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Telle quelle – l’intervention de Yanis Varoufakis lors de la réunion de l’Euro-groupe du 27 juin 2015, présentée par lui-même

Thursday 30 July 2015 at 00:14

La réunion de l’Euro-groupe du 27 juin 2015 ne restera pas comme un moment glorieux de l’histoire européenne. Les ministres [des finances de la zone euro, NdT] ont rejeté la requête du gouvernement grec demandant qu’une semaine soit accordée au peuple grec pour qu’il puisse donner une réponse, oui ou non, aux propositions des institutions – des propositions cruciales pour l’avenir de la Grèce au sein de l’Euro-zone. L’idée même qu’un gouvernement puisse consulter son peuple à propos d’une proposition problématique émanant de ces institutions a été reçue avec incompréhension, et souvent même avec un dédain proche du mépris. On m’a même demandé “Comment pouvez-vous vous attendre à ce que des gens ordinaires comprennent des problèmes aussi complexes ?” Certes, la démocratie n’était pas à la fête à la réunion de l’Euro-groupe d’hier ! Mais les institutions européennes non plus. Après le rejet de notre requête, le président de l’Euro-groupe a brisé la convention relative à l’unanimité (en produisant un communiqué sans mon consentement) et a même pris la décision douteuse de convoquer une réunion de l’Euro-groupe sans le ministre grec, ostensiblement pour discuter “des suites à donner”.

La démocratie et une union monétaire peuvent-elles coexister ? Ou l’une des deux doit-elle céder le pas ? C’est à cette question fondamentale que l’Euro-groupe a décidé de répondre en plaçant la démocratie dans la case des problèmes insolubles. Temporairement, espérons-le.

Intervention de Yanis Varoufakis lors de la réunion de l’Euro-groupe du 27 juin 2015

Chers collègues,

Lors de notre précédente réunion (le 25 juin), les institutions ont présenté leur offre finale aux autorités grecques, en réponse à notre proposition d’accord au niveau ministériel (Staff Level Agreement, SLA), présentée le 22 juin et signée par le premier ministre Tsipras. Après une étude longue et minutieuse, notre gouvernement a décidé que, malheureusement, la proposition formulée par les institutions ne pouvait pas être acceptée. Etant donné la proximité de l’échéance du 30 juin, à laquelle l’accord actuel de prêt expire, cette impasse qui nous soucie tous fortement et ses causes doivent être examinées soigneusement.

Nous avons rejeté les propositions des institutions du 25 juin pour plusieurs raisons essentielles. La première est l’association d’austérité et d’injustice sociale qu’elles auraient imposée à une population déjà dévastée par… l’austérité et l’injustice sociale. Même notre propre proposition d’accord SLA (du 22 juin) est une proposition d’austérité, une tentative pour apaiser les institutions et par là s’approcher d’un accord. Mais notre SLA cherchait à déplacer le fardeau de ce nouvel assaut d’austérité vers ceux qui sont le plus capables de le supporter, par exemple en s’appliquant à augmenter les contributions des employeurs aux fonds de retraite plutôt qu’à réduire les retraites les plus basses. Néanmoins même notre SLA contient de nombreux points que la société grecque rejette.

Donc, ayant été durement poussés à accepter une substantielle nouvelle austérité, sous la forme d’un excédent primaire absurdement élevé (3,5% du PIB à moyen terme, encore que ce soit quelque peu moins que l’irréalisable chiffre accepté par les précédents gouvernements grecs, c’est-à-dire 4,5%), nous en sommes arrivés à devoir faire des compromis conduisant à la récession entre, d’un côté, de plus hauts impôts/plus hautes charges dans une économie où ceux qui paient leur dû y laissent la peau des fesses et, d’un autre côté, des réductions de retraites/bénéfices dans une société déjà dévastée par des coupes massives dans le soutien au revenu de base des nécessiteux de plus en plus nombreux.

Laissez-moi vous dire, chers collègues, ce que nous avons déjà communiqué aux institutions le 22 juin, lorsque nous présentions nos propres propositions : même ce SLA, celui que nous proposions, serait très pénible à faire voter par le parlement, étant donné le niveau des mesures de récession et l’austérité qu’il comporte. Malheureusement, la réponse des institutions a été d’insister sur des mesures encore plus génératrices de récession, alias mesures paramétriques (par exemple en augmentant la TVA sur les hôtels de 6% à 23% !) et, encore pire, d’insister sur un déplacement massif du fardeau, du monde des affaires vers les membres les plus faibles de la société (par exemple en réduisant les retraites les plus basses, en retirant le soutien aux agriculteurs, en repoussant à l’infini la législation offrant quelque protection aux travailleurs gravement exploités).

Les nouvelles propositions des institutions, telles qu’exprimées dans leur document SLA/Mesures préalables du 25 juin changeraient un politiquement très problématique ensemble de mesures – du point de vue de notre parlement- en un ensemble qui serait très difficile à faire admettre par notre groupe parlementaire. Mais ce n’est pas tout. Le pire apparaît encore bien pire une fois que l’on a jeté un œil au montage financier proposé.

Ce qui rend impossible l’adoption par le parlement des mesures proposées est l’absence de réponse à la question suivante : ces mesures douloureuses nous donneront-elles au moins une période de tranquillité pour la mise en œuvre des réformes et des mesures acceptées ? Est-ce qu’une vague d’optimisme viendra contrer les effets de récession provoqués par la consolidation budgétaire supplémentaire que l’on impose à un pays qui a été en récession pendant 21 trimestres d’affilée ? La réponse est évidente : non, la proposition des institutions n’offre pas de telles perspectives.

Et voici pourquoi : le financement proposé pour les cinq mois à venir (voyez plus bas pour le détail) pose toutes sortes de problèmes :

Premièrement, il ne constitue aucune provision pour les arriérés de l’état, résultant de cinq mois de paiement sans déboursement et de l’effondrement du revenu de l’impôt, en résultat de la constante menace de Grexit qui flottait dans l’air, pour ainsi dire.

Deuxièmement, l’idée de cannibaliser le Fonds Hellénique de Stabilité Financière (HFSF) pour repayer à la BCE des bons de l’ère du SMP [Security Market Program, circa 2010, NdT] constitue un évident et très présent danger. Ces sommes étaient réservées, comme il se doit, au renforcement des banques grecques fragiles, éventuellement par une opération qui s’occupe de leur montagne de créances immobilisées qui entame leur capitalisation. La réponse que j’ai reçue de hauts responsables de la BCE, que l’on laissera anonymes, est que, en cas de nécessité, le HFSF sera réapprovisionné pour qu’il puisse faire face aux besoins de capitalisation des banques. Et qui fera le réapprovisionnement ? Le Mécanisme Européen de Stabilité (MES), telle est la réponse que l’on m’a faite. Mais, et c’est un mais colossal, ceci ne fait pas partie de l’accord proposé et, de plus, ceci ne peut pas faire partie de l’accord puisque les institutions n’ont pas le mandat leur permettant d’engager le MES de cette manière – comme je suis bien sûr que Wolfgang [Schäuble, NdT] nous le rappellera à tous. Et, de plus, si un tel nouvel arrangement peut être fait, pourquoi donc ne discute-t-on pas de notre proposition, sensée et modérée, d’une nouvelle facilité du MES accordée à la Grèce facilitant le déplacement des engagements SMP de la Banque Centrale Européenne vers le MES ? La réponse “on n’en discutera pas parce qu’on n’en discutera pas” sera pour moi très difficile à communiquer à mon parlement, accompagnée d’un autre paquet de mesures d’austérité.

Troisièmement, le calendrier proposé pour les versements est un champ de mines de revues – une par mois – qui garantira deux choses. D’abord, que le gouvernement grec sera plongé tous les jours, toutes les semaines, dans le processus de réexamen pour cinq longs mois. Et ensuite, bien avant la fin de ces cinq mois, que l’on entrera dans une autre fastidieuse négociation sur le programme suivant – puisqu’il n’y a rien dans la proposition des institutions susceptible d’inspirer ne serait-ce que le plus évanescent des espoirs qu’à la fin de cette nouvelle prolongation la Grèce puisse se tenir debout toute seule.

Quatrièmement, étant donné qu’il est abondamment prouvé que notre dette restera insoutenable à la fin de l’année, et que l’accès au marché restera alors aussi lointain qu’il l’est maintenant, on ne pourra pas compter que le FMI débourse sa part, les 3,5 milliards compris par les institutions dans le montage financier présenté.

Ce sont là de solides raisons qui font que notre gouvernement ne se considère pas mandaté pour accepter la proposition des institutions ou pour utiliser sa majorité parlementaire pour la faire voter.

En même temps, nous n’avons pas non plus le mandat pour rejeter les propositions des institutions, conscients que nous sommes du moment historique critique où nous nous trouvons. Notre parti a recueilli 36% des suffrages et le gouvernement dans son ensemble dispose d’un peu plus que 40%. Pleinement conscients de l’importance de notre décision, nous nous sentons obligés de porter devant le peuple grec la proposition des institutions. Nous devrons nous efforcer de lui expliquer clairement ce qu’un Oui aux propositions signifie, de même pour un Non, et le laisser décider. Pour notre part nous accepterons le verdict et ferons tout pour le mettre en œuvre – d’une façon ou d’une autre.

Certains s’inquiètent de ce qu’un vote Oui puisse être un vote de défiance envers notre gouvernement (puisque de notre côté nous recommandons de voter Non), et que dans cas-là, face à l’Euro-groupe, nous ne soyons pas en position de signer et d’appliquer l’accord avec les institutions. Pas du tout. Nous sommes des démocrates engagés. Si le peuple nous donne clairement l’instruction de signer les propositions des institutions, nous le ferons quoi qu’il en coûte, et même si cela signifie un changement de gouvernement.

Chers collègues, le référendum est la meilleure solution pour tous compte tenu des contraintes présentes.

Sur la question qui doit être posée au peuple grec beaucoup a été dit. Beaucoup d’entre vous nous ont parlé, conseillé et même enjoint d’en faire une question de oui ou non à l’euro. Je voudrais être clair sur ce point. Premièrement, la question a été formulée par le cabinet et présentée au parlement – et c’est “Acceptez-vous la proposition des institutions telle qu’elle nous a été présentée le 25 juin par L’Euro-groupe ?” C’est la seule question pertinente. Si nous avions accepté cette proposition deux jours avant nous aurions conclu un accord. Le gouvernement grec demande maintenant à son électorat de répondre à la question que vous m’avez fait me poser Jeroen – particulièrement lorsque vous avez dit, et je cite, “vous pouvez, si vous voulez, considérer cette proposition comme à prendre ou à laisser”. Et bien voilà comment nous la prenons et nous rendons hommage actuellement aux institutions et au peuple grec en demandant à ces derniers de nous livrer une réponse claire sur la proposition des institutions.

A ceux qui disent qu’en réalité c’est un référendum sur l’euro, ma réponse est celle-ci : Vous avez tout à fait le droit de dire cela mais je ne ferais pas de commentaires. C’est votre point de vue, votre avis, votre interprétation. Pas les nôtres ! Votre vision n’est logique que si dans le non du peuple grec à la proposition des institutions réside une menace implicite d’actions visant à sortir illégalement la Grèce de l’euro. Une telle menace ne serait pas en adéquation avec les principes fondamentaux d’une gouvernance européenne démocratique et de la loi européenne.

A ceux qui nous enjoignent de formuler la question du référendum comme étant celle d’un dilemme euro-drachme, ma réponse est claire comme de l’eau de roche : Dans les traités européens il y a des dispositions pour une sortie de l’UE. Il n’y en a pas pour une sortie de la zone euro. A juste titre , bien sûr, car l’indivisibilité de notre Union Monétaire fait partie de sa “raison d’être”. Nous demander de formuler la question du référendum comme un choix incluant la sortie de la zone euro c’est nous demander de violer les traités de l’UE et la Loi de l’UE. Je suggère à quiconque voudrait que nous, ou d’autres, tenions un référendum sur la question de son appartenance à l’UEM d’en changer d’abord les traités.

Chers collègues,

Il est temps de faire le point. Il y a une raison pour laquelle nous nous trouvons dans les difficultés actuelles : La proposition initiale que notre gouvernement vous a faite à vous et aux institutions, et que j’ai clairement énoncée devant l’Euro-groupe lors de ma toute première intervention, n’a jamais été prise au sérieux. C’était la proposition qu’un terrain d’entente soit trouvé entre le Protocole d’Entente [PE] en place et le programme de notre nouveau gouvernement. Pendant un bref moment la déclaration de l’Euro-groupe le 20 février a fait émerger l’espoir d’un tel terrain d’entente – car il n’y avait pas eu de référence au PE et la concentration s’était faite sur la nouvelle liste de réforme de notre gouvernement qui serait présentée aux institutions.

Malheureusement, immédiatement après le 20 février les institutions, et la plupart des collègues ici présents, ont cherché à remettre le PE au centre et à réduire notre rôle à des changements marginaux dans le cadre du PE. C’est comme si on nous disait, pour paraphraser Henry Ford, que nous pouvions avoir n’importe quelle liste de réformes, n’importe quel accord pour autant que ce soit le PE. Le terrain d’entente commun a ainsi été sacrifié préférant imposer à notre gouvernement une retraite humiliante. C’est ma vision. Mais ce n’est pas important pour le moment. Pour le moment c’est au peuple Grec de décider.

Notre tâche aujourd’hui, dans l’Euro-groupe, doit être de préparer le terrain à un passage en douceur vers le référendum du 5 juillet. Cela signifie une chose : que notre accord de prêt soit prolongé de quelques semaines afin que le référendum puisse  se tenir dans des conditions de tranquillité. Immédiatement après le 5 juillet, si les gens ont voté Oui, la proposition des institutions sera signée. Jusque là, pendant la semaine prochaine, à l’approche du référendum, toute déviation de la normalité, particulièrement dans le secteur bancaire, sera invariablement interprétée comme une tentative de forcer les électeurs grecs.

La société grecque a payé un prix élevé au travers de la contraction budgétaire pour faire partie de notre union monétaire. Mais une union monétaire démocratique qui menace un peuple sur le point de se prononcer avec des contrôles de capitaux et des fermetures de banques est une contradiction dans les termes. J’aimerais penser que l’Euro-groupe respectera ce principe. En ce qui concerne la BCE, le gardien de notre stabilité monétaire et de l’Union elle-même, et en cela je n’ai aucun doute, si l’Euro-groupe prend la décision responsable d’accepter la demande d’extension de notre accord de prêt, elle, la BCE fera tout ce qu’il faut pour octroyer au peuple grec quelques jours de plus pour donner leur avis.

Chers collègues, ce sont des moments critiques et les décisions à prendre sont capitales. Dans les années à venir on pourrait bien nous demander : “Où étiez-vous le 27 juin ? Et qu’avez-vous fait pour éviter ce qui est arrivé ?” Pour le moins nous devrions être capables de leur dire cela : “Nous avons donné au peuple qui vivait sous la plus terrible dépression une chance de réfléchir et choisir. Nous avons essayé la démocratie comme moyen de briser un verrou. Et nous avons fait ce qu’il faut pour leur donner les quelques jours pour le faire.”

POSTSCRITUM – Le jour où le Président de l’Euro-groupe a rompu avec la tradition de l’unanimité et exclu la Grèce d’une réunion de l’Euro-groupe volontairement.

A la suite de mon intervention (voir ci-dessus) le président de l’Euro-groupe a rejeté notre demande d’extension, avec le soutien des autres membres, et a annoncé que l’Euro-groupe ferait une déclaration accusant la Grèce d’être à l’origine de l’impasse, et proposant que les 18 ministres (c’est à dire les 19 ministres des finances de l’Euro-zone moins le ministre grec) se retrouvent plus tard pour discuter des voies et moyens de se protéger de la faillite.

A ce moment j’ai demandé un conseil juridique au secrétariat, à savoir si une déclaration de l’Euro-groupe pouvait se faire hors de l’unanimité conventionnelle et si le président de l’Euro-groupe pouvait convoquer une réunion  sans inviter le ministre des finances d’un état-membre. J’ai reçu l’extraordinaire réponse suivante : “L’Euro-groupe est un groupe informel. Par conséquent il n’est pas lié par des traités ou des règles écrites. Même si l’unanimité est classiquement observée, le président de l’Euro-groupe n’est pas lié par des règles explicites.” Je laisse le lecteur commenter cette remarquable déclaration.

De mon côté j’ai conclu ainsi :

Chers collègues, le refus d’une extension de l’accord de prêt de quelques semaines, et ceci dans le but de donner au peuple grec la possibilité de débattre paisiblement et sereinement de la proposition des institutions, surtout au vu de la forte probabilité qu’ils acceptent ces propositions (contrairement à l’avis de notre gouvernement),portera atteinte durablement à la crédibilité de l’Euro-groupe en tant qu’organisme démocratique de décision comprenant des états-partenaires qui ne partagent pas seulement une monnaie commune mais aussi des valeurs communes.

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CONFERENCE DE PRESSE IMMEDIATEMENT APRES LA REUNION DE L’EUROGROUPE LE 27 JUIN 2015

Source : Yanis Varoufakis, le 28/06/2015

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

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Sur la déclaration sur la Grèce du sommet de l’Euro : premières impressions de Yanis Varoufakis

Durant les prochaines heures et les prochains jours, je siégerai au parlement afin d’évaluer la législation faisant partie du récent accord du sommet européen sur la Grèce. J’ai aussi hâte d’entendre en personne mes camarades, Alexis Tsipras et Euclid Tsakalotos, qui ont tant enduré durant ces derniers jours. Jusque-là, je compte réserver mon jugement quant au texte qui nous est présenté. En attendant, voici mes quelques premières impressions à chaud telles que soulevées par la déclaration du sommet de l’Euro.

  • Un nouveau traité de Versailles hante l’Europe – j’ai utilisé cette expression à l’époque au printemps 2010 pour décrire le premier « sauvetage financier » de la Grèce qui était préparé à ce moment-là. Si cette allégorie était alors pertinente, elle ne l’est, malheureusement, que trop aujourd’hui.
  • L’Union Européenne n’avait encore jamais pris une décision qui affaiblisse aussi fondamentalement le projet d’intégration européenne. Les dirigeants européens, en traitant Alexis Tsipras et notre gouvernement de la manière dont ils l’ont fait, ont porté un coup décisif au projet européen.
  • Le projet d’intégration européenne a, en effet, été mortellement blessé durant ces dernières années. Et comme Paul Krugman l’a dit à juste titre, quoi que vous pensiez de Syriza, ou de la Grèce, ce ne sont ni les Grecs ni Syriza qui ont tué le rêve d’une Europe démocratique et unie.
  • Dès 1971, Nick Kaldor, le célèbre économiste de Cambridge, avait prévenu que forger une union monétaire avant qu’une union politique ne soit possible, ne mènerait pas seulement à l’échec de l’union monétaire, mais aussi à la déconstruction du projet politique européen. Plus tard, en 1999, le sociologue germano-britannique Ralf Dahrendorf avait aussi averti qu’une union économique et monétaire diviserait l’Europe plus qu’elle ne l’unirait. Pendant toutes ces années, j’ai espéré qu’ils avaient tort. Maintenant, les pouvoirs en place à Bruxelles, à Berlin et à Francfort ont conspiré pour leur donner raison.
  • La déclaration du sommet de l’Euro d’hier matin ressemble à un document couchant sur le papier les termes de la reddition de la Grèce. Elle est rédigée comme une déclaration confirmant que la Grèce accepte de devenir un vassal de l’Euro-groupe.
  • La déclaration du sommet de l’Euro d’hier matin n’a rien à voir avec l’économie, ni avec une quelconque préoccupation pour le type de programme de réformes capable de sortir la Grèce du bourbier. C’est purement et simplement la manifestation d’une politique de l’humiliation qui est à l’œuvre. Même quelqu’un qui exècre notre gouvernement doit voir que la liste des exigences de l’Euro-groupe n’a rien de décent ou de raisonnable.
  • La déclaration du sommet de l’Euro d’hier matin a donné le signal d’une complète annulation de la souveraineté nationale, sans mettre à sa place un corps politique souverain supra-national, pan-européen. Les Européens, même ceux qui se fichent complètement de la Grèce, devraient faire attention.
  • Les médias dépensent beaucoup d’énergie à essayer de savoir si les Termes de la Reddition seront acceptés par le parlement grec, et en particulier si les parlementaires comme moi resteront dans le droit chemin et voteront en faveur de la législation correspondante. Je ne pense pas que ce soit la plus intéressante des questions. La question cruciale est : est-ce que l’économie grecque a une chance de s’en sortir sous ces termes ? C’est la question qui me préoccupera durant les sessions parlementaires qui suivront dans les prochaines heures et les prochains jours. La plus grande crainte que j’ai est que même une complète reddition de notre part ne mènerait qu’à une crise sans fin de plus en plus profonde.
  • Le récent sommet de l’Euro n’est en effet rien d’autre que l’aboutissement d’un coup d’état. En 1967, ce sont les tanks que les puissances étrangères utilisèrent pour mettre fin à la démocratie grecque. Dans mon interview à Philip Adams, sur la radio nationale d’ABC, LNL, j’ai affirmé qu’en 2015 un autre coup d’état était organisé par les puissances étrangères, en utilisant cette fois, à la place des tanks, les banques grecques. Peut-être que la plus grosse différence économique est que, si en 1967, les biens publics grecs n’étaient pas ciblés, en 2015, les puissances derrière le coup d’état ont exigé de se voir remettre tous les actifs publics restants, afin qu’ils servent à payer notre dette insoutenable et irremboursable.

Source : Yanis Varoufakis, le 14/07/2015

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Source: http://www.les-crises.fr/telle-quelle-lintervention-de-yanis-varoufakis-lors-de-la-reunion-de-leuro-groupe-du-27-juin-2015-presentee-par-lui-meme/


Actu’Ukraine 29/07/2015

Wednesday 29 July 2015 at 01:42

ACTU’UKRAINE DU 20 AU 26 JUILLET 2015

 

Merci à toutes celles et tous ceux qui ont participé à cette Actu’Ukraine !

Actu’Ukraine fait une pause en août… On se revoit en septembre !

 

 FOCUS SUR UN GRAND PAS VERS LA PAIX

• La conversation au format “Normandie” du 23 juillet.  Le groupe de contact des accords de Minsk était arrivé à un accord important le 21 juillet. Le groupe s’est entendu sur un retrait multilatéral (donc y compris les ukrainiens) des armes d’un calibre inférieur à 100 mm (c’est à dire les chars et l’artillerie légère) des lignes de front (novorossia.today, dnr-news.com). Le fait important et sans doute déclencheur de cet accord est que ce retrait est déjà effectif du côté des Novorusses. Après la république de Lougansk la semaine dernière, celle de Donetsk a terminé le retrait de ce type d’armes des lignes de front justement le 21 juillet (rt.com), ce que l’OSCE a pu “observer”, mais pas “confirmer” (novorossia.today). Fait très notable, le député du conseil municipal de Kiev et journaliste Dmitri Gordon, très ultra nationaliste, conseille le 21 juillet aux autorités ukrainiennes de laisser tomber leurs prétentions sur le Donbass (vzgliad.ru, gordonua.com). Porochenko lui-même déclare dans un communiqué officiel, le 22 juillet : “I hope it will be the real beginning of the ceasefire” “J’espère que c’est le vrai début du cessez-le-feu” (president.gov.ua).

 

22 juillet 2015 : communiqué officiel de la présidence d’Ukraine (president.gov.ua)

 President’s statement about the Minsk agreement: I hope it will be the real beginning of the ceasefire
“I hope it will be the real beginning of the ceasefire,” the President said about the Minsk agreement. 
President  Petro Poroshenko announced the signing the Agreement by the Trilateral  Contact Group that would allow withdrawing heavy weapons and  establishing the 30-kilometer buffer zone along the contact line.
During  his meeting with the core groups of the Luhansk region in  Severodonetsk, the President said that he instructed the members of the  Contact Group from Ukraine to initiate signing the Agreement for  establishing the 30-kilometer buffer zone along the contact line, which  would include the removal of artillery, the remaining tanks, and  mortars. “Thus, constant shelling in Severodonetsk, Rubizhne,  Lysychansk, and impossible Popasnaya,” the President said.
The  Head of State noted that the diplomatic efforts were successful and the  proposal of Ukraine was accepted at the insistence of the OSCE. “The  countdown will start in a few days and all heavy weapons will be  withdrawn under the control of the OSCE,” Petro Poroshenko said.
“I  hope that this will be the beginning of the real ceasefire, withdrawal  of heavy machinery and artillery, release of hostages illegally kept by  the occupiers, and effective control of the OSCE over the performance of  such agreements. Then, such steps will ensure potential economic and  political reintegration of such territories and their return to  Ukraine,” Petro Poroshenko said.

 

22 juillet 2015 :  Я сподіваюся, що це буде реальний початок припинення вогню – Президент про Мінську домовленість   (youtube)

 

Le 23 juillet au soir, une conversation téléphonique au format “Normandie” (Ukraine, Russie, France, Allemagne) a  lieu. Les résultats du groupe de contact sont actés et de grandes avancées sont décidées durant cette conversation. Les chefs d’état des pays du “format de Normandie” appellent donc  le 23 juillet à un cessez-le-feu complet (lefigaro.fr), demandent/exigent de Kiev le retrait des forces armées ukrainiennes de Shirokino d’ici le 3 août (vz.ru, sputniknews) pour répondre à la démilitarisation unilatérale de la ville par les Novorusses le 2 juillet (les-crises.fr dans le Focus de la semaine). Pour éviter surtout que des éléments de l’armée ou de la garde nationale cherchent à occuper le terrain, comme cela a été tenté le 22 juillet  (novorossia.today) et enfin appellent au retrait des chars et de l’artillerie “légère” (calibre inférieur à 100 mm) à 15 km de par et d’autre de la ligne de front, ce qui concerne en fait principalement les forces ukrainiennes, puisque les Novorusses ont déjà effectué ce retrait.

 

 

Les quatre communiqués de presse officiels sont reproduits ci-dessous.

23 juillet 2015 : Communiqué officiel de la présidence d’Ukraine  (president.gov.ua)

President had a conversation in the Normandy format
President of Ukraine Petro Poroshenko had a telephone conversation  with German Chancellor Angela Merkel, French President Francois  Hollande, and Russian President Vladimir Putin.
The leaders  discussed the results of the last meeting of the Trilateral Contact  Group and its four subgroups held on 21 July in Minsk.
The  President of Ukraine mentioned the deteriorating security situation in  the Donbas, including increasing attacks by militants.
The leaders  emphasized the need to ensure proper monitoring and verification of the  ceasefire by the OSCE and supported the initiative of the President of  Ukraine on immediate signing the Trilateral Contact Group Agreement for  the withdrawal of tanks, guns with calibre below 100 mm, and mortars.
The  President of Ukraine stressed the need for release of all hostages,  including those illegally detained in Russia, and in particular Nadia  Savchenko.
The parties welcomed decisions made by the Trilateral  Contact Group in relation to repairing damage to the water and railway  infrastructure.
Special attention was paid to the immediate  establishment of delimitation line for the humanitarian and logistics  centers where Ukrainians from occupied territories would  be able to by  goods and drugs at affordable prices.
The leaders also discussed  the upcoming elections in some parts of the Donetsk and Luhansk regions.  In that context, Petro Poroshenko emphasised that arranging fictitious  elections scheduled for 18 October and 1 November would be unacceptable  and such elections would not have legal consequences.
The parties  agreed to speed up the preparations of the Agreement between Ukraine,  the EU, and Russia to ensure Russian gas supplies to Ukraine.
The leaders agreed to continue the dialogue.

 

23 juillet 2015 : Communiqué officiel du Kremlin (kremlin.ru)

 Telephone conversation with Angela Merkel, Francois Hollande and Petro Poroshenko 
Vladimir Putin had a telephone conversation with Federal Chancellor of Germany Angela Merkel, President of France Francois Hollande and President of Ukraine Petro Poroshenko.
The four leaders examined the implementation of the Minsk Agreements of February 12, 2015, taking into account the results of the recent meeting of the Contact Group and its working sub-groups on July 21. 
They expressed satisfaction with the decision announced by the Donetsk People’s Republic and Lugansk People’s Republic to carry out a voluntary and unilateral withdrawal of arms of a calibre of less than 100mm, and the start of this withdrawal. The Contact Group’s working sub-group on security has reached agreement on a document on withdrawal of tanks and mortars of a calibre of less than 120mm and artillery systems with a calibre of less than 100mm to 15 kilometres from the line of contact. The emphasis is now on getting this document signed as soon as possible and implementing these agreements that complement the measures set out in the Minsk Agreements. 
The four leaders  once again stressed the importance of strict compliance with  the ceasefire regime and establishment of demilitarised zones, under  the oversight of the OSCE’s  special monitoring mission. In this respect, a call was made  for Ukrainian forces to withdraw from the village of Shirokino, which  the self-defence forces withdrew from earlier in a goodwill gesture. They also discussed  the exchange of people detained by both sides in the conflict,  and the possibility of getting International Red Cross representatives involved. 
Mr  Putin stressed that a stable and comprehensive settlement to Ukraine’s  internal crisis would be possible only if Kiev establishes direct dialogue with  Donbass representatives. The Russian leader called on Ukraine to comply more  closely with the spirit and the letter of the Minsk Agreements,  and in particular to consult with Donetsk and Lugansk people’s republics  representatives and bring into legal force a permanent legally enshrined special status  for the two regions and a law on an amnesty, and also settle the procedures  for holding local elections. 
The four leaders exchanged views on possible steps to resolve a number of serious social, economic and humanitarian problems in the Donbass region. 
They also discussed matters concerning Russian gas supplies to Ukraine.
The four leaders agreed to continue their work in the Normandy format at various levels.

 

23 juillet 2015 : Communiqué officiel de l’Elysée (elysee.fr)

 Entretien téléphonique en format Normandie – Ukraine                 
Le Président de la République et la  Chancelière allemande se sont entretenus avec les Présidents ukrainien  et russe de la situation dans l’est de l’Ukraine et de la mise en œuvre  du paquet de mesures adopté à Minsk le 12 février 2015.
Lors de cet appel téléphonique, les points suivants ont été agréés :
    
Questions de sécurité
Les quatre dirigeants ont pris note des accords trouvés sur le  retrait des chars et de l’artillerie légère à 15 km de part et d’autre  de la ligne de contact, dans le cadre du groupe de travail de Minsk en charge des questions de sécurité. Ils souhaitent que ces accords soient  signés dès que possible et qu’un dispositif d’observation effectif par  la Mission spéciale d’observation de l’OSCE soit mis en place le long de  la ligne de contact.
S’agissant de Chyrokine, les quatre dirigeants ont pris note du  retrait des forces séparatistes et demandé à la Mission spéciale  d’observation de l’OSCE et aux experts de la Commission de contrôle et  de coordination du cessez-le-feu (JCCC) de trouver des solutions  pratiques, d’ici le 3 août, pour le retrait des troupes ukrainiennes et  l’installation de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE.
Ils sont convenus de l’importance de respecter les engagements pris à  Minsk en février concernant le retrait des armes lourdes de la ligne de  contact, la mise en oeuvre complète du cessez-le-feu et l’accès de la  Mission spéciale d’observation de l’OSCE.
 
Questions humanitaires
Les quatre dirigeants ont salué la décision de lancer des projets de  rénovation des infrastructures de traitement et d’approvisionnement en  eau et de restaurer une voie ferrée pour le transport de charbon.
Ils ont salué l’accord trouvé afin d’établir des centres logistiques  humanitaires dans la zone tampon. Ces centres devraient être utilisés  pour la fourniture de services bancaires mobiles.
Afin de progresser sur les échanges de prisonniers et  l’identification des personnes disparues, ils ont marqué l’importance  d’assurer un libre accès au Comité international de la Croix Rouge  (CICR).
 
Questions politiques
Les quatre dirigeants ont salué l’intention des parties de discuter  des élections locales et du régime de décentralisation le 28 juillet  dans le cadre du groupe de travail de Minsk en charge des questions  politiques.
L’importance de retenir une seule date pour l’organisation des  élections locales dans l’ensemble de l’Ukraine, y compris dans certains  secteurs des régions de Donetsk et de Lougansk, a été soulignée.
Il a aussi été rappelé que les élections locales devaient être  organisées selon les normes de l’OSCE et être surveillées par le Bureau  des institutions démocratiques et des droits de l’Homme (BIDDH) de  l’OSCE.
 
Energie
Enfin, les quatre dirigeants sont convenus de la nécessité de trouver rapidement un accord sur le prochain paquet gazier.

 

23 juillet 2015 : Communiqué officiel de la Chancellerie fédérale (bundesregierung.de)

 Bundeskanzlerin Merkel telefoniert mit den Staatspräsidenten von Frankreich, Russland und der Ukraine   
Die stellvertretende Sprecherin der Bundesregierung, Christiane Wirtz, teilt mit:
Bundeskanzlerin Angela Merkel hat heute  (23.7.2015) in einer Telefonkonferenz mit den Staatspräsidenten von  Frankreich, Russland und der Ukraine über die Lage in der Ukraine  beraten. Zentrales Thema war der Stand der Umsetzung der Minsker  Vereinbarungen. 
Dabei waren sich die Gesprächsteilnehmer einig,  dass die in dieser Woche erzielten Vereinbarungen zum Rückzug von  Panzern und leichter Artillerie von der Kontaktlinie rasch umgesetzt  werden müssten und dass der Rückzug von der Organisation für Sicherheit  und Zusammenarbeit in Europa (OSZE) überwacht werden soll.
Um den lokalen Waffenstillstand in der lange umkämpften Stadt Schyrokyne zu sichern, sollen Experten der OSZE bis zum 3. August Lösungen für offene Fragen wie das Räumen von Minen finden.
Es bestand Einigkeit, dass dem politischen Prozess  besondere Aufmerksamkeit gewidmet werden müsse. Insbesondere seien  Fortschritte zu den für Herbst geplanten Kommunalwahlen im Einklang mit  den Standards der OSZE sowie dem ukrainischen Recht und dem besonderen Status der von Separatisten kontrollierten Gebiete dringlich.
Alle vier Staats- und Regierungschefs begrüßten die  Einigung vom Dienstag auf humanitäre Projekte zur Unterstützung der von  dem Konflikt am meisten betroffenen Bevölkerung in der Ostukraine (z.B.  im Wassersektor, bei der Reparatur von Eisenbahnlinien und der  Einrichtung von humanitären Zentren an der Kontaktlinie). Auch die Frage  des Zugangs zu Gefangenen sowie der Suche nach Vermissten mit  Unterstützung des Internationalen Komitees vom Roten Kreuz soll wieder  aufgenommen werden.
Die Gesprächsteilnehmer stimmten darin überein,  dass alle Seiten aufgefordert blieben, das Minsker Maßnahmenpaket von  Februar 2015 umzusetzen. Dazu zählen insbesondere der Abzug auch der  schweren Waffen sowie die Überprüfung durch die OSZE, der freier Zugang gewährt werden müsse.
Es wurde vereinbart, die Gasverhandlungen zwischen Russland und der Ukraine rasch wieder aufzunehmen.

 

Dans la foulée, Porochenko a une conversation téléphonique avec le Vice Président américain Biden (president.gov.ua, pravda.com.ua).

 

24 juillet 2015 : Communiqué officiel de la présidence d’Ukraine (president.gov.ua)

 President had a phone conversation with U.S. Vice President
Vice  President Biden supported the efforts of President Poroshenko on the  fulfillment of the Minsk agreements. He noted that the U.S. positively  evaluated the efforts of Ukraine on the establishment of peace,  achievement of political settlement and restoration of normal life in  Donbas.
President Petro Poroshenko and Vice President Joseph Biden shared views on the situation in Donbas.
The  Head of State informed the American party on the results of yesterday’s  negotiations in the Normandy format and the aftermath of the  negotiations of the Trilateral Contact Group of July 21 in Minsk,  particularly on the achievement of the agreement regarding the  withdrawal of heavy weaponry of caliber greater than 100 mm and the  establishment of 30 km demilitarized area on the touch line under the  OSCE control, which should ensure real ceasefire. 
Petro  Poroshenko is hopeful that the U.S. will facilitate the fulfillment of  these important agreements that are a necessary precondition for the  further progress in the political settlement and the solution of urgent  humanitarian and economic problems in Donbas.
Vice President Biden  supported the efforts of President Poroshenko on the fulfillment of the  Minsk agreements. He noted that the U.S. positively evaluated the  efforts of Ukraine on the establishment of peace, achievement of  political settlement and restoration of normal life in Donbas.
The  parties discussed military-technical cooperation and prospects of  establishing the international criminal tribunal regarding the tragedy  of MH17 aircraft.
President Poroshenko is hopeful that Ukraine  will get the next IMF tranche. He informed on the signature of the law,  which creates an opportunity for the continuation of funding.

 

Du coup, Porochenko se déclare favorable à une zone tampon de 30 kilomètres pour éviter les bombardements, c’est à dire accepte de facto le retrait des chars et de l’artillerie légère ukrainienne (geab.eu).  L’accord devrait être signé avant le 3 août 2015 et  mis en oeuvre dans les 10 jours suivants (sputniknews). Il est, de plus, également question de lever le blocus des républiques de l’est et d’organiser les échanges commerciaux entre l’Ukraine et les républiques (fortruss). Porochenko déclare toutefois dans la foulée que “le Donbass restera en Ukraine et que ses habitants pourront parler le russe et l’ukrainien” (sputniknew). Il admet ainsi une sorte de fédéralisation qui était la demande initiale des Novorusses et des Odessites en mars-avril 2014, c’est à dire avant le massacre d’Odessa du 2 mai 2014 et avant la guerre civile au Donbass. Porochenko le déclare, mais malheureusement plus d’un an trop tard avec des milliards de dollars de destruction et des dizaines de milliers de morts. Un autre acte tangible de détente est que les deux soldats russes capturés en Ukraine en mai (Actu’Ukraine du 27 mai 2015 : les crises  L’isolement par rapport aux USA : mise en pratique – Le flop de la capture de deux soldats russes en Ukraine) auraient été échangés discrètement contre des soldats ukrainiens et des “combattants étrangers” prisonniers des républiques de l’Est (Fortruss).

Ce n’est pas forcément la fin de la guerre, mais c’est un bon pas en avant. Seule l’infanterie va rester sur les lignes de front, ce qui empêchera les bombardements. Certes, il est toujours possible que des groupes de reconnaissance (comme à Shirokino le 22) ou de sabotage s’infiltrent en territoire ennemi, mais cela serait, si tel est le cas, d’une intensité nettement moindre que ce que l’on a connu les mois passés, par exemple à Marinka début juin.

Du coup, l’atmosphère se détend. L’Ukraine échappe (pour l’instant) au défaut de paiement  (ici.radio-canada.ca) et le FMI débloque une tranche de 1,7 milliard USD de son prêt de 17,5 milliards USD à l’Ukraine (unian.info, pravda.com.ua, bloomberg.com). De manière plus anecdotique, mais politiquement importante, la FIFA réaffirme son soutien à la coupe du monde de football en Russie en 2018 (rt.com, youtube). Annonce faite par Blatter à Saint-Petersbourg lors de la cérémonie du tirage au sort des équipes :I would like to inform you that the executive committee has  recently adopted a new resolution in which FIFA assures the Russian  Federation of its full support in carrying out the World Cup in Russia  in 2018,

 

25 juillet 2015 : Russia: FIFA’s Executive Committee has ‘trust and confidence’ in Russia – Blatter   (youtube)

 

Point de vue politique, Russes et américains se réconcilient avec le but commun affiché d’en finir avec DEASH et autres groupes du même genre (sputniknews). Kerry prévient même Israël qu’une attaque israëlienne sur l’Iran serait une “énorme erreur avec des conséquences” (rt.com).

 

Il y a clairement un changement de position au sein du camp USA/UE qui va plus loin que l’arrêt des hostilités, ce qui inquiète le pouvoir ukrainien. En effet, les sanctions contre la Russie, seule “victoire” tangible de l’Ukraine, sont en péril, du moins au niveau de l’UE (glavnoe.ua reprenant une info de la chaîne 112.ua). A la question d’un journaliste concernant les sanctions (l’UE allait-elle les renforcer?), Loutsenko, le chef du bloc Petro Porochenko, a répondu: “Non, malheureusement, il n’en est pas question (Ndlr : de les renforcer). Malheureusement, il est question de savoir si on les conserve, ils disent ouvertement que cette option est menacée. Parce que les amis de Poutine disent que c’est l’Ukraine qui est fautive et ne veut pas la paix, qu’elle ne respecte pas les accords de Minsk et qu’en conséquence, ils ne veulent pas être obligés de perdre leurs possibilités de commercer avec la Russie”. Selon lui, on considère au sein du Parlement européen qu’il est pratiquement impossible de conserver les sanctions si l’Ukraine cesse de soutenir les accords de Minsk. Loutsenko s’appuye sur un article du Times qui affirme que les sanctions sont inopérantes car les oligarques russes appartenant à l’entourage du président russe et aussi les proches de celui-ci ont trouvé le moyen de contourner ces sanctions en vendant ou en cédant leurs actifs aux membres de leur famille et à leur entourage. En résumé et en caricature, cela donne le dessin donné plus bas dans les “Exemples d’humour russe”.

 

D’une manière factuelle, les sanctions se retournent essentiellement contre l’UE. Les USA commercent tranquillement avec la Russie et la Russie en profite pour se rendre autonome, réoriente ses flux commerciaux et songe à prolonger ses propres sanctions anti UE (sputniknews). En Europe, quelques chiffres parlant : les exportations allemandes vers la Russie sont en baisse de 43% (vz.ru) et les entreprises italiennes perdent 8 milllions EUR par jour du fait des sanctions (sputniknews). En Finlande, l’industrie laitière est en crise en raison du temps et de l’embargo russe (vz.ru). L’initiative des 10 parlementaires français et leur voyage en Crimée s’inscrit dans cette logique de levée des sanctions (voir le focus sur le sujet, un peu plus bas).

 ”Il est peut-être temps d’adoucir les sanctions contre la Russie”

 

Une seule question demeure.  Est-ce que Porochenko sera assez fort politiquement pour mener à bien ces avancées vers la paix ? Pour la pravda russe, rien n’est moins sûr (russia-insider), mais c’est néanmoins possible si personne ne remet de l’huile sur le feu…

Et ca commence plutôt mal. Alors que des ordres ont effectivement été donnés pour quitter Shirokino (dnr-news.com), les “volontaires et patriotes ukrainiens” ont l’intention de bloquer le retrait des troupes (dnr-news.com). A suivre donc…

 

FOCUS : LA VETCHE DE PRAVIY SEKTOR ET LE PAYSAGE POLITIQUE UKRAINIEN

• La Vetche du 21 juillet 2015. Donc, comme annoncé, Praviy Sektor a organisé sa Vetche à Kiev le mardi 21 juillet. Si dimanche, très peu de monde était présent, Praviy Sektor a réussi à rassembler mardi plusieurs  milliers de personnes, de 3 à 6000 (vz.ru). C’est à la fois peu et beaucoup. Peu pour démarrer une révolution, beaucoup si l’on compare à la Vetche organisée à Dnipropetrovsk par Kolomoïski en mars 2015 qui n’avait rassemblé que quelques centaines de personnes au mieux.

 

 

Yarosh, le chef de Praviy Sektor, annonce une nouvelle étape de la révolution (ukrstream.tv) avec des slogans comme “Gloire à l’Ukraine !” et “A bas le pouvoir des traîtres !” (http://colonelcassad.livejournal.com/2298823.html) et renomme son mouvement en Mouvement de Libération Nationale (vz.ru). Il demande en outre la dénonciation des accords de Minsk (sputniknews). De Defensa y voit les premisses d’une décomposition avancée du pouvoir et les germes d’une nouvelle révolution (dedefensa.org). Ce qui répond à une autre inquiétude selon laquelle “dans un an, les ukrainiens seront prêts à n’importe quoi” (fortruss). Fondamentalement, Praviy Sekor /MLN se sent  trahi par le gouvernement ukrainien avec le vote de la constitution, la traque des Praviy Sektor de Mukachevo et la récente détente (voir plus pas dans le focus “Détente internationale ?”). Il n’est plus question de guerre (du moins officiellement). Les héros de PS et d’Azov entre autres sont morts pour rien… Alors la colère des ultra-nationalistes se retourne naturellement vers le gouvernement (fortruss). Stratfor sort une analyse sur Praviy Sektor et sur ses capacités à déstabiliser le régime de Kiev (stratfor.com). Pour Stratfor, Praviy Sektor/MLN est plus une nuisance qu’une menace.

Nuisance ou menace, Praviy Sektor/MLN appelle à un référendum dans lequel sera posé plusieurs questions :

 

Les jours précédents, Praviy Sektor /MLN avait tweeté des attaques sans équivoque contre le gouvernement et l’UE (fortruss). Par exemple :

“Un esclave est un esclave, qu’elle que soit la couleur”

 

“Ne financez pas l’occupant intérieur ! si vous achetez Roshen (Note : c’est la chocolaterie qui appartient à Porochenko), vous financez l’occupant intérieur !” 

 

“Nous avons mis en place des réformes GRANDES COMME CA” 

 

21 juillet 2015 : «Правий сектор» розпочинає новий етап української революції – Ярош (“Secteur droit” commence une nouvelle étape de la révolution ukrainienne – Jarosz) (youtube)

 

A remarquer dans cette vidéo le regard de Yarosh. Il est plein d’émotion. Ce n’est pas un regard ou un ton de colère, mais plutôt les yeux de quelqu’un qui se sent trahi… Vulgairement parlant, il a plutôt l’air “d’avoir les boules”…

 

21 juillet : Промова Дмитра Яроша під час Віче на Майдані Незалежності у Києві   (Discours de Dmitri Yarosh) (sectorpravdy.com)

Traduction automatique de l’ukrainien à l’anglais

Glory To Ukraine!
You know, people like us do messiahs, I – as simple and sinner like all of you here, and who are all over Ukraine. We do what we have to do. We defend state sovereignty and territorial integrity of our country. And, frankly, I was not interested in names out Poroshenko Avakov and all others.
We predicted that the blood of our heroes that shed here, come sharomyzhnyky that will manage our Ukraine. We  know well that do not have names now vary country, and must be thrown  into the dustbin of history all political peretasovana log. We know what must be destroyed system of internal occupation. Other way is not.
Dear  friends, I thank you, for what you have gathered, I, frankly, did not  think that so many people come to support Ukrainian patriots. thank you!
For us it is very important to perform two tasks. First – this is to protect our country. For  we know perfectly well that many think that the legal sector – it is  such a “ryboshky” that will peck at the bait Putin and his gang. In fact, do not be! From our very expect that we are off to smash admin. buildings and everything else. We show that we – disciplined revolutionary force that this generation  from the Chamber and our Congress begins a new stage of Ukrainian  revolution.
Our combat units now carry their service in the combat zones of their responsibility. We do not take off our men from the front to prevent the enemy to start a broad offensive in the east of Ukraine. However, while the whole, there are also representatives of the battalions of the 5th, 8th, separate groups, and so on. I’ll release of all soldiers congratulations!
Today the congress Right Sector. Extraordinary Congress detonator which are the events in Mukachevo. I was in Transcarpathia several days and looked at the equipment and soldiers who are concentrated there. As the commander of the 8th Battalion friend “June”: “those forces and Donetsk could be tipped.” But for some reason, a dozen of our guys the forces were thrown. It’s amazing! Given that we have not seen those natshvardiytsiv there on the front. They are the second and third lines of block-posts.
Our guys shed blood, and for this same punished here in the rear. And not just ours – we’re talking about the entire volunteer movement.
Today the Congress Right Sector were adopted strategic decisions. First: Right Sector initiates a nationwide referendum, which will be submitted several questions. First  – distrust the government, the second – we demand that at last war  waged by Russia against Ukraine was recognized by the war, not the ATO -  and then word has to say our Ukrainian people. Third – we support the complete blockade of the occupied territories. Fourth – we ask the support of the people to legalize Ukrainian Volunteer Corps and other volunteer departments under the law.
Today was also decided, in view of the fact that we are starting a new  stage of the revolutionary struggle, renamed the Military Political  Movement Right Sector for National Liberation Movement Right Sector.
We believe that people can not win, but happy people without the people themselves – also impossible. Therefore, we sincerely look forward to your support. Without you – we nothing with you – we have the power! So together we will win!
Dear friends, we have come – very big job. It is – difficult and not a day. Now,  literally tomorrow, in all regions of Ukraine, each regional center  will happen to our operational headquarters referendum. I ask actively involved in this work because we can tear down internal  occupation regime and the terrible defeat of the external enemy – Putin  and his gang.
Glory To Ukraine! Thank Nation! Thank you friends! Total – win!

 

Texte ukrainien original

Слава Україні!
Знаєте, у нас люди люблять творити месій, я – такий простий та грішний як і ви всі тут, і які знаходяться по всій Україні. Ми робимо те, що мусимо робити. Ми захищаємо державний суверенітет та територіальну цілісність нашої держави. І, чесно говорячи, мене геть не цікавлять прізвища порошенків, авакових та всіх інших.
Ми передбачали, що на крові наших героїв, яка проливалась ось тут, прийдуть шаромижники, які будуть керувати нашою Україною. Ми знаємо чудово, що не прізвища мають зараз мінятись в країні, а має бути викинута на смітник історії вся перетасована політична колода. Ми знаємо, що має бути знищена система внутрішньої окупації. Іншого шляху в нас немає.
Шановні друзі, я вам щиро дякую, за те що ви зібралися, я, якщо чесно, не думав, що так багато людей прийде підтримати українських патріотів. Дякую вам!
Для нас зараз дуже важливо виконати два завдання. Перше – це вберегти нашу державу. Бо ми чудово знаємо, що багато хто думає, що Правий сектор – це такі собі “рибьошки”, які будуть клювати на наживку путіна та його банди. Насправді так не буде! Від нас дуже чекали, що ми зараз підемо громити адмін. будівлі і все інше. Ми показуємо, що ми – дисциплінована революційна сила, яка оцим от віче і нашим з’їздом розпочинає новий етап української революції.
Наші бойові підрозділи зараз несуть свою службу в зонах своєї бойової відповідальності. Ми не знімаємо наших бійців з фронту, щоб не дати ворогу почати широкий наступ на сході України. Але, при тому всьому, тут є і представники цих батальйонів 5-го, 8-го, окремих груп, тощо. Я вам від всіх фронтовиків передаю вітання!
Сьогодні відбувся з’їзд Правого сектору. Надзвичайний з’їзд, детонатором до якого стали події в Мукачеві. Я був на Закарпатті декілька днів і дивився на техніку та солдат, які там сконцентровані. Як сказав комбат 8-го Батальйону друг “Червень”: “з тими силам і Донецьк можна було б відбити”. Але чомусь на десяток наших хлопців ті сили були кинуті. Дивно! При тому, що ми не бачили тих нацгвардійців там, на фронті. Вони стоять на другій та третій лінії блок-постів.
Наші хлопці проливають кров, і за це ж, несуть покарання тут, в тилу. І не тільки наші, – ми говоримо про весь добровольчий рух.
Сьогодні на З’їзді Правого сектору були прийняті стратегічні рішення. Перше: Правий сектор ініціює всеукраїнський Референдум, на який буде винесено декілька питань. Перше – недовіра владі, друге – ми вимагаємо, щоб нарешті війна, яка ведеться Росією проти України була визнана війною, а не АТО, – і тут слово має сказати наш український народ. Третє – ми виступаємо за повну блокаду окупованих територій. Четверте – ми просимо підтримки народу в тому, щоб легалізувати Добровольчий Український Корпус і інші добровольчі підрозділи згідно чинного законодавства.
Сьогодні також було прийняте рішення, в зв’язку з тим, що ми починаємо новий етап революційної боротьби, перейменувати Військово-Політичний Рух Правий сектор на Національно-Визвольний Рух Правий сектор.
Ми переконані в тому, що народ перемогти неможливо, але і ощасливити народ без участі самого народу – теж неможливо. Тому ми щиро розраховуємо на вашу підтримку. Без вас – ми ніщо, з вами – ми сила! Тому разом ми переможемо!
Шановні друзі, у нас попереду – дуже велика робота. Вона – важка і не одноденна. Зараз, буквально завтрашнього дня, по всіх областях України, в кожному райцентрі будуть творитись оперативні штаби для нашого Референдуму. Я прошу активно долучатися до цієї роботи, бо ми можемо знести режим внутрішньої окупації, і перемогти зовнішнього страшного ворога – путіна і його банду.
Слава Україні! Слава Нації! Дякую друзі! Разом – переможемо!

 

21 juillet 2015 : Мітинг «Правого сектору» на майдані Незалежності (пряма трансляція)   (Réunion de Secteur Droit sur la Place de l’Indépendance (diffusion en direct) (youtube)

 

• Le paysage politique ukrainien. La vie politique ukrainienne est très fragmentée. En juin 2014, on ne comptait pas moins de 210 partis en Ukraine, plus ou moins grands, plus ou moins “vivants”  (wikipedia). Les dernières élections législatives datent d’octobre 2014 (wikipedia, wikipedia). Le mode de scrutin ukrainien est un peu compliqué, c’est un mélange de majoritaire et de proportionnelle. La moitié des députés (225 sur 450) est élue au scrutin majoritaire et l’autre au scrutin proportionnel avec un seuil de 5%. Du fait de la sécession de la Crimée et de la guerre civile à l’est, 27 circonscriptions se retrouvent hors du contrôle de Kiev. On a donc au final 225 députés élus à la proportionnelle et 198 (225-27) au scrutin majoritaire, ce qui fait un total de 423. La répartition actuelle du parlement ukrainien, la Rada, est la suivante :

 

 

Comme aucun parti n’a la majorité absolue, une coalition a été formée comprenant les partis suivants pour un total de 288 députés sur 423, soit 68 % du parlement :

 

Ceci laisse plus ou moins dans l’opposition les partis suivants :

 

A cela s’ajoute 96 députés “indépendants”.

 

à noter également que par rapport aux élections de 2014, trois faits nouveaux sont apparus :

 

• Le dernier sondage en date. Le dernier sondage date de juin-juillet  2015 (kiis.com.ua) : From June 27 to July 9 of 2015 Kyiv International Institute of  Sociology (KIIS) has conducted a nationwide opinion poll. 2044  respondents above 18 years old, who live in 110 settlements all over  Ukraine (except Crimea)”.

 

Les résultats sont les suivants :

 

Si on recalcule les pourcentages en excluant les personnes n’ayant pas exprimé l’intention de voter pour un parti, on obtient (en gras, les partis ayant plus de 5% d’intention de vote) :

 

Les principaux enseignements sont que par rapport aux élections législatives de 2014 :

 

• Tensions politiques internes intenses. Le président de la fraction “Bloc Porochenko”, Youri Loutsenko, constate l’existence d’une profonde crise au sein de la coalition parlementaire : “La coalition se trouve actuellement dans un état de super-crise. On en est arrivé à ce que personne ne veut être le coordinateur de cette coalition”. Il attribue ce problème au populisme et au refus des politiciens de “se mouiller” en étant coordinateurs du conseil de la coalition  (pravda.com.ua).

Parubiy (Svoboda) a deposé le 20 juillet  une loi visant à aider, dans le cadre de la Garde Nationale, la formation et l’armement des volontaires dans tout le pays. Ce qui serait parfait pour aider Azov, Praviy Sektor/MLN et d’autres à se cacher sous le titre de garde nationale (pravda.com.ua). De son côté, le gouverneur de Transcarpathie récemment nommé, Moskal, accuse Pravy Sektor/MLN de kidnapping et de tortures (interpretermag.com).

Porochenko a mis Liashko (Parti Radical) à la porte d’une réunion du Conseil national des réformes (vz.ru). Auparavant Liashko avait accusé Porochenko de faire pression sur les députés pour obtenir leurs votes à la Rada sur certains projets en les menaçant d’arrestation (vz.ru). Du coup, le parti radical (celui de Liashko) exige la démission de Chokine, le procureur général d’Ukraine et prohe de Porochenko (vz.ru).

 

• Exercice pratique : L’élection partielle à Tchernigov. Cette élection est complétement délirante. Il s’agit de remplacer le député en place, Valery Kulich, qui est nommé au gouvernerat de la région. pas moins de 127 candidats se sont inscrits pour cette élection (news.pn) ! Tout ceci est destiné à disperser les voix des électeurs car le vrai enjeu est entre un lieutenant d’Igor Kolomoysky, Gennady Korban (wikipedia), et un proche de Porochenko, Sergey Berezenko (odessatalk.com).

L’ambiance sur place est “très tendue” même pour l’Ukraine. La semaine dernière nous faisions état d’un accrochage en direct entre Saakashvili et un autre lieutenant de Kolomoiski, Boris Filatov. Saakachvilii était venu soutenir un candidat  pour ces élections partielles prévues le 26 juillet (gordonua, vzgliad.ru). Filatov a l’intention de déposer plainte contre Saakachvili suite à ces incidents (unian.net).

Avakov avait annoncé l’envoi de renforts pour surveiller le bon déroulement de ces élections (gordonua). Apparemment le temps presse. Le 21 juillet, on est passé de l’accrochage à la bastonnade d’un candidat à l’élection par deux députés du parti radical, Lozovoi et Mosiychuk (parti de Liashko). A l’arrivée : une dent cassée et une commotion cérébrale (korrespondent.net, youtube). Du coup, c’est de bonne guerre, Gerashchenko s’étend sur sa page Facebook sur l’immunité parlementaire et  la responsabilité pénale de Lozovoi (facebook).

 

21 juillet 2015 : Люди Ляшка б’ють Дурнєва (Les partisans de Liashko ont battu Durneva) (youtube)

 

Le député de la faction présidentielle, Sergueï Leshchenko, pense que la campagne actuelle de cette élection est honteuse (radiosvoboda.org). il y aurait des achats de votes, Kolomoiski et Saakashvili seraient tous les deux dans le coup (bbc.com, hromadske.tv).

 

20 juillet 2015 : Вибори в Чернігові. Спецвипуск програми Дорогі депутати   (youtube)

 

Vendredi 24 juin, 2000 policiers sont envoyés à Tchernigov pour surveiller ces élections (vesti-ukr.com) ! Pour Porochenko, la campagne électorale à Tchernigov (circonscription 205) est “une honte” pour l’Ukraine. Il a appelé Avakov à maintenir l’ordre dimanche, lors du scrutin (gordonua).

 

Au final, dimanche, la participation a été de 35,32% seulement, même si elle est “plus élevée que prévue” (gordonua, unian.net). La commission électorale centrale (Ts.I.K) donne Berenzenko (Bloc Petro Porochenko) gagnant avec 35,86 % des votes, contre 14,78% pour Korban (Oukrop), après le dépouillement de 99 % des bulletins (gordonua), ce qui contredit trois des quatre sociétés de sondage ayant réalisé des exit polls qui donnaient Korban gagnant à l’élection, une seule mettant Berezenko en tête (unian.net). Il y a eu des bagarres dans deux bureaux de vote (vesti-ukr.com).

 

 

FOCUS SUR L’UKRAINE ET SES VOISINS PLUS OU MOINS LOINTAINS

• OCS. Analyse de De Defensa sur l’extension de OCS (dedefensa.org).

 

• Turquie. Selon Regnum, l’Ukraine et la Turquie projetteraient de déstabiliser la situation en Crimée (regnum.ru). En fin de semaine, a Turquie autorise les Etats-Unis à utiliser l’une de ses bases aériennes pour lutter contre l’Etat islamique en Syrie (unian.net) et bombarde elle-même des positions de DAESH et du PPK (kurdes). Les frappes de l’armée turques sur les positions kurdes en Irak divisent les Occidentaux (vz.ru). L’UE appelle la Turquie au calme vis à vis des Kurdes, les Etats Unis soutiennent Ankara (unian.net). La Turquie demande une réunion extraordinaire du Conseil atlantique (vzgliad.ru).

 

• Israël. L’Ukraine et Israël veulent accélérer la signature d’un accord sur une zone de libre-échange entre les deux pays (sputniknews). Porochenko a d’ailleurs parlé à Netanyahu le 23 juillet sur ce sujet entre autre (president.gov.ua)

 

23 juillet 2015 : Communiqué officiel de la présidence d’Ukraine (president.gov.ua)

 President had a telephone conversation with Prime Minister of Israel
President Petro Poroshenko had a telephone conversation with Israeli Prime Minister Benjamin Netanyahu.
Petro  Poroshenko thanked Israeli doctors for their assistance to Captain of  Police Department Nadia Andrukhiv who was injured in explosions near the  police precincts in Lviv. She is treated in Israel upon the initiative  of the President and thanks to his support.
The Israeli Prime Minister promised to do everything to help the officer injured as a result of the terrorist attack in Lviv.
The  President of Ukraine also raised the issue of ensuring crossing the  Israeli border for Ukrainian tourists. The Israeli Prime Minister has  promised to take all measures to make it possible for Ukrainians to  travel freely across his country.
Petro Poroshenko and Benjamin  Netanyahu also discussed the Free Trade Zone Agreement between Ukraine  and Israel and agreed to speed up the preparation process.
The  President and the Prime Minister also said that they would like to  arrange the meeting of the Ukrainian-Israeli Intergovernmental  Commission on Economic Cooperation as soon as possible. Petro Poroshenko  and Benjamin Netanyahu agreed to maintain close political cooperation.

 

• Géorgie. Donald Tusk, le président du conseil de l’Europe, très anti-russe, donne une conférence de presse en Géorgie (tvnewsroom part-1, tvnewsroom part-2 et tvnewsroom part-3).

 

• Arabie Saoudite. Ramzan Kadyrov, le leader tchétchène pro russe, joue depuis longtemps le rôle quasi officiel d’ambassadeur de la Russie auprès du monde musulman. Il a fait le hadj (le pèlerinage à La Mecque) avec le président (ou le premier ministre) de Malaisie et le roi de Jordanie est son “frère”. Mais jusque là, étant donné sa lutte féroce contre les jihadiste du Caucase, il était plutôt en froid avec l’Arabie Saoudite et le Qatar, grands argentiers des dits jihadistes. Les choses changent ! Le roi d’Arabie Saoudite a ouvert pour lui les portes de la Kaaba (sputniknews) ! Dixit Sputnik news : “Le point culminant de cette visite fut l’ouverture extraordinaire des  portes de la Kaaba pour la mère du dirigeant tchétchène, Aïmani  Kadyrova. Il s’agit d’un geste très rare dans le monde musulman, qui  témoigne de la haute estime portée par le roi d’Arabie Saoudite à Ramzan  Kadyrov et à sa famille. L’ouverture de ce sanctuaire pourrait être  considérée comme une invitation au renforcement des relations entre la  Russie et le monde islamique, où Ramzan Kadyrov joue le rôle de  médiateur et d’homme de confiance du président russe.”

 

• Kyrgyzstan. Les USA sont “déçus” de la rupture de leur accord de coopération avec le Kyrgyzstan (sputniknews, russia-insider). Le président du Kirghizstan Almazbek Atambaïev a déclaré que la décision du State Department US de donner le prix des droits de l’homme à l’activiste Azimjan Askarov témoigne de la volonté des Etats-Unis d’organiser un “chaos dirigé” dans son pays. Il a soutenu la décision du gouvernement de dénoncer l’accord conclu avec les Etats-Unis en 1993 (vz.ru).
• Daghestan. Au Daghestan, Les mères de la ville de Derbent (wikipedia) exigent des autorités la fermeture d’une mosquée salafiste (eadaily.com).

 

• Pologne. Depuis un an, le pouvoir polonais a été un soutien indéfectible du pouvoir ukrainien. Qui plus est, son ex-premier-ministre Donald Tusk, profondément anti-russe, est actuellement président du Conseil européen. Mais qu’en pense le peuple ? Un sondage Ipsos, cité par Radio Polsha (radiopolsha.pl) révèle que si 55% des Polonais estiment que les “Arabes” représentent un danger pour leur pays, 35% pensent la même chose à l’égard de leurs voisins ukrainiens. La sympathie des Polonais va surtout aux pays d’Europe de l’ouest (63%) ainsi qu’aux Etats-Unis et au Canada (62%).

La défiance des Polonais envers les migrants ukrainiens est donc visible chez un tiers des habitants. Toute l’actualité depuis un an en matière de corruption, de trafics et de contrebande en tous genres y est certainement pour quelque chose. La Pologne est, parmi les anciens satellites de l’ex-URSS, le pays qui s’en sort le mieux sur le plan économique, les Polonais n’ont certainement aucune envie de voir des migrants ukrainiens importer dans leur pays leurs mauvaises habitudes de magouilleurs et saper une prospérité encore fragile (le problème des migrants est à rapprocher du paragraphe de jeudi 23 sur le régime sans visa).

De plus, un film est en cours de fin de tournage dans le pays sur les massacres de Volhynie (1943-1944) (colonelcassad, fortruss), ce qui ne va pas améliorer les relations avec le pouvoir en place à Kiev qui glorifie ses combattants nazis (russia-insider). Un film avait déjà été réalisé sur Katyn (wikipedia), le massacre des officiers polonais par les russes en 1940 dans une forêt de Biélorussie (wikipedia). Les polonais s’attaquent avec ce nouveau film à un massacre d’une toute autre ampleur. A Katyn les russes ont tué des milliers d’officiers par balles. En Volhynie, les troupes ukrainiennes nazies ont exterminé près de 100000 personnes du bébé au vieilllard avec une rare barbarie : personnes clouées sur les portes ou découpées en morceaux à la scie, mutilations, tortures, … Si vous avez le coeur bien accroché, vous pouvez aller voir ce site qui recense certaines photos des événements (uglich-jj.livejournal.com).

 

 

Autre info sur la Pologne,  John A.Heffern, l’adjoint aux affaires européennes au département d’état indique que le sommet de l’OTAN de juillet 2016 à Varsovie ne prendra pas la décision d’installer des bases permanentes de l’OTAN en Pologne et ce malgré l’insistance des diplomates polonais (fortruss).

 

• Carte comparée des conflits 2010 et 2015.

 

 

 

FOCUS SUR LES EXERCICES MILITAIRES DE L’OTAN ET LA MOBILISATION GENERALE EN TRANSNISTRIE

• Rapid Trident. Les USA, l’OTAN et l’Ukraine débutent les exercices “Rapid Trident” (eur.army.mil) au sein du polygone militaire de Yavoriv, à la frontière ouest de l’Ukraine (army.mil), là où 300 parachutistes américains entraînent déjà depuis avril des unités ukrainiennes dans le cadre de la mission “Fearless Guardian”. Présentés comme d’une “ampleur sans précédent” (lexpress.fr), ces exercices se dérouleront du 20 au 31 juillet 2015 et rassemblent des soldats de 18 nations. Dis comme cela, c’est impressionnant. Le nombre de soldats y participant l’est moins : 1800 en tout, y compris les américains, les polonais et les ukrainiens… Cela fait une moyenne de 100 soldats par pays… Par exemple, ;…. Pour l’instant c’est plus folklorique que militaire (dailymail.co.uk)…

 

Présentation officielle de Rapid Trident par l’armée américaine (eur.army.mil)

 WHAT IS RAPID TRIDENT?
Rapid Trident is a regional command post exercise and  field training exercise focused on peacekeeping and stability operations  to ensure a safe and secure environment within the operating  environment. The exercise is being held at the International  Peacekeeping and Security Center (IPSC) in Yavoriv, Ukraine. The  exercise will be conducted July 20-31, 2015. 
Saber Guardian/Rapid Trident supports interoperability among Ukraine,  the U.S., NATO and Partnership for Peace member nations. This year, 18  countries are taking part in the exercise with participation of  approximately 1,800 personnel. 
In preparation for the field training exercise, training audiences will  undergo one week of situational training exercises that focus on  exercise key tasks such as countering improvised explosive devices,  convoy operations and patrolling. The exercise will feature a combined,  internationally staffed battalion focused on peacekeeping and stability  operations. 
Participating nations’ forces include Ukraine, Azerbaijan, Bulgaria,  Canada, Estonia, Georgia, Germany, Great Britain, Latvia, Lithuania,  Moldova, Norway, Poland, Romania, Spain, Sweden, Turkey and the U.S. The  Rapid Trident exercise comes at the explicit request of the Ukrainian  government and military.

 

20 juillet 2015 : Rapid Trident 2015 Opening Ceremony (youtube)

 

20 juillet 2015 : Manoeuvres militaires sans précédent dans l’Ouest de l’Ukraine (lexpress.fr, dailymotion)

Cliquer sur l’image pour voir la video :

 

 

Tout ceci fait finalement assez rire les russes (sputniknews), d’autant que quelques jours plus tard, un exercice militaire conjoint USA Estonie d’héliportage et de parachutage est annulé… à cause de la pluie et du vent (fortruss) ! Pragmatiquement parlant, ce n’est pas illogique s’il s’agit d’une formation, mais l’impact médiatique de cette annulation est négatif pour les USA.

Dans les jours précédents ces exercices “sans précédent”, les russes ont organisé des exercices “routiniers” avec environ 2000 parachutistes et leur matériel d’un côté (sputniknews) et 900 opérateurs de blindés de l’autre (sputniknews).  De plus, en fin de semaine, la Russie accueille l’édition 2015 des épreuves de biathlon en char de combat. 13 nations participent. Les chinois ont amené leur “matériel” (rt.com) !

Question : comment l’OTAN qui renacle à s’exercer sous la pluie peut-elle espérer entrer en compétition avec un pays pour qui le char de combat est un sport ?…

 

 

Avec un prime un bijou d’humour involontaire de l’OTAN : “l’OTAN n’acceptera jamais les efforts de la Russie pour créer des sphères d’influence le long de ses frontières” (twitter au 20 juillet)

 

Oana Lungescu ‏@NATOpress  16h16 hours ago
SG: #NATO supports #Ukraine, #Georgia, #Moldova and “will never accept” #Russia’s efforts to create “spheres of influence along its borders”

 

 

• Joint Effort 2015. Parallélement, du 19 au 25 juillet ont lieu des exercices militaires “Joint Effort 2015″ en Moldavie avec environ 800 militaires de Moldavie, USA, Roumanie, Pologne et Georgie dans une base militaire de la seconde ville de Moldavie, Balti. Il s’agit, là aussi, des exercices “parmi les plus importants” jamais organisés en Moldavie et un “test d’interopérabilité des forces armées des pays concernés” comme pour Rapid Trident. Rappelons que ce n’est pas la première fois que des exercices ont lieu en Moldavie et que la Moldavie fait partie du “Programme de partenariat pour la Paix” de l’OTAN (abcnews.go.com). Cependant, cela arrive la même semaine que l’annonce de la création par la Roumanie et la Moldavie d’un “bataillon conjoint de maintien de la paix” (actmedia.eu). C’est le rapprochement entre la Moldavie et la Roumanie dans les années 90 qui avait déclenché les deux guerres civiles en Transnistrie.

 

 

Du coup, voyant la menace se préciser de nouveau, la République de Transnistrie déclare la mobilisation générale des hommes de 18 à 27 ans (sputniknews). L’ordre a été publié sur le site du président de cette république (president.gospmr.ru) La Pravda ukrainienne affirme évidemment que cela s’est fait “sur ordre de la Russie” (pravda.com.ua). Rappelons que la Transnistrie est un pays à peine large au mieux de 20 kilomètres et que sa meilleure défense est d’anticiper une éventuelle aggression, d’où la mobilisation.

 


De plus, près de 7000 militaires ukrainiens sont concentrés près des frontières de la Transnistrie (vz.ru) et Praviy Sektor / Mouvement de Libération Nationale a établi des checkpoints à la frontière (novorossia.today)

 

Du coup, les Russes sont moins “amusés”…

 

 

FOCUS SUR LES VOYAGES PARALLÈLES DU PARLEMENT DE L’UE A KIEV ET DES PARLEMENTAIRES FRANÇAIS EN CRIMÉE

• Le Parlement Européen en Ukraine : “business as usual”. Schulz l’avait annoncé la semaine dernière. Une délégation du Parlement Européen est donc en Ukraine cette semaine.

EXTRAIT DE L’ACTU’UKRAINE DE LA SEMAINE DERNIÈRE (les-crises.fr)

• Délégation du Parlement Européen à Kiev. Une délégation du PE conduite par Elmar Brok, président de la commission des Affaires étrangères et Andreï Plenkovic, président de la Délégation du PE pour les relations avec l’Ukraine, se rendra à Kiev du 23 au 25 juillet pour une visite au cours de laquelle elle rencontrera Porochenko, Yatseniouk et Groitsman. Des rencontres sont aussi prévues avec la mission spéciale d’observation de l’OSCE et avec des organisations de la société civile (lb.ua).

Le quotidien Leviy Bereg rappelle que le président du Parlement européen Martin Schulz  a conclu le 3 juillet dernier à Kiev avec le président de la Rada Groisman un accord pour renforcer la coopération des deux institutions (lb.ua). Martin Schulz avait annoncé devant la Rada que le PE pourrait envoyer des observateurs pour les élections locales et régionales (lb.ua). Il avait été aussi annoncé le 3 juillet dernier que le PE enverrait à Kiev une mission présidée par son ancien Président du PE Pat Cox, lequel avait participé aux négociations concernant la libération de Timochenko, pour examiner les moyens d’améliorer le fonctionnement de la Rada (lb.ua).

Rien de bien nouveau. Des discussions habituelles. Des assurances du soutien de l’UE (president.gov.ua).  Le Vice-président du PE Czarnecki prévient à cette occasion Porochenko de la constitution d’un lobby pro-russe au sein de l’UE, notamment après les événements en Transcarpathie (vzgliad.ru). Elmar Brok, président de la commission des Affaires étrangères du PE, déclare pour sa part que “la Russie doit comprendre l’inéluctabilité des sanctions pour les crimes de guerre et la violation du droit international” (unian.net) et que “l’UE  ne peut pas faire la guerre à la Russie à cause de l’Ukraine, qui n’est d’ailleurs pas membre de l’OTAN. Nous devons agir par les sanctions.” (gordonua)

 

 

22 juillet 2015 : Communiqué officiel de la présidence de l’Ukraine (president.gov.ua)

 President Petro Poroshenko and Vice President of the  European Parliament Richard Charnetsky discussed support provided by  the EU and Poland to Ukraine                                  
The President of Ukraine met with the Vice President of the European Parliament.
Petro  Poroshenko thanked Richard Charnetsky for his personal support of  Ukraine on its path towards reforms and fight against the Russian  aggression. The Head of State stressed the importance of ensuring  cooperation between Europe with Ukraine and Richard Charnetsky’s  contribution to the adoption of the European Parliament’s Resolutions,  and in particular those related to the annexation of the Crimea,  aggression in the East, and requirements to release Nadia Savchenko from  the Russian prison. “Establishment of the first ever European  Parliament office in Kyiv is evidence of your sincere support of Ukraine  and mutual respect,” the Head of State said.
The President also  expressed hope that after the presidential elections in Poland, Richard  Charnetsky’s experience would help further improve relations between the  two countries, strengthen the position of Poland as an advocate for  Ukraine’s European integration for Ukraine, and in particular the  visa-free regime for Ukraine.
Richard Charnetsky confirms that the  European Parliament is ready to support Ukraine in introduction of the  visa-free regime between Ukraine and the EU in 2016, which will be a  strong driving force for the country’s development and reformation.
The  President of Ukraine and the Vice President of the European Parliament  discussed the situation in the Donbas and the Minsk agreements  implementation. Richard Charnetsky praised Ukraine’s efforts in  promoting the implementation of the peace plan, including the  constitutional reform.
Richard Charnetsky emphasized that Western  countries place confidence in President Petro Poroshenko. “You are the  most earnest partner when it comes to relationships between the West,  Ukraine, and Poland,” he said.
The Vice President of the European  Parliament said that the recent situation in Mukacheve has caused great  harm to the image of Ukraine as the Russian PR used it against Ukraine.  He emphasised the increased efforts of pro-Russian lobby in the European  Union.

 

• Des parlementaires français en Crimée : la rupture du consensus diplomatique européen anti-russe. Cette visite somme toute banale du Parlement Européen est totalement occultée par l’initiative d’une dizaine de parlementaires français menés par le député Thierry Mariani (les républicains ex UMP), vice-président du Groupe d’amitié  France-Russie de l’Assemblée nationale (itele.fr, lemonde.fr, unian.info). Parmi les parlementaires, on compte une majorité issue du parti Les Républicains (ex UMP) : Nicolas Dhuicq, Jacques Myard, Claude Goasguen, Patrice Verchère, Sauveur Gandolfi-Scheit  et Marie-Christine Dalloz, un UDI : Yves Pozzo di Borgo (vice-président de la Commission des affaires étrangères et de la  défense du Sénat) et un Radical : Jérôme Lambert.

 

 

Donc cette délégation passe par Moscou mercredi 22 juillet puis visite la Crimée et spécifiquement les villes de Yalta, Simferopol et Sébastopol le jeudi 23 juillet. Les français ont rencontré sur place les représentants des autorités locales (rt.com). Mariani donne des interviews à Sputnik News (sputniknews), Kommersant (kommersant.ru) et Regnum (regnum.ru).  Pozzo de Borgo est interviewé par Regnum (regnum.ru).

 

22 juillet 2015 : Interview de Thierry Mariani à Sputnik News (sputniknews)

 

23 juillet 2015 : Russia: “Crimea is now an integral part of Russia” says French MP Mariani   (youtube)

 

24 juillet 2015 : Russia: Crimea’s reunification was ‘logical’ development – French MP Mariani (youtube)

 

Petit interlude franco-français, Goasgen indique que Sarkozy a approuvé la visite des parlementaires français en Crimée (vz.ru). Oukraïnskaya Pravda réagit aussitôt pour s’étrangler de rage : “Sarkozy a approuvé le voyage scandaleux des députés français en Crimée occupée” (pravda.com.ua). Claude Goasguen a également déclaré à l’agence TASS que “Sarkozy avait montré beaucoup d’enthousiasme par rapport à ce voyage” et ajouté que Nicolas Sarkozy pourrait même se rendre lui-même en Crimée : “Он может, может. Пока точных планов нет, но это вполне возможно”, – сообщил Клод Гоасген.” (Il peut le faire. Pour l’instant, il n’y a pas de plans précis, mais c’est tout-à-fait possible”, a déclaré Goasguen).

 

Selon Sputnik News, les parlementaires français sont “surpris” par le niveau de bonheur en Crimée : “We saw happy people here who live in Crimea and have returned  to Russia. We talked to young people. It’s a very different picture  from what is shown in our countries. I saw such a warm welcome here. We  had a completely different idea about Crimea [before the visit]” (sputniknews.). Pour Mariani, les Criméens dans leur ensemble sont heureux d’être de nouveau russes (rt.com, lesechos.fr).

 

 

La presse russe se fait l’écho de cette visite en reprenant des propos de Thierry Mariani, par exemple sur le fait qu’il ne voit pas de raison de prolonger les sanctions contre la Russie (vz.ru, rt.com, eurointegration.com.ua). Voir par ailleurs la déclaration de Youri Loutsenko à ce propos dans le premier focus de cette semaine. VzGliad voit dans la visite des parlementaires français en Crimée “un signal pour toute l’Europe” (vz.ru).

Histoire que les choses soient claires et de calmer le jeu (c’est une boutade), le Sénateur Yves Pozzo di Borgo va même jusqu’à s’afficher avec un tee-shirt de l’effigie de Poutine et dénigrant Obama (rt.com) !

 

 

Même si Mariani précise que ce voyage ne représente pas la position du gouvernement français (fr.rbth.com), cela n’empêche pas une tempête médiatique de protestation de s’abattre sur lui et ses collégues avec un automatisme quasi pavlovien.

 

Le ministre des affaires étrangères français, Fabius, est “choqué” (franceinfo.fr) et voit même dans cette visite une “violation du droit international” (sputniknews). Pour Elisabeth Guigou, présidente de la Commission des Affaires Etrangères à l’Assemblée Nationale, c’est “une initiative choquante et une équipée ridicule” (itele.fr, lepoint.fr). Le Parisien titre que Mariani “défend l’annexion de la Crimée” (leparisien.fr) ainsi que Boursorama  (boursorama). Plus nuancée dans le titre, RFI parle d’une “visite très critiquée” (rfi.fr).

Elmar Brok, Président de la commission des Affaires étrangères du Parlement européen, qualifie la visite de la délégation parlementaire française en Crimée de “grosse erreur” (unian.net). Le New York Times titre : “French Lawmakers Visit Crimea, to the Dismay of Officials Back Home” (nytimes). la BBC rappelle que cette visite est condamnée par la France et l’Ukraine (bbc.com). Pour la Lettonie, c’est une “honte pour l’Europe (lepoint.fr).

En Ukraine, Euromaidan donne justement la liste des parlementaires français concernés comme s’il s’agissait d’un couloir de la honte (euromaidanpress.com/) et dans un autre article titre que “la visite de Mariani en Crimée est une honte pour la France” (euromaidanpress.com). Le média ukrainien “Eurointegration” voit rouge, pour lui “Des députés français faisant partie des “amis de Poutine” se rassemblent en Crimée annexée” (eurointegration.com.ua). Novayagazeta dénigre l’initiative française et se demande “pourquoi les français sont-ils allés en Crimée ?” (novayagazeta.ru).

Kiev qualifie ce voyage de  “marque d’irrespect envers la souveraineté nationale de l’Ukraine” et de  “violation délibérée de la législation ukrainienne” (sputniknews). Kiyv Post titre “French lawmakers’ visit to Crimea outrages Ukrainian, French officials” (kyivpost). Pour UNIAN, les français visitent la Crimée “occupée” (unian.info) et le Parlement Européen condamne cette visite (unian.info).

Kiev affirme que la délégation de parlementaires français en Crimée ne restera pas sans conséquences (vz.ru) et de fait, les parlementaires français sont interdits de séjour en Ukraine (sputniknews)…

 

Hanna Hopko (parti Samopomich et présidente de la commission des Affaires étrangères de la Rada), en situation délicate après son refus de voter la loi de décentralisation (voir la semaine dernière) donne des gages à Porochenko pour conserver son poste et attaque violemment, voire outrancièrement, l’initiative des députés français via son Facebook (facebook.com)

 

DÉCLARATION 
La Verkhovna Rada d’Ukraine des affaires étrangères sur la décision des députés de l’Assemblée nationale de la France de visiter le territoire occupé temporairement de la République autonome de Crimée
Nous, les membres de la Verkhovna Rada d’Ukraine des affaires étrangères, surpris et indignés par l’intention des députés de l’Assemblée nationale française de visiter la Crimée. (La Crimée) est une partie intégrante du territoire de l’Ukraine, traîtreusement occupé et annexé par la Fédération de Russie avec l’utilisation de ses forces armées et les agences de renseignement en violation des principes fondamentaux du droit international et des accords bilatéraux, y compris le traité de 1997 entre l’Ukraine et la Fédération de Russie, le Mémorandum de Budapest de 1994, les documents fondamentaux de l’Organisation des Nations Unies, de l’ OSCE et d’autres organisations internationales. En effectuant ce crime international, la Russie a violé les principes de base du gouvernement mondial et européen, a détruit l’équilibre des forces dans la région et a provoqué la plus importante crise depuis la crise de la sécurité de la Seconde Guerre mondiale en Europe.
Les actions des députés de l’Assemblée nationale de la France sont un défi direct à la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Le territoire de la République autonome de Crimée a été, est et fera partie de l’Ukraine. Tenir l‘autonomie du territoire sous la pointe du fusil du soi-disant « référendum »,  ne change rien à cette situation, et c’est la conviction des citoyens de l’Ukraine et des membres choisis de la Verkhovna Rada. il est particulièrement regrettable que cette initiative de députés d‘un pays ayant été dans le passé annexé par la force des armes (ait) ainsi trahi la mémoire  de nombreuses générations de français, qui ont défendu l’indépendance et la souveraineté de leur pays. Nous condamnons cette décision, prise par un groupe de députés de l’Assemblée nationale de la République Française, quelles que soient les explications qui puissent être données. Cette décision a démontrée le manque de respect pour la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine, son peuple et le droit international.
 Pour: Claude BARTELONE, président de l’Assemblée nationale de la République française
Élisabeth Guigou,  présidente de la Commission Aux Affaires étrangères de l’Assemblée nationale de la République française
Remy POVROSU, président du Groupe d’Amitié Ukraine – France Assemblée nationale de la République de la France

 

 

Bref, des réactions disproportionnées par rapport à l’événement. Ce qui donne l’analyse de De Defensa suivante : “Une brèche dans la formidable muraille antirusse du Système” (dedefensa.org). A suivre…

 

 

FOCUS SUR  LE MONDE MERVEILLEUX DE SAAKASHVILI

• Bras-de-fer à Odessa entre Saakashvili et un ex-député, Vassili Khmelnitski. Dans la ligne des décisions prises par Saakashvili de rendre au public odessite certaines plages privatisées ou réservées aux membres de la police et d’organismes gouvernementaux, le nouveau gouverneur avait fait abattre lundi un mur en béton bordant la propriété d’un ex-député de la Rada, Vassili Khmelnitski (kyivpost). On le voit se fâchant sur une vidéo et vilipendant les “milliardaires” qui s’approprient l’espace public (youtube)…

 

20 juillet 2015 : Открытие пляжа, захваченного киевским миллиардером, бывшим депутатом Хмельницким  (youtube)

 

Mais le personnage en question ne s’est pas laissé faire, et dès jeudi, des ouvriers ont posé une clôture de grillage à l’emplacement du mur abattu, rétrécissant à nouveau le passage  Le mur ayant été abattu, les vacanciers auront désormais une vue imprenable sur la demeure du très riche ex-député de Kiev, et pourront admirer l’architecture de sa datcha (ridus.ru).

 

 

• Le ratage “Gaidar”. Maria Gaidar a raté son examen de passage de nationalisme ukrainien en refusant de nommer la Russie comme étant en guerre contre l’Ukraine. Du coup elle n’a pas bonne presse (sputniknews, russia-insider.com) et doit “rattraper le coup” d’autant qu’elle n’est pas, pour l’instant, officiellement nommée (unian.net). Le 19 juillet, elle donne une interview en anglais à la chaîne controversée Hromadske (hromadske.tv, youtube de 28min30 jusqu’à 45min) et le 20 sur 112 (112.ua).

 

Elle annonce donc être prête à renoncer à sa nationalité russe (une “tragédie” pour elle la semaine dernière) et arrêter ses démarches pour acquérir la nationalité israélienne (dnr-news). De plus, elle déclare que la Russie a attaqué la Georgie en 2008, qu’il est un “fait” que la Russie fait la guerre à l’Ukraine et qu’elle estime la réunion de la Crimée et de la Russie illégale (vz.ru).

 

• Opposition Porochenko Saakashvili Kolomoïski. Les observateurs voient de plus en plus se dessiner une concurrence et une opposition entre Porochenko et Saakachvili. Porochenko a organisé hier une rencontre de tous les gouverneurs d’Ukraine à Odessa à laquelle il a assisté. Les autres gouverneurs ont été assez critiques vis à vis de Saakashvili (vesti-ukr.com). Saakashvili lui claironne qu’il fait des réformes à Odessa beaucoup plus vite que Porochenko à Kiev (atlanticcouncil.org). Ambiance.

Selon VzGliad, Saakachvili aide Porochenko à se débarrasser des gens de Kolomoiski. Korban serait la prochaine cible à Tchernigov et au delà c’est sans doute Filatov qui est visé (vz.ru). “Svobodnaïa Pressa” fait une analyse au ton très enlevé sur la situation de ces trois acteurs (svpressa.ru).

 

En bonus, l’émision de 1+1 du 19 juillet dans laquelle Saakasvili accusait Kolomoïski (youtube.com)

 

19 juillet 2015 : Интервью Михаила Саакашвили телеканалу 1+1  (youtube)

 

• Purges odessites. Saakashvili appelle a virer ex abrupto le chef du port maritine commercial d’Ilitchevsk, Yuri Kruk (censor.net.ua, capital.ua) et se rend en personne sur place pour annoncer lui-même son limogeage à l’intéressé (gordonua). Saakashvili donne comme explication l’existence de “sociétés indélicates basées en Amérique Centrale (Bélize)” (facebook). Depuis sa nomination, Saakachvili a géorgisé l’exécutif de la région et pratiquement divisé par deux le nombre de ses employés (unian.net). Pour la première fois l’ancien gouverneur de la région d’Odessa Igor Palitsa commente sur sa page Facebook la nomination de Saakachvili pour le remplacer. Il ne l’avait rencontré que deux fois, en mai 2014 et en mai 2015. Palitsa est particulièrement remonté par un article du service de presse de Saakachvili selon lequel celui-ci est venu “nettoyer les écuries d’Augias” laissées par Palitsa (unian.net).

 

• Implication de plus en plus grande des USA à Odessa. Saakashvili, Chef de l’Administration d’Etat régional d’Odessa et l’Assistant Secretary, Bureau of International Narcotics and Law Enforcement Affairs, Bill Brownfield (state.gov, wikipedia) ont signé un accord pour une coopération renforcée (kyivpost, facebook). Les États-Unis aideront la région d’Odessa dans la réforme des douanes, des services administratifs et dans la prestation de services juridiques gratuits bénévoles. Bill Brownfield, a déclaré lors d’une conférence de presse que Washington soutient pleinement la politique anti-corruption à Odessa.

En prime; le FBI va être chargé d’entraîner la police d’Odessa (pravda.com.ua) .

 

 

 

FOCUS SUR QUELQUES ROUAGES DE L’UE EN UKRAINE

• L’EUAM. EUAM (European Union Advisory Mission) est l’équipe de conseillers de l’UE en Ukraine pour tout ce qui est police, garde frontière, garde nationale, service de sécurité et pénitencier ainsi que les institutions juridiques (euam-ukraine.eu). Cette équipe est donc directement concernée par la réorganisation de la police de la route en cours.

 

 

 

Le site internet est, de manière amusante, basé aux USA, ca montre bien l’indépendance européenne en matiere d’informatique (http://ns.myip.ms/info/whois/192.241.88.232/k/512797244/website/www.euam-ukraine.eu). Pour se faire plaisir on remarquera qu’à l’adresse IP est 192.241.88.232 il y a deux autres sites  : convert.ge et dieta.ge. L’extension “ge” c’est la Georgie…

Au niveau du compte tweeter, il est toujours intéressant à suivre l’historique des abonnements (hyper pas ue) (twitter) :

 

1) foreign Policy
2) Kyiv Post
3) Christopher Miller Magazine Mashable
4) Avakov Miistere de l’Interieur
5) Simon Ostrovsky magazine Vice News
8) Hillary Clinton
9) Yatsenyuk
10) porochenko
13) Lesya Orobets
14) Svyatoslav Vakarchuk
17) Shaun Walker –> Journal Guardian
 
21) Klytchko
22) Leshchenko
25) Dmitry Timchuk
26) Hromadaske
27) Tetiana Danylenko
28) Pyatt ambassadeur US
29) Pavel Sheremet
 
31) Bill Clinton
32) Andriy Shevchenko
34) Nayyem
35) Vitaly Portnikov
 
36) Euromaidan

 

• Yes-Ukraine. Yes Ukraine est une création de l’oligarque ukrainien Victor Pinchuk. La Yalta European Strategy (YES) is dixit le site officiel “the leading public diplomacy  platform in Eastern Europe to develop strategies for Ukraine and Wider  Europe and promote Ukraine’s European integration” (yes-ukraine.org). YES a été créée en 2004 et est présidée par l’ex président polonais Aleksander Kwasniewski (wikipedia). La prochaine réunion de YES aura lieu les 10 et 12 septembre 2015.

 

 

 

 

FOCUS SUR LES TEMOIGNAGES DE CEUX QUI VIVENT LES EVENEMENTS

• Interview d’un français en Novorussie. Il s’agit d’Erwan Castel qui tient le blog gaideclin.blogspot.fr. Il est interviewé via Skype par Meta TV. l’interview date du 8 juillet et est relayée par le blog d’Erwann Castel le 22 juillet  (gaideclin).

 

8 juillet 2015 : Les vraies raisons de la guerre en Ukraine – Erwan Castel et Alain Benajam – Meta TV (dailymotion, dailymotion et dailymotion)

 

 

• Un Ukrainien au Donbass. Arthur Senko est un blogueur ukrainien, originaire de Vinnitsa, en  Ukraine centrale.  En juin dernier, il décide de se rendre à Donetsk pour  voir de ses propres yeux ce qui s’y passe, pour rencontrer les  habitants et discuter avec eux, avoir leurs opinions sur le conflit en  cours et le devenir de l’Ukraine et du Donbass. (youtube, facebook, vk.com).

 

18 juillet 2015 : Un ukrainien à Donetsk #1. Première impression. [sous-titres français]   (youtube)

 

18 juillet 2015 : Un ukrainien à Donetsk #2. Réactions à la langue ukrainienne [sous-titres français]  (youtube)

 

19 juillet 2015 : Un ukrainien à Donetsk #3: un lieu inattendu [sous-titres français]  (youtube)

 

19 juillet 2015 : Un Ukrainien à Donetsk #4: Comment voyez-vous cette guerre ? [sous-titres français] (youtube)

 

20 juillet 2015 : Un ukrainien à Donetsk #5. Comment mettre fin à cette guerre ? (youtube)

 

20 juillet 2015 : Un ukrainien à Donetsk#6 : Y a-t-il une chance que le Donbass reste en Ukraine ?  (youtube)

 

• Projet documentaire “Le Donbass sous le feu” : Episode 10 : “Invictus”. Maxim Fadeïev est journaliste dans le réseau d’agences indépendantes News Front, il a survécu au siège de Slaviansk et réside actuellement à Donetsk où il a créé le projet documentaire “Le Donbass sous le feu “. La dixième partie de ce projet est parue le 19 juillet et traduite en anglais le 22 (traduit par Kazzura youtub, source : youtube).

 

19 juillet 2015 : Фильм 10-й: «Непокоренный». Документальный проект NewsFront: «Донбасс. На линии огня» (“Invictus”, unbowed) (sous-titres anglais par Kazzura : youtube, source : youtube).

 

Les documentaires précédents :

 

10 mars 2015 : Le Donbass sous le feu (Part. 9) : Greetings from Gorlovka (sous-titres anglais par Kazzura : youtube, source : youtube)

Cliquer sur l’image pour voir la video :

 

27 février 2015 : Le Donbass sous le feu (Part. 8) : Sur les routes de la guerre (sous-titres anglais par Kazzura : youtube, source : youtube)

Cliquer sur l’image pour voir la video :

 

23 janvier 2015 : Le Donbass sous le feu (Part. 7) : La guerre, c’est la guerre (sous-titres anglais par Kazzura : youtube (18+), source : youtube)

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13 janvier 2015 : Le Donbass sous le feu (Part. 6) : Le Nouvel An 2015 (sous-titres anglais par Kazzura : youtube, source : youtube)

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26 décembre 2014 :  Le Donbass sous le feu (Part. 5) : Séparatistes (sous-titres anglais par Kazzura : youtube, source : youtube)

Cliquer sur l’image pour voir la video :

 

6 décembre 2014 : Le Donbass sous le feu (Part. 4) : Le Terminal (sous-titres anglais par Kazzura : youtube, source : youtube)

Cliquer sur l’image pour voir la video :

 

30 novembre 2014 : Le Donbass sous le feu (Part. 3) : «С любовью. Донецк» (Avec Amour. Donetsk) (source non sous-titrée : youtube)

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18 novembre 2014 : Le Donbass sous le feu (Part. 2) : Памяти воина «Волка» (Dans la mémoire du guerrier “loup”)  (source non sous-titrée : youtube)

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23 février 2015 : Le Donbass sous le feu (Part. 1) :  «Прифронтовой город»  (La ville de première ligne)  (source non sous-titrée : youtube)

Cliquer sur l’image pour voir la video :

 

• Anatoly Shary est à présent sous-titré en anglais. La plupart des vidéos du channel d’Anatoly Shary sont à présent sous-titrées en anglais avec une latence de 3 à 4 jours pour les nouvelles. Ceci permettra une plus grande diffusion de ces informations quasi-journalières  (fortruss, youtube) ! Quelques exemples…

 

17 février 2015 : Трейлер (bande-annonce) (youtube)

 

16 juillet 2015 : Переведи меня через блокпост (checkpoints ukrainiens) (youtube)

 

19 juillet 2015 : Донецк. После обстрела  (Donetsk, après le bombardement) (youtube)

 

 

SUITE DE LA SEMAINE PASSEE

• Quelques éléments sur la Transcarpathie. Une analyse de De Defensa sur les rapports entre Transcarpathie, Hongrie et Praviy Sektor (dedefensa.org) et une analyse de la “Revue Contemporaine” datant de juillet 1912 (gallica.bnf.fr). De façon connexe, on apprenait la semaine dernière que la Hongrie se méfiait fortement de l’ukraine et menait ouvertement des opérations d’espionnage en Ukraine, notamment en Transcarpathie. Le 20 juillet, le Ministre des Affaires Étrangères  d’Ukraine a convoqué l’ambassadeur hongrois pour “explications, qualifiant d’inacceptables les opérations des services secrets hongrois en Ukraine (korrespondent.net, mfa.gov.ua, zik.ua).

Etrangement, L’ambassadeur US se rend à Mukachevo le lundi 20 juillet pour “se rendre compte de la situation” (mukachevo.net, fortruss). Etrangement car Mulachevo est a priori un conflit local et interne à l’Ukraine dans lequel les USA n’ont rien à faire… D’ailleurs, l’ancien Premier Ministre ukrainien Nikolaï Azarov le note sur sa page FB : “la visite à Moukatchevo en Transcarpathie de l’ambassadeur US permet de déduire qui est le vrai maître en Ukraine” (vz.ru, facebook). Peut-être aussi que les tensions que l’on observe entre la population et la garde nationale font penser aux premières semaines du conflit dans le Donbass (fortruss)…

Pour la petite histoire, le député Lanio aurait finalement quitté l’Ukraine en traversant la frontière sud ouest (unian.net). En tous cas, c’est ce que le SBU déclare (pravda.com.ua). Et pour finir, une vision ukrainienne dépassionnée des événements de Transcarpathie (nv.ua).

 


• La nouvelle police des transports. Eka Zguladze annonce la suppression globale de l’ancien service (vesti-ukr) et indique que le déploiement de la nouvelle Police des Transports s’étend à présent à  la Transcarpathie (unian.net). Le recrutement/casting des futurs membres ont d’ailleurs commencé en fin de semaine à Oujgorod, Place du Peuple n° 4. Les candidats ont jusqu’au 11 août pour se présenter (glavnoe.ua).

 

• Poursuite des purges : Le SBU. Le SBU annonce avoir arrêté le 20 juillet certains de ses membres qui s’étaient livrés à des écoutes illégales des opposants lors de la “Révolution de la Dignité”, lire le “coup d’état du Maidan en 2014″ (sbu.gov.ua).  Comme d’habitude, des hommes ligotés à terre et des liasses de gros billets (ici des 500 UAH)… En prime le lien du site officiel du SBU (sbu.gov.ua)…

 

 

Et les “déplacements” de cadres aux SBU se poursuivent (lb.ua). Porochenko a ainsi nommé un nouveau responsable du SBU en Transcarpathie (unian.net).

 

• Poursuite des purges : La Justice.  Cette fois c’est le procureur de Kiev qui est arrêté. Il est soupconné de trafic de “drogue” (en fait de médicaments). Remarquez la photo montrant une position vraiment pas respectueuse et apparamment un SBU en tenue de “gangster” qui le garde (korrespondent.net). Long article de VzGliad sur la crise des procureurs en Ukraine (vz.ru). Le procureur général d’Ukraine, Chokine, déclare au cours d’une conférence de presse que l’on veut s’en prendre à sa vie (unian.net).

 

 

• Poursuite des purges : Transparence des patrimoines. Le parlement a voté le 14 juillet une loi imposant la transparence des possessions de terres, de propriétés et de voitures. Cela ne va pas plaire à plein de gens (pravda.com.ua)…

 

• Poursuite des purges : L’enseignement.  Le 21 juillet, une perquision conjointe du Parquet général, du SBU et du Ministère de l’Intérieur a eu lieu chez des hauts fonctionnaires du Ministère de l’Education (unian.net). Le 22, le gouvernement limoge le Directeur du Centre d’évaluation de l’enseignement (lb.ua/).

 

• Restriction dans la santé : après les enfants cancéreux, les séropositifs. Bientôt, ce sont environ 8000 séropositifs qui pourraient être privés de traitement (20minutes.fr).

 

• Le bombardement de Donetsk du 18 juillet. Ce jour là, le centre-ville de Donetsk a été bombardé (rue  Universitetskaia – rue Schorsa et l’hôpital No. 23). 46, rue  Tselinogradska . Un homme de 31 ans, agent de sécurité sur un chantier  de construction près de 69, rue Shchorsa  a été tué.  Dans les deux cas,  l’OSCE a été en mesure de conclure que le feu a été tiré à partir de la  zone de Pisky (11km au nord-ouest de Donetsk) et Pervomaiske (17km au  nord-ouest de Donetsk) contrôlés par l’Ukraine.

 

20 juillet 2015 : Bombardements  de Donetsk et rapport OSCE. Le 18 07 2015   (youtube)

 

21 juillet 2015 : Donetsk, le 21 07 15. L’obus transperce trois appartements (sous-titres français]  (youtube)

 

Extrait du rapport de l’OSCE : Latest from OSCE Special Monitoring Mission (SMM) to Ukraine based on information received as of 19:30 (Kyiv time), 19 July 2015 (osce.org)

 “On 19 July the SMM observed the aftermath of shelling overnight and  conducted crater analyses in “DPR”-controlled Donetsk city, visiting a  total of 12 impact sites. Around 80 Universytetska Street and 69  Shchorsa Street (2.5km north-west of Donetsk city centre), the SMM  observed three fresh craters that it concluded had been caused by MBT  fragmentation shells (125mm) fired from the north-west. At Hospital No.  23 at 46 Tselinogradska Street (4km west of Donetsk city centre), the  SMM observed three fresh craters that it also concluded had been caused  by MBT fragmentation shells (125mm) fired from the north-west. In both  cases, the SMM was able to conclude the direction of fire to have been  from the area of government-controlled Pisky (11km north-west of  Donetsk) and Pervomaiske (17km north-west of Donetsk). Moreover, the SMM  learned that a security guard at a construction site close to 69  Shchorsa Street had been killed – and the SMM observed damage to a  smouldering building there, with a direct hit to the roof, and then  visited Kalinina morgue and confirmed the death of the 31-year-old man.”

 

 

Sur cette vidéo, on voit l’obus passer entre les immeubles (zerohedge, vidéo à 1mn37 environ : youtube)

 

 

20 juillet 2015 : 21.07.15 Утренний Обстрел Донецка ВСУ , видно полёт снаряда  (youtube)

 

L’analyse de l’attaque compilée par Colonel Cassad montre que le bombardement est le fait d’un ou plusieurs tanks et non de l’artillerie, ce qui en soi est une bonne nouvelle. Il est sans doute question d’un acte isolé d’une unité, voir d’un équipage (colonelcassad).


• Manifestation à Donetsk le 23 juillet. L’OSCE est régulièrement pris à parti par les Novorusses pour son apathie. Le 23 juillet, une manifestation a eu lieu à Donetsk devant  l’hôtel Park Inn où logent les observateurs de l’OSCE et les représentants de la Croix-Rouge.

 

23 juillet 2015 : Donetsk. Les voitures de l’OSCE taguées par les habitants [le 23/07/15]   (youtube)

 

23 juillet 2015 : Donbass. Manifestation devant l’hôtel de l’OSCE le 23 juillet 2015   (youtube)

 

Auparavant des résidents de Donetsk avaient appelé pacifiquement l’OSCE à réagir (novorossia.today, youtube).

 

20 juillet 2015 : Resident from Donetsk: an appeal to OSCE (youtube)

 

Il faut dire que les presses ukrainiennes et atlantistes avaient atteint un niveau délirant d’hypocrisie. Allant jusqu’à dire que les Novorusses se bombardaient eux-mêmes pour accuser les Ukrainiens (russia-insider, kyivpost)

 

• Des éléments sur le vol MH17. Le conseil de sécurité de l’ONU a commencé l’examen du projet de résolution relative à la constitution d’un tribunal international pour juger de l’affaire du Boeing malais (pravda.com.ua). En vertu des accords entre les pays participants à l’enquête sur le drame du MH1, les résultats de l’enquête sur le crash seront tenus secrets. L’adjointe à l’intégration européenne du ministre des affaires étrangères d’Ukraine, Elena Zerkal précise : “With  regard to criminal investigation, we set up a joint investigation team  and the investigation is still ongoing. At the same time it is  classified and confidential and the results will not be presented for  public discussion.” (fortruss). Grahams Phillips, sur son blog “The Truth Speaker” sort plusieurs articles sur le sujet :

 

 

• Suite des attentats à Donetsk. Alors que Kyiv Post se réjouit et titre “Arbitrary arrests in Russian-held Donetsk as city descends into anarchy “ (kyivpost), Colonel Cassad livre un témoignage d’un membre de l’unité militaire incriminée dans les attentats, et dont des membres ont été arrêtés (colonelcassad).

 

 

 

LE RESTE DES INFOS : LUNDI 20 JUILLET 2015

Humour ukrainien involontaire…  avec ce titre d’OukraïnskaIa Pravda lundi 20 dès potron-minet : Ситуация на востоке Украины остается стабильно неспокойной – 75 обстрелов (La situation dans l’est de l’Ukraine reste stablement agitée – 75 tirs)  (pravda.com.ua).

 

• Odessa, ville Far-West. Un bar a encore explosé (obozrevatel.com). Il s’agit du bar “Liberty”, en plein centre, dans lequel une grenade a été jetée. Un vigile a été blessé (obozrevatel.com). De plus, Andreï Yousov, l’un des meneurs de l’Euromaïdan d’Odessa, et sa femme se sont fait tabasser par des inconnus (pravda.com.ua). La femme de Youssov a tenu à préciser qu’ils se sont sortis des pattes de leurs agresseurs grâce à l’intervention de passants, pas grâce à la police…

 

Petites visites de courtoisie entre amis. Les USA et l’Ukraine vont effectuer entre le 20 et le 26 des vols conjoints d’observation au-dessus du territoire russe (pravda.com.ua). La communication faite par OukraïnskaIa Pravda reprend celle faite dans “Novoe Vremia” par Sergueï Rizhkov, directeur du Centre russe de réduction du danger nucléaire. En même temps, la Russie fera de même dans le ciel de la Lituanie et de la Lettonie, en vertu d’un accord commun dit du “ciel ouvert”. Echange de bons procédés.

Cela fera au moins une fois où la Lituanie ne hurlera pas “au loup” à propos d’avions ou de sous-marins russes, comme aujourd’hui (pravda.com.ua, twitter). L’article de Pravda précise néanmoins que les navires russes se trouvaient à six milles de la limite des eaux territoriales. N’importe quel autre navire de guerre de n’importe quel autre pays s’y serait trouvé, personne n’en parlerait. Mais ce sont des navires russes…

 

• Petite pénalité. Le fisc ukrainien reclame 5 Milliards UAH (environ 250 millions USD) de pénalités à Ukrnafta (forbes.ua).

 

• Rependance d’un EuroMaidan. Eugene Vasilkevich Dovlatov, un journaliste d’Odessa et activiste du Maïdan, présente ses excuses à Poutine (lenta.ru).

 

 

LE RESTE DES INFOS : MARDI 21 JUILLET 2015

Nouvelle chaîne de télé anti-russe. La Pravda de Kiev titre : “La Pologne et les Pays-Bas créent une chaîne télévisée pour “contrer la propagande russe” (traduire par “créent une chaîne télévisée pour diffuser de la propagande anti-russe”). Décidément, la Hollande dépense beaucoup d’argent pour les activités anti-russes. Il y avait déjà eu la création de la chaîne ukrainienne “Hromadske” (itunes.apple.com) au financement international : Pays-Bas, Congrès US, UE. C’est sur cette chaîne que le journaliste ukrainien Bogdan Boutkievitch avait dit clairement qu’il y avait au Donbass 1,5 million d’inutiles qu’il fallait tuer : Sa prestation (sous-titrée en anglais) pour mémoire (youtube).

 

31 juillet 2014 : Bogdan Boutkevitch: You need to kill 1.5 million people in Donbass  (youtube)

 

 

LE RESTE DES INFOS : MERCREDI 22 JUILLET 2015

• Epuration culturelle ukrainienne : Depardieu dans le collimateur du SBU. Notre Gérard Depardieu a chaud aux oreilles en ce moment. Le SBU aurait décidé qu’il représente un danger pour la sécurité nationale de l’Ukraine (pravda.com.ua, theguardian.com) ! En fait, la logique ukrainienne de purification tous azimuts (listes de personnes non grata, listes de films et émissions russes interdites de diffusion, déboulonnage de statues de Lénine, dérussification des noms de rues, etc.) touche aussi la culture. Le ministère de la culture ukrainien avait déjà transmis en janvier au Conseil de Sécurité Nationale une liste de 117 personnalités du monde culturel interdites de séjour en Ukraine, ou dont les oeuvres et productions sont proscrites, liste qui n’apparaît pas apparemment sur le site officiel du ministère (http://mincult.kmu.gov.ua/mincult/uk/index) et dont le ministère avait jusqu’à présent toujours démenti l’existence (calvertjournal.com). Apparemment, il est à présent question de 500 voire 600 personnes dont Gérard Depardieu (news.rin.ru). Il y a deux semaines de cela, une initiative nommée “Pidvitch” ainsi que d’autres associations avaient manifesté devant le ministère de la culture et communiqué au ministre leur propre liste de “moutons noirs” qui comptait 500 noms. Dans cette liste, il est aussi question de l’acteur Steven Seagal et du chanteur compositeur Goran Bregovic (tass.ru) ou encore du cinéaste et musicien serbe Emir Kusturica, du réalisateur Oliver Stone et évidemment de nombreux artistes russes et quelques ukrainiens…

 

• Une cache d’armes américaines trouvée dans les ruines de l’aéroport de Lougansk. Comme à Donetsk, l’aéroport de Lougansk a été utilisé par les forces ukrainiennes comme tête de pont durant l’été 2014 pour débarquer des troupes et du matériel et faire éclater le front. Comme à Donetsk, cela s’est mal fini pour les Ukrainiens. dans les ruines de l’aéroport, une cache d’armes d’origine américaine a été trouvée. Elle contenait notamment des missiles portables anti-aériens Stinger (sputniknews, sputniknews). La cache date de l’offensive ukrainienne de l’été 2014, ce qui implique que des livraisons d’armes ou l’utilisation de mercenaires US ont été réalisées à cette époque.

 

 

• Porochenko nomme Heorhy Tuka, un volontaire et activiste euromaidan, au gouvernerat de la partie sous contrôle de Kiev de l’Oblast de Lougansk (kyivpost.).

 

 

LE RESTE DES INFOS : JEUDI 23 JUILLET 2015

Trente-troisième convoi humanitaire russe au Donbass. Plus personne n’en parle. Surtout pas nos médias, qui préfèrent parler de la Grèce. Ainsi, le 33e convoi russe est parti ce matin vers une heure du centre du ministère des situations d’urgence de Rostov-sur-le-Don et se dirige vers la frontière ukrainienne (vesti-ukr.com). Il apporte encore plus de mille tonnes de marchandises : “Среди грузов медикаменты, продукты питания, в том числе консервы, крупы, макаронные изделия, а также предметы первой необходимости. Гуманитарная помощь будет доставлена в Донецк и Луганск. Перед границей колонна разделится примерно на две равные части.” Traduction : “Dans les chargements, il y a des médicaments, de la nourriture, entre autres des conserves, de l’orge, des pâtes, mais aussi des objets de première nécessité. L’aide humanitaire sera déchargée à Donetsk et à Lougansk. Avant la frontière, elle se divisera en deux convois d’importance égale.”

Mais les camions ne transportent pas seulement des choses matérielles. Ils amènent aussi des médecins et des psychologues et  du personnel technique afin de pallier tout incident mécanique ou autre et d’empêcher ainsi que le convoi soit soumis à des arrêts préjudiciables à l’accomplissement de sa mission. Et pendant ce temps, à l’ONU, on est encore en train de discuter de la faisabilité d’un envoi d’aide humanitaire. Dans les pays de l’UE, on n’y pense même pas. Et l’Ukraine y voit toujours une “invasion” russe. En caricature, cela donne ça :

 

Régime sans visas. C’est depuis le début le Graal de l’intégration européenne pour Porochenko : obtenir de l’UE un régime sans visa pour les Ukrainiens. Hélas pour lui, l’UE vient de durcir les conditions d’obtention des visas (vesti-ukr.com). Cela ne date pas d’aujourd’hui, les Polonais avaient déjà commencé en octobre 2014 (14 10 2014 ridus.ru, news de 23 h 24) : “Les autorités polonaises ont compliqué l’obtention de visas Schengen pour les Ukrainiens. Malgré l’orientation pro-européenne du gouvernement de Kiev, les habitants des oblasts occidentaux de l’Ukraine sont pratiquement privés de la possibilité de voyager sans problème en Europe, communique Russia today (http://russian.rt.com/article/54414). “Ainsi, auparavant il suffisait d’être enregistré comme résident permanent dans l’un des oblasts de l’ouest et d’exprimer le souhait de faire ce que l’on appelait une virée-shopping en Pologne. En cas d’acquisition effective de marchandises, les Ukrainiens recevaient un visa multiple avec un délai de validité d’un an. Maintenant, pour ceux qui désirent se rendre en Pologne pour des achats, on exige qu’ils produisent un relevé de compte bancaire et pour ceux qui veulent se rendre sur le territoire polonais, il leur faut prouver qu’ils ont un travail pour au moins six mois.” Le même site (ridus.ru) écrivait encore (12  11  2014 ridus.ru, news de 15 h 16) : ” D’après l’UE, l’attribution à l’ukraine d’un régime sans visa ne sera pas possible avant la première moitié de 2015, écrit “La Vérité européenne” en se référant à ses propres sources au sein des milieux diplomatiques (http://www.eurointegration.com.ua/news/2014/11/12/7027716/)”

Un média ukrainien (zn.ua) exprimait d’ailleurs le 16 novembre 2014 une crainte évidente : “L’Ukraine s’attend à une fuite massive de sa population, si l’on établit un régime sans visa avec l’UE, étant précisé qu’au cours des premières années après l’abolition du visa, environ trois millions de personnes pourraient quitter le pays, écrit ZN.ua, citant Andreï Gaïdoutskovo, un expert en transferts de capitaux et en surveillance bancaire des migrants.

Récemment, le 6 juillet, un autre média (112.ua) avait donné un petit espoir aux Ukrainiens : Martin Schulz avait promis de travailler au régime sans visa entre Ukraine et UE, et d’envoyer des observateurs pour les élections régionales (112.ua).

 

 

LE RESTE DES INFOS : VENDREDI  24  JUILLET

Attentats à Kiev.  Deux explosions ont retenti en plein centre de la capitale la nuit dernière. La façade d’une banque a été mitraillée au lance-grenades. Il n’y a pas eu de blessés (pravda.com.ua).

 

• Initiative russe d’une agence de notation internationale.  Il y a en fait déjà au moins 4 petites agences russes de notation, qui n’ont aucune notoriété. Une agence plus grosse se met en place, avec la participation de Gazprombank. Par contre le projet d’agence russo-chinoise n’avance pas (rt.com).

 

• Exemples d’humour russe plus ou moins fins  (fortruss).

 

Russia’s FSB is monitoring Klichko’s conversations. Just for laughs.

 

“Ukraine’s  postal service released a stamp bearing Poroshenko’s face. But it  turned out it’s not sticking to the letters–people are spitting on the  wrong side!”

 

“If somebody doesn’t like the idea of restoring USSR, we’ll settle for the 1870 borders.”

 

Minions are Ukrainians
1. Very gullible
2. Blue and yellow
3. Help all manner of evildoers (especially from the US)
4. Whatever they do, it has the opposite effect.
5. They speak an emotional language which constantly changes so that nobody understands it, not even themselves. 

 

  “It’s merrier with Mr. Putin!
World order and twice as fast!”

 


“Maybe it’s time to reduce the sanctions on Russia?”

 

 Find 10 differences
Iraq–ISIS–Ramadi
Ukraine–Right Sector–Mukachevo

 

 “Ukraine is closely copying the Russian 1990s:
–President-alcoholic
–Fights in the parliament
–Oligarchs in key posts
–IMF
–Default
–Love for the US
And it will end with a New Year’s “I’m tired, I’m leaving”, and the appointment of Putin

 

“That feeling with Right Sector Nazis have declared themselves a national liberation movement and called for a referendum”

 

  A meeting of Normandy Four:
–Zdravstvuyte!
–Guten Tag!
–Bonjour!
–Give us money, please!

 

We’re not Gazprom, but we can also deliver warmth to NATO homes

 

If one is to die, one should die with music 

[A pun on the Right Sector leader Muzychka, killed in Transcarpathia in 2014]

 

• Humour russo américain.

 

 

LE RESTE DES INFOS : SAMEDI 25 JUILLET 2015

• Derniers soubresauts guerriers ?  Oukraïnskaïa Pravda dénonce l’intensification des tirs par les miliciens “séparatistes”  sur les positions ukrainiennes et affirme qu’ils utilisent des munitions incendiaires (pravda.com.ua). C’est possible, quoique, venant de ce média officiel du pouvoir ukrainien, il est raisonnable de s’attendre à de la propagande caractérisée. Quant aux munitions incendiaires, nous rappellerons que les forces ukrainiennes ont, les premières, utilisé des munitions à cassettes (bombardement du centre de Lougansk en juin 2014, nombreuses victimes civiles), et des obus au phosphore blanc, et ce, dès l’automne 2014 :

 

D’un autre côté l’OSCE annonce que les échanges de tirs autour de l’aéroport de Donetsk se sont amenuisés (osce.org). Un obus de mortier est tombé dimanche près de véhicules de l’OSCE sur la ligne de front dans la région de Lougansk (sputniknews) et un chef de patrouille de l’OSCE a été blessé, le lundi suivant, près de Shirokino (sputniknews).

 

• Démontage. Les russes démontent certains équipements électroniques leur appartenant des porte-hélicoptères “Mistral”. Ceci dit, la poupe des navires vient aussi de Russie… S’ils les démontent aussi, les Mistral vont avoir du mal à flotter (lenta.ru). Ceci n’empêche pas Bloomberg d’écrire le 28 juillet que Hollande décidera “dans les semaines à venir” s’il livre les Mistral à la Russie (bloomberg.com via pravda.com.ua)…

• Ratification en cours dans l’UE. Comme on pouvait s’y attendre, l’Allemagne a mené à bien la nuit dernière la dernière étape du processus de ratification de l’accord d’association UE-Ukraine (112.ua).

 

LE RESTE DES INFOS : DIMANCHE 26 JUILLET 2015

• Fait pas bon être avocat lié aux ultra-nationalistes en Ukraine. Jaroslav  Babich, le chef du département juridique du régiment “Azov”, a été trouvé pendu dans un pièce d’un casernement Azov en zone ATO (dnr-news) et l’avocat de Vita Zaveruha a reçu un avis de mobilisation (dnr-news, Fortruss).

 

 

• Ni prêtre orthodoxe du patriarcat de Moscou. A Kiev, un prêtre de l’église orthodoxe dépendant de Moscou a reçu deux balles dans la tête près de son domicile. La thèse avancée par la police est celle de cambrioleurs (dnr-news, sputniknews).

 

• Manifestation conjointe de nationalistes ukrainiens et russes à Kiev. Manifestation devant l’ambassade russe à Kiev pour demander la libération des “prisonniers politiques” en Russie (colonelcassad).

 

• Article de synthèse sur la défense de Lougansk en juillet-août 2014 (colonelcassad).

 

 

 

 

Source: http://www.les-crises.fr/actuukraine-29072015/


La Grèce est traitée comme un état hostile occupé, par Ambrose Evans-Pritchard

Wednesday 29 July 2015 at 00:14

Un nouvel accord pour Athènes qui est le plus mauvais possible et ne résout rien


Photo : AP

Par Ambrose Evans-Pritchard

Comme les Bourbons Napolitains – gentils en comparaison – les dirigeants de la zone Euro n’ont rien appris et rien oublié.

La cruelle capitulation imposée à la Grèce après 31 heures de torture diplomatique n’offre aucune sortie concevable à la crise perpétuelle du pays. Les termes en sont infiniment plus durs que ceux rejetés par les électeurs grecs lors du référendum triomphal une semaine auparavant et ne pourront donc jamais obtenir d’approbation démocratique.

Ils doivent être entérinés par un parlement grec toujours dominé par des députés de gauche et de droite qui détestent chaque ligne de la déclaration du sommet, l’infâme SN 4070/15 et ont seulement accepté – si tant est qu’ils l’aient fait – le couteau sous la gorge.

Les inspecteurs de l’Union économique et monétaire peuvent mettre un veto aux lois. L’émasculation du parlement grec a été glissée dans le texte. Il ne manque plus qu’une unité de gendarmes de l’Union économique et monétaire.

De tels termes sont inapplicables. Les créanciers ont cherché à rendre le nouveau mémorandum définitif en transférant 50 milliards d’euros d’actifs grecs “à un fonds indépendant qui monétisera les actifs par des privatisations et d’autres moyens”. Il sera utilisé en partie pour régler les dettes.

Ce fonds sera sous “la surveillance” de l’Union européenne. Les finesses cosmétiques de souveraineté seront préservées en laissant les autorités grecques gérer leurs affaires quotidiennes. Personne n’est dupe.

 

Un Tsipras “crucifié” a capitulé devant des mesures draconiennes après 17 heures de pourparlers achevés tard dans la nuit

Autrement dit, ils saisissent à la source le peu de bijoux restants de la Grèce. Ceci n’est pas vraiment différent du Comité International pour la Gestion de la Dette Grecque en 1898 imposé à la Grèce après que le pays eût fait faillite à la suite d’une guerre balkanique désastreuse.

Une ligue de six grandes puissances détentrices d’obligations, menée par des banquiers britanniques, confisquèrent les droits de douane dans le Port du Pirée, saisirent les revenus issus des droits de timbre, du tabac, du sel, du kérosène et jusqu’aux droits sur les cartes à jouer. Mais au moins il n’y eut aucune tromperie sur la solidarité et l’aide à la Grèce en cette occasion.

“C’est le Traité de Versailles d’aujourd’hui,” a dit M. Varoufakis ce matin, me parlant depuis sa maison sur une île de la mer Égée.

Selon les nouveaux termes de l’accord, la Grèce doit resserrer son budget d’environ 2% de son PIB dès l’année prochaine, poussant le pays plus loin dans une spirale de déflation-dettes et dans l’étape suivante de sa dépression de six ans.

Cela aura pour résultat que le gouvernement manquera les objectifs budgétaires encore une fois – probablement de beaucoup – dans une répétition exacte de la politique d’auto-faillite qui a rendu hors de contrôle la dynamique de la dette grecque dans les deux derniers ensembles de prêts de la Troïka.

Comme le Fonds Monétaire International l’a reconnu dans son célèbre mea culpa, si vous méjugez le multiplicateur fiscal et forcez l’austérité au-delà de la dose thérapeutique, vous aggravez les choses. Le ratio dette/PIB s’accroît malgré les coupes dans les dépenses.

Les dirigeants de l’UEM ont une réponse. Comme les courtisans de Knut le Grand, ils ordonneront simplement que les vagues refluent. Le texte déclare qu’en plus des diminutions des retraites et des augmentations des impôts il doit y avoir “des réductions de dépenses quasi automatiques en cas d’écarts par rapport aux objectifs des excédents primaires ambitieux”.

Autrement dit, ils seront forcés de mettre en œuvre des politiques restrictives pro-cycliques. La dérive fiscale qui a agi comme un léger amortisseur pendant les cinq dernières années ne sera pas tolérée cette fois.

 

A propos des demandes de l’UEM, l’économiste américain et Prix Nobel Paul Krugman déclare “cela va au-delà de l’intransigeance, c’est une vindicte”

Et n’oublions pas que ces excédents primaires n’ont jamais eu aucun sens en premier lieu. Ils n’ont pas été établis sur la base de l’analyse macro-économique. Ils ont été inclus dans des accords antérieurs car c’est ce qui serait nécessaire – ceteris paribus – pour faire croire que la dette est supportable et donc pour que le FMI accorde son financement. Quelle blague !

L’économiste Nobel Paul Krugman dit que les demandes de l’UEM sont “de la folie” à tous les niveaux. “Ce que nous avons appris pendant ces deux dernières semaines, c’est qu’être membre de la zone Euro signifie que les créanciers peuvent détruire votre économie si vous déviez de la norme. Ceci n’a absolument aucun rapport avec les sous-jacents économiques de l’austérité”, a-t-il dit.

“Cela dépasse l’intransigeance et devient pure vindicte, destruction complète de la souveraineté nationale, sans espoir d’apaisement. C’est probablement conçu pour que la Grèce ne puisse l’accepter ; mais quand même, c’est une trahison grotesque de tout ce que le projet européen a supposé signifier”, a-t-il dit.

Oui, Syriza a flanché, mais il y a beaucoup de chapitres encore à écrire dans cette misérable histoire.

Les banques grecques sont sur le point de s’écrouler. Il ne reste même pas assez d’argent pour couvrir les retraits aux distributeurs automatiques de 60 € par jour durant cette semaine, ou couvrir les paiements hebdomadaires de 120 € aux retraités et aux chômeurs – c’est-à-dire la minuscule fraction des chômeurs qui reçoit quelque chose.

Le contrôle des capitaux a mené à un arrêt de l’économie. Presque rien n’entre dans le pays. Les sociétés consomment leurs derniers stocks de matières premières et d’importations essentielles. Des centaines d’usines, des moulins et des unités de fabrication ont déjà réduit leurs équipes et se préparent à débrayer dès cette semaine.

Les dernières réservations touristiques se sont effondrées de 30%. Syriza a fait face à un sérieux risque du pays d’épuisement des stocks de produits alimentaires importés dès la fin de ce mois, avec des conséquences catastrophiques au sommet de la saison touristique. Ainsi oui, face à l’horreur complète de ce qui se passe, ils ont reculé.

Pas besoin d’être un oracle pour voir que la Grèce va au-devant de plus de problèmes

Il n’y a aucun doute que Syriza a vendu un programme trompeur au peuple grec avec ses promesses incompatibles de déchirer le mémorandum de la Troïka et de garder la Grèce dans l’euro. Ils ont appris une horrible leçon.

Pourtant c’est seulement la moitié de l’histoire. Nous avons aussi vu le pouvoir des créanciers de l’UEM mettre un pays à genoux en coupant la liquidité de secours (ELA) au système bancaire.

Il n’y a aucun doute, c’est la décision de la Banque Centrale Européenne de geler l’ELA à 89 milliards d’euros il y a deux semaines qui a précipité la crise finale et a détruit la volonté de résister de Syriza. Les responsabilités sur cet épisode sont confuses. Personnellement, je n’accuse pas Mario Draghi de la BCE pour cet abus de pouvoir. C’était en substance une décision politique prise par l’Euro-groupe.

Mais de quelque manière qu’on le déguise, le fait demeure que la BCE a dicté par ses actes un règlement politique et servi de bras armé aux créanciers au lieu de faire respecter la loi du traité de l’UE.

Elle a adopté une attitude qui a déstabilisé encore plus le système financier d’un état membre de l’UEM qui avait déjà de graves ennuis, et l’a vraisemblablement fait en enfreignant son premier devoir fixé par les traités, celui de maintenir la stabilité financière. C’est un moment crucial.

Ce que nous avons tous vu avec une grande clarté est que les pouvoirs des créanciers de l’UEM peuvent soumettre un état indiscipliné – à condition qu’il soit petit – en bloquant son système bancaire. Nous avons aussi vu qu’un petit pays n’a pas la moindre défense. C’est le pouvoir monétaire pris d’une folie furieuse.

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Et comme si cela ne suffisait pas, le premier ministre grec Alexis Tsipras ne peut même pas se prévaloir auprès des Grecs d’avoir garanti l’allègement des dettes, la seule chose qui aurait pu le sauver. Même cela, l’Allemagne l’a bloqué.

Elle a agi ainsi malgré la pression conséquente de la Maison-Blanche et du FMI et bien que la France, l’Italie et les dirigeants de la Commission de l’UE et du Conseil admettent qu’une forme de réduction soit nécessaire.

Le FMI dit que l’allègement des dettes doit être d’au moins 30% du PIB. Même cela est trop bas. Étant donné les dégâts faits par six ans d’implosion économique, une décennie d’investissements perdue, une hystérésis chronique, un chômage des jeunes à 50% ou plus, une fuite des cerveaux diplômés et un système bancaire ruiné, ce serait encore insuffisant si toute la dette était annulée. Voilà ce que cette expérience de l’UEM a fait au pays. [L'hystérésis caractérise un système tendant à rester dans le même état après qu'ait cessé la cause extérieure ayant produit cet état, NdT]

Mais tout ce que les Grecs obtiennent n’est que vagues propos sur une “possible” extension des maturités, quelque part dans l’avenir, une fois qu’ils auront sauté à travers d’innombrables cerceaux et réussi leurs examens. C’est ce que l’on leur avait promis en 2012. Ce n’est jamais arrivé.

“Si les détails de l’allègement de la dette ne sont pas écrits clairement dans le plan global, cela ne vaut rien”, a dit M. Varoufakis.

Le document du sommet affirme avec une malhonnêteté égoïste que la dette de la Grèce a déraillé en raison de l’échec des gouvernements grecs à respecter les termes du Mémorandum au cours de l’année dernière. Si ceci n’était pas arrivé, la dette serait toujours soutenable.

C’est un mensonge. La dette publique a gonflé à 180% vers la fin de l’année dernière – bien avant que Syriza ne soit élu – et bien que le gouvernement de Démocratie Nouvelle ait respecté la plupart des demandes de la Troïka.

La vérité est que la Grèce était déjà en faillite en 2010. Les créanciers de l’UEM ont refusé d’accorder une restructuration normale de la dette parce que cela aurait provoqué une contagion instantanée au Portugal, à l’Espagne et à l’Italie à un moment où la zone Euro n’avait aucun prêteur en dernier ressort ni aucune défense.

 

Le chef brisé de Syriza doit vendre un accord qui laisse la Grèce dans un piège de dettes permanentes

Les documents divulgués du FMI ne laissent aucun doute quant au fait que le sauvetage avait pour but de sauver l’euro et les banques européennes, pas la Grèce. Plus de dette a été déversée sur les contribuables Grecs pour gagner du temps, tant en 2010 que de nouveau en 2012, en mettant de côté la crise à laquelle l’Europe fait face aujourd’hui.

Dans une façon étrange, le seul politicien européen qui offrait vraiment à la Grèce une sortie de l’impasse était Wolfgang Schäuble, le ministre allemand des finances, même si son offre a été faite d’une façon inélégante, presque sous la forme d’un diktat.

Son plan pour un retrait adouci de l’Euro-zone pour 5 ans – un euphémisme, car il voulait vraiment dire Grexit – avec un allègement des dettes de type Club de Paris, une aide humanitaire et un ensemble de mesures de croissance, pourrait permettre à la Grèce de regagner d’une façon ordonnée de la compétitivité avec la drachme.

Une telle formule impliquerait l’intervention de la BCE pour stabiliser la drachme, empêchant une spirale de baisse incontrôlée et dangereuse. Cela aurait certainement été mieux que le document atroce que M. Tsipras doit maintenant rapporter à Athènes.

Le chef brisé de Syriza doit vendre un accord qui laisse la Grèce dans un piège de dettes permanentes, sous un contrôle néocolonial, et si fragile économiquement qu’il est quasi assuré d’éclater en une nouvelle crise à la prochaine récession mondiale ou européenne.

A ce moment-là, tout le monde accusera de nouveau les Grecs, injustement, et nous aurons encore une autre manche d’amères négociations, jusqu’à ce que quelque chose casse finalement ce cycle sinistre d’échec et de récriminations.

 

L’accord laissera la Grèce économiquement si fragile qu’il est quasi certain qu’il éclatera en une nouvelle crise à la prochaine récession mondiale

Pour la zone Euro cet “accord” est le pire possible. Ils n’ont rien résolu. L’Allemagne et ses alliés ont pour la première fois essayé d’éjecter un pays de l’euro et, ce faisant, ont violé le caractère sacré de l’union monétaire.

Au lieu d”aller de l’avant, dans ces temps de crise profonde, vers une union fiscale et politique pour maintenir ensemble l’euro – comme les architectes de l’UEM l’avaient toujours prévu – ils ont fait machine arrière.

D’un même coup ils ont converti la zone Euro en un système de change fixe, un Mécanisme de Taux de Change renouvelé (ERM) qui est en soi instable, soumis au caprice et à la merci de politiciens populistes qui font du théâtre pour leurs électeurs. Les marchés commencent déjà à l’appeler ERM3.

Dans les jours prochains je reviendrai sur le comportement de l’Allemagne et sur le désastre diplomatique auquel on a assisté. Pour le moment, j’aimerais seulement citer le verdict de l’historien Simon Schama. Il a dit :

“Si Tsipras portait la couronne du Roi Pyrrhus la semaine dernière, c’est Merkel qui la porte maintenant. Son ultimatum est le début de la fin de l’UE”, a-t-il dit. Exactement.

Crise en Grèce : ce qui est arrivé depuis le référendum

Dimanche 5 juillet

La Grèce dit “non”

L’électorat grec rejette les conditions d’un accord de renflouement, avec 61,31% de “non”, renforçant le premier ministre Alexis Tsipras qui déclare que ce vote “n’est pas un mandat de rupture avec l’Europe, mais un mandat qui renforce notre capacité de négociation pour aboutir à un accord viable”.

Lundi 6 juillet

Le ministre “rock-star” démissionne

Yanis Varoufakis démissionne de ses fonctions de ministre des finances de la Grèce pour améliorer les relations avec les créanciers de l’Euro-zone. Il est remplacé par Euclide Tsakalotos, qui a dirigé les discussions avec les créanciers de l’Union Européenne et du FMI. La BCE maintient un flux de liquidités vital vers les banques grecques mais avec des condition durcies.

Mardi 7 juillet

Les Grecs se présentent les mains vides

Les ministres des finances de l’Euro-zone se rencontrent à Bruxelles avant un sommet extraordinaire des chefs d’état et de gouvernement de l’Euro-zone. Les deux rencontrent s’achèvent sans une proposition détaillée du gouvernement grec. Il est donné à Athènes jusqu’à jeudi pour présenter un programme de réformes convaincant.

Mercredi 8 juillet

“Dernier appel”

Tsipras déclare au parlement européen que la Grèce présentera dans les 24 heures un plan “crédible” alors que le président de l’UE Donald Tusk prévient les parlementaires : “C’est vraiment le dernier appel pour la Grèce et, pour nous, notre dernière chance.” Athènes soumet formellement la demande d’une nouvelle aide au fonds de stabilité de l’Euro-zone et propose des réformes des retraites et de la fiscalité en échange d’un prêt de trois ans de l’Euro-zone.

Jeudi 9 juillet

Mieux vaut tard que jamais

Après que la chancelière allemande Angela Merkel ait répété qu’elle s’oppose à une décote sur la dette, la Grèce soumet à Bruxelles un nouveau plan de sauvetage, deux heures avant la date-butoir à minuit.

Vendredi 10 juillet

Non, mais oui

Athènes détaille les nouvelles propositions, qui ressemblent de près à celles soumises par les créanciers internationaux de la Grèce le mois précédent. La Grèce y accepte de se plier aux exigences des créanciers de décourager les retraites anticipées, de relever les cotisations de santé, d’augmenter les taxes, de vendre les parts de l’état dans le géant des télécoms OTE et de privatiser les ports du Pirée et de Thessalonique.

Samedi 11 juillet

Un Grexit temporaire ?

Une réunion des ministres des finances de la zone euro s’achève par de profondes divisions sur la confiance à accorder à Tsipras pour un troisième plan d’aide de plus de 80 milliards d’euros. Un document du ministère des finances allemand indique que Berlin attend bien plus d’engagements concrets de la Grèce, faute de quoi la Grèce devrait quitter la zone euro pendant cinq ans jusqu’à ce qu’elle ait remis les choses en ordre.

Dimanche 12 juillet

Les choses se gâtent

L’UE annule un sommet des 28 à Bruxelles pour décider si la Grèce devrait rester dans l’euro. Il est remplacé par un sommet des 19 dirigeants de l’Euro-zone, où il est demandé à Athènes de faire passer de nouvelles réformes dans la semaine.

Lundi 13 juillet

“A-grec-ment”

Tusk annonce que le sommet est parvenu à un accord unanime sur un “plan pour la Grèce avec d’importantes réformes et un soutien financier”. Un document de 7 pages révèle ses termes : hausse de la TVA et baisse des retraites, mais avec 50 milliards d’euros de privatisations dont une partie sera affectée à des initiatives de croissance. Athènes doit aussi réorganiser son système de justice civil et aligner ses lois bancaires sur le reste de l’UE.

Source : The Telegraph, le 13/07/2015

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

 

Source: http://www.les-crises.fr/la-grece-est-traitee-comme-un-etat-hostile-occupe-par-ambrose-evans-pritchard/


La Grèce, la gôche, la gauche, par Jacques Sapir

Tuesday 28 July 2015 at 02:03

PAR  · 22 JUILLET 2015

Le diktat arraché à la Grèce par l’Eurogroupe et la Commission européenne est une tragédie pour la Grèce. Cet accord ne réglera rien et va même empirer la crise que la Grèce connaît. La dette de la Grèce n’était pas soutenable en 2010. Elle ne l’était pas en 2012. Elle ne l’est toujours pas après ce diktat. La solvabilité du pays n’est nullement assurée car la viabilité de l’économie n’est pas assurée. Ici se trouve une évidence, niée par les négociateurs de Bruxelles, qu’un pays ne peut rembourser que ce que son économie lui permet. En fait, c’est même l’inverse qui apparaît le plus évident, car les mesures imposées dans ce diktat, combinées avec les conséquences de la politique de la Banque Centrale Européenne, vont aggraver la crise économique en Grèce. Mais, les conditions qui ont entouré ce désastre ont des conséquences qui dépassent la Grèce. Nous assistons aujourd’hui au naufrage de la social-démocratie européenne et à un moment charnière pour ce que l’on appelle la « gauche radicale ».

Le naufrage de la Social-Démocratie européenne

La social-démocratie européenne, avec son grand rêve d’une Union européenne réformée, d’un Euro dit « de gauche », a sombré entre les derniers jours de juin et les premiers de juillet[1]. La social-démocratie européenne s’est révélée être une force d’imposition de l’austérité, une force qui a contribué à écraser une tentative pour construire un autre chemin économique en Europe. Ce naufrage n’a qu’un précédent : celui d’août 1914, ou mieux encore 1918. Comme à cette époque, la social-démocratie allemande est bien entendu la première à sombrer. Le fantôme de Ebert, et de sa collaboration avec Noske, est revenu hanter les couloirs de la chancellerie à Berlin[2]. La collusion entre le SPD et la droite allemande à propos de la Grèce a été évidente[3]. Que l’on se souvienne des déclarations d’un Martin Schulz, appelant au renversement d’un gouvernement, le gouvernement grec, démocratiquement élu, ou les déclarations tout aussi calamiteuses d’un Sigmar Gabriel, le dirigeant du SPD, allié d’Angela Merkel au sein du gouvernement allemand. Mais ce phénomène dépasse, et de loin, le cas de l’Allemagne. En Grande-Bretagne, les événements de ces derniers jours ont aggravé la crise latente au sein du Labour déjà mal remis de l’épisode Tony Blair[4]. Ces événements vont aussi aggraver la crise interne du PD en Italie, parti rassemblant depuis une partie des anciens « eurocommunistes » jusqu’au centre-gauche issue de la démocratie chrétienne. On pourrait multiplier les exemples.

En France, on voit dans la manière dont la majorité du Parti dit « socialiste » s’est rangé autour du diktat, dans la manière et dans les mots dont le Premier ministre, Manuel Valls, a usé pour faire voter le Parlement, que cette logique de collaboration avec l’ennemi est allée jusqu’aux tréfonds de sa logique. Il est d’ailleurs significatif que les « frondeurs » du Parti dit « socialiste » aient, dans leur majorité, voté avec le reste du Parti. Même le PCF, qui est le seul parti du Front de gauche représenté au Parlement, a hésité. Rappelons que le lundi matin Pierre Laurent appelait à voter le soutien à ce diktat avant que le Président du groupe, André Chassaigne, tenant compte des réactions de la base et de nombreuses fédérations locales[5], fasse voter contre. Ce pas de clerc de Pierre Laurent est en réalité très révélateur non seulement d’une politique réduite aux intérêts électoraux et financiers, mais aussi du poids de l’idéologie européiste au sein du PCF. Il faut comprendre comment cette idéologie s’est constituée, et pourquoi les événements de ces derniers jours la mettent aussi violemment en crise.

L’Europe comme seule horizon ?

L’Union européenne, rebaptisée « Europe » au prix d’une supercherie évidente, était devenue le cœur du projet de la social-démocratie depuis les années 1980. L’effondrement de l’Union soviétique avait même donné une certaine urgence au « rêve » européen de la social-démocratie. En fait, cette dernière voyait, dans un projet de type « fédéral » la possibilité d’imposer à ce qu’elle appelait les « forces de la réaction », et dans les années 1980 celles-ci étaient bien identifiées en Grande-Bretagne avec le Thatchérisme, des mesures sociales. La défaite de la social-démocratie traditionnelle en Grande-Bretagne face à Margaret Thatcher validait en un sens ce projet. Convaincue, surtout en France et en Italie, de l’impossibilité de faire « un autre politique économique » dans le cadre national, elle reportait ses espoirs sur une politique à l’échelle de l’Europe. L’absence d’analyse sérieuse des raisons de l’échec de la politique d’Union de la Gauche en 1981-1983, a certainement été un facteur important dans le tournant pris par la gauche française, de fait l’une des moins « sociale-démocrates » en Europe. D’autres facteurs jouèrent leur rôle, comme l’impact des « années de plomb » en Italie.

Mais, le ralliement à l’idée européenne était en fait ancien. Dès les années 1950 s’est imposée au sein de la social-démocratie l’idée que seule une organisation fortement intégrée de l’Europe occidentale pouvait empêcher le retour des guerres sur le continent européen. Il faut aussi signaler le très fort anticommunisme du SPD en Allemagne de l’Ouest, ce qui le conduisit à accepter le cadre du Traité de Rome (et de l’OTAN) comme seul cadre susceptible de garantir le système social ouest-européen qu’il s’agissait alors non pas de changer mais de faire évoluer. Notons aussi le fait que nombre de social-démocraties du sud de l’Europe (en Espagne et au Portugal en particulier) subirent l’influence du SPD.

Pourtant, le tournant des années 1980 va bien au-delà. Il y a une transformation qualitative qui fait passer « l’Europe » d’élément important dans l’idéologie des partis de l’Internationale Socialiste à un élément dominant et central. C’est une idéologie de substitution, qui allie le vieux fond internationaliste (ou plus précisément des formulations internationalistes car quant à la réalité de l’internationalisme de la social-démocratie, il y aurait beaucoup à dire) avec un « grand projet », s’étendant sur plusieurs générations. Les différentes social-démocraties européennes, puis ce qui survivait du mouvement communiste institutionnel, ont donc fait de la « construction européenne » l’alpha et l’oméga de leur projet politique[6]. Ceci a eu des effets importants dans le mouvement syndical, et la CFDT a commencé son involution qui l’a transformé en un syndicat de collaboration de classe, évolution qui s’est accélérée à partir de 1995. Mais, même au sein de la CGT, on peut ressentir cette évolution avec une montée en puissance du tropisme « européen ». Ce tropisme a déjà été mis à mal, du moins en France, par l’échec du référendum de 2005. Le résultat, qui n’avait pu être obtenu que parce qu’une frange des électeurs du Parti dit « socialiste » avait voté « non » a été vécu comme un véritable drame au sein de ce Parti. Au lieu d’en tirer les leçons, et de comprendre que ce tropisme « européen » ne pouvait qu’entraîner de nouvelles catastrophes, les dirigeants de ce Parti ont décidé de persévérer.

Encore fallait-il que, dans sa réalité, l’Union européenne permette d’accorder à ce dit projet quelques créances. C’est cela qui vient de sombrer avec la crise grecque.

Le principe de réalité

En effet, l’Union européenne s’est révélée sous un jour hideux. Ou, plus exactement, certaines de ses institutions ont montré qu’elles n’étaient nullement « neutres », mais qu’elles avaient ce que l’on peut appeler un « contenu de classe » ou, si l’on veut utiliser un langage moins marqué, qu’elles étaient consubstantiellement au service des nantis. Cela concerne, évidemment, au premier chef les institutions monétaires, c’est à dire la zone Euro. Les institutions de l’Union Economique et Monétaire, et surtout le fait que certaines d’entre elles soient des « institutions de fait » sans existence juridique (comme l’Eurogroupe) assurent la prédominance non seulement d’une certaine politique économique au sein de l’UEM, mais aussi la domination de la financiarisation sur les pays de l’UEM. Le fait que ces institutions soient aujourd’hui consolidées dans l’UE, même si de nombreux pays de l’UE ne font pas partie de la zone Euro, aggrave cette situation. On a clairement vu non seulement l’impossibilité de faire une autre politique que l’austérité dans le cadre de la zone Euro, mais surtout que ce cadre était politique et entendait imposer sa loi à tous les pays. Enfin, on a eu la confirmation que, loin de constituer un cadre apaisant les tensions entre pays, la zone Euro avait pour effet de les exacerber.

On voit bien qu’aucune politique alternative n’est possible dans le cadre de la zone Euro. On pourrait en dire sans doute de même avec l’UE telle qu’elle existe aujourd’hui. Les conditions de négociation du TTIP/TAFTA montrent que ce traité que l’on veut conclure dans le dos des peuples ne fonctionnera qu’au profit des grandes sociétés multinationales. L’UE ne protège nullement de ce marché mondial. Elle contribue au contraire à l’accoucher. La compréhension de ces faits pénètre désormais de plus en plus profondément au sein de l’électorat mais aussi au sein de certaines fractions de l’appareil social-démocrate. C’est le cas en France au sein du Parti dit « socialiste ».

La social-démocratie est donc confrontée à la réalité. Elle a rêvé un processus de construction européenne et se réveille aujourd’hui avec un monstre. Qui plus est, elle se retrouve dans la peau de l’un des deux parents de ce monstre. On comprend, alors, la gueule de bois historique qui a saisi la social-démocratie européenne. Mais, peut-elle renier ce qui résulte de près de trente années de ses compromissions multiples et répétées ?

L’Union européenne, et bien entendu la zone Euro, vont se révéler la Némésis de la social-démocratie européenne. Mais, dans le même temps ceci confronte les différents partis de la « gauche radicale » à un moment charnière. Car, de leur réaction rapide, dépend leur capacité à prendre pied dans l’électorat de cette social-démocraties ou au contraire de voir d’autres forces s’en emparer. En politique aussi, la nature a horreur du vide.

Source : http://russeurope.hypotheses.org

Notes

[1] Evans-Pritchard A., « EMU brutality in Greece has destroyed the trust of Europe’s Left », The Telegraph, 15 juillet 2015, http://www.telegraph.co.uk/finance/comment/ambroseevans_pritchard/EMU-brutality-in-Greece-has-destroyed-the-trust-of-Europes-Left.html

[2] F. Ebert, dirigeant du SPD, écrasa dans le sang avec la complicité de la Reichswehr et des corps francs la révolte de la gauche socialiste autour de Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht

[3] Mounk Y., « Germany’s Social Democrats Are Colluding in Greece’s Destruction—And I’m Leaving The Party », The Nation, 16 juillet 2015, http://www.thenation.com/article/germanys-social-democrats-are-colluding-in-greeces-destruction-and-im-leaving-the-party/

[4] Jones O., « The left must put Britain’s EU withdrawal on the agenda”, The Guardian, 14 juillet 2015, http://www.theguardian.com/commentisfree/2015/jul/14/left-reject-eu-greece-eurosceptic

[5] Je peux en témoigner compte tenu du nombre de commentaires provenant de responsables de sections locales et départementales du PCF arrivés sur le carnet RussEurope entre le lundi 13 et le mardi 14 juillet.

[6] Voir « Quand la mauvaise foi remplace l’économie: le PCF et le mythe de “l’autre euro” », 16 juin 2013, note sur RussEuropehttp://russeurope.hypotheses.org/1381

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PAR  · 24 JUILLET 2015

Cette note fait suite à la précédente[1], postée sur ce carnet le 22 juillet.

 

Les événements qui ont conduit au Diktat imposé à la Grèce, et ce dit Diktat lui-même, constituent un moment charnière pour ce que l’on appelle la « gauche radicale ». En un sens, la crise grecque soumet cette « gauche radicale » à un test aussi sévère que celui imposé à la social-démocratie. Si la « gauche radicale » n’est pas aujourd’hui dans la même crise que la social-démocratie, elle risque néanmoins de se trouver face à une crise d’orientation de première grandeur. En effet, l’européisme qui caractérise la « gauche radicale » a été lui aussi condamné par le Diktat imposé à la Grèce. La question est aujourd’hui posée de savoir si la « gauche radicale » va accepter de n’être qu’une force d’appoint de la social-démocratie ou si elle est capable d’assumer toutes les conséquences d’un programme de rupture. Mais, un tel programme de rupture n’est plus, aujourd’hui, compatible avec l’européisme.

 

Eléments de définition de la « gauche radicale »

Précisons d’abord ce que l’on entend par ce terme. Il s’agit des partis ou mouvements politiques qui se sont constitués à la gauche de la social-démocratie traditionnelle, et le plus souvent en réaction contre sa politique et ses orientations. Cela n’inclut pas les partis restés fidèles à l’identité communiste (comme le KKE grec ou le PRC italien) ni les partis ou mouvements d’extrême-gauche restés fidèles à une identité marxiste révolutionnaire, plus ou moins dénaturée par le sectarisme et le dogmatisme (comme en France le NPA ou Lutte ouvrière). Cela inclut donc Syriza en Grèce, Podemos en Espagne, le Front de Gauche en France ou encore Die Linke en Allemagne et SEL en Italie[2]. L’origine de ces partis est diverse et ceci entraîne des logiques tant politiques qu’idéologiques très particulières. De ce point de vue, la gauche radicale apparaît comme un courant ayant des aspirations communes mais qui est en réalité très hétérogène. En réalité, la culture politique et l’histoire de chaque pays se reflète dans le type de parti ou de mouvement. Si les partis de la gauche radicale se sont dotés de structures de coordination au niveau de l’Union européenne, il n’y a pas d’unité européenne de ce courant tout simplement parce que l’histoire politique de chaque pays a sa spécificité.

En France comme en Allemagne, ils se sont constitués à partir de dissidences de la social-démocratie et d’une union avec ce qui survivait des partis communistes (le PCF en France et le PDS en Allemagne), et dans certains cas rejoints par des forces d’extrême-gauche. A l’inverse, Podemos est un mouvement relativement nouveau, issu des « Indignés » qui ont été relativement fort en Espagne. La cas de Syriza en Grèce est intermédiaire, car le parti communiste grec s’était coupé en deux du temps de la dictature des colonels, avec le « Parti de l’intérieur » proche du courant dit « Eurocommuniste » qui a engendré Synapismos et le « Parti de l’extérieur » de strict obédience moscoutaire.Synapismos a été le noyau de Syriza rejoint tant par des mouvements d’extrême-gauche que par des dissidents de la social-démocratie locale (le PASOK), tandis que le « Parti de l’extérieur » s’est reconstitué dans le KKE, et continue de mener une existence sectaire, repliée sur lui-même. L’Italie est un cas particulier. En effet, le processus de dissolution du PCI (en dépit de la scission du PRC) a abouti à sa fusion dans un vaste ensemble électoral, le Parti Démocrate, qui inclut les résidus du PSI et un morceau de la Démocratie Chrétienne. L’Italie est certainement le pays ou la « gauche radicale » est la plus faible et cela a des conséquences importantes sur la structuration de l’espace politique italien. Cette faiblesse a laissée le champ libre à la fois au Movimente Cinque Stelle de Beppe Grillo, qui est devenu le deuxième parti d’Italie, qu’à la Ligue du Nord de Salvini.

 

Eclectisme politique et européisme

Si l’éclectisme politique, conséquence logique de l’hétérogénéité des modes de formations et de la diversité des cultures politique nationales, est l’une des caractéristiques de la « Gauche Radicale » à l’échelle européenne, on peut remarquer cependant certains traits communs en ce qui concerne l’Union européenne. Si ces divers partis ou mouvements se sont opposés, plus ou moins, aux différents traités constitutifs de l’Union européenne depuis le début des années 1990, ils n’en partagent pas moins ce que l’on peut appeler une « idéologie européiste ». Ils sont dans une large mesure convaincus que l’Union européenne, même sous la domination de la droite néo-libérale, constitue un cadre privilégié de l’action politique. Depuis la crise financière de 2007-2009, crise qui continue à faire sentir ses effets jusqu’à aujourd’hui, une partie de ces mouvements voit dans le cadre de l’Union européenne une garantie contre le retour à la situation des années 1930. Bien entendu, cette acceptation du cadre de l’Union européenne se fait avec une forte tonalité critique. Les thèmes comme « changer l’Europe » ou « changer d’Europe » sont très présents dans le vocabulaire de ces partis ou mouvements. Mais, ce « changement » d’une part reprend à son compte le fait que l’UE serait l’Europe (et non une forme d’institutionnalisation couvrant certains pays de l’Europe, au sens culturel comme géographique) et d’autre part doit se faire largement dans le cadre de certaines des institutions existantes, et c’est en particulier le cas de l’Euro.

La question de l’Euro offre un concentré des contradictions de la « Gauche Radicale ». Dans une large mesure il n’est pas remis en cause. Et l’on a vu les conséquences tragiques que cette absence de remise en cause a eues sur le comportement de Syriza ces derniers jours. Tsipras a pris la décision politique de refuser la réquisition de la Banque Centrale de Grèce et de mettre en circulation des reconnaissance de dette car il pensait, et là on ne peut lui donner tort, que ces décisions entraîneraient probablement une sortie de la Grèce de l’Euro. Ce faisant, il s’est néanmoins mis lui-même la tête sur le billot face à l’intransigeance de l’Eurogroupe. Surtout, il n’a pas compris que la gestion de l’Euro ne relevait pas de l’économie, avec un calcul coût-avantage, mais quelle relevait du politique. Les options que représentaient Syriza étaient politiquement inacceptables pour l’Eurogroupe. Demain, on risque de voir l’histoire se répéter avec Podemos qui entend situer sa revendication d’une autre politique économique à l’intérieur de la zone Euro.

Ce refus de remettre l’Euro en cause à plusieurs origines. On peut y voir les restes d’un vieux marxisme dogmatique qui considère que, finalement, la monnaie n’a pas d’importance. Seules comptent les « forces productives », dans un logique qui doit, il faut le dire, plus à Jean-Baptiste Say (« les produits s’échangent contre des produits, la monnaie est un voile ») qu’à Marx. Cette logique peut aussi se décliner sur le mode du « progrès ». Certes, l’Euro, produit du pouvoir bourgeois a bien des défauts, mais il constitue un « progrès » allant vers l’unification des espaces productifs, et une fois que les « masses populaires » auront pris le pouvoir elles pourront utiliser cet « instrument » dépouillé de ses habits bourgeois. En fait, c’est la reprise, sans doute inconsciente, de ce que Boukharine expliquait en 1915-1916 sur l’évolution des « trusts capitalistes d’Etat » qui conduiraient au socialisme en en changeant la direction politique[3]. Enfin, certains reconnaissent que l’Euro a bien des défauts, mais expliquent que la rupture de la zone Euro ramènerait l’Europe à la situation des années trente. C’est, semble-t-il, la position de Tsipras[4]. Cet européisme, qui infecte une grande partie de la « gauche radicale », risque donc fort d’être sa Némésis. On voit bien aujourd’hui qu’aucun programme économique radicalement différent du consensus austéritaire qui domine en Europe n’est possible tant que l’on persiste à adhérer à l’européisme. C’est la leçon qu’il nous faut tirer de la capitulation de Tsipras face à l’Eurogroupe[5]. Le grand historien britannique, Perry Anderson écrit ainsi : « Tsipras et ses collègues ont répété à qui voulait les entendre qu’il était hors de question d’abandonner l’euro. Ce faisant, ils ont renoncé à tout espoir sérieux de négocier avec l’Europe réelle — et non l’Europe qu’ils fantasmaient »[6]. Ceci décrit bien le piège de l’européisme dans lequel Tsipras s’est enfermé, et qui menace aujourd’hui la « gauche radicale ».

 

L’UE, un système semi-colonial ?

Il faut ici comprendre une chose importante : la souveraineté a été pendant longtemps un point aveugle de la « gauche radicale ». Pourtant, la « gauche radicale » a défendu la notion de souveraineté alimentaire. Elle n’a cependant jamais, jusqu’à présent, voulu sauter le pas et aller se réclamer de la souveraineté politique. Les seuls courants qui l’on fait, comme le chevènementisme en France, ont été isolés et incapable d’étendre leur influence sur la « gauche radicale », même si l’héritage de Jean-Pierre Chevènement s’étend désormais au-delà de la coupure gauche/droite.

Pourtant, il existe une tradition marxiste, certes ancienne, qui indiquait que les luttes pour la transformation de la société ne pouvaient se mener que dans le cadre d’un Etat souverain[7]. Mais, cette tradition semble avoir été emportée dans le grand processus de remise en cause de l’expérience soviétique qui s’est imposé avec la fin de l’URSS en 1991. Pourtant, une analyse du système soviétique compris comme un capitalisme d’Etataurait permis de comprendre bien des choses, et en particulier les caractéristiques d’une trajectoire alternative dans le cadre d’un pays « semi-féodal et semi-colonial ». De fait, tout le débat sur la « nature de l’URSS » est ainsi passé à la trappe[8], en dépit de ce qu’il pouvait apporter à la compréhension des modes d’existence du capitalisme et à sa diversité, mais aussi aux alternatives possibles dans les stratégies économiques[9]. On peut penser qu’une partie des problèmes que l’on rencontre dans le débat contemporain provient de l’effet d’amnésie sur la connaissance accumulée dès années soixante à la fin des années quatre-vingt du siècle dernier, effet d’amnésie qui provient à la fois de l’émergence d’une nouvelle génération de militants politiques, et du nouveau contexte des luttes, contexte qui semblait exiger des connaissances nouvelles.

En fait, c’est le concept d’Etat « semi-colonial » qui apporte le plus de lumière sur la situation actuelle des pays européens. On peut considérer l’UE comme un système colonial mais dont la « métropole » ne pourrait être complètement identifiée. En cela ce « colonialisme » ou plus exactement ce « semi-colonialisme » n’est pas entièrement réductible à la situation de la fin du XIXème siècle et du début du XXème siècle. Si l’Allemagne apparaît comme le pays profitant le plus des structures de l’UE, cela n’implique pas que l’UE soit le système colonial de l’Allemagne. L’UE permet le déploiement de structures financières assurant le contrôle et la domination, et ces structures financières ne sont pas réductibles au capitalisme allemand. Il s’agit plus d’un « semi-colonialisme » que d’un colonialisme simple, en ceci que les pays de l’UE conserve, à des degrés divers, des marges d’autonomie. Certains de ses pays peuvent d’ailleurs se constituer en force néocoloniale envers les pays du « Sud », même si la logique de leurs actions est soumise, in fine, à l’approbation par le système semi-colonial. Le cas de la Grèce est spécifique en ce que, sous le joug des différents mémorandums, le pays est passé d’un statut semi-colonial à un statut qui est de plus en plus directement colonial.

Dans un pays en train de passer, ou déjà entièrement passé, sous la coupe d’un système semi-colonial, la question de la souveraineté devient dès lors cruciale. Elle concentre l’ensemble des luttes pour le changement économique et social. En un sens, on pouvait penser que Syriza l’avait compris quand il fait l’alliance avec l’ANEL à la suite des élections du 25 janvier. Mais, l’européisme est resté trop puissant à l’intérieur de ce parti.

 

La « gauche radicale » et la question de la rupture

La question fondamentale qui est désormais ouvertement posée aux différents mouvements de la « gauche radicale » est celle du degré de leur compréhension du cadre semi-colonial dans lesquels ils sont amener à lutter, et donc du caractère primordial de la lutte pour le recouvrement de la souveraineté. Cela implique une rupture avec l’européisme, et avec la religion de l’Euro. Mais cela n’implique pas que cela. De la prise en compte de cette situation découle en réalité non seulement une stratégie politique, comment reconstruire la souveraineté et avec quelles médiations, mais aussi une tactique, autrement dit quelles seront les alliances les mieux à même de porter ce projet politique.

Bien entendu, ces questions vont se concentrer en priorité sur le rapport à l’Euro, car il est désormais l’institution qui concentre largement le contenu semi-colonial de l’UE. De ce point de vue, il faut remarquer que certains des conseillers de Yanis Varoufakis ont changé leur position sur l’Euro et se prononcent désormais pour une rupture franche avec la monnaie unique[10]. Jean-Luc Mélenchon écrit quant à lui sur son blog : « toute tentative de changer l’Europe de l’intérieur est vouée à l’impuissance si ceux qui l’entreprennent ne sont pas près à tirer instantanément et totalement la leçon d’un échec, en rompant le cadre. Autrement dit aucun plan A n’a de chance sans plan B. Et quand vient l’heure du plan B il ne faut pas avoir la main qui tremble »[11]. Si ce texte à l’intérêt de monter la détermination en cas d’échec d’appliquer une politique de rupture, ce qui est un progrès par rapport à l’émission de juillet 2012 que nous avions faites Mélenchon et moi et où il n’évoquait le fameux « plan B » que comme un moyen de réaliser le « plan A », il montre que Mélenchon n’a pas encore tiré TOUTES les leçons du Diktat imposé à la Grèce. En réalité, aucun changement de l’UE de l’intérieur n’est possible. La « Gauche Radicale » doit se fixer comme objectif premier la rupture, au moins avec les institutions dont le contenu semi-colonial est le plus grand, c’est à dire l’Euro, et elle doit penser ses alliances politiques à partir de cet objectif. Pour elle, l’heure des choix est arrivée ; il faudra rompre ou se condamner à périr.

[1] Sapir J., « La Grèce, la gôche, la gauche (I) », note publiée sur RussEurope le 22 juillet 2015, http://russeurope.hypotheses.org/4138

[2] Voir Marlière P., « La gauche radicale en Europe : esquisse de portrait », in Jean-Numa Ducange, Philippe Marlière et Louis Weber, La gauche radicale en Europe, éditions du Croquant, Paris, collection « Enjeux et débats d’Espaces Marx », Paris, 2014.

[3] Boukharine N., L’Économie mondiale et l’impérialisme 1915. traduction. Paris, Anthropos, 1977. Voir, aussi, Christian SalmonLe Rêve mathématique de Nicolaï Boukharine, Paris, Le Sycomore, 1980.

[4] Kouvelakis S., interview donné à Sebastian Budgen, « Greece: The Struggle Continues » in Jacobin, 15 juillet 2015, https://www.jacobinmag.com/2015/07/tsipras-varoufakis-kouvelakis-syriza-euro-debt/

[5] Gianni A., « Il problema non è Tsipras ma questa Europa » in MicroMega, 22 juillet 2015, http://www.sinistrainrete.info/index.php?option=com_content&view/il-problema-non-e-tsipras-ma-questa-europa&catid=44:europa&Itemid=82

[6] Anderson P., « La débacle grecque », 22 juillet 2015,http://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/220715/la-debacle-grecque-par-perry-anderson

[7] Voir, Georges Haupt, Michael Lowy et Claude Weill, Les Marxistes et la question nationale, 1848-1914, Editions Maspéro, Paris, 1974.

[8] Sapir J., “Le débat sur la nature de l’URSS: lecture rétrospective d’un débat qui ne fut pas sans conséquences”, in R. Motamed-Nejad, (ed.), URSS et Russie – Rupture historique et continuité économique , PUF, Paris, 1997, pp. 81-115.

[9] Sapir J., L’économie mobilisée. Essai sur les économies de type soviétique, La Découverte, Paris, janvier 1990; (ouvrage publié en Allemagne, dans une version traduite et augmentée en 1992, Logik der Sowjetischen Ökonomie – Oder die Permanente Kriegswirtschaft, LIT Verlag, Munster et Hambourg

[10] Munevar D., « Why I’ve Changed My Mind About Grexit », in SocialEurope, 23 juillet 2015, http://www.socialeurope.eu/2015/07/why-ive-changed-my-mind-about-grexit/

[11] Mélenchon J-L, 23 juillet 2015,https://www.facebook.com/JLMelenchon/posts/10153499370008750

Source: http://www.les-crises.fr/la-grece-la-goche-la-gauche-i-par-jacques-sapir/


Sauvetage grec, « un nouveau traité de Versailles » pour Yanis Varoufakis

Tuesday 28 July 2015 at 00:02

Suite de la série…

Lundi 13 juillet 2015, 22:39

Exclusif : Alex McClintock

Image : L’ancien ministre des finances grec Yanis Varoufakis s’adresse à la presse après avoir déposé son bulletin lors du référendum sur l’austérité le 5 juillet 2015 à Athènes (MILOS BICANSKI/GETTY IMAGES)

Dans sa première interview depuis sa démission du poste de ministre des finances grec, Yanis Varoufakis a pris pour cible les créanciers de la Grèce, révélé le degré de préparation du pays à quitter l’euro et a alerté de la montée de l’extrême droite. Late Night Live vous en fait part.

Dans sa première interview depuis sa démission au début du mois, l’ancien ministre des finances grec Yanis Varoufakis décrit l’accord de sauvetage de 86 milliards accepté par le premier ministre Alexis Tsipras comme « un nouveau traité de Versailles ».

« C’est la politique de l’humiliation », a-t-il dit à Late Night Live. « La troïka a fait en sorte de lui faire ravaler chaque critique qu’il a prononcée sur la troïka pendant les cinq dernières années. Pas seulement ces six mois où nous avons été dans le gouvernement, mais dans les années précédentes.

Cela n’a rien à voir avec l’économie, rien à voir avec la remise en route de la Grèce vers la reprise. Ceci est un nouveau Traité de Versailles qui hante l’Europe à nouveau et le premier ministre le sait. Il sait qu’il aura tort s’il signe et tort s’il ne signe pas. »

L’accord, accepté lundi après 17 heures de pourparlers avec des leaders de la zone Euro, contient des conditions très dures, incluant des coupes dans les pensions de retraite, des augmentations fiscales et le transfert de biens publics dans un fonds de placement pour payer pour la recapitalisation des banques grecques.

M. Varoufakis a rejeté l’accord en utilisant les termes les plus forts possibles, le comparant au coup d’état de 1967 qui a instauré une dictature militaire dans la nation méditerranéenne.

« Dans le coup d’état le choix des armes utilisées pour abattre la démocratie a été alors les tanks. Eh bien, cette fois cela a été les banques. Les banques ont été utilisées par des pouvoirs étrangers pour prendre le contrôle du gouvernement. La différence est que cette fois ils prennent tous les biens publics. »

M. Varoufakis a suggéré que M. Tsipras provoque des élections anticipées plutôt que présenter l’accord devant le Parlement grec, disant qu’il serait « très étonné » si M. Tsipras voulait rester premier ministre.

Il a insisté, cependant, sur le fait que lui et M. Tsipras restent en bons termes et qu’il a adopté une attitude discrète au cours de la semaine dernière pour soutenir M. Tsipras et son successeur au ministère des finances, Euclid Tsakolotos.

« J’ai sauté plus qu’on ne m’a poussé », a dit M. Varoufakis, décrivant sa démission au lendemain immédiat du « non » au référendum du 6 juillet sur des termes du sauvetage similaires à ceux acceptés le lundi.

« Je suis entré ravi dans le bureau du premier ministre. J’étais sur un joli nuage poussé par les bons vents de l’enthousiasme du public pour la victoire de la démocratie grecque au référendum. Au moment où je suis entré dans le bureau du premier ministre, j’ai immédiatement senti un certain sentiment de résignation, une atmosphère chargée négativement. J’étais confronté à un air de défaite qui ne cadrait absolument pas avec ce qui se passait dehors.

À ce stade il fallait que je l’exprime au premier ministre : si vous voulez utiliser le buzz de la démocratie hors des portes de ce bâtiment, vous pouvez compter sur moi. Mais si d’un autre côté vous ne vous sentez pas capable de gérer ce « non » majestueux à une proposition irrationnelle de nos partenaires européens, je disparaîtrai simplement dans la nuit. »

L’ancien ministre des finances a aussi décrit les préparatifs secrets du gouvernement grec pour imprimer des drachmes au cas où le pays serait forcé à quitter l’euro.

« En tant que gouvernement responsable, nous savions pertinemment qu’il y avait une alliance significative à l’intérieur de l’Euro-groupe, et nous avons dû préparer des éventualités, » a-t-il dit. « Il fallait que nous ayons une petite équipe de personnes dans le secret qui créeraient le plan au cas où nous serions forcés à quitter l’union monétaire de la zone euro. »

« C’est évidemment un dilemme. Une fois que le plan commence a être mis en œuvre, une fois que vous passez de cinq personnes qui travaillent dessus à 500, le minimum nécessaire à sa mise en œuvre, cela devient de notoriété publique. Au moment où c’est de notoriété publique, la prophétie auto-réalisatrice crée sa propre dynamique… Nous n’avons jamais fait cette transition de cinq à 500. Nous n’avons jamais eu de mandat pour le faire. Nous n’avons jamais voulu le faire. Nous avions le modèle sur le papier mais il n’a jamais été activé. »

M. Varoufakis a dit qu’il resterait député d’arrière-ban au parlement grec, où il a « beaucoup plus d’espace de manœuvre et pour dire la vérité. » Il a cependant averti que l’austérité encouragera l’extrême droite du pays.

« Au parlement, je dois m’asseoir et regarder la droite de l’auditorium, où 10 nazis siègent, représentant Aube Dorée. Si notre parti, Syriza, qui a cultivé tant d’espoir en Grèce… si nous trahissons cet espoir et inclinons la tête devant cette nouvelle forme d’occupation postmoderne, alors je ne vois pas d’autre issue que le renforcement d’Aube Dorée. Ils vont hériter du manteau de l’élan anti-austérité, c’est tragique. »

« Le projet d’une démocratie européenne, d’une union démocratique de l’Union européenne, vient d’être victime d’une catastrophe majeure. »

Source : ABC, le 13/07/2015

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.


Source: http://www.les-crises.fr/sauvetage-grec-un-nouveau-traite-de-versailles-pour-lancien-ministre-des-finances-yanis-varoufakis/


L’histoire secrète d’une victoire des lobbies à Bruxelles, contre la santé publique

Monday 27 July 2015 at 02:06

Excellent article du Canard

Des échanges de mails révèlent comment l’industrie chimique a torpillé l’interdiction des perturbateurs endocriniens. Un récit perturbant…

Ce n’est plus du lobbying, c’est de l’art… A Bruxelles, l’industrie chi­mique a réussi à saboter l’interdic­tion des perturbateurs endocriniens. Ces composés chimiques que l’on retrouve par­tout, dans les plastiques, les tapis, les den­tifrices, les cosmétiques, les pesticides, et qui sont soupçonnés d’être responsables, même à très faible dose, de cancers, de troubles de la croissance et autres menus dégâts sur la santé.

Avec une maestria qui laisse baba, les lobbies ont reporté l’échéance d’au moins quatre ans. Dans un rapport rédigé en an­glais et publié le 20 mai, une organisation indépendante, Corporate Europe Observatory, dévoile les coulisses de ce feuille­ton. Des coulisses pas faciles à visiter : il a fallu deux ans à la journaliste française Stéphane Horel, coauteure du rapport, pour obtenir des milliers de pages de documents et plusieurs courriels croquignolets…

Experts gavés

Février 2013. L’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa, en anglais) s’apprête à publier un rapport étonnam­ment sympa pour l’industrie. A vous don­ner envie de déguster du perturbateur endocrinien au petit dej ! Pas si surprenant, en réalité : près de la moitié des 18 experts qui tiennent le stylo ont des liens d’intérêt étroits avec l’industrie, via des animations de colloques, des travaux de recherche ou des boulots de consultant, et les chèques qui vont avec. Manque de bol, au même moment, le 19 février exactement, le Programme des Nations unies pour l’en­vironnement (PNUE) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) publient leur propre rapport. Et leur conclusion dépote :

Les perturbateurs endocriniens constituent « une menace globale » sur la santé, « qui impose de trouver une solution ». C’est clair et tranché.

Avec leur avis tiédasse, les experts de l’Efsa ont l’air malin ! Et ils s’en rendent vite compte. Le 20 février, dans un courriel à ses confrères, l’un d’eux gémit : « Chers collègues, la vie est compliquée… Il est presque embarrassant de comparer notre version actuelle avec le rapport de l’OMS / PNUE. » Et de se lamenter, en dé­voilant toute leur cuisine, au passage : « Quand le rapport de l’OMS / PNUE sou­ligne certaines caractéristiques des pertur­bateurs endocriniens et les signale comme spécifiques, notre rapport, au contraire, les minimise (sic) ou évite de les mentionner (re-sic). »

L’humiliation ne s’arrête pas là :

Quand le rapport de l’OMS / PNUE par­vient à la conclusion que la méthode traditionnelle d’évaluation des risques des pro­duits chimiques est inadéquate [pour les perturbateurs endocriniens], nous arrivons à la conclusion exactement opposée. » Notre expert n’a plus qu’à se planquer sous la table : « Je suis heureux de ne pas avoir à être présent à la conférence de presse (…) pour défendre le rapport actuel (…), sachant que l’auditoire aura lu le rapport de l’OMS. Un vrai cauchemar !» Seule solution, sou­pire ce grand déprimé : « refaire notre rap­port ou, au moins, le modifier de manière significative… » Scientifiquement, bien sûr. Pif, paf, pouf, à quoi ça tient, la santé de 500 millions d’Européens…

Du rapport ou du cochon ?

A peine moins effondré, son collègue Ber­nard Bottex, qui supervise le travail du groupe, répond, en opinant du chef : « Les (…) conclusions actuelles où nous expliquons que les perturbateurs endocriniens peuvent être traités comme la plupart des autres substances chimiques (…) nous isolent du reste du monde et pourraient être difficiles à défendre, étant donné les incertitudes [et] le manque de données et de méthodes que nous avons identifiées. » Bref, on a fait un travail de cochon, et ça va se remarquer ! Il n’y a plus qu’à relancer la foire aux idées : « Toute suggestion de reformulation (…) sera bienvenue. » Ce détricotage de der­nière minute était sans doute trop com­pliqué : la conclusion du rapport n’a fina­lement pas bougé d’un iota…

Le ridicule ne tue pas. Avec l’aide de ses « experts », l’industrie repart au combat. Pour elle, il est vital de gagner du temps : le règlement européen sur les pesticides prévoit d’établir une nomenclature des perturbateurs endocriniens avant dé­cembre 2013. Une étape en forme de cou­peret : sitôt inscrits sur la liste, plusieurs pesticides, suivis d’un tas d’autres pro­duits, seront interdits. Pour les lobbies, il y a le feu au lac : un premier rapport de travail, peu favorable à leurs intérêts, a déjà été remis à la Commission euro­péenne. Commander un second rapport, inutile, à l’Efsa, était une première façon de jouer la montre. Mais il y a plus effi­cace pour gagner du temps : réclamer une étude d’impact sur le coût économique d’une éventuelle interdiction. Si c’est trop cher, tant pis pour les cancers ?

Dans les couloirs de Bruxelles, les croche-pattes de dernière minute s’en­chaînent. Le 7 juin 2013 à 9 h 30, la Di­rection générale de l’environnement tient une réunion cruciale pour approuver un projet de définition. A 14 h 04, le géant de la chimie Bayer la court-circuite et envoie un courriel au plus haut niveau de la Com­mission : au secrétariat général de Barroso. Une définition « inappropriée » des perturbateurs aurait des conséquences dé­sastreuses sur la « production agricole », plaide Bayer. Et de sortir une étude, en­core une, de son chapeau. Après le déjeu­ner — et l’ultime message de Bayer —, la réunion capote : aucune définition n’est, validée…

Vite ! Le fer est chaud, il n’y a plus qu’à le battre et à faire monter une « contro­verse scientifique » là où l’OMS et les Na­tions unies n’en voyaient aucune… Dix jours plus tard, le 17 juin 2013, un groupe de 56 experts envoie un courrier à Anne Glover, la conseillère scientifique de Barroso. Sor­tis de nulle part, sans aucune lettre de mis­sion, ces visionnaires descendent en flèche un projet qui n’est même pas encore ficelé : « Le projet actuel est basé sur une ignorance complète des principes de pharmacologie et de toxicologie. » Pas le cas de ces experts, qui connaissent leur sujet…

La victoire en chantage

Entre 2007 et 2012, le toxicologue Wolfgang Dekant, qui emmène les signataires, a cumulé à lui seul 18 contrats de re­cherche avec l’industrie. Un deuxième est consultant pour BASF. Un troisième, Gio Batta Gori, a empoché «plusieurs millions de dollars » avec l’industrie du tabac, selon des factures consultées par Stéphane Horel. Mais cela ne perturbe personne.

Le 2 juillet 2013, la secrétaire générale de Barroso, Catherine Day, se fend d’une très officielle note interne : étant donné les « vues divergentes » de la communauté scientifique « et les impacts potentiels sur l’industrie chimique et le commerce inter­national », il convient de mener « une étude d’impact », laquelle renvoie l’interdiction aux calendes grecques… Le soir même, elle gèle le processus.

Victoire sur toute la ligne, et même au-delà : l’étude d’impact vient seulement d’être lancée, deux ans plus tard. Aucune interdiction ne sera possible avant 2017. Bingo ! C’était tout le plan de l’industrie : entre-temps, les négociations sur l’accord transatlantique de libre-échange (Tafta) ont bien avancé et ont rendu l’interdiction encore plus compliquée, sous la pression américaine. Le lobbying, c’est une subtile chimie…

Source : Isabelle Barré, pour le Canard Enchaîné, juin 2015

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Une molécule qui imite, change ou bloque l’action d’une hormone et perturbe le fonctionnement de l’organisme

L’exposition à certaines substances toxiques peut par exemple perturber la fonction reproductrice, avec la création d’anomalies au niveau des organes reproducteurs, baisse de qualité du sperme, etc…

Ces substances se comportent comme des hormones et peuvent interagir avec notre système hormonal, d’où le terme de « perturbateurs endocriniens ».

Une liste des perturbateurs endocriniens

C’est bien joli tout ça, mais on entend parler de perturbateurs endocriniens à tout va, encore faudrait-il savoir identifier toutes les substances qui correspondent à ces fameux perturbateurs. Si les effets nocifs des perturbateurs endocriniens sont difficiles à prouver, la recherche actuelle se focalise sur 5 familles de substances douteuses:

Nous sommes tous exposés à ces substances toxiques via notre alimentation, notre respiration et notre peau. Par mesure de précaution, les autorités sanitaires ont défini pour certains perturbateurs endocriniens une dose maximale d’exposition. Or nos expositions sont tellement diverses et variables, qu’il est bien difficile de savoir exactement à quelle dose nous sommes réellement exposés quotidiennement, sans parler des effets combinés (exposition simultanée à plusieurs substances).

Dans quoi se cachent les perturbateurs endocriniens ?

1.Le bisphénol A

Le bisphénol A fait beaucoup parler de lui en ce moment, ce composé chimique rend les plastiques incassables et résistants à la chaleur. Autrement dit, il y en a partout et plus principalement dans les plastique dur et transparent, et même à l’intérieur des boîtes de conserve: bouteilles plastiques, gobelets, assiettes et couverts en plastique, lunettes de soleil, téléphones portables, jouets, cannettes…
S’il est aujourd’hui difficile d’y échapper, on peut au moins limiter l’usage des plastiques alimentaires : bouteilles et récipients en verre, plats en inox, etc… Et surtout, évitez de faire chauffer au four micro-ondes un plat ou une barquette en plastique, car ce fameux bisphénol A passe dans les aliments sous l’effet de la chaleur !

Evitez donc d’acheter des produits qui affichent les signes BPA ou PC (polycarbonate).

Nota : la Commission européenne a voté l’interdiction du bisphénol A dans les biberons au printemps 2011 ?!? Mais pas pour le reste, donc ce qui est dangereux pour bébé ne l’est pas pour maman ou papa ?…C’est à mourir de rire !

2. Les parabènes

Les parabènes sont des conservateurs très abondamment utilisés dans les cosmétiques, aliments, boissons et médicaments. Butylparaben ou propylparabens, également mentionné parahydroxybenzoate de propyl. Les parabènes se cachent aussi sous divers codes: E214, E215, E218, E219…

Pour ne pas se tromper au niveau de votre alimentation, privilégiez le bio pour limiter les conservateurs en général. Pour le reste lisez les étiquettes pour éviter les produits qui en contiennent. Encore plus simple, il suffit de privilégier les produits qui affichent clairement sur leur emballage : « sans parabènes ».

3. Les phtalates

Les phtalates contrairement au bisphénol A, sont incorporés aux plastiques pour leur donner de la souplesse, ils sont présents dans les emballages alimentaires, rideaux de douches, certains dispositifs médicaux, etc… Les phtalates sont également utilisés pour dénaturer l’alcool dans les produits cosmétiques et particulièrement les parfums.

Certains de ces phtalates sont interdits dans les jouets et les articles de puériculture. Une forte odeur de plastique dégagée par les produits neufs peuvent nous aider à repérer leur présence, les emballages alimentaires portant le code de recyclage n°3, le nom diéthylphtalates ou DET dans la liste des ingrédients des cosmétiques, les termes « alco(h)ol dénat » et « ethanol » indiquent également les présences de phtalates.

Nota : Pas de micro-ondes ni de lave-vaisselle pour ces plastiques, bien aérer longuement et souvent en cas d’achat de produit ou matériel plastique neuf, pour évacuer les fortes émanations de phtalates !

4. Les composés perfluorés

Les composés perfluorés sont présents dans les ustensiles de cuisson antiadhésifs, dans les produits imperméabilisés et traités antitaches (moquettes, vêtements, cartons alimentaires…).

Lorsque vous faites la cuisine, évitez de rayer les revêtements antiadhésifs et remplacez-les dès les premiers signes d’usure. Pour les vêtements et les tissus d’ameublement, favorisez les produits affichant « sans composés perfluorés » ou « sans PFOA ».

Au niveau de l’alimentation, les composés perfluorés se concentrent dans les poissons gras (saumon, maquereau…) en raison du rejet industriel.

5. Les composés polybromés

Moins connus, les composés polybromés sont des retardateurs de flamme, les (CPB & PBDE) ils sont incorporés dans les produits inflammables : sièges, télé, ordinateurs, vêtements, capitonnage, tissus d’ameublement…

Ils sont libérés petit à petit dans l’air ambiant, ils se concentrent dans l’habitacle de notre voiture, notre bureau et notre logement : il est donc impératif d’aérer tous les jours, et encore plus après l’achat de matériels et produits neufs.

Dans l’alimentation les composés polybromés s’accumulent dans les produits riches en graisses, grâce encore une fois aux rejets industriels. On en retrouve dans les poissons, le lait, la viande… Pour s’en protéger il suffit de privilégier les produits le plus naturels possibles.

Conclusion

En attendant que d’autres études évaluent et confirment les risques sanitaires réels dus à ces substances, nous devons éliminer au maximum ces molécules par quelques petits gestes quotidiens, dans le choix de notre alimentation, de nos cosmétiques, de nos ustensiles de cuisine, et en aérant quotidiennement notre logement, voiture et lieu de travail.

Source : bon-coin-santé

Voir aussi ici

Source: http://www.les-crises.fr/lhistoire-secrete-dune-victoire-des-lobbies-a-bruxelles-contre-la-sante-publique/


Notre bataille pour sauver la Grèce, par Yanis Varoufakis

Monday 27 July 2015 at 00:15

On aura cette semaine une petite série sur la traduction des interventions de Varoufakis, afin d’en apprendre un peu plus sur le dessous des tables, puisqu’on a bien vu que pour nos journalistes, les explications du contentieux UE-Grèce venait à 95 % des déclarations des ministres de l’UE… Une certaine idée de la déontologie j’imagine…

P.S. quelqu’un pourrait-il faire une traduction depuis le grec ? Me contacter merci…

Le texte intégral de la première interview de l’ancien ministre des finances grec depuis sa démission.

Par Harry Lambert – paru le 13 juillet 2015 à 17h37

Yanis Varoufakis se sent « aux anges » depuis que son rôle dans les pourparlers sur la crise s’est achevé. Photo : Getty

Cet entretien a eu lieu avant l’accord.

Harry Lambert : Alors, comment vous sentez-vous ?

Yanis Varoufakis : Je me sens aux anges – je n’ai plus à me soumettre à cet emploi du temps surchargé, absolument inhumain, tout simplement inconcevable. J’ai dormi deux heures par jour pendant cinq mois… Je suis également soulagé de ne plus avoir à supporter cette pression incroyable, d’avoir à négocier une position que je considère difficile à défendre, quand bien même j’arriverais à obtenir l’approbation de l’autre bord, si vous voyez ce que je veux dire.

HL : Comment était-ce ? Y a-t-il des aspects que vous avez appréciés ?

YV : Oh, beaucoup. Mais ce que cela vous permet de voir de l’intérieur… de voir vos pires craintes confirmées… Que les « puissances établies » s’adressent directement à vous, et qu’il en soit comme vous le craigniez – la situation était encore pire qu’on l’imaginait ! C’était donc amusant, d’être en première ligne.

HL : À quoi faites-vous allusion ?

YV : À l’absence totale de scrupules démocratiques, de la part des soi-disant défenseurs de la démocratie européenne. Et d’autre part le sentiment très clair que nous sommes sur la même longueur d’onde en ce qui concerne l’analyse – bien sûr, cela ne sortira plus maintenant. Et néanmoins d’avoir des personnages très puissants qui vous regardent dans le blanc des yeux et vous disent : « Vous avez raison dans ce que vous dites, mais ça ne nous empêchera pas de vous écraser de toute façon. »

HL : Vous avez déclaré que les créanciers s’opposaient à vous parce que « j’essaie de parler économie dans l’Euro-groupe, ce que personne ne fait ». Qu’est-ce qui s’est passé lorsque vous l’avez fait ?

YV : Ce n’est pas tant que cela ne se soit pas bien passé – c’est qu’il y avait un refus catégorique d’entrer dans des arguments économiques. Catégorique… Vous avancez un argument que vous avez vraiment travaillé – pour vous assurer qu’il est logiquement cohérent – et vous avez tout simplement des regards vides en réponse. C’est comme si vous n’aviez rien dit du tout. Ce que vous dites n’a aucun rapport avec ce qu’ils disent. Vous auriez tout aussi bien pu chanter l’hymne national suédois – vous obtiendriez la même réponse. Et c’est assez effrayant, pour qui est habitué aux débats universitaires… Le camp d’en face participe toujours. Là, il n’y avait aucune participation, d’aucune sorte. Ce n’était même pas de l’ennui, c’était comme si vous n’aviez tout simplement pas parlé.

HL : Lorsque vous êtes arrivé, début février, cela ne peut avoir été une position commune ?

YV : Oh, il y avait des gens très sympathiques personnellement parlant – vous savez, en privé, de façon informelle, particulièrement au FMI. [HL : « Au plus haut niveau ? » YV : « Au plus haut niveau, au plus haut niveau. »] Mais une fois dans le cadre de l’Euro-groupe, quelques politesses, et c’est fini, retour derrière les parapets de la version officielle.

[Mais] Schäuble a été cohérent tout du long. Son point de vue était le suivant : « Je ne vais pas discuter le programme – cela a été accepté par le gouvernement précédent, et nous ne pouvons tout simplement pas permettre à une élection de remettre tout en question. Pour la raison que nous avons des élections en permanence, nous sommes 19, si chaque élection devait changer quelque chose, les traités entre nous n’auraient aucune valeur. »

A ce point, il m’a fallu me dresser et dire : « Eh bien, peut-être dans ce cas devrions-nous suspendre toute élection dans les pays endettés », et il n’y a pas eu de réponse. La seule interprétation que je puisse donner [de leur point de vue], c’est : « Oui, ce serait une bonne idée, mais difficile à mettre en œuvre. Donc, soit vous signez sur la ligne en bas, soit vous disparaissez. »

HL : Et Merkel ?

YV : Il faut que vous compreniez que je n’ai jamais eu affaire à Merkel ; les ministres des finances parlent aux ministres des finances, les premiers ministres parlent aux chanceliers. D’après ce que j’ai compris, elle était différente. Elle a essayé d’apaiser le premier ministre [Tsipras] – elle lui a dit : « On trouvera une solution, ne vous inquiétez pas, je ne laisserai rien d’horrible se produire, faites simplement vos devoirs et travaillez avec les institutions, travaillez avec la Troïka, il ne peut y avoir d’impasse. »

Ce ne n’est pas ce que j’ai entendu de mon côté – le président de l’Euro-groupe et le Dr Schaüble ont été tous deux très clairs. Au bout d’un moment il m’a été signifié sans ambiguïté : « Ceci est un cheval, ou vous montez dessus, ou bien c’est mort. »

HL : D’accord, et quand était-ce ?

YV : Dès le début, dès le tout début. [La première rencontre a eu lieu début février.]

HL : Alors pourquoi faire traîner les choses jusqu’à l’été ?

YV : Eh bien, il n’y avait pas le choix. Notre gouvernement avait reçu un mandat pour négocier. Donc notre premier mandat était d’élaborer l’espace et le temps nécessaires pour négocier et obtenir un autre accord. C’était cela, notre mandat – négocier, pas en venir aux mains avec nos créanciers.

Les négociations ont duré une éternité, parce que de l’autre côté on refusait de négocier. Ils insistaient pour obtenir un « accord exhaustif », autrement dit ils voulaient parler de tout. Mon interprétation est que lorsque vous voulez tout aborder, vous ne voulez rien aborder. Mais nous avons continué comme ça.

Et voyez, il n’y avait aucune position proposée sur quoi que ce soit par eux, aucune. Ainsi ils ont … laissez-moi vous donner un exemple. Ils disaient : on a besoin de toutes vos données sur le chemin fiscal que la Grèce parcourt, on a besoin de toutes les données sur les entreprises publiques. Alors nous passons beaucoup de temps pour leur livrer toutes les données, répondre à des questionnaires, avoir des rencontres à n’en plus finir pour transférer les données.

C’était la phase numéro un. Dans la seconde, ils nous demandent ce que nous voulons faire au sujet de la TVA. Alors ils refusent notre proposition sans pour autant en faire une de leur côté. Et puis, avant que nous n’ayons une chance de conclure sur la TVA avec eux, ils changent de sujet, par exemple les privatisations. Ils nous demandent ce que nous voulons faire concernant les privatisations, nous faisons une proposition, ils la refusent. Alors ils changent de sujet à nouveau, les pensions par exemple, puis les marchés de produits, puis les relations employeurs-employés, puis toutes sortes d’autres choses, vous voyez ? C’était comme un chat qui chasse sa propre queue.

Nous avions l’impression, le gouvernement avait l’impression qu’on ne pouvait pas interrompre le processus. Voyez, ma suggestion dès le début était : Voilà un pays qui a fait naufrage, qui a fait naufrage il y a longtemps. … Sûrement, il faut réformer ce pays – on est d’accord là-dessus. Parce que le temps pressait et parce que pendant les négociations, la banque centrale extrayait la liquidité [des banques grecques] pour nous mettre sous pression, pour que nous pliions, ma proposition immuable à la Troïka était assez simple : mettons-nous en accord sur trois ou quatre réformes importantes au sujet desquelles il y a consensus, comme le système d’imposition, la TVA, et allons les mettre en œuvre sur-le-champ. Et vous allez réduire les restrictions de liquidité de la BCE. Vous voulez un accord total – continuons de négocier – et entre-temps, introduisons ces réformes au parlement, en accord entre nous et vous.

Et ils disaient : « Non, non, il faut que ce soit une révision totale. On ne mettra rien en œuvre si vous osez introduire une proposition de loi. On verra cela comme une action unilatérale et inamicale au processus de négociation. » Et alors, quelques mois plus tard, ils glisseront aux medias que nous n’avons pas réformé le pays et que nous perdions du temps ! Et ainsi … [gloussements] on était mené en bateau, dans les grandes largeurs.

Ainsi, le temps passant, la liquidité s’est tarie presque complètement, et nous étions en défaut ou en quasi-défaut de paiement envers le FMI, alors ils ont présenté leurs propositions qui étaient absolument impossibles… complètement non viables et toxiques.

HL : Avez-vous tenté de collaborer avec les gouvernements d’autres pays endettés ?

YV : La réponse est non, et la raison en est très simple : dès le tout début, ces pays en question nous déclaraient on ne peut plus ouvertement qu’ils étaient les ennemis les plus énergiques de notre gouvernement, dès le tout début. Et la raison, évidemment, c’était que notre succès aurait été leur pire cauchemar : si nous parvenions à négocier un meilleur accord pour la Grèce, cela les détruirait politiquement, ils auraient à se justifier devant leur propre peuple, expliquer pourquoi ils n’avaient pas négocié comme nous.

HL : Et quant à s’allier avec des partis qui avaient de la sympathie pour vous, comme Podemos ?

YV : Pas vraiment. Je veux dire, nous avions de bonnes relations avec eux mais ils ne pouvaient rien faire de toute façon – leur voix ne pouvait parvenir à l’intérieur de l’Euro-groupe. Et concrètement, plus ils s’exprimaient en notre faveur, plus le ministre des finances espagnol s’opposait à nous.

HL : Et George Osborne ? Quelle était la nature de vos relations avec lui ?

YV : Oh très bonnes, très agréables, excellentes. Mais il n’est pas dans le circuit, il ne fait pas partie de l’Euro-groupe. J’ai eu plusieurs fois l’occasion de discuter avec lui et vous pouviez voir une vraie empathie. Et effectivement, si vous lisez le Telegraph, les plus grands supporters de notre cause ont été les Tories ! A cause de leur Euroscepticisme, heu… ce n’est pas seulement de l’Euroscepticisme ; c’est une vision burkéenne de la souveraineté du Parlement – dans notre cas, il était très clair que notre Parlement était considéré comme quantité négligeable.

HL : Quel a été le principal problème s’agissant de la façon dont l’Euro-groupe fonctionne ?

YV : Pour prendre un exemple, il y a eu un moment où le président de l’Euro-groupe [Jeroen Dijsselbloem, le ministre des finances des Pays-Bas et président du MES, NdT] a décidé d’entrer en opposition avec nous et nous a effectivement réduits au silence et a fait comprendre que la Grèce était sur la voie de sortie de l’Euro-zone… Il existe une règle qui veut que tout communiqué de l’Euro-groupe doit recueillir l’unanimité et que le président ne peut décider de convoquer une réunion de l’Euro-zone et en exclure un état-membre. Et lui a dit : « Oh je suis sûr que je peux faire ça. » Alors j’ai demandé un avis juridique. Cela a créé une petite confusion. Pendant 5 à 10 minutes la réunion a été suspendue, des juristes, des officiels se sont mis à se parler les uns les autres, au téléphone, et finalement un expert quelconque s’est adressé à moi pour me dire ceci : « Eh bien, l’Euro-groupe n’a pas d’existence juridique, il n’existe aucun traité qui régit l’Euro-groupe. »

Nous sommes donc en présence d’un groupe sans existence juridique qui a rien moins que le pouvoir de décider de la vie des Européens. Personne ne peut y opposer quoi que ce soit étant donné qu’il n’existe pas légalement. Aucun compte rendu des débats n’est donc rédigé, tout est totalement confidentiel. Et donc aucun citoyen ne peut savoir ce qui s’y dit. … On y aborde des questions quasi de vie ou de mort et aucun membre n’a à répondre de quoi que ce soit à personne.

HL : Et le groupe est-il guidé par les attitudes allemandes ?

YV : Oh totalement. Pas les attitudes – par le ministre des finances allemand. Cela ressemble à un orchestre parfaitement accordé dont il serait le chef d’orchestre. La partition est parfaitement exécutée. Il peut arriver que l’orchestre fasse une fausse note, alors il intervient et tout rentre dans l’ordre.

HL : N’y a-t-il aucun contre-pouvoir à l’intérieur de l’Euro-groupe, est-ce que les Français peuvent s’y opposer ?

YV : Le ministre français des finances a été le seul à faire entendre quelques sons différents de la ligne allemande, des sons très subtils. Vous sentiez qu’il devait choisir ses mots avec précaution pour ne pas apparaitre comme un opposant. Et en dernière analyse, quand « Doc » Schäuble répondait et déterminait la ligne officielle, le ministre français finissait par se coucher et accepter.

HL : Parlons de votre bagage théorique, et de votre ouvrage sur Marx en 2013, lorsque vous disiez :

« Une sortie de la Grèce, du Portugal ou de l’Italie de la zone Euro entraînerait rapidement une dislocation du capitalisme européen, générant une région à surplus récessionnaire marquée à l’est du Rhin et au nord des Alpes, tandis que le reste de l’Europe serait en proie à une stagflation brutale. D’après vous, qui bénéficierait de cette évolution ? La gauche progressiste, se relevant telle un phénix des cendres des institutions européennes ? Ou les nazis d’Aube Dorée, les néofascistes de toutes sortes, les xénophobes et les voyous ? Je n’ai pas le moindre doute sur lequel des deux se débrouillerait le mieux d’une désintégration européenne. »

HL : … donc un Grexit ajouterait inévitablement de l’eau au moulin d’Aube Dorée, vous le pensez toujours ?

YV : Eh bien, écoutez, je ne crois pas à une version déterministe de l’Histoire. Syriza est maintenant une force dominante. Si nous arrivons à nous sortir de ce pétrin unis, et à organiser un Grexit de façon ordonnée… nous pourrions trouver une solution. Mais je ne suis pas sûr que nous puissions y arriver, parce que mettre en œuvre la dislocation d’une union monétaire requiert un grand niveau d’expertise, et je ne suis pas sûr que nous y arriverions en Grèce sans renforts extérieurs.

HL : Vous avez dû réfléchir à un Grexit dès le premier jour…

YV : Oui, tout à fait.

HL : … avait-on fait des préparatifs ?

YV : La réponse sera oui et non. Nous avions un petit groupe, un « cabinet de guerre » au sein du ministère, d’à peu près cinq personnes qui s’en occupaient : et donc nous avons travaillé en théorie, sur le papier, sur tout ce qui devait être fait [pour se préparer à un Grexit]. Mais c’est une chose de le faire à 4 ou 5 personnes, c’en est une toute autre de préparer le pays pour ça. Pour y préparer le pays, l’exécutif devait prendre une décision, et il ne l’a jamais prise.

HL : Et au cours de la semaine écoulée, était-ce une décision vers laquelle vous pensiez vous diriger [se préparer pour un Grexit] ?

YV : De mon point de vue, il nous fallait faire extrêmement attention à ne pas la mettre en branle. Je ne voulais pas en faire une prédiction auto-réalisatrice. Je ne voulais pas en faire une illustration de cette fameuse phrase de Nietzsche parlant de celui qui, s’il contemple trop l’abîme, sera à son tour contemplé par l’abîme. Mais j’ai également pensé que, du moment ou l’Euro-groupe avait fermé les banques, il nous fallait accélérer le processus.

HL : D’accord. Il restait donc deux options si je comprends bien – un Grexit immédiat ou imprimer des IOU et prendre le contrôle de la Banque Centrale [entraînant potentiellement mais pas nécessairement un Grexit] ?

YV : Bien sûr, bien sûr. Je n’ai jamais cru que nous devions aller directement vers une nouvelle devise. Mon opinion était – et c’était celle du gouvernement – que s’ils osaient fermer nos banques, ce que je considérais comme une manœuvre agressive d’une puissance incroyable, nous devions répondre de manière agressive mais sans franchir le point de non-retour.

Nous devions imprimer nos propres IOU ou tout au moins annoncer que nous allions le faire, nous devions faire un haircut sur les obligations du Trésor de 2012 que détient la BCE, ou annoncer que nous allions le faire ; et nous devions prendre le contrôle de la Banque Centrale. C’était le tryptique, les trois choses que nous devions faire si la BCE fermait nos banques.

… J’avais prévenu le gouvernement que c’est ce qui allait arriver [la fermeture des banques par la BCE] pendant un mois, dans le but de nous amener à signer un accord humiliant. Ce qui est arrivé – et de nombreux collègues n’en croyaient pas leurs yeux – c’est que ma recommandation de répondre « énergiquement » a été rejetée.

HL : Et il s’en est fallu de beaucoup ?

YV : Eh bien laissez-moi vous dire que sur six personnes nous étions deux… Comme ma recommandation a été rejetée, j’ai reçu pour ordre de fermer les banques en coordination avec la BCE et la Banque Centrale grecque, ce à quoi j’étais opposé, mais je l’ai quand même fait, parce que j’ai l’esprit d’équipe, je crois en la responsabilité collective.

Et puis le référendum est arrivé, et il nous a donné un coup de boost, un de ceux qui aurait justifié ce type de réponse énergique [son plan] à la BCE, mais cette nuit-là le gouvernement a décidé que la volonté populaire, ce « Non » très clair, ne devait pas servir à alimenter cette approche énergique.

Au contraire, il devait mener à de larges concessions au camp adverse : la réunion du conseil des leaders politiques, avec notre premier ministre acceptant d’emblée que quoi qu’il arrive, quoi que la partie adverse fasse, nous ne répondrions jamais d’une quelconque manière défiante. Et ça signifie essentiellement plier. … Vous cessez de négocier.

HL : Donc vous ne gardez plus beaucoup d’espoir que cet accord soit meilleur que celui de la semaine passée – il sera pire dans tous les cas ?

YV : Il sera pire dans tous les cas. Je garde espoir que notre gouvernement insistera sur la restructuration de la dette mais je ne vois pas comment le ministre des finances allemand pourrait s’engager là-dessus lors de la réunion à venir de l’Euro-groupe. S’il le fait, ce sera un miracle.

HL : Exactement – parce que, comme vous l’avez expliqué, votre marge de manœuvre a disparu à cet instant ?

YV : Je le crois, je le crois. A moins qu’il [Schaüble] prenne ses ordres de la chancelière. Il reste hautement improbable qu’elle s’engage là-dessus.

HL : Reprenons un peu de recul. Pourriez-vous expliquer, en termes profanes pour nos lecteurs, vos remarques à propos du Capital de Piketty ?

YV : Eh bien, laissez-moi exprimer en premier lieu mon embarras, parce que Piketty nous a grandement soutenus, moi et le gouvernement, et j’ai été affreux envers lui dans ma critique de son livre ! J’apprécie réellement ses positions au cours des derniers mois, et je compte le lui dire lorsque je le rencontrerai en septembre.

Mais je maintiens mes critiques envers son ouvrage. Son intuition est correcte. Son horreur des inégalités… [inaudible]. Toutefois, son analyse va à l’encontre de cet argument, pour autant que je sache. Pour la raison que, dans son livre, le modèle néoclassique du capitalisme ne laisse que très peu d’espace pour monter le dossier qu’il veut établir, sauf à construire un modèle doté d’un jeu de paramètres très détaillés, ce qui sape l’objet de son propos. En d’autres termes, si je m’opposais à sa thèse selon laquelle l’inégalité est inhérente au capitalisme, je serais capable de démonter son dossier en m’attaquant à son analyse.

HL : Je ne voudrais pas que nous entrions trop dans les détails, parce que cela sera coupé au montage…

YV : Oui…

HL : … mais il s’agit de sa façon de mesurer la richesse ?

YV : Oui, il utilise une définition du capital qui rend le capital impossible à appréhender – il y a donc contradiction dans les termes. [Cliquez ici http://yanisvaroufakis.eu/2014/10/08/6006/ pour accéder à la critique du Capital de Piketty par Y. Varoufakis.]

HL : Revenons à la crise. Je ne comprends que très peu de choses à propos de vos relations avec Tsipras…

YV : Je le connais depuis fin 2010, parce que j’étais un critique ardent du gouvernement à cette époque, même si fut un temps j’en avais été proche. J’étais proche de la famille Papandréou – je le suis toujours, d’une certaine façon – mais je suis devenu connu … A l’époque, c’était franchement nouveau qu’un ancien conseiller déclare : « Nous nous comportons comme si la faillite n’avait pas eu lieu, nous essayons de la couvrir avec des nouveaux prêts qui ne sont pas viables », ce genre de choses.

Cela a provoqué des remous à l’époque, et Tsipras était un jeune leader, essayant de comprendre ce qui se passait, ce qu’était la crise, et quelle position adopter.

HL : Y a-t-il eu une première rencontre dont vous vous rappeliez ?

YV : Oh, oui. C’était fin 2010, nous étions allés dans une cafétéria, nous étions trois, et dans mon souvenir il n’était pas clair dans sa position, à propos du drachme contre l’euro, sur les causes de la crise, et je l’ai vraiment, je dirais, « recadré » sur ce qui se passait. Et ça a été le début d’un dialogue qui s’est prolongé sur des années et qui a… Je crois que je l’ai aidé à mettre au point sa vision de ce qui devait être fait.

HL : Alors qu’est-ce que cela fait, après quatre ans et demi, de ne plus travailler à ses côtés ?

YV : Oh, je ne le vois pas comme ça, j’ai le sentiment que nous sommes très proches. Notre séparation s’est faite de façon très amicale. Il n’y a jamais eu de problème sérieux entre nous, pas jusqu’à aujourd’hui. Et je suis très proche d’Euclide Tsakalotos [le nouveau ministre des finances].

HL : Et je suppose que vous vous entretenez de nouveau avec eux cette semaine ?

YV : Je n’ai pas parlé au premier ministre cette semaine, ces deux derniers jours, mais je parle avec Euclide, oui, et je considère Euclide comme un proche, et vice-versa, et je ne l’envie pas du tout. [Rires]

HL : Seriez-vous choqué si Tsipras démissionnait ?

YV : Rien ne me choque ces derniers temps – notre zone Euro est un endroit très inhospitalier pour les honnêtes gens. Cela ne me choquerait pas davantage qu’il reste et accepte un très mauvais accord. Parce que je comprends qu’il se sente une obligation envers les gens qui le soutiennent, qui nous soutiennent, pour ne pas laisser ce pays devenir un état en faillite.

Mais je ne vais pas renier ma propre opinion, que j’ai formulée en 2010, selon laquelle ce pays devrait cesser de jouer les prolongations et de faire semblant, que nous devrions cesser de contracter de nouveaux emprunts et faire comme si le problème avait été résolu, alors que ce n’est pas le cas, alors que nous avons rendu notre dette encore moins viable en instaurant davantage d’austérité, laquelle contracte toujours plus notre économie et alourdit encore le fardeau des dépossédés, créant une crise humanitaire. C’est quelque chose que je ne peux pas accepter. Je n’en serai pas l’artisan.

HL : Dernière question : garderez-vous des liens avec certaines personnes avec lesquelles vous avez dû négocier ?

YV : Hum, je ne suis pas sûr. Je ne donnerai pas de noms, je n’ai pas envie de ruiner leur carrière ! [Rires]

Source : New Statesman, le 13/07/2015

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Source: http://www.les-crises.fr/transcription-integrale-de-linterview-de-yanis-varoufakis-notre-bataille-pour-sauver-la-grece/


François Hollande: contradictions et démagogie

Sunday 26 July 2015 at 01:11

Le dimanche 19 juillet, le Président de la République, M. François Hollande, a fait deux déclarations dans des registres très différents. La première fut faite dans le cadre d’une lettre envoyée au Journal du Dimanche à l’occasion du 90ème anniversaire de Jacques Delors[1]. Elle porte sur l’Europe, l’Union européenne et l’organisation de la zone Euro. La seconde déclaration a été faite en Lozère le samedi 19 juillet, où se rendait le Président de la République pour assister au passage du Tour de France[2]. Face à la grave crise que subissent les éleveurs français, il a appelé les français à manger de la viande française. En apparence ces deux déclarations ne portent pas sur la même chose. La première est l’annonce, honnête ou non, d’un projet de transformation de certaines des institutions européennes dans un sens plus « fédéral ». La seconde se voulait une réaction à la crise grave que subit l’élevage en France, qu’il s’agisse de la filière dite de la viande bovine, de la filière du lait ou de celle de la viande de porc. En apparence, il s’agit donc d’un problème de politique intérieure. Mais en apparence seulement. Car, demander aux français de consommer avant tout de la viande élevée et abattue en France revient en réalité à faire du protectionnisme et même plus, à se prononcer pour une forme d’autarcie. A l’inverse, l’avancée vers des institutions fédérales aboutit exactement à l’inverse. De fait, l’un des arguments avancés en faveur de l’Euro était qu’il devait permettre une unification des marchés des pays considérés, rendant impossible toute forme de protectionnisme. Jamais la contradiction dans le discours du Président François Hollande n’aura été aussi visible, aussi patente, aussi constitutive de sa vision de la politique.

François Hollande et le gouvernement de la zone Euro

L’annonce d’un changement des institutions européennes vient donc à la fin de cette lettre ; ce sont les dernières phrases : « J’ai proposé de reprendre l’idée de Jacques Delors du gouvernement de la zone euro et d’y ajouter un budget spécifique ainsi qu’un Parlement pour en assurer le contrôle démocratique. Partager une monnaie, c’est bien plus que vouloir une convergence. C’est un choix que 19 pays ont fait parce que c’était leur intérêt. Nul gouvernement d’ailleurs depuis quinze ans n’a pris la responsabilité d’en sortir. Ce choix appelle une organisation renforcée et avec les pays qui en décideront, une avant-garde. La France y est prête parce que, comme Jacques Delors nous l’a montré, elle se grandit toujours quand elle est à l’initiative de l’Europe ». Quand François Hollande propose un « parlement de la zone Euro » afin d’en assurer le « contrôle démocratique » il ne répond pas au problème réel de la zone Euro, qui s’est révélé dans la crise grecque. En fait, ce contrôle démocratique pourrait très bien se faire de manière bien plus simple. Si l’on pensait sérieusement que tel était le problème, on pourrait le résoudre en institutionnalisant l’Eurogroupe, qui rappelons le n’a pas d’existence légale dans les traités, et en le soumettant au contrôle du Parlement européen. Nul besoin de créer de nouvelles institutions ni un nouveau Parlement dont on avoue ne pas saisir très bien la relation avec celui déjà existant. Cette prolifération des institutions n’est pas sans évoquer certains souvenirs. On se souvient du mot de Georges Clémenceau, lors de débats sous la troisième république : « quand je veux enterrer un problème, je créé une commission ». Il s’applique à merveille à l’idée de François Hollande. Donc, si on voulait soumettre l’Eurogroupe à un contrôle démocratique, les représentants des 19 pays de la zone Euro pourraient se réunir en comité restreint et superviser les décisions de l’Eurogroupe, mais aussi de la Banque Centrale Européenne. Il n’est nullement nécessaire d’élire un nouveau Parlement. Reste la question du budget. Et cette question soulève un problème, celui-ci bien réel, mais fort différent de ce que prétend le Président de la République.

Mais quel est ce problème réel ? C’est bien le refus de la part de l’Allemagne de faire fonctionner une « union de transfert » dans le cadre de la zone Euro. Ce refus, on peut le regretter au nom de la « solidarité » qui est évoquée dans cette même lettre, mais on peut aussi le comprendre. Car il convient maintenant de dire qu’une union de transfert impliquerait une ponction budgétaire énorme sur l’Allemagne, calculée entre 8% et 12% du PIB par an. On voit que cela n’a rien à voir avec une « organisation renforcée » et une « avant garde ». C’est un problème très simple, que tout étudiant en licence en économie comprend. Si les régions d’un même pays, en dépit de leurs différences en richesse et en dotation de capital (matériel et humain) peuvent vivre avec la même monnaie, c’est grâce au budget qui transfert massivement des ressources. C’est la situation dans tous les pays, comme on l’a vu aux Etats-Unis, quand certains Etats ont connu des difficultés importantes, mais aussi en Allemagne ou en Inde, pour ne parler ici que des pays fédéraux. Sauf que la zone Euro n’est pas un pays, on le voit dans les différences de cultures politiques, et qu’elle refuse, en particulier dans le traité de l’UEM, la notion d’union de transfert. Dès lors, la seule forme d’ajustement possible passe par ce que l’on appelle des « dévaluations internes », autrement dit des politiques extrêmement récessives. Evoquer un « gouvernement de la zone Euro » sans aborder la question des transferts n’est donc pas honnête.

La raison d’un hors-sujet

Alors, pourquoi parler de « démocratie » quand il est évident que le problème primordial est celui des transferts ? Si le président de la République était un étudiant, on dirait qu’il est hors-sujet. Mais, François Hollande n’est pas stupide, contrairement à ce que d’aucuns croient. Il a parfaitement compris les conséquences désastreuses de l’accord, ou plus exactement du diktat, même Strauss-Kahn utilise ce terme, imposé à la Grèce. Il en voit surtout les conséquences politiques. Et, en politicien qu’il est il pense qu’il faut répondre à un problème politique par une « solution » politique. Sauf, que cette solution est d’une part superfétatoire – si l’on voulait réellement démocratiser la zone Euro cela peut se faire plus simplement autrement par l’institutionnalisation de l’Eurogroupe – et d’autre part ne répond nullement au problème fondamental de la zone Euro. Alors pourquoi a-t-il fait cette proposition ? Très probablement pour faire ce que l’on appelle de « l’enfumage ».

En fait, il prend position pour l’élection présidentielle de 2017 sous couvert de parler d’Europe. Et ceci se voit un peu plus haut dans sa lettre : « Les populistes se sont emparés de ce désenchantement et s’en prennent à l’Europe parce qu’ils ont peur du monde, parce qu’ils veulent revenir aux divisions, aux murs, aux grillages ». Dans cette phrase, il pratique la confusion à grande échelle. Tout d’abord en prétendant que la peur du monde explique le dégout de l’Union européenne. Puis en confondant délibérément Europe et Union européenne. Il est clair que ce sont les abus des institutions de l’UE qui engendrent un rejet aujourd’hui grandissant de l’UE. Et, la manière dont la Grèce a été traitée n’est que l’un de ces abus, mais assurément le plus grave et le plus spectaculaire. Il n’y a nulle « peur du monde ». Mais, il y a un rejet de ce que représentent Mme Merkel, M. Juncker et M. Dijsselbloem. Il entend enfermer les opposant à l’Euro, et les opposants à l’UE dans la cage des rétrogrades. Pourtant, quand on voit comment l’UE fonctionne, et comment la zone Euro est gérée, on peut se demander si les véritables rétrogrades ne sont pas justement Mme Merkel, M. Juncker et M. Dijsselbloem, mais aussi M. François Hollande. Si, le véritable obstacle au mouvement et au progrès n’est pas cette conception particulière des institutions européennes, que nous avons héritée de Jacques Delors, mais aussi de Jean Monnet. Cette vision technocratique et anti-démocratique de l’Europe, fondée sur la négation de la souveraineté, c’est une vision du XIXème siècle, c’est la vision du Congrès de Vienne, alors que nous en sommes au XXIème. En pratiquant toutes ces confusions, en s’abritant derrière ces rideaux de fumées, en s’inventant des ennemis imaginaires, François Hollande est bien entré en campagne électorale. Qu’il l’ait fait alors que ce déroulait ce drame symbolique du viol de la souveraineté grecque montre que s’il n’est pas dénué d’intelligence, son intelligence est étriquée, formatée, sèche, stérile, et dépourvue de ce qui devrait en être la principale qualité : la puissance d’imagination.

Manger français?

Et cela, on le constate dans la seconde déclaration. En effet, si on la prend au pied de la lettre ce n’est même pas une incitation au protectionnisme, mais directement à l’autarcie. Nous ne mangerions que ce que nous produirions. Si l’on veut alors parler de « peur du monde », de « grillages », nous sommes amplement servis. François Hollande aurait pu plaider pour une certaine qualité de nourriture, dire que la viande élevée en France présentait, dans certains cas, plus de garanties, tant sanitaires qu’alimentaires, sur des produits importés. Il aurait pu, au passage, condamner l’importation dans notre pays de ce modèle des usines à viande, comme les « fermes des mille vaches ». Notons, au passage, que cette position, qui est respectable et qui serait digne d’être soutenue, est parfaitement contradictoire avec le Traité Transatlantique, ou TAFTA, qui est actuellement négocié dans la plus parfaite obscurité, par la Commission européenne. François Hollande va-t-il donc appeler à rejeter ce traité, remettre en cause tout le processus européen ? Bien sur que non ; et pour justifier sa position il nous ressortira la grande tirade sur ceux qui «…s’en prennent à l’Europe parce qu’ils ont peur du monde, parce qu’ils veulent revenir aux divisions, aux murs, aux grillages ».

Il y a donc une incohérence profonde dans ce qu’a dit notre Président. Cette incohérence tient à ce qu’une partie du discours est juste : oui, la viande produite en France offre plutôt plus de garanties tant d’un point de vue sanitaire que d’un point de vue gustatif sur la viande produite dans de véritables « usines à viande » aux Etats-Unis ou en Allemagne. La meilleure réponse serait alors d’établir des critères quant aux conditions de production et de taxer, voire d’interdire, toute viande d’importation ne répondant pas à ces critères. Ce n’est plus de l’autarcie mais du protectionnisme, car cela autorise toujours l’importation de viandes moyennant qu’elles soient produites dans des conditions que nous trouvons acceptables. Notons aussi que l’on pourrait se coordonner avec des pays dont les exploitations agricoles sont du même type que le notre pour l’élaboration en commun de labels de qualités (les AOP et AOC) et une organisation du marché (avec des quotas pour le lait) qui permettraient à la fois de garantir un niveau de vie décent aux éleveurs sans les mettre sous perfusion avec des aides, ce que l’on va encore faire, et de maintenir un niveau de qualité adéquat. Cette politique impliquerait une restructuration de la commercialisation et impliquerait la constitution de filières intégrées allant de l’élevage à la commercialisation, sans doute de structures coopératives. Seulement, il faut savoir que tout ceci a été pratiqué et a été démantelé au nom de l’Union européenne et dans une logique dite « de grand marché ».

Entre le libre-échange intégral, qui provoque des désertifications de territoires, des crises alimentaires, qui conduit à accepter une alimentation au goût standardisé, et l’autarcie, il y a une solution, celle d’une maîtrise du marché par un protectionnisme intelligent qui associe dans des circuits courts les producteurs et les consommateurs. Mais, il faut savoir qu’une telle politique est aujourd’hui contradictoire avec les intérêts de certains pays, et certainement contradictoires avec les règles de l’Union européenne.

On mesure alors toute la contradiction révélée par ces deux déclarations quasi-simultanées de François Hollande. Mais, il y a une raison à cette contradiction.

François Hollande en campagne

Il est désormais évident que François Hollande est en campagne pour l’élection présidentielle de 2017. Mais, il n’a ni projet ni programme. Le parti qui est le sien, le parti dit « socialiste », est depuis plusieurs années en état de coma dépassé. Il n’y a plus de réflexion globale en son sein. Tous les courants où une certaine recherche intellectuelle, et quel que soit le jugement que l’on porte sur cette recherche, se faisait jour ont été marginalisés. Confronté à la montée du ressentiment contre les institutions européennes, ressentiment qui aujourd’hui touche des couches très différentes de la population française et qui est amplement justifié par leur mode de fonctionnement, il cherche des échappatoires, qui à enfourcher un fois le cheval de l’européisme le plus absolu, mais aussi le plus incohérent, et l’autre celui d’une revendication autarcique que pourraient reprendre à leur compte les identitaires. En vérité, l’absence de réponse aux problèmes de fond le contraint à ces exercices de styles. Et cela porte un nom en politique. On appelle cette tactique qui consiste à flatter chaque segment de son électorat, quitte à faire des promesses parfaitement contradictoires, et sans s’adresser au peuple tout entier, de la démagogie.

Ainsi, sous le couvert d’un homme politique qui se veut sérieux et responsable, c’est bien le masque du démagogue que l’on trouve. Mais, le démagogue est obligé pour ne pas être démasqué, d’accuser de démagogie ses adversaires. Ainsi, on verra, sans nul doute, fleurir dans le discours de François Hollande d’ici 2017 les accusations de démagogie et de populisme portées contre ses adversaires. Nous savons désormais que ces accusations ne font que refléter la démagogie profonde du projet de François Hollande.

[1] Journal du Dimance, François Hollande, « François Hollande : “Ce qui nous menace, ce n’est pas l’excès d’Europe, mais son insuffisance” », 19 juillet 2015,http://www.lejdd.fr/Politique/Francois-Hollande-Ce-qui-nous-menace-ce-n-est-pas-l-exces-d-Europe-mais-son-insuffisance-742998

[2] http://www.francetvinfo.fr/economie/crise/prix-de-la-viande-francois-hollande-en-appelle-au-patriotisme-des-consommateurs_1004661.html

Source : Jacques Sapir, pour son blog RussEurope, le 21 juillet 2015.

Source: http://www.les-crises.fr/francois-hollande-contradictions-et-demagogie/


Revue de presse du 26/07/2014

Sunday 26 July 2015 at 00:22

La sélection d’articles pour cette semaine. Bonne lecture.

Source: http://www.les-crises.fr/revue-de-presse-du-26072014/


“Nous sommes passés dans l’allégeance au suzerain américain”, par Jean-Pierre Chevènement

Saturday 25 July 2015 at 01:41

Entretien de Jean-Pierre Chevènement accordé à Marianne, vendredi 10 juillet 2015. Propos recueillis par Anne Rosencher et Alexis Lacroix.

"Nous sommes passés dans l'allégeance au suzerain américain"

MARIANNE : Les événements récents ont donné matière à s’interroger sur la place de la France, sur sa capacité à tenir son rang et à se faire entendre. On a notamment appris il y a deux semaines que la NSA avait mis sur écoutes trois présidents français. Ces révélations ont donné lieu à quelques froncements de sourcils mollement mis en scène. Notre réaction a-t-elle été suffisante ?

Jean-Pierre Chevènement : Le général de Gaulle eût été beaucoup plus sourcilleux. Depuis cette époque, et surtout depuis les événements du 11 septembre 2001, il s’est développé un système d’écoutes généralisées, facilité par les progrès fulgurants des technologies de l’espace et des télécommunications, contre lequel il est difficile de lutter. Mais dans cette affaire, ce qui m’a le plus frappé, ce fut la révélation que le Bundesnachrichtendienst – le service de renseignements allemand – avait effectué des écoutes pour le compte de la NSA. J’y ai vu là un partage du travail assez révélateur de la situation de l’Europe actuelle : l’Allemagne est la puissance décisionnaire en matière économique, financière, monétaire, mais pour tout ce qui relève de la grande politique, comme les relations avec la Russie, il faut qu’il soit clair que les Etats-Unis tiennent le manche. Dans l’affaire qui nous intéresse, on aurait été en droit d’attendre au moins que le gouvernement des Etats-Unis présente ses excuses à la France.

Barack Obama s’est excusé, non ?

Pas exactement. Le président des Etats-Unis s’est borné à promettre que son pays ne recommencerait plus. Pour comprendre dans quel monde nous vivons, il importe de replacer la pratique américaine des écoutes dans un cadre plus vaste. Au prétexte de lutte contre la corruption ou d’application des embargos qu’ils décrètent, les Etats-Unis, depuis une bonne dizaine d’années, se sont arrogé le droit de sanctionner financièrement les entreprises qui manquent à des obligations du droit américain. BNP Paribas ou Alstom, mais aussi la Société générale et le Crédit agricole, en ont fait les frais. Le droit extraterritorial qu’appliquent les Etats-Unis de punir les entreprises jugées « contrevenantes » exerce un effet de tétanisation sur une large part de nos banques. Beaucoup craignent de perdre leur accès au marché financier américain. Il en résulte un système d’allégeance et d’inféodation à l’échelle planétaire. Les Américains ont mis en place ce système très sophistiqué de punition extraterritoriale pour obliger les entreprises étrangères à relayer l’ordre international qu’ils décident souverainement. Les Européens y ont résisté, un peu : au milieu des années 2000, Dominique de Villepin, Jack Straw et Joschka Fischer, ministre des Affaires étrangères de leurs pays respectifs, ont tenté d’infléchir la politique de sanctions vis-à-vis de l’Iran. Leurs efforts n’ont toutefois pas résisté à la politique d’alignement mise en œuvre en France par Nicolas Sarkozy.

Qu’est-ce qui explique, selon vous, que nous ayons plié le genou face aux Etats-Unis ? L’arme économique est-elle devenue un moyen pour Washington d’asseoir son hégémonie politique ?

La tétanisation exercée sur nos entreprises commence à l’échelle des banques. Dès lors qu’un financement paraît un tant soit peu risqué vis-à-vis de potentielles sanctions américaines, les banques le refusent. L’effet dissuasif, par exemple, est manifeste en ce qui concerne les sanctions visant la Russie. Qui sait que les exportations de la France vers ce pays sont passées de 9 milliards en 2012 à 6,7 milliards en 2014 ? Et qu’au premier trimestre 2015, elles ont encore fléchi de 33% par rapport au premier trimestre 2014 ? Au travers de leur économie – qui représente environ 1/5è de l’économie mondiale –, mais surtout grâce au fait que le dollar reste la monnaie mondiale, les Etats-Unis se sont arrogé la possibilité de contrôler, à travers leur Département de la Justice, les activités de toutes les entreprises de la planète.

Vous dressez un constat d’intériorisation de la contrainte par nos entreprises et par nos dirigeants. Comment remédier à cet état de fait ?

Il importe d’abord de savoir si l’Europe n’est plus qu’une machine à relayer les sanctions décrétées par les Etats-Unis en fonction de leurs propres critères qui ne sont pas forcément les nôtres. Dans la crise ukrainienne qu’on aurait pu éviter si on n’avait pas placé l’Ukraine devant le dilemme absurde d’avoir à choisir entre l’Europe et la Russie, la France a essayé de réagir en mettant sur pied le format dit « de Normandie ». Cela a abouti aux deux accords de cessez-le-feu de Minsk. Or, les accords de Minsk II ne sont pas appliqués du fait de l’Ukraine, refusant le volet politique qui prévoit des élections dans les régions russophones de l’Est et une réforme constitutionnelle permettant une large décentralisation. Et voilà qu’on sanctionne la Russie ! C’est du Guignol ! Les sanctions ont été reconduites sans vrai débat le 29 juin par le Conseil européen. Ce système d’inféodation doit être contesté. L’ordre international n’est plus l’ordre formellement égalitaire de 1945. Au sein de l’ONU, toutes les nations sont en principe à égalité sauf, naturellement, au conseil de Sécurité où il y a cinq membres permanents sur quinze. Ce schéma légal s’est décomposé. L’« occidentalisme » qui prévaut désormais est un système d’allégeance au Suzerain américain.

D’ailleurs, l’OTAN n’a-t-il pas aussi pris la place de l’ONU ?

En effet, l’OTAN aimerait bien remplacer l’ONU, car, au sein des Nations unies, il y a le P2 (Etats-Unis/Grande-Bretagne), le P3 (avec la France) et le P5 (avec la Russie et la Chine). Le bon sens voudrait qu’on continue à travailler dans ce cadre, car nous ne sommes plus à l’époque de la guerre froide et nous pouvons discuter raisonnablement avec les Chinois et avec les Russes, comme cela a été fait avec succès pour le désarmement chimique de la Syrie. Mais les Américains, avec l’affaire ukrainienne, ont allumé un brandon de discorde entre l’Europe et la Russie ; ils cherchent à empêcher l’Europe d’exister politiquement et accessoirement de trouver une alternative à sa dépendance énergétique envers les pays du Golfe, qu’ils protègent. Pourtant, face à Daesh, une menace dirigée conjointement contre l’Europe, l’Amérique et la Russie, sans parler des populations musulmanes prises au piège, nous aurions bien besoin d’une coopération !

Justement, quelle analyse géopolitique faites-vous de l’émergence de Daesh ? Rejoignez-vous celle du premier ministre, Manuel Valls, qui a récemment parlé d’une «guerre de civilisation » ?

Manuel Valls utilise la terminologie du politologue américain Samuel Huntington – dont on oublie trop souvent qu’il ne préconisait pas le clash des civilisations, et qu’il voulait plutôt le prévenir… Manuel Valls n’a sûrement pas voulu alimenter cette Confrontation que cherche à provoquer le terrorisme djihadiste : l’Islam contre l’Occident. Nous ne sommes pas affrontés à une civilisation, mais au terrorisme. Les premières victimes du terrorisme, ce sont les musulmans. Les fractures et les divisions au sein des sociétés du monde arabo-musulman viennent de loin. Historiquement, deux réponses à l’Occident se sont faites jour au lendemain de l’effondrement de l’Empire ottoman : d’une part, la réponse moderniste, libérale ou socialiste, avec Nasser et le parti Baas ; d’autre part, la réponse identitaire, dont la création des Frères musulmans en 1928, par Hassan el-Banna, a été la première formulation, avant l’émergence du salafisme révolutionnaire avec El Quaïda puis Daesh. Si les Etats-Unis ont largement soutenu le wahhabisme, qui est le terreau du salafisme, la France, elle, jusqu’à la guerre du Golfe, en 1990, a toujours cherché à privilégier la voie moderniste au sein du monde arabe. Les deux Guerres du Golfe ont abouti à la destruction de l’Etat irakien et installé au pouvoir à Bagdad une majorité chiite. Le gouvernement El Maliki a mené une politique sectaire vis-à-vis des sunnites de l’ouest du pays. Abandonnés, ceux-ci, qui avaient joué un rôle dirigeant depuis l’installation de la dynastie hachémite en Irak en 1921, ont été jetés, par aveuglement, dans les bras d’Al-Qaida et de Daesh.

Que faire face à ce que l’islamologue Mohammed Arkoun appellait «l’extension de la pandémie djihadiste», et qui arrive aux portes de l’Europe, dans le Maghreb francophone et en Libye ?

L’action de la France avait, jusqu’ici, largement contribué à soustraire le Maghreb à ce que le général de Gaulle avait appelé «les malheurs grandissants» qui se sont faits jour au Proche et Moyen Orient après 1967. Il faut reconnaître, ensuite, que la guerre de Nicolas Sarkozy contre la Libye de Kadhafi, a été une imbécillité – mais j’ai été bien seul à le dire alors. J’ai été le seul sénateur de gauche, avec les communistes, à ne pas voter la prolongation de l’opération française en 2011… Aujourd’hui, les troubles s’étendent au Maghreb. La malheureuse Tunisie a été frappée par deux fois en trois mois par le terrorisme djihadiste. Et je songe avec inquiétude à l’Algérie, où, en dépit des efforts des autorités, l’on observe dans le M’zab des tensions intercommunautaires entre les Mozabites et les Arabes chaambi. Pour toutes ces raisons, il y a urgence à réinventer vis-à-vis du monde arabo-musulman une politique qui soit la nôtre au Moyen-Orient, faite de prudence et de raison. Nous en sommes loin. La France a un rôle de médiation à jouer.

La deuxième actualité qui donne à réfléchir aux questions de souveraineté est la crise européenne liée à la dette grecque. Que traduisent, selon vous, les rebondissements de ces derniers jours ? 

Pour que les choses soient claires, j’ai toujours considéré que la monnaie unique comportait un vice originel dont elle ne peut pas plus se défaire que l’homme du pêché originel, selon les écritures…

C’est-à-dire ?

Le vice tient à ce que l’euro juxtapose des pays très hétérogènes, du point de vue économique, mais aussi au regard de leur culture et de leurs repères historiques. L’Europe est faite de nations. Nous ne sommes aux Etats-Unis d’Amérique, où il y avait treize colonies britanniques, mais dans un continent où il existe une bonne trentaine de peuples. L’erreur initiale, il faut donc chercher très en amont… Bien avant la création de l’euro…

C’est ce que vous avez nommé, dans un de vos livres, « la faute de Monsieur Monnet» ?

En effet, la méthode choisie par Jean Monnet a consisté à créer une suite de petits faits accomplis censés conduire à ce que Robert Schuman nommait une « solidarité croissante des peuples européens ». Qui peut être contre une « solidarité croissante des peuples européens » ? Moi même je suis pour ! Mais, dans l’optique de Jean Monnet, il fallait créer progressivement l’irréversible en agissant par-dessus la tête des Etats nationaux en confiant à la Commission le monopole de la proposition législative ou réglementaire : on a ainsi fait une Europe technocratique se substituant aux nations. Avec la monnaie unique, les économies étaient censées converger, de facto. Or c’est le contraire qui est arrivé : les économies ont divergé. Pas seulement entre l’Allemagne et la Grèce, mais aussi avec la France.

Qu’aurait-on dû faire, selon vous ?

Plutôt qu’une monnaie unique, c’est une monnaie commune que nous aurions dû mettre en place. Les peuples auraient ainsi pu garder leurs monnaies sur les territoires nationaux et faire devise commune à l’extérieur. Vous savez comment une option a été choisie, et l’autre, écartée ? Tout s’est passé lors d’une conversation entre François Mitterrand et Pierre Bérégovoy au début de 1989. Le second a expliqué au premier qu’il y avait le choix entre deux solutions (monnaie commune ou monnaie unique). «  – Qui est pour la monnaie commune ?, demande le président.
- Les Anglais, répond son ministre de l’Economie.
- Et qui est pour la monnaie unique ?
- Les Allemands et tous les autres
- Eh bien, prenez la formule qui a le soutien d’une majorité. »
Le résultat ? Depuis 2007, le PNB de la France est stagnant. Celui de l’Italie a baissé de 9%, celui du Portugal et de l’Espagne de 15%, celui de la Grèce de 25%… Le propre de la monnaie unique, en l’absence de mécanismes correctifs que les Allemands rejettent, est d’aggraver les divergences entre les régions productives et riches qui prospèrent, et les régions sous-productives et pauvres qui s’appauvrissent encore. Donc de promouvoir la mezzogiornisation de l’Europe.

Est-ce à dire que la perspective de rester dans l’euro nuirait à la Grèce et à son économie ? 

Je pense qu’il y a deux solutions. Si l’on veut absolument garder la Grèce dans la monnaie unique, il serait raisonnable d’abattre sa dette d’environ un tiers. Car il est impossible pour ce pays de rembourser une dette qui représente aujourd’hui 177% de son PIB. Mais les créanciers l’accepteront-ils ? Je précise que ces créanciers sont aujourd’hui des créanciers publics, car ils se sont substitués aux créanciers privés, les banques, principalement françaises et allemandes, qui ont pu retirer leurs billes en mai 2010 ! Mais les institutions européennes ont refusé toute discussion sur la dette.

Pourquoi, d’après vous ? Par idéologie ?

Il est sans doute très difficile de se mettre d’accord à dix-huit ou à dix-neuf. Mais il y avait surtout des attitudes fermées, caractéristiques de certains pays du Nord qui veulent par avance donner une leçon aux pays dits du « club Med ». Par conséquent, aucun assouplissement n’a été introduit, bien que la France ait plaidé pour que l’on discute du sujet « plus tard ».

La deuxième solution serait la « sortie amicale » de la Grèce hors de la monnaie unique, assortie du maintien d’un lien avec l’euro, soit une dévaluation de 30% qui restaurerait la compétitivité perdue du pays, sans impliquer une politique d’austérité insupportable et sans perspective. Parallèlement, la part de leur dette que les Grecs ne sont pas en mesure de rembourser, serait écrêtée à due proportion, et le pays se verrait doté d’une euro-drachme qui pourrait lui rendre sa compétitivité, surtout si l’Europe l’aidait via des fonds structurels à passer le premier choc du renchérissement des importations et notamment de la facture énergétique.

Vous avez appelé récemment à une recomposition politique. Existe-t-il une fraternité des non alignés ?

La tâche que je me donne est très ambitieuse. Elle consiste à faire émerger un nouveau logiciel à la place du logiciel néo-libéral maquillé aux couleurs européistes qui a failli, ainsi que chaque citoyen peut le constater. Dans de nombreux domaines, il est possible de faire évoluer certains leaders politiques. Alors, dans quel espace ? J’ai cité deux points de repères, mais ce sont des marqueurs : j’ai dit, de Jean-Luc Mélenchon à Nicolas Dupont-Aignan. Contrairement à ce qu’ont voulu faire croire certaines âmes peu délicates, le barycentre n’est pas forcément du côté de Dupont-Aignan, bien que ce soit un homme politique à mes yeux très respectable et courageux.

Vous êtes aussi d’accord quand il va soutenir Robert Ménard à Béziers, ou quand il semble faire des petits appels des pieds au FN, notamment en disant que Marine Le Pen aurait sa place dans un gouvernement qu’il dirigerait ? 

Evidemment non. Ce sont, selon mes recherches, des erreurs commises en 2012, au plus fort de la campagne des législatives, mais qui sont montées en épingle pour déformer et discréditer son projet. Moi je juge Dupont-Aignan sur le fond de ses orientations qui tendent à créer une véritable alternative républicaine, la seule qui puisse faire reculer le FN. Il faudrait que ceux qui, par leur politique, ont fait le lit du FN depuis 1983, cessent leurs manipulations pour éteindre toute contestation de la même politique désastreuse qu’ils poursuivent depuis si longtemps.

Florian Philippot, le numéro 2 de ce parti, se réclame souvent de vous…

Il se réclame de moi… Pour ma part, je ne me réclame pas de lui. L’accès du FN au pouvoir serait désastreux pour la France et pour son image dans le monde. J’ajoute que leur passé est si chargé que je vois pas comment un honnête homme peut s’y fourvoyer. Pour ma part je suis pour un dialogue sans exclusive. Les limites que j’ai tracées laissent beaucoup d’espace. Un homme comme Manuel Valls, par exemple, me semble avoir une bonne compréhension de ce que peut apporter, à la gauche et surtout au pays, l’idée républicaine …

Vous dites cela car, comme en témoigne le portrait de Clemenceau qui orne votre bureau, vous partagez avec le premier ministre une commune admiration pour le Tigre ?

Certes, mais pas seulement ! Valls, dont je n’épouse évidemment pas toutes les orientations, notamment en matière économique, est quelqu’un qui s’exprime souvent avec autorité et bon sens. En tant qu’ancien ministre de l’Intérieur, j’observe qu’il est dans le juste sur les questions qui ont trait au régalien. Et sur le reste, j’ai le sentiment qu’il possède une certaine aptitude à progresser. Je pense qu’il peut évoluer sur des sujets comme l’euro par exemple. Dans les deux années qui viennent, il va falloir rassembler les talents et les énergies pour bâtir un nouveau logiciel. Le mot de Mendes France m’a toujours paru pertinent : « il n’y a pas de politique sans risque, mais il y a des politiques sans chance. » Et je ne crois pas que la conjonction des astres – bas taux d’intérêt, faiblesse de l’euro et bas prix du pétrole – soit faite pour durer.

Source : Jean-Pierre Chevénement, pour son blog www.chevenement.fr, le 10 juillet 2015.

Source: http://www.les-crises.fr/nous-sommes-passes-dans-lallegeance-au-suzerain-americain-par-jean-pierre-chevenement/