les-crises.fr

Ce site n'est pas le site officiel.
C'est un blog automatisé qui réplique les articles automatiquement

[Socialisme 2.0] 2014, Valls enterre le socialisme : “Il faut en finir avec la gauche passéiste”

Thursday 30 October 2014 at 02:59

Fa-bu-leu-se interview de Manuel Valls parue dans le Nouvel Obs du 23 octobre 2014.

Belle leçon de libéralisme (en jaune)… Je ne commente pas (trop) à ce stade, pour ne pas sombrer dans une inévitable vulgarité.

Condoléances aux cocus cependant.

La crise s’éternise, le pouvoir sombre dans l’impopularité, la majorité se divise, et Martine Aubry le somme de changer de cap. Le Premier ministre riposte et lance un défi à la gauche : “se réinventer ou mourir”

Les Français ont le sentiment que tous les sacrifices auxquels ils ont consenti depuis deux ans et demi n’ont servi à rien. Les déficits sont toujours aussi inquiétants, le chômage toujours aussi haut et la croissance toujours aussi nulle. Comment l’expliquez-vous ?

- Je ne partage pas un constat aussi sévère, mais il est vrai qu’il y a un grand désarroi, de l’inquiétude pour l’avenir, de la colère aussi. On l’a bien vu aux dernières élections municipales et européennes. Nous aurions dû faire dès 2012 un constat plus clair sur la situation de la France, sur sa triple crise : crise de croissance, crise de la dette et des déficits, crise de confiance. Tout part de là. Si nous étions partis de l’analyse très lucide de la Cour des Comptes de juillet 2012, le sens des réformes et le cap du quinquennat auraient été davantage affirmés. Ils l’ont été progressivement par la suite avec les conclusions du rapport Gallois en novembre 2012 qui a mis l’accent de manière implacable sur le décrochage de compétitivité de notre économie et de nos entreprises depuis dix ans.

Vous ne l’aviez pas mesuré avant?

L’enjeu de la production avait été un des thèmes forts de la campagne de François Hollande, mais nous avons sans doute sous-estimé l’ampleur de la crise de compétitivité et de la crise de confiance. Cela nous a empêchés – c’est une responsabilité collective – d’aller plus vite, dès le début.

Vous avez pris du retard ou vous avez fait des mauvais choix à l’époque ?

- Nous avons sans doute pris du retard et il y a eu des mauvais choix.

Lesquels ?

- La hausse de la fiscalité a frappé durement nos concitoyens, notamment les couches populaires et les classes moyennes. Nous avons privilégié l’impôt par rapport à la diminution de la dépense publique. Or ces décisions sont venues s’ajouter à celles effectuées à la fin du précédent quinquennat. 30 milliards de hausse de la fiscalité avec la droite, 30 milliards avec la gauche. C’est ce qui a provoqué un véritable ras-le-bol fiscal. Pendant sa campagne, François Hollande avait été extrêmement raisonnable quant aux promesses, il était lui-même très lucide sur la situation. La victoire de 2012 a créé dans le pays une espérance, une urgence. Et comme les résultats tardent à venir, il y a de la déception.

Cette espérance s’incarnait dans le slogan de campagne : “Le changement, c’est maintenant”. Aujourd’hui, le changement c’est quoi ?

Le changement, depuis le début, c’est redresser la France.

Ça, c’est le discours, mais en quoi cela change-t-il la vie des Français?

Il faut du temps. Certains nous disent : « Faites d’abord des réformes, la croissance viendra après. » C’est illusoire. D’autres nous disent :  « Tant que la croissance ne sera pas là, il faut différer les réformes. » C’est dangereux. Il faut, en même temps, réformer la France et l’Europe. Il faut surtout expliquer la cohérence de ce mouvement de réformes sans précédent. Il a trois finalités. La première, c’est libérer la création d’emplois par tous les moyens. La seconde, et c’est sans doute là où il a manqué des explications, c’est la lutte contre les inégalités. Cela passe d’abord par la refondation de l’Ecole. Avec 1 milliard d’euros supplémentaires en 2015, l’Education redevient le premier budget de la nation. Cela a-t-il été entendu? Pas assez. La troisième finalité, c’est la préparation de l’avenir, avec nos grandes réformes de structures. Au  fond ce que nous recherchons, c’est ce que nous avons perdu : la  confiance. Si les efforts que nous demandons sont expliqués et compris, la cohérence du quinquennat de François Hollande apparaîtra plus évidente.

Et les résultats, c’est pour quand ? Il reste six mois, avez-vous dit…

- Je n’ai jamais dit ça !

NdR : « Si d’ici trois à six mois, la situation ne s’est pas inversée, ce sera foutu » – Source AFP, 15/09/2014

Je sais bien que nous vivons sous la dictature de l’immédiat, mais il faut assumer devant les Français que réformer un pays qui a perdu sa compétitivité prendra dix ans. Je comprends leur impatience, mais il faut du temps pour que la France rattrape pleinement son retard. L’étude de l’OCDE publiée récemment est encourageante. Elle juge que les réformes que nous menons auront un impact significatif sur la croissance.

Pas de lendemain qui chantent d’ici à la fin du quinquennat, alors ?

Evitons le simplisme. Nous agissons aussi à  court terme. La baisse des impôts, intervenue  à l’automne sera amplifiée en 2015, pour 6 millions de ménages supplémentaires, la baisse du coût du travail et de la fiscalité pour les entreprises, la grande réforme des allocations familiales, tout cela, c’est du concret pour les Français.

Vous avez fait “cadeau” aux entreprises de 41 milliards pour qu’elles reconstituent leurs marges et recommencent à embaucher. Jouent-elles le jeu aujourd’hui ?

Voilà un beau cliché ! Les 41 milliards, c’est pour la France, pour rendre notre économie, nos entreprises plus compétitives, pour que nous ne décrochions pas du reste de l’Europe et du monde. Sans compétitivité, il n’y a pas de création de richesses, et sans création de richesses, il n’y a pas d’emplois. Moi, je ne confonds pas les entreprises avec leurs seuls dirigeants ou leurs seuls actionnaires. Les entreprises, ce sont aussi des salariés, des ouvriers, des techniciens, des cadres. Nous devons bâtir des compromis sociaux qui permettent de protéger les salariés sans nuire  à la compétitivité des entreprises. La clé, c’est la qualité des rapports sociaux et c’est la marque de ce quinquennat Je réunirai le 4 novembre prochain l’ensemble des partenaires sociaux pour faire le point sur les aides aux entreprises. Quand la nation tout entière consent un effort aussi important, il faut que les entreprises assument leurs responsabilités.

Réformer, c’est aussi affronter les corporatismes. Or sur Air France, l’écotaxe, ou encore la suppression des conseils généraux, vous avez reculé

Réformer, c’est difficile, il y a toujours des résistances – car beaucoup de Français, dans le privé comme dans le public, ont peur d’être déclassés, de perdre leur situation. Mais il faut savoir les surmonter. La réforme ferroviaire adonné lieu à une grève particulièrement longue au mois de juin. Pourtant, je n’ai pas cédé. Pour Air France, l’essentiel de la réforme concernait le développement de la compagnie low cost Transavia France, pas Transavia Europe. J’ai soutenu personnellement la direction. La grève a été longue mais, pour la première fois, ce ne sont pas les pilotes qui ont eu raison ! Le gouvernement a tenu bon.

Sur l’écotaxe, n y a eu un recul.

Ça ne sert à rien de s’entêter! Le projet d’écotaxe voté par l’Assemblée à la quasi-unanimité, en 2011, s’est révélé il y a un an impossible à mettre en oeuvre pour des raisons techniques et politiques. Ce qui a été inventé en juin dernier ne fonctionnait pas non plus. Nous aurions dû y renoncer plus tôt. Gouverner, ce n’est pas s’entêter, c’est être pragmatique, c’est reconnaître aussi quand des erreurs ont été commises.

Et c’est pour ne pas vous entêter que vous avez cédé aux demandes du PRG sur les conseils généraux ?

Vous voudriez m’enfermer dans un débat que je connais par coeur… Soit on réforme et on est une brute, on passe sur tous les corps intermédiaires : partis, syndicats, élus … Soit on les écoute, et alors c’est le recul ! La réforme la plus importante, c’est celle des régions. Parce qu’elle va changer profondément la réalité du pays avec 12 régions plus fortes, à taille européenne, ayant désormais toutes les compétences sur le volet économique. Cette réforme jugée « impossible » sera votée avant la fin de l’année. Nous avons créé les grandes métropoles, réformé les intercommunalités pour leur donner davantage de moyens d’action. Mais il y a aussi dans certains territoires ruraux, périurbains, un sentiment profond d’abandon, un grand besoin de proximité. Il n’est donc pas absurde que, dans les départements ruraux, on conserve les conseils départementaux. Le pragmatisme n’est en rien contradictoire avec la réforme.

Sur les professions réglementées, la réforme Macron semble moins ambitieuse que oelle de son prédécesseur.

Au contraire ! Mais je refuse qu’on jette à la vindicte des professions qui comptent pour notre pays : notaires, professions de droit, pharmaciens… Grâce au dialogue, nous bâtissons une loi qui libère les énergies dans ces secteurs. La loi croissance et activité ouvrira aussi avec les contreparties prévues dans le rapport Bailly, davantage de possibilités de travailler le dimanche pour favoriser notamment l’attractivité des zones touristiques. Nous y intégrerons enfin le fruit du dialogue social sur la représentativité et le lissage des seuils sociaux.

Plus de liberté pour les autocars et les professions réglementées, ça ne suffira pas pour ramener la croissance, mais ça suffira peut-être pour donner des gages à Bruxelles ?

Nous faisons cette réforme d’abord pour nous-mêmes!

Comment expliquez-vous que ces réformes ne suffisent pas à convaincre Angela Merkel ?

Qu’en savez-vous? La chancelière elle-même a déclaré que notre programme de réformes était impressionnant par son ampleur et par sa diversité.

Vous aurez donc son soutien sur la question des déficits que la France réduit moins vite que prévu ?

C’est un autre sujet. Ramener nos déficits à 3% dès l’an prochain est impossible. Baisser de 30 milliards supplémentaires la dépense par rapport aux 21 milliards déjà engagés nous plongerait dans l’austérité et bloquerait le pays. Aujourd’hui, l’Europe sous-estime la gravité de sa situation. Certains voyaient, il y a six mois, la croissance revenir doucement. Ce que je vois se profiler, si nous ne faisons rien, c’est un risque de déflation et de récession. Les politiques d’ajustement non coordonnées ont-elles fini par tuer la croissance? Je le crains. Mais il y a deux avancées dont on ne parle pas assez : la baisse de l’euro, que j’avais moi-même réclamée, et l’annonce du plan Juncker de 300 milliards d’euros d’investissements. Cela veut dire que nous pouvons changer la politique budgétaire et monétaire de l’Union européenne. C’est ce que ne cesse de dire François Hollande depuis deux ans et demi.

Réduire les dépenses de 50 milliards, ce n’est pas l’austérité ?

Absolument pas. Mais je suis conscient que pour ceux qui connaissent la crise depuis des années, qui sont au chômage ou dans la précarité, la question peut se poser. Pourtant c’est la réalité ! Quand nous créons 60 000 postes d’enseignants pour lutter contre l’échec scolaire, et aussi des postes de policiers, de magistrats, quand nous augmentons les bourses pour les étudiants, quand nous augmentons les rémunérations des catégories B et C de la fonction publique, nous ne faisons pas de l’austérité ! Nous avons à faire des choix. La dépense publique dans notre pays représente 57 % de la richesse. Réduire ce montant n’est en rien une politique dictée par Bruxelles. Nous le faisons pour nous, pour préparer l’avenir, pour que la dette ne pèse pas davantage sur nos enfants, pour ne pas perdre notre souveraineté.

NdR : vous notez la malhonnêteté visant à rapprocher le niveau des “dépenses publiques” de la dette, alors que rien n’interdit de voter un budget équilibré – mais cela a des conséquences. Les États-Unis ont une dette supérieure à la nôtre, avec des “dépenses publiques” parmi les plus faibles.

Le prix Nobel d’économie Jean Tirole juge le marché du travail en France « assez catastrophique », c’est aussi votre avis ?

ll faut d’abord se féliciter de ce prix Nobel ! Le marché du travail ne fonctionne pas bien, c’est un fait. Et le niveau du chômage est aussi une résultante de ce dysfonctionnement. Se poser la question de l’efficacité et de l’équité des règles est donc légitime. Elle se pose d’ailleurs tous les deux ans à l’occasion de la renégociation de la convention d’assurance-chômage entre partenaires sociaux. Ils le feront au plus tard en 2016. Cela ne doit pas nous empêcher d’ici là d’en parler! D’autant plus que le régime est aujourd’hui en déficit de près de 4 milliards d’euros.

Y a-t-il des abus? Ce régime est-il à vos yeux trop généreux ?

Il faut éviter les caricatures : le haut niveau du chômage ne résulte pas d’un refus des chômeurs de travailler. Il y a toujours des abus, mais personne n’est au chômage par plaisir. Et, vous le savez, seulement la moitié des demandeurs d’emploi sont indemnisés. Mais se poser la question des devoirs des chômeurs, de leur formation, d’un meilleur accompagnement par Pôle emploi, des bonnes incitations pour retrouver un travail, ce n’est pas une régression sociale. Le fonctionnement du marché du travail n’est pas satisfaisant car il ne crée pas assez d’emplois, il génère des inégalités importantes entre, d’une part, des salariés très protégés en CDI et, d’autre part, des salariés très précaires en CDD et en intérim. C’est là-dessus qu’il faut agir.

NdR : traduction : ami lecteur en CDI, tu es un peu un salaud quand même, tu devrais avoir honte et partager ta sécurité…

Vous dessinez le contrat unique?

Les partenaires sociaux n’ont pas souhaité s’engager sur le contrat unique. Ce qui ne veut pas dire que ce n’est pas intéressant. Mais il faut être pragmatique. Certains économistes comme Jean Tirole en sont venus à proposer cette idée parce qu’ils font le constat qu’aujourd’hui un certain nombre d’entreprises ne veulent pas embaucher en raison du coût trop élevé du licenciement, notamment parce que l’incertitude juridique est trop forte. Je partage ce constat. La loi de sécurisation de l’emploi votée l’an dernier encourage fortement la recherche d’un accord entre partenaires sociaux. Et déjà le nombre de recours juridiques suite à des plans sociaux a chuté. Pour ce qui est des conflits individuels, une concertation s’engage. Elle devra permettre de rendre la justice prud’homale plus rapide et plus efficace.

La gauche au pouvoir a toujours mené des réformes emblématiques : les lois Auroux, la cinquième semaine de congés payés, les 35 heures, la CMU… On cherche en vain la grande réforme sociale du quinquennat Hollande ?

- Il ne faut pas s’enfermer dans l’idée de la réforme emblématique, même si nous avons déjà fait beaucoup de choses. Le mariage pour tous, c’est une grande avancée pour l’égalité des droits. Personne ne reviendra dessus. Je suis certain qu’on retiendra de ce quinquennat la refondation de l’École et cette réforme historique qui vient d’être votée : la transition énergétique. C’est une grande loi de gauche ! Mais méfions-nous des symboles pour les symboles…

L’histoire de la gauche est jalonnée de symboles…

- Il faut en finir avec la gauche passéiste, celle qui s’attache à un passé révolu et nostalgique, hantée par le surmoi marxiste et par le souvenir des Trente Glorieuses. La seule question qui vaille, c’est comment orienter la modernité pour accélérer l’émancipation des individus.

Cette gauche est pragmatique plus qu’idéologique ?

- Oui parce que l’idéologie a conduit à des désastres mais la gauche que je porte garde un idéal : l’émancipation de chacun. Elle est pragmatique, réformiste et républicaine.

Pas socialiste ?

- Je le répète : pragmatique, réformiste et républicaine.

Vous avez dit que la gauche pouvait mourir ?

Oui. Si la gauche est menacée, c’est parce qu’elle n’a pas réussi à articuler des réponses fortes sur des questions essentielles : comment faire face à la globalisation qui crée des gagnants et des perdants ? Comment réformer l’Etat-providence ? Quelles réponses apporter en termes de citoyenneté, de laïcité, d’égalité femme-homme, notamment avec la construction d’un islam de France compatible avec nos valeurs ? Comment encore répondre à l’individualisme, qui épanouit et fragilise en même temps ? Le temps des solutions globales, identiques pour tous, est révolu. Il faut rechercher l’universalité des principes tout en tenant compte de l’hétérogénéité des situations.

C’est ce que nous faisons en réformant les allocations familiailes. C’est pourquoi j’assume totalement cette réforme. Un autre enjeu fondamental, c’est la question de l’identité. La gauche l’a négligée car elle pensait que seule comptait l’identité sociale. D’où votre question : « Quelle est la grande réforme sociale emblématique de ce quinquennat ? » Cette négligence nous revient aujourd’hui conune un boomerang parce que la nation n’est pas soluble dans le social. On peut mener les politiques le plus sophistiquées sur le plan technique, si nos concitoyens n’ont pas le sentiment d’appartenir à quelque chose de plus grand, ils retombent dans la défiance.

Si la gauche croit encore au progrès, la France, elle , n’y croit plus. Le pays sombre dans le déclinisme… 

- Face au repli que propose l’extrême droite – on sort de l’euro, on ferme les frontières, on accable les immigrés et les musulmans de tous les maux –, face à une droite elle aussi aspirée par le déclinisme, il est essentiel que la gauche se réarme intellectuellement. faut aussi qu’elle redonne de la fierté aux Français. La France est un grand pays, la cinquième puissance économique mondiale, la deuxième en Europe, sa parole compte et elle contribue pleinement à la stabilité du monde. La gauche est forte quand elle s’adresse à tous. Le projet de cette gauche moderne, c’est de combattre tout ce qui aliène et enferme l’individu. Sa valeur cardinale, c’est l’émancipation. Son combat, c’est la République. Mais, si la gauche ne se réinvente pas, oui, elle peut mourir…

NdR : vous noterez le bug due à la contradiction absolue entre la vision proclamée du discours “notre projet est de combattre tout ce qui aliène”, et le fond du discours qui est une soumission totale aux diktats du néolibéralisme – qui aliènent pas mal, si, si…

Beaucoup pensent que c’est vous l’assassin…

- Quand la gauche se recroqueville sur le passé, sur les totems, elle cesse d’être fidèle à l’idéal du progrès, et donc à elle-même.

[NdR. Pensée pour Orwell et Jean-Claude Michéa - mais nous en parlerons bientôt...]

Ceux qui vous accusent de trahir sont des représentants de la gauche du passé ?

- Moi, j’évite l’insulte, la caricature, mais je pense, oui, qu’ils sont dépassés. La gauche qui renonce à réformer, qui choisit de défendre les solutions d’hier plutôt que de résoudre les problèmes d’aujourd’hui, cette gauche-là se trompe de combat. Ce que je reproche à la démarche de Jean-Luc Mélenchon, c’est son manque d’imagination. Aux autres, je demande si laisser filer les déficits et augmenter les impôts, c’est une nouveauté ? Non. C’est ce qui a été fait systématiquement depuis quarante ans et cela n’a pas marché !

[NdR. Comme le néolibéralisme, en fait ?]

Si un assouplissement de notre marché du travail, une intervention repensée de l’État ou la remise en cause de telle ou telle rente de situation contribuent à lutter contre les inégalités et à faire progresser l’intérêt général, il est de mon devoir d’envisager ces solutions. 57% de dépenses publiques, est-ce que l’on considère que c’est efficace ? Non. Face à ce modèle inefficace qui redistribue aveuglément sans tenir compte des besoins de chacun, et revient a posteriori sur les inégalités pour les corriger, nous devons proposer un modèle que j’appelle la prédistribution pour prévenir les inégalités. D’où la nécessité d’investir massivement dans l’éducation, la recherche, la formation et la culture.

Cette gauche, au fond, elle est sociale-libérale ?

J’écarte les mots piégeux qui visent à enfermer. Et j’invite toutes les forces progressistes à envisager leur propre dépassement. On ne milite plus au XXIe siècle comme au XIXe siècle.

Le PS doit-il changer de nom ?

Pourquoi pas ? Mais ce changement ne peut être que l’aboutissement d’un processus. Depuis la refondation du PS au congrès d’Epinay de 1971, la gauche réinvente le monde dans l’opposition, puis elle gouverne de façon pragmatique, mais comme elle ne l’assume pas, elle perd les élections. Ce cycle d’Epinay est terminé. Moi, je suis d’une gauche qui marche et qui assume les responsabilités. A l’heure des réseaux sociaux, le verticalisme des partis ne fonctionne plus. Ils doivent changer. J’invite donc à un nouveau compromis entre toutes les forces progressistes du pays.

Sous quelle forme ?

L’idée pourrait être de bâtir une maison commune dans laquelle chacun se retrouve.

Mais les écologistes ont quitté le gouvernement, le PRG a menacé de le faire, et le fossé entre les formations de gauche n’a jamais paru aussi profond.

Si nous restons tous dans nos chapelles et nos boutiques à défendre nos prés carrés, nous ne nous en sortirons pas. Nous devons créer demain une maison commune, une fédération ou une seule formation, tout est ouvert, mais, en tout cas, c’est le chemin à suivre. Le paradoxe, c’est que les différences aujourd’hui entre les partis de gauche sont beaucoup moins importantes qu’elles ne l’étaient hier.

Parce qu’il n’y a plus d’idéologie ?

Oui, et parce que les modèles ont failli. L’histoire est passée par là. C’est pourquoi nous devons nous réinventer, mais en acceptant de gouverner. Un autre impératif nous y contraint, c’est la menace d’une droite dure et d’une extrême droite qui progresse…

Si vous échouez, après vous, c’est le FN ? Vous avez dit que l’extrême droite était aux portes du pouvoir…

Quand je regarde les résultats des élections et les sondages, c’est une réalité. La progression du FN s’appuie sur un courant décliniste, anti-européen, celui d’une France rétrécie qui propose comme solution la régression, ça s’appelle la réaction. Le camp progressiste, lui, est divisé, morcelé, sur la défensive…

La gauche est-elle minoritaire en France?

En ce moment, électoralement sans doute, au vu des millions d’abstentionnistes, comme on l’a constaté aux municipales. Mais il y a une bataille d’idées à mener. Soyons gramsciens : il nous faut reconquérir l’hégémonie culturelle. Sur beaucoup de sujets, le mariage pour tous, la priorité à l’école, la réforme des allocations familiales, la nécessité de l’ordre républicain, le soutien aux entreprises, sommes-nous minoritaires dans l’opinion ?

[NdR. Fantastique, le type au pouvoir qui donne des leçons d e Démocratie à la terre entière explique tranquillement qu'il est "minoritaire électoralement", mais bon, c'est sans importance. RIP de Gaulle...]

L’aide aux entreprises, ce n’est pas vraiment un canon de la gauche…

Il y a les canons de la gauche et il y a les thèmes que nous avons conquis : la sécurité, l’aide aux entreprises, la réduction de la dépense publique, ce sont des idées que nous portons désormais.

À gauche, Martine Aubry vous somme de changer de cap.

- Martine Aubry a assumé les responsabilités du pouvoir. Aujourd’hui, elle participe au débat d’idées. Je ne partage pas sa proposition consistant à revenir en arrière et donc à perdre tous les fruits de nos efforts, et ce alors même que les choix que nous avons faits viennent de se mettre en place. Le débat, c’est utile, mais il y a aussi la responsabilité, l’unité et le devoir de cohésion. J’y suis attaché. Je suis adhérent du PS depuis l’âge de 18 ans. Mes inspirations sont multiples : Clemenceau, Mendès, forcément Jaurès et Blum, mais aussi Felipe González, Olof Palme, Willy Brandt. Et j’ai eu la chance de travailler avec Rocard et Jospin. Cette filiation, c’est aussi celle de Martine Aubry. Mais ma gauche à moi se nourrit de ce passé, sans s’y enfermer. Elle est pragmatique.

Cette gauche pragmatique, c’est aussi le visage d’Emmanuel Macron, très critiqué par une bonne partie de la gauche ?

- C’est une nouvelle génération qui assume ses responsabilités. Le plus grand danger qui guette la gauche, c’est le sectarisme. Parce qu’il a été banquier, Emmanuel Macron ne pourrait pas être de gauche ? Notre impératif, c’est le rassemblement. François Mitterrand, en 1981, a su s’entourer de gens qui venaient d’horizons très divers. En 2012, nous avons commis l’erreur de ne pas tendre la main à François Bayrou. Peut-être l’aurait-il refusée, mais nous aurions dû le faire, alors qu’il avait appelé à voter pour François Hollande. Il n’y a rien de pire que le sectarisme au nom d’une prétendue pureté.

C’est une question qui ne se pose qu’à gauche ?

C’est vrai! Peut-être parce qu’on demande beaucoup plus à la gauche. On est plus exigeant Oui être de gauche, c’est plus difficile, mais c’est passionnant. Alors, vive la gauche !

Propos recueillis par Matthieu Croissandeau, Renaud Dély et Sophie Fay pour le Nouvel Obs.

P.S. Lire aussi pour mémoire ce fabuleux billet :  ”Je me bats depuis longtemps pour une vision libérale de l’économie” de François Rebsamen

Source: http://www.les-crises.fr/valls-enterre-le-socialisme/


[Socialisme 3.0] 2017, Emmanuel Macron réinvente le socialisme ?

Thursday 30 October 2014 at 02:50

Parce qu’il vaut mieux en rire qu’en pleurer, laissons la parole à Nicolas Canteloup…

P.S. Le code d’intégration pour vos blogs… :)

<iframe width=”590″ height=”331″ src=”//rutube.ru/play/embed/7302304″ frameborder=”0″ webkitAllowFullScreen mozallowfullscreen allowfullscreen></iframe>

Source: http://www.les-crises.fr/2017-emmanuel-macron/


[Hommage] Rémi Fraisse, et le silence de l’Etat, par Daniel Schneidermann

Wednesday 29 October 2014 at 05:01

Pas un mot. Pas un mot de Hollande. Pas un mot de Valls. Pas un mot de Royal. Pas un mot de Le Foll. Pas un mot de Cazeneuve. Pas un mot de Cambadélis. Pas un mot d’aucun gouvernant socialiste, après la mort de Rémi Fraisse, le jeune manifestant contre le barrage de Sivens, dans le Tarn, dont le premier rapport d’autopsie indique qu’il est mort “après une explosion”, lors d’un échange de projectiles entre manifestants et gendarmes, cocktails molotov contre grenades assourdissantes. Pas un mot (ah si. On me souffle (1) que Cazeneuve a envoyé un communiqué lundi soir, peu avant minuit, soit plus de 24 heures après la nouvelle, communiqué dans lequel il “pense à la famille et aux proches” de la victime). L’expression de la révolte et de la douleur est laissée aux écolos -il fallait entendre Cécile Duflot ce mardi matin, sur France Info. Mais peut-être n’ont-plus de mots. Peut-être n’ont-ils plus de larmes. Peut-être les ont-ils toutes versées pour le PDG de Total, dont les obsèques se déroulaient lundi, en présence de Hollande et Valls.
Rémi Fraisse était botaniste bénévole à Nature Midi-Pyrénées, association affiliée à France Nature Environnement, association qui n’est pas connue pour être un repaire de boutefeux. Il venait de passer un BTS environnement. Soyons prudent : on ne sait pas d’où venait le projectile qui l’a tué. Mais on sait qu’il est mort pour ses idées. “Mourir pour des idées, c’est une chose, mais c’est quand même relativement stupide et bête.” Qui a proféré ces fortes paroles ? Le président (socialiste) du Conseil général du Tarn, Thierry Carcenac. (2) Soyons prudent : on ne connait pas la pensée profonde du président (socialiste) du Conseil général du Tarn. On ne sait pas si c’est Rémi Fraisse, que Carcenac juge “relativement stupide et bête”, ou si c’est la situation elle-même.
Sur la brutalité apparemment très particulière dont font preuve les gendarmes dans l’occupation de Sivens, sur les réserves techniques émises sur le projet de barrage lui-même par un rapport d’experts du ministère de l’environnement, tout est dit, et très bien, par cet article de Mediapart (3). En gros, le projet est surdimensionné, les études ont été bâclées, mais on ne peut pas l’arrêter, maintenant que les opérations de déboisement ont commencé. Et si on l’arrête, on perd le bénéfice des subventions européennes qui doivent le financer partiellement. Toutes les informations sur le mouvement sont par ailleurs disponibles sur le blog Tant qu’il y aura des bouilles (4). Sur tous ces aspects, pas plus que sur la mort d’un jeune écolo de 21 ans, le gouvernement ne dit rien. Sur les projets pharaoniques qui transforment l’un après l’autre l’agriculture française, sur Sivens comme sur la ferme de Mille vaches (5), peut-être n’ont-ils tout simplement plus de mots.
Daniel Schneidermann – 28/10
Source : ASI
====================================

Finalement, Valls a réagi :

“Le Premier ministre Manuel Valls a également défendu son ministre de l’Intérieur en expliquant qu’il “n’accepterait pas les mises en cause, les accusations qui ont été portées en dehors de l’hémicycle”, a-t-il dit à l’Assemblée, dans un silence total.

Je n’accepterai pas la mise en cause des policiers et des gendarmes qui ont compté de nombreux blessés dans leurs rangs [et qui sont] confrontés souvent à une violence extrême”, a-t-il ajouté.

Je n’accepterai pas non plus ces violences [...] Il n’y a pas de place dans notre République et dans la démocratie pour les casseurs et là aussi la justice doit passer”, a lancé le Premier ministre. Il a fait appel à “la dignité” et “à la responsabilité”, “à la décence et à la tempérance” par “respect” pour le jeune homme.” (Source)

Manuel Valls, une vraie vision humaniste de la vie…

P.S. d’ailleurs, c’est comme pour le MH17, pas la peine d’attendre le résultat de l’enquête, le petit jeune mort, c’était un casseur… D’ailleurs Fraisse, ça sonne pas un peu russe des fois ? Bref, attendons les résultats de l’enquête avant d’avoir un avis arrêté – la mort du manifestant étant de toutes façons inexcusable…

====================================

P.P.S. ah, tiens, au fait :  ”Je n’accepterai pas la mise en cause des policiers et des gendarmes – Il n’y a pas de place dans notre République et dans la démocratie pour les casseurs”.

C’est joli, mais cette règle s’applique-t-elle aussi à Kiev ?

Parce qu’il me semble qu’il y avait peu de solidarité avec l’ancien président démocratiquement élu qui s’est retrouvé avec des milliers de miliciens armés tirant sur la police…

(ceci étant dit sans lien direct avec les manifestants français, évidemment sans comparaison avec les miliciens ukrainiens. Je me demande juste comment régirait Valls face à la même chose, vu que les socialistes ont condamné l’ancien président ukrainien…)

====================================

Les proches de Rémi Fraisse témoignent : « Il n’a pas mesuré ce qui l’attendait »

Ils n’ont voulu parler qu’à Reporterre et ne s’exprimeront plus dans les médias. Anna, l’amie de Rémi Fraisse, sa soeur Chloé, et des amis proches racontent dans ce texte qui était celui qu’ils aimaient, et ce qui s’est passé le soir du 25 octobre


- Plaisance-du-Touch (Haute-Garonne), reportage

Trois jours après le drame du Testet, les proches de Rémi Fraisse ont demandé à Reporterre de transmettre ce qu’ils avaient à dire sur la mort de Rémi. Ce témoignage de son amie Anna, de sa soeur, et d’autres amis, a été publié avec leur accord plein et entier.

Dans ce texte, ils reviennent sur la personnalité du jeune homme, le déroulé des évènements du 25 octobre où il se trouvait avec son amie, et les conséquences de cette nuit funeste.

Comme ils le précisent, cet entretien sera pour eux l’unique qu’ils accepteront de livrer sur l’affaire.

« Un type bienveillant, pacifiste et un peu grande gueule »

Nous connaissions Rémi depuis le collège. C’était vraiment quelqu’un de gentil et de doux. Il était très tolérant, sincère, honnête, mais un peu grande gueule. C’est clair qu’il n’hésitait pas à dire ce qu’il pensait, et il n’était pas du genre à se laisser embarquer sans raison par n’importe qui. Un type bienveillant, très apaisant. Il était extrêmement sociable et parvenait sans peine à se faire de nombreux amis où qu’il allait.

Rémi n’avait aucune implication dans des mouvements politiques organisés, sinon ses activités de botaniste dans l’association France Nature Environnement. Il participait à la protection de la nature dans la région toulousaine. Après un BTS en gestion et protection de l’environnement, il travaillait durement comme intérimaire et avait plein de projets : un voyage en Amérique du Sud, la reprise d’une école mais surtout l’achat d’un terrain. Il souhaitait monter une exploitation de plantes médicinales, se renseignait auprès de professionnels. Il avait trouvé sa voie.

Rémi aimait la musique, jouait avec nous de la guitare, du blues, appréciait beaucoup le reggae. Il avait un jour récupéré un bout de bois mort et creusé lui-même un didgeridoo. Il aimait beaucoup faire des choses de ses mains, par lui-même.


- Renoncule à feuille d’ophioglosse : Rémi participait au groupe de protection de cette plante -

« Il est venu à Sivens presque par hasard »

Rémi est venu à Sivens le samedi 25 octobre presque par hasard. Ce n’était pas un militant, encore moins un activiste. Mais il s’intéressait à la protection de l’environnement, se sentait concerné par ce combat. Comme il connaissait d’autres personnes qui y allaient, il a voulu s’y rendre aussi pour afficher un soutien pacifique.

Je suis arrivé avec lui vers 16 heures sur place [c’est Anna qui parle], on voyait déjà au loin la fumée, l’hélicoptère, on ne s’attendait pas du tout à ça. Mais des personnes nous ont rassurés en nous disant que tous ces événements se déroulaient de l’autre côté de la zone, à deux kilomètres. L’ambiance était étrange entre la fête joyeuse, les animations et discussions près des chapiteaux et de l’autre côté au loin les affrontements, les gaz lacrymogènes qui montaient dans le ciel et les bruits d’explosion.

Nous sommes restés du côté du chapiteau, Rémi a rencontré plein de gens, chantait des chansons, les messages inscrits un peu partout nous faisaient rire, il y avait un bon esprit. C’est là dedans que nous voyions notre place. Nous sommes restés à proximité toute la soirée, à faire la fête.

Vers deux heures moins le quart, dans la nuit, des amis sont allés plus loin voir ce qui se passait. À leurs dires, ça avait l’air impressionnant, on entendait encore les explosions fortes. Rémi a voulu y aller. Le temps de faire le trajet, nous sommes arrivés sur les lieux des affrontements. Les flics tiraient en rafale. Le spectacle était très violent, l’ambiance très particulière, nous n’avions jamais vécu ça. Face à une telle scène d’incompréhension et d’injustice, Rémi ne pouvait que réagir d’une manière ou d’une autre. Il avait un peu bu dans la soirée, mais n’était pas ivre, il avait juste une bouteille de vin et des gâteaux apéritifs dans son sac à dos.

Je l’ai vu partir d’un coup en criant « Allez, faut y aller ! » Il a commencé à courir devant. Il n’avait rien pour se protéger, il n’a pas mesuré ce qui l’attendait. Les flics ont tiré en rafale, je me suis écarté pour me mettre à l’abri. Quand je me suis retournée, Rémi n’était plus là.

Ensuite, les gendarmes ont fait une sortie. On a commencé à le chercher, en allant même tout devant, sans succès. Je ne sais pas combien de temps ça a duré. J’ai crié son nom dans le champ mais il ne répondait pas. J’ai passé la nuit dehors à le chercher puis à retrouver sa voiture. C’était un cauchemar. Pendant toute cette phase, j’ai perdu mon portable, un objet précieux car il contient nos dernières photos ensemble.

J’ai dormi quelques heures et dès le lever du soleil, j’ai recommencé à le chercher sur la zone des combats. Il n’y avait plus personne sur les lieux. J’ai juste rencontré une fille qui m’a accompagnée jusqu’à l’infirmerie où il n’était pas non plus. Peu après, quelqu’un a crié « Rémi Fraisse ! », il avait retrouvé son portefeuille, perdu en début de soirée. En retrouvant les amis à la voiture, j’ai découvert qu’ils ne savaient pas non plus où il était.

À 10 heures, j’ai donné son signalement au point d’accueil. Ça a beaucoup trainé. Je suis finalement tombé sur un de ses amis qui venait d’appeler les organisateurs. Ce sont eux qui m’ont appris que son corps avait été retrouvé inerte dans la nuit par les gendarmes. J’avais cru qu’il avait été embarqué. Je n’aurais jamais pu imaginer qu’il arriverait un tel évènement.

« Nous ne souhaitons pas que sa mort soit instrumentalisée »

Tout a été beaucoup trop vite depuis sa mort. La famille a été contactée par téléphone pour l’identification. Elle n’a fait qu’une description verbale et nous avons transmis une photo d’identité qui a confirmé qu’il s’agissait bien de lui. Nous n’avons eu aucun droit en amont, on nous a dit d’attendre l’expertise légale. À ce jour, aucun proche n’a pu avoir accès au corps. Nous avons appris le résultat de l’autopsie par les médias. C’est notamment ce manque d’information qui nous a décidé à porter deux plaintes, pour « homicide volontaire » et pour « violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner », pour avoir accès au dossier.

Rémi était quelqu’un de foncièrement pacifiste. L’après-midi avant sa mort, il avait une nouvelle fois défendu cette attitude non violente dans une discussion avec des occupants de la zone.

Rémi est très vite devenu un instrument médiatique et politique. C’est à la fois désolant et révélateur d’une société qui à bien des égards marche sur la tête. Nous ne demandons pas l’arrêt du projet en son nom, mais il va de soi que ce barrage ne doit pas être construit. Il n’y a pas besoin d’être politisé pour se rendre compte qu’à Sivens se déroule une mobilisation citoyenne légitime, et la violence que certains utilisent là-bas beaucoup moins.

Nous témoignons ici afin qu’un tel drame ne se reproduise pas. Avec ce texte, nous voulons poser les choses une fois pour toute et pouvoir ensuite gérer ça entre nous aussi sereinement que possible.

Nous n’accepterons plus après la publication de cet article aucune sollicitation de la part d’aucun média. Que ceux-ci cessent le harcèlement autour de la famille et des proches, que toute la lumière soit faite sur les causes exactes de sa mort pour que nous puissions faire notre deuil en paix.

- Propos recueillis par Grégoire Souchay

NDLR : nous remercions sincèrement les personnes interrogées pour leur confiance et saluons celles et ceux qui ont permis de rendre cet entretien possible.

Source : Grégoire Souchay pour Reporterre

==========================

En savoir plus sur le projet de barrage ici

Le rapport officiel à la Ministre de l’écologie est ici (finalement publié après 2 mois de grève de la faim d’opposants…) :

“Le choix d’un barrage en travers de la vallée a été privilégié sans réelle analyse des solutions alternatives possibles. Ceci est d’autant plus regrettable que le coût d’investissement rapporté au volume stocké est élevé. [...]  La mission conclut à une surestimation des besoins de substitution de l’ordre de 35%.[...] Le contenu de l’étude d’impact est considéré comme très moyen [...] Il existe un véritable problème de compatibilité entre le projet, tel qu’il est actuellement présenté, les règles d’intervention du FEADER, et les règles applicables en matière d’aides publiques.”

Rapport d’expertise Barrage de Sivens publié par les-crises
Edit : Le Nouvel Obs, en “une”, toujours un journalisme de qualité (je précise que je n’ai cependant pas d’avis définitif sur ce barrage) :
=> en fait, c’est juste l’avis d’un ponte de la FDSEA… (logique, le barrage n’existe pas, si on ne le fait pas, c’est donc une catastrophe, CQFD…)

Source: http://www.les-crises.fr/remi-fraisse-et-le-silence-de-l-etat/


[Reprise] On essaye de nous attirer dans une nouvelle guerre froide, par Mikhaïl Gorbatchev

Wednesday 29 October 2014 at 03:00

Dans une interview à la RTS du 17 septembre 2014, le Nobel de la paix et ex-président de l’URSS a critiqué l’Otan et jugé “révoltantes” les sanctions européennes contre la Russie.

 

Transcription de l’interview :

Q : Les sanctions de l’Union européenne contre la Russie, est-ce que c’est risqué, c’est dangereux selon vous ? Une provocation ?

MG : C’est indéfendable ! Quelle genre de politique est-ce que c’est ? C’est révoltant ! Ça veut dire essayer d’étouffer notre pays pour que la Russie cesse sa politique, sa stratégie de coopération, de développement. Cela veut dire que notre partenaire va mal.

Q : Il y a 25 ans, moment historique : vous avez accepté le mouvement d’époque, une Allemagne unifiée dans l’OTAN, une maison commune (c’étaient vos paroles). Est-ce que l’OTAN a trahi en voulant tellement s’étendre du côté de la Russie ? Est-ce qu’elle a trahi ?

MG : L’OTAN n’est pas nécessaire ! On n’en a plus besoin.  L’OTAN n’est plus nécessaire.

Q : Elle devrait être dissoute ?

MG : On n’a plus besoin de l’OTAN. On s’est bien débarrassé du Pacte de Varsovie. Mais l’OTAN veut toujours prouver qu’elle a sauvé le monde ! Ils veulent, à l’OTAN, faire en sorte que partout sur tous les territoires, on leur obéisse. Ils disent : « pour la paix » ; mais en fait ils veulent simplement avoir une influence universelle sur la politique de tous les pays.

[…]

Q : Cette femme si puissante [Angela Merkel], une Allemagne prospère, équilibrée… A quoi vous pensez ?

MG : Je pense que la génération actuelle et la précédente ont fait beaucoup de choses pour changer l’Allemagne, pour changer la réputation de l’Allemagne. C’est un pays démocratique. Mais je vois que la chancelière Mme Merkel – je la respecte beaucoup – mais elle va dans tous les sens.

Q : Sur la question de l’Ukraine vous dites ?

MG : Oui. Sur les sanctions surtout. Mais je ne pense pas que les Allemands puissent permettre une complication de nos relations.

Q : Vous avez mis fin à la guerre froide. Aujourd’hui, est-ce qu’il y a dans les têtes de certains, aux États-Unis, en Russie, un retour de guerre froide ?

MG : ça y ressemble quelque part. J’ai l’impression parfois aussi que l’on essaye de nous attirer dans une nouvelle guerre froide. Mais il faut tout faire pour ne pas admettre ça. Il faut arrêter quiconque veut une nouvelle guerre froide.

Source : Interview de Mikhaïl Gorbatchev à la RTS, sur le site du Point

Source: http://www.les-crises.fr/reprise-mikhail-gorbatchev-rts/


[Médias] François Hollande se veut le garant de l’unité du pays

Wednesday 29 October 2014 at 02:00

Ah ce stade, le commentaire est inutile – comme la lecture de l’article. Tout est dans la photo…

François Hollande se veut le garant de l’unité du pays.

En déplacement à Dijon, le président de la République a prononcé un discours rassembleur dans lequel il a fustigé “ceux qui pensent que c’était mieux avant.” (clin d’oeils aux lecteurs de Michéa)

Source : Nouvel Obs

Source: http://www.les-crises.fr/medias-francois-hollande-se-veut-le-garant-de-lunite-du-pays/


Miscellanées du mercredi (Delamarche, Sapir, Béchade, Farage)

Wednesday 29 October 2014 at 00:01

I. Olivier Delamarche

Un grand classique : La minute d’Olivier Delamarche : Stress test, Fed et QE3 : « un grand foirage économique » – 27/10

Olivier Delamarche VS Franck Nicolas (1/2): A quoi le quantitative easing de la Fed aurait-t-il servi ? – 27/10

Olivier Delamarche VS Franck Nicolas (2/2): Que dire des résultats des stress tests bancaires ? – 27/10

II. Philippe Béchade

La minute de Philippe Béchade: Japon: 0.5 de croissance pour un déficit commercial de 8 mds – 22/10

Philippe Béchade VS Bernard Aybran (1/2): Marchés: une tendance soutenue par des rumeurs sur de possibles nouvelles mesures de la BCE – 22/10
*

Philippe Béchade VS Bernard Aybran (2/2): Marchés: “les résultats d’entreprises aux États-Unis sont bons” – 22/10

III. Jacques Sapir

La Minute de Jacques Sapir : Budget: Paris et Bruxelle jouent à “un poker menteur” – 28/10

Jacques Sapir: Fed: le QE a-t-il permis à l’économie américaine de redémarrer ? – 28/10

IV. Nigel Farage

Farage : «la Commission européenne est l’ennemi ultime du concept de la démocratie»






Images sous Copyright des auteurs. N’hésitez pas à consulter régulièrement leurs sites, comme les excellents Patrick Chappatte, Ali Dilem, Tartrais, Martin Vidberg, Grémi, ou les sites Soyons sérieux et Urtikan.

Source: http://www.les-crises.fr/miscellanees-29-10-2014/


[RECOMMANDÉ] Nouvel ordre mondial : de nouvelles règles ou un jeu sans règles ? par Vladimir Poutine

Tuesday 28 October 2014 at 03:16

Allez, je continue la propagande :)

Ça me fait rire tous les gens scandalisés par la diffusion des discours russes – cela me rappelle souvent les discours nationalistes qui ont conduit à 1914.

Comme si donner de l’information pouvait être nuisible – à chacun de les lire avec recul et esprit critique…

Vladimir Poutine a pris part à la dernière séance plénière de la XIe session du Club International de Discussion Valdaï. Le thème de la réunion était : L’ordre mondial : de nouvelles règles ou un jeu sans règles ?

Cette année, 108 experts, historiens et analystes politiques originaires de 25 pays, dont 62 participants étrangers, ont pris part aux travaux du Club.

La réunion plénière a présenté une synthèse des travaux du Club au cours des trois journées précédentes, qui ont été consacrées à l’analyse des facteurs d’érosion du système actuel des institutions et des normes du droit international.

Discours du Président Vladimir Poutine durant la dernière séance plénière de la XIe session du Club Valdaï 

Retranscription :

Chers collègues, Mesdames et Messieurs, chers amis,

C’est un plaisir de vous accueillir à la XIe réunion du Club Valdaï.

Il a déjà été mentionné que le Club a de nouveaux co-organisateurs cette année. Ils comprennent des organisations non gouvernementales russes, des groupes d’experts et de grandes universités. Il a également été suggéré d’élargir les discussions à des questions qui ne sont pas seulement liées à la Russie elle-même, mais aussi à la politique et à l’économie mondiales.

J’espère que ces changements dans l’organisation et le contenu des sessions renforceront l’influence du Club en tant que forum de discussion et d’experts de premier plan. Dans le même temps, j’espère que « l’esprit de Valdaï » sera conservé – cette atmosphère libre et ouverte, cette opportunité d’exprimer toutes sortes d’opinions très différentes et franches.

Permettez-moi de dire à cet égard que je ne vais pas vous décevoir et que je vais parler directement et franchement. Certains de mes propos pourront sembler un peu trop rudes, mais si nous ne parlons pas directement et honnêtement de ce que nous pensons vraiment, alors il est absolument inutile de tenir de telles réunions. Il serait préférable, dans ce cas, de se contenter des rencontres diplomatiques, où personne ne dit rien qui ait une véritable portée et, reprenant les paroles d’un célèbre diplomate, où vous vous rendez compte que les diplomates ont une langue faite pour ne pas dire la vérité. 

Nous nous réunissons pour d’autres raisons. Nous nous réunissons pour nous parler franchement. Nous avons besoin d’être directs et francs aujourd’hui, non pas pour s’envoyer des piques, mais afin de tenter de faire la lumière sur ce qui se passe dans le monde, d’essayer de comprendre pourquoi le monde est de moins en moins sûr et de plus en plus imprévisible, et pourquoi les risques augmentent partout autour de nous.

Les débats d’aujourd’hui se sont tenus sous le thème : De nouvelles règles ou un jeu sans règles ? Je pense que cette formule décrit avec précision le tournant historique que nous avons atteint aujourd’hui et le choix auquel nous sommes tous confrontés. Bien sûr, il n’y a rien de nouveau dans l’idée que le monde est en train de changer très rapidement. Je sais que c’est quelque chose dont vous avez parlé durant les échanges d’aujourd’hui. Il est certainement difficile de ne pas remarquer les transformations dramatiques dans la politique mondiale et dans l’économie, dans la vie publique, dans l’industrie, l’information et les technologies sociales.

Permettez-moi de vous demander dès maintenant de me pardonner si j’en viens à répéter ce que certains des participants à la discussion ont déjà dit. C’est pratiquement inévitable. Vous avez déjà eu des discussions détaillées, mais je vais exposer mon point de vue. Il coïncidera avec le point de vue des participants sur certains points et divergera sur d’autres.

Tandis que nous analysons la situation d’aujourd’hui, n’oublions pas les leçons de l’histoire. Tout d’abord, les changements dans l’ordre mondial – et tout ce que nous voyons aujourd’hui constitue des événements de cette ampleur – ont généralement été accompagnés sinon par une guerre et des conflits à l’échelle mondiale, du moins par des chaînes de conflits locaux intenses. Deuxièmement, la politique mondiale est avant tout une question de leadership économique, de guerre et de paix, avec une dimension humanitaire, incluant les droits de l’homme.

Aujourd’hui, le monde est plein de contradictions. Nous devons être francs en nous demandant mutuellement si nous avons un filet de sécurité fiable et bien en place. Malheureusement, il n’y a aucune garantie et aucune certitude que le système actuel de sécurité mondiale et régionale soit en mesure de nous protéger des bouleversements. Ce système a été sérieusement affaibli, fragmenté et déformé. Les organisations internationales et régionales de coopération politique, économique, et culturelle traversent également des temps difficiles.

Oui, un grand nombre des mécanismes actuels visant à assurer l’ordre mondial ont été créés il y a très longtemps, y compris et surtout dans la période suivant immédiatement la Seconde Guerre mondiale. Permettez-moi de souligner que la solidité du système créé à l’époque reposait non seulement sur l’équilibre des forces et les droits des pays vainqueurs, mais aussi sur le fait que les « pères fondateurs » de ce système se respectaient mutuellement, n’essayaient pas de mettre la pression sur les autres, mais tentaient de parvenir à des accords.

L’essentiel est que ce système doit se développer, et malgré ses diverses lacunes, il doit au moins être capable de maintenir les problèmes mondiaux actuels dans certaines limites et de réguler l’intensité de la concurrence naturelle entre les nations.

Je suis convaincu que nous ne pouvions pas prendre ce mécanisme de freins et contrepoids que nous avons construit au cours des dernières décennies, parfois avec les plus grands efforts et difficultés, et tout simplement le détruire sans rien reconstruire à sa place. Sinon, nous serions laissés sans instruments autres que la force brute.

Ce que nous devions faire était de procéder à une reconstruction rationnelle et de l’adapter aux nouvelles réalités du système des relations internationales.

Mais les Etats-Unis, s’étant eux-mêmes déclarés vainqueurs de la Guerre Froide, n’en voyaient pas le besoin. Au lieu d’établir un nouvel équilibre des forces, essentiel pour maintenir l’ordre et la stabilité, ils ont pris des mesures qui ont jeté le système dans un déséquilibre marqué et profond.

La Guerre Froide a pris fin, mais elle n’a pas pris fin avec la signature d’un traité de paix comprenant des accords clairs et transparents sur le respect des règles existantes ou la création d’un nouvel ensemble de règles et de normes. Cela a créé l’impression que les soi-disant « vainqueurs » de la Guerre Froide avaient décidé de forcer les événements et de remodeler le monde afin de satisfaire leurs propres besoins et intérêts. Lorsque le système actuel des relations internationales, le droit international et les freins et contrepoids en place faisaient obstacle à ces objectifs, ce système été déclaré sans valeur, obsolète et nécessitant une démolition immédiate.

Pardonnez l’analogie, mais c’est la façon dont les nouveaux riches se comportent quand ils se retrouvent tout à coup avec une grande fortune, dans ce cas sous la forme d’un leadership et d’une domination mondiale. Au lieu de gérer leur patrimoine intelligemment, pour leur propre bénéfice aussi bien sûr, je pense qu’ils ont commis beaucoup de folies.

Nous sommes entrés dans une période de différentes interprétations et de silences délibérés dans la politique mondiale. Le droit international a maintes fois été forcé de battre en retraite, encore et encore, par l’assaut impitoyable du nihilisme légal. L’objectivité et la justice ont été sacrifiées sur l’autel de l’opportunisme politique. Des interprétations arbitraires et des évaluations biaisées ont remplacé les normes juridiques. Dans le même temps, l’emprise complète sur les médias de masse mondiaux ont rendu possible, quand on le désirait, de présenter le blanc comme noir et le noir comme blanc.

Dans une situation où vous aviez la domination d’un pays et de ses alliés, ou plutôt de ses satellites, la recherche de solutions globales s’est souvent transformée en une tentative d’imposer ses propres recettes universelles. Les ambitions de ce groupe sont devenues si grandes qu’ils ont commencé à présenter les politiques qu’ils concoctaient dans leurs corridors du pouvoir comme le point de vue de l’ensemble de la communauté internationale. Mais ce n’est pas le cas.

La notion même de « souveraineté nationale » est devenue une valeur relative pour la plupart des pays. En essence, ce qui était proposé était cette formule : plus la loyauté de tel ou tel régime en place envers le seul centre de pouvoir dans le monde est grande, plus grande sera sa légitimité.

Nous aurons une discussion libre après mon propos et je serai heureux de répondre à vos questions et je tiens également à utiliser mon droit à vous poser des questions. Que personne n’hésite à essayer de réfuter les arguments que je viens d’exposer lors de la discussion à venir.

Les mesures prises contre ceux qui refusent de se soumettre sont bien connues et ont été essayées et testées de nombreuses fois. Elles comprennent l’usage de la force, la pression économique et la propagande, l’ingérence dans les affaires intérieures, et les appels à une sorte de légitimité « supra-légale » lorsqu’ils ont besoin de justifier une intervention illégale dans tel ou tel conflit ou de renverser des régimes qui dérangent. Dernièrement, nous avons de plus en plus de preuves que le chantage pur et simple a également été utilisé en ce qui concerne un certain nombre de dirigeants. Ce n’est pas pour rien que « Big Brother » dépense des milliards de dollars pour tenir sous surveillance le monde entier, y compris ses propres alliés les plus proches.

Demandons-nous à quel point nous sommes à l’aise avec tout cela, à quel point nous sommes en sécurité, combien nous sommes heureux de vivre dans ce monde, à quel degré de justice et de rationalité il est parvenu. Peut-être n’avons-nous pas de véritables raisons de nous inquiéter, de discuter et de poser des questions embarrassantes ? Peut-être que la position exceptionnelle des États-Unis et la façon dont ils mènent leur leadership est vraiment une bénédiction pour nous tous, et que leur ingérence dans les événements du monde entier apporte la paix, la prospérité, le progrès, la croissance et la démocratie, et nous devrions peut-être seulement nous détendre et profiter de tout cela ?

Permettez-moi de dire que ce n’est pas le cas, absolument pas le cas.

Un diktat unilatéral et le fait d’imposer ses propres modèles aux autres produisent le résultat inverse. Au lieu de régler les conflits, cela conduit à leur escalade ; à la place d’États souverains et stables, nous voyons la propagation croissante du chaos ; et à la place de la démocratie, il y a un soutien pour un public très douteux allant de néo-fascistes avoués à des islamistes radicaux.

Pourquoi soutiennent-ils de tels individus ? Ils le font parce qu’ils décident de les utiliser comme instruments dans la voie de la réalisation de leurs objectifs, mais ensuite, ils se brûlent les doigts et font marche arrière. Je ne cesse jamais d’être étonné par la façon dont nos partenaires ne cessent de marcher sur le même râteau, comme on dit ici en Russie, c’est-à-dire de faire les mêmes erreurs encore et encore.

Ils ont jadis parrainé des mouvements islamistes extrémistes pour combattre l’Union soviétique. Ces groupes se sont formés au combat et aguerris en Afghanistan, et ont plus tard donné naissance aux Talibans et à Al-Qaïda. L’Occident les a sinon soutenus, du moins a fermé les yeux sur cela, et, je dirais, a fourni des informations et un soutien politique et financier à l’invasion de la Russie et des pays de la région d’Asie centrale par les terroristes internationaux (nous ne l’avons pas oublié). C’est seulement après que des attaques terroristes horribles aient été commises sur le sol américain lui-même que les États-Unis ont pris conscience de la menace collective du terrorisme. Permettez-moi de vous rappeler que nous avons été le premier pays à soutenir le peuple américain à l’époque, le premier à réagir comme des amis et partenaires après la terrible tragédie du 11 Septembre.

Au cours de mes conversations avec les dirigeants américains et européens, je parlais toujours de la nécessité de lutter ensemble contre le terrorisme, de le considérer comme un défi à l’échelle mondiale. Nous ne pouvons pas nous résigner et accepter cette menace, nous ne pouvons pas la couper en morceaux séparés à l’aide du deux poids deux mesures. Nos partenaires ont exprimé leur accord, mais après quelques temps, nous nous sommes retrouvés au point de départ. Ce fut d’abord l’opération militaire en Irak, puis en Libye, qui a été poussée au bord du gouffre. Pourquoi la Libye a-t-elle été réduite à cette situation ? Aujourd’hui, c’est un pays en danger de démantèlement et qui est devenu un terrain d’entraînement pour les terroristes.

Seule la détermination et la sagesse de la direction égyptienne actuelle a sauvé ce pays arabe clé du chaos et de l’emprise des terroristes. En Syrie, comme par le passé, les États-Unis et leurs alliés ont commencé à financer et armer directement les rebelles et leur ont permis de remplir leurs rangs de mercenaires provenant de divers pays. Permettez-moi de vous demander où ces rebelles obtiennent leur argent, leurs armes et leurs spécialistes militaires ? D’où tout cela vient-il ? Comment l’Etat Islamique notoire a-t-il réussi à devenir un groupe aussi puissant, de fait une véritable force armée ?

Quant aux sources de financement, aujourd’hui, l’argent ne vient plus seulement de la drogue, dont la production a augmenté non pas de quelques points de pourcentage mais dans des proportions considérables depuis que les forces de la coalition internationale sont intervenues en Afghanistan. Vous êtes au courant de cela. Les terroristes obtiennent également de l’argent en vendant du pétrole. Le pétrole est produit dans le territoire contrôlé par les terroristes, qui le vendent à des prix de dumping, le produisent et le transportent. Mais d’autres achètent ce pétrole, le revendent, et font du profit, sans penser au fait qu’ils financent ainsi les terroristes qui pourraient venir tôt ou tard sur leur propre sol et semer la destruction dans leur propre pays.

Où trouvent-ils les nouvelles recrues ? En Irak, après que Saddam Hussein ait été renversé, les institutions de l’État, y compris l’armée, ont été laissés en ruines. Nous avons dit, à l’époque, soyez très, très prudents. Vous mettez les gens à la rue, et que vont-ils y faire ? N’oubliez pas que légitimement ou non, ils faisaient partie de la direction d’une grande puissance régionale, et en quoi est-ce que vous les transformez maintenant ?

Quel fut le résultat ? Des dizaines de milliers de soldats, d’officiers et d’anciens militants du parti Baas se sont retrouvé à la rue et ont aujourd’hui rejoint les rangs des rebelles. Peut-être cela explique-t-il pourquoi l’Etat islamique s’est avéré si efficace. En termes militaires, il agit très efficacement et il a certains cadres très compétents. La Russie a mis en garde à plusieurs reprises sur les dangers des actions militaires unilatérales, des interventions dans les affaires des Etats souverains, et des flirts avec les extrémistes et les radicaux. Nous avons insisté pour que les groupes luttant contre le gouvernement syrien central, surtout l’Etat islamique, soient inscrits sur les listes des organisations terroristes. Mais avons-nous vu le moindre résultat ? Nous avons lancé des appels en vain.

Nous avons parfois l’impression que nos collègues et amis sont constamment aux prises avec les conséquences de leurs propres politiques, et qu’ils dépensent tous leurs efforts dans le traitement des risques qu’ils ont eux-mêmes créés, en payant un prix de plus en plus élevé.

Chers collègues,

Cette période de domination unipolaire a démontré de manière convaincante que le fait d’avoir un seul centre de pouvoir ne rend pas les processus mondiaux plus faciles à gérer. Au contraire, ce type de construction instable a montré son incapacité à lutter contre les menaces réelles telles que les conflits régionaux, le terrorisme, le trafic de drogue, le fanatisme religieux, le chauvinisme et le néo-nazisme. Dans le même temps, il a ouvert une large voie aux fiertés nationales exacerbées, à la manipulation de l’opinion publique et à la brutalisation et à l’oppression des faibles par les forts.

Essentiellement, le monde unipolaire est tout simplement un moyen de justifier la dictature sur les individus et les nations. Le monde unipolaire s’est avéré un fardeau trop rude, trop lourd et trop ingérable même pour son chef auto-proclamé. Des commentaires ont été faits dans ce sens juste avant mon intervention, et je suis entièrement d’accord avec eux. Voilà pourquoi nous voyons, en cette nouvelle étape de l’histoire, des tentatives de recréer un semblant de monde quasi-bipolaire en tant que modèle commode pour perpétuer le leadership américain. Peu importe qui prend la place du centre du mal dans la propagande américaine, peu importe qui remplace l’ex-l’URSS en tant que principal adversaire. Cela pourrait être l’Iran, en tant que pays qui cherche à acquérir la technologie nucléaire, la Chine, en tant que plus grande économie mondiale, ou la Russie, en tant que superpuissance nucléaire.

Aujourd’hui, nous assistons à de nouveaux efforts pour fragmenter le monde, dessiner de nouvelles lignes de clivage, réunir des coalitions qui ne sont pas façonnées pour quelque chose mais dirigées contre quelqu’un, qui que ce soit, pour créer l’image d’un ennemi comme ce fut le cas pendant les années de Guerre Froide, et s’emparer du droit à ce leadership, ou diktat si vous préférez. La situation était présentée de cette façon au cours de la Guerre Froide. Nous savons tous cela et nous le comprenons bien. Les Etats-Unis ont toujours dit à leurs alliés : « Nous avons un ennemi commun, un ennemi terrible, le centre du mal, et nous vous protégeons, vous nos alliés, de cet ennemi, et nous avons donc le droit de vous donner des ordres, de vous forcer à sacrifier vos intérêts politiques et économiques et à payer votre quote-part des coûts de cette défense collective, mais nous serons les responsables de tout cela bien sûr. » En bref, nous voyons aujourd’hui des tentatives, dans un monde nouveau et changeant, de reproduire les modèles familiers de la gestion globale, et tout cela de manière à garantir aux États-Unis leur situation exceptionnelle et à récolter des dividendes politiques et économiques.

Mais ces tentatives sont de plus en plus déconnectées de la réalité et sont en contradiction avec la diversité du monde. Des mesures de ce genre créent inévitablement des confrontations et provoquent des contre-mesures, et ont pour résultat l’effet inverse de ce qui était souhaité. Nous voyons ce qui se passe quand la politique commence imprudemment à s’ingérer dans l’économie et que la logique des décisions rationnelles cède la place à la logique de confrontation, qui ne fait que nuire aux propres positions et intérêts économiques des pays en question, y compris les intérêts des entreprises nationales.

Les projets économiques communs et les investissements mutuels rapprochent objectivement les pays et contribuent à aplanir les problèmes actuels dans les relations entre Etats. Mais aujourd’hui, la communauté mondiale des affaires fait face à des pressions sans précédent de la part des gouvernements occidentaux. De quelles affaires, de quelles opportunités économiques ou de quel pragmatisme peut-on encore parler lorsque nous entendons des slogans tels que « la patrie est en danger », « le monde libre est menacé », et « la démocratie est en péril » ? Et tout le monde doit alors se mobiliser. Voilà à quoi ressemble une vraie politique de mobilisation.

Les sanctions sapent déjà les fondements du commerce mondial, les règles de l’OMC et le principe de l’inviolabilité de la propriété privée. Ils portent un coup dangereux au modèle libéral de la mondialisation fondé sur les marchés, la liberté et la concurrence, qui, permettez-moi de le souligner, est précisément un modèle qui a avant tout bénéficié aux pays occidentaux. Et maintenant, ils risquent de perdre la confiance en tant que gouvernants de la mondialisation. Nous devons nous demander, pourquoi était-ce nécessaire ? Après tout, la prospérité des États-Unis repose en grande partie sur la confiance des investisseurs et des détenteurs étrangers de dollars et de valeurs mobilières étasuniennes. Cette confiance est clairement mise à mal et des signes de désillusion quant aux fruits de la mondialisation sont maintenant visibles dans de nombreux pays.

Le précédent bien connu de Chypre et les sanctions pour des motifs politiques n’ont fait que renforcer la tendance à chercher à renforcer la souveraineté économique et financière et la volonté des pays ou de leurs groupes régionaux de trouver des moyens de se protéger contre les risques de pressions extérieures. Nous voyons déjà que de plus en plus de pays cherchent des moyens de devenir moins dépendants du dollar et mettent en place des systèmes financiers, de paiement et des monnaies de réserve alternatifs. Je pense que nos amis américains sont tout simplement en train de scier la branche sur laquelle ils sont assis. On ne peut pas mélanger la politique et l’économie, mais c’est ce qui se passe maintenant. J’ai toujours pensé et je pense encore aujourd’hui que les sanctions pour des motifs politiques sont une erreur qui nuira à tous, mais je suis sûr que nous reviendrons sur ce point.

Nous savons comment ces décisions ont été prises et qui exerçait les pressions. Mais permettez-moi de souligner que la Russie ne va pas perdre son calme, s’offenser ou venir mendier à la porte de quiconque. La Russie est un pays auto-suffisant. Nous allons travailler au sein de l’environnement économique international qui a pris forme, développer la production et la technologie nationales et agir de façon plus décisive pour mener à bien notre transformation. Les pressions de l’extérieur, comme cela a été le cas à plusieurs reprises par le passé, ne feront que consolider notre société, nous maintenir en éveil et nous amener à nous concentrer sur nos principaux objectifs de développement.

Bien sûr, les sanctions constituent un obstacle. Ils essaient de nous affaiblir par ces sanctions, d’entraver notre développement et de nous pousser à l’isolement politique, économique et culturel, en d’autres termes nous forcer à prendre du retard. Mais permettez-moi de rappeler encore une fois que le monde est un endroit très différent aujourd’hui. Nous n’avons pas l’intention de nous isoler de quiconque ou de choisir une sorte de voie de développement fermée, en essayant de vivre en autarcie. Nous sommes toujours ouverts au dialogue, y compris au sujet de la normalisation de nos relations économiques et politiques. Nous comptons ici sur l’approche et la position pragmatiques des milieux d’affaires dans les principaux pays.

Certains disent aujourd’hui que la Russie tournerait le dos à l’Europe – de tels propos ont probablement été tenus ici aussi lors des discussions – et rechercherait de nouveaux partenaires commerciaux, surtout en Asie. Permettez-moi de dire que ce n’est absolument pas le cas. Notre politique active dans la région Asie-Pacifique n’a pas commencé d’hier, et non en réponse aux sanctions, mais c’est une politique que nous suivons depuis maintenant un bon nombre d’années. Comme beaucoup d’autres pays, y compris les pays occidentaux, nous avons vu que l’Asie joue un rôle de plus en plus important dans le monde, dans l’économie et dans la politique, et nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre d’ignorer ces développements.

Permettez-moi de dire encore une fois que tout le monde agit ainsi, et nous allons le faire nous aussi, d’autant plus qu’une grande partie de notre pays est géographiquement en Asie. Au nom de quoi devrions-nous ne pas faire usage de nos avantages concurrentiels dans ce domaine ? Ce serait faire preuve d’une vue extrêmement courte que de ne pas le faire.

Le développement des relations économiques avec ces pays et la réalisation de projets d’intégration communs créent aussi de grandes incitations pour notre développement national. Les tendances démographiques, économiques et culturelles actuelles suggèrent que la dépendance à une seule superpuissance va objectivement diminuer. C’est une chose que les experts européens et américains ont également évoqué dans leurs réunions et travaux.

Peut-être que l’évolution de la politique internationale sera le reflet de l’évolution que nous constatons dans l’économie mondiale, à savoir la concurrence intensive pour des niches spécifiques et des changements fréquents de dirigeants dans des domaines précis. Ceci est tout à fait possible.

Il ne fait aucun doute que des facteurs humanitaires tels que l’éducation, la science, la santé et la culture jouent un rôle plus important dans la concurrence mondiale. Cela a également un impact important sur les relations internationales, y compris parce que cette ressource douce (soft power) dépendra dans une large mesure des réalisations concrètes dans le développement du capital humain plutôt que des trucages sophistiqués de la propagande.

Dans le même temps, la formation d’un soi-disant monde polycentrique (je voudrais également attirer l’attention sur cela, chers collègues), en soi et d’elle-même, n’améliore pas la stabilité ; de fait, il est plus probable que ce soit l’inverse. L’objectif d’atteindre l’équilibre mondial est en train de devenir un casse-tête assez difficile, une équation à plusieurs inconnues.

Qu’est-ce que l’avenir nous réserve donc, si nous choisissons de ne pas respecter les règles – même si elles peuvent être strictes et peu pratiques – mais plutôt de vivre sans règles du tout ? Et ce scénario est tout à fait possible ; nous ne pouvons pas l’exclure, compte tenu des tensions dans la situation internationale. Beaucoup de prédictions peuvent déjà être faites, en tenant compte des tendances actuelles, et malheureusement, elles ne sont pas optimistes. Si nous ne créons pas un système clair d’engagements et d’accords mutuels, si nous ne construisons pas les mécanismes de gestion et de résolution des situations de crise, les symptômes de l’anarchie mondiale vont inévitablement s’accroître.

Aujourd’hui, nous voyons déjà une forte augmentation de la probabilité de tout un ensemble de conflits violents avec la participation directe ou indirecte des plus grandes puissances mondiales. Et les facteurs de risque comprennent non seulement les conflits multinationaux traditionnels, mais aussi l’instabilité interne dans différents États, surtout quand on parle de nations situées aux intersections des intérêts géopolitiques des grandes puissances, ou à la frontière de continents civilisationnels, culturels, historiques et économiques.

L’Ukraine, qui j’en suis sûr a été longuement évoquée et dont nous parlerons encore, est l’un des exemples de ces sortes de conflits qui affectent l’équilibre international des puissances, et je pense que ce ne sera certainement pas le dernier. De là émane la prochaine menace réelle de détruire le système actuel d’accords de contrôle des armements. Et ce processus dangereux a été initié par les Etats-Unis d’Amérique quand ils se sont unilatéralement retirés du Traité sur les missiles anti-balistiques (ABM) en 2002, puis se sont lancés dans la création de leur système global de défense antimissile et poursuivent aujourd’hui activement ce processus.

Chers collègues et amis,

Je tiens à souligner que nous ne sommes pas à l’origine de tout cela. Une fois de plus, nous glissons vers des temps où, au lieu de l’équilibre des intérêts et des garanties mutuelles, ce sera la peur et l’équilibre de la destruction mutuelle qui empêcheront les nations de se livrer à un conflit direct. En l’absence d’instruments juridiques et politiques, les armes deviennent encore une fois le point focal de l’ordre du jour mondial ; elles sont utilisées n’importe où et n’importe comment, sans la moindre sanction du Conseil de sécurité de l’ONU. Et si le Conseil de sécurité refuse de rendre de tels arrêts, alors on le condamne immédiatement comme un instrument dépassé et inefficace.

De nombreux États ne voient pas d’autres moyens d’assurer leur souveraineté qu’en obtenant leurs propres bombes. Cela est extrêmement dangereux. Nous insistons sur la nécessité de poursuivre les négociations ; nous ne sommes pas seulement en faveur de pourparlers, mais nous insistons sur la nécessité de poursuivre les pourparlers de réduction des arsenaux nucléaires. Moins nous aurons d’armes nucléaires dans le monde, mieux ce sera. Et nous sommes prêts à mener les discussions les plus sérieuses et les plus concrètes sur le désarmement nucléaire – mais seulement des discussions sérieuses sans aucun deux poids, deux mesures.

Qu’est-ce que je veux dire par là ? Aujourd’hui, de nombreux types d’armes de haute précision sont déjà assimilables à des armes de destruction massive en termes de capacité, et en cas de renonciation complète aux armes nucléaires ou de réduction radicale du potentiel nucléaire, les nations qui sont des leaders dans la création et la production de systèmes de haute précision auront un net avantage militaire. La parité stratégique sera perturbée, ce qui est susceptible d’entraîner de la déstabilisation. Le recours à une soi-disant première frappe préventive globale peut devenir tentant. En bref, les risques ne diminuent pas, mais s’intensifient.

La prochaine menace évidente est l’escalade plus avant de conflits ethniques, religieux et sociaux. De tels conflits sont dangereux non seulement en tant que tels, mais aussi parce qu’ils créent des zones d’anarchie, d’absence total de lois et de chaos autour d’eux, des lieux qui sont commodes pour les terroristes et les criminels, et où la piraterie, le trafic d’êtres humains et le trafic de drogue sont florissants.

D’ailleurs, nos collègues ont alors essayé de contrôler plus ou moins ces processus, d’exploiter les conflits régionaux et de concevoir des « révolutions colorées » en fonction de leurs intérêts, mais le génie s’est échappé de la lampe. Il semble que les pères de la théorie du chaos contrôlé eux-mêmes ne sachent plus quoi en faire ; il y a confusion dans leurs rangs.

Nous suivons de près les discussions à la fois au sein de l’élite dirigeante et de la communauté des experts. Il suffit de regarder les gros titres de la presse occidentale de l’année dernière. Les mêmes personnes sont appelées des combattants pour la démocratie, puis des islamistes ; d’abord, ils parlent de révolutions puis ils parlent d’émeutes et de soulèvements. Le résultat est évident : la propagation du chaos mondial.

Chers collègues,

Compte tenu de la situation mondiale, il est temps de commencer à se mettre d’accord sur des choses fondamentales. Ceci est d’une importance et d’une nécessité extrêmes ; cela vaudrait beaucoup mieux que de se retirer dans nos propres retranchements. Plus nous faisons face à des problèmes communs, plus nous nous trouvons dans le même bateau, pour ainsi dire. Et la manière sensée de trouver une issue réside dans la coopération entre les nations, les sociétés, dans le fait de trouver des réponses collectives aux défis croissants, et dans la gestion commune des risques. Certes, certains de nos partenaires, pour des raisons bien à eux, ne se remémorent cela que lorsque c’est dans leurs intérêts.

L’expérience pratique montre que les réponses communes aux défis ne sont pas toujours une panacée, et il faut que nous comprenions cela. En outre, dans la plupart des cas, elles sont difficiles à atteindre : il n’est pas facile de surmonter les différences dans les intérêts nationaux et la subjectivité de différentes approches, en particulier lorsqu’il s’agit de pays ayant des traditions culturelles et historiques différentes. Mais néanmoins, nous avons des exemples où, ayant des objectifs communs et agissant sur la base des mêmes critères, nous avons obtenu collectivement un réel succès.

Permettez-moi de vous rappeler la résolution du problème des armes chimiques en Syrie, et le dialogue de fond conséquent sur le programme nucléaire iranien, ainsi que notre travail sur les questions nord-coréennes, qui ont aussi connu des résultats positifs. Pourquoi ne pouvons-nous pas utiliser cette expérience à l’avenir pour relever les défis locaux et mondiaux ?

Quelle pourrait être la base juridique, politique, et économique pour un nouvel ordre mondial qui permettrait la stabilité et la sécurité, tout en encourageant une saine concurrence, et en ne permettant pas la formation de nouveaux monopoles qui entravent le développement ? Il est peu probable que quiconque puisse proposer dès à présent des solutions absolument exhaustives et prêtes à l’emploi. Nous aurons besoin de beaucoup de travail et de la participation d’un large éventail de gouvernements, d’entreprises mondiales, de la société civile, et de plates-formes d’experts telles que celle-ci.

Cependant, il est évident que les succès et les résultats réels ne sont possibles que si les participants clés des affaires internationales peuvent se mettre d’accord sur l’harmonisation des intérêts de base, sur le fait de s’imposer des limites raisonnables, et de donner l’exemple d’un leadership positif et responsable. Nous devons identifier clairement où se terminent les actions unilatérales et nous avons besoin de mettre en œuvre des mécanismes multilatéraux. Et dans le cadre de l’amélioration de l’efficacité du droit international, nous devons résoudre le dilemme entre les actions de la communauté internationale visant à assurer la sécurité et les droits de l’homme, et le principe de la souveraineté nationale et de la non-ingérence dans les affaires intérieures d’un État, quel qu’il soit.

Ces collisions mêmes conduisent de plus en plus à une interférence extérieure arbitraire dans des processus internes complexes, et encore et encore, ils provoquent des conflits dangereux entre les principaux acteurs mondiaux. La question de la préservation de la souveraineté devient presque primordiale dans le maintien et le renforcement de la stabilité mondiale.

De toute évidence, discuter des critères de l’utilisation de la force extérieure est extrêmement difficile. Il est pratiquement impossible de la séparer des intérêts des nations particulières. Cependant, il est beaucoup plus dangereux de rester dans une situation où il n’y a pas d’accords qui soient clairs pour tout le monde, et où des conditions claires pour l’ingérence nécessaire et légale ne sont pas fixées.

J’ajouterais que les relations internationales doivent être basées sur le droit international, qui lui-même doit reposer sur des principes moraux tels que la justice, l’égalité et la vérité. Peut-être le plus important est-il le respect de ses partenaires et de leurs intérêts. C’est une formule évidente, mais le fait de la respecter, tout simplement, pourrait changer radicalement la situation mondiale.

Je suis certain qu’avec une volonté réelle, nous pouvons restaurer l’efficacité du système international et des institutions régionales. Nous n’avons même pas besoin de reconstruire quelque chose de nouveau, à partir de zéro ; ce n’est pas une « terre vierge », d’autant plus que les institutions créées après la Seconde Guerre mondiale sont relativement universelles et peuvent être dotées d’un contenu moderne et adéquat pour gérer la situation actuelle.

Cela est vrai quant à l’amélioration du travail de l’ONU, dont le rôle central est irremplaçable, ainsi que celui de l’OSCE, qui, durant 40 ans, a démontré qu’elle était un mécanisme nécessaire pour assurer la sécurité et la coopération dans la région euro-atlantique. Je dois dire que même aujourd’hui, en essayant de résoudre la crise dans le sud-est de l’Ukraine, l’OSCE joue un rôle très positif.

À la lumière des changements fondamentaux dans l’environnement international, l’augmentation des désordres incontrôlables et des diverses menaces, nous avons besoin d’un nouveau consensus mondial des forces responsables. Il ne s’agit pas de conclure certaines transactions locales ou un partage des zones d’influence dans l’esprit de la diplomatie classique, ni d’assurer la domination globale et complète de quiconque. Je pense que nous avons besoin d’une nouvelle version de l’interdépendance. Nous ne devrions pas avoir peur de cela. Au contraire, c’est un bon instrument pour harmoniser les positions.

Ceci est particulièrement pertinent étant donné le renforcement et la croissance de certaines régions de la planète, processus qui nécessite objectivement l’institutionnalisation de ces nouveaux pôles, par la création de puissantes organisations régionales et l’élaboration de règles pour leur interaction. La coopération entre ces centres contribuerait sérieusement à la stabilité de la sécurité, de la politique et de l’économie mondiales. Mais afin d’établir un tel dialogue, nous devons partir du postulat selon lequel tous les centres régionaux et projets d’intégration qui se forment autour d’eux doivent avoir les mêmes droits au développement, afin qu’ils puissent se compléter mutuellement et que personne ne puisse artificiellement les forcer à entrer en conflit ou en opposition. De telles actions destructrices briseraient les liens entre les Etats, et les Etats eux-mêmes seraient soumis à des difficultés extrêmes, voire même à une destruction totale.

Je voudrais vous rappeler les événements de l’année dernière. Nous avions prévenu nos partenaires américains et européens que les décisions hâtives prises en coulisses, par exemple, sur l’association de l’Ukraine avec l’UE, étaient emplies de risques graves pour l’économie. Nous n’avons pas même évoqué les problèmes politiques ; nous n’avons parlé que de l’économie, en disant que de telles mesures, mises en place sans arrangements préalables, nuiraient aux intérêts de nombreux autres pays, dont la Russie – en tant que principal partenaire commercial de l’Ukraine –, et qu’un large débat sur ces questions était nécessaire. D’ailleurs, à cet égard, je vous rappelle que par exemple, les négociations sur l’adhésion de la Russie à l’OMC ont duré 19 ans. Ce fut un travail très difficile, et un certain consensus a finalement été atteint.

Pourquoi est-ce que je soulève cette question ? Parce qu’en mettant en œuvre ce projet d’association avec l’Ukraine, nos partenaires seraient venus à nous avec leurs biens et services par la porte arrière, pour ainsi dire, et nous n’avons pas donné notre accord pour cela, personne ne nous a rien demandé à ce sujet. Nous avons eu des discussions sur tous les sujets liés à l’association de l’Ukraine avec l’UE, des discussions persistantes, mais je tiens à souligner que notre action a été menée d’une manière tout à fait civilisée, en indiquant des problèmes possibles, et en soulignant les raisonnements et arguments évidents. Mais personne ne voulait nous écouter et personne ne voulait discuter. Ils nous ont simplement dit : ce ne sont pas vos affaires, point, fin de la discussion. Au lieu du dialogue global mais – je le souligne – civilisé que nous proposions, ils en sont venus à un renversement de gouvernement ; ils ont plongé le pays dans le chaos, dans l’effondrement économique et social, dans une guerre civile avec des pertes considérables.

Pourquoi ? Quand je demande à mes collègues pourquoi, ils n’ont plus de réponse ; personne ne dit rien. C’est tout. Tout le monde est désemparé, disant que ça c’est juste passé comme ça. Ces actions n’auraient pas dû être encouragées – cela ne pouvait pas fonctionner. Après tout (je me suis déjà exprimé à ce sujet), l’ancien président ukrainien Viktor Ianoukovitch avait tout signé, il était d’accord avec tout. Pourquoi ont-ils fait ça ? Dans quel but ? Est-ce là une manière civilisée de résoudre les problèmes ? Apparemment, ceux qui fomentent constamment de nouvelles « révolutions colorées » se considèrent comme de « brillants artistes » et ne peuvent tout simplement pas s’arrêter.

Je suis certain que le travail des associations intégrées, la coopération des structures régionales, doivent être construits sur une base transparente et claire ; le processus de formation de l’Union économique eurasienne est un bon exemple d’une telle transparence. Les États qui font partie de ce projet ont informé leurs partenaires de leurs plans à l’avance, en précisant les paramètres de notre association et les principes de son travail, qui correspondent pleinement aux règles de l’Organisation mondiale du commerce.

J’ajouterais que nous aurions également accueilli favorablement l’initiation d’un dialogue concret entre l’Eurasie et l’Union européenne. D’ailleurs, ils nous ont presque catégoriquement refusé cela, et il est également difficile d’en comprendre les raisons. Qu’est-ce qu’il y a de si effrayant à cela ?

Et bien sûr, avec un tel travail conjoint, on pourrait penser que nous devons nous engager dans un dialogue (j’ai évoqué cela à de nombreuses reprises et j’ai entendu l’accord de plusieurs de nos partenaires occidentaux, du moins en Europe) sur la nécessité de créer un espace commun pour la coopération économique et humanitaire s’étendant depuis l’Atlantique jusqu’à l’océan Pacifique.

Chers collègues,

La Russie a fait son choix. Nos priorités sont d’améliorer encore nos institutions démocratiques et notre économie ouverte, d’accélérer notre développement interne, en tenant compte de toutes les tendances modernes positives observées dans le monde, et en consolidant notre société sur la base des valeurs traditionnelles et du patriotisme.

Nous avons un agenda pacifique et positif, tourné vers l’intégration. Nous travaillons activement avec nos collègues de l’Union économique eurasienne, de l’Organisation de coopération de Shanghai, du BRICS et avec d’autres partenaires. Ce programme vise à renforcer les liens entre les gouvernements, pas à les fragiliser. Nous ne prévoyons pas de façonner des blocs ou de participer à un échange de coups.

Les allégations et déclarations selon lesquelles la Russie essaie d’établir une sorte d’empire, empiétant sur la souveraineté de ses voisins, n’ont aucun fondement. La Russie n’a pas besoin d’un quelconque rôle spécial ou exclusif dans le monde – je tiens à le souligner. Tout en respectant les intérêts des autres, nous voulons simplement que nos propres intérêts soient pris en compte et que notre position soit respectée.

Nous sommes bien conscients du fait que le monde est entré dans une ère de changements et de transformations globales, dans laquelle nous avons tous besoin d’un degré particulier de prudence et de la capacité à éviter toutes mesures irréfléchies. Dans les années suivant la guerre froide, les acteurs politiques mondiaux ont en quelque sorte perdu ces qualités. Maintenant, nous devons nous les rappeler. Sinon, les espoirs d’un développement stable et pacifique seront une illusion dangereuse, tandis que la crise d’aujourd’hui servira simplement de prélude à l’effondrement de l’ordre mondial.

Oui, bien sûr, j’ai déjà souligné que la construction d’un ordre mondial plus stable est une tâche difficile. Nous parlons d’une tâche longue et difficile. Nous avons réussi à élaborer des règles pour l’interaction après la Seconde Guerre mondiale, et nous avons pu parvenir à un accord à Helsinki dans les années 1970. Notre devoir commun est de résoudre ce défi fondamental à cette nouvelle étape du développement.

Je vous remercie vivement pour votre attention.

Traduction en français :http://www.sayed7asan.blogspot.fr

Texte original (russe) :http://kremlin.ru/news/46860   Traduction (anglais) :http://eng.news.kremlin.ru/news/23137 

======================================================

Il me semble intéressant de mettre aussi ici le discours de Vladimir Poutine du 10 février 2007 à Munich :

Madame la chancelière fédérale,
Monsieur Teltschik,
Mesdames,
Messieurs,

Je vous remercie pour cette invitation à participer à une conférence aussi représentative, qui a réuni hommes politiques, militaires, entrepreneurs et experts de plus de 40 pays du monde.

Le format de conférence me permet d’éviter les formules de politesse superflues et de recourir aux clichés diplomatiques aussi agréables à entendre que vides de sens. Le format de la conférence me permet de dire ce que je pense des problèmes de la sécurité internationale et, si mes jugements vous semblent inutilement polémiques ou même imprécis, je vous demande de ne pas m’en vouloir. Ce n’est qu’une conférence et j’espère que dans deux ou trois minutes Monsieur Teltschik n’allumera pas la « lampe rouge ».

On sait que les problèmes de la sécurité internationale sont bien plus larges que ceux de la stabilité militaro-politique. Ces problèmes concernent la stabilité de l’économie mondiale, la lutte contre la pauvreté, la sécurité économique et le développement du dialogue entre les civilisations.

Le caractère universel et indivisible de la sécurité est reflété dans son principe de base : « la sécurité de chacun signifie la sécurité de tous ». Franklin Roosevelt avait déclaré au début de la Seconde Guerre mondiale : « Où que la paix soit rompue, c’est le monde entier qui est menacé ».

Ces paroles restent valables aujourd’hui. D’ailleurs, le sujet de notre conférence en témoigne : Les Crises globales impliquent une responsabilité globale.

Il y a vingt ans, le monde était divisé sur le plan économique et idéologique et sa sécurité était assurée par les potentiels stratégiques immenses des deux superpuissances.

La confrontation globale reléguait les problèmes économiques et sociaux urgents à la périphérie des relations internationales et de l’agenda mondial. De même que n’importe quelle guerre, la Guerre froide nous a laissé, pour ainsi dire, des « obus non explosés ». Je pense aux stéréotypes idéologiques, aux doubles standards et autres clichés hérités de la mentalité des blocs.

Le monde unipolaire proposé après la Guerre froide ne s’est pas non plus réalisé.

Certes, l’histoire de l’humanité a connu des périodes d’unipolarité et d’aspiration à la domination mondiale. L’histoire de l’humanité en a vu de toutes sortes.

Qu’est ce qu’un monde unipolaire ? Malgré toutes les tentatives d’embellir ce terme, il ne signifie en pratique qu’une seule chose : c’est un seul centre de pouvoir, un seul centre de force et un seul centre de décision.

C’est le monde d’un unique maître, d’un unique souverain. En fin de compte, cela est fatal à tous ceux qui se trouvent au sein de ce système aussi bien qu’au souverain lui-même, qui se détruira de l’intérieur.

Bien entendu, cela n’a rien à voir avec la démocratie, car la démocratie, c’est, comme on le sait, le pouvoir de la majorité qui prend en considération les intérêts et les opinions de la minorité.

A propos, on donne constamment des leçons de démocratie à la Russie. Mais ceux qui le font ne veulent pas, on ne sait pourquoi, eux-mêmes apprendre.

J’estime que le modèle unipolaire n’est pas seulement inadmissible pour le monde contemporain, mais qu’il est même tout à fait impossible. Non seulement parce que, dans les conditions d’un leader unique, le monde contemporain (je tiens à le souligner : contemporain) manquera de ressources militaro-politiques et économiques. Mais, et c’est encore plus important, ce modèle est inefficace, car il ne peut en aucun cas reposer sur la base morale et éthique de la civilisation contemporaine.

Cependant, tout ce qui se produit actuellement dans le monde – et nous ne faisons que commencer à discuter à ce sujet – est la conséquence des tentatives pour implanter cette conception dans les affaires mondiales : la conception du monde unipolaire.

Quel en est le résultat ?

Les actions unilatérales, souvent illégitimes, n’ont réglé aucun problème. Bien plus, elles ont entraîné de nouvelles tragédies humaines et de nouveaux foyers de tension. Jugez par vous-mêmes : les guerres, les conflits locaux et régionaux n’ont pas diminué. Monsieur Teltschik l’a mentionné d’une manière très délicate. Les victimes de ces conflits ne sont pas moins nombreuses, au contraire, elles sont bien plus nombreuses qu’auparavant.

Nous sommes en présence de l’emploi hypertrophié, sans aucune entrave, de la force – militaire – dans les affaires internationales, qui plonge le monde dans un abîme de conflits successifs. Par conséquent, aucun des conflits ne peut être réglé dans son ensemble. Et leur règlement politique devient également impossible.

Nous sommes témoins d’un mépris de plus en plus grand des principes fondamentaux du droit international. Bien plus, certaines normes et, en fait, presque tout le système du droit d’un seul Etat, avant tout, bien entendu, des États-Unis, a débordé de ses frontières nationales dans tous les domaines : dans l’économie, la politique et dans la sphère humanitaire, et est imposé à d’autres États. À qui cela peut-il convenir ?

Dans les affaires internationales, on se heurte de plus en plus souvent au désir de régler tel ou tel problème en s’inspirant de ce qu’on appelle l’opportunité politique, fondée sur la conjoncture politique.

Évidemment, cela est très dangereux, personne ne se sent plus en sécurité, je tiens à le souligner, parce que personne ne peut plus trouver refuge derrière le droit international. Évidemment, cette politique est le catalyseur de la course aux armements.

La domination du facteur force alimente inévitablement l’aspiration de certains pays à détenir des armes de destruction massive. Qui plus est, on a vu apparaître des menaces foncièrement nouvelles qui étaient connues auparavant, mais qui acquièrent aujourd’hui un caractère global, par exemple, le terrorisme.

Je suis certain qu’en ce moment crucial il faut repenser sérieusement l’architecture globale de la sécurité.

Il faut rechercher un équilibre raisonnable des intérêts de tous les acteurs du dialogue international. D’autant plus que le « paysage international » change très rapidement et substantiellement en raison du développement dynamique de toute une série d’États et de régions.

Mme la chancelière fédérale l’a déjà mentionné. Ainsi, le PIB commun de l’Inde et de la Chine en parité de pouvoir d’achat dépasse déjà celui des États-Unis. Le PIB des États du groupe BRIC – Brésil, Russie, Inde et Chine – évalué selon le même principe dépasse le PIB de l’Union européenne tout entière. Selon les experts, ce fossé va s’élargir dans un avenir prévisible.

Il ne fait pas de doute que le potentiel économique des nouveaux centres de la croissance mondiale sera inévitablement converti en influence politique, et la multipolarité se renforcera.

Le rôle de la diplomatie multilatérale s’accroît considérablement dans ce contexte. L’ouverture, la transparence et la prévisibilité en politique n’ont pas d’alternative raisonnable et l’emploi de la force doit effectivement être une ultime mesure, de même que la peine de mort dans les systèmes judiciaires de certains États.

Aujourd’hui, au contraire, nous observons une situation où des pays dans lesquels la peine de mort est interdite même à l’égard des assassins et d’autres dangereux criminels participent allégrement à des opérations militaires qu’il est difficile de considérer comme légitimes et qui provoquent la mort de centaines, voire de milliers de civils !

Une question se pose en même temps : devons-nous rester impassibles face à divers conflits intérieurs dans certains pays, aux actions des régimes autoritaires, des tyrans, à la prolifération des armes de destructions massive ? C’est le fond de la question posée à la chancelière fédérale par Monsieur Lieberman [1] , notre vénérable collègue. Ai-je bien compris votre question (dit-il en s’adressant à Joseph Lieberman) ? Bien entendu, c’est une question importante ! Pouvons-nous assister impassiblement à ce qui se produit ? J’essaierai de répondre à votre question. Bien entendu, nous ne devons pas rester impassibles. Bien sûr que non.

Mais avons-nous les moyens de faire face à ces menaces ? Oui, nous les avons. Il suffit de se rappeler l’histoire récente. Le passage à la démocratie n’a-t-il pas été pacifique dans notre pays ? Le régime soviétique a subi une transformation pacifique, malgré la grande quantité d’armes, y compris nucléaires, dont il disposait ! Pourquoi donc faut-il bombarder et pilonner aujourd’hui à tout bout de champ ? Manquerions-nous de culture politique, de respect pour les valeurs démocratiques et le droit, en l’absence d’une menace d’extermination réciproque ?

Je suis certain que la Charte des Nations unies est l’unique mécanisme d’adoption de décisions sur l’emploi de la force en tant que dernier recours. Dans cet ordre d’idées, ou bien je n’ai pas compris ce qui vient d’être déclaré par notre collègue ministre italien de la Défense [2], ou bien il ne s’est pas exprimé clairement. En tout cas, j’ai entendu ce qui suit : l’usage de la force ne peut être légitime que si cette décision a été prise par l’OTAN, l’Union européenne ou l’ONU. S’il l’estime effectivement, alors nos points de vue sont différents. Ou bien j’ai mal entendu. L’usage de la force n’est légitime que sur la base d’un mandat des Nations unies. Il ne faut pas substituer l’OTAN et l’Union européenne à l’Organisation des Nations unies. Lorsque l’ONU réunira réellement les forces de la communauté internationale qui pourront réagir efficacement aux événements dans certains pays, lorsque nous nous débarrasserons du mépris du droit international, la situation pourra changer. Sinon, elle restera dans l’impasse et les lourdes erreurs se multiplieront. Il faut oeuvrer pour que le droit international soit universel aussi bien dans sa compréhension que dans l’application de ses normes.

Il ne faut pas oublier qu’en politique, le mode d’action démocratique suppose nécessairement une discussion et une élaboration minutieuse des décisions.

Mesdames et messieurs !

Le risque potentiel de déstabilisation des relations internationales tient également à l’absence évidente de progrès dans le domaine du désarmement.

La Russie se prononce pour la reprise du dialogue à ce sujet.

Il est très important d’appliquer les normes juridiques internationales en matière de désarmement, tout en poursuivant la réduction des armements nucléaires.

Nous avons convenu avec les États-Unis de ramener nos charges nucléaires équipant les vecteurs stratégiques à 1700 – 2 200 unités d’ici au 31 décembre 2012. La Russie a l’intention de respecter strictement ses engagements. Nous espérons que nos partenaires agiront en toute transparence, eux aussi, et ne garderont pas sous le coude quelques centaines de charges nucléaires pour les « mauvais jours ». Donc, si le nouveau ministre états-unien de la Défense annonce que les Etats-Unis se garderont de mettre leurs charges excédentaires en stock, ni de les dissimuler « sous un coussin » ou « sous une couverture », je vous demanderai de vous lever pour applaudir ses paroles. Ce serait une déclaration très importante.

La Russie respecte strictement le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et le régime multilatéral de contrôle de la technologie des missiles, et elle a l’intention de les respecter à l’avenir également. Les principes à la base de ces documents revêtent un caractère universel.

À cette occasion, je tiens à rappeler que dans les années 1980, l’URSS et les États-Unis ont signé un Traité sur l’élimination des missiles à moyenne et plus courte portée sans toutefois conférer de caractère universel à ce document.

À l’heure actuelle, toute une série de pays possèdent des missiles de cette classe : la République populaire démocratique de Corée, la République de Corée, l’Inde, l’Iran, le Pakistan, l’État d’Israël. De nombreux autres pays sont en train de concevoir ces systèmes et envisagent d’en doter leurs forces armées. Or, seuls les États-Unis d’Amérique et la Russie restent fidèles à leur engagement de ne pas construire ces armes.

Il est clair que dans ces conditions nous sommes obligés de veiller à assurer notre sécurité.

En même temps, il faut empêcher l’apparition de nouveaux types d’armes de pointe susceptibles de déstabiliser la situation. Je ne parle pas des mesures visant à prévenir la confrontation dans de nouveaux milieux, surtout dans l’espace. On sait que les « guerres des étoles » ne relèvent plus de la fiction, mais de la réalité. Dès le milieu des années 1980, nos partenaires états-uniens ont réussi à intercepter un de leurs satellites.

Selon la Russie, la militarisation de l’espace est susceptible d’avoir des conséquences imprévisibles pour la communauté mondiale, conséquences qui ne seraient pas moins graves que l’avènement de l’ère nucléaire. C’est pour cela que nous avons maintes fois lancé des initiatives visant à prévenir le déploiement d’armes dans l’espace.

Aujourd’hui, je tiens à vous dire que nous avons préparé un projet de Traité sur le non-déploiement d’armes dans l’espace. D’ici peu, nous l’enverrons à nos partenaires en qualité de proposition officielle. Je propose de travailler ensemble sur ce document.

En ce qui concerne les projets prévoyant le déploiement en Europe d’éléments du système de défense antimissiles, ils ne manquent pas non plus de nous inquiéter. Qui a besoin d’une nouvelle relance – inévitable en l’occurrence – de la course aux armements ? Je doute fort que ce soient les Européens.

Aucun des pays dits « à problèmes » ne possède de missiles ayant une portée de l’ordre de 5 000 à 8 000 kilomètres et susceptibles de menacer l’Europe. Mieux, dans un avenir prévisible, leur apparition dans ces pays n’est pas envisageable. Je dirais même plus : une tentative de lancer un missile nord-coréen, par exemple, vers les États-Unis via l’Europe serait contraire aux lois de la balistique.

Profitant de mon séjour en Allemagne, je tiens à évoquer la crise que traverse le Traité sur les forces armées conventionnelles en Europe.

Signé en 1999, ce Traité était adapté à une nouvelle réalité géopolitique : le démantèlement du bloc de Varsovie. Sept ans se sont écoulés depuis, mais il n’a été ratifié que par quatre pays, dont la Fédération de Russie.

Les pays de l’OTAN ont ouvertement déclaré qu’ils ne ratifieraient pas le Traité, dont les dispositions relatives aux limitations dans la zone des « flancs » (déploiement sur les « flancs » d’un certain nombre de forces armées) tant que la Russie ne procéderait pas au retrait de ses bases de la Géorgie et de la Moldavie. Le retrait de nos troupes de la Géorgie est en cours et ce, à un rythme accéléré. Tout le monde sait que nous avons déjà réglé ces problèmes avec nos collègues géorgiens. Quant à la Moldavie, on y trouve pour le moment une formation de 1 500 militaires chargés de maintenir la paix et de protéger les entrepôts de munitions qui y subsistent depuis l’époque soviétique. Nous discutons en permanence de cette question avec Monsieur Solana : il connaît bien notre position. Nous sommes prêts à aller plus loin dans cette direction.

Mais que se passe-t-il pendant ce temps-là ? Eh bien, on voit apparaître en Bulgarie et en Roumanie des « bases états-uniennes légères avancées » de 5 000 militaires chacune. Il se trouve que l’OTAN rapproche ses forces avancées de nos frontières, tandis que nous – qui respectons strictement le Traité – ne réagissons pas à ces démarches.

Il est évident, je pense, que l’élargissement de l’OTAN n’a rien à voir avec la modernisation de l’alliance, ni avec la sécurité en Europe. Au contraire, c’est un facteur représentant une provocation sérieuse et abaissant le niveau de la confiance mutuelle. Nous sommes légitimement en droit de demander ouvertement contre qui cet élargissement est opéré. Que sont devenues les assurances données par nos partenaires occidentaux après la dissolution du Pacte de Varsovie ? Où sont ces assurances ? On l’a oublié. Néanmoins, je me permettrai de rappeler aux personnes présentes dans cette salle ce qui a été dit. Je tiens à citer des paroles tirées du discours de M. Werner, alors Secrétaire général de l’OTAN, prononcé à Bruxelles le 17 mai 1990 : « Que nous soyons prêts à ne pas déployer les troupes de l’OTAN à l’extérieur du territoire de la RFA, cela donne à l’Union soviétique des garanties sûres de sécurité ». Où sont aujourd’hui ces garanties ?

Les blocs de béton et les pierres du Mur de Berlin sont depuis longtemps des souvenirs. Mais il ne faut pas oublier que sa chute est devenue possible notamment grâce au choix historique de notre peuple – le peuple de Russie – en faveur de la démocratie et de la liberté, de l’ouverture et du partenariat sincère avec tous les membres de la grande famille européenne.

Or, maintenant, on s’efforce de nous imposer de nouvelles lignes de démarcation et de nouveaux murs. Même s’ils sont virtuels, ils ne manquent pas de diviser, de compartimenter notre continent. Faudra-t-il à nouveau des années et des décennies, une succession de plusieurs générations de responsables politiques pour démanteler ces murs ?

Mesdames, Messieurs !

Nous préconisons le renforcement du régime de non-prolifération. L’actuelle base juridique internationale permet de mettre au point des technologies de production de combustible nucléaire pour l’utiliser ensuite à des fins pacifiques. Et bon nombre d’États veulent, à juste titre, développer leur propre nucléaire civil en tant que base de leur indépendance énergétique. En même temps, nous comprenons que ces technologies peuvent se transformer rapidement en know-how pour la production de matériaux nucléaires militaires.

Cela suscite une grave tension internationale. La situation autour du programme nucléaire iranien en est un exemple éclatant. Si la communauté internationale n’élabore pas de solution raisonnable à ce conflit d’intérêts, le monde sera ébranlé, à l’avenir également, par ce genre de crises déstabilisatrices, car l’Iran n’est pas l’unique pays du seuil, et nous ne le savons que trop, nous et vous. Aussi, nous serons en permanence confrontés à la menace de prolifération des armes de destruction massive (ADM).

L’année dernière, la Russie a proposé de créer des centres d’enrichissement d’uranium multinationaux. Nous acceptons que de tels centres se créent non seulement en Russie, mais aussi dans d’autres pays où le nucléaire civil se développe sur une base légale. Les États cherchant à développer leur nucléaire civil pourraient recevoir du combustible, en participant directement au travail de ces centres, évidemment, sous le contrôle rigoureux de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).

Or, les dernières initiatives du président des États-Unis, George W. Bush, sont à l’unisson de cette initiative russe. Je pense que la Russie et les États-Unis sont objectivement et également intéressés au durcissement du régime de non-prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs. Et ce sont justement nos deux pays, leaders pour leur potentiel nucléaire et balistique, qui doivent, eux aussi, devenir leaders de la mise au point de nouvelles mesures plus rigoureuses en matière de non-prolifération. La Russie est prête à effectuer un tel travail. Nous menons des consultations avec nos amis états-uniens.

Somme toute, il doit y être question de la mise en place de tout un système de leviers politiques et de stimulants économiques qui n’incitent pas les États à créer leurs propres capacités en matière de cycle du combustible nucléaire, mais leur permettent de développer leur nucléaire civil, en renforçant ainsi leur potentiel énergétique.

À cette occasion, je tiens à parler plus en détail de la coopération énergétique internationale. Mme la chancelière fédérale en a parlé, elle aussi, bien que brièvement. Dans la sphère énergétique, la Russie s’oriente vers l’élaboration de principes de marché et de conditions transparentes qui soient les mêmes pour tous. Il est évident que le prix des hydrocarbures doit être établi par le marché et ne doit pas faire l’objet de spéculations politiques ni de pressions ou de chantages économiques.

Nous sommes ouverts à la coopération. Des compagnies étrangères participent à nos plus grands projets économiques. Selon différentes évaluations, jusqu’à 26% de l’extraction de pétrole en Russie reviennent – réfléchissez bien à ce chiffre – jusqu’à 26% de l’extraction de pétrole en Russie reviennent au capital étranger. Essayez donc de me citer un exemple de présence aussi large du business russe dans les branches clés de l’économie des États d’Occident. Il n’y en a pas !

Je tiens aussi à rappeler la proportion d’investissements arrivant en Russie et partant de Russie vers d’autres pays du monde. Ce rapport est à peu près de quinze pour un. Voilà un exemple éclatant de l’ouverture et de la stabilité de l’économie russe.

La sécurité économique est une sphère où tous doivent s’en tenir à des principes uniques. Nous sommes prêts à une concurrence loyale.

L’économie russe a de plus en plus de possibilités pour cela. Cette dynamique est objectivement évaluée par des experts et nos partenaires étrangers. Récemment, par exemple, la Russie a été mieux notée au sein de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) : notre pays est passé notamment du groupe à risque 4 au groupe 3. Profitant de l’occasion, ici, aujourd’hui à Munich, je voudrais remercier tout particulièrement nos collègues allemands de leur concours à l’adoption de la décision évoquée.

Continuons. Comme vous le savez, le processus d’adhésion de la Russie à l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) est entré dans sa phase finale. Je rappellerai qu’au cours des négociations longues et difficiles, nous avons plus d’une fois entendu des paroles sur la liberté d’expression, la liberté de commerce et des possibilités égales, mais seulement quand il s’agissait du marché russe.

Et encore un thème très important qui influe directement sur la sécurité globale. On parle beaucoup aujourd’hui de la lutte contre la pauvreté. Mais qu’est-ce qui se produit en réalité ? D’une part, des ressources financières – et souvent importantes – sont allouées à des programmes d’assistance aux pays les plus pauvres. Quoi qu’il en soit, et beaucoup le savent ici également, il n’est pas rare que les compagnies des pays donateurs eux-mêmes « les utilisent ». D’autre part, l’agriculture dans les pays industrialisés est toujours subventionnée, alors que l’accès des hautes technologies est limité pour d’autres.

Appelons donc les choses par leurs noms : il s’avère qu’une main distribue les « aides caritatives », alors que l’autre entretient l’arriération économique, mais récolte aussi des bénéfices. La tension sociale surgissant dans de telles régions dépressives se traduit inévitablement par la croissance du radicalisme et de l’extrémisme, tout en alimentant le terrorisme et les conflits locaux. Et si tout cela se produit de surcroît, par exemple, au Proche-Orient dans le contexte d’une vision aggravée du monde extérieur, en tant que monde injuste, une déstabilisation globale risque de se produire.

Il va sans dire que les principales puissances mondiales doivent voir cette menace et organiser, par conséquent, un système plus démocratique et plus équitable de rapports économiques qui donne à tous une chance et une possibilité de développement.

Intervenant à une conférence sur la sécurité, on ne peut pas, non plus, Mesdames et Messieurs, passer sous silence l’activité de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). L’OSCE a été créée pour examiner tous les aspects, je tiens à le souligner, tous les aspects de la sécurité, qu’il s’agisse des aspects politico-militaires, économiques ou humanitaires et ce, dans leurs rapports réciproques.

Mais que voyons-nous aujourd’hui en réalité ? Nous voyons que cet équilibre est manifestement perturbé. On essaie de transformer l’OSCE en instrument vulgaire au service des intérêts politiques extérieurs d’un seul pays ou d’un groupe de pays à l’égard d’autres États. Et c’est pour cette tâche, que l’on a aussi « monté de toutes pièces » l’appareil bureaucratique de l’OSCE qui n’est nullement lié aux États fondateurs. On a « monté de toutes pièces » pour cette tâche également les procédures d’adoption des décisions et d’utilisation des fameuses « organisations non gouvernementales (ONG) ». Formellement, il s’agit effectivement d’organisations indépendantes, mais financées rationnellement et, par conséquent, contrôlées.

Conformément aux documents fondateurs, dans la sphère humanitaire, l’OSCE est appelée à accorder aux pays membres, à leur demande, un concours en matière de respect des normes internationales dans le domaine des droits de l’homme. C’est une importante mission. Nous la soutenons. Mais cela ne signifie pas qu’on peut s’ingérer dans les affaires intérieures d’autres pays et encore moins tenter de leur dicter la manière dont ils doivent vivre et se développer.

Il est parfaitement évident qu’une telle ingérence ne contribue pas du tout à la maturation d’Etats authentiquement démocratiques. Par contre, elle les rend dépendants, avec comme conséquence l’instabilité sur les plans économique et politique.

Nous espérons que l’OSCE se guidera sur ses tâches immédiates et organisera ses relations avec des États souverains sur la base du respect, de la confiance et de la transparence.

Mesdames, Messieurs !

En conclusion, je voudrais retenir ceci. Nous entendons très souvent – et je les entends personnellement – les appels de nos partenaires, y compris nos partenaires européens, exhortant la Russie à jouer un rôle de plus en plus actif dans les affaires internationales.

Je me permettrai à cette occasion une petite remarque. Nous n’avons pas besoin d’être éperonnés ou stimulés. La Russie a une histoire millénaire, et pratiquement elle a toujours eu le privilège de pratiquer une politique extérieure indépendante.

Nous n’avons pas l’intention aujourd’hui non plus de faillir à cette tradition. En même temps, nous voyons que le monde a changé et nous évaluons avec réalisme nos propres possibilités et notre propre potentiel. Et évidemment nous voudrions aussi avoir affaire à des partenaires sérieux et tout aussi indépendants avec lesquels nous pourrions travailler à l’édification d’un monde plus démocratique et plus équitable, tout en y garantissant la sécurité et la prospérité non seulement des élites, mais de tous.

Je vous remercie de votre attention.

Vladimir Poutine

[1] Favorable à une action militaire contre l’Iran, le sénateur Joseph Lieberman est le leader des faucons de la gauche états-unienne. Il se situe dans la ligne du très anti-russe Henry « Scoop » Jackson, figure tutélaire des néoconservateurs. NDLR.

Source: http://www.les-crises.fr/nouvel-ordre-mondial-de-nouvelles-regles-ou-un-jeu-sans-regles/


[Médias] Brésil : Rousseff réélue – mais c’est un peu comme si elle avait perdu, quoi…

Tuesday 28 October 2014 at 02:00

Nos médias – une certaine idée de l’information et, surtout, du pluralisme…

====================================================================

Les 2 sources :

====================================================================

====================================================================

Les perroquets :

====================================================================

====================================================================

====================================================================

====================================================================

====================================================================

====================================================================

====================================================================

====================================================================

====================================================================

====================================================================

====================================================================

====================================================================

====================================================================

====================================================================

====================================================================

Les perroquets avec une dose de vocabulaire :

====================================================================

====================================================================

====================================================================

Les médias plus objectifs :

====================================================================

====================================================================

====================================================================

====================================================================

====================================================================

Le plus franc :

====================================================================

(c’est le France 24 allemand)

Bah oui, “Présidente de justesse”, donc pas tout à fait Présidente…

====================================================================

La preuve : !!!

====================================================================

Les Echos ont trouvé le coupable :

====================================================================

====================================================================

Bref, en résumé :

Dilma roussef réelue de justesse à la tête du bresil
Bresil : Dilma roussef réélue presidente de justesse
DIlma Rousseff réélue de justesse à la tête du Bresil
DIlma Rousseff réélue de justesse presidente du Bresil
Bresil :la presidente DilmaRoussef réélue de justesse
Présidentielle au Brésil : Dilma Roussef réélue de justesse
Brésil : Roussef réélue de justesse
Dilma Roussef réélue de kustesse à la presidence du bresil
Bresil : la presidente Dilma Roussef réélue de justesse
Bresil : reelue de justesse, Dilma Roussef appel au “dialogue”
Dilma roussef réélue de justesse à la tête du bresil
Dilma Roussef réélue de justesse au Bresil
Bresil : Dilma Roussef réélue de justesse
Dilma Roussef réélue de justesse à la tête du Breil avec 51,45% des voix
Au brésil, Dilma Roussef réélue à l ‘arraché
Brésil: dilma Roussef , rééélue de peu, Promet dialogue et changements
Dilma Roussef réélue au terme d’une campagne féroce
Dilma Roussef réélue présidente du Bresil
Dilma Roussef, présidente de justesse
Brésil: la Bourse malmenée àprès la réélection de Dilma Roussef
Dilma Roussef, réélue de justesse présidente du Brésil: la victoire du Social

Les résultats

Source Wikipédia :

Rousseff a été élue avec 51,639 %… “De justesse” avec 3 460 000 voix d’avance

Face à Aécio Nunes, que la presse a réussi à qualifier en permanence de :

alors que les résultats du 1er tour (indiqués) montrent qu’il n’y avait aucun candidat sérieux à sa droite – c’est donc le candidat de droite quoi…

Et surtout, tient, il a été élu avec combien Hollande ?

Hollande a donc été élu avec 51,635 %… Soit moins que Rousseff pour son 2e mandat, le 4e de suite de son parti…

C’est moi ou je n’ai jamais vu indiqué en 2012 que Hollande avait été élu “de justesse” ?

=======================================================

Bon après, c’est sûr que 51,4 %, ce n’est pas comme en Ecosse, où 55 %, c’est une “large victoire” :

Épilogue

Vous trouvez que j’exagère un peu ? Voyez :

====================================================================

Il vient juste de gagner 4 présidentielles de suite, mais c’est un parti affaibli…

C’est pas comme les partis en France…

====================================================================

Fallait pas voter pour elle on vous a dit !!!

Source: http://www.les-crises.fr/rousseff-reelue-mais-c-est-un-peu-comme-si-elle-avait-perdu-quoi/


La vaste blague des Stress-Tests de la BCE…

Monday 27 October 2014 at 04:03

Pour ceux que cela intéresse, j’en ai parlé au JT de 12h30 sur France Culture – à écouter ici.

Les Stress Tests de la BCE

La BCE s’apprêtant à prendre en charge la supervision des grandes banques européennes, elle a réalisé un audit de leurs comptes, et effectué un “stress test”.

Le stress test est une simulation de ce qui adviendrait en cas de problèmes importants. Elle a rendu sa copie hier.

Et VICTOIRE :

stress test bce

=========================================================

stress test bce

=========================================================

stress test bce

=========================================================

stress test bce

=========================================================

stress test bce

stress test bce

=========================================================

stress test bce

=========================================================

stress test bce

=========================================================

stress test bce

=========================================================

stress test bce

=========================================================

stress test bce

=========================================================

stress test bce

Enfin, victoire dans les médias qui reprennent la dépêche de l’AFP qui reprend la communiqué de la BCE… :

Francfort (AFP) – Les grandes banques françaises ont passé haut la main l’évaluation menée auprès de 130 établissements par la Banque centrale européenne, mais 25 institutions bancaires – dont neuf italiennes – ont échoué, selon les résultats divulgués dimanche par la BCE.

Parmi les treize établissements évalués en France, seule la Caisse de refinancement de l’habitat (CRH) ne respectait pas les niveaux de solvabilité requis.

Au total, 25 banques de la zone euro n’ont pas réussi à cet examen sans précédent visant à restaurer la confiance dans ce secteur-clé de l’économie, mais douze d’entre elles ont déjà pris des mesures pour corriger leur besoin en capital.

En France, les banques examinées, outre la CRH, étaient la Banque centrale de Compensation, Banque PSA Finance, BNP Paribas, BPCE, Crédit Agricole, Crédit Mutuel, HSBC France, la Banque Postale, la banque publique d’investissement bpifrance, RCI Banque (filiale de Renault), la Société de financement local et Société Générale.

Cet examen “va doper la confiance publique dans le secteur bancaire“, s’est félicité Vitor Constancio, vice-président de la BCE.

“En identifiant les problèmes et les risques, il va aider à réparer les bilans et rendre les banques plus résistantes et robustes. Cela devrait faciliter la distribution du crédit en Europe, ce qui va soutenir la croissance économique”, a-t-il ajouté.

Au total, cette opération d’envergure a mobilisé plus de 6.000 personnes.

Voici les victimes :

stress test bce

Voici le bilan global :

stress test bce

Voici le rapport synthétique :

Stress Tests Aggregate Report publié par les-crises

Et le rapport complet :

Stress Test : Rapport publié par les-crises

Analysons…

C’est quoi un Stress-Test ?

Il y a déjà eu des stress-tests en Europe, en 2009 (qui avaient certifié les banques irlandaises en faillite peu après) et 2011 (avec des faillites juste après d’autres banques certifiée), par le régulateur européen.

Cette fois ci, on allait voir ce qu’on allait voir, car la BCE allait s’en occuper…

Eh bien, on a vu… Mais il faut creuser – ce que bien peu ont fait…

Alors c’est quoi un Stress-Test ?

C’est un peu comme quand vous achetez une pompe pour un bassin extérieur. Vous n’avez pas envie qu’elle explose en gelant l’hiver. En général, chez vous, ça descend à -10°C. Eh bien dans un stress test, vous testez si elle n’explose pas à -20 °C, et là vous êtes tranquille.

Le principe est identique pour les banques : vous regardez si elles résistent à des environnements difficiles.

Quand on dit que les banques françaises ont passé haut la main le test, ont dit qu’elles résistent haut la main aux hypothèses du test de la BCE.

Mais bien entendu, tout repose ici sur la dureté du test : si vous testez la pompe à -2 °C, elle le passe haut la main, mais cela vous fera une belle jambe cet hiver…

Analysons donc les hypothèses de la BCE…

Les hypothèses des Stress Tests

Elles sont bien cachées mais les voilà :

Stress Tests : Hypothèses publié par les-crises

stress test bce

On va les détailler, d’abord pour la France, puis pour les autres…

La BCE a testé un scénario noir avec récession, déflation, hausse des taux d’intérêt, chute de la Bourse et de l’immobilier.

C’est tout à la fois MAIS il n’y a qu’un seul scénario de crise (sic.).

The adverse scenario, designed by the ESRB, reflects the systemic risks that are currently assessed as representing the most pertinent threats to the stability of the EU banking sector: (i) an increase in global bond yields amplified by an abrupt reversal in risk assessment, especially towards emerging market economies; (ii) a further deterioration of credit quality in countries with feeble demand; (iii) stalling policy reforms jeopardising confidence in the sustainability of public finances; and (iv) the lack of necessary bank balance sheet repair to maintain affordable market funding. (Source)

Scenario Noir Prix Immobiliers

Voici le scenario noir pour la France au niveau des prix des logements :

stress test bce

Cela se lit ainsi :

  1. l’hypothèse moyenne (Baseline) est que les prix baisseront de -1,6 % en 2014, -1,0 % en 2015 et augmenteront de 0,5 % en 2016. Pourquoi ? Parce que…
  2. on fait pour ce scenario l’hypothèse d’un choc induisant une déviation à la baisse par rapport à l’hypothèse de -11,2 % en 2014, -11,5 % en 2015 et -6,3 % en 2016 ;
  3. le scenario testé est donc une baisse des prix de l’immobilier de -12,8 % en 2014, -12,4 % en 2015 et -5,9 % en 2016 ;
  4. bref, on aurait une baisse des prix de l’immobilier de -26,6 % en 3 ans.

Honnêtement, c’est un scénario noir assez honnête pour ce cadre d’exercice. Les prix sont au double de la moyenne historique, et ça commence à baisser.

Donc -27 %, pourquoi pas.

Cependant, notons que cet item n’a probablement pas un énorme impact sur les banques, paradoxalement. En effet, on n’a pas comme aux USA de système de prêts gagés sur la valeur des maisons, et, contrairement à 1993, les banques possèdent très peu d’immobilier, et vendre le bien ne vous exonère pas de continuer à rembourser la banque si le montant de la vente ne suffit pas.

La bulle actuelle est une bulle des ménages. Si les prix chutent, ils auront faut un mauvais investissement personnel, mais ils devront continuer à se saigner pour rembourser. C’est à dire qu’en pratique, ils ne vendront pas à perte leur bien (“tant que tu n’as pas vendu, tu n’as pas perdu”), et resteront “scotchés” dans leur appartement…

Voici les hypothèses de tous les pays :

stress test bce

La BCE fait donc subir un choc de 20 points sur l’immobilier résidentiel à la zone euro.

De même la BCE teste une chute de l’immobilier commercial de -12 % en France et -10 % dans la zone euro.

Au final, pas grand chose à dire. Ce n’est pas le cas pour la suite…

Scenario Noir Chômage

Pour la France :

stress test bce

On a ici un scenario noir… 12,2 % de chômage en 2016 !

Or, on est passé de 7,4 % en 2008 à 10,2 % en 2014, et ça monte toujours. 12,2, c’est moins que le taux actuel en Italie, et l’Espagne et la Grèce ont montré que le taux pouvait atteindre 25 %…

C’est donc un scenario gris, et clairement pas noir…

Il en est de même pour le reste de la zone :

stress test bce

Le choc sur la zone euro est donc à peine de 2 points de plus que l’estimation actuelle..

Scenario Noir Inflation

Pour la France :

stress test bce

Vous ne rêvez pas : le choc titanesque est une déflation de… -0,3 % en 2016 !

Et donc une inflation plus basse que prévu de 2,2 points en 3 ans…

C’est un niveau de choc très limité…

Au passage, la BCE ne teste pas de modèle avec emballement de l’inflation à 3 ou 4 %…

Pour la zone :

stress test bce

Idem, un choc de -1,9 points en 3 ans (par rapport à l’hypothèse moyenne) – sans aucune déflation dans la zone.

Scenario Noir Bourse

Voici donc le scénario noir boursier en France :

stress test bce

On a donc un krach de -20 % sur un an (la Bourse remontant les 2 années suivantes. Ici les taux ne se cumulent pas, car c’est bien l’écart par rapport à la valeur du CAC attendue).

Rappelons quelques années noires :

Bref, le krach envisagé est ici bien trop faible pour être considéré comme sérieux, surtout vu le niveau stratosphérique actuel des actions…

Pour la zone :

stress test bce

Idem avec un scénario de krach européen à -18 %…

Scenario Noir Récession

Pour la France :

stress test bce

La plaisanterie s’approfondit : on a un scenario noir avec une récession de -0,4 % en 2014 et -1,1 % en 2015, et de la croissance faible ensuite. Soit une récession au final de -1,5%.

Rappelons qu’en 2009, la récession a été de -2,5 % – soit 1 point de moins que le scenario noir de la BCE !

Idem en Europe :

stress test bce

-2,1 % en zone euro (contre -4,4 en 2009), avec -2,6 en Allemagne (contre -5,1 en 2009)…

Scenario Noir Taux d’intérêt

Last but not Least : l’évolution des taux en France (emprunt d’État à 10 ans) :

stress test bce

Alors là, on a le pompon du ridicule, le choc terrible, c’est une hausse des taux de 1,4 points de base au maximum qui se réduit à 1 les deux années suivantes : les taux atteignent ainsi 3,8 %.

S’il est vrai que les taux actuels de la France sont très bas, ils étaient déjà à 3,8 % en 2009, 4,8 % en 2008 et 5,8 % en 2000 !!

D’ailleurs, ils sont sympas, c’est marqué dans la dernière colonne : depuis 2000, ce taux a varié entre 1,7 % et 5,8 %. Alors du coup, il prennent comme cas terrible : 3,8 % !!

Alors qu’il faudrait tester à 7 ou 8 % au vu de l’expérience des autres pays frontaliers !

Pour la zone :

stress test bce

Le ridicule est complet :

Conclusion

Elle est sans appel : le scenario noir testé par la BCE est sans commune mesure avec la crise de 2008, et reste donc très loin de ce qui se passerait face à une crise encore pire – que beaucoup d’analystes redoutent…

Ainsi si les stress tests précédents avaient des scenarios équivalent à une brise soutenue, la BCE est certes montée en gamme, mais elle est toujours restée au niveau d’un petit orage.

La BCE n’a clairement pas testé la solidité face à une tempête comme celle d’il y a 6 ans…

Il est donc normal que les banques s’en soient bien sorties, vu qu’elles ont justement renforcé leurs fonds propres depuis.

Mais ils restent très insuffisants.

Ainsi, une étude du mois dernier du sérieux institut allemand ZEW montrait des besoins de capitaux très importants :

L’inutilité des Stress Tests

En fait, les stress tests sont parfaitement inutiles :

stress test bce

Pire encore, ce qu’il faut tester, ce n’est pas une récession de -5 %, c’est la faillite de Bank of America et JP Morgan.

Mais comme ce sont des banques systémiques, cet adjectif même indique qu’elles entraineront la faillite de toutes les autres.

Et donc qu’il n’y a rien à “tester”.

La seule chose à faire est d’éradiquer le coté systémique, à savoir :

Une mégabanque, c’est comme une centrale nucléaire. Il faut exiger le même degré de sécurité. (qui est d’ailleurs imparfait, on est d’accord).

Si on peut discuter de l’intérêt / risque d’avoir une centrale nucléaire, il n’est pas acceptable de laisser vivre des centrales nucléaires “systémiques”, c’est à dire des centrales qui, si elles explosent, entraine l’explosion simultanée de la plupart des centrales de la planète. Il faudrait être fou…

L’existence de banques systémique n’est plus acceptable.

Face à ce risque, il est inutile de chercher à rajouter des miettes de capitaux, qui sont sans commune mesure avec les volumes de pertes possibles.

Il ne faut pas chercher à gérer la prochaine crise bancaire avec des banques systémiques (en faisant des stress tests), il faut tout faire pour l’empêcher…

Pour vous convaincre, voici l’état de votre banque :

On voit bien que les 4 systémiques qui restent (RIP Dexia), sont des bombes en raison des centaines de milliards d’euros d’actifs financiers risqués au bilan (et plus encore avec le hors bilan – non, non, il n’y a pas d’erreur, ce sont bien des milliards d’euros).

Exemple : BNP a un bilan de 1 800 Md€ (presque le PIB du pays, et encore, il est réduit fictivement par de nouvelles normes comptables), dont 672 Md€ d’actifs financiers à risque, pour 72 Md€ de capitaux propres. Elle a donc un risque maximum de 25 fois ses fonds propres – historiquement, les banquiers ne dépassaient pas 12. Si elle perd 4 % de son actif, elle est en faillite (elle l’est en pratique bien avant…).

Le Crédit Mutuel et la Banque Postale ont des leviers élevés aussi, mais c’est bien moins grave, car ils ont bien moins de risques financiers – ce ne sont pas des banques universelles…

Après, à vous de choisir où vous mettez votre argent…

Épilogue : l’article du Figaro

Comprendre les stress tests en cinq questions

En quoi consistent les stress tests auxquels ont été soumises 130 banques européennes? A quoi servent-ils? Le Figaro fait le point.

La Banque centrale européenne (BCE) a dévoilé ce dimanche les résultats des «stress tests» réalisés sur 130 banques de la zone euro, après un exercice inédit de revue des bilans (AQR) qui fait enfin la lumière sur les bilans des banques du Vieux Continent. C’est une crise bancaire, la faillite de Lehman Brothers, aux États-Unis, en 2009, qui a déclenché la crise économique et financière en Europe. La crise de la dette souveraine de la zone euro en 2011 a également alimenté une défiance dans les banques européennes, à laquelle la BCE tente de mettre fin en devenant le superviseur unique du système financier européen à partir du 4 novembre.

• En quoi consistent ces «stress tests» de la BCE?

Les «stress tests» visent à tester la solidité des bilans bancaires en cas de «choc» économique ou financier. Il s’agit de passer les bilans des banques à la moulinette de scénarios plus ou moins «stressant» (crise obligataire, récession, envolée du chômage), qui font bouger les prix des actifs bancaires, les comptes de résultats, et, in fine, les ratios de fonds propres des banques – le fameux Core Tier One (CET1), qui rapporte les capitaux propres apportés par les actionnaires à la taille du bilan. D’après la réglementation européenne, ces fonds propres doivent représenter 8 % du total des engagements (crédits, positions de marché).

Je rappelle que ce chiffre de 8 % est pipeauté, la réglementation permettant de fictivement réduire le bilan par des probabilités à deux balles. Lire ce billet dédié à cette pondération des actifs. Le vrai ratio financier est de 3 % à 4 %.

Les «stress tests» 2014 ont été conçus par l’EBA, l’Autorité bancaire européenne, basée à Londres. Ils concernent les 130 banques les plus importantes de la zone euro: celles dont le total du bilan dépasse 30 milliards d’euros ou les trois premières de chaque pays, ce qui englobe 85 % du système bancaire en zone euro. Les banques anglaises, suédoises et ou polonaises sont également soumises à ces «stress tests» dont les résultats sont dévoilés par leur banque centrale respective. Dans la zone euro, ces «tests» ont été réalisés sous la houlette de la BCE de novembre 2013 à octobre 2014. L’opération a mobilisé plus de 6 000 inspecteurs et auditeurs. L’objectif de cette «opération vérité des bilans» est triple: jouer la transparence, assainir les bilans, et restaurer la confiance dans les banques de la zone euro.

• Que prévoit le scénario catastrophe français?

Le scénario le plus «stressé» appliqué aux 13 groupes bancaires français supervisés par la BCE envisage deux années de récession en 2014 et 2015, une année complète de déflation en 2016. Le chômage grimperait à 12,2 % en 2016. Les taux d’intérêt à 10 ans tripleraient, passant de 1,2 % aujourd’hui à 3,8 % en 2016. Et, plus intéressant: les prix de l’immobilier chuteraient de 30 %! «En France, nous ne sommes pas à l’abri d’une correction des prix importante», confie un régulateur. Ce qui impacterait fortement les banques dont les actifs sont en grande partie constitués de prêts hypothécaires.

Ben non, c’est le taux d’intérêt et l’inflation bien plus que les prix immobiliers qui comptent…

• Quelles conséquences de l’échec d’une banque?

Si une banque ne respecte pas les ratios de solvabilité par temps calme, ou si elle échoue aux «stress tests», elle ne manquera pas d’être chahutée sur les marchés lundi matin. Les banques épinglées disposent de deux semaines pour présenter à la BCE un programme de recapitalisation détaillant comment elles entendent combler leur manque de capitaux propres dans les six mois à venir. Si les besoins en capitaux propres ne peuvent être comblés rapidement par les marchés, il y aura crise, les actionnaires seront mis à contribution, ainsi que les créanciers subordonnés. S’il devait y avoir des aides publiques, elles devront être validées par Bruxelles, qui applique des règles très strictes pour les aides d’État aux banques.

En effet, il ne donne JAMAIS plus que 100 % de ce que demande la banque…

Si la banque n’est pas jugée viable, elle sera mise en faillite ordonnée ou restructurée, ce fut le cas pour la première banque portugaise Banco Espirito Santo. L’heure n’est pas encore aux fonds de résolution européens (55 milliards d’euros d’argent des banques mutualisés) qui n’entrera en vigueur qu’à partir de 2016 et très progressivement.

Comme l’ensemble des bilans bancaires de la zone euro tourne autour de 20 000 milliards, avec 55 milliards, on a de quoi voir venir (au moins une heure…).

• Pourquoi cet exercice serait-il plus crédible que les précédents?

Parce qu’il a été précédé d’un examen des bilans bancaires très rigoureux, et inédit, piloté par la BCE. La Banque centrale européenne joue sa crédibilité dans cet exercice. Avant de prendre en main la supervision directe de 130 banques de la zone euro, le 4 novembre 2014, une étape essentielle de l’union bancaire, la BCE exigeait une transparence totale des bilans des institutions de crédit dont elle aura la charge. Elle a mis en place des moyens humains et financiers exceptionnels pour effectuer cette revue des bilans détaillée. C’est bien ce qui fait la spécificité de ces «stress tests», version 2014.

Avec des hypothèses angéliques, ça vaut le coup en effet…

Les précédents tests de résistance, réalisés en 2010 et en 2011, étaient sujets à caution, car ils reposaient sur les superviseurs nationaux, souvent juge et partie.

Ah, enfin une bonne remarque ! Bah oui, c’est un problème, car la banque centrale nationale est chargée de la sécurité du système bancaire, et elle joue sa peau en lui prêtant de l’argent en cas de besoin. Donc si c’est elle qui contrôle, elle est juge et partie, en effet. Si elle déclare en faillite 2 ou 3 grosses banques, comme elles lui doivent des sommes importantes, elle se met aussi ipso facto en faillite elle-même – ce qu’aucune structure ne fera jamais…

Alors que là, comme c’est la BCE qui contrôle, eh bien… Euh, … Ah ben non, c’est pareil, c’est la banque centrale qui a prêté in fine à toutes les banques de la zone…

Rappel pour la BCE :

Elle a 100 Md€ de fonds propres, mais a prêté 500 Md€ aux banques. Tu penses comme elle va facilement mettre des grosses banques en faillite…

Comme pour le nucléaire, il faut une autorité indépendante de contrôle, dotée de moyens importants, dont ce sera la SEULE mission…

En Espagne, et au Portugal, ils ont été décrédibilisés avec l’affaire Bankia et l’affaire Banco Espirito Santo. La supervision par la BCE est censée restaurer cette confiance perdue.

Eh oui, d’ailleurs, on peut donner des leçons, c’est Daniel Nouy de la Banque de France qui a été dépêchée à la BCE pour gérer tout ceci – et comme elle n’a pas vu Kerviel, la contrepartie AIG, les aventures grecques du Crédit Agricole, Dexia, le problème des liquidités en dollars en 2011, les aventures soudanaises de BNP, etc., c’est donc la bonne personne pour gérer le contrôle européen…

• Cela empêchera-t-il une prochaine crise bancaire?

La peur du gendarme, incarnée par Danièle Nouy, responsable de la supervision des banques à la BCE, devrait obliger les banques à mieux se tenir. Dans la perspective des «stress tests» 2014, les banques de la zone euro ont déjà renforcé leur bilan à la hauteur de 203 milliards d’euros. Des «stress tests» similaires auront lieu tous les ans. La supervision par la BCE devrait éviter les erreurs du passé.

L’espoir fait vivre…

Les bilans seront en principe «réparés» plus en amont ; la restructuration d’une banque devrait être plus sereine, et la faillite, si nécessaire, plus ordonnée. La BCE entend également renforcer les fusions transfrontalières.

Malheureusement, la journaliste a apparemment un petit souci de vocabulaire, puisqu’elle semble croire possible “la faillite sereine d’une banque systémique”.

C’est un peu comme “le démantèlement serein d’une centrale nucléaire en fusion”…

Source : Le Figaro

P.S. désolé pour les coquilles qu’il doit rester au vu de l’heure de rédaction…

Source: http://www.les-crises.fr/la-vaste-blague-des-stress-tests-de-la-bce/


[Médias] Législatives ukrainienne : 2emes tendances

Monday 27 October 2014 at 01:00

Tendances

Voici les premières tendances sur les scores en voix. Mais comme la moitié des sièges de députés sont accordés au scrutin majoritaire à 1 tour, il faudra patienter un peu pour les résultats, qui accorderont beaucoup de députés aux 2 premiers partis.

Mon analyse est assez simple. (je le remettrai à jour si besoin)

1. Problème au niveau de la participation, avec 52 % – ce qui est bas pour ce type d’élection. Il y avait 60 % à la présidentielle.

2. Echec en voix de Porochenko, qui obtiendrait moins de 25 % des suffrages, alors qu’il a été élu avec 55 % des voix au 1er tour fin mai… Il devrait avoir cependant de nombreux députés.

3. Succès inattendu du Premier Ministre et de son bloc

4. Estimation des votes : 6 partis entreront au Parlement

Résultat partiels, sur 70 % des voix :

 

Svoboda est heureusement en baisse, mais avec secteur droit, le parti radical et sans doute un bout de Samopomich, cela nous fait toujours 15 % des voix à des fascistes, et 15 % de plus pour de l’extrême-droite... Bah, la guerre n’allait clairement pas les faire reculer… L’avantage c’est qu’ils auront peu d’élus.

Après rien de bien extraordinaire, j’ai expliqué dès le mois de mars que le souci de l’Ukraine, c’est que 65 % des gens sont plutôt pro-Europe et 35 % plutôt pro-Russie, mais que SURTOUT, c’était en fait 100 % des gens sur les 2/3 Ouest du pays contre 100 % des gens sur le tiers Est (j’exagère avec 100 %, c’est pour poser le problème). Et comme le sujet n’est pas anecdotique, mais fondamental, tant au plan politique qu’économique, aucun ne cédera. Et cela risque fort de se terminer ainsi : OU on crée une Ukraine neutre, non alignée et elle reste unie (proposition Kissinger et Poutine) OU l’Ukraine est partitionnée, et l’UE chipe l’Ouest et le Centre. Pas bien compliqué, me semble t il. L’Hypothèse “l’UE chipe 100 % de l’Ukraine” ne peut que conduire à une guerre civile – CQFD.

Voici 2 sondages intéressants sur la vision des Ukrainiens.

Le premier sur la cote de confiance diverses institutions :

18 % de confiance dans la parlement (Rada), joli score…

Et voici sur le premier bilan du Président :

Impressionnant…

Allez 2 réactions de la presse pour rire un peu

Le Monde : Ecrasante victoire des pro-occidentaux aux législatives en Ukraine

Par Benoît Vitkine (envoyé spécial en Ukraine)

En votant massivement

45/50 % d’abstention…

en faveur des deux principales forces politiques au pouvoir à Kiev, dimanche 26 octobre lors des élections législatives, l’Ukraine en guerre a exprimé un fort besoin de stabilité et d’unité.

Ben en guerre civile, ils pouvaient voter quoi ?

Selon les premiers sondages de sortie des urnes, la liste du président Petro Porochenko recueille 23 % des voix. Celle du premier ministre, Arsenii Iatseniouk, le talonne avec 21 % des voix. La participation est toutefois faible (52 %), contre 60,3 % lors de la présidentielle du 25 mai.

POROCHENKO RESTE L’HOMME FORT DE L’UKRAINE

Six mois exactement après son élection à la présidence, c’est toutefois Petro Porochenko qui reste l’homme fort de l’Ukraine.

Il n’a perdu que 50 % à 60 % de ses voix…

Le président, qui devait jusqu’à présent s’appuyer pour gouverner sur des transfuges du Parti des régions de l’ancien président Viktor Ianoukovitch, va désormais prendre la tête d’une majorité solide.

Euh je rêve où il s’appuyait surtout sur Patrie, Svoboda et Udar ?

Et je rêve, ou Porochenko est cofondateur dudit Parti des Régions, et a été ministre de Ianoukovitch ????

En cela, le vote de dimanche clôt politiquement le chapitre de Maïdan. Le Parlement sortant, élu en 2012, ne reflétait pas le paysage politique issu de la révolution : c’est notamment lui qui avait voté les lois liberticides du 16 janvier, censées étouffer la contestation contre le président Ianoukovitch. Inacceptable pour une immense majorité d’Ukrainiens.

C’est à mourir de rire… D’ailleurs, quand on voit ce que vote notre Parlement au niveau de lois liberticides (surveillance généralisée, interdiction de sortie du territoire…) soi-disant “antiterroristes” alors qu’il n’y a pas de terrorisme en France, je pense que ce ne sera pas beau à voir quand (et si par malheur) on était touché…

Ces élections sont aussi celles d’un profond renouvellement de la scène politique ukrainienne.

Porochenko, Iatseniouk, Svoboda, Timochenko… Je crois que c’est clair…

Le Parlement né du scrutin de dimanche est, de toute l’histoire ukrainienne, celui qui affiche la plus nette orientation vers les réformes et l’intégration européenne.

Je propose de lancer des consultations psychiatrique à Sainte Anne autour des hallucinations délirantes autour du concept magique de “réformes” – terme vide ne signifiant rien…

Plus de la moitié des députés devraient être de nouveaux entrants.

Ca promet…

Parmi eux, une vingtaine d’anciens activistes de la révolution de Maïdan, déterminés à ne pas laisser le personnel politique retomber dans ses vieux travers, mais aussi nombre de combattants plus ou moins illustres du front de l’est,

qui ont donc participé au massacre de près de 4 000 civils ?

à qui les différents partis ont accordé des places de choix sur leurs listes. La guerre dans le Donbass, sans avoir été un thème central de la campagne, reste omniprésente dans les esprits.

Ben non, le pays est juste en guerre…

Nul ne pourra d’ailleurs l’oublier, lorsque le nouveau Parlement se réunira pour la première fois, fin novembre : 27 sièges resteront vacants, le vote ne s’étant pas tenu dans 12 circonscriptions de la Crimée, annexée par la Russie en avril, et dans 15 circonscriptions des régions de l’est dont le contrôle échappe à Kiev.

LES PARTIS PRORUSSES FONT LES FRAIS DE CETTE RECOMPOSITION

Les partis prorusses font les frais de cette recomposition.

Quelle arnaque médiatique fantastique quand même cette notion de “pro-russe”…

Le Bloc d’opposition, qui accueillait principalement des anciens élus du Parti des régions, obtient près de 8 % des suffrages. Pour la première fois depuis 23 ans, le Parti communiste (3 %) ne sera pas représenté au Parlement.

Ben oui, comme leur électorat est dans les régions en guerre, et comme il est en voie d’être interdit…

D’ici quelques jours, des résultats plus complets montreront aussi si l’effacement du clivage politique entre le centre-ouest et le sud-est, observé lors de la présidentielle du 25 mai, se confirme.

C’est vrai qu’il n’y avait pas de différences :

election présidentielle ukraine 2014 presidential

election présidentielle ukraine 2014 presidential

election présidentielle ukraine 2014 presidential

Les nationalistes ukrainiens de Svoboda sont en recul par rapport à leur score de 2012 (6,3 %).

Bah oui, il y a 2 partis fascistes à 6 % maintenant alors…

Svoboda n’a fait que x 6 par rapport à la présidentielle où on moquait son faible score…

Le scrutin n’a pas été parfait. Dans plusieurs circonscriptions, on peut s’attendre à ce que des réclamations soient émises sur l’honnêteté du vote et du dépouillement. L’Organisation pour la sécurité et le développement en Europe (OSCE), qui a supervisé le déroulement des opérations, doit rendre un premier verdict lundi après-midi. La campagne a aussi été marquée par la perpétuation des pratiques peu glorieuses qui caractérisent la vie politique ukrainienne depuis 23 ans.

Dans de nombreuses circonscriptions, la corruption électorale – distribution d’argent ou de cadeaux – est toujours de mise, et nombre d’élus peu réputés pour leur honnêteté vont conserver leur poste. Surtout, en l’absence de tout système de financement public, une poignée d’oligarques continuent d’exercer un poids immense sur la vie politique, en mettant leurs moyens financiers et médiatiques au service des listes et partis de leur choix.

Génial ce scrutin alors….

M. Porochenko, qui devrait dans les jours qui viennent enregistrer les ralliements d’une centaine de députés indépendants, va tenter de constituer la coalition la plus large possible. Il s’agit d’éviter un face-à-face avec le seul Iatseniouk. Les deux hommes s’apprécient et travaillent en confiance, mais ils sont en concurrence, et le seront encore plus avec les résultats serrés de dimanche soir.

« Tous les partis de Maïdan seront invités à faire partie de la coalition », a expliqué dimanche soir Iouri Loutsenko, l’un des bras droits de M. Porochenko, depuis le siège du parti. Outre le Front populaire, la liste réformatrice Samopomitch, emmenée par le maire de Lviv et qui réalise un très bon score (13%), devrait se joindre à la nouvelle majorité. Ioulia Timochenko, qui réalise un score décevant de 5,6 % à la tête de son parti Batkivchtchina, pourrait aussi être sollicitée.

LES DOSSIERS NE MANQUENT PAS POUR LA NOUVELLE MAJORITÉ

Une tâche extrêmement difficile attend cette nouvelle majorité. Il s’agit à la fois de répondre aux aspirations qui se sont exprimées durant Maïdan, autrement dit réformer en profondeur les structures du pays pour faire diminuer la corruption et améliorer la qualité de la gouvernance, et parer à l’urgence. Ici, les dossiers ne manquent pas.

Le plus brûlant d’entre eux est le conflit dans le Donbass. La stratégie de conciliation du président a permis de faire diminuer le niveau des violences, mais le processus de règlement politique engagé après les accords de Minsk, début septembre, est au point mort. M. Iatseniouk a été critique de cette stratégie, mais le dossier devrait rester entre les mains du président, qui négocie en même temps avec les séparatistes de l’Est et avec Moscou, pour tenter de convaincre le Kremlin de ne pas déstabiliser plus avant l’Ukraine.

Autre dossier urgent, le gaz. Moscou, qui a brutalement augmenté le prix de ses livraisons après le changement de pouvoir à Kiev et exige le règlement d’impayés, a coupé le robinet du gaz en juin.

Ils abusent ces Russes de ne plus faire le tarif “pays frère” mais le tarif international – et de demander à être payés en plus !

Les négociations sont régulières, sous l’égide de la Commission européenne, mais elles n’ont toujours pas abouti à un accord. Les réserves ukrainiennes sont limitées et deux jours avant le scrutin, le thermomètre est descendu en dessous de zéro degré à Kiev. Plus largement, l’économie est dans un état catastrophique. La situation, déjà peu brillante, a été encore fortement dégradée par la guerre. En 2014, le PIB pourrait se contracter de 8 %. La monnaie nationale, la hryvnia, a chuté de plus de 11 %, provoquant une forte baisse du niveau de vie.

Les bons scores des partis réformateurs et pro-européens montrent que la société ukrainienne est prête à patienter pour voir se réaliser les promesses de Maïdan.

Je suis toujours fasciné par ces journalistes nationalistes européens…

La guerre, en même temps qu’elle a ralenti la mise en œuvre des réformes, a soudé la société ukrainienne.

Au Monde, tu touches 20 € à chaque fois que tu utilises le mot “réforme”. Bilan : 80 € ici…

Et puis ouaouh, drôlement soudée la société ukrainiene…

Comme l’amour, le nationalisme rend aveugle.

Un autre signe en est le faible score obtenu par le Parti radical d’Oleh Liachko.

6 %, un faible score pour un fasciste ?

Ce populiste qui estime notamment que l’Ukraine doit acquérir l’arme nucléaire, n’obtient que 6,5 %, loin des scores mirobolants que lui promettaient les sondages.

Ah d’accord, la référence c’est le sondage bidon….

Source : Le Monde

J’aimais bien cet autre titre :

Meuh, ils ne pensent qu’à l’Europe du soir au matin là bas…

Le Nouvel Obs : Ecrasante victoire des pro-occidentaux aux législatives

Le Bloc du président Petro Porochenko et quatre autres mouvements pro-occidentaux, dont des nationalistes, auraient obtenu environ 70% des voix. Des pro-russes seront également au Parlement.

Saloperie de Démocratie va…

Le camp pro-occidental,

mais quelqu’un peut leur dire que ce n’était pas un référendum sur l’Europe ?

mené par le président Petro Porochenko, a remporté dimanche 26 octobre aux législatives une victoire d’une ampleur sans précédent depuis l’indépendance de l’Ukraine, et après six mois d’un conflit opposant dans l’Est l’armée ukrainienne aux rebelles pro-russes.

Les sondages réalisés à la sortie des bureaux de vote, dont les résultats ont été rendus publics à leur fermeture, donnent environ 70% des voix aux différents partis pro-occidentaux, y compris nationalistes, en lice pour ce scrutin marqué en outre par l’accession au parlement du principal parti héritier de celui de l’ex-président pro-russe Viktor Ianoukovitch.

Oui, Porochenko, Svoboda, c’est pareil…

Le Parti communiste pourrait, quant à lui, événement historique, disparaître de l’assemblée.

Bah oui, ses régions n’ont pas voté…

Ces élections renouvellent radicalement le parlement et accentuent le rapprochement de l’Ukraine avec l’Union européenne.

Oh oui, oh oui !

Euh, et le peuple de “l’Union européenne”, il peut voter pour donner son avis à ça ou c’est interdit ?

Ce scrutin était crucial pour cette ex-république soviétique en proie depuis près d’un an à une très grave crise, avec le renversement par la rue de Viktor Ianoukovitch, l’annexion de la Crimée par la Russie et, dans les régions orientales, le réveil des séparatismes qui a dégénéré en conflit armé.

Ce pays de 45 millions d’habitants est également le terrain d’affrontements géopolitiques entre Occidentaux et Russes dont les relations, de l’aveu même de Moscou, ont “touché le fond”.

Un rapprochement “irréversible” avec l’Europe

Les Ukrainiens ont plébiscité un rapprochement “irréversible” de leur pays avec l’Europe, a déclaré dimanche soir le président Petro Porochenko alors que les pro-occidentaux ont obtenu une victoire écrasante aux législatives selon les sondages à la sortie des bureaux de vote.

Ces fanatiques sont fous…

“Plus de trois-quarts des électeurs ayant participé au vote ont soutenu de façon puissante et irréversible l’orientation de l’Ukraine vers l’Europe”, a déclaré le président dans une déclaration à la Nation diffusée à la télévision.

Le Bloc Petro Porochenko du chef de l’Etat arrive sans surprise en tête avec 22% à 23% des suffrages, selon les résultats des sondages diffusés par trois instituts. Ce score est toutefois inférieur aux 30% que lui donnaient avant les législatives les sondages et ce mouvement est talonné par le Front Populaire du Premier ministre Arseni Iatseniouk (21%), suivi de Samopomitch (13%), parti composé de jeunes représentants de la société civile et de combattants venus de l’Est.

Ces deux formations sont favorables à une offensive plus musclée contre les séparatistes pro-russes dans l’Est, où les combats ont déjà fait plus de 3 700 morts depuis avril.

3 700 morts, civils russophones (puisqu’ils ne le précisent pas), ce n’était pas encore assez musclé… Heureusement, ces “pro–européens” ont gagné et vont arranger ça…

“La majorité des électeurs s’est prononcé en faveur des forces politiques qui soutiennent le plan de paix [...] et cherchent des moyens politiques pour régler le conflit”, a toutefois insisté Petro Porochenko dans sa déclaration à la Nation. “Les partisans d’une solution militaire sont en nette minorité.”

“Le tribunal populaire a condamné à mort le parti communiste”

Avec près de 8%, le Bloc d’Opposition, regroupant plusieurs figures du Parti des Régions de Viktor Ianoukovitch, dépasse le seuil des 5% nécessaire à une présence au Parlement, contrairement au Parti communiste (moins de 3%), en passe d’y perdre sa place pour la première fois depuis 1993.

Petro Porochenko s’est d’ailleurs félicité du déclin du parti communiste : “Le tribunal populaire [...] a condamné à mort le parti communiste”, a déclaré M. Porochenko. “Les Ukrainiens ont porté un coup décisif à la cinquième colonne communiste.”

Sympa ces déclarations de Démocrate, dommage que Le Monde ne les ait pas repris dans son papier…

Suivent le Parti radical du populiste Oleg Liachko (6%), les nationalistes de Svoboda (6%) et le parti Batkivchtchina de l’ancienne Première ministre Ioulia Timochenko (5%).

Pas important, passons vite…

Ces sondages donnent une idée des rapports de forces dans l’opinion mais pas directement de la répartition des 450 sièges de la Verkhovna Rada (Parlement). La moitié des députés est en effet élue dans des scrutins à la majorité simple. Et les résultats dans ces circonscriptions ne seront pas immédiatement connus.

27 sièges de députés resteront vides

Ces élections ont été convoquées par le président Porochenko, élu en mai dès le premier tour, pour définitivement tourner la page du régime prorusse de Viktor Ianoukovitch, renversé au terme d’un mouvement de contestation pro-occidentale déclenché en novembre 2013 sur le Maïdan, dans le centre de Kiev.

Mais elles sont assombries par le conflit entre forces ukrainiennes et séparatistes dans le bassin minier du Donbass, dans l’Est.

Environ cinq millions d’électeurs, sur 36 millions au total, n’auront pas pu voter, en Crimée, rattachée à la Russie en mars, et dans les zones contrôlées par les séparatistes dans l’Est. 27 des 450 sièges de députés resteront ainsi vides.

A Donetsk, principal fief des rebelles, les habitants ont boudé les élections et attendent celles que les séparatistes prévoient d’organiser le 2 novembre.

Sortir l’Ukraine d’une profonde récession

Dans un geste symbolique, le président Petro Porochenko, en tenue de camouflage, s’était rendu dans la matinée à Kramatorsk, ville rebelle reprise l’été dernier par les forces ukrainiennes, pour saluer “l’exploit des soldats auxquels nous devons notre vie pacifique“.

La guerre, c’est la paix…

Relisez 1984, vite…

De retour à Kiev, il a voté et dit espérer des élections “une équipe forte et efficace pour la mise en oeuvre de réformes et la victoire nécessaire pour apporter la paix dans le Donbass”, en proie à des combats depuis six mois.

Tiens, ils ont aussi une prime à l’Obs, mais plus faible apparemment…

Le nouveau Parlement devra voter des réformes radicales

Je pense aussi, ça va être intéressant, on suivra…

Finalement c’est peut être bien 20 € aussi…

destinées à sortir l’Ukraine d’une profonde récession, aggravée par le conflit dans l’Est industriel, à lutter contre une corruption endémique et à la rapprocher de l’Union européenne, avec laquelle elle a récemment signé l’accord d’association rejeté l’an dernier par Viktor Ianoukovitch.

Il devra accentuer les douloureuses mesures de rigueur

Il faudrait leur envoyer Valls…

exigées par les bailleurs de fonds occidentaux, notamment le FMI,

Purée, ça c’est de la liberté retrouvée…

pour sauver l’Ukraine de la faillite après le retrait du soutien financier russe. La situation est encore aggravée par le conflit gazier avec la Russie, qui la prive de gaz. La tâche semble herculéenne face à un conflit très coûteux et destructeur, et qui s’enlise.

Selon le ministère de la Défense, les positions des forces ukrainiennes ont fait l’objet de tirs de la part des rebelles à 18 reprises dimanche, sans faire de victimes.

Et selon les rebelles ?

L’instauration d’un cessez-le-feu le 5 septembre a permis une baisse d’intensité de la confrontation dans l’Est, mais des points de tension persistent, notamment à l’aéroport de Donetsk.

Source : Le Nouvel Obs, avec AFP

Et on fini par Libération :

et :

P.S. tiens, d’ailleurs, en journal de gauche, Libération a su soutenir Dilma Rousseff :

Source: http://www.les-crises.fr/medias-presidentielle-ukrainienne-1eres-tendances/