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Revue de presse internationale du 14/02/2016

Sunday 14 February 2016 at 00:20

En particulier cette semaine, face à une sévère recrudescence des positions anti-Russie dans les médias, une interview de Mikhaël Gorbatchev (en VF) sous le thème Géopolitique. De nombreux articles proposés en traduction. Pensez à postuler via le formulaire de contact du blog pour la revue ou le suivi de quelques comptes tweeters (5 anglophones, 1 francophone). Merci à nos contributeurs.

Source: http://www.les-crises.fr/revue-de-presse-internationale-du-14022016/


Revue de presse du 13/02/2016

Saturday 13 February 2016 at 03:40

Avec notamment cette semaine en économie, l’Islande face au reste du monde ; Chomsky contre les républicains (américains) ; La Turquie entre chantage et déconvenues ; l’Irak ; et Snowden inquiet pour la France. Merci à nos contributeurs. Rejoignez-les : Nous recherchons en particulier un ou deux amateurs de tweeter pour suivre quelques comptes anglophones, vous pouvez postuler via le formulaire de contact du blog.

Source: http://www.les-crises.fr/revue-de-presse-du-13022016/


De quoi la Deutsche Bank est-elle le nom ?, par Romaric Godin

Saturday 13 February 2016 at 03:10

Source : La Tribune, Romaric Godin, 11/02/2016

Les difficultés de Deutsche Bank donnent le vertige. Mais de quoi sont-elles le symptôme ? (Crédits : © Kai Pfaffenbach / Reuters)

Le géant allemand inquiète les marchés et le monde économique. Colosse au pieds d’argile, elle est cependant surtout le symptôme de choix économiques et des carences de la gestion de la crise depuis 2007

L’anecdote pourrait faire sourire si les temps étaient plus légers. Mardi 9 février, à Paris, lors du 48ème Conseil économique et financier franco-allemand, le ministre des Finances allemand Wolfgang Schäuble, qui vient de se dire « sans inquiétude » sur le sort de la Deutsche Bank, rejette à nouveau l’idée de la mise en place du « troisième pilier » de l’union bancaire, pour cause de manque de confiance dans les banques des pays du sud de l’Europe. « Il n’est pas possible d’avancer sur la solidarité si l’on n’a pas la stabilité des banques », proclame alors le président de la Bundesbank, Jens Weidmann, sous les approbations du ministre français des Finances, Michel Sapin.

L’effondrement de Deutsche Bank

Au même moment, pourtant, l’action de la première banque allemande plonge pour atteindre son plus bas niveau historique. C’est donc peu dire si le marché est en désaccord profond avec le ministre allemand. Ce jeudi, alors que le titre de l’établissement de Francfort a repris sa glissade, après une hausse de 14 % mercredi, le CDS (titres d’assurances contre le défaut) de Deutsche Bank évaluait à près de 20 % le risque d’une faillite dans les 5 ans. Un niveau digne des établissements les moins recommandables du sud de l’Europe.

La « culture de la stabilité »

Il y a, dans ce paradoxe, toute l’ambiguïté du rapport allemand à l’Europe. D’un côté, la volonté affichée de transmettre à l’ensemble de la zone euro, la Stabilitätskultur, la « culture de stabilité » dont la presse conservatrice d’outre-Rhin ne cesse de regretter l’absence au sud du continent. Et de l’autre, cette culture a précisément donné naissance à des monstres financiers qui, régulièrement, mettent en péril régulièrement l’économie européenne. Car Deutsche Bank n’est pas un cas isolé : le secteur financier allemand – et européen qui dépend aussi de cet excédent – est un colosse aux pieds d’argile, et ce fait est en grande partie le fruit du modèle économique allemand dit de « stabilité. »

Qu’est-ce donc que cette « culture de la stabilité » ? Elle repose principalement sur une inflation contenue, clé pour une croissance réduite des salaires. Ceci induit une demande intérieure faible et une amélioration de la compétitivité externe qui favorise la croissance des exportations. Autrement dit, la « culture de stabilité » se traduit dans les faits par une explosion des excédents commerciaux et des excédents courants. Car tout réemploi de ces excédents dans la demande intérieure risque de stimuler la demande intérieure, donc l’inflation. Ce modèle génère donc mécaniquement des excédents considérables. Aussi peut-on constater que l’application de ce modèle à la zone euro a conduit cette dernière à augmenter de 10 milliards d’euros l’excédent courant de l’union monétaire qui atteint désormais 3 % de son PIB.

L’emploi de l’excédent allemand

Le problème réside alors dans le réemploi de cet excédent. Traditionnellement, les banques mutualistes et les caisses d’épargne locales, utilisaient l’essentiel de ces revenus des exportations devenus dépôts pour financer le développement du Mittelstand, ces PME exportatrices qui forment le fer de lance de l’industrie allemande, et l’économie locale. Le reste servait souvent à financer les participations croisées de l’industrie et de la finance (un système connu sous le nom de Deutschland AG, « Allemagne SA »). Mais dans les années 1990, ce modèle s’épuise avec la mondialisation. Avec les réformes Schröder et le ralentissement de l’investissement public, les excédents allemands (l’excédent des comptes courants de l’Allemagne dépasse 8 % du PIB) se sont encore élargis. L’investissement dans les activités servant la demande intérieure est devenu moins rentable, tandis que l’amélioration de la compétitivité coût rendait l’investissement dans les produits servant la demande externe moins urgent. Que faire alors de ces excédents ?

Les promesses de Deutsche Bank

La réponse est devenue simple : au début des années 2000, la dérégulation et la mondialisation financières offraient des opportunités immenses. Et les banques d’affaires allemandes, à commencer par la Deutsche Bank, proposaient des rendements alléchants. Le patron de cette banque de 2006 à 2012, le suisse Josef Ackermann promet des rendements de 25 % (ce qui lui vaudra en 2011 le titre de « banquier le plus dangereux du monde » de la part de l’ancien chef économiste du FMI Simon Johnson). Ses concurrents, Commerzbank et Dresdner Bank rivalisent pour offrir des rendements à deux chiffres. Les banques régionales, les Landesbanken, ne sont pas en reste, d’autant qu’elles bénéficient de leurs liens avec les autorités locales et les caisses d’épargne. Dans ces conditions, pourquoi irait-on investir sur des projets de long terme en Allemagne avec des rendements faibles et incertains ?

Pour remplir leurs engagements, les banques allemandes investissent à tout va dans ce qui rapporte le plus. Et qui, donc, est le plus risqué. Les subprimes aux Etats-Unis, bien sûr, mais aussi l’immobilier irlandais et espagnol ou la dette publique grecque. Les milliards des excédents allemands viennent alimenter des bulles qui explosent les unes après les autres entre 2007 et 2010. Parfois, on n’hésite pas à franchir certaines limites. Deutsche Bank, là encore, est en première ligne, comme les nombreux scandales, du Libor au financement illicite des pays sous embargo étasunien dans lesquels elle a été condamnée, l’a montré.

Les banques allemandes, parmi les plus exposées après 2008

Lorsque la crise financière survient, le secteur financier allemand est clairement un des plus exposés. Et ce n’est pas un hasard. L’Etat fédéral doit oublier ses principes (qu’au besoin il a pourtant utilisé lorsque cela l’arrangeait dans les autres pays de la zone euro) : il vient au secours des banques. Commerzbank et Dresdner Bank fusionnent en janvier 2009 grâce au renflouement de Berlin qui prend 25 % du capital de la nouvelle entité. En juin 2009, la banque Hypo Real Estate, de taille équivalente à Lehman Brothers, est nationalisée – une première en Allemagne depuis 1932 – en urgence, après l’expropriation manu militari de ses actionnaires privés, et démantelée. Parallèlement, les banques régionales allemandes sont renflouées par les Länder, à coup de dizaines de milliards d’euros, tandis que WestLB, trop mal en point, sera démantelée aux frais de l’Etat fédéral. En tout, plus de 200 milliards d’euros de garanties sur les actifs « toxiques » ont été émises par l’Etat fédéral via son fonds, la SoFFin.

Deutsche Bank sauvée ?

Ce sauvetage a permis de réduire la facture de la crise pour la Deutsche Bank, qui n’a pas fait appel directement à l’Etat. D’autant que, fortement exposée aux dettes périphériques, elle a bénéficié de l’appui du gouvernement allemand et de la BCE qui ont tout fait pour éviter une restructuration de la dette irlandaise, et ont repoussé suffisamment celle de la dette grecque pour que la Deutsche Bank puisse vendre ses titres (en grande partie, du reste, à la BCE, dans le cadre du programme appelé SMP en 2010-2011). Dernier élément : en 2009, l’Etat fédéral offre à la Deutsche Bank la filiale bancaire de la poste allemande, la Postbank pour un prix très raisonnable. Une façon de récupérer du cash en pleine crise pour le géant bancaire qui va cependant tant malmener cette filiale qu’elle va devoir en déprécier de moitié la valeur. Ainsi, la Deutsche Bank a été maintenue en activité, alors même que les excédents allemands continuaient à progresser.

Aveuglement des autorités

La Deutsche Bank a donc été indirectement sauvée par les Etats de la zone euro. Elle est donc restée cette immense machine à recycler les excédents allemands. Certes, sur les marchés, tout le monde sait depuis longtemps qu’il existe un problème Deutsche Bank. D’autant que l’établissement a été rattrapé par la justice pour ses activités indélicates et a dû provisionner 5,2 milliards d’euros pour ses futures pénalités, mais uniquement sur ce qui est connu. Mais tout le monde a feint de l’ignorer. La banque a donc passé sans difficulté les différents stress tests et autres revues de la qualité des actifs, dont on rappellera cependant que les ratios sont calculés sur des risques « pondérés » et non sur des montants réels. Une bonne façon, donc, de fermer les yeux en se donnant bonne conscience. La responsabilité de la crise de cette banque francfortoise aujourd’hui n’est donc pas que celle de ses dirigeants actuels, mais aussi de ceux du passé et des responsables politiques allemands et européens. Bref, Wolfgang Schäuble, ministre des Finances depuis 2009, sait fort bien que Deutsche Bank est une menace pour la « stabilité », sans doute autant que les banques italiennes.

Le risque de spirale

Tenue artificiellement hors de l’eau, Deutsche Bank voit sa situation se compliquer cependant de plus en plus, notamment avec ses problèmes judiciaires. La réaction de l’établissement a été récemment, comme le souligne dans une analyse récente la journaliste de Forbes Frances Coppola, de prendre davantage de risques pour renforcer la rentabilité de ses divisions les plus rentables. Or, plus de risque signifie plus de besoins en capitaux, mais plus de risque signifie aussi plus de méfiance des investisseurs. Deutsche Bank semble donc piégée. Il est bien difficile de croire qu’elle est « solide comme un roc » comme le prétend John Cryan, un de ses co-présidents. En effet, avec 220 milliards d’euros de réserves, un accès au marché désormais compromis et un bilan de 1.626 milliards d’euros, la banque allemande pourrait être contrainte de convertir en avril ses fameuses « Coco » (obligations convertibles) en actions dévalorisées. Ce serait alors la réalisation des craintes du marché : la perte complète de crédibilité de la banque.

Quelle crise ?

Aujourd’hui, la Deutsche Bank fait trembler les marchés. Elle a le potentiel d’être un nouveau Lehman Brothers à l’européenne. Mais il ne fait aucun doute aux acteurs du marché que Berlin ne la laissera pas aller à la faillite. Il y aura alors sauvetage de la Deutsche Bank. Mais comment renflouer un tel colosse ? L’union bancaire interdit les renflouements directs par l’Etat, mais l’Allemagne acceptera-t-elle de faire payer les créanciers et les déposants de Deutsche Bank ? Entre sauver l’union bancaire et sauver son modèle économique, le choix devrait être rapide. On cherche cependant d’autres solutions. La dernière rumeur de marché veut que la BCE rachète des titres bancaires… Le gouvernement allemand, si opposé aux rachats de titres par la banque centrale, y trouverait soudain un certain charme. La « culture de la stabilité » serait alors bien oubliée…

Deutsche Bank, ce symptôme

Reste une question : comme on l’a vu, Deutsche Bank n’est qu’un symptôme : celui d’un modèle économique néfaste et dangereux, mais pourtant érigé en référence dans la zone euro. Et celui d’un système financier européen qui n’a pas été aussi maîtrisé qu’on le croyait et qui continue à s’appuyer sur la garantie implicite des Etats. Si l’on en finit avec Deutsche Bank, une autre banque prendra le relais. La menace sur la stabilité n’est pas toujours où Wolfgang Schäuble et Jens Weidmann voudraient qu’elle soit. Tant que les excédents allemands ne se réduiront pas, c’est la stabilité économique de l’Europe qui sera en danger.

Source : La Tribune, Romaric Godin, 11/02/2016

Source: http://www.les-crises.fr/de-quoi-la-deutsche-bank-est-elle-le-nom-par-romaric-godin/


On a détecté des ondes gravitationnelles ! par Yaroslav Pigenet

Saturday 13 February 2016 at 02:50

Source : CNRS, Yaroslav Pigenet, 11-02-2016

Vue d’artiste de deux trous noirs qui, en fusionnant, émettent des ondes gravitationnelles.

Aujourd’hui, à 16h30, les collaborations Ligo et Virgo ont annoncé avoir détecté des ondes gravitationnelles, un siècle après leur description par Einstein. C’est un double coup de maître : en détectant pour la première fois ces ondes, les chercheurs ont également observé la première collision entre deux trous noirs. Une nouvelle fenêtre s’ouvre sur l’Univers.

Dévoilées par Einstein en 1915, les équations de la relativité générale induisaient l’existence théorique de deux phénomènes inconnus et inobservables à l’époque : les ondes gravitationnelles et les trous noirs. Après une quête de près d’un demi-siècle, les physiciens, et plus particulièrement, depuis 2007, ceux de la collaboration associant les observatoires Ligo (États-Unis) et Virgo (Europe), tiennent enfin leur Graal : la première observation directe d’une onde gravitationnelle causée par la collision de deux trous noirs. Cette découverte annoncée le 11 février ne constitue pas seulement une validation supplémentaire de la théorie d’Einstein, elle fait aussi entrer l’astronomie dans une nouvelle ère en lui procurant un messager de plus pour observer les phénomènes les plus violents de l’Univers.

Il y a très longtemps, dans une galaxie très très lointaine, deux trous noirs qui tournaient l’un autour de l’autre et pesaient chacun environ 30 soleils ont fini par se rencontrer à 200 000 kilomètres/seconde (les deux tiers de la vitesse de la lumière !) et fusionner. Un phénomène appelé coalescence. Cet événement cataclysmique, baptisé GW150914, a, en une fraction de seconde, converti en ondes gravi­tationnelles une énergie équivalant à trois fois la masse du Soleil.

Deux observations simultanées

Ce sont ces ondes, générées à plus d’un milliard d’années-lumière de la Terre, que les deux interféromètres laser géants de Ligo – l’un situé en Louisiane, l’autre à 3 000 kilomètres, dans l’État de Washington – ont observé simultanément le 14 septembre 2015 à 11 h 51. « Cette double détection et la force du signal enregistré assurent qu’il ne s’agit pas d’une fausse alarme, précise Benoît Mours, chercheur au Laboratoire d’Annecy-le-Vieux de physique des particules (Lapp)1 et responsable scientifique du projet Virgo en France. Selon nos vérifications, un bruit aléatoire mimant GW150914 est si peu probable qu’il ne pourrait se produire qu’au plus une fois tous les 200 000 ans ! »

Cette double
détection et
la force du signal
enregistré assurent
qu’il ne s’agit
pas d’une fausse
alarme.

Cette observation directe est d’abord une confirmation éclatante de la validité de la théorie de la relativité générale et de l’une de ses prédictions les plus révolutionnaires. C’est aussi une prouesse technique sachant qu’Einstein lui-même pensait que les déformations de l’espace-temps dues aux ondes gravitationnelles étaient si ténues qu’elles ne pourraient jamais être détectées directement.

« Pour l’astrophysique, cette découverte est un peu ce qu’a été celle du boson de Higgs pour la physique des particules, explique Tania Regimbau, astrophysicienne dans le groupe Virgo-Artemis2. Et ce tant par la manière – une colla­boration internationale de plusieurs années rassemblant des centaines de chercheurs –, que par le résultat – la validation expérimentale d’une théorie centenaire ouvrant la voie à une nouvelle astronomie. »

Bras ouest de 3 km dans lequel circule l’un des deux faisceaux laser de l’interféromètre Virgo. Ce détecteur mesure les déformations de l’espace générées par le passage des ondes gravitationnelles.  C. FRESILLON/VIRGO/CNRS PHOTOTHEQUE

Remonter l’histoire de l’Univers

En effet, après les ondes électromagnétiques (lumière, ondes radio, rayons X…), qui ont permis aux astronomes d’observer des phénomènes et des objets cosmiques de plus en plus éloignés, les ondes gravitationnelles vont désormais permettre d’étudier des événements extrêmes et de remonter encore plus loin dans l’histoire de l’Univers. Le ­redémarrage en 2016 du détecteur Advanced Virgo en Italie, dont les données seront combinées avec celles de Ligo, fournira aux chercheurs un observatoire gravitationnel capable d’identifier et de localiser encore plus précisément les sources de ces précieuses ondes. Kagra au Japon devrait com­pléter ce réseau vers 2018. Ces instruments seront ensuite rejoints, vers 2030, par eLISA, un ensemble de trois satellites qui constitueront un interféromètre avec l’ambition de détecter directement les ondes gravitationnelles issues du Big Bang. L’ère de l’astronomie gravitationnelle est née.

Source : CNRS, Yaroslav Pigenet, 11-02-2016

 

Ondes gravitationnelles : la plus vibrante des prédictions d’Einstein confirmée

Source : Le Point, Olivia Recasens, 09-02-2016

Pour la première fois, les “vibrations de l’espace-temps” prédites par Einstein ont été détectées. Une découverte plus importante que celle du boson de Higgs.

Au départ, ce n’était qu’une folle rumeur. Un message posté le 11 janvier sur Twitterpar le cosmologiste Lawrence Krauss, de l’université d’Arizona State : « Mes dernières informations au sujet du Ligo ont été confirmées par des sources indépendantes. Restez branchés ! On a peut-être découvert des ondes gravitationnelles  !! Excitant. » Retweeté plus de 1 900 fois, le tweet du cosmologiste a fait le tour de la planète science, s’attirant une volée de réactions sceptiques tant la nouvelle était à peine croyable.

Mais, désormais, la découverte est officielle : des physiciens sont parvenus à détecter des ondes gravitationnelles, selon une étude publiée dans Physical Review Letters. « C’est l’une des plus importantes découvertes scientifiques de notre temps. À mon avis, plus importante encore que celle du boson de Higgs ! explique au Point Catherine Bréchignac, secrétaire perpétuelle de l’Académie des sciences (1). La preuve que nous disposons maintenant d’un appareil capable de mieux comprendre l’infiniment grand. Nous n’allons plus nous contenter de regarder les étoiles, mais voir à l’intérieur d’elles, car ces ondes pénètrent la matière au seuil de laquelle la lumière s’arrête. »

L’histoire des ondes gravitationnelles commence il y a cent ans avec Albert Einsteinqui se met en tête de comprendre comment se propage le champ gravitationnel dans la toute nouvelle théorie de la gravitation qu’il vient de construire, la théorie de la relativité générale. Mais l’article que le physicien écrit en 1916 contient une importante erreur, et ce n’est qu’en 1918, dans un deuxième papier, qu’il en donne la bonne description. Les ondes gravitationnelles, « OG » de leur petit nom, forment l’un des éléments-clés de la théorie de la relativité générale : la propagation par ondes, à la vitesse de la lumière de la gravitation. La relativité générale prédit en effet que tout corps qui se déplace génère une déformation de la structure de l’espace-temps, autrement dit, modifie les distances et le temps, et cette déformation se propage par ondes successives dans le cosmos à la manière d’une vague à la surface de l’eau. Seuls des événements extrêmement violents génèrent des OG, des cataclysmes cosmiques, tels que la formation d’une étoile dans un trou noir, l’explosion d’une supernova ou encore la collision de deux étoiles à neutrons. Mais, pour autant, personne n’avait encore réussi à détecter ces déformations de l’espace-temps, qui se propagent dans l’Univers à 300 000 km/s, la vitesse de la lumière.

« Courage »

Cela fait trente ans pourtant que les scientifiques les traquent activement. D’un côté, Virgo, une antenne de détection construite à Pise sous l’égide du CNRS et de l’Institut national de physique nucléaire italien (INFN), qui mobilise six équipes françaises (APC, LAL, LAPP, LMA, LKB, OCA). De l’autre, Ligo de la National Science Foundation avec ses deux interféromètres situés aux États-Unis. En 2014, vu l’ampleur du défi, Virgo et Ligo ont signé un accord pour mettre en commun leurs données. En septembre 2015, ce sont les deux interféromètres américains qui ont enfin capté des signaux, éphémères – ils n’ont duré qu’une petite fraction de seconde –, provenant du mouvement orbital, puis de la fusion de deux trous noirs géants, chacun d’une masse équivalant à 30 soleils, situés à environ un milliard d’années-lumière de la Terre. C’est cette observation qui vient donc d’être confirmée après vérification des données.

Pendant longtemps, on a douté de l’existence de ces ondes. « La première preuve mathématique n’a été apportée qu’en 1952 par Yvonne Choquet-Bruhat, spécialiste de la relativité. Puis, à la fin des années 50, un autre pionnier, Joseph Weber, a eu le courage de penser qu’il fallait construire des détecteurs assez sensibles pour détecter les OG », raconte Thibault Damour (1), professeur à l’Institut des hautes études scientifiques, qui a notamment fourni au réseau Ligo/Virgo une méthode inédite pour décrire le signal émis par la fusion de deux trous noirs et faciliter ainsi sa détection.

« Courage », le mot n’est pas trop fort si l’on interroge les chercheurs qui ont consacré tout ou partie de leur carrière à la quête des ondes gravitationnelles. « Dès le début de construction de Virgo, il y a eu plusieurs voix conservatrices qui se sont levées : c’est trop risqué, trop cher, mieux vaudrait investir sur d’autres domaines. Heureusement, le CNRS a tenu bon ; c’est cela, l’avantage principal des organismes nationaux de recherche, leur persévérance sur des cibles scientifiques de longue durée », se souvient Stavros Katsanevas, directeur adjoint scientifique de l’Institut de physique nucléaire et physique des particules (IN2P3) du CNRS et président de l’Observatoire européen des ondes gravitationnelles (EGO/ VIRGO) de 2002 à 2012. « Cela dit, la construction de Virgo a commencé trois ans plus tard que celle de Ligo. Les collègues de Virgo ont fait des efforts remarquables, et le retard s’est réduit à quelques mois seulement. Les deux collaborations travaillent main dans la main et des contributions cruciales dans l’analyse de ces événements ont été apportées par les équipes européennes, telles que le laboratoire Astroparticule et Cosmologie de l’IN2P3/Paris-Diderot/CeA/Obs de Paris. »

Vertigineux

Depuis l’annonce de la détection, c’est comme si le monde de la physique avait subi une onde gravitationnelle, et ceux qui n’avaient pas brillé par leur enthousiasme jouent désormais des coudes pour être sur la photo. Il est vrai que l’exploit de Virgo/Ligo donne ni plus ni moins naissance à une nouvelle astronomie. Quatre cents ans après l’astronomie optique lancée par Galilée lorsqu’il a braqué sa lunette vers le ciel. « Les premiers radiotélescopes ont ensuite ouvert la voie à l’astronomie radio, les satellites ont lancé l’astronomie des rayons X, puis celle des rayons gamma, etc. Des astronomies toutes basées sur les ondes électromagnétiques jusqu’à ce que les premiers détecteurs de neutrinos cosmiques inaugurent l’astronomie neutronique. La détection des ondes gravitationnelles, d’un autre type de signal donc, nous donne de nouvelles lunettes pour voir des choses nouvelles dans l’Univers », précise Thibault Damour.

De fait, les perspectives sont vertigineuses : pouvoir sonder l’énergie noire, cette force étrange qui expliquerait l’expansion de notre Univers, mieux explorer le cosmos et, pourquoi pas, remonter dans le temps jusqu’à 14 milliards d’années. En effet, non seulement les physiciens ont capturé le signal émis par des ondes gravitationnelles, mais ils ont aussi observé, pour la première fois, la fusion de deux trous noirs. La preuve de l’existence de ces ogres dévoreurs de lumière, qui détiennent peut-être le secret de la naissance de notre Univers. Au début des années 2000, Jean-Pierre Luminet, astrophysicien à l’Observatoire de Paris-Meudon et directeur de recherche au CNRS, écrivait : « Les frontières de la science sont toujours un mélange bizarre de vérité nouvelle, d’hypothèse raisonnable et de conjecture extravagante. » La prouesse que viennent d’accomplir les physiciens américains, français et italiens ouvre une fenêtre sur l’Univers en apparence extravagant inventé par Einstein il y a un siècle.

(1) Retrouvez l’avis de l’Académie ainsi qu’un dossier complet sur la lumière.

(2) Le prochain cours de Thibault Damour à l’IHES, les 18 et 25 février, porte sur « Ondes gravitationnelles et systèmes binaires ». Sur le site, figurent aussi les contribution de l’IHES aux ondes gravitationnelles.

Source : Le Point, Olivia Recasens, 09-02-2016

Source: http://www.les-crises.fr/on-a-detecte-des-ondes-gravitationnelles-par-yaroslav-pigenet/


La Chine menace les compagnies américaines de sanctions : est-ce l’avenir ? Par Peter Harrell

Saturday 13 February 2016 at 01:51

Source : Reuters – The Great Debate, le 26/01/2016

 

Des conteneurs maritimes entassés dans un port de Qingdao, province de Shandong, le 10 décembre 2013. REUTERS/China Daily

La récente menace par la Chine d’imposer des sanctions aux entreprises américaines du secteur de la défense vendant des armes à Taïwan ne devrait pas prendre les officiels ou les dirigeants de sociétés américains par surprise : cela fait des années que Washington applique ce genre de sanctions. Que les concurrents des É-U se mettent à copier leurs tactiques n’était qu’une question de temps.

Indépendamment du fait que la Chine mette sa menace à exécution, Washington a besoin de se préparer à une nouvelle norme dans laquelle les États-Unis doivent autant se défendre contre des sanctions qu’en imposer.

La Chine s’inspire directement du manuel des sanctions que Washington a développé contre l’Iran. Entre 2010 et 2015, les États-Unis ont effectivement donné le choix à diverses entreprises : s’ils pratiquaient un commerce interdit avec l’Iran, comme l’achat de pétrole, on leur couperait toute possibilité d’activité commerciale sur le sol américain. Forcés de choisir entre l’accès au plus important système financier au monde et un marché iranien plus de trente fois moindre, la plupart des entreprises se sont rangées du côté de Washington et ont évité Téhéran.

Les menaces chinoises imitent cette approche – tentant de forcer les sociétés américaines à choisir entre les ventes d’armes à Taïwan et l’accès à une économie chinoise presque vingt fois plus importante. Bien que les entreprises américaines ne vendent actuellement aucun équipement militaire à la Chine, de nombreux contractants de la défense des É-U vendent des avions de transport de passagers, des pièces d’aviation et d’autres équipements civils en Chine et pourraient voir leur capacité à continuer ces ventes interrompue par Pékin.

 

Des conteneurs maritimes sur un navire au port de Rizhao, province de Shandong, le 6 décembre 2015. REUTERS/Stringer

Pour Pékin, il s’agit d’un changement de position officielle. La Chine a longtemps argué que seules les sanctions imposées par le Conseil de Sécurité des Nations Unies étaient légitimes. Cependant, Pékin ne s’est pas strictement tenu à cette politique. En 2012, par exemple, il a unilatéralement limité les importations de fruits et de légumes depuis les Philippines en rétorsion, dans le cadre d’une dispute sur des revendications en mer de Chine du Sud.

Mais les menaces publiques de la Chine au sujet de Taïwan marquent une escalade majeure de sa volonté apparente de déployer ses propres sanctions contre les sociétés américaines engagées dans les affaires commerciales, en particulier des affaires explicitement autorisées par l’administration Obama et soutenues publiquement par de nombreux membres du Congrès.

Les décideurs politiques chinois comprennent que leurs difficultés économiques et financières grandissantes rendent leurs menaces de sanctions d’autant plus crédibles. La Chine constitue un marché décisif pour les produits américains, des voitures aux microprocesseurs, et les entreprises comme Wal-Mart, Apple, MasterCard et Starbucks sont parmi les entreprises américaines de pointe qui génèrent au moins dix pour cent de leur chiffre d’affaires en Chine, selon des données rassemblées l’an dernier par Factset Research.

D’autres pays, comme la Russie, ont aussi commencé à évaluer les domaines dans lesquels ils ont un poids économique qu’ils peuvent utiliser contre Washington et ses alliés.

Il y a plusieurs étapes pratiques que les États-Unis devraient effectuer pour répondre aux menaces chinoises ou pour être prêts lorsque d’autres pays menaceront de sanctions.

 

Un travailleur marche dans la zone des conteneurs du port de Shanghai, 10 avril 2012. REUTERS/Aly Song

Premièrement, les responsables américains doivent commencer à planifier systématiquement leur défense contre les sanctions. Bien que Washington ait de puissants mécanismes d’analyse pour développer de nouvelles sanctions contre des cibles étrangères, il ne fait pas grand-chose pour analyser la vulnérabilité des É-U aux sanctions. Il faut changer cela. Et vite. Le Département du Trésor devrait, pour commencer, mettre en place un comité de planification de défense contre les sanctions pour étudier la vulnérabilité américaine aux sanctions et émettre des rapports.

Deuxièmement, Washington doit faire savoir clairement à Pékin que le gouvernement américain soutiendra les entreprises américaines menacées de sanctions. Les principaux responsables américains devraient insister sur le fait que Washington considère la menace chinoise comme inacceptable et que les États-Unis encourageront les entreprises américaines à participer à l’accord avec Taïwan malgré les menaces.

Si la Chine poursuit sur sa lancée et impose des sanctions, Washington devra envisager des mécanismes pour protester contre les actions de la Chine et chercher des recours économiques pour les entreprises américaines affectées.

Troisièmement, les entreprises devraient faire plus pour identifier les risques de sanctions et durcir leurs défenses contre leurs vulnérabilités potentielles. Les entreprises américaines sont déjà engagées dans des analyses sophistiquées pour s’assurer que des évènements lointains tels que tremblements de terre et autres catastrophes naturelles ne déstabilisent pas le marché mondial. Les entreprises devraient employer des analyses de risque similaires et des stratégies d’amortissement pour les sanctions potentielles de la part de gouvernements étrangers.

Quatrièmement, les États-Unis doivent investir beaucoup plus d’énergie et de capital diplomatique pour construire des normes mondiales définissant quand des sanctions devraient et ne devraient pas être utilisées. Il y a actuellement quelques normes de ce type – même parmi de proches alliés des É-U comme l’Union Européenne.

Si Washington ne pousse pas à la mise en place de telles normes, la Chine et d’autres gouvernements le feront probablement. Le développement de normes autour de l’utilisation de sanctions ne préviendra pas en soi leur utilisation abusive par la Chine et d’autres gouvernements. Mais de même que les normes mondiales aident à limiter l’utilisation abusive de la force militaire par les gouvernements étrangers, des normes sur l’utilisation de la force économique aideront Washington à combattre des abus.

Les sanctions et d’autres outils économiques joueront probablement un rôle central dans la politique étrangère américaine dans les années à venir. La menace chinoise met en évidence le besoin de reconnaître les vulnérabilités propres des États-Unis, contre lesquelles Washington devrait prendre des mesures.

Source : Reuters – The Great Debate, le 26/01/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

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Source : DeDefensa, 28/1/2016

Une “guerre des sanctions”, ou l’arroseur bientôt arrosé ?

Les Chinois viennent de réagir à l’intention affichée par les USA de vendre des armements à Taïwan. (Depuis décembre, des compagnies US négocient pour la vente à Taïwan de navires et d’autres équipements à hauteur de $1,83 milliard. Le gouvernement US vient d’approuver cette vente.) La réaction chinoise pouvait sembler convenue en première lecture, avec l’habituelle protestation. Pourtant, cette fois il y a des menaces directes et précises de “sanctions” que la Chine se réserve le droit d’imposer, de manière unilatérale, sans consultation ni autorisation de l’ONU, “à l’américaine” quoi… Cela, estime Peter Harrell le 27 janvier sur son blog de l’agence Reuters, représente un changement considérable. Harrell, qui est présentement Adjunct Senior Fellow au think tank à la mode à Washington (Center for a New American Security [CNAS] de Michele Flournoy), vient de l’administration Obama : il était assistant du secrétaire d’État pour les questions de sanctions et de mesures financières de rétorsion (dites “anti-threat”, ce qui est un sophisme révélateur). Il s’agit donc bien d’un spécialiste de la question des sanctions, qui, jusqu’à la mi-2015, était au cœur de la machinerie dirigeant cette politique au sein de l’exécutif US.

C’est Harrell qui nous conseille de prendre très au sérieux, 1) la menace chinoise ; 2) ce que cette menace implique du comportement de la Chine, et d’autres pays, pour l’avenir assez rapproché ; 3) par conséquent, – parce que c’est bien dans ce sens qu’il faut lire ce propos, comme Harrell l’explique plus loin, – autant de situations menaçantes qui apparaîtraient éventuellement pour les USA .

« China’s recent threat to impose sanctions on U.S. defense companies that sell arms to Taiwan should come as no surprise to American officials or corporate executives: Washington has been issuing sanctions of these sorts for years. It was only a matter of time before U.S. competitors started copying its tactics. Regardless of whether China follows through on its threat, Washington needs to be ready for a new normal in which the United States must defend against sanctions as well as impose them.

» China is taking a page from the sanctions playbook Washington developed against Iran. Between 2010 and 2015, the United States effectively gave companies a choice: If they did prohibited business with Iran, like buying oil, they would get cut off from doing any business in the United States. Forced to choose between access to the world’s most important financial system and an Iranian market less than 1/30th the size, most companies stuck with Washington and avoided Tehran. China’s threat mirrors this approach — trying to force U.S. companies to choose between defense sales to Taiwan and access to a Chinese economy that is nearly 20 times larger. While U.S. companies do not currently sell military equipment to China, many U.S. defense contractors do sell civilian passenger aircraft, aviation parts and other civilian equipment in China and could find their ability to continue those sales cut off by Beijing.

» For Beijing, this is a change in official position. China has long argued that only sanctions imposed by the United Nations Security Council are legitimate. Yet, Beijing has not strictly adhered to this policy. In 2012, for example, it unilaterally limited imports of fruit and vegetables from the Philippines in retaliation for a dispute over claims in the South China Sea. But China’s public threat over Taiwan marks a major escalation in its apparent willingness to deploy sanctions of its own against U.S. companies engaging in business, particularly business that is expressly authorized by the Obama administration and publicly supported by many in Congress.

» Chinese policymakers understand that their growing economic and financial clout makes sanctions threats more credible. China is a critical market for U.S. products from cars to computer chips, and companies like Wal-Mart, Apple, MasterCard and Starbucks are among the leading American firms that generate at least 10 percent of their business in China, according to data compiled last year by Factset Research. Other countries, like Russia, have also begun to assess areas where they have economic leverage they can use against Washington and its allies… »

Ce qui est remarquable dans ce qu’écrit Harrell, c’est la perception qu’il nous expose de la probabilité du changement de comportement de la Chine, qui semblerait vouloir passer d’une politique strictement multilatérale et conforme aux règles internationales édictées par l’ONU, à une attitude unilatérale, déterminée souverainement et en fonction des seuls intérêts chinois. Harrell estime que c’est le poids économique de la Chine, la multiplicité de ses relations commerciales, sa place importante comme très grand marché pour les exportations, qui lui permet de prétendre à une telle politique : lorsque et si la Chine interdit l’exportation de matériels aéronautiques US sur son territoire, les pertes de Boeing constitueront un énorme manque à gagner pour la firme autant qu’un important déficit à l’exportation pour les USA.

Bien entendu, l’argument a du poids et il ne peut pas ne pas être pris en compte pour ce qu’il pèse. Mais il y a évidemment un autre aspect, qui concerne l’attitude des USA, tant du point de vue direct de sa politique unilatéraliste d’application de sanctions décidés par eux-seuls, que du point de vue indirect de leur attitude politique et stratégique vis-à-vis de la Chine (notamment les pressions exercées sur la Chine parfois à la limite de la violation, sinon en violation pure et simple selon la Chine de règles internationales qui la concernent directement, comme les diverses croisières de l’US Navy vis-à-vis des eaux territoriales chinoises). On peut même avancer l’hypothèse que la politique générale des USA avec leur complet désintérêt pour le respect des lois internationales, même lorsque la Chine n’est pas concernée, a également pesé dans ce qui serait un changement de la politique.

Cette possibilité de sanctions chinoises, si elle conduit à des sanctions anti-US, – ce qui paraît inévitable si les livraisons US à Taïwan se réalisent, et selon l’idée que les USA ne reculeront pas à cet égard, – marquera un tournant important de la politique chinoise dans le sens de l’unilatéralisme anti-US. Cela signifiera que la Chine a été conduite, sinon “forcée”, à abandonner sa politique classique de respect des principes de la vie internationale par le comportement des USA. Cela se ferait en parallèle à l’évolution de la politique russe depuis la croise ukrainienne, mais cette fois avec les politiques de ces deux grands pays se renforçant l’une l’autre, et les incitant l’un et l’autre à aller de l’avant dans le sens de ce qu’on ne peut percevoir autrement que comme une politique de confrontation avec les USA dans les domaines des relations internationales. La responsabilité étant absolument du fait des USA depuis de nombreuses décennies, on ne peut que constater le caractère à la fois fondé et inéluctable de telles réactions.

Que feraient les USA si les Chinois mettaient leurs menaces à exécution ? C’est l’objet d’une deuxième partie du texte de Harrell, qui conseille aux USA de prendre plusieurs mesures et orientations : « First, U.S. officials need to begin systematically planning for sanctions defense. While Washington has strong analytic mechanisms to develop new sanctions against foreign targets, it does little to analyze U.S. sanctions vulnerabilities. This needs to change. Fast. The Treasury Department should, for a start, set up a defensive sanctions planning committee to research and report on U.S. sanctions vulnerabilities.

» Second, Washington needs to make clear to Beijing that the U.S. government will support American companies threatened by sanctions. Senior U.S. officials should emphasize that Washington views China’s threat as unacceptable and that the United States will encourage American companies to participate in the deal with Taiwan despite the threat. If China follows through and imposes sanctions, Washington needs to look at mechanisms to protest China’s action and to seek economic recourse for affected U.S. companies.

» Third, companies need to do more to identify sanctions risks and to harden defenses against potential vulnerabilities. U.S. companies already engage in sophisticated analyses to ensure that far-flung events like earthquakes or other natural disasters do not disrupt global business. Companies should apply similar risk assessments and mitigation strategies toward potential sanctions by foreign governments.

» Fourth, the United States needs to invest far more energy and diplomatic capital to build global standards defining when sanctions should and should not be used. There are currently few such standards — even among close U.S. allies like the European Union. If Washington does not step up to shape such standards, China and other governments will likely try to do so. Developing standards about the use of sanctions will not, by itself, prevent China or other governments from misusing them. But just as global standards help constrain the misuse of military force by foreign governments, standards about the use of economic force will help Washington fight back against misuse. »

Les recommandations données par Harrell, qui ne fait là qu’extrapoler des réflexions qu’il a conduites alors qu’il se trouvait en poste au département d’État, représentent assez bien les contradictions internes des USA. Ce pays est unilatéraliste en essence, disons par l’“exceptionnalisme” même qui lui est accordé sous une forme transcendantale par des autorités suprêmes qu’il ne peut être question de contester, et il a les plus grandes difficultés à comprendre qu’on puisse critiquer ses propres actions unilatérales, tandis qu’il s’exclame avec fureur lui-même lorsque d’autres esquissent l’intention de développer de telles actions unilatérales. Par ailleurs, la puissance des USA décline, et notamment relativement à d’autres puissances telles que la Chine pour ce qui nous occupe, ce qui fait qu’ils se trouvent confrontés à la possibilité de même type d’actons qu’eux-mêmes produisent depuis des décennies ; mais, bien entendu, les autres n’ont pas l’adoubement de l’“exceptionnalisme” US…

Ainsi Harrell propose-t-il, assez paradoxalement, d’une part des mesures agressives même si défensives, pour combattre, voire tenter d’annihiler d’éventuelles sanctions anti-US, d’autre part de participer à la mise en place de “standards” internationaux pour définir et réguler les sanctions. Dans ce cas, se dirait-on, pourquoi tout bonnement ne pas suivre les règles de l’ONU, et alors pourquoi ne pas respecter les décisions de l’ONU ? Simplement parce que les USA ne veulent pas l’abolition de la politique des sanctions, ni même la moindre contrainte sur leur politique nationale, mais des “standards” pour restreindre une amorce de politique des sanctions contre eux. Selon les habitudes US, de tels “standards” devraient être respectés par les autres, mais de façon moins contrainte sinon assez relâchée, par les USA ; au besoin, les USA appliqueraient des sanctions contre les pays qui ne respecteraient pas, dans leurs propres politiques, ces standards des sanctions, des standards qu’eux-mêmes (les USA) ne seraient tenus en aucune façon de respecter, selon les règles mêmes de leur Constitution et les positions définies de façon constante par le Congrès. C’est dire si l’on peut douter grandement que de telles recommandations soient suivies d’effets, les USA étant tout entier conduits par leur propre perception de leur “exceptionnalité” ; laquelle pourrait même les conduire, malgré les conseils de Harrell, à refuser de conceptualiser la perspective qu’une réelle “politique des sanctions” puisse être développée contre eux, – comme on n’imagine pas la possibilité d’un crime de Lèse-Majesté, – et les mettrait dans la plus grande difficulté d’établir une défense efficace contre une attaque qu’ils imaginent impossible du fait même de leur statut.

… En attendant, la seule réaction que l’on est invité à manifester sans la moindre restriction, c’est le constat que les USAmontrent brusquement leur vulnérabilité à une “politique des sanctions” dont ils ont été les constants initiateurs et les constants utilisateurs. Il y a 15 ans, il y aurait même seulement 10 ans, un chroniqueur si fortement instruit dans ce domaine comme l’est Harrell n’aurait pas eu l’esprit de telles propositions qui impliquent une position US défensive dans “la guerre des sanctions” ; jusqu’ici, la “politique des sanctions” étaient l’essence même de la politique US, et son caractère était central et offensif dans cette politique, et on ne pouvait concevoir aucun cas où elle pût être  annexée de manière durable et conséquent par un autre. Ce temps est fini.

Source : DeDefensa, 28/1/2016

Source: http://www.les-crises.fr/la-chine-menace-les-compagnies-americaines-de-sanctions-est-ce-lavenir-par-peter-harrell/


Crise financière : les banques centrales, seules responsables ? Par Romaric Godin

Friday 12 February 2016 at 11:15

Analyse de Romaric Godin sur la petite crise actuelle – que je juge pour ma part trop favorable aux banques centrales, mais bon…

Source : La Tribune, Romaric Godin, 10/02/2016

Les banques centrales sont-elles les seules responsables de la crise boursière ? (Crédits : Reuters)

L’affaire semble entendue : la baisse des marchés s’expliquerait par la générosité des banques centrales. Cette interprétation oublie cependant pourquoi cette politique monétaire très accommodante est devenue inévitable…

La crise financière est de retour. Près de huit ans et demi après les premiers soubresauts de la crise des subprimes, les Bourses mondiales plongent à nouveau, la santé des banques est préoccupante, l’économie réelle inquiète. Pour la plupart des observateurs, la cause est entendue : ce nouveau coup de grisou a un coupable tout désigné, les banques centrales et leurs politiques accommodantes, le « QE ». Ce sont elles, assure-t-on, qui, en déversant des milliards de dollars, d’euros, de livres et des centaines de milliards de yens ont alimenté une bulle sur les marchés qui, aujourd’hui, éclate. Ce sont elles qui, en imposant des taux négatifs, pèsent sur les résultats bancaires.

Cette explication n’est pas entièrement erronée. Les politiques d’assouplissement quantitatif menées par la Fed, la Banque d’Angleterre, la Banque du Japon, puis la BCE ont certes déversé d’immenses quantités de liquidités sur les marchés. Leur diffusion dans l’économie réelle a été plus lente, voire réduite. Elles ont donc alimenté un puissant courant acheteur que les difficultés chinoises et le ralentissement de la croissance européenne ont brutalement freiné. D’où cette correction qui, en réalité, a débuté en août dernier, lors de la première « dévaluation » du yuan chinois.

Les deux erreurs de 2008 et 2010

Mais cette explication n’est que partielle. Cette nouvelle secousse, rappelons-le, n’est que la poursuite de la grande crise de 2007 – crise de la dérégulation – allant à son terme. Une crise qui a connu deux relances : la faillite de Lehman Brothers le 15 septembre 2008 qui a conduit le système financier au bord de l’abîme et le « sauvetage » tardif et inefficient de la Grèce le 10 mai 2010 qui a plongé la zone euro dans une tourmente économique dont elle n’est qu’à peine sortie. Dans les deux cas, l’erreur est venue principalement de gouvernements inconscients, pressés de gérer le court terme (on se souvient de l’obsession, pendant tout le printemps 2010, d’Angela Merkel pour les élections régionales en Rhénanie du Nord Westphalie) et enfermés dans des certitudes économiques fondées sur l’efficience du marché.

En 2008, les Etats-Unis ont ainsi voulu « faire un exemple » avec Lehman Brothers et montrer que l’Etat ne viendrait pas en aide à ceux qui avaient pris des risques démesurés. Le marché jouait son rôle « purificateur. » En 2010, les dirigeants européens ont appliqué la théorie ricardienne : il fallait rétablir rapidement les comptes publics des Etats touchés par la crise pour rétablir la confiance des marchés et des agents économiques. Il fallait aussi « punir » ceux qui avaient dépensé trop en leur faisant sentir les conséquences des déséquilibres qu’ils étaient censés avoir créés. Dans les deux cas, ces décisions ont été des désastres immenses et les banques centrales sont intervenues alors comme des « filets de protection », sauvant ce qui pouvait l’être. La BCE a été, du reste, la moins déterminée à agir. On se souvient que Jean-Claude Trichet a remonté deux fois les taux en pleine crise, en juillet 2008 et en juillet 2011, et qu’il a fallu attendre Mario Draghi et l’été 2012 pour voir une action déterminée de l’institution contre la crise européenne. Ce n’est pas sans raison que la BCE a été la dernière à se lancer dans le QE. Et ce n’est pas sans raison que la zone euro a été la région la plus frappée par la crise depuis 2007…

L’erreur des autorités européennes

Les banques centrales ont donc été des pompiers et sans doute se sont-elles muées en partie en pyromanes, mais pourquoi cette mutation a-t-elle eu lieu ? Parce qu’elles ont échoué en réalité à relancer les perspectives de croissance, donc d’inflation. Mais cet échec n’est pas que celui des banques centrales, c’est aussi celui des gouvernements qui se sont uniquement reposés sur la politique monétaire pour faire le travail de redressement de ces perspectives, alors qu’eux, au contraire, tiraient dans le sens inverse. L’exemple de la zone euro est, de ce point de vue, très parlant. Entre 2010 et 2014, les gouvernements et les autorités européennes, y compris la BCE, ont mené et incité à une politique centrée sur la consolidation budgétaire et les « réformes structurelles » visant surtout à réduire le coût du travail. Une politique clairement déflationniste qui a ruiné la croissance potentielle européenne et détruit la confiance dans l’avenir qu’elle devait établir. Dès lors, l’inflation faible s’est installée durablement.

Depuis octobre 2013, l’inflation annuelle sous-jacente, hors énergie et alimentation, n’est passé qu’une fois au-dessus de 1 %, c’était 1,1 % en octobre 2015. Dans ces conditions, les anticipations d’inflation ont reculé et lorsque les anticipations d’inflation reculent, l’incitation à investir est nulle. Or, la zone euro ne pourra connaître de reprise réelle sans reprise de l’investissement.

Les effets mondiaux de la politique européenne

Du reste, cette politique déflationniste européenne a eu d’autres répercussions. En réduisant la croissance européenne de façon durable, elle a pesé sur les exportations de plusieurs pays, comme la Chine. La deuxième économie du monde a alors tenté de contenir, pour des raisons politiques, ses niveaux de production tout en accélérant son retournement vers une économie moins dépendante de l’extérieur et plus de la demande interne. Ces deux mouvements ont conduit à une surproduction industrielle chinoise et à une explosion de l’endettement dans l’Empire du milieu à partir de 2012. Mais lorsque l’économie chinoise a engagé son ajustement inévitable, sa croissance a ralenti, entraînant une baisse des prix des matières premières (déjà engagée par la baisse de la croissance européenne) et une baisse de la demande chinoise en importations. D’où deux conséquences pour la zone euro : une nouvelle baisse de l’inflation et un ralentissement des perspectives économiques. Pour l’Allemagne, par exemple, la Chambre de Commerce vient de revoir à 1,3 % (contre 1,7 % pour le gouvernement) sa perspective de croissance pour 2015.

L’avertissement de Mario Draghi

Dans ces conditions, les banques centrales ont à nouveau agi (à l’exception de la Fed qui semble néanmoins revenir sur sa politique de resserrement). Mais cette politique ne peut se substituer à l’absence de perspectives pour les agents économiques. Elle peut aider la demande, pas la créer. Or, il fallait la créer. Lorsque Mario Draghi a projeté de lancer la BCE dans le grand bain du QE, le 22 août 2014, à Jackson Hole, il a indiqué qu’il ne le ferait que s’il était aidé, que si, en complément de la BCE, il y avait une politique de croissance en zone euro, comprenant une vraie relance. L’idée était simple : en relançant la demande, les Etats auraient stimulé la demande et créé des débouchés pour les fonds libérés par le QE. Autant de liquidités qui n’auraient pas servi, alors, à alimenter des bulles spéculatives. Mais il a obtenu une fin de non-recevoir. Wolfgang Schäuble, à l’époque, avait assuré qu’on avait « mal compris Mario Draghi. » Fermez le ban. Pour satisfaire les foules, on avait lancé un « plan Juncker » qui, comme le « pacte de croissance » de François Hollande en 2012, s’est perdu dans les sables de Bruxelles. Et le QE a bel et bien trop alimenté les bulles…

Ce que la politique monétaire accommodante a permis d’éviter

Il faudrait cependant ne pas oublier que les banques centrales ont permis d’éviter la mise en place d’un cercle déflationniste. Le QE aurait apporté un point d’inflation en 2015 en zone euro. Sans lui, l’inflation aurait été de -0,8 %, ce qui aurait enclenché à coup sûr une spirale déflationniste où, non seulement, l’investissement serait à l’arrêt, mais où les salaires et l’emploi aurait dû s’ajuster. Une telle spirale est un des pires dangers économiques dont il est fort délicat de s’extirper, le cas japonais ne cesse de le prouver. Mais il est souvent trop sous-estimé par les partisans de la « destruction créatrice » de Schumpeter. L’action de la BCE en 2014-2015 a donc été essentielle, comme en 2008 et 2012.

Mais, comme tout remède, il a des effets secondaires. Une action déterminée d’accompagnement des Etats ou de l’UE aurait pu réduire ces effets en permettant une meilleure transmission à l’économie réelle. On a préféré ne rien faire pour sauver la façade d’une politique de réduction budgétaire soit disant efficace, mais qui se révélera absolument inutile en cas de nouvelle récession. Pire même, pendant longtemps, les Etats – singulièrement la France – ont compté sur la seule action des banques centrales pour faire revenir la croissance, ne prenant pas au sérieux les avertissements de Mario Draghi sur l’incapacité de la politique monétaire à créer de la croissance.

Lampistes ?

La responsabilité des banques centrales est donc celle d’un lampiste. Les vrais responsables, ce sont les Etats et les autorités européennes qui ont mené une politique déflationniste et ont refusé toute vraie politique active de relance. Les banques centrales, la BCE en particulier, ont contenu avec les moyens dont elles disposaient l’incendie qu’elles n’ont pas allumé, ni entretenu. Cette action, produit de la passivité et de l’aveuglement idéologique des Etats, avait un revers. On en subit aujourd’hui les conséquences. Mais, en réalité, les banques centrales ont été les seules à montrer réellement du courage, de l’initiative et de l’innovation pour faire face à une crise d’une ampleur unique.

Accuser les banques centrales, c’est donc se tromper de responsable en réalité. C’est aussi prétendre que le marché aurait, sans leur action, réalisé un ajustement moins douloureux, alors que les expériences de 2008 et 2010 prouvent le contraire. C’est donc se payer de mots. Et l’économie européenne – et mondiale – s’est trop longtemps payée de mots. Elle a soif de vraie inflation que seule une politique de relance de l’investissement et des salaires apportera.

Source : La Tribune, Romaric Godin, 10/02/2016

Source: http://www.les-crises.fr/crise-financiere-les-banques-centrales-seules-responsables-par-romaric-godin/


444 millions de dollars en 17 ans : Hillary, la petite soeur des riches

Friday 12 February 2016 at 04:25

Pour faire suite à l’article d’hier et à vos remarques, voici le détail et les sources du financement politiques (dons) d’Hillary Clinton en 17 ans et de Bernie Sanders en 27 ans :

Est-il utile de commenter le match 444 à 20, et les différents financiers de sa campagne (banques contre syndicats) ?

Mais ceci prouve évidemment que c’est la seule candidat qualifiée, le New York Times (Le Monde local) venant de la soutenir officiellement (j’imagine par excès de déontologie) – en espérant que ça marche aussi bien qu’en 2008…

 

Source: http://www.les-crises.fr/444-millions-de-dollars-en-17-ans-hillary/


Le 21ème siècle : une époque de corruption, par Paul Craig Roberts

Friday 12 February 2016 at 02:00

Source : Paul Craig Roberts, le 18/01/2016

Paul Craig Roberts

Dans les dernières années du 20e siècle, la corruption est entrée dans la politique étrangère américaine d’une nouvelle manière. Sous de faux prétextes, Washington a démantelé la Yougoslavie et la Serbie afin d’avancer un agenda caché. Au 21e siècle, cette corruption s’est multipliée de nombreuses fois. L’Afghanistan, l’Irak, la Somalie et la Libye ont été détruits, et l’Iran et la Syrie auraient aussi été détruits si le président de la Russie ne l’avait empêché. Washington est également derrière la destruction actuelle du Yémen, et Washington a autorisé et financé la destruction par les israéliens de la Palestine. De surcroît, Washington a effectué des opérations militaires à l’intérieur du Pakistan sans lui déclarer la guerre, assassinant nombre de femmes, d’enfants et de villageois âgés sous couvert de combat contre le terrorisme. Les crimes de guerre de Washington sont comparables à ceux de n’importe quel pays dans l’histoire.

J’ai documenté ces crimes dans mes articles et mes livres (Clarity Press).

Quiconque croit encore à l’intégrité de la politique étrangère de Washington est une âme égarée.

La Russie et la Chine ont maintenant une alliance stratégique trop solide pour Washington. La Russie et la Chine empêcheront de nouvelles attaques de Washington contre leur sécurité et leurs intérêts nationaux. Les pays importants pour la Chine et la Russie seront protégés par cette alliance. Alors que le monde se réveille et constate le mal que l’Occident représente, d’autres pays iront chercher la protection de la Russie et de la Chine.

L’Amérique est aussi en train d’échouer sur le front économique. Mes articles et mon livre, L’Échec du capitalisme du laisser-faire, qui a été publié en anglais, chinois, coréen, tchèque, et allemand, ont montré comment Washington n’est pas intervenu, et de fait a applaudi, au moment où l’investissement à court terme par des comités directeurs, des actionnaires, et Wall Street éviscérait l’économie américaine, envoyant les emplois industriels, les savoir-faire d’entreprise, et la technologie, en même temps que les emplois professionnels qualifiés négociables en Chine, en Inde et dans d’autres pays, laissant l’Amérique avec une économie tellement anémiée que le revenu moyen par foyer est en baisse depuis des années. Aujourd’hui 50% des Américains de 25 ans vivent avec leurs parents ou leurs grands-parents parce qu’ils ne peuvent pas trouver un travail qui leur permette de vivre indépendamment. http://www.zerohedge.com/news/2015-10-27/why-are-half-all-25-year-olds-still-living-their-parents-federal-reserve-answers Ce fait brutal est masqué par la presse-tituée US, source d’histoires imaginaires sur la reprise de l’économie américaine.

Les réalités de nos existences sont tellement différentes de ce qu’il en est rapporté que j’en reste abasourdi. En tant qu’ancien professeur d’économie, éditeur du Wall Street Journal et secrétaire adjoint du Trésor pour les politiques économiques, je suis sidéré par la corruption qui règne dans le secteur financier, le Trésor, les agences de régulation financière et la Réserve fédérale. Au temps où j’exerçais, il y aurait eu des mises en examen, et des peines de prison pour les banquiers et les représentants du gouvernement.

Dans l’Amérique d’aujourd’hui, il n’y a pas de libre marché financier. Tous les marchés sont truqués par la Réserve fédérale et le Trésor. Les agences de régulation, contrôlées par ceux que ces mêmes agences sont censées contrôler, regardent ailleurs, et quand ce n’est pas le cas, elles sont quand même incapables de faire respecter quelque loi que ce soit, parce que les intérêts privés sont plus puissants que la loi.

Même les agences de statistiques gouvernementales ont été corrompues. Les mesures de l’inflation ont été concoctées pour la sous-estimer. Ce mensonge permet non seulement à Washington d’éviter de faire payer à la Sécurité sociale les ajustements au coût de la vie, et cela libère de l’argent pour mener plus de guerres, mais aussi, en sous-estimant l’inflation, le gouvernement peut créer une croissance du “PIB réel” en comptant l’inflation comme une véritable croissance, exactement de la même manière que le gouvernement crée 5% de chômage en ne comptant pas les travailleurs découragés qui ont cherché un emploi jusqu’à ce qu’ils ne puissent plus assumer le coût de la recherche, et qu’ils laissent tomber. Le taux de chômage officiel est de 5%, mais personne ne peut trouver de travail. Comment le taux de chômage peut-il être de 5% quand la moitié des jeunes de moins de 25 ans vivent chez leurs proches parce qu’ils ne peuvent pas se payer une existence indépendante ? Comme John Williams (de ShadowFacts) le rapporte, le taux de chômage qui inclut ces Américains qui ont arrêté de chercher un emploi parce qu’il n’y a pas de travail peut être estimé à 23%.

La Réserve fédérale, l’outil d’une petite poignée de banques, a réussi à créer l’illusion d’une reprise de l’économie depuis juin 2009 en imprimant des trillions de dollars qui vont se placer non pas dans l’économie mais dans le prix des actifs financiers. Pour la presse-tituée des médias du secteur financier, la hausse artificielle des marchés boursiers et obligataires est la “preuve” que l’économie croît rapidement.

La poignée de gens instruits qui reste en Amérique, et il s’agit seulement d’une petite poignée, comprend qu’il n’y a eu aucune reprise depuis la récession précédente, et que la rechute est juste au coin de la rue. John Williams a souligné que la production industrielle américaine, quand elle est ajustée correctement en tenant compte de l’inflation, n’a jamais retrouvé son niveau de 2008, encore moins de son pic de l’année 2000 ; et elle est de nouveau en train de diminuer.

Le consommateur américain est épuisé, accablé par les dettes et le manque d’augmentation de revenus. Toute la politique économique des États-Unis est focalisée sur la préservation de cette poignée de banques new-yorkaises, pas sur la préservation de l’économie américaine.

Les économistes et leurs compères de Wall Street nieront le déclin de la production industrielle, l’Amérique étant désormais une économie de services. Les économistes prétendent que ces services de la Nouvelle Économie sont high-tech, mais en réalité ce sont des serveuses, des barmen, des commis à temps partiel, et des services de santé ambulatoire qui ont remplacé les emplois de production industrielle et les postes d’ingénieurs, pour un salaire bien moindre, faisant chuter ainsi la demande globale réelle des États-Unis. Dans les quelques occasions où les économistes néolibéraux admettent l’existence de ces problèmes, ils en rejettent la faute sur la Chine.

Il n’est pas sûr que l’économie américaine puisse être réanimée. Pour relancer l’économie américaine, il faudrait re-réguler le système financier, et ramener les emplois et la part de PIB que l’externalisation offshore a donnés aux pays étrangers. Cela nécessiterait, comme Michael Hudson le démontre dans son nouveau livre, Killing the Host, une révolution dans les politiques fiscales, qui empêcherait le secteur financier de capter les profits et de les capitaliser en titres de créance dont il tire rémunération.

Le gouvernement américain, contrôlé aujourd’hui par des intérêts économiques corrompus, ne permettrait jamais des politiques qui affecteraient les bonus des cadres et les profits de Wall Street. Le capitalisme américain d’aujourd’hui fait de l’argent en bradant l’économie américaine et les gens qui en dépendent.

Dans l’Amérique de “la Liberté et la Démocratie”, le gouvernement et l’économie servent des intérêts complètement déconnectés des intérêts du peuple américain. Le bradage du peuple américain est protégé par un immense paravent de propagande fournie par les économistes du libre-échange et la press-tituée financière payée pour mentir.

Quand l’Amérique sombrera, les vassaux de Washington en Europe, au Canada, en Australie et au Japon sombreront également. A moins que Washington ne détruise le monde dans une guerre nucléaire, le monde sera remodelé, et l’Occident corrompu et débauché ne sera plus qu’une partie insignifiante du nouveau monde.

Source : Paul Craig Roberts, le 18/01/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Source: http://www.les-crises.fr/le-21eme-siecle-une-epoque-de-corruption-par-paul-craig-roberts/


Le camp du Bien en panique

Friday 12 February 2016 at 01:41

Quelques bon billets du site Chroniques du grand jeu

Source : Chroniques du Grand Jeu, Observatus geopoliticus, 5-02-2016

L’avancée russo-syrienne à Alep fait des dégâts dans le camp autoproclamé du Bien ; Etats-Unis, Arabie saoudite et Turquie sont sur les dents et menacent même, pour les deux derniers, d’entrer dans la mêlée tandis que la guerre de l’information reprend de plus belle.

Depuis une semaine, les forces loyalistes appuyées par les Russes, les Iraniens et le Hezbollah volent de succès en succès dans la région d’Alep, deuxième ville du pays et verrou de la rébellion. La libération des deux villages chiites de Nubul et Zahraa, assiégées depuis trois ans (!) par les “terroristes modérés”, a considérablement changé la donne dans le nord syrien.

La principale route d’approvisionnement d’Al Qaeda et autre Ahrar al-Cham vers la Turquie est coupée et l’étau se resserre autour de la grande ville du nord, déjà occupée pour moitié par les forces loyalistes. Alep est peut-être un tas de ruines mais sa prise constituerait un important tournant, psychologique mais aussi stratégique. La rébellion “modérée” se verrait obligée de se replier sur Idlib et Jisr al-Chougour, ses derniers fiefs au nord, tandis qu’Assad commencerait à reconstruire la Syrie utile avant de se tourner contre Daech en Syrie orientale.

Et comme ailleurs, notamment dans le sud ou dans la province de Lattaquié, la situation n’est pas meilleure pour les salafistes si chers au camp du Bien, ça commence à sentir le roussi pour les protégés de la bande américano-turco-saoudienne… Comme le dit un analyste, “les rebelles battent en retraite partout”.

Les Russes, que les stratèges de Saint-Germain-des-Prés voyaient s’embourber, mènent pour l’instant leur campagne de main de maître. Contrairement à ce que claironnait la propagande saoudienne, ils renforcent même leur présence militaire en Syrie avec l’envoi de quelques Sukhois 35, dernière pépite de l’aviation russe (avant le futur Pak-Fa) et l’un des meilleurs avions du monde.

Idéal pour tester l’avion en conditions réelles et lancer un avertissement à la Turquie.

Plus d’avions + renseignement amplifié (notamment grâce au centre de Bagdad mis sur pied en septembre à la barbe des Américains) = forte recrudescence des raids russes ces derniers jours (25 à 30%) qui mettent au supplice les insurgés.

Dans ces conditions, il n’est guère étonnant de voir le camp du Bien engager une danse du ventre hystérique. La mafia médiatique reprend sa bonne vieille propagande, les osbcures ONG syriennes installées à Londres ou en Turquie (LOL) hurlent au massacre de civils par les méchants navions russes (tout y passe : hôpitaux, écoles, ne manquent plus que les léproseries…), Ankara accuse évidemment Moscou de fournir des armes au PKK (ce qui n’est d’ailleurs peut-être pas tout à fait faux).

Surtout, Turcs et Saoudiens seraient prêts à entrer en guerre en Syrie, sous couvert de combattre leur bébé daéchique (éternel prétexte) ; si ça se confirme, cela signifie qu’ils considèrent la situation comme vraiment mauvaise. Si une intervention saoudienne relève de la farce, les pitres wahhabites étant incapables depuis plusieurs mois de venir à bout de quelques rebelles déguenillés au Yémen, une intervention ottomane est à prendre beaucoup plus au sérieux. Mais elle interroge…

Reprenons l’article qui résume bien la situation de ces derniers jours :

« Nous avons de sérieuses raisons de soupçonner une préparation intensive de la Turquie pour une intervention militaire sur le territoire d’un État souverain : la Syrie », a indiqué, le 4 février, le général Igor Konachenkov, le porte-parole du ministère russe de la Défense,

« L’armée russe observe un nombre croissant de signes d’une préparation secrète des forces armées turques afin de mener des opérations sur le territoire syrien », a ajouté l’officier, faisant état de « l’accumulation en de nombreux points de la frontière turco-syrienne d’équipement du génie servant à préparer une intervention militaire, ainsi que de soldats et d’engins militaires ».

« Ce type de dispositif est utilisé pour permettre des mouvements rapides de colonnes militaires avec armes et munitions en zone de guerre, ainsi que le transfert et l’évacuation du personnel », a souligné le général Igor Konachenkov. « Si quelqu’un à Ankara pense que l’interdiction d’un vol de reconnaissance russe permettra de cacher quoi que ce soit, il n’est pas professionnel », a-t-il poursuivi.

Pour l’instant, les autorités turques ont refusé de faire tout commentaire face à ces accusations russes, se contentant de confirmer « l’interdiction pour raisons de sécurité » d’un vol russe de reconnaissance prévu du 1e au 5 février dans le cadre du traité Ciel ouvert dont les deux pays sont signataires. Ce traité prévoit des survols pour contrôler les installations militaires et d’armements, afin d’entretenir la confiance mutuelle.

Scénarios possibles :

En attendant, Washington reste étrangement silencieuse tandis que les Sukhoi 35 sont en état d’alerte pour les prochaines 24 heures…

Source : Chroniques du Grand Jeu, Observatus geopoliticus, 5-02-2016

 

Batifolages gaziers

Source : Chroniques du Grand Jeu, Observatus geopoliticus, 2, 02, 2016

Le feuilleton de l’or bleu – dont on pourra se remémorer quelques épisodes (iciiciici ou ici) – ne connaît pas la crise et continue de plus belle.

Déjà paniqué par un documentaire de Canal + sur la véritable nature de la révolution néo-nazie du Maidan, le régime clownesque de Kiev vient encore de sortir une idée de génie. Tenez-vous bien, l’Ukraine va porter plainte contre le Nord Stream 2 ! Défense de rire, c’est l’inénarrable Yatseniouk qui le claironne. L’ « argument » de Kiev est que… heu… à vrai dire, on ne le comprend pas trop. En gros, c’est l’éternelle histoire du beurre et de l’argent du beurre : Les Russes sont des vilains mais nous voulons que leur gaz passe par chez nous pour toucher les dividendes. Si vous le dites…

Evidemment, le petit protégé de Victoria “fuck the UE” Nuland n’aurait pu trouver seul cette lumineuse idée, le parrain US n’est pas loin. Est-ce un hasard si, dix jours auparavant, le vice Biden et Tapiocashenko avaient promis de torpiller le gazoduc russe ? On imagine déjà le lobbying américain auprès de la grosse Bertha Angela…

Un bonheur ne venant jamais seul, la Pologne s’y met aussi et insiste pour que les gazoducs de l’ennemi russe passent sur son territoire. Ne craignant pas la contradiction, Varsovie demande également un renforcement de l’OTAN sur son sol ! Vous avez dit schizo ?

Tout cela constitue-t-il une menace pour le Nord Stream 2 ? C’est peu probable. Les intérêts allemands et ceux des compagnies énergétiques européennes impliquées dans le projet sont trop importants. Mémère Merkel est prête à se vendre aux Américains jusqu’à un certain point mais pas plus. Elle a continuellement tenté de torpiller la route sud (South Stream puis Turk Stream) mais s’est faite soudain bien moins véhémente lorsque Moscou a proposé de doubler la route nord.

Et, last but not least, nous en revenons toujours au même problème : les autres sources d’approvisionnement. Comme nous l’annoncions il y a longtemps, le gaz de schiste US est une illusion et sa production a déjà commencé à baisser. Le gaz azéri est une fumisterie et concerne des quantités négligeables. Le gaz turkmène ne passera jamais par un pipeline transcaspien tant que Moscou et Téhéran s’y opposeront.

Reste le gaz iranien. La levée des sanctions a rempli d’espoir les eurocrates (notons en passant l’invraisemblable hypocrisie de ces vassaux de l’empire : le 15 janvier à 23h59, l’Iran était encore le diable en personne ; le 16 janvier à 0h01, l’Iran est soudain devenu, par la grâce de Washington, tout à fait fréquentable). On a même commencé à évoquer un gazoduc vers l’Europe via la Turquie. Mais mais mais… Premier problème : le tracé passerait forcément par les zones kurdes en guerre et où plusieurs tubes ont déjà sauté. Le 6 août, nous écrivions :

Rien ne va plus en Turquie, un troisième pipeline explose ! Et pas n’importe lequel : il s’agit du BTE (Bakou-Tbilissi-Erzurum). Ce corridor Azerbaïdjan-Géorgie-Turquie est promu sans relâche par les Américains depuis vingt ans afin de détourner l’Europe des hydrocarbures russes et d’isoler Moscou. C’est la route du BTC (Bakou-Tbilissi-Ceyhan), ouvert en 2005 et transportant le pétrole caspien de l’Azerbaïdjan à travers la Géorgie et la Turquie, évitant soigneusement le territoire arménien, allié de Moscou. C’est la route que devait emprunter l’illusoire Nabucco qui, contrairement à l’opéra de Verdi, est resté définitivement dans les cartons. C’est enfin le projet brinquebalant du TANAP qui, tel Jésus multipliant les pains, est censé “assurer la sécurité énergétique” de l’Europe avec ses malheureux 16 Mds de m3 de gaz annuels. Les Américains ne s’arrêtent pas à ces détails : de gré ou de force, leurs “alliés” européens doivent tout consommer, même du vent, plutôt que du gaz russe… Les Européens ne sont évidemment pas dupes mais n’osent pas contredire frontalement leur maître, d’où ce petit jeu qu’ils croient follement subtil d’un pas en avant puis en arrière, une jambe finissant par faire un croche-pied à l’autre.

Deuxième problème : l’Iran est de toute façon loin, très loin de pouvoir fournir de grosses quantité à l’Europe, du moins dans un avenir proche. Plusieurs récentes analyses ont douché les espoirs fous nés de la levée des sanctions. Le système iranien de transport est archaïque ou inexistant et requiert des centaines de milliards d’investissements, idem pour les gisements. Pire ! Téhéran a également d’autres projets, comme l’IPI (Iran-Pakistan-Inde) vers ses futurs alliés au sein de l’Organisation de Coopération de Shanghai. Conclusion : il faudra attendre au moins jusqu’en 2025 et plutôt 2030 pour que l’Iran soit capable de livrer du gaz à l’Europe, si tant est que le problème kurde soit réglé en Turquie.

Et puisqu’on parle du loup… Ankara a énormément de mal à trouver d’autres fournisseurs que russe après le quasi gel des relations. Ca tombe particulièrement mal, la Turquie n’a jamais autant consommé d’or bleu de son histoire. Au lendemain de la bourde du 24 novembre, Davutoglu s’est précipité en Azerbaïdjan pour humer le bon air gazier. Le moins que l’on puisse dire est qu’il a été déçu. Répétons-le, on parle ici de quantités insignifiantes (les importations turques de gaz russe sont 1,4 plus importantes que la production totale de gaz azéri !) En plus, Bakou n’a pas trop envie de se mettre Moscou à dos en ce moment, alors que les Russes sont de plus en plus présents en Arménie et peuvent, quand ils le veulent, soutenir plus franchement Erevan dans la dispute du haut Karabagh.

Le sultan aura beau faire des pieds et des mains, il n’y échappera pas et continuera d’avaler du gaz russe. Que dire alors de l’Europe, dont la consommation est dix fois supérieure…

Source : Chroniques du Grand Jeu, Observatus geopoliticus, 2, 02, 2016

 

Les terroristes modérés en difficulté

Source : Chroniques du Grand Jeu, Observatus geopoliticus, 31-01-2016

Les mouchoirs sont de sortie dans les chancelleries occidentales et pétromonarchiques, et il nous semble même entendre quelques sanglots étouffés : leurs si chers terroristes modérés sont partout sur le reculoir en Syrie.

Au sud, l’armée loyaliste a repris il y a quelques jours Cheikh Meskine, une ville stratégiquement importante, coupant plus ou moins les voies de communication des djihadistes dans la province de Deraa. Nous avions d’ailleurs vu que la Jordanie voisine, dans un retournement de veste digne d’elle-même, n’était plus très chaude pour soutenir la rébellion et avait ordonné à ses protégés de ne plus s’en prendre au régime mais à Al Nosra si chère au coeur de Fabius.

A la frontière libanaise, dans les montagnes du Qalamoun globalement mais pas totalement reconquises par le Hezbollah, EI et Al Nosra se sont à nouveau écharpé alors que les poches insurgées se réduisent sans cesse.

A Deir ez-Zoor, enclave loyaliste en plein territoire de l’Etat Islamique, l’armée a repoussé la grande attaque daéchique que nous prévoyions dernièrement. Si l’agence de presse officielle exagère sans doute un peu, il est certain que les petits hommes en noir ont subi des pertes et en ont été pour leurs frais. Là comme ailleurs l’aviation russe a été déterminante.

En parlant de cela, c’est comme si on y était :

Mais c’est surtout au nord que la dynamique du combat a profondément changé. A Alep, l’un des principaux groupes insurgés, jusque-là soutenu par la Turquie et les Etats-Unis, bat en retraite. Chose intéressante : ils affirment ne plus recevoir de munitions et d’armements. Conséquence des bombardements russes ou bisbilles avec leurs parrains ? Toujours dans la région d’Alep, les salafistes d’Ahrar al-Cham et les qaédistes d’Al Nosra, pourtant alliés dans l’Armée de la conquête soutenue à bouts de bras par notre amie l’Arabie saoudite, se bagarrent comme des chiffonniers. Le fait est rapporté, ô divine surprise, par le Monde, à qui il arrive parfois de faire de l’information (ça doit être les bonnes résolutions de 2016). Au fait, où sont donc passés les fameux “rebelles modérés” ?

Et comme dans la province de Lattaquié, les loyalistes reprennent localité sur localité, les bastions insurgés d’Idlib et Jisr Al-Choughour, adossés à la Turquie, sont sur la défensive, commençant à être pris en tenaille par l’ouest, le sud et l’est. La coalition syro-russo-irano-hezbollahi s’approche avec gourmandise de la frontière turque, rendant de plus en plus difficile l’approvisionnement des terroristes modérés. Pas étonnant que le sultan commence à avoir des sueurs froides…

C’est dans ce contexte qu’a eu lieu avant-hier l’incident que tous les médias ont rapporté, à savoir une possible nouvelle incursion d’un avion russe dans l’espace aérien turc. Ankara postillonne et convoque l’ambassadeur russe, Moscou balaie d’un revers de la main et parle de “grossière propagande”. Ce qui est intéressant ici, c’est que si violation il y a eu, la chasse turque s’est bien gardée cette fois d’abattre l’avion. Faut dire que c’était un Sukhoi 34 protégé par un halo de S-400 et non un vieux Sukhoi 24 solitaire… Et puis le sultan n’a peut-être pas envie d’aller plus loin dans l’escalade avec l’ours vu l’avalanche de sanctions qui lui est tombé sur le crâne.

Les Russkovs doivent maintenant se sentir forts sur la frontière syro-turque. Les batteries de S-400 n’hésiteront pas à descendre les F16 ottomans comme des mouches. C’est sans doute cela qui explique ce qui s’est passé le 23 décembre… Les lecteurs se souviennent sans doute qu’Erdogan avait lancé un ultimatum aux YPG kurdes syriennes : “ne traversez pas l’Euphrate ou nous vous bombarderons”. Eh bien, fait passé inaperçu de tous (y compris de votre serviteur, je dois l’avouer avec honte), les YPG ont bien traversé l’Euphrate le 23 décembre et commencé à faire mouvement pour sceller la frontière afin de couper Daech de la Turquie. Ankara n’a pas réagi ! Erdo-gollum a dû ravaler sa fierté devant les missiles russes pointés sur ses avions.

Guère étonnant dans ces conditions que les Turcs aient fait des pieds et des mains pour que les Kurdes syriens soient exclus du nouveau round de négociations à Genève. Moscou a beau jeu de demander leur participation, se les attachant ainsi encore un peu plus. Il est vrai que sans eux, Genève 3 est une coquille vide. Cela ne gêne pas plus que ça Damas : au vu de la nouvelle dynamique du conflit, le temps joue maintenant pour Assad et ses alliés.

Source : Chroniques du Grand Jeu, Observatus geopoliticus, 31-01-2016

Source: http://www.les-crises.fr/le-camp-du-bien-en-panique/


["...et c'est le drame"] CATASTROPHE, la candidate des riches a perdu !

Thursday 11 February 2016 at 04:09

Coup de tonnerre :

Gros article dans le Monde : Féministe à contretemps, Hillary Clinton paie ses choix tactiques

Eh oui, si Sainte Clinton perd, c’est forcément un problème tactique, nullement un énorme problème stratégique…

Légère différence entre les candidats – heum…

(admirez les différences de slogan aussi, qui en dit long sur le passage du politique au show-business. On a apparemment échappé à “Youpi Clinton”)

Que donnent les analyses “Sortie des urnes” ?

Vote en fonction du revenu :

Hillary l’emporte donc seulement chez les démocrates de plus de 200 000 $ de revenus – et encore de peu… Mais chuuuut

Par âge ?

Bon, 84 % des 18-30 ans ont voté Sanders, mais chuuuut, nos médias ne vont quand même pas trop le valoriser…

Par sexe ?

Damned, les femmes préfèrent avoir apparemment un président de gauche plutôt qu’une présidente riche…

Mais le Monde nous donne la stratégie gagante :

Ce qui est en effet éclatant :

50 % contre 49 %…

Je rappelle les grands axes du programme de Sanders :

Bizarre, il me semble que ça pourrait intéresser les blacks…

Inégalités de patrimoine USA Etats-Unis suivant origine

(je dis ça, je dis rien…)

 

Bon, ceci étant, n’ayez pas trop d’espoir, il y a peu de chance que Sanders gagne, car 16 % des délégués sont des notables, qui sont acquis à Clinton, qui doit donc obtenir seulement 34 % des délégués élus…

Et en plus, Clinton est donnée en tête des prochaines primaires.

Mais ça pourrait changer… Belle journée pour Sanders :

(Bon site ici pour suivre les sondages pour les primaires)

Terminons par la très grosse blague : comment ont été financés les candidats ? Admirez en cliquant dessus :

Clinton par Wall Street, et pas qu’un peu, et Sanders par les syndicats…

Source: http://www.les-crises.fr/et-cest-de-drame-hillary/