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“Censure”, “droit au blasphème” et islamophobie, par Laurent Lévy [2006]

Tuesday 10 February 2015 at 02:48

Retour sur un intéressant texte de 2006, au moment de la publication des premières caricatures…

À l’heure où la grande presse unanime et une bonne partie de la classe politique (de François Hollande à Nicolas Sarkozy en passant par Dominique Voynet et François Bayrou) apporte publiquement son soutien à Charlie Hebdo dans le procès qui lui est intenté pour avoir publié des dessins racistes (comment appeler autrement un dessin qui, représentant le prophète Mahomet lui même coiffé d’une bombe, véhicule l’équation Islam = terrorisme et doncmusulman = terroriste potentiel ?), il nous a paru nécessaire de re-publier le texte que Laurent Lévy avait écrit il y a un an en pleine « affaire des caricatures », et qui dit l’essentiel.

On se serait bien passé de cette tempête ; cela n’empêche pas de chercher à y comprendre quelque chose, et à interroger ce qui s’y joue. Une série de dessins « satiriques » a fait scandale en Scandinavie, et déclenché la fureur, dans un certain nombre de pays musulmans, de secteurs entiers de l’opinion publique, et bien souvent des Etats eux-mêmes. Rassemblements et manifestations, menaces, imprécations se succèdent à rythme accéléré. Le directeur de publication d’un quotidien français qui les a reproduits est démis de ses fonctions par le propriétaire du journal. D’autres organes de presse s’empressent alors d’exprimer leur solidarité en republiant les dessins litigieux, au nom de la « liberté d’expression », du « droit au blasphème » et de la résistance contre « l’obscurantisme » religieux. Le président de la république dénonce alors une « provocation », suivi par des commentateurs qui appellent à ménager la susceptibilité des musulmans. Le texte qui suit revient sur cette controverse, sur ses termes, trop rarement définis (« caricature », « liberté d’expression », « censure », « droit au blasphème ») et sur son point aveugle : le caractère raciste d’au moins deux des dessins.

En elle même, cet enchaînement de faits aurait pu n’appeler aucun commentaire. Il est devenu terriblement banal que se publient des dessins de mauvais goût ; que ce qui semble sacré aux un-es soit traité irrévérencieusement par les autres ; que des personnes protestent lorsqu’elles se sentent blessées ; que des violents exercent ou menacent d’exercer des violences ; qu’un patron remercie son subordonné. Ce sont pourtant ces banalités qui ont provoqué la tempête.

Caricature ou délire raciste ?

Il n’est pas certain qu’on aide à la compréhension des choses en évoquant simplement dans cette affaire des « caricatures » ou des dessins « satiriques ». La satire est un exercice dans lequel défauts et vices des personnes qui en font l’objet sont moqués ou mis en évidence d’une manière plaisante. Sur l’un des dessins en cause, celui qui a le plus fait scandale, le prophète de l’islam est présenté coiffé d’un engin explosif. Il ne s’agissait donc pas là de dénoncer ou de critiquer un trait caractéristique du personnage ainsi représenté, mais d’affirmer son caractère intrinsèquement criminel, et même terroriste – et à travers lui celui de l’ensemble du monde musulman. Une caricature doit ressembler à son sujet. On ne peut reprocher à un caricaturiste de forcer certains traits, et de dessiner par exemple des oreilles d’éléphant à qui aurait simplement de grandes oreilles : il ne fait là que son métier de caricaturiste. Le dessin en cause n’est pas de ce registre ; il n’est ni satirique ni caricatural : il est simplement l’exposé d’une thèse dénonçant l’Islam comme terroriste par définition (sous le turban même de son prophète) – ou le terrorisme comme musulman par essence. Il est donc, de ce fait même, une incitation raciste à la haine islamophobe – dans un contexte où, bien souvent, toute incitation est hélas en la matière superfétatoire. « Vous voyez celui-là, votre voisin, l’Arabe, avec sa femme voilée et son fils à casquette, dit-on en substance, méfiez vous de lui, c’est un terroriste en puissance. »

On a ici l’illustration du fait que ce que l’on dénonce comme racisme islamophobe n’est en aucune manière une simple « critique de la religion musulmane », ni même sa simple détestation en tant que religion : dire que l’islam est par nature « terroriste », ce n’est pas critiquer l’islam, c’est en donner une représentation qui, pour être fantasmatique, n’en produit pas moins tous les effets du racisme ordinaire. De la même manière que dire que les Noirs sont paresseux, les Juifs avares ou les Jaunes cruels, ce n’est pas critiquer l’Afrique, la religion juive ou l’Asie, mais alimenter des stéréotypes et tenir des propos racistes.

Quoi qu’il en soit, ce autour de quoi le débat a tourné, curieusement, n’est pas la portée de ces dessins ou la signification politique de leur publication. Dans le contexte actuel, où la mondialisation capitaliste prend bien souvent les formes d’une guerre de l’occident contre le reste du monde ; où l’index est pointé vers l’Islam pour mieux faire admettre, sous le nom de guerre au terrorisme, les menées impérialistes des États Unis et de leurs alliés au moyen Orient et au delà ; où des dictatures féroces se présentent comme « musulmanes », et font de l’identité religieuse un dérivatif aux populations qu’elles oppriment ; où l’islam est instrumentalisé par de troubles mouvements politiques ; où les minorités musulmanes d’Europe font l’objet d’un racisme structurel, qui sert d’instrument à leur surexploitation, et à la division des victimes du système économique et social ; ou l’islamophobie sert de ciment idéologique à tout cela ; dans ce contexte, donc, il y aurait pourtant eu beaucoup à dire sur la publication de ces dessins.

Pourtant, même ceux qui l’ont condamnée ou regrettée se sont bien souvent bornés à évoquer l’injure ainsi faite aux musulmans, mais sans en proposer l’analyse – laissant ainsi entendre que l’essentiel résidait, non pas dans le contenu des dessins, mais dans leur simple existence. Au demeurant, même ce débat est demeuré accessoire ; l’essentiel a porté sur la question de la « censure », de la liberté de la presse, de la liberté d’expression. Or, de tous côté, même cette question a été abordée par le plus petit bout possible de la lorgnette.

« Censure » et « liberté d’expression »

La publication de ces dessins se justifie, explique-t-on, parce que la liberté d’expression est un principe supérieur à tout autre. En quoi consiste ce principe, en quoi il serait menacé, en quoi la publication de ces dessins en serait la simple mise en œuvre, ou la défense, voilà ce que l’on ne nous explique pas.

Notons d’abord qu’il n’existe pas, en tous cas en France, de principe général de la liberté d’expression. Présenter un tel principe comme l’un des apports de l’universalisme occidental est une filouterie. La loi sur la liberté de la presse, qui régit cette question, lui donne des limites : il est interdit – et pénalement sanctionné – de diffamer autrui ou de l’injurier ; il est interdit d’inciter à la haine raciale. Injures, diffamations, incitations à la haine, sont d’autant plus interdites qu’elles visent des groupes particuliers à raison de leur appartenance réelle ou supposée à une race, à une religion, à un peuple, ou à raison de leur origine, de leur orientation sexuelle, de leur état de santé, etc.

De ce seul point de vue, on peut dire que, par exemple – et puisque c’est bien de cela qu’il s’agit en l’espèce – la provocation à la haine à l’encontre des musulmans est pénalement sanctionnée par la loi française. Dans quelle mesure cette loi est-elle effectivement mise en œuvre, cela est une autre question. Dans quelle mesure la pénalisation de certaines expressions se justifie en est encore une autre.

Il n’est pas inutile de remarquer sur ce point que la voie pénale n’est pas la seule qui soit offerte, même en demeurant dans le domaine du contrôle judiciaire des comportements, pour combattre les propos qui portent atteinte aux personnes, à leur dignité, à leur sécurité, etc. On se rappelle par exemple la condamnation de Jean-Marie Le Pen pour avoir dit que les chambres à gaz nazies étaient un simple « détail » de l’histoire du vingtième siècle. Aucun texte, alors, ne réprimait ce genre de négationnisme ; il n’y avait pas encore de « loi Gayssot ». C’est au nom du principe juridique général qui veut que « tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer » (article 1382 du Code civil) que des associations d’anciens déportés, des associations antiracistes et de défense des droits de l’homme, etc., avaient poursuivi en justice l’auteur de ces propos et l’avaient fait condamner à leur verser des dommages et intérêts : la portée symbolique d’une telle condamnation vaut bien celle d’une condamnation pénale.

Outre ce recours aux règles de la responsabilité civile, qui veut que l’on est tenu des fautes que l’on commet, des mesures peuvent toujours être prises en cas de troubles à l’ordre public, commis ou risquant de l’être, à travers une publication par ailleurs en elle-même licite ; ou lorsque est en cause le respect dû à la vie privée, que la loi protège également. Dans de tels cas, il appartient aux tribunaux d’arbitrer entre les principes de liberté d’expression et de protection de la vie privée ou de l’ordre public, principes tenus par la loi comme également respectables – même si la notion « d’ordre public » est en elle-même extrêmement confuse, et sujette aux pires dérives. La requête de certaines associations musulmanes tendant à faire interdire la sortie du numéro de Charlie-Hebdo reproduisant les fameux dessins a semble-t-il été écartée pour des raisons de forme ; rien ne permet donc de dire si, quant au fond, elle n’aurait pas pu être accueillie.

Par ailleurs, lorsqu’il s’agit de lutter contre des propos ou des comportements, on n’est pas tenu de recourir aux tribunaux : les combats idéologiques sont avant tout politiques, et la condamnation morale de l’opinion est sans doute la meilleure qui soit ; des décisions de justice peuvent y contribuer, mais ne sauraient la remplacer ; par ailleurs, les juges eux mêmes sont des hommes et des femmes qui n’échappent pas comme par miracle aux idées dominantes. Leurs décisions, lorsque doit être appréciée d’une manière somme toute subjective la valeur des principes et des intérêts en cause dans un cas déterminé, sont aussi fonction de l’état de l’opinion ; les juges partagent les évidences communes, et la voie judiciaire suppose souvent, pour avoir quelque efficacité, qu’existe au moins un courant significatif de l’opinion allant dans le sens de la décision recherchée.

Donc, la liberté d’expression n’est pas, en France, un absolu intangible ; mais à supposer qu’elle le soit, rien ne permettrait de dire pour autant que la publication de nos caricatures se justifiait : ce n’est pas parce qu’on a « le droit » de faire une chose qu’il faut absolument la faire ; si ce « droit » peut, pour un tempérament légaliste, être une condition nécessaire à la publication, il n’en est certainement pas une condition suffisante. On peut donc parfaitement considérer que même s’il était loisible de le faire, il ne l’aurait pas fallu. Nulle « censure » à cela.

Le « droit au blasphème » et ses usages

Certains ont dans le débat brandi ce qui apparaît aujourd’hui comme un lieu commun dans certains milieux islamophobes : le « droit au blasphème ». L’expression est à tout le moins curieuse. Pour qui n’est pas croyant, le blasphème est sans portée. On ne peut pas vouloir déplaire à un « Dieu » dont on nie l’existence. Le blasphème ne peut concerner que les personnes pour qui il a un sens, c’est à dire celles qui sont croyantes ; et pour elles, dans une société où coexistent toutes sortes de croyances et toutes sortes d’incroyances, l’interdit n’a pas à résulter de la loi générale applicable à tous les membres de celle-ci : il résulte déjà des règles de leur religion, auxquelles elles adhèrent librement. Ceux qui prônent le « droit au blasphème » ne le réclament à l’évidence pas pour ceux qui, par leur adhésion à une religion, se refusent de toutes façons à l’exercer. Non : ils le réclament pour eux mêmes. Or, pour qui n’est pas croyant, le blasphème n’a en tant que tel aucun sens, et si l’on s’interroge sur les raisons qui peuvent les pousser à en réclamer le droit – qu’au demeurant personne ne leur conteste – on voit que la raison est simple : puisque injurier « Dieu » n’a pour eux aucun sens, ce sont simplement les croyants qu’ils veulent injurier.

Il est paradoxal, soit dit entre parenthèses, de constater que ceux-là même qui disent que la religion doit demeurer de l’ordre des choses privées, strictement domestiques, voire clandestines, ne se proposent pas de blasphémer dans le secret de leur boudoir. S’ils exigent que chacun garde sa foi bien au chaud dans son for intérieur, ils souhaitent quant à eux exhiber à tous vents leur irréligion.

Au demeurant, républicanistes de tous poils devraient y réfléchir à deux fois à propos de blasphème : leur religion a également ses idoles sacrée, à tel point qu’ils ont institué en délits les outrages faits au drapeau tricolore où à l’hymne guerrier qu’est La Marseillaise. Les adorateurs de ces idoles, le fait est significatif, n’ont eu l’idée de cette pénalisation qu’après le 11 septembre 2001, et plus précisément après qu’au mois d’octobre de cette même année, des jeunes gens eurent commis l’irréparable sacrilège de « siffler » le célèbre refrain affirmant que les « ennemis de la France » ont un « sang impur ».

Quant aux quelques momies qui défilaient en ordre dispersé en décembre dernier pour célébrer le centenaire de la loi de 1905, elles arboraient un badge indiquant : « Laïcité sacrée ! »…

La question, cela dit, n’est donc pas simplement celle de la liberté d’expression, mais celle de l’expression elle-même, de ses raisons d’être, de sa signification idéologique et politique dans un contexte donné.

« L’anticléricalisme » au service du racisme

On admirera à cet égard la perversité de l’argument – également entendu dans ce débat – selon lequel la publication des dessins en question permettait de manifester un soutien au directeur de publication licencié deFrance-Soir. Considérer que cet ancien directeur doit être soutenu, c’est considérer qu’il aurait été licencié « à tort ». Mais cela pourrait avoir plusieurs fondements ; or, il ne semble pas que qui que ce soit ait contesté, par exemple, le droit d’un patron de presse à décider de la ligne éditoriale de son journal, et à disposer, comme d’autant de mouchoirs jetables, de ses subordonnés : les questions ainsi posées n’auraient dans une telle hypothèse, plus grand chose à voir avec le contenu du dessin publié par France-Soir, et tout à voir avec l’organisation des entreprises en général, et des entreprises de presse en particulier, dans un système capitaliste. Or, si ce dont il s’agit n’est pas le droit régalien du propriétaire du journal de se défaire de son directeur de publication s’il ne partage pas ses choix, c’est qu’il s’agit des motifs précis du renvoi de ce directeur : il lui a été reproché d’avoir publié le dessin en cause, et c’est cela qui est contesté ; en somme, le soutien à ce directeur consiste à dire qu’il a eu raison de publier ledit dessin. Mais alors il est hypocrite de dire que c’est pour le soutenir qu’on le publie également : c’est en réalité simplement parce que l’on pense qu’il fallait en effet le publier. Ni la solidarité journalistique, ni la liberté d’expression n’expliquent donc cette nouvelle publication. Il faut l’expliquer par elle-même.

On a vu que ces dessins se caractérisaient d’abord et avant tout par leur islamophobie, par leur dénonciation des musulmans en général comme agents du terrorisme ; il n’est pas pour autant certain que toute reproduction ait ou ait eu une visée raciste. Quand le débat fait rage, quand dans le monde entier, manifestations, violences et menaces se succèdent, il peut être légitime de donner à chacun les moyens de savoir de quoi il retourne. Si le dessin litigieux a été commandité, dessiné, initialement publié, puis reproduit, dans une intention islamophobe, il pouvait parfaitement être reproduit une fois le débat lancé pour les seuls besoins de l’information du public. Donner à voir le dessin dans de telles conditions ne signifie pas forcément : « Regardez comment je vois Mahomet », mais peut signifier : « Regardez quel est le dessin que beaucoup jugent scandaleux ». Rappeler que l’on a reproché à Le Pen de dire : « détail », cela n’est pas la même chose que dire soi-même : « détail ». On peut dès lors s’interroger sur le sens de la publication dans France-Soir, mais aussi dans Le Nouvel Observateur, de ce dessin ; et on peut, pourquoi pas, accorder à ces journaux le bénéfice du doute, dès lors qu’ils n’ont pas simplement dit publier un portrait du prophète de l’islam, mais simplement voulu mettre à la portée du public l’un des éléments d’un débat en cours. Et la vérité est en effet que l’on comprend mieux l’émotion soulevée par un dessin tel que celui-là une fois qu’on l’a vu.

Pourtant, tout le contexte de ce débat rend assez transparente l’intention raciste de Charlie Hebdo dans cette publication. D’abord parce que ce journal n’est pas à proprement parler un journal d’information (( C’est une hebdomadaire satirique, qui prétend plutôt faire rire sur l’ « actualité » – telle que la mettent en scène les autres médias – que de produire lui-même une information de première main )) ; ensuite parce que l’islamophobie est désormais l’un de ses fonds de commerce favoris (( Et enfin parce que son directeur, Philippe Val, a lui même assumé une position « engagée » et s’est refusé à reconnaître le moindre racisme dans les dessins qu’il reproduisait )) . La mise en avant complaisante de son caractère décidément irrévérencieux ou anticlérical ne suffit en aucune manière à excuser une telle ligne éditoriale. Au demeurant, il y a quelque chose de lamentablement indécent de voir un journal qui s’est naguère illustré par son irrévérence à l’égard des puissants de son propre monde, et qui choisit aujourd’hui, la fatigue de ses collaborateurs aidant peut-être, de faire porter dans un confortable retournement d’alliances et de valeurs, son irrévérence sur les déshérités, victimes de ces mêmes puissants. Que des Français, blancs, de tradition chrétienne, se moquent de l’Église catholique, cela peut avoir du sens. Que des Arabes, des Iraniens, des Afghans, ou des Pakistanais entendent combattre l’islam, cela les regarde. Que ceux qui ont tout s’en prennent aux convictions intimes de ceux qui n’ont rien, cela devient une autre histoire.

Quoi qu’il en soit, le débat autour des « caricatures » donne l’occasion d’approfondir la spécificité, à l’intérieur des idéologies antireligieuses, des attaques permanentes dont « l’islam » fait l’objet : à cet égard, Charlie Hebdo n’est jamais qu’un symptôme parmi d’autres, simplement un peu plus minable que d’autres.

Un contexte islamophobe

Les agents de l’islamophobie contemporaine, qui s’obstinent à prétendre n’y voir qu’une manifestation légitime du droit – incontestable dans une démocratie – à « critiquer » les religions seraient bien inspirés, au lieu de se borner à les déplorer avec condescendance, de s’interroger sur les réactions que suscitent les attaques contre « l’islam » chez de nombreuses personnes, hommes et femmes, qui ne se considèrent pas à titre personnel comme religieuses, qui ne se soumettent à aucun des préceptes de la religion musulmane, et qui se sentent néanmoins visées par ces attaques.

On disait jadis, pour désigner – quelle que soit leur origine effective – les personnes issues de l’immigration maghrébine, « les Algériens ». Plus tard, on a dit « les immigrés ». On a inventé les « les beurs ». Désormais, les voilà étiquetés « musulmans ». Quand une personne se voit en permanence assignée à une identité, il faut bien qu’elle finisse par s’y reconnaître. Tel jeune homme dont le nom trahit une origine maghrébine, qu’il ne cherche d’ailleurs pas à cacher, se voyait demander dans le courant du dernier mois de Ramadan, alors qu’il était en plein déjeuner accompagné d’un verre de vin, s’il pratiquait le jeûne. Puisqu’il sait qu’on le considère, quoi qu’il fasse ou dise, comme « musulman », il est assez naturel qu’il considère de son côté que les attaques lancées contre l’islam le concernent de près. De toutes façons, quelles que soient leur attitude personnelle à l’égard de la religion, les personnes issues de l’immigration maghrébine ou sahélienne ont généralement certaines attaches avec l’islam, en tant par exemple qu’il est la religion de leurs parents, de certains de leurs frères ou de certaines de leurs sœurs, d’amis, de cousins, de voisins, etc. Il savent d’emblée, lorsqu’on s’en prend en termes généraux aux « musulmans », que ces proches, dont ils mesurent à quel point ils n’ont rien à voir avec les caricatures que l’on dresse d’eux, sont victimes de ces attaques. Il n’est pas rare que se définissent aujourd’hui comme « musulmans » des gens dépourvu de toutes pratiques religieuses, et qui n’auraient pas eu idée de se définir ainsi jusqu’à ce que, un matin de septembre 2001, ils ne s’aperçoivent qu’on les regardait tout à coup d’un œil différent.

On peut regretter la violence des réactions suscitées par l’affaire des caricatures dans le monde musulman ; on ne saurait s’en étonner. Le monde musulman a toutes raisons de considérer qu’il ne reçoit de l’occident que mépris et humiliations. Les dictatures au pouvoir ont beau jeu de s’appuyer sur les manifestations de ce mépris pour canaliser contre d’autres qu’elles mêmes les rancœurs populaires : l’occident fournit pour cela surabondance de prétextes ; il n’est pas surprenant qu’à l’occasion, les intéressés s’en saisissent.

Les provocations de Nicolas Sarkozy avaient naguère déclenché quelques incendies de voitures ; celle d’un journal danois aura déclenché celui de quelques ambassades. Ceux qui prêchent la « guerre des civilisations » ne peuvent s’étonner de voir riposter leur ennemi désigné.

Source : Laurent Lévy, pour LMSI (Les Mots Sont Importants) – 8/2/2007

 

Source: http://www.les-crises.fr/censure-droit-au-blaspheme-et-islamophobie/


[Reprises] Ils ont eu tort d’attaquer la prétendue islamophobie de « Charlie » (!)

Tuesday 10 February 2015 at 01:55

OK, c’est clair :

  • des personnes, y compris anciens salariés de Charlie ,critiquaient fortement Charlie pour Islamophobie, en disant que cela allait faire monter les tensions
  • on a eu l’attentat barbare
  • “conclusion” : les gens avaient donc tort de dire ça, CQFD.

!!!

Pour Christophe Ramaux, la gauche radicale a eu tort d’attaquer la prétendue islamophobie de « Charlie »

Source : Le Monde, 09/01/2015

Une femme près d'une voiture de police, aux abords d'une mosquée à La Rochelle, le 9 janvier

Une femme près d’une voiture de police, aux abords d’une mosquée à La Rochelle, le 9 janvier

Christophe Ramaux, membre du collectif d’animation des Economistes atterrés, Université Paris-I

C’était finalement un testament. Dans un article de l’ensemble de sa rédaction publié le 20 novembre 2013 (dans Le Monde), Charlie s’élevait contre le procès en islamophobie intenté depuis longtemps par certains, en particulier à la gauche de la gauche. Un islamophobe, et il y en a, est un raciste. Un bouffeur de religions, et Charlie en était, n’est pas raciste. Il maudit toutes les religions et c’est bien son droit. Cibler uniquement l’islam, c’est cibler derrière lui certaines populations, les Arabes au premier chef. La rédaction de Charlie avait raison : en les accusant d’islamophobie, c’est un procès en racisme que d’aucuns s’autorisaient à son encontre. Une salissure ignoble pour ces dessinateurs et écrivains qui ont toujours eu l’antiracisme chevillé à la plume.

Comment en est-on arrivé là ? Comment expliquer que des dirigeants d’Attac, du NPA, des journalistes de Politis et d’autres – les uns et autres ont organisé avec les Indigènes de la République et Mediapart une Journée contre l’islamophobie le 13 décembre 2014 – aient pu alimenter cette infamie ? Comment expliquer que certains animateurs des Economistes atterrés aient rejeté la collaboration de Charb au prétexte qu’il était islamophobe ? Les Economistes atterrés – dont le spectre va bien au-delà de la gauche radicale – ont heureusement remis les pendules à l’heure et rendu ainsi hommage à Bernard Maris, leur oncle à tous. Leur collectif d’animation a décidé, après débats et contre l’avis de certains irréductibles, de publier un communiqué où il est fait explicitement mention de la laïcité.

Attac a décidé l’inverse. Son communiqué se refuse sciemment à mentionner la laïcité. On en est là : certains ont commis un précédent en accusant Charlie d’islamophobie. Après le massacre de la rédaction, ce précédent de trop appelait un sursaut. Nombreux dans la gauche de la gauche en sont conscients. D’autres s’acharnent dans l’aveuglement, en refusant de nommer la laïcité, ce pourquoi ceux de Charlie sont tombés. Ils proclament qu’ils sont « tous Charlie ». Au ciel, les principaux intéressés, fidèles à eux-mêmes, doivent en rire, mais en jaune amer. Comment expliquer cette dérive ?

Les musulmans peuvent-ils être réactionnaires ?

La réponse est dans le testament de Charlie. Sa rédaction s’interrogeait : au nom de quoi « la religion musulmane […] devrait, elle, être épargnée. Pourquoi diable ? Quel est le rapport, autre qu’idéologique, essentialiste au fond, entre le fait d’être arabe par exemple et l’appartenance à l’islam ? » C’est bien là le cœur du problème. Sans craindre le racisme pervers qui se niche ici, certains ne conçoivent pas que des musulmans, des immigrés ou enfants d’immigrés puissent être totalement réactionnaires, et même fascistes, au même titre que certains catholiques, protestants, juifs ou agnostiques. Plus de mille départs en Syrie, cela devrait alerter ceux qui n’ont pu envoyer que quelques dizaines de guérilleros en Amérique latine ou ailleurs.

Ceux-là continuent néanmoins à nier qu’une frange extrêmement minoritaire, mais signifiante, de la jeunesse trouve sa cause dans le fascisme djihadiste. Nommer la chose serait favoriser « l’islamophobie ». Comme si la masse des musulmans n’avait pas besoin d’être soutenue dans la lutte sans merci de « tous ensemble » contre le fascisme vert. Selon Edwy Plenel, grand contempteur de l’islamophobie, la question qu’il convient de poser est « pourquoi notre société produit-elle ces enfants-là » ? Juste question de prime abord. Oui le capitalisme néolibéral, l’austérité, engendre comme toujours, chômage, précarité et désespérance sociale. Mais cela ne suffit pas. La politique ne peut être rabattue sur l’économie et la sociologie. Elle a son autonomie, sa consistance propre. Les mêmes conditions sociales ne produisent pas les mêmes trajectoires. Les êtres humains ont d’abord une tête, vivent de représentation. Ils ont leur autonomie, leur responsabilité.

Dénier la responsabilité de ceux qui adhèrent à l’intégrisme radical, n’est-ce pas les nier un peu plus ? Et n’est-ce pas un narcissisme lui aussi pervers que de laisser entendre que « nous » sommes « aussi » responsables de cela ? La dite « société » n’est-elle qu’à accabler ? Aussi perfectible soit-elle, et elle l’est grandement, ne doit-elle pas aussi être défendue dans ses fondements mêmes – les valeurs républicaines dont la laïcité justement – face à ceux qui la violentent ? Au rassemblement de mercredi soir à Paris seuls « Charlie, Charlie » et « liberté d’expression » ont percé le silence de l’effroi. Quels seront les mots d’ordre des prochaines manifestations ? « Non à tous les fascismes dont celui des djihadistes » : c’est la seule trame susceptible de rendre véritablement hommage à la profondeur du combat de Charlie.

Contre le fascisme brun donc, mais aussi – et explicitement – contre le fascisme vert, car le déni de ce dernier nourri le premier. La gauche radicale reprendra-t-elle cette trame ? Espérons-le. Il y aura bien d’autres chantiers à défricher pour elle ensuite : celui du rapport à l’Etat, à la nation, à la démocratie y compris représentative, au pouvoir justement, à l’intérêt général, à la société même.

Il est minuit moins le quart pour la « génération » de mai 68. Charlie a été l’étendard le plus échevelé de cette génération. Qui l’eut cru ? Qui eut cru que ce soit par Charlie que cette « génération » fasse enfin le deuil de ses impasses ? Qui eut cru que Charlie soit élevé au rang de cause nationale, de deuil national, que résonnent par lui la rose et le réséda ? L’histoire prochaine de notre pays sera-t-elle aussi facétieuse que Charlie l’était ? Nous sommes peut-être « minoritaires » indiquait tragiquement le testament de Charlie. Pas sûr…


#JeSuisCharlie : que peut faire internet ? Beaucoup. Créons un million de “Charlie Hebdo”

Source : Le Nouvel Observateur, 09/01/2015

Qu’est-ce qu’un tweet va changer ? De nombreux internautes se posent cette question après l’attaque terroriste contre les locaux de “Charlie Hebdo”. Et beaucoup ne savent pas quoi faire de plus pour montrer leur soutien. Mais ce n’est pas vain, et il y a d’autres moyens de s’engager, comme l’explique notre Benoît Raphaël, fondateur de Trensboard.

Mobilisations de soutien à New York le 7 janvier

Des mobilisations de soutien se sont déroulées dans le monde entier, ici à New York le 7 janvier (RICHARD B. LEVINE/SIPA)

Je vais essayer de faire court. Il y a déjà eu tellement de messages Twitter, Facebook, de photos Instagram, de chroniques, de communiqués, de billets de blogs, d’interviews, de dessins, d’affiches brandies dans la rue, en silence d’abord, puis avec des chants, qu’il pourrait paraître inutile d’en rajouter, surtout moi. Qu’ai-je à dire de plus ?

Mais je pense que c’est bien. Autant l’infobésité peut parfois rendre l’information plus opaque, autant cette fois, il faut faire du bruit. Le contenu des messages a ici autant d’importance que leur capacité à créer une immense vague. Contre l’obscurité. Contre cet autre vent qui veut annuler la liberté, l’esprit frondeur, l’esprit de la France, et ces élans formidables d’empathie, de richesse d’expression, de partage et d’empowerment que je vois se libérer grâce à Internet depuis quelques années.

Mon premier sourire après une journée d’effroi

Le massacre opéré à Charlie Hebdo attaquait plusieurs symboles. Sans bien les comprendre. Sans les comprendre, au fond. Sans comprendre aussi que ces symboles, la liberté, la liberté de la presse, le courage, le besoin de sens, la nécessité de rire, la générosité, et la profonde humanité derrière la caricature féroce, font aussi partie de ce nouveau monde, autant que la haine, le désespoir et le repli sur soi.

Dans la nuit de mercredi à jeudi 8 janvier, à minuit, voici les mots les plus tweetés dans le monde, cartographiés par Trendsmap. C’était mon premier sourire, après une journée d’effroi :

Capture Trendsmap

(Capture Trendsmap)

Je parle en tant que journaliste, blogueur et entrepreneur, mais aussi en tant que citoyen. Un citoyen du monde, mais aujourd’hui profondément Français, Français comme un symbole, et qui ne s’est jamais senti aussi libre et optimiste depuis qu’il a rencontré Internet. Cette incroyable invention qui relie les gens, étend les libertés, augmente le savoir et l’empathie.

Investissons dans les médias

Alors que pouvons nous faire, nous, citoyens, nous internautes, forts de ce nouveau pouvoir, face à ce que certains Français ont appelé “notre 11 septembre” ?

 

Nous pouvons faire tellement. Tellement depuis que nous sommes connectés.

C’est la liberté d’expression qui a été attaquée. La liberté de la presse. Les médias. Et nous avons ressenti hier l’urgence d’être plus forts que jamais. La force, la diversité, l’indépendance des médias, c’est notre meilleure arme contre l’obscurantisme et le fanatisme.

Il faut investir dans les médias. Il faut les moderniser pour les rendre plus forts. Pour les rendre plus rentables. Et plus indépendants.

La force d’internet, c’est de multiplier

Il faut surtout que les citoyens que nous sommes participions à cette aventure : en les soutenant, en les challengeant mais avec affection. En finançant, via le crowdfuning, un maximum de projets médias, en nous abonnant aux médias, aux médias locaux, aux médias nationaux. En nous abonnant, bien sûr, à “Charlie Hebdo”. Et ils faut que les médias comprennent que leur meilleur soutien, ce sont les citoyens, qui sont tous internautes.

Et qu’il faut les rendre plus que lecteurs, il faut les rendre acteurs. Il y a plein de façons de le faire. Et encore plus à inventer.

Il faut aussi, chacun de notre côté, ensemble, créer des millions de “Charlie Hebdo”. C’est la force d’Internet. Celle de multiplier. Et celle de maintenir des voix, en les répétant ailleurs, à l’infini, quand on tente de les briser.

Des journaux à genoux

Et il ne faut jamais plier les genoux, comme disait Charb. Pas comme le “Daily News”, comme le “Telegraph”, qui ont surfé sur le buzz mais en floutant ou en cachant les couvertures controversées de “Charlie Hebdo”. Ultime insulte d’une profession qui se met à genoux. Tandis que les autres, médias, mais aussi la foule internaute, et celle dans la rue, brandissait ces mêmes unes dans un magnifique : “Même pas peur !”

OB : Ca crève les yeux que du coup la France a peur…

(Et si vous vous demandez qui est à l’origine de ce logo repris dans le monde entier, “Je suis Charlie”, il vient d’un internaute)


Plantu au secours de Charlie Hebdo après avoir “armé” ses assassins

Source : Caricatures&caricature, 11/01/2015

Caricature: Encore une provocation !!

Petit rappel : le 21 septembre 2012, Plantu faisait passer ce dessin en “une” du journal Le Monde. Il s’agit d’une caricature visant très clairement Charb, alors directeur de Charlie Hebdo, figuré en débile mental. Le contexte ? Quelques jours auparavant, Charlie Hebdo avait publié des caricatures mettant en scène Mahomet, réagissant à la polémique autour d’un film récemment posté sur Internet, L’Innocence des Musulmans. De nouvelles menaces de mort avaient été proférées de par le monde, contre l’hebdomadaire satirique dont certains dessinateurs (Charb notamment), étaient déjà sous protection policière.

Plantu s’était donc désolidarisé de ce journal qui défendait alors au péril de sa vie son droit à caricaturer les intégristes en général et Mahomet en particulier. Plantu, comme tant d’autres éditorialistes, responsables politiques ou “intellectuels”, avait à ce moment-là participé à la campagne de dénigrement contre Charlie, en parlant d’irresponsabilité. Il en appelait alors à l’autocensure, expliquant que Charb serait responsable des morts que “provoquerait” au Pakistan dans les jours qui suivraient, la publication dans son journal de caricatures visant Mahomet. Plantu renforçait alors le camp des intégristes et participait à l’isolement du journal, en en faisant une cible évidente et facile pour les terroristes.

Je ne connais pas d’équivalent dans l’histoire de la presse, d’un grand journal quotidien “démocratique” qui aurait publié en “une” une caricature contre un dessinateur inscrit sur la black-list des djihadistes du monde entier, constituant donc un objectif principal et public de leurs prochains attentats…

Quand comme Plantu on considère le dessinateur “responsable” de la possible instrumentalisation de ses propres dessins à des fins meurtrières, on ne publie pas en “une” d’un grand journal une caricature visant un dessinateur menacé de mort… Le site de Cartooning for peace présente d’ailleurs l’association comme ayant l’objectif de “soutenir les dessinateurs empêchés d’exercer librement leur métier ou dont la liberté est menacée”. Ca ne valait pas le coup de défendre Charb et Charlie contre les menaces d’attentats ?

Par son attitude et alors qu’il se présente comme “le” défenseur de la liberté d’expression et des dessinateurs victimes de menaces au travers le monde, Plantu a “armé” indirectement les assassins de Charb et de ses amis, comme les dessinateurs antisémites pendant la collaboration en France “armaient” ceux qui déportaient des juifs.

Comme l’indique François Forcadell sur son blog, Plantu se serait aujourd’hui engagé à trouver un financeur pour assurer la pérennité de Charlie Hebdo. La belle affaire ! Maintenant qu’ils sont presque tous morts, il serait devenu urgent de les soutenir ? N’est-ce pas, cher Plantu ? As tu au moins quelques remords ?

Guillaume Doizy

Source: http://www.les-crises.fr/reprises-ils-ont-eu-tort-dattaquer-la-pretendue-islamophobie-de-charlie/


[Reprise] Violences contre Charlie Hebdo: la mondialisation des imbéciles

Tuesday 10 February 2015 at 01:22

Caroline Fourest a trouvé la cause du terrorisme : la testostérone !  :)

Elle pointe, mal, un vrai problème : la mondialisation. Une loi ici, une loi la-bas, mais de plus en plus un seul monde…

Et pour tous les afficionados du gouvernement mondial, un petit souci : il faudra aussi une loi mondiale unique alors… Et donc, on interdit quoi ?

P.S. admirez le style Fourest dans les fins de phrase

Publication: 19/01/2015

Ainsi donc, après avoir tué à Paris, d’autres fanatiques tuent et brûlent des Églises au Niger pour un dessin de pardon qui n’a rien d’une « provocation gratuite » et tout d’un acte de courage en réaction à ce massacre.

La mondialisation de la folie n’est pas nouvelle. Elle nous tend un piège bien connu. Blâmer des dessinateurs français d’avoir répondu pacifiquement à un crime quand il faut évidemment blâmer ceux capables de tuer pour un dessin… Qu’ils n’ont probablement pas vus.

Le droit au blasphème milite pour la laïcité.

[OB Pour les néoconservteurs, laïcité = athéisme, en général, vous aurez compris.]

Or c’est justement ce manque de laïcité qui explique ces pogroms religieux pouvant s’enflammer au moindre prétexte comme au Niger. Le pape y a-t-il seulement pensé avant de comparer le fait de moquer la foi à une insulte justifiant de répondre par « un poing dans la gueule » ? Au Pakistan, c’est au nom de cette « philosophie » obscurantiste que des chrétiens sont mis en prison, comme Asia Bibi. Le seul fait d’énoncer sa foi est vécu comme une insulte à la religion des autres, majoritaires, et peut valoir d’être jugé pour « blasphème ». Charlie défend le droit au blasphème et donc Asia Bibi, contrairement au Pape dont la déclaration encourage les violents de façon irresponsable.

Mais les vrais responsables sont bien ceux qui commettent ces violences. Ces réactions sont restées pour l’heure ultra-minoritaires au sein de ceux que certains commentateurs appellent très rapidement LE monde musulman, alors qu’il est divers et a réagi à 99% plutôt pacifiquement. Quelques centaines de manifestants fanatisés au Niger, en Algérie, au Sénégal ou au Pakistan. C’est trop mais cent fois moins qu’à la fin des années 80 contre le livre de Salman Rushdie… Et bien moins qu’en 2006, lorsque la publication des dessins danois avait servi de prétexte pour brûler des ambassades et tuer plus de 150 personnes.

Le fait de tenir bon a un prix, mais ce prix a un sens. Combien de vies et de libertés perdrons-nous si nous cédions ? C’est la question qu’il faut se poser. Au lieu de renverser les procès en « irresponsabilité ».

Des terroristes mal intégrés ?

En parlant d’irresponsabilité, on reste sans voix devant les clichés déversés outre-Atlantique sur la France à l’occasion de ce drame.

Ne parlons pas de Fox news qui a confondu les zones d’urbanisation prioritaires avec des zones de non droit entièrement musulmanes rappelant Bagdad ou Kaboul, ni de carte de zones « no go zones » tracées en rouge, ni de son pseudo-expert qui aura eu au moins le mérite de nous faire rire dans un moment pareil.

Mais Fox news n’est pas la seule chaîne à faire des raccourcis terriblement indécents. Obama, qui n’a pas trouvé le temps de venir en France, a frôlé l’indécence en nous expliquant que le terrorisme est lié au manque d’intégration des musulmans… Si réussie aux Etats-Unis. Comme si aucun terroriste américain n’avait jamais existé. Peut-on se permettre de lui rappeler que la discrimination sociale explique rarement, et n’excuse jamais, le terrorisme ?

Était-ce vraiment parce qu’il était « mal intégré » que le milliardaire Oussama Ben Laden a commandité les attentats du 11-Septembre et souhaité ceux de Charlie Hebdo ? Parce qu’ils étaient mal intégrés que les islamistes algériens des GIA ont ensanglanté l’Algérie pendant toutes les années 90 ? Ou que des jihadistes irakiens et syriens ont créé l’État islamique ?

Comment peut-on dire dans la même phrase que les musulmans sont les premières victimes du terrorisme, ce qui est vrai, tout en expliquant le terrorisme par le manque d’intégration des musulmans ? C’est donc parce qu’ils ne sont pas assez intégrés dans les pays musulmans que les musulmans se tuent eux-mêmes ? Les musulmans seraient donc racistes envers les musulmans et ce racisme expliquerait la naissance de l’islam politique radical en Égypte et au Pakistan ?

Est-ce parce qu’ils sont nés en France que les frères Kouachi ont voulu faire le jihad contre les Américains après Abou Ghraib et une guerre américaine contre le terrorisme plus dévastatrice qu’efficace ? Est-ce vraiment à cause d’un dessin – que la presse américaine ne montre pour ne pas « offenser » – que la propagande jihadiste marche si bien ou à cause de ses images d’Abou Ghraib… Qu’il n’aurait pas fallu montrer pour ne pas « offenser » ?

La vérité, c’est que le terrorisme islamiste comme la guerre fournit un sens et de l’adrénaline à tous les frustrés qui rêvent de tirer à la kalachnikov et d’avoir des esclaves sexuelles. L’explication hormonale, patriarcale, est bien plus valable que l’explication sociale. Ce qui ne veut absolument pas dire qu’une meilleure politique sociale n’est pas souhaitable pour faire baisser la tentation hormonale.

La réponse au terrorisme ne se trouve pas dans l’excuse mais bien dans le fait de tenir bon en matière d’idéal. Et c’est là où la censure de Charlie Hebdo par certains journaux américains et anglais est si grave.

Censure anglo-saxonne

On débat dans les rédactions, on soutient Charlie, mais les directions ont tranché… La plupart ont censuré la couverture de Charlie hebdo, comme ils avaient censuré les caricatures danoises en 2006, en expliquant qu’elles pouvaient être offensantes pour les musulmans.

[OB : C'est DINGUE cette volonté de ne pas offenser ses lecteurs quand même...]

Certains disent aujourd’hui pour des raisons de sécurité. C’est un progrès. Mais serions-nous en danger si tous les médias du monde avaient simplement montré ces dessins danois ou cette « une » au lieu d’en faire un tabou ? Au lieu de laisser croire qu’ils pouvaient justifier des réactions outrées ?

Ce refus d’informer révèle un fossé culturel gigantesque concernant la laïcité et la liberté d’expression.

L’Amérique a fondé sa démocratie sur la liberté de religion. Les sensibilités religieuses y sont plus sacrées que le devoir d’informer. Quant à l’Angleterre, elle n’est ni une république ni laïque, mais une monarchie parlementaire liée à une religion d’État. Cette religion privilégiée l’incite visiblement à manier avec précaution les sensibilités d’autres religions, minoritaires, au nom d’un interdit religieux qui n’existe même pas.

Le Coran n’interdit même pas la représentation de Mahomet. Il interdit l’idôlatrie. C’est-à-dire exactement ce que font les fanatiques en le révérant et en tuant en son nom pour empêcher qu’on désacralise son image… dans Charlie Hebdo.

Quand bien même le Coran interdirait de représenter Mahomet, cet interdit n’est évidemment pas valable pour les non musulmans et les démocraties laïques. Ou alors, il faut aller jusqu’au bout de la logique et interdire à tous, partout, toutes les représentations des prophètes de l’islam… Comme Jésus en fait partie, il faut interdire les Christs en croix dans les Église et les films sur Jésus dans les cinémas. Et puis pourquoi se limiter aux religions ? En toute logique, pour éviter d’offenser, il faut aussi interdire les films hollywoodiens qui froissent Kim Jong Un, le dictateur Nord-Coréen. Et plus globalement importer les lois des dictateurs et des fanatiques en démocratie. C’est-à-dire l’abattre.

L’Amérique a compris cet enjeu au moment des menaces pesant sur le film « The Interview ». Elle a tenu tête à la Corée du Nord. Elle perd le nord quand il s’agit de religion.

Ce ne serait pas si grave si ces critères anglo-saxons n’étaient pas devenus les nôtres malgré nous. Puisqu’ils régissent les nouveaux médias mondiaux que sont l’iPad d’Apple ou Facebook. Sur ces nouveaux médias mondiaux, le fait de moquer la religion ou de montrer des seins peut vous valoir d’être bloqué et censuré. Tandis que l’incitation à la haine, elle, ne fait que prospérer.

Dieudonné n’est pas Charlie

Pendant ce temps, au lieu de défendre la liberté d’expresison tout en combattant l’incitation à la haine, comme le fait Charlie, de grandes voix sèment la confusion. Comme Jon Stewart, le célèbre animateur humoriste du Daily Show, qui n’a rien trouvé de mieux que d’accuser les médias français d’« hypocrisie » et de prendre la défense de l’antisémite Dieudonné. Ce qui a régalé les sites d’extrême droite et/ou pro-islamistes français (et oui, les deux ne sont pas incompatibles, surtout chez les soutiens de Dieudonné).

Cette conception confuse de la liberté d’expression n’est pas seulement irresponsable et navrante. Elle sert les ennemis de la liberté.

Quand Dieudonné était un humoriste et se riait de toutes les religions, dont le judaïsme, personne ne songeait à le faire condamner à des amendes… Qu’ils ne règlent d’ailleurs pas. A l’époque, il était drôle et soutenu. Mais ce Dieudonné n’existe plus. Aujourd’hui, il est à la tête d’un parti politique, fondé avec un homme qui se définit comme « national socialiste », dont le fond de commerce est le racisme anti-Juifs. Il ne rit plus contre les religions. Il minimise voire nie la Shoah, se moque de la décapitation et s’identifie à l’assassin d’une policière noire et des clients de l’Hyper Casher.

La différence entre Charlie Hebdo et Dieudonné, c’est que Charlie rit des terroristes tandis que Dieudonné rit avec les terroristes. C’est la différence entre l’humour et la haine, entre faire respirer la démocratie et vouloir la tuer.

Que des journalistes anglo-saxons, des internautes ou de jeunes enfants ne fassent pas cette distinction est inquiétant. Cette confusion est un poison mortel pour la démocratie. On ne pourra pas arrêter toutes les balles. Mais l’on doit chercher un antidote et s’éclaircir les idées au plus vite, avant de céder de nous-mêmes à ceux qui nous menacent, sans même qu’ils aient besoin de tirer.

C. Fourest

Source : Huffingtonpost.fr

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Caroline Fourest en action à la télé anglaise…

Enfin, voilà le genre de dessinateur non haineux dont Caroline Fourest faisait la promotion dans Charlie Hebdo en 2008, comme le dénonçait un ancien membre de l’équipe… :

Source: http://www.les-crises.fr/la-mondialisation-des-imbeciles/


[IMPORTANT Entraide] Synthèses, Recherches, Rédaction, Modération, WordPress, Vidéos

Monday 9 February 2015 at 07:50

Ce qui se passe est assez effrayant, et on n’arrive plus à suivre…

Je renouvelle l’appel d’hier, vu que nous n’avons pas eu un seul volontaire pour nous aider :(

On aurait donc besoin de personnes pour nous aider pour :

Merci de m’écrire ici (2e rubrique Contact, pas la 1ère pour les Liens svp).

Olivier Berruyer

Source: http://www.les-crises.fr/important-entraide-02-2015/


Malgré la pression, Tsipras ne recule pas, par Okeanos

Monday 9 February 2015 at 05:23

Nous retrouvons en ces temps troublés notre correspondant en Grèce, Okeanos, qui anime l’excellent site Okeanews, et nous donne les dernières nouvelles…

Malgré la pression, Tsipras ne recule pas

Avec une semaine très difficile qui se profile pour la Grèce et au milieu de la pression croissante des créanciers, le Premier ministre Alexis Tsipras a présenté dimanche le programme de son gouvernement au Parlement, s’engageant à mettre en œuvre ses promesses pré-électorale.

Nous n’avons qu’un seul engagement – servir les intérêts du peuple, le bien de la société”, a-t-il dit, ajoutant que c’était la “décision irrévocable” de son gouvernement de mettre en œuvre les promesses de campagne “dans leur intégralité“.

Le premier ministre a dit que le gouvernement ne chercherait pas une extension du plan de sauvetage de la Grèce, notant que cela serait équivalent à une “extension d’erreurs et de catastrophes“, et a réitéré les demandes grecques pour une phase de transition (bridge) jusqu’à ce qu’un “accord mutuellement acceptable” soit atteint avec les créanciers. “Nous n’avons pas l’intention de menacer la stabilité en Europe“, a-t-il précisé, ajoutant toutefois qu’il ne négociera pas la souveraineté du pays. “Notre pays ne reçoit plus d’ordres par e-mail“, a-t-il lancé.

Tsipras a déclaré que son gouvernement a besoin d’espace pour une discussion sur la restructuration de la dette de la Grèce et un nouvel accord, ajoutant que l’augmentation de l’austérité ne ferait qu’exacerber le problème.

Il s’est engagé à remplacer l’impôt foncier unifié (ENFIA) par une nouvelle taxe sur les grandes propriétés et à remettre en place le seuil d’exonération des revenus à son niveau d’avant crise, soit 12000€ (contre 5000€ aujourd’hui, soit un revenu imposable dès 416,66€/mois).

Il a également promis d’introduire un système fiscal équitable et de sévir contre l’évasion fiscale et la corruption. Les conventions collectives seront également restaurées. Tsipras a également confirmé que salaire minimum retrouvera son niveau d’avant crise -751 euros- progressivement jusqu’en 2016.

Un 13ème mois de retraite sera également versé pour les retraités qui gagnent moins de 700 euros par mois.

Sa priorité reste la lutte contre la “crise humanitaire”, disant que “La Grèce ne peut pas être un pays civilisé si des milliers ont faim“. Il promet l’électricité et la nourriture gratuite pour les ménages qui ont été victimes des “mesures barbares” de ces dernières années.

Dans la fonction publique, Tsipras demande la ré-embauche immédiate des femmes de ménage du ministère des Finances, des gardes scolaires et du personnel administratif des universités, notant que cela n’alourdira pas le budget puisque ces ré-embauches remplaceront des embauches prévues pour 2015.

Le premier ministre a également promis de rouvrir ERT, le radiodiffuseur public brusquement arrêté en Juin 2013 par l’ancien gouvernement de Samaras, et va lancer une enquête parlementaire pour déterminer comment la Grèce est entrée dans le mémorandum. Concernant les privatisations, il dit que le gouvernement n’est pas contre l’investissement privé, mais rejette les “ventes massives”, ajoutant que les services publics ne seraient pas en vente.

Gros dossier également et source probable de désaccords avec l’Allemagne, Tsipras a dit que c’était un “devoir historique” pour la Grèce de demander des réparations de guerre à l’Allemagne. Manolis Glezos devrait prendre en charge la commission dédiée à ce sujet.

Tsipras a également évoqué la création d’un portefeuille spécial pour superviser la lutte contre la corruption et l’évasion fiscale, avec comme priorité la vérification des listes à disposition (liste Lagarde, etc).

Le premier ministre a annoncé des coupes dans les budgets des ministères : rationalisation de l’administration publique, annulation des privilèges des ministres et des députés, vente d’un des trois avions du gouvernement, vente d’une partie des véhicules de fonctions des députés et révision des droits aux voitures de fonctions pour les députés.

Tsipras a également directement visé les élites grecques en déclarant que le triangle des puissants (banques / médias / politique) sera brisé. Il annonce de profonds changements dans les médias et proposera de nouvelles procédures pour les permis de radiodiffusion et souhaite “vérifier comment les médias obtiennent des prêts“, annonçant que les médias privés devront obtenir des licences appropriées et payer leurs fréquences, ce qui n’est toujours pas le cas en Grèce.

Le discours de Tsipras marque le lancement de trois jours de débats qui doivent aboutir à un vote de confiance pour son gouvernement. La coalition est certaine de remporter le vote, avec 162 sièges sur les 300 que comptent la Vouli.

Mais la partie qui s’annonce avec les créanciers du pays sera beaucoup plus difficile. Le ministre des Finances Yanis Varoufakis devra faire face à ses homologues de la zone euro à Bruxelles pour un sommet d’urgence ce mercredi. Tsipras rencontrera ses homologues européens le lendemain lors d’un sommet des dirigeants à Bruxelles.

Okeanos, Okeanews, le 08/02/2015

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Extraits du discours offensif de la nouvelle Présidente du Parlement grec

Les quelques extraits du discours prononcé par Zoé Konstantopoulou, lors de son élection en tant que Présidente du Parlement hellénique.

Mesdames et Messieurs les députés,

Je vous parlerai du fond du cœur, avec la sincérité et la droiture qui conviennent à l’honneur et à la responsabilité qui accompagnent la mission dont vous m’avez chargée mais aussi à l’honneur et à la responsabilité qui accompagnent la confiance dont nos concitoyens ont fait preuve envers chacun et chacune d’entre nous.

Nous sommes ici, non pas parce que le destin l’a voulu, ni par le caprice de quelque hasard, mais parce que nous l’avons choisi et nous avons été choisis et élus par les citoyens de ce pays, le peuple de notre patrie qui est préoccupé et qui lutte pour la dignité, la justice, l’égalité, la démocratie, la liberté. Pour des valeurs et des biens qui furent conquis en versant du sang, par des sacrifices, des luttes dont la marque indélébile se trouve dans l’Histoire de ce pays. Des valeurs et des biens qui, de nos jours, sont contestés ou restreints de la manière la plus cynique qui soit.

(…)

Avec les parlementaires actifs et participants au processus parlementaire. Non pas de simples « applaudisseurs » de prises de position gouvernementales ou de l’opposition.

(…)

En cette période parlementaire, il ne faudra pas répéter des phénomènes de dégénérescence de la fonction législative, tel que l’abus de la procédure d’urgence et des amendements.

Je m’engage, en tant que Présidente du Parlement, que les amendements présentés hors-délai ou sans rapport avec l’objet des dispositions des projets de loi ne seront pas reçus. Pas même, bien entendu, des projets de lois comptant des centaines de pages, sans structure, ou des actes législatifs qui ne remplissent pas les critères constitutionnels[référence directe à tous les textes des mémorandas].

(…)

J’en arrive aux questions de transparence et d’égalité devant la loi. Le Parlement ne peut pas opérer comme un dispositif de blanchiment de scandales ni comme un cimetière de dossiers relevant du droit pénal. Récupérer et examiner des dossiers qui, tout en ayant été transmis au Parlement par la Justice, croupissent des mois, voire, des années durant dans quelques tiroirs sans même être examinés, est un devoir démocratique élémentaire et fondamental tout autant qu’un préalable à la cohésion sociale. Je m’adresse au sens du droit de TOUS les députés, en tant que représentants des citoyens. Et je vous invite à ce que, tous ensemble, nous mettions fin à cette honteuse situation du traitement privilégié qui a LOURDEMENT touché le prestige du Parlement. Par le biais des commissions existantes mais aussi par celui de la constitution des nouveaux organes nécessaires, il est impérieux que le Parlement garantisse la légalité, la transparence et l’examen de tous les dossiers en suspens, quelles que soient les personnes impliquées. Qu’il s’agisse de personnes politiques, parlementaires et gouvernementales, qu’il s’agisse de représentants d’intérêts économiques et de sociétés qui corrompent, comme dans les affaires Siemens et celles concernant les armements. N’oublions pas que pareilles affaires mobilisent également des obligations internationales à l’égard d’autres pays, conformément au cadre juridique international contre la corruption et que notre pays n’a pas épuisé son arsenal juridique afin de rendre justice et de faire ressortir la vérité et révéler le produit du crime. Les représentants d’autres gouvernements connaissent également ces obligations. Ainsi, la déclaration faite hier par le Ministre des finances Allemand, selon lequel « chaque pays veille simplement et uniquement à ses propres affaires », est non pertinente et non fondée.

Notre pays et notre peuple furent les victimes de corruption à grande échelle qui ne se limite pas aux frontières nationales et ne concernent pas uniquement notre « chez nous ». Il est de l’obligation des États européens également de collaborer et de nettoyer notre « chez nous » collectif européen.

(…)

J’en viens à l’initiative la plus importante de la période parlementaire précédente, dont tous ceux qui ont participé sont fiers. La constitution de la commission interpartis du Parlement pour la revendication des réparations de guerre allemandes. À l’initiative de Manolis Glezos et du groupe parlementaire de Syriza et avec la collaboration unanime de tous les groupes parlementaires, cette commission fut constituée et opéra de manière exemplaire, présidée par M. Tzavaras, mais n’a pas pu achever sa mission à cause des élections qui sont intervenues. Durant cette nouvelle période parlementaire, la commission sera très rapidement constituée pour remplir le devoir national qu’est la revendication effective de cette dette morale, historique et financière à l’égard de notre patrie, à l’égard des victimes de la sauvagerie nazie, pour la réparation des catastrophes, le remboursement et l’acquittement du prêt de l’Occupation, pour le dédommagement des victimes et pour la restitution des trésors archéologiques volés.

En tant que Présidente du Parlement, j’entreprendrai aussi, personnellement, toutes les initiatives de sorte que cette dette, qui survit depuis 70 ans, soit remboursée. Des initiatives analogues seront entreprises afin que le Parlement contribue de manière essentielle à promouvoir les revendications d’annulation de la majeure partie de la dette et de l’intégration de clauses de croissance et de garanties d’endiguement de la crise humanitaire et de secours à notre peuple. La diplomatie parlementaire n’est pas un cérémonial ni l’équivalent de relations publiques. Elle est un précieux outil qu’il est nécessaire de mettre en branle, pour ce qui est tant du Président que des commissions de relations internationales ou de commissions d’amitié, de sorte que l’affaire grecque, la demande d’une solution équitable et bénéfique pour notre peuple, par annulation de la dette et moratoire des remboursements soit l’objet d’une campagne interparlementaire de revendication vive, qui s’appuie sur l’information de vive voix des autres parlements et assemblées parlementaires mais aussi des peuples européens qui se mobilisent déjà en solidarité de notre peuple.

(…)

L’Histoire est écrite par les peuples qui espèrent, sont optimistes, contestent, luttent et revendiquent. L’Histoire est également écrite par les dirigeants politiques et les représentants du peuple, les Parlements, quand ils se dressent à la hauteur de leur responsabilité et forment un mur de protection de la société. Les réflexes démocratiques de notre peuple sont actifs et s’expriment de plus en plus clairement. En se référant précisément aux luttes historiques de notre peuple, à la résistance nationale, à la gauche, au mouvement des étudiants, à la lutte contre la dictature, aux mouvements sociaux.

De plus en plus nombreux sont ceux qui prennent conscience du fait qu’ils ne veulent pas vivre à genoux. Ni laisser comme héritage à leurs enfants un nouvel esclavage économique. Les gens retrouvent le sourire, ces derniers jours. Ils retrouvent la ténacité, la confiance en eux, leur dignité. Ils revendiquent d’être partie de l’Histoire et non pas ses spectateurs. Et ils se réunissent sur les places en manifestant pour des principes et des valeurs universels, comme l’ont fait, hier soir, des milliers de citoyens à Athènes mais aussi dans d’autres capitales européennes.

Toute l’Europe, le monde entier, a le regard tourné vers la Grèce avec espoir. Par ce qu’ils savent que la reconnaissance des droits et le soulagement du peuple grec sera une victoire des hommes face aux autocrates financiers et aux nouvelles tyrannies des banques, des marchés, des nouvelles oligarchies qui ont pour objectif de se substituer à la démocratie.

(…)

Respecter la Constitution relève du patriotisme des Grecs qui ont le droit et le devoir de résister par tout moyen à tout qui tente de la violer. C’est à ce patriotisme démocratique constitutionnel par lequel la société grecque est portée, tout au long de son histoire, et dont le Parlement hellénique est imprégné en tant qu’institution, que butera tout qui s’efforcerait de faire du chantage à notre peuple et de contourner la démocratie de notre pays.

Okeanews, 8/2/2015

La vidéo du discours complet :

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La vision de Greenspan

La Grèce devra tôt ou tard sortir de la zone euro, a estimé dimanche l’ancien président de la banque centrale américaine Alan Greenspan. “Il s’agit d’une crise et je ne pense pas qu’elle puisse être résolue facilement, en fait je ne pense pas qu’elle puisse être résolue sans une sortie de la Grèce de la zone euro”, a déclaré l’ancien président de la Réserve fédérale américaine (Fed) à la radio BBC. “Je ne pense pas que cela les aide d’être dans l’euro et je ne vois certainement pas comment cela peut aider le reste de la zone euro. Et je pense qu’il s’agit juste d’une question de temps avant que chacun ne réalise que se séparer est la meilleure stratégie”, a-t-il ajouté. Le président de la Fed de 1987 à 2006 a également estimé que la zone euro ne pouvait poursuivre sous sa forme actuelle sans intégration politique.

Ces commentaires interviennent après un marathon européen peu concluant du Premier ministre grec Alexis Tsipras et du ministre des Finances Yanis Varoufakis, à l’issue duquel Athènes a réitéré sa demande d’un plan-relais d’aide au pays. Cette tournée s’est achevée sur un constat de désaccord persistant entre Athènes et Berlin, qui a enjoint au gouvernement grec de reprendre les négociations avec la troïka de ses créanciers (UE, BCE, FMI).

Source : Le Point

Source: http://www.les-crises.fr/malgre-la-pression-tsipras-ne-recule-pas/


MAE anglais : Poutine, ce “tyran du milieu du XXè siècle”…

Monday 9 February 2015 at 04:50

Vladimir Poutine agit comme un “tyran du milieu du XXe siècle” et devrait “adapter son comportement en fonction du déclin de l’économie russe”, a accusé dimanche le ministre britannique des Affaires étrangères (MAE), Philip Hammond.

Livrer des armes à l’Ukraine n’est pas envisagé “pour l’instant”, mais la position de la Grande-Bretagne à cet égard pourrait changer, a ajouté le chef de la diplomatie britannique sur la chaîne d’information en continu Skynews.

Cet homme a envoyé des troupes franchir une frontière internationale et occuper le territoire d’un autre pays, en se comportant au XXIe siècle comme un tyran du milieu du XXe siècle“, a souligné le ministre en parlant du président russe.

Oui oui, c’est bien le ministre du pays qui a envahi l’Irak (où il y avait peu de Britanniques) d’une façon – hmmmm- un peu plus violente… (enfin, il me semble)

C’est typiquement le genre de 12 poids 12 mesures qui ne peut que faire haïr l’Occident par les autres pays…

“Les nations civilisées ne se comportent pas ainsi au XXIe siècle, a-t-il insisté. Nous vivons dans une société régie par des lois. Nous voulons que le peuple russe fasse partie de la communauté internationale [...] mais nous ne pouvons tolérer ce comportement scandaleux et d’un autre âge de la part du Kremlin.”

M. Hammond s’est exprimé alors qu’un sommet réunissant France, Allemagne, Ukraine et Russie est prévu à Minsk mercredi avec pour tenter de trouver une solution au conflit entre séparatistes prorusses et forces ukrainiennes qui a fait plus de 5.500 morts, dont de nombreux civils, dans l’Est de l’Ukraine.

Le ministre a défendu l’absence de la Grande-Bretagne à la table des négociations en soulignant qu’il n’était “pas pratique d’être à dix pour parler au Kremlin”.

“Ceci est l’une des dernières chances pour la Russie d’éviter de nouveaux dommages significatifs à son économie. M. Poutine doit adapter son comportement en fonction du déclin de l’économie russe“, a-t-il commenté.

“Il n’y a pas de solution militaire à ce conflit. Les Ukrainiens ne peuvent pas vaincre l’armée russe. Il faut trouver une solution politique et M. Poutine doit comprendre que ses actions en Ukraine auront un prix politique et économique“, a-t-il développé, faisant peser la menace de nouvelles sanctions économiques.

Source : AFP (repris ici par La Libre.be ), 8/2/2015

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Je n’aime pas trop jouer au populiste, mais on est d’accord, ces gens sont totalement cinglés ?

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(Rappel) Tiens, sien passant non, on va bientôt regretter Sarko :

L’ancien président français Nicolas Sarkozy, désormais chef de l’opposition de droite à son successeur François Hollande, a estimé samedi qu’on ne pouvait “pas reprocher à la Crimée” d’avoir “choisi la Russie” et a mis en garde contre une nouvelle “guerre froide” avec Moscou.

“La séparation entre l’Europe et la Russie est un drame. Que les Américains la souhaitent, c’est leur droit et c’est leur problème. Nous avons une civilisation en commun avec la Russie. Les intérêts des Américains avec les Russes, ce ne sont pas les intérêts de l’Europe avec la Russie”, a affirmé l’ex-chef de l’Etat lors d’une réunion à Paris des dirigeants du parti de droite UMP qu’il dirige, . “Nous ne voulons pas de la résurgence d’une guerre froide entre l’Europe et la Russie”, a-t-il martelé en évoquant les tensions entre Moscou et les Occidentaux nées du conflit dans l’est de l’Ukraine et de l’annexion de la Crimée par Moscou en mars 2014 après un référendum de la population locale.

“La Crimée a choisi la Russie, on ne peut pas le lui reprocher”, a ajouté M. Sarkozy, estimant par ailleurs qu’”il faut trouver les moyens d’une force d’interposition pour protéger les Russophones d’Ukraine”. “L’Ukraine doit garder sa vocation de pont entre l’Europe et la Russie. Elle n’a pas vocation à entrer dans l’Union européenne”, a-t-il ajouté. (Source AFP)

Source: http://www.les-crises.fr/poutine-ce-tyran-du-milieu-du-xxe-siecle/


L’option Fallouja pour l’Ukraine de l’Est, par Mike Whitney (+ Sapir)

Monday 9 February 2015 at 04:15

La vraie raison pour laquelle Washington se sent menacé par Moscou

« Je veux lancer un appel au peuple ukrainien, aux mères, aux pères, aux sœurs et aux grands-parents : Cessez d’envoyer vos fils et frères au massacre, un massacre inutile et sans merci. Les intérêts du gouvernement ukrainien ne sont pas les vôtres. Je vous en supplie: Reprenez vos esprits. Vous n’êtes pas obligés d’arroser les champs du Donbass avec le sang ukrainien. Ça n’en vaut pas la peine.  »

Alexander Zakharchenko, Premier ministre de la République populaire de Donetsk

Washington a besoin d’une guerre en Ukraine pour atteindre ses objectifs stratégiques. On ne le dira jamais assez.

Les États-Unis veulent faire avancer l’OTAN jusqu’à la frontière occidentale de la Russie. Ils veulent un pont terrestre vers l’Asie pour multiplier les bases militaires étatsuniennes sur tout le continent. Ils veulent contrôler les couloirs de pipelines de la Russie vers l’Europe pour contrôler les revenus de Moscou et s’assurer que le gaz continue d’être négocié en dollars. Et ils veulent une Russie affaiblie et instable qui sera plus vulnérable au changement de régime, à la fragmentation et, finalement, au contrôle étranger. Ces objectifs ne peuvent être atteints pacifiquement, et de fait, si les combats cessaient demain, les sanctions seraient levées peu après et l’économie russe rebondirait. Cela serait-il profitable à Washington?

Bien sûr que non. Cela saperait le plan plus vaste de Washington qui est d’intégrer la Chine et la Russie dans le système économique dominant, le système du dollar. Les éminences grises étatsuniennes se rendent compte que si le système actuel ne peut pas se développer, il s’effondrera. Si la Chine et la Russie ne sont pas mises au pas et convaincues d’accepter un rôle subalterne dans l’ordre mondial mené par les Etats-Unis, Washington perdra sa position de puissance hégémonique mondiale.

C’est la raison pour laquelle les hostilités dans l’Est Ukraine s’intensifient et vont continuer à s’intensifier. C’est la raison pour laquelle le Congrès américain a voté des sanctions plus sévères contre le secteur énergétique russe ainsi que l’envoi d’armes létales à l’armée ukrainienne. C’est la raison pour laquelle Washington a envoyé des instructeurs militaires en Ukraine et se prépare à fournir 3 milliards de dollars de « missiles anti-blindés, de drones de reconnaissance, de blindés Humvees, et de radars capables de repérer l’emplacement des roquettes et de l’artillerie ennemies. » Toutes les actions de Washington n’ont qu’un seul but : intensifier la lutte et intensifier le conflit. Les lourdes pertes subies par l’armée inexpérimentée de l’Ukraine et les terribles souffrances des civils de Lougansk et Donetsk n’ont aucun intérêt pour les stratèges américains. Leur travail est d’éviter la paix à tout prix parce que la paix ferait dérailler le projet américain de pivoter vers l’Asie et de rester la seule superpuissance au monde. Voici un extrait d’un article de WSWS:

« L’objectif ultime des Etats-Unis et ses alliés est de réduire la Russie à une semi-colonie misérable. Cette stratégie, historiquement associée au conseiller à la Sécurité Nationale de l’administration Carter, Zbigniew Brzezinski, National Security Advisor, est à nouveau à l’honneur.

Dans un discours prononcé l’an dernier au Centre Wilson, Brzezinski a appelé Washington à fournir à Kiev des « armes spécialement conçues pour permettre aux Ukrainiens de s’engager dans une guérilla urbaine de résistance. » Conformément à la politique actuellement prônée par l’Institut Brookings et d’autres think tanks qui appellent à armer le régime de Kiev, Brzezinski a appelé à fournir des « armes antichars … des armes appropriées au close-combat urbain. »

La stratégie définie par Brzezinski est certes criminelle d’un point de vue politique – du fait qu’elle piège la Russie dans une guerre urbaine ethnique en Ukraine qui menacerait de mort des millions, sinon des milliards de personnes – mais le fait est qu’elle est parfaitement conforme à la politique qu’il prône contre la Russie depuis des décennies.  » (“L’armement américain de l’Ukraine et le danger d’une troisième guerre mondiale “World Socialist Web Site)

L’aide militaire non létale entraînera inévitablement l’aide létale, les armes sophistiquées, les zones d’exclusion aérienne, l’assistance secrète, les milices privées, les opérations spéciales et les bottes sur le terrain. Nous connaissons déjà tout ça. La population étatsunienne ne s’oppose pas à la guerre, il n’y a pas de mouvement anti-guerre en mesure de paralyser les villes, déclencher une grève générale ou remettre en question le statu quo. Il n’y a donc aucun moyen d’enrayer le bellicisme galopant. Les médias et la classe politique ont donné carte blanche à Obama, il peut poursuivre la guerre comme il veut. Cela augmente la probabilité d’une guerre plus large, cet été après la fonte des neiges.

Bien qu’on ne puisse exclure la possibilité d’une conflagration nucléaire, cela n’affectera pas le projet étatsunien pour le futur proche. Personne ne pense que Poutine va déclencher une guerre nucléaire pour protéger le Donbass, ce qui enlève toute force dissuasive à cette arme.

Et Washington ne s’inquiète pas non plus des coûts. Malgré l’échec des interventions militaires en Afghanistan, en Irak, en Libye et dans une demi-douzaine d’autres pays à travers le monde, les actions américaines montent encore, les investissements étrangers dans les bons du Trésor américain atteignent des records, l’économie des Etats-Unis croît à un rythme supérieur à tous ses concurrents, et le dollar a grimpé d’un impressionnant 13 % face à un panier de devises étrangères depuis juin dernier. Ça n’a rien coûté à l’Amérique de détruire de larges pans de la planète et de tuer plus d’un million de personnes. Pourquoi s’arrêteraient-ils maintenant?

Ils ne s’arrêteront pas, et c’est la raison pour laquelle les combats en Ukraine vont s’intensifier. Voyez ce que dit WSWS:

« Lundi, le New York Times a annoncé que l’administration Obama allait armer directement l’armée ukrainienne et les milices fascistes qui soutiennent le régime de Kiev lui-même soutenu par l’OTAN, après les récents revers que ce régime vient de subir dans la guerre qu’il mène contre les forces séparatistes pro-russes dans l’est de l’Ukraine.

L’article cite un rapport publié conjointement, lundi, par l’Institut Brookings, le Conseil Atlantique et le Conseil de Chicago sur les affaires mondiales, et remis au président Obama, qui conseille la Maison Blanche et l’OTAN sur la meilleure manière d’intensifier la guerre en Ukraine ….

Selon le Times, les responsables américains se rallient tous aux propositions du rapport. Le commandant de l’OTAN en Europe, le général Philip M. Breedlove, le secrétaire à la Défense Chuck Hagel, le secrétaire d’Etat américain John Kerry et le chef d’état-major des armées des États-Unis le général Martin Dempsey soutiennent tous la proposition d‘armer Kiev. La conseillère à la sécurité nationale, Susan Rice, est en train de reconsidérer son opposition à la fourniture d’armes à Kiev, ce qui permettra à Obama d’en faire autant. » (« Washington s’apprêt à armer le régime ukrainien« , World Socialist Web Site).

Vous voyez ce qui est en train de se passer? Les dés sont déjà jetés. Il y aura une guerre avec la Russie parce que c’est ce que l’establishment politique veut. C’est aussi simple que cela. Et tandis que les provocations précédentes n’ont pas réussi à attirer Poutine dans le chaudron ukrainien, cette nouvelle vague de violence – l’offensive printanière – y parviendra sûrement. Poutine ne va pas rester les bras croisés pendant que les suppléants des Etats-Unis réduisent le Donbass en ruines façon Fallouja avec les armes et la logistique étatsuniennes. Il fera ce que tout leader responsable doit faire. Il protégera son peuple. Cela signifie la guerre. (Voir les immenses dégâts que la guerre par procuration d’Obama a déjà causés en Ukraine de l’Est, ici : “Un aperçu de la situation socio-humanitaire sur le territoire de la République populaire de Donetsk à la suite des opérations militaires du 17 janvier 2015).

Guerre asymétrique: la chute des prix du pétrole

Gardez à l’esprit que l’économie russe a déjà souffert des sanctions économiques, de la manipulation du prix du pétrole, et de la brutale attaque contre le rouble. Jusqu’à cette semaine, les médias grand public rejetaient l’idée que les Saoudiens faisaient délibérément chuter les prix du pétrole pour nuire à la Russie. Ils disaient que les Saoudiens cherchaient simplement à conserver leur « part de marché » en maintenant les mêmes niveaux de production et en laisser les prix baisser naturellement. Mais tout cela était de la foutaise et le New York Times l’a finalement reconnu mardi dans un article intitulé: « Le pétrole saoudien est un moyen de pression pour forcer la Russie à cesser de soutenir le président syrien, Assad ». Voici un extrait de l’article:

« L’Arabie saoudite a tenté de faire pression sur le président Vladimir V. Poutine de Russie pour qu’il renonce à soutenir le président Bachar al-Assad de Syrie, en se servant de sa position dominante sur les marchés mondiaux du pétrole au moment où le gouvernement russe souffre des conséquences de la chute des prix du pétrole …

Des officiels saoudiens disent – et c’est ce qu’ils ont dit aux États-Unis – qu’ils peuvent peser sur M. Poutine en raison de leur capacité à réduire l’offre de pétrole et à faire monter les prix … Le moindre signe d’affaiblissement du soutien que la Russie apporte à M. Assad pourrait indiquer que la récente agitation du marché du pétrole a un impact sur la gouvernance mondiale …

L’effet de levier de l’Arabie saoudite dépend de l’importance que Moscou attache à la baisse de ses revenus pétroliers. « Si sa situation est si grave que les Russes ont besoin d’un accord pétrolier tout de suite, alors les Saoudiens sont dans en bonne position pour leur faire payer un prix géopolitique aussi », a déclaré F. Gregory Gause III, un spécialiste du Moyen-Orient de l’école de gouvernement et de service publique Texas A & Bush (« Le pétrole saoudien est considéré comme un moyen de pression pour forcer la Russie à cesser de soutenir le Syrien Assad», New York Times).

Les Saoudiens « pensent donc qu’ils ont une certaine influence sur M. Poutine en raison de leur capacité » à manipuler les prix?

Tout est dit, n’est-ce pas?

Ce qui est intéressant dans cet article c’est la façon dont il contredit des articles précédents du Times. Par exemple, il y a seulement deux semaines, dans un article intitulé « Qui dominera le marché du pétrole? », l’auteur ne voyait aucune raison d’ordre politique à l’action de l’Arabie. Selon lui, les Saoudiens avaient juste peur « de perdre des parts de marché de façon permanente » s’ils réduisaient la production et maintenaient les prix élevés. Le Times a fait maintenant volte-face et rejoint les soi-disant fous de la conspiration qui disent que les prix ont été manipulés pour des raisons politiques. En fait, la chute brutale des prix n’avait rien à voir avec les pressions déflationnistes, la dynamique de l’offre et de la demande ou d’autres forces mystérieuses du marché. C’était de la politique à 100 %.

L’attaque sur le rouble était tout aussi politique, bien que ses péripéties soient beaucoup plus sommaires. Il y a une interview d’Alistair Crooke qui intéressera ceux qui se demandent comment la  » domination tous azimuth » du Pentagone s’applique à la guerre financière. Selon Crooke:

« … Avec l’Ukraine, nous sommes entrés dans une nouvelle ère: Nous assistons à un conflit géostratégique de première importance qui est en réalité une guerre géo-financière entre les Etats-Unis et la Russie. Nous avons l’effondrement des prix du pétrole; nous avons les guerres de devises; nous avons le « court-circuit » artificiel – la vente à découvert – du rouble. Nous avons bien une guerre géo-financière, et la première conséquence de cette guerre géo-financière, c’est la formation d’une alliance étroite entre la Russie et la Chine.

La Chine a compris que la Russie était le premier domino; si la Russie tombe, la Chine suivra. Ces deux états sont en train de créer ensemble un système financier parallèle, détaché du système financier occidental.

Depuis quelque temps, l’ordre international est structuré autour de l’Organisation des Nations Unies et du corpus du droit international, mais l’Occident a de plus en plus tendance à contourner les Nations Unies, qui est pourtant l’institution destinée à maintenir l’ordre international, et à recourir plutôt aux sanctions économiques pour faire pression sur certains pays. Nous avons un système financier basé sur le dollar, et en se servant du fait qu’ils contrôlent toutes les transactions en dollars, les États-Unis ont réussi à contourner les vieux outils de la diplomatie et l’ONU – pour atteindre leurs objectifs.

De fait, ce monopole de la monnaie de réserve est devenu l’unique outil des Etats-Unis – jusqu’à remplacer l’action multilatérale de l’ONU. Les États-Unis revendiquent le contrôle juridique de toutes les transactions libellées en dollars partout dans le monde. Et la plupart des transactions internationales commerciales ou autres sont libellés en dollars. C’est ce qu’on appelle la financiarisation de l’ordre mondial: L’ordre international dépend davantage aujourd’hui du contrôle exercé par le Trésor américain et la Réserve fédérale que de l’ONU » (“La Turquie pourrait devenir l’otage de l’EIIL tout comme le Pakistan avant elle“, Today’s Zaman).

La guerre financière, la guerre asymétrique, la guerre de quatrième génération, la guerre de l’espace, la guerre de l’information, la guerre nucléaire, la guerre au laser, chimique et biologique : Les États-Unis ont élargi leur arsenal bien au-delà de la gamme traditionnelle des armes conventionnelles. Leur but, bien sûr, est de préserver l’ordre mondial post-1991 (date de la dissolution de l’Union soviétique) et de maintenir leur domination absolue. L’émergence d’un ordre mondial multipolaire dirigé par Moscou menace gravement l’hégémonie de Washington. Le premier affrontement d’importance entre ces deux visions concurrentes du monde aura probablement lieu cet été dans l’est de l’Ukraine. Que Dieu nous vienne en aide !

Note: Les Forces armées de Novorussie (NAF) tiennent actuellement 8 000 soldats de l’armée régulière ukrainienne encerclés à Debaltsevo, dans l’est de l’Ukraine. C’est très important, bien que les médias (de manière prévisible) aient pris soin de ne pas en faire de grands titres.

Des corridors d’évacuation ont été ouverts pour permettre aux civils de quitter la zone. Les combats pourraient éclater à tout moment. À l’heure actuelle, il semble qu’une bonne partie de l’armée nazie de Kiev pourrait être détruite d’un seul coup d’un seul. C’est pourquoi Merkel et Hollande ont pris l’avion pour Moscou pour discuter d’urgence avec Poutine. La paix ne les intéresse pas le moins du monde. Ce qu’iIs veulent, c’est tout simplement sauver leur armée par procuration de l’anéantissement.

Je pense que Poutine va intervenir en faveur des soldats ukrainiens, mais le commandant Zakharchenko refusera sans doute. S’il laisse ces soldats sortir du chaudron maintenant, quelle assurance a-t-il qu’ils ne seront pas de retour dans un mois ou deux avec des armes ultra perfectionnées fournies par nos va-t-en guerre du congrès et de la Maison Blanche?

Alors dîtes-moi : quel choix Zakharchenko a-t-il réellement? Si ses camarades sont tués dans de futurs combats parce qu’il a laissé l’armée de Kiev s’échapper, à qui pourra-t-il en vouloir sinon à lui-même?

Il n’y a pas de bon choix.

Source : Marc Whitney, pour Counter Punch, traduit en français par Dominique Muselet pour Arrêt sur Info

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Moscou, Munich et Minsk

8 février 2015

Par

 

Le processus de négociations sur l’Ukraine, dont la visite à Moscou de Mme Merkel et de M. François Hollande le 6 février a été un épisode, est clairement appelé à continuer. Ces deux dirigeants ont prévu de se rencontrer, le mercredi 11 février, à Minsk avec le Président Poutine et le Président de l’Ukraine, M. Poroshenko[1]. Les responsables des Républiques de Donetsk et de Lougansk seront aussi de la partie. On peut donc s’attendre à une négociation enfin sérieuse. Mais que la route est longue qui va de Moscou à Munich et de Munich à Minsk. Cette route nous renvoie aux pires moments de la Guerre Froide, que l’on croyait défunte.

Un parfum de guerre froide ?

Car c’est dans une situation très dégradée que cette négociation va s’engager. Pourtant, il est bon qu’elle s’engage. L’urgence humanitaire dans le Donbass l’exige, et la situation désespérée des troupes de Kiev l’impose. Mais, rien ne dit qu’elle aboutisse. Pour cela, il faudra que le Président Poroshenko fasse des concessions substantielles, qui pourraient le mettre en difficulté dès son retour à Kiev. Et rien ne dit qu’il soit de l’intérêt des Etats-Unis que les combats s’arrêtent.

Le Président François Hollande a dit, samedi 7 février à Tulle, une chose juste : la seule alternative serait la guerre, ou plus exactement la poursuite de cette guerre civile que Kiev camoufle sous le nom « d’Opération Anti-Terroristes ». On ne peut qu’adhérer à ce constat. Le sommet sur la sécurité, qui s’est tenu lui aussi le samedi 7 février à Munich, a cependant bien montré à quel point nous en sommes arrivés. Très clairement, une partie des journalistes américains et britanniques présents ont tout cherché pour ressusciter un climat de guerre froide. Dans une atmosphère délétère, faite d’accusations insensées, on a plus cherché à mettre la Russie en accusation qu’à avancer vers un accord. Le « show » pathétique du Président ukrainien, M. Poroshenko, agitant des « passeports » russes, a participé de cette atmosphère délétère. Pourtant, dans son allocution, le Ministre Russe des Affaires Etrangères, M. Sergueï Lavrov, a dit des choses importantes, qu’il faut écouter et surtout entendre, même si l’on ne partage pas son point de vue[2].

Autisme occidental.

Un des points qui ressort de cette conférence est l’autisme des dirigeants occidentaux au discours tenus par les responsables russes depuis 2007. La presse occidentale peut évoquer un soi-disant autisme de Vladimir Poutine[3]. On sait bien qui, en réalité, se refuse à entendre l’autre. Vladimir Poutine s’est exprimé avec constance sur la désintégration du cadre de sécurité résultant de la politique américaine, telle qu’elle était menée depuis 1995-1996. Jamais on a pris ces propos au sérieux. La crise actuelle en résulte dans une large mesure.

La vision politique de l’environnement international du XXIème siècle qui caractérise Vladimir Poutine et ses conseillers est nettement plus pessimiste que celle de ses prédécesseurs[4]. Elle tire le bilan de l’intervention de l’OTAN au Kosovo et de l’intervention américaine en Irak en 2003[5]. Si l’on reprend son discours de Munich, prononcé le 10 février 2007, et qui est un document fondateur de la politique étrangère russe, on remarque qu’il y fait le constat suivant :

« Le monde unipolaire proposé après la guerre froide ne s’est pas non plus réalisé. Certes, l’histoire de l’humanité a connu des périodes d’unipolarité et d’aspiration à la domination mondiale. L’histoire de l’humanité en a vu de toutes sortes. Qu’est ce qu’un monde unipolaire? Malgré toutes les tentatives d’embellir ce terme, il ne signifie en pratique qu’une seule chose: c’est un seul centre de pouvoir, un seul centre de force et un seul centre de décision. C’est le monde d’un unique maître, d’un unique souverain. En fin de compte, cela est fatal à tous ceux qui se trouvent au sein de ce système aussi bien qu’au souverain lui-même, qui se détruira de l’intérieur.

  Bien entendu, cela n’a rien à voir avec la démocratie, car la démocratie, c’est, comme on le sait, le pouvoir de la majorité qui prend en considération les intérêts et les opinions de la minorité. A propos, on donne constamment des leçons de démocratie à la Russie. Mais ceux qui le font ne veulent pas, on ne sait pourquoi, eux-mêmes apprendre. J’estime que le modèle unipolaire n’est pas seulement inadmissible pour le monde contemporain, mais qu’il est même tout à fait impossible. Non seulement parce que, dans les conditions d’un leader unique, le monde contemporain (je tiens à le souligner: contemporain) manquera de ressources militaro-politiques et économiques. Mais, et c’est encore plus important, ce modèle est inefficace, car il ne peut en aucun cas reposer sur la base morale et éthique de la civilisation contemporaine »[6].

Ce pessimisme incite donc le pouvoir russe à prendre ses précautions et à se prémunir contre ce qu’il appelle « l’aventurisme » des Etats-Unis. Cela le conduit aussi à souhaiter une réhabilitation rapide des capacités technologiques et industrielles du secteur des industries à fort contenu technologique et de l’armement. En fait, de là date la priorité dont bénéficient ces secteurs. La politique économique devient alors pour une part déterminée par l’analyse de la situation internationale. Comme pour la Chine on peut constater ici aussi que les décisions économiques sont dictées par une analyse politique. En Russie aussi, depuis 2000, la politique est au poste de commandes. Il faudra bien un jour se résoudre à l’admettre.

L’urgence d’un réel cessez-le-feu.

Mais, pour l’instant, les esprits sont focalisés sur la négociation en cours. Il faut donc en comprendre les blocages, qu’ils soient immédiats ou de plus long terme. Le premier porte sur les conditions d’un cessez-le-feu dont l’urgence s’impose. L’idée de revenir aux accords de Minsk, si elle peut se comprendre d’un strict point de vue diplomatique, est absurde sur le terrain. Ces accords n’ont jamais été appliqués et ne pouvaient l’être. Les positions des forces insurgées comme celles de l’armée de Kiev étaient trop imbriquées pour qu’il puisse en résulter un cessez-le-feu vérifiable. Les déclarations du Président Poroshenko à ce sujet cachent mal sa volonté de voir effacer sur la table de négociations la défaite militaire que ses forces ont subie. Il ne peut en être ainsi.

Aujourd’hui, avec l’élimination progressive des « poches » contrôlées par l’armée de Kiev, un cessez-le-feu sur la ligne actuelle des combats est beaucoup plus logique. Il faut ici dire cette triste vérité. Il aura fallu une nouvelle défaite militaire des forces de Kiev pour rendre peut-être possible un cessez-le-feu. Telle était la constatation que je faisais il y a déjà plusieurs jours[7].

Kiev ne peut plus aujourd’hui se masquer la réalité : il n’y aura pas d’issue militaire dans ce conflit, point qu’a d’ailleurs rappelé la Chancelière Angela Merkel à Munich. Il est donc urgent que des négociations s’ouvrent entre Kiev et les insurgés, et que ces négociations soient garanties tant par l’Union Européenne, la Russie que les Etats-Unis. A cet égard, vouloir inclure la Russie et non les insurgés n’a aucun sens. C’est faire fi de l’indépendance acquise par les gens de Donetsk et de Lougansk. C’est ne pas comprendre que Poutine ne peut exercer une pression trop forte sur eux, sous peine de se voir rejeté par une large majorité de la société russe qui soutient les insurgés.

Les conditions de la viabilité d’un cessez-le-feu

Mais, un cessez-le-feu ne vaut que s’il est respecté, et en particulier si cessent les bombardements meurtriers sur les civils dont les forces de Kiev se rendent coupables. Il faut ici redire que le comportement sur le terrain de certaines des forces de Kiev relève du crime de guerre. Ces bombardements ont été trop systématiques pour qu’il s’agisse d’erreurs de tir. Rappelons que les forces de Kiev utilisent des bombes et des obus au phosphore, des bombes à fragmentation[8], pour des attaques contre la population civile. Des missiles tactiques de type « OTR-21 Totchka-U » ont même été utilisés[9]. C’est dire l’urgence qu’il y a à aboutir à un cessez-le-feu qui soit réellement respecté.

Pour cela, il faut impérativement une force d’interposition. Cette force sera chargée de vérifier qu’il n’y a aucune arme lourde d’un côté et de l’autre à une distance de plusieurs dizaines de kilomètres de la ligne de cessez-le-feu. Cette force ne peut à l’évidence inclure ni l’armée de Kiev, ni aucun des pays de l’OTAN, car cette organisation est désormais partie prenante du conflit, ni la Russie.

Cela fait près de 6 mois que je dis et j’écris que seule une force de Casques Bleus des Nations Unies peut avoir l’autorité pour imposer un cessez-le-feu[10]. Il faudra bien un jour en convenir. On peut imaginer quelle en serait la composition, sans doute des pays des BRICS, mais ayant de bonnes relations avec les Etats-Unis. Cela désigne deux pays : l’Inde et la République d’Afrique du Sud. On doit donc faire pression sur les Etats-Unis et sur le gouvernement de Kiev pour qu’ils acceptent une telle solution. Aujourd’hui, seule l’organisation des Nations Unies a la légitimité pour imposer une solution mettant fin au conflit armé. Le plus vite cela sera reconnu le mieux cela vaudra pour tout le monde. C’est aussi l’une des leçons que l’on peut tirer des dix dernières années. A chaque fois que les Etats-Unis ont imposé que l’on contourne les Nations-Unies, des désastres sont survenus. Il faut, ici encore, se souvenir des termes utilisés en 2007 par le Président Poutine à Munich :

« Quel en est le résultat [ d’une action hors du cadre des Nations Unies]? Les actions unilatérales, souvent illégitimes, n’ont réglé aucun problème. Bien plus, elles ont entraîné de nouvelles tragédies humaines et de nouveaux foyers de tension. Jugez par vous-mêmes: les guerres, les conflits locaux et régionaux n’ont pas diminué. (…)Nous sommes témoins d’un mépris de plus en plus grand des principes fondamentaux du droit international. Bien plus, certaines normes et, en fait, presque tout le système du droit d’un seul Etat, avant tout, bien entendu, des Etats-Unis, a débordé de ses frontières nationales dans tous les domaines: dans l’économie, la politique et dans la sphère humanitaire, et est imposé à d’autres Etats. A qui cela peut-il convenir? »[11].

Quelles solutions politiques ?

Il faudra, ensuite mais ensuite seulement, aborder l’épineuse question de l’issue politique de cette crise. La solution d’un fédéralisme « simple », qui eut été possible en mars ou bien en avril 2014 est aujourd’hui morte. La violence des forces de Kiev et les milliers de morts de Donetsk et Lougansk l’ont rendue impossible. Il faut ici méditer sur ce fait : ce qui aurait été possible au début du conflit, sans l’usage disproportionné de la violence dont les forces de Kiev se sont rendues coupable ne l’est plus désormais. On peut alors penser à une solution du type de celle qui a été adoptée en Irak pour les régions kurdes : une république autonome dans le cadre de l’Ukraine. Cette solution, même si elle ne correspond pas à ce que souhaitent les dirigeants de Donetsk ou de Lougansk, est bien meilleure qu’une « indépendance » sans reconnaissance internationale. Mais il faut aussi penser au statut de l’Ukraine elle-même.

Là, nous avons une contradiction entre le principe de souveraineté, que nul ne veut remettre en cause, et la réalité géopolitique. On comprend qu’une Ukraine militairement hostile à la Russie est une menace directe pour cette dernière. Mais, l’Ukraine ne peut fonctionner économiquement sans la Russie. Et là se trouve sans doute la solution. L’Ukraine doit volontairement accepter un statut de neutralité, que ce soit par rapport à une alliance militaire (comme l’OTAN) ou dans des relations économiques (tant par rapport à l’UE qu’à l’Union Eurasienne). Cette décision doit alors s’accompagner de la déclaration par la Russie du renouvellement des contrats gaziers et pétroliers ainsi que de celle des Etats-Unis s’engageant à ne pas conclure une quelconque alliance militaire avec l’Ukraine. Il est donc essentiel d’impliquer directement les Etats-Unis dans cet accord. On peut comprendre que la Russie ne se contente pas de l’engagement de l’Allemagne et de la France à ne pas admettre l’Ukraine dans l’OTAN. Cet engagement pourrait être tourné par un traité bilatéral entre l’Ukraine et les Etats-Unis.

Quel futur pour l’OTAN ?

Enfin, cela pose la question des institutions de sécurité en Europe. Très clairement l’OTAN, qui n’a su ni voulu s’adapter à la nouvelle configuration géostratégique datant de la fin de l’URSS a donné ses preuves de nocivité. Cette organisation, datant de 1949, avait à sa fondation trois objectifs : garantir les pays membres contre une agression soviétique, garantir ces mêmes pays contre une résurgence du militarisme allemand, et garantir la présence en Europe des Etats-Unis. Ces trois raisons sont à l’évidence caduques. Cette organisation doit donc soit évoluer, et admettre la Russie en son sein, soit disparaître, et être remplacée par une nouvelle organisation de sécurité cette fois réellement européenne.


[1] http://lci.tf1.fr/monde/europe/rencontre-hollande-merkel-poutine-et-porochenko-mercredi-8560786.html

[2] RT : « Lavrov: US escalated Ukraine crisis at every stage, blamed Russia », 7 février 2015, http://rt.com/news/230219-lavrov-munich-speech-ukraine/

[3] Viallèle A., « Vladimir Poutine serait autiste Asperger ? Ne jouons pas avec des diagnostics hasardeux », L’Obs, 6 février 2015, http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1320249-vladimir-poutine-serait-autiste-asperger-ne-jouons-pas-avec-des-diagnostics-hasardeux.html

[4] Voir la déclaration du président Russe lors de la conférence sur la sécurité qui s’est tenue à Munich le 10 février 2007 et dont le texte a été traduit dans La Lettre Sentinel, n°43, mars 2007.

[5] Points que j’ai développés dans Sapir J., Le Nouveau XXIème Siècle, Le Seuil, Paris, 2008.

[6] Voir, La Lettre Sentinel, n°43, mars 2007.

[7] Sapir J., « Nouvelles du Donbass », note publiée sur Russeurope, le 2 février 2015, http://russeurope.hypotheses.org/3381

[8] http://fr.sputniknews.com/international/20150206/1014397894.html

[9] https://www.youtube.com/watch?v=y9-8KvtfjZA

[10] Sapir J., « Ukraine : Cease-Fire ? », note publiée sur Russeurope, le 3 septembre 2014, http://russeurope.hypotheses.org/2770

[11] Voir, La Lettre Sentinel, n°43, mars 2007.

 

Source: http://www.les-crises.fr/l-option-fallouja-pour-lukraine-de-lest-par-mike-whitney/


[Reprises] Non, nous ne sommes pas en guerre !

Monday 9 February 2015 at 03:07

Je me permets de rappeler que :
1/ on est en guerre contre une entité constituée : pas contre le terrorisme, l’islam ou l’oxygène…
2/ la démocratie n’est pas compatible avec la guerre
3/ les vraies guerres c’est en général nous qui les déclenchons…

Je ne suis pas en guerre

Cela vient sans doute d’avoir été biberonné (entre autres lectures) à Charlie Hebdo du temps où ce journal n’était pas obsédé par l’Islam, mais la vision de l’Assemblée chantant d’une voix mâle La Marseillaise pour répandre un sang impur, l’écoute de l’applaudissement à tout rompre de la police, la lecture du discours de Manuel Valls ponctué de « barbarie »« guerre » et autres mesures exceptionnelles contre le terrorisme, tout cela soulève un sentiment à mi-chemin entre le malaise et le haut-le-coeur. Comme si la classe politique et médiatique volait l’expression populaire de dimanche, qui mettait d’abord en avant la liberté d’expression, les crayons, la parole.

Tous ces gens, dimanche, voulaient-ils seulement des policiers, des soldats dans les rues, de l’ordre, de l’autorité, de l’épuration, de la guerre ? Et bien, si c’était cela, je ne serai pas d’accord avec eux.

Immense malaise de n’entendre quasiment que les mots de police, de traque, de renseignement, de prison, d’isolement, de protection. Immense malaise de voir dix mille soldats déployés, en plus de ceux qui trainent dans les rues déjà depuis des années. Ils ne sont pas là pour protéger quoi que ce soit – ont-ils empêché les assassinats du 7 janvier ? -, mais pour nous habituer à trouver normal qu’il y ait des soldats dans les rues. Comme dans… un Etat militaire, un Etat policier.

Immense malaise de l’absence presque totale de réflexion, au sens de retour sur soi. Comme s’il ne s’agissait que d’un péril extérieur, étranger, indicible. Immense malaise devant l’incapacité à poser cette question simple : qu’est-ce qui a conduit MM. Kouachi et Coulibaly à commettre de tels actes ? L’incapacité à oublier deux faits simples : ces hommes étaient français. Ils sont nés du sein de cette nation que l’on célèbre avec des mots vengeurs. Et puis cet autre fait simple, que rappelait Stéphane Lavignotte : « Les assassins ont fait quelque chose d’inhumain, de monstrueux. Mais ils restent des humains. » Oui, ce sont des humains, et l’on n’entend presque rien, ces jours-ci, qui nous aident à réfléchir à ce qui pousse des humains à commettre de tels actes.

Je ne sais pas. Mais je sais que nous ne saurons pas si, en nous obsédant sur les policiers, la guerre, les prisons, nous ne parlons pas d’écoles, de villes, de culture. De racines, de déracinement, d’exclusions, de solitude, de lien social.

Et quand j’entends l’unanimité de ces politiciens qui parlent de guerre - Manuel Valls : « La France est en guerre contre le terrorisme, le djihadisme et l’islamisme radical » -, je rappelle qu’il y a une autre guerre, décrite sans fard par le milliardaire Warren Buffet : « Tout va très bien pour les riches dans ce pays, nous n’avons jamais été aussi prospères. C’est une guerre de classes, et c’est ma classe qui est en train de gagner. » Vraiment, n’y a-t-il rien à voir, pas un fil d’explication, entre le crime de MM. Kouachi et les politiques prônées par MM. Bolloré, Arnault, Pinault, Dassault, Mulliez,… ? Rien à voir entre la poussée de « l’islamisme radical » et le fait que 85 personnes possèdent autant que trois milliards d’autres humains ? Rien à voir entre la poursuite obstinée des politiques néo-libérales et la déshérence de l’école, des systèmes de santé, des quartiers ?

Il y a une guerre des riches contre le peuple. Et il faut poser la question inconvenante de savoir si une partie du peuple ne répond pas d’une façon que n’avait pas prévue les traités révolutionnaires.

Et puis, entendre ces députés blancs, mâles, français, faire comme si on nous faisait la guerre. Mais, au fait, qui fait la guerre à qui ? Qui a commencé dans ce jeu fou ? Qui a des troupes au Mali, au Centrafrique, en Irak ? Qui n’a rien dit quand l’Etat d’Israël a mené une guerre sans pitié à Gaza, en juillet dernier,tuant 1 800 Palestiniens dont 65 % de civils ? Qui est intervenu en Libye en 2011 ? Et combien de personnes les drones de M. Obama ont-ils tué ? Etc. dans cette liste sans fin : il ne s’agit pas ici, en deux phrases, de désigner les coupables et les victimes, mais de rappeler qu’il est impossible de déterminer dans les guerres qui a raison et qui a tort, puisque les torts sont partagés.

Eh bien, il faut pouvoir dire : non, je ne suis pas en guerre ; non, je ne considère pas que le problème islamique est le plus important de l’époque ; non, je n’admets pas une unanimité qui couvrirait une inégalité stupéfiante ; non, je ne ne pense pas que nous avons besoin de plus de policiers et de prisons.

Et oui, je peux dire : Nous voulons la paix ; nous considérons que l’essentiel aujourd’hui est la crise écologique ; nous ne retrouverons l’unité que quand les inégalités seront réduites ; nous avons besoin de plus d’artistes et d’écoles.

Source : Hervé Kempf, pour Reporterre


Non, nous ne sommes pas en guerre

Le discours guerrier que certains politiques commencent à employer recèle bien des menaces. Sur nos libertés d’abord, certains voulant clairement les rogner au nom de la sécurité, alors qu’une nouvelle loi antiterroriste est adoptée tous les deux ans depuis le 11 septembre 2001 ! En déployant massivement l’armée sur le territoire, d’autres confondent opérations militaires et enquêtes de police judiciaire : « Et bien non : le territoire national n’est ni le désert sahélien, ni des régions du Yémen », écrit Eros Sana, collaborateur de Basta ! qui a réalisé des reportages photos au Mali, en Egypte ou en Palestine.
Nous ne sommes pas en guerre. N’en déplaise à François Fillon, Nicolas Sarkozy, Manuel Valls et François Hollande qui ont tous répété le contraire, nous ne sommes pas en guerre.

Nous ne sommes pas en guerre, car accepter d’être en guerre, c’est accepter de tracer une ligne indépassable entre « eux » et « nous », une ligne entre des « ennemis de l’intérieur » et le reste de la nation. C’est accepter une fracture insurmontable entre citoyennes et citoyens de ce pays. Or le rôle de dirigeants politiques qui se veulent à la hauteur des événements qui frappent la France est un rôle d’union du peuple, plutôt que de division.

Depuis 1986, quinze lois antiterroristes ont été adoptées

Nous ne sommes pas en guerre, car si l’on se base du point de vue du droit, national comme international, les trois personnes qui ont lâchement attaqué et exécuté les membres de l’équipe deCharlie Hebdo, les trois policiers ainsi que les quatre personnes de confession juive, ne relèvent pas du droit de la guerre. Les frères Kouachi et Amedi Coulibaly relèvent du droit pénal : ce sont ni plus ni moins que des criminels, des malfaiteurs. Oui, des malfaiteurs, même en relation avec une entreprise terroriste. Le droit pénal français en matière de lutte antiterroriste relève d’un régime juridique spécifique qui déroge en grande partie au droit commun et qui comporte un nombre impressionnant de mesures en matière de capacité d’investigation et de répression.

Cette législation en matière de lutte antiterroriste est l’une des plus fournies : depuis 1986, quinze lois ont été adoptées en la matière, dont sept depuis le 11 septembre 2001 – soit une nouvelle loi tous les deux ans ! Les frères Kouachi et Amedi Coulibaly peuvent être qualifiés de terroristes, de criminels, de personnes immondes, mais ce ne sont pas les guerriers d’une cinquième colonne fantasmée, au sein de notre population, cachée dans nos campagnes et dans nos banlieues, hébergée dans nos tours ou dans nos maisons.

Ne pas confondre opérations militaires et enquêtes de police judiciaire

Nous ne sommes pas en guerre. Prétendre le contraire revient à faire croire qu’entre les ennemis hors des frontières de la France et les criminels présents dans nos frontières, il n’y a aucune différence. Il existerait un continuum entre « opérations militaires extérieures » et « opérations militaires intérieures ». C’est d’ailleurs dans ce sens que Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, a justifié le déploiement de 10 500 soldats sur le territoire français. C’est « une opération militaire intérieure », déclare-t-il, avant d’ajouter qu’« il n’y a pas de rupture entre la menace extérieure et la menace intérieure » et de faire le lien entre la mobilisation du 11 janvier 2015 en France et le début de l’engagement militaire au Mali, le 13 janvier 2013. « Aujourd’hui, les armées sont là parce que c’est la même menace, pour nos armées c’est le même combat. »

Eh bien non : le territoire national n’est ni le désert sahélien, ni des régions du Yémen. Mener des opérations militaires à l’étranger, à l’appel d’un État ou dans le cadre de l’Onu, est une chose. Lutter contre le terrorisme ou des gangsters influencés idéologiquement en menant des opérations de police judiciaire sur le territoire national en est une autre. Appliquer cet amalgame entre territoire national et opérations extérieures, revient à reprendre la rhétorique de George W. Bush et des néo-conservateurs nord-américains avec leur « war on terror », et risquer les graves conséquences que l’on sait, avec l’invasion de l’Afghanistan puis de l’Irak.

Les risques mortels d’une « Union sacrée » au service de la guerre

Nous ne sommes pas en guerre. « Entrer en guerre » signifierait accepter ce que les terroristes tentent justement d’imposer à notre société et à ses institutions : la division, la suspension ou la fin de plusieurs de nos libertés fondamentales, la fin de notre État de droit, la fin de notre démocratie. Entrer en guerre, adopter un état d’esprit guerrier – une « union sacrée » –, ne pas seulement répondre avec le déjà très étoffé arsenal répressif juridique et administratif, y ajouter des mesures « exceptionnelles », c’est abandonner ce qui fait de la France ce qu’elle est, un État de droit. On ne peut répondre à ces actes terroristes par l’instauration d’un régime d’exception. Pour chacun d’entre nous, ce serait sacrifier, consciemment ou non, une grande partie de nos libertés individuelles et de nos droits collectifs, sur l’autel d’une illusion sécuritaire. On combat les terroristes. On ne peut malheureusement pas éradiquer le terrorisme.

Certains comparent le choc des attaques qui ont commencé le 7 janvier 2014 au choc des attentats du 11 septembre 2001. Je ne suis pas partisan de cette comparaison. Tout d’abord parce que les deux événements n’ont rien à voir en terme de préparation, d’acteurs, de symboles et d’intensité, ensuite parce que le contexte n’est pas le même. Enfin parce que la France n’est pas les États-Unis. Cependant, si l’on part du postulat que les deux évènements sont comparables, référons-nous aux conséquences qu’ont eues les attentats du 11 septembre sur la société américaine, sur la démocratie américaine et sur les libertés fondamentales des citoyennes et citoyens américains. En comparant ces deux événements et la cohorte des (mauvaises) décisions qui ont suivi, nous devons avant tout refuser que ne se dérobent sous nos pieds nos libertés fondamentales à travers des lois d’exception ou des « mesures exceptionnelles » devenues permanentes. Nous devons refuser, comme cela a été le cas pour les États-Unis de George Bush, que tout se règle par des moyens exclusivement guerriers.

Davantage s’inspirer d’Oslo que de Washington

Le 22 juillet 2011, la Norvège était frappée par deux attentats commis par un individu se réclamant du christianisme, qui assassinait 77 personnes pour leurs opinions politiques. A la suite de cette tragédie, conscient de la gravité de ces évènements ainsi que des limites du modèle de société, le Premier ministre norvégien déclarait :« La réponse de la Norvège à cette violence sera plus de démocratie, plus de tolérance et une plus grand implication politique. » Nos dirigeants politiques devraient davantage s’inspirer d’Oslo que de Washington. Il est primordial d’accompagner les grands discours sur « l’union nationale » d’une certaine forme d’humilité. L’humilité de reconnaître que notre société a également trop longtemps produit sur l’ensemble du territoire inégalités et violences, discriminations, racisme, antisémitisme, islamophobie, négrophobie, sexisme, homophobie…

Partout, des centaines de milliers de personnes ont clamé « je suis Charlie », en particulier ce dimanche 11 janvier. Une affirmation polysémique : chacune et chacun y projetant le sens qu’il veut y donner. Les dirigeants de notre pays ont, eux, pour tâche de donner un sens collectif à « Nous sommes Charlie ». Ils doivent avant tout répéter que nous sommes dans un État de droit, que nous sommes une société de justice, une société qui, face à l’ignominie, résiste mais ne sombre pas, que nous sommes une société où tous et toutes ont leur place, athées comme croyants, chrétiens, juifs comme musulmans. Une France qui « sans les juifs de France n’est pas la France », mais aussi une France qui, sans les musulmans de France n’est plus la France. Ceux qui nous gouvernent doivent comprendre que nous devons guérir ensemble car nous avons été blessés ensemble.

Source : Eros Sana, pour Le Grand Soir


Non, nous ne sommes pas en guerre !

Non, Monsieur VALLS, nous ne sommes pas en guerre !Non, la France n’est pas en guerre… suite aux meurtres atroces de la semaine dernière !

Je ne sais pas si vous vous promenez dans les rues ou si vous avez regardé la télévision ces derniers jours, Monsieur le Premier Ministre ?! Mais les millions de français et d’étrangers de toutes origines, de toutes confessions religieuses, de toutes convictions politiques et philosophiques… qui sont sortis dans les rues, se sont réunis avec dignité et ont défilé dans le plus grand des respects… l’ont fait contre la barbarie et pour défendre les valeurs de notre République, notamment la liberté d’expression ! Pas pour je ne sais trop quelle guerre dans laquelle vous voulez nous emmener ?!

Pas à un moment, ces millions de manifestants n’ont exprimé des propos guerriers, des envies d’en découdre avec tel pays, telle population ou telle communauté religieuse… Non, Monsieur VALLS, les marées humaines de ces derniers jours, à travers la France et le monde, ont renvoyé des images et des messages de solidarité, de fraternité, d’amour et de liberté… comme plus belle réponse à l’obscurantisme et à la barbarie de ces trois meurtriers !

Il n’y a que vous, les politiciens et les élites de nos sociétés occidentales, représentants de l’oligarchie capitaliste, qui parlez de guerre, qui voulez aller coûte-que-coûte faire la guerre ! Je dois dire, et c’est bien malheureux, qu’il y a un consensus presque unanime de vous tous, nos dirigeants, pour “jouer aux petits soldats”… peut-être parce que vous ne serez jamais sur le front !

Effectivement, dans votre cortège de personnalités, dimanche dernier, nombre d’entre vous à l’esprit belliqueux, êtes impliqués voire même à l’origine de la plupart des conflits militaires à travers le monde… Effectivement, certains ont même le sang de nombreuses victimes innocentes sur leurs mains… Effectivement, certains de vos invités sont les représentants de pays qui bafouent les valeurs inscrites dans la Constitution Française telles que la liberté d’expression, la liberté de croyance, la liberté de pensée… de régimes monarchiques féodaux aux valeurs opposées à celles de notre République ! D’autres pratiquent même des politiques d’apartheid, la torture, des emprisonnements voire des exécutions arbitraires !

Peut-être que vous, dirigeants qui vivez dans des palais dorés et surprotégés, qui ne risquez pas de mourir sous les bombes ou les balles d’armes que vous vendez à travers le monde… vous voulez faire la guerre et continuer ainsi votre commerce mortifère, mais ô combien lucratif ?! Je veux bien le croire, ça !

Mais les millions de voix qui se sont levées depuis le 7 janvier dernier, elles, n’ont jamais demandé la guerre…

D’ailleurs, la guerre contre qui ?

Contre trois jeunes nés en France qui ont sombré dans l’extrémisme religieux et dans la folie meurtrière ? Peut-être faut-il vous poser la question des politiques libérales et d’austérité que vous mettez en œuvre depuis des décennies et qui engendrent pauvreté, exclusion, communautarisme, perte des valeurs républicaines… et pour certains, glissement vers l’obscurantisme et la barbarie ?!
Contre les 1000, 2000… 5000 soi-disant personnes au profil “similaire” à ces trois assassins, prêts à se lancer dans le “djihad” et à mettre la France à feu et à sang ? Sur la base de quels éléments factuels, ces prédictions apocalyptiques ?
Contre les 5 à 6 millions de musulmans qui vivent en France et pratiquent un Islam de tolérance, respectueux des valeurs de la République et notamment de la laïcité ?

D’ailleurs, de la laïcité, valeur essentielle de notre République… parlons-en !
Vous les premiers, messieurs le Président et le Premier Ministre de notre République Française, ce d’autant plus dans un contexte actuel exceptionnel avec des risques importants d’amalgames, de discriminations et d’instrumentalisation… vous mettez à mal la laïcité en assistant à une office religieuse avec une kippa sur le dessus du crâne, alors que vous devez être les garants des valeurs de notre République ! Drôle de conception de la laïcité, que d’arborer un signe d’appartenance à une religion en particulier en de pareilles circonstances ?!
Pourtant, les carnages de ces derniers jours sont des attaques contre toutes les religions sans distinction et sans hiérarchisation aucune, mais surtout contre toutes les valeurs de notre République Française… et, entre autres, la laïcité.
Je ne parle même pas du fait d’accueillir avec les honneurs de notre République et d’être assis à côté de Benjamin NETANYAHOU, chef d’état d’un pays qui bafoue depuis des décennies le droit international, ainsi que les valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité, de respect de certaines populations et religions !

Oui, Monsieur Manuel VALLS, “nous sommes tous juifs”… mais pas plus, pas moins que “tous musulmans”, “tous catholiques”, “tous protestants”, “tous CHARLIE”… “tous libres de nos convictions philosophiques, politiques ou religieuses” !
Il aurait été de bon ton, dans votre discours de l’autre jour, que votre formule ne se limite pas à une religion mais à l’ensemble de celles-ci et avant toute autre chose, aux valeurs de la République Française.
A toutes les religions pour montrer qu’il n’y a pas de différence, pas de préférence pour l’une par rapport aux autres dans un état laïque ; qu’elles ont toutes leur place dans notre société française mais avec une séparation claire entre celles-ci et l’état français que vous êtes censé représenter !

D’ailleurs, Monsieur VALLS, pourquoi des forces de l’ordre devant les écoles de confession juive… et pas devant toutes les écoles de la République ? Pourquoi des militaires devant les synagogues… et pas également devant tous les lieux de culte musulmans qui subissent depuis quelques jours des attaques racistes et des dégradations ?
La République Française n’est-elle plus “une et indivisible”, égale pour tous les concitoyens de notre pays, quels que soient leurs origines et leurs signes d’appartenance ?

Non, Monsieur VALLS, nous, peuples français et du monde, ne sommes pas en guerre !

Nous n’acceptons pas votre discours belliqueux, qui risque d’attiser les divisions, d’engendrer des amalgames, des tensions et d’autres drames… Nous ne voulons pas d’un état de guerre qui justifiera forcément des restrictions de nos libertés individuelles… et notamment de la liberté d’expression !

Nous attendons plutôt d’hommes et de femmes qui se prétendent de “gauche”, qu’ils fassent les choix courageux d’une politique axée sur l’éducation et la culture, loin du prosélytisme libéral actuel, en donnant notamment les moyens à “l’école de la République” d’inculquer à tous nos enfants les valeurs pour lesquelles des millions de personnes sont descendus dans les rues ces derniers jours !

Nous attendons, Monsieur VALLS, plutôt que de vous entendre vouloir partir en guerre contre je ne sais trop quels djihadistes, que vous mettiez en œuvre une politique de relance de la consommation, de hausse des salaires, de rétablissement des services publiques sur l’ensemble du territoire français, quartiers de banlieues compris… afin de sortir de la paupérisation et de l’exclusion des tranches entières de la population de notre pays ! Ce n’est que comme ça que vous éviterez que des jeunes français actuellement sans perspectives d’avenir, se laissent embrigader dans des quêtes “d’absolu” les entrainant dans la barbarie…

Résolument non, Monsieur Manuel VALLS, la France n’est pas en guerre et elle ne doit pas y rentrer ! Ne rajoutez pas de la barbarie à la barbarie !

En mémoire aux dix-sept morts et aux blessés des tueries de la semaine dernière, mais aussi à tous les morts et blessés des guerres que des hommes engagent par bêtise et ignorance… Ce sont rarement ceux qui déclenchent les guerres qui en sont les premières victimes, mais bien souvent les populations civiles innocentes !

Source : Emmanuel Adami, pour Le Grand Soir

Source: http://www.les-crises.fr/non-nous-ne-sommes-pas-en-guerre/


[Reprise] “Résistons à l’esprit de guerre”, par Dominique de Villepin

Monday 9 February 2015 at 01:29

Résistons à l’esprit de guerre

Nous sommes aujourd’hui sidérés par le déchaînement de violence froide et calculée qui a tué douze personnes et grièvement blessé tant d’autres, qui visait à réduire au silence un organe de presse par la liquidation méthodique de toute sa rédaction pour intimider la liberté elle-même. Ils sont morts parce qu’ils étaient journalistes, morts parce qu’ils étaient libres, morts pour ce qu’ils représentaient. Nos forces de l’ordre ont payé un lourd tribut à la protection de la sécurité de nos concitoyens.
Le pays fait face, uni, à l’attentat terroriste le plus meurtrier depuis près de deux siècles, par des manifestations spontanées de solidarité.
La tentation est grande dans ces moments de recourir à des formules martiales. L’émotion est intense,mais l’intelligence de ce qui se passe est indispensable.

Une peur construite pour nous enfermer tous

La France glisse lentement dans un climat de guerre. Une guerre étrange qui ne dit pas son nom. Une guerre qui efface les frontières entre dehors et dedans. A l’intérieur semblent s’imposer des images, des postures, des logiques de guerre civile larvée. Le terrorisme change de visage.Les réseaux de poseurs de bombe semblent avoir laissé place aux loups solitaires qui eux-mêmes cèdent aujourd’hui le terrain àune nouvelle violence, des commandos aux méthodes mafieuses et aux équipements militaires se fixant pour but d’éliminer des cibles symboliques représentant la démocratie et la liberté. Ce n’est plus la terreur chaotique, c’est la peur organisée, construite pierre à pierre pour nous enfermer tous.

A l’extérieur, nous voyons se cristalliser de mois en mois la ligne de front cauchemardesque d’une guerre de civilisations opposant l’Occident à l’Islam, sous les traits déformés et monstrueux de l’islamisme. Les interventions occidentales font système : elles semblaient des opérations indépendantes, mues par des ambitions diverses ; elles ont abouti à un résultat unique, l’émergence d’un ennemi djihadiste insaisissable et l’effondrement des Etats et des sociétés civiles de la région. Nous le savons, d’autres opérations s’annoncent : en Libye, que l’opération de 2011 et l’implosion depuis cette date a transformée en repère terroriste du Sahara ; au Sahel et en particulier au Nigeria, aux confins du Cameroun et du Tchad où Boko Haram étend son emprise barbare. Mais ces guerres nourrissent toujours de nouvelles guerres, chaque fois plus grandes, chaque fois plus impossibles. Elles nourrissent le terrorisme chez nous en promettant de l’éradiquer. Car on ne viendra à bout du djihadisme là-bas et du terrorisme ici qu’en apportant des solutions concrètes aux crises du monde musulman, qui sont à la fois des conflits territoriaux, sociaux, politiques, économiques,que nous simplifions en ne regardant que le symptôme islamiste.

L’esprit de guerre est un piège. C’est un engrenage qui nous conduit chaque jour davantage vers une guerre hors de tout contrôle. Notre devoir est de résister à l’esprit de guerre au nom de nos valeurs démocratiques. La seule victoire que puissent espérer les fanatiques, c’est de nous convaincre que nous menons une guerre totale. C’est de nous mener dans l’impasse de la force que nous croyions être un raccourci.

Nous avons trois adversaires redoutables à affronter.

Il y a d’abord, le plus évident, les terroristes. Nous ne pouvons tolérer que des assassins de masse circulent encore dans le pays et que les apôtres de la haine sèment leurs paroles impunément. Tous les moyens de l’Etat de droit doivent être mis en œuvre pour les appréhender et les traduire en justice. Nous devons améliorer les dispositifs de prévention, de surveillance et de protection des lieux sensibles, empêcher la radicalisation notamment dans les prisons. Face à un ennemi sans frontières, il ne peut y avoir de lutte efficace qu’à travers une coopération policière et judiciaire sans cesse renforcée, à l’échelle de l’Europe mais également avec les autres pays concernés. Là où il y a vingt ans il n’y avait que quelques foyers terroristes, aujourd’hui le monde entier est concerné.

Il est urgent de tarir tous les financements de l’extrémisme islamiste en France, notamment venant de pays du Moyen-Orient. C’est dans ce but que, ministre de l’intérieur, j’avais proposé de réformer le financement des constructions de lieux de culte musulman par une Fondation des œuvres de l’islam permettant de réduire les financements étrangers, et permettre ainsi l’épanouissement d’un islam de France.

Perte des repères démocratiques

Il y a un second ennemi, c’est la peur. Le sentiment d’une violence imprévisible, omniprésente et soudaine suscite un désir de sécurité qu’il sera impossible de combler. L’expérience nous l’enseigne, les attaques terroristes favorisent le renoncement aux valeurs démocratiques, le souci de notre sécurité nous disposant à sacrifier les libertés de tiers, chez nous ou à l’étranger. La spirale de défiance créée aux Etats-Unis par le Patriot Act et la légitimation durable de la torture ou des détentions illégales a aujourd’hui plongé ce pays dans la perte de repères moraux. Nous avons vu le vertige de la guerre civile en Algérie durant les années de plomb. Nous voyons de plus en plus de pays qui ont peur, qui s’emmurent, qui s’éloignent des valeurs démocratiques.

Il y a un troisième ennemi aujourd’hui, c’est le rejet. Notre pays se crispe de jour en jour.    élites se tournent chaque jour davantage vers des discours de division et d’exclusion permettant tous les amalgames. L’Histoire nous enseigne que lorsque les digues sautent, le pays risque l’effondrement. Si nous aimantons la violence, c’est parce que nous sommes divisés, faibles, repliés sur nous-mêmes ; un pays blessé qui perd son sang. Les polémiques littéraires, les démagogies partisanes, nous montrent que l’enjeu n’est pas tant de nous sauver des autres, d’invasions ou de remplacements supposés, mais de nous sauver de nous-mêmes, de notre renoncement, de notre narcissisme du déclin, de notre tentation occidentaliste et suicidaire.

Dans l’épreuve, chacun d’entre nous a un devoir à accomplir. Agissons avec responsabilité, sang-froid et dans l’unité, ripostons par l’exemplarité démocratique, redevenons ce que nous sommes, des républicains qui croient au dialogue, à la force de la culture et de l’éducation et à la paix.

Dominique de Villepin (Ancien Premier ministre)

Sources: www.lemonde.fr, 8/1/2015

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Dominique de Villepin: «“Je suis Charlie”, ça ne peut pas être le seul message de la France»

Par Vincent Tremolet de Villers Publié le 19/01/2015

FIGAROVOX/EXTRAITS-L’ancien premier ministre appelle de ses vœux un traitement ciblé et impitoyable de la menace terroriste mais refuse le terme de guerre et les visions «globalisantes».

«La France est en guerre», a dit Manuel Valls…

Nous sommes face à un choix. Soit la logique de guerre, en considérant qu’il n’y a qu’un front continu, de l’extérieur jusqu’à l’intérieur. Nous choisissons alors la surenchère militaire, l’exclusion de ceux qui ne pensent pas comme nous sans pour autant penser comme nos ennemis. Cela signifiera, ici comme là-bas, toujours plus de guerre. Soit nous choisissons la fidélité à nous-mêmes. Nous gardons à l’intérieur le cap de nos repères républicains en rassemblant et en unifiant, et nous gardons à l’extérieur nos repères gaullistes, qui sont une politique de sécurité nationale mais dans le souci du monde, la recherche de solutions et l’esprit de dialogue. Face au drame qui l’a frappée, la France a montré une grande dignité. La mobilisation nationale et populaire a été un sursaut impressionnant. Le peuple a choisi d’instinct la fidélité à la France. Ce dernier choix me paraît être à la fois le plus juste et le plus protecteur.

Pourquoi?

Le terrorisme nous tend un piège. Il veut nous pousser à la faute, et la faute, c’est la guerre. Il vise à créer des amalgames et à fédérer des sensibilités différentes, en s’appuyant sur des sympathies, un sentiment d’humiliation, de rejet. Ainsi il peut élargir sa base au-delà des plus radicaux. Notre intérêt est donc d’éviter l’engrenage de la force. L’idée d’un unique front extérieur signifierait que la situation serait la même en Libye, en Syrie, en Irak, au Mali. Or ce sont des théâtres d’opérations différents qui exigent une approche fine. Chaque guerre appelle une nouvelle guerre. À l’agenda se dessine une nouvelle intervention militaire en Libye ou encore au Nigeria. Chaque guerre augmente l’image d’une guerre globale, celle d’un conflit de civilisation entre Occident et Islam, et donc le pouvoir d’attraction de l’ennemi djihadiste. La violence exerce un phénomène d’aimantation. Notamment chez des jeunes en mal identitaire, en contestation, cela crée le sentiment d’une mission, d’un statut, d’une reconnaissance. L’enjeu de la lutte contre Daech, c’est d’empêcher la constitution de territoires du djihad offrant un refuge à tous les apprentis terroristes. C’est le vide des États faillis qui la rend possible. Il faut une mobilisation de tous les États de la région pour réduire les fractures identitaires entre chiites et sunnites, entre Iran et Arabie saoudite.

Retrouvez la suite de l’entretien ici (abonnés) ou dans Le Figaro du 20 janvier.

Source : LeFigaro

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Dominique de Villepin : “Le rôle militariste… par FranceInfo, le 20/01/2015

Source: http://www.les-crises.fr/reprise-resistons-a-lesprit-de-guerre-par-dominique-de-villepin/


[Reprise] C’est pas tout ça, mais faut bombarder Saddam, par Jacques-Marie Bourget

Monday 9 February 2015 at 01:19

Au lendemain des attentats perpétrés contre la rédaction de “Charlie Hebdo”, la réaction du gouvernement est attendue tant d’un point de vue diplomatique que militaire. Jacques-Marie Bourget explique avec ironie que la France doit rapidement se pencher sur certains pays, accusés de financer des groupes terroristes.

C’est pas tout ça, mais maintenant faut bombarder Saddam. Quel Saddam ? Je ne sais pas mais on va bien en trouver un. A ce qu’on dit il y a un bon signe, Le Drian a déjà en main un tube avec un élixir dedans, et il va l’agiter pour nous désigner l’ordonnateur de nos malheurs. Tous les journaux si généreux, si sensibles et émotifs, si proches des autres, nous ont dit que l’attaque contre Charlie était « notre 11 septembre ». Après le drame du World Trade Center, la recette de George Bush II ayant été la bonne, j’espère que cette France soudée comme une carrosserie de tank, et si « debout », va faire la même chose. Un bon signe, le porte-avions Charles De Gaulle a déjà pris la mer. Ça lui fait du bien, dérouille ses hélices et promène ses marins ainsi éloignés des MST de Toulon. S’il ne tombe pas en panne, il devrait faire mal. Gare aux bergers qui poussent leurs troupeaux dans plaines de Syrie. Un keffieh reste un keffieh, et dans le manuel du soldat, cela depuis 1954, une philosophie impulsée par Mitterrand, chef de guerre en Algérie, il est recommandé de tirer. Tant mieux il ne viendra pas se plaindre, le bédouin, et ses moutons encore moins. La guerre contre le terrorisme est une affaire assez peu sérieuse pour qu’on la confie aux militaires.

Quel pays la France va-t-elle vitrifier ?

Quel pays, le Qatar n’en étant pas un et Fabius, qui y voit de l’intérêt, ayant dit qu’il est innocent, quel pays la France va-t-elle vitrifier ? Après avoir donné un coup de pouce en Syrie, Sarko l’a fait en Libye avec l’émir Al-Thani et le poète BHL. François II l’a fait, pas assez à son goût, chez Bachar aussi. Quelle cible prendre comme dirait Bigeard ? Vous avez dit Bigeard ? Le Yémen ? Ce serait pas mal. D’abord à cause de Nizan et de son livre Aden Arabie qui s’ouvre par la plus belle phrase de la littérature, « J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus belle âge de la vie ». En plus c’est le grand père d’Emmanuel Todd et il y a, à Sanaa et dans tout le pays une architecture sublime. Mais âgée et que l’on pourrait raser pour la remplacer par des « canopées ». Comme au-dessus du trou des Halles, à Paris. C’est moche mais les Socialistes aiment ça. Dans leurs cavales commentées par eux-mêmes, dans leur road movie, les frères Kouachi ont désigné le coupable, pourquoi faire compliqué : le Yémen.

Problème, le Qatar aime le Yémen qui, lui, n’aime pas l’Arabie Saoudite qui n’aime pas le Qatar. Ouf. Donc, la France peut-elle attaquer un Etat ami de Doha ? Trop cruel et dangereux pour la durée d’une amitié. Il faut encore réfléchir et Le Drian a un peu de temps pour secouer son tube, qui n’est plus d’anthrax mais d’entracte.

Pas question de rupture diplomatique avec ceux qui financent le djihad

Une grande réunion, tenue à Bruxelles, examine les moyens utiles pour faire en sorte qu’on ne tue plus des gens à coups de kalach, fussent-ils journalistes. J’ai examiné l’ordre du jour. Pas question de rupture diplomatique avec les pays où les milliardaires qui financent le djihad, pas question de punir ceux qui achètent le pétrole vendu par Daech ou par les fous de Dieu Libyens. Pas question, en France, de mettre son nez dans les finances d’organisations islamiques c’est-à-dire de leur filiale islamiste, le « vote musulman » est si précieux.

La guerre étant déclarée, nous mobilisons large, personnellement bon balayeur, je pense être convoqué pour nettoyer un commissariat pendant que les policiers terroriseront les terroristes. Mais quand même réveillons-nous et le regard ouvert jetons un œil sur l’Algérie. Difficile de combattre le djihad sans un coup de main de ce pays. Il en a tant souffert et connait l’engeance. Là, écoutez bien, l’Europe vient de décider d’accorder une subvention de 150 000 euros à toute association qui se formera pour « défendre la démocratie ». Autrement dit qui luttera contre le pouvoir en place. Pas impossible que les prochains tueurs ne soient plus d’anciens stagiaires du Yémen, mais des types ayant pris le ferry à Alger.

Le Qatar et l’Arabie Saoudite : un Téléthon pour le djihad

Comme on n’est jamais aussi bien trahi que par ses amis, ce sont les Étasuniens qui sont venus contredire les serments de l’émir du Qatar, quand il jure ne pas financer le terrorisme. En l’occurrence le Trésor : oui l’argent du Qatar a bien abondé l’État Islamique ! Ainsi, un certain Tariq Al-Harzi, cheville ouvrière de l’accueil des djihadistes étrangers dans la zone frontalière turco-syrienne, a touché au moins deux millions de dollars d’un intermédiaire financier basé à Doha. C’est ce bienfaiteur qui, lui-même, a recruté Al-Harzi.

Selon les agents des services spéciaux c’est en milliards de dollars que l’on compte l’aide du Qatar et de l’Arabie Saoudite, l’un et l’autre lancés dans un vrai Téléthon pour le djihad. Selon nos confrères du Daily Telegraph, un diplomate occidental vient de révéler les chiffres qui tuent : « Entre huit et douze personnalités éminentes au Qatar ont récolté des millions de dollars pour les djihadistes. Et ils ne s’en cachaient guère ».

Un rapport du Département d’Etat sur le terrorisme précise que Doha ne « prête aucune vigilance » à cet argent mortifère. Même pris la main dans la bourse d’or, l’émir n’a pas besoin d’avouer son forfait : c’est toujours un ami, un cousin qui prête son concours à la dotation djihadiste. Et le cheikh et sa famille d’expliquer : « on ne peut empêcher nos proches, nos amis de pratiquer la Zakat… Parfois ils se font abuser… » . La zakat, la charité islamique qui fait que l’on va forcément au ciel si on sait se montrer généreux.

Dommage qu’entre deux siestes Laurent Fabius n’ait pas eu le temps de lire les rapports de ses amis de Washington.

Source : Jacques-Marie Bourget, repris par Anaïs Chabalier pour Le Grand Soir, depuis l’article original publié pour Le Plus de l’Obs

Source: http://www.les-crises.fr/c-est-pas-tout-ca-mais-faut-bombarder-saddam/