers ? Alexis Tsipras a annoncé qu’il « respectera ce choix et le fera respecter. » Restera-t-il alors chef du gouvernement ? Sans doute. Quand bien même il démissionnerait, il y a fort à parier que les urnes le renvoient à Maximou, le Matignon grec. Il engagera alors une politique contraire à son programme, mais que le peuple grec lui aura demandé d’exécuter. Ceci lui permettra de rompre avec son aile gauche, mais aussi d’insister sur ce que son gouvernement a arraché aux créanciers au cours de ces cinq mois, notamment le rétablissement des discussions collectives et la préservation des retraites (à l’exception des cotisations santé). Sera-ce tenable ? Seul l’avenir le dira et peut-être devra-t-il alors changer de coalition comme le souhaitent Bruxelles et les créanciers. Mais du moins, ce sera un choix du peuple grec, non le fruit d’une pression des créanciers. En cas de oui, Alexis Tsipras peut aussi refuser de continuer à gouverner et se retirer en se gardant “en réserve.” Dans ce cas, le jeu politique grec sera rebattu. Il sera intéressant de voir ce qu’en dit le premier ministre cette semaine.

Problèmes avec les créanciers et la BCE

Cette campagne ne va pas aller sans poser de problèmes majeurs. D’abord, il semble désormais inévitable que la Grèce fera mardi 30 juin défaut sur le FMI. Que fera alors la BCE ? Le conseil des gouverneurs décidera dimanche de la poursuite ou non du programme d’accès à la liquidité d’urgence. Si elle durcit les conditions de ce programme ou si elle le coupe, la campagne référendaire risque de se produire dans une atmosphère de panique. La Grèce va aussi demander, a précisé Alexis Tsipras, une courte prolongation du programme afin de permettre aux électeurs de choisir. En cas de oui, le programme sera prolongé de cinq mois comme le proposent les créanciers. Les Européens ont donc les moyens de perturber cette courte campagne, voire de la rendre caduque en refusant de prolonger l’aide. Dans ce cas, il faudra négocier à partir de rien un nouveau programme et la question du référendum du 5 juillet n’aura aucun sens. L’Eurogroupe de ce samedi devra prendre cette décision. Sa réunion n’est donc pas sans importance.

Reprendre la main

Reste qu’en décidant de laisser in fine choisir les Grecs eux-mêmes, Alexis Tsipras a introduit un élément démocratique nouveau dans l’histoire de la crise grecque. Les créanciers doivent faire face à un adversaire qui utilise la démocratie comme une arme. Dans son discours, il a précisé que la “Grèce, berceau de la démocratie, enverra une réponse démocratique tonitruante à l’Europe et au monde.” Et d’ajouter : “à l’autoritarisme et à l’austérité sévère nous répondrons avec la démocratie, calmement et avec détermination.”

C’est un changement de paradigme majeur, à condition que la volonté des Grecs soit en effet réellement respectée. Ne pas respecter ce choix serait inconscient pour les Européens et contraire à leurs principes. Indiscutablement, si ce référendum montre qu’il n’a pas pu arracher assez de concessions aux créanciers, il montre aussi qu’Alexis Tsipras a désormais repris la main dans son bras de fer avec eux. On comprend que ces derniers doivent désormais être furieux.

Source : La tribune, 27/06/2015

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Edit : pour le concours… (jouez aussi en signalant les perles en commentaire)

Et c’est plus dur d’être démocrate (et honnête) que de gouverner, à l’évidence…

Source: http://www.les-crises.fr/tsipras-convoque-un-referendum-le-5-juillet-pour-rejeter-les-demandes-des-creanciers/