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Le terrorisme ne se combat pas par la guerre, par Pierre Conesa

Saturday 24 January 2015 at 00:01

Je vous propose aujourd’hui une excellente interview de Pierre Conesa, spécialiste des questions stratégiques internationales en particulier militaires, réalisée par l’excellente chaine Youtube ThinkerView.

Eh, tout d’un coup, on n’est pas mieux ici que sur LeMonde.fr, non ? :)

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Comment lutter contre la radicalisation ? Deux semaines après les attentats qui ont fait 17 morts en France, la question est au centre du débat. Pour Pierre Conesa, ex-haut fonctionnaire au ministère de la Défense et auteur d’un rapport sur ce sujet, il faut d’abord s’appuyer sur “les élites musulmanes”. Autre priorité : se resituer sur la scène internationale.

“Quelle politique de contre-radicalisation ?” C’est le titre du rapport rendu par Pierre Conesa fin décembre 2014 à la Fondation d’aide aux victimes du terrorisme. Après le choc provoqué par les attentats meurtiers des 7 et 9 janvier derniers à Paris, c’est la question de l’après qui se pose. Et notamment celle de la lutte contre la radicalisation.

Objectif n°1 : désigner la cible

Pour Pierre Conesa, ancien haut fonctionnaire au ministère de la Défense, l’objectif premier d’une politique de contre-radicalisation est de “désigner la cible“, car “c’est le seul moyen de faire comprendre que la composante musulmane de la société française n’est pas concernée dans sa totalité par ces comportements“.

La cible, pour ce spécialiste des questions stratégiques internationales, a un nom : le salafisme. “Le salafisme est une idéologie propagée par l’Arabie saoudite dans les années 1980-90 pour lutter contre les Frères musulmans, qui avaient fait l’erreur de soutenir Saddam Hussein pendant la guerre du Golfe. Le salafisme, abondé par l’argent de l’Arabie saoudite, a propagé partout des mosquées avec des imams salafistes, y compris en Algérie, et nos amis algériens l’ont payé“.

Inutile donc de stigmatiser toute une communauté. Au contraire, selon Pierre Conesa, il faut s’appuyer sur la “classe moyenne musulmane“. Une démarche qui oblige à comprendre d’abord les racines de ces mouvements de ré-islamisation.

Les “reborn muslims”, des enfants de parents “trahis par la République”

Je voudrais rappeler un épisode qu’on a vécu dans les années 1980, c’est la Marche des beurs, qui était sur la thématique ‘liberté, égalité, fraternité’. La réponse du Parti socialiste, à l’époque, a été de constituer SOS racisme avec aucun des leaders de la Marche. Et ça, c’est le genre de choses qui a fait que les enfants de ces gens-là, qui avaient cru à la République, se sont ré-islamisés. Donc les “reborn muslims”, ceux qui vont ensuite donner naissance à ces salafistes, sont des enfants dont les parents ont été trahis par la République“.

Pour l’auteur du rapport “Quelle politique de contre-radicalisation ?”, il est urgent de trouver un interlocuteur crédible dans la communauté musulmane, car elle est le réseau le plus “avancé, puisque c’est elle qui, à travers les imams, les théologiens, les présidents d’associations, les travailleurs sociaux, connaît la communauté. Or quel est leur interlocuteur aujourd’hui ? Le CFCM (Conseil Français du Culte Musulman), mais c’est une structure qui ne fonctionne pas“.

Au coeur de la politique de contre-radicalisation, il y a donc la communauté musulmane. “On ne va pas définir une politique de contre-radicalisation sans les élites musulmanes. Il y a des volets entiers qui ne relèvent pas du gouvernement. Ce n’est pas le ministre de l’Intérieur  qui va tenir un discours théologique. Donc aujourd’hui construire cette interface est une première chose“.

Une nouvelle politique extérieure : “le terrorisme ne se combat pas par la guerre”

Au-delà de la politique intérieure, la France doit aussi “se resituer complètement sur la scène internationale“, poursuit Pierre Conesa. ”Autre aspect important, c’est la perception de l’ensemble de la communauté sur les ratés de la politique extérieure. On a depuis une dizaine d’années utilisé la force armée pour aller sur des tas de théâtres extérieurs pour lesquels aujourd’hui il n’y a aucun résultat positif. Le terrorisme ne se combat pas par la guerre. Il ne se combat pas non plus par l’augmentation des budgets de la police et du renseignement. C’est un des volets seulement“.

Source : France Info

Source: http://www.les-crises.fr/le-terrorisme-ne-se-combat-pas-par-la-guerre-par-pierre-conesa/


Revue de presse du 24/01/2015

Saturday 24 January 2015 at 00:00

Cette semaine la revue rapporte notamment les contradictions de quelques acteurs entre le passé et le présent : les USA et “l’État Islamique”; Hollande et l’utilisation du terrorisme. Parallèlement les prétextes à moins de démocratie ne manquent pas. Les articles du thème Réflexion seront donc d’autant plus bienvenus, sans oublier les suites de 2 “feuilletons”. Bonne lecture.

Source: http://www.les-crises.fr/revue-de-presse-du-24-01-2015/


[Hold-Up à 1 100 000 millions d'€] QE : comment la BCE se moque du monde !

Friday 23 January 2015 at 01:00

Je réagis rapidement à ce (nouveau) scandale bancaire.

Comme la presse a souvent écrit des bêtises, je vous renvoie vers le communiqué de presse de la BCE

Que va faire la BCE ?

Mario Draghi a annoncé un programme de rachat d’actifs de 60 milliards d’euros par mois de mars 2015 jusqu’à fin septembre 2016, soit un QE à plus de 1 100 milliards d’euros au total.

Les achats d’obligations souveraines seront réalisés au prorata de la répartition du capital de la BCE, c’est-à-dire qu’un montant réduit sera consacré au rachat des dettes des plus petits pays comme la Grèce. Ils concerneront les obligations des États membres de la zone euro et des Institutions européennes.

(Cela fait quand même la bagatelle maximale de 220 Md€ pour la France – soit presque 4 années d’impôt sur le revenu !!!)

La BCE achètera des obligations de 2 à 30 ans

Les taux des obligations à dix ans sont les plus souvent cités en référence, mais les interventions de la BCE porteront sur toutes les maturités : aussi bien sur des dettes à deux ans que sur des dettes à trente ans.

Pour ne pas déstabiliser les marchés, il est indiqué que la BCE ne rachètera sur le marché secondaire pas plus que 25 % du montant de chaque émission obligataire des différents États, et pas plus de 33% de la dette totale de chaque émetteur…

Les risques ne seront partagés que sur 20% des titres achetés

Dans le cadre du vaste programme d’achats d’actifs lancé jeudi par la BCE, seuls 20% des titres achetés seront susceptibles de provoquer des pertes assumées collectivement par l’ensemble des États de la zone euro, a annoncé Mario Draghi.

“20% des achats d’actifs supplémentaires seront soumis à un régime de partage des risques”, a expliqué Draghi, limitant ainsi le degré de solidarité entre contribuables européens lors des futurs achats massifs de dette publique et privée, qui doivent commencer dès mars prochain.

On notera que même les Echos n’ont rien compris… :

(bas, on ne parle que de 600 Md€ de solidarité en + ou en -)

Pourtant, le reste des journaux a compris, et la BCE est claire :

“En ce qui concerne le partage des pertes hypothétiques, le Conseil des gouverneurs a décidé que les achats de titres des institutions européennes (qui s’élèveront à 12 % des achats d’actifs supplémentaires et qui seront effectués par les banques centrales nationales) seront soumis au partage des pertes. Les autres achats d’actifs supplémentaires réalisés par les BCN ne seront pas soumis au partage des pertes. La BCE détiendra 8 % des achats d’actifs supplémentaires. Cela signifie que 20 % de ces achats supplémentaires feront l’objet d’un régime de partage des risques.”

Ainsi, ces 20 % se scindent en 12 % des achats concerneront les obligations des Institutions Européennes (donc a priori les institutions type MES servant à boucher les trous précédents…) et 8 % achetés directement par la BCE.

Les 80 % restant sont achetés directement par les banques centrales de chaque pays, SANS AUCUNE SOLIDARITÉ européenne !

Et donc cela revient à dire que c’est chaque banque centrale nationale qui va racheter les obligations de son propre gouvernement sur le marché secondaire…

C’est une vraie innovation (et j’avoue ne même pas voir comment c’est juridiquement possible) : jusqu’à présent, l’EuroSystème (= toutes les banques centrales nationales) était à 100 % solidaire…

D’où ce commentaire incroyable :

P.S. s’il y a des tabous, c’est pour une raison. L’avenir nous remontrera pourquoi…

Bah oui : on détricote 80 % de la solidarité, donc c’est un progrès vers l’Union.

Cela me semble être au contraire un sacré pas vers la dissolution de l’euro !

Lors de la fin de l’euro, ils nous diront encore que c’est une belle occasion d’aller vers plus d’union, vous verrez…

Bref, il ne faut pas s’étonner dès lors que “L’usage d’un tel programme comme instrument de politique monétaire a fait « l’unanimité » parmi les 25 membres du Conseil, a précisé Mario Draghi, et le choix de l’enclencher dès mars a seulement fait « consensus », car certains membres du Conseil ne voyaient pas l’urgence d’agir dès maintenant.”
L’Allemagne traine les pieds, mais elle ne s’est pas opposée ici à la mesure, vu que, au pire du pire, ne lui couterait qu’une cinquantaine de milliards – vu que 80 % de pertes seront pour les pays acheteurs de dette…

Hein ?

Bon, en résumé : la BCE va faire tourner la planche à billets (on appelle ça QE pour que les gens ne comprennent pas) pour racheter des dettes publiques à ceux qui en ont déjà acheté.

Et ça sert à quoi ?

1. Officiellement, “c’est pour lutter contre la déflation rampante” – et donc pour faire monter les prix.

En effet, c’est exactement ce qui s’est passé aux États-Unis, précurseurs :

Ah non, flûte – Caramba, encore raté…

P.S. je signale que ce n’est pas parce que cela semble marcher au début qu’il y a lien – on peut s’amuser à faire dire n’importe quoi à de tels graphiques, en mettant n’importe quelle donnée. En revanche, c’est un excellent moyen de “prouver négativement” qu’il n’y a pas de lien, quand on voit une divergence majeure comme ici…

Pourquoi cela ne marche-t-il pas ?

Il est vrai, qu’en général, par le passé, quand on faisait tourner la planche à billets, cela faisait de l’inflation. Mais pas là.

C’est lié au fait qu’on a désormais une énorme économie financière, au dessus-de l’économie réelle, qui modifie les flux financiers.

Economie réelle financière

Mais en fait, le principe est toujours vrai, simplement on a une mauvaise définition.

Car on appelle inflation l’”évolution des prix à la consommation”, donc ce que vous achetez tous les jours.

Et on ne compte pas là dedans les prix des actifs : actions, obligations, immobilier…

Regardez, on vous serine que la BCE a terrassé l’inflation depuis 20 ans (donc “que les prix ont peu augmenté”), mais si vous avez acheté un bien immobilier dans cette période, vous vous êtes normalement aperçu qu’il y avait un petit souci dans sa définition de l’inflation… Et vous auriez sans doute préféré une baguette plus chère mais les prix immobiliers de 1995…

C’est un peu comme si je disais qu’actuellement, on a une déflation cataclysmique de – 50 % – en vous précisant que, bien entendu, j’appelle “inflation” l’évolution des seuls prix du pétrole…

Et en fait, dans l’économie financiarisée actuelle, les actions de la banque centrale ont bien tendance à faire de l’inflation – mais de l’inflation des actifs. J’avais analysé ceci pour la Suisse il y a 2 ans (au vu des ses magnifiques séries historiques) :

Masse monétaire inflation suisse

Et quand on voit le cours actuel des actions (records historiques – ce qui est clairement du délire vu le contexte économique !!), des obligations, de l’immobilier, des taux d’intérêts, on voit bien qu’il y a bien un fort effet inflationniste – mais des actifs.

2. on a droit aussi à “c’est pour relancer la croissance

J’imagine que c’est de nouveau au vu du phénoménal succès américain :

Ah non, flûte – Caramba, encore raté…

Si des types dans une cave à Francfort pouvaient relancer la croissance, cela se saurait…

Je cite donc le grand et regretté J.K. Galbraith, ancien conseiller économique de plusieurs présidents américains (source dans ce billet : Action des banques centrales : l’élégante esquive de la réalité) :

“On estime que les mesures discrètes prises par la Federal Reserve sont les plus approuvées et les mieux acceptées des interventions sur l’économie. Elles n’en sont pas moins parfaitement inefficaces, elles n’ont pas l’effet qu’elles sont censées avoir. La récession et le chômage – ou le boom et l’inflation – se poursuivent. C’est un des mensonges auxquels nous tenons le plus. [...]

Depuis 1913, date à laquelle la Federal Reserve a commencé à exister pleinement, le bilan de sa lutte contre l’inflation et particulièrement contre la récession a été d’une insignifiance totale et continue.  [...]

Pendant la Seconde Guerre mondiale, avec l’expérience du conflit précédent, on redoutait beaucoup l’inflation. Finalement, elle a été maintenue sous contrôle étroit et n’a laissé aucun souvenir vraiment désagréable. Les historiens ne voient même plus le problème. Un facteur de poids a pesé dans cet heureux résultat : on a tiré les leçons du passé et l’on n’a fait aucune confiance à la Federal Reserve. Il n’était pas question, dans cette période si difficile, de fonder la politique économique sur l’espoir ou la mythologie. Contenir l’inflation était l’une de mes tâches principales pendant ces années (j’étais administrateur adjoint chargé de la politique des prix à l’Office de contrôle des prix, donc immédiatement concerné par la lutte anti inflation), et j’étais bien persuadé, moi aussi, que la Federal Reserve n’avait pas la moindre importance. Et c’était exact.

Dans les décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, les menaces d’inflation et de récession ont été moins graves. La Fédéral Reserve, après des débats internes savants et souvent acharnés, a pris des mesures. Elles ont été très applaudies, ont donné lieu à des prévisions optimistes, et n’ont eu aucun effet.”

Je me permets enfin de rappeler que toutes ces mesures « non conventionnelles » n’ont jamais été testées à ce point dans l’Histoire. Je n’ai pas connaissance de cas dans l’Histoire où une Banque centrale ait pris tant de risques, et encore moins où elle se soit retrouvé en fonds propres très négatifs en cas de problèmes…

En théorie, ce n’est pas un drame vu que c’est une banque centrale, mais en pratique, on verra ce que ça donne en terme de panique et de défiance envers la monnaie…

En conclusion : quand les banquiers centraux rentrent dans cette logique à la Ponzi (la BCE doit faire des QU pour remplacer la Fed qui arrête et la BoJ qui limite aussi son aide aux marchés), ça finit en général très mal…

Ben alors, ça sert à quoi en vrai ?

Eh bien, c’est assez simple. un tel QE sert principalement à 2 choses :

1. Vous l’avez compris, à continuer la gabegie financière, à maintenir au cric des bulles gigantesques, indues et dangereuses – en évitant la vérité des prix (ce qui a à l’évidence des impacts négatifs sur l’économie réelle)

Ça permet aussi aux États de voir baisser le taux d’intérêt qu’ils payent (en ne payant pas le bon prix) – et donc de continuer à s’endetter encore plus. Ca semble bien comme ça, mais c’est en fait comme avoir de la drogue gratuite.

Et le jour où le système lâche et il faut payer le vrai prix sur le stock énorme de dette, c’est la banqueroute assurée…

2. Et mieux encore… À aider les banques privées !

Car que se passe-t-il lors d’un prêt à un État ?

Petite simulation comptable (désolé, c’est important) :

Quand tout se passe bien : (1) Disons que la Grèce reçoive 1 000 d’une banque pour un prêt à 20 ans. On note que la banque encaisse un intérêt de 7 %, donc ÉLEVÉ, contrepartie d’un risque de défaut (sans ce risque, les taux seraient toujours très faibles).

(2) au bout de 20 ans, la Grèce lève les impôts qui vont bien (ou ré-emprunte en vrai) et rembourse la banque. Tout va bien.

(3) mais problème, en cas de défaut, la banque a perdu son argent (et la Grèce l’a gagné vu qu’elle ne rembourse pas)

(4) et dans le cas du jour, alors que les inquiétudes augmentent sur la capacité de la Grèce à rembourser, et donc que le risque qui a été rémunéré 7 % semble voir approcher sa réalisation, la BCE s’interpose, rachetant l’obligation à risque achetée par une banque PRIVÉE qui a été rémunérée pour ce risque ! Donc elle reprend une obligation dangereuse au moment où le risque de défaut approche ! Merci pour le con-tribuable…

En effet, on voit bien que dans cette opération :

  1. les liquidités dans le système augmentent de 1000 (la banque est remboursée, mais la Grèce n’a encore rien payé) : du cash pour continuer à jouer…
  2. la banque récupère 100 % de sa mis, et pour juste 1 100 Md€ – merci Mario…
  3. la BCE récupère le risque pourri et le risque de défaut !

Ainsi, c’est un peu comme si 10 minutes avant que le Titanic ne tape l’Iceberg, la BCE arrive en barque, lance une corde à un milliardaire qui descend dans la barque et la BCE prend sa place sur le bateau – le tout en lui rachetant au passage son billet à plein tarif…

Elle est pas belle la vie ?

N.B. : vous apercevez ici dans (4) clairement comment est créé la monnaie (ici monnaie de banque centrale). Tout se joue d’un trait de plumes, PARCE QUE la banque (centrale) gère le “compte en banque” du client (ici une banque normale). En échange de la créance détenue par la banque normale, elle crédite simplement son compte en banque de 1000. Elle écrit 1000 de plus – et rien besoin d’autre. C’est une possibilité issue du privilège de tenir les comptes – exactement comme si vous tenez les comptes d’une partie de Scrabble ou de Poker, il vous suffit juste… bah de rajouter 1000 avec votre stylo. BIEN ENTENDU, cette possibilité est en général interdite – par principe même d’être teneur du compte, il faut respecter des règles (sinon les banques pourraient racheter le pays d’un trait de plumes!)… D’où le fameux adage “Les crédits (ou ici les achats de créances) font les dépôts” (c’est enseigné en 1ère année de cours d’économie).

Sinon :

Bah, tu m’étonnes…

Il ne doit rester que les imbéciles pour penser, après 8 ans de crise, que les Banques centrales agissent dans l’intérêt général…

OUPS, désolé…

Conclusion

Comme la déflation est en effet ennuyeuse, et que c’est le but proclamé par Mario, la conclusion est limpide :

(cela fait quand même 7 600 € par ménage européen, ou plus de 15 000 € pour la moitié des ménages les plus pauvres – ce qui aurait été une vraie bouffée d’oxygène pour eux…)

Et vous verrez que le jour où les citoyens demanderont à recevoir directement l’argent des QE sur leur compte en banque (ce qui aurait probablement alors un vrai effet inflationniste), on nous expliquera que finalement, ils ne sont pas efficaces et qu’il faut oublier cette idée…

P.S. Billet rédigé pour les Éconoclastes

P.P.S. Je mets à la suite ce billet du jour de Jacques Sapir :

Le QE de la BCE

22 janvier 2015

Par

Ainsi, Mario Draghi a bien utilisé le « bazooka ». L’annonce qu’il vient de faire le jeudi 22 janvier restera dans les annales. La Banque Centrale Européenne s’est donc converti à « l’assouplissement », ce que l’on appelle le « quantitative easing » (ou QE pour les initiés. Mais, il s’agit d’une mesure désespérée. Rien ne prouve qu’elle donne les résultats espérés. Elle soulève par ailleurs de nombreuses questions. En un sens, on peut y voir aussi, et c’est là peut-être le point le plus important, l’amorce d’une reconnaissance que la zone Euro ne fonctionne plus et qu’il convient d’en préparer la dissolution.

Les mesures annoncées.

Lors de sa conférence de presse Mario Draghi a donc fait une série d’annonce que l’on peut résumer comme suit :

  • -       La BCE a décidé de lancer un programme d’achat d’actifs étendu, qui rassemble mais aussi dépasse les programmes antérieurement annoncés (TLTRO). Ce programme, qui entrera en vigueur au mois de mars et se continuera jusqu’en septembre 2016, consistera dans des achats de titres obligataires privés et publics sur le marché secondaire pour un volume de 60 milliards d’Euros par mois.
  • -       Ce programme a été décidé en raison de l’effondrement de l’inflation et des risques que fait courir la déflation à la zone Euro.
  • -       Il sera mis en place sous une règle de proportionnalité à la contribution de chaque gouvernement au système de la BCE.
  • -       La BCE coordonnera les achats de titres qui seront effectués, dans les limites indiquées par les Banques Centrales Nationales (NCB). La prise en compte des risques sera couverte à 20% par la BCE dans le cadre d’un principe de solidarité à l’échelle de la zone Euro, et pour le reste reviendra à chaque Banque Centrale.
  • -       Les titres achetés pourront avoir une maturité allant jusqu’à trente ans.
  • -       Ce programme ne doit pas inciter les gouvernements au laxisme budgétaire.

Ces mesures étaient attendues par les opérateurs des marchés financiers, mais l’ampleur du programme a favorablement impressionné ces mêmes opérateurs. Le montant total de cet « assouplissement » atteignant ainsi 1140 milliards. L’Euro a amorcé un mouvement de baisse par rapport au Dollars des Etats-Unis. Mais, d’autres détails sont aussi à noter, et en particulier la règle de proportionnalité dans les achats de dettes (qui implique que trois pays en bénéficieront le plus, l’Allemagne, la France et l’Italie) mais aussi la règle de solidarité qui est limitée à 20% des achats.

Une mesure désespérée ?

On doit se demander si cette annonce faite par Mario Draghi n’est pas la toute dernière mesure prise en désespoir de cause devant l’évolution de la situation économique, mais aussi politique, de la zone Euro. Rappelons les faits :

  1. Mario Draghi avait brandi la menace d’une telle action dès le début du mois de septembre 2012. Si l’on s’en tient à la théorie de la crédibilité qui sert de base à la politique déclaratoire de la BCE, cette menace était faite pour ne pas être mise en pratique. Elle devait décourager de manière décisive les spéculateurs et tous ceux qui anticipaient une possible dissolution de la zone Euro. Or, il faut bien reconnaître qu’après environ un an où il fut cru sur parole, la crédibilité de Mario Draghi s’est lentement, puis de plus en plus rapidement, effritée. Ainsi, la dernière mesure visant les banques et datant de septembre 2014, ce que l’on appelle le « TLTRO » a été un échec. Cette perte de la crédibilité est un signe important de la crise que l’on connaît dans la zone Euro.
  2. Les mécanismes permettant à cet assouplissement monétaire de relancer l’inflation et par là même l’activité économique ne sont pas clairs. En effet, l’Europe n’est pas les Etats-Unis, et même dans ce pays les résultats des QE1, QE2 et QE3 sont pour le moins mitigés.
    • Le rôle du crédit dans la consommation et dans l’investissement est nettement moins important en Europe qu’au Etats-Unis.Si l’annonce de cet assouplissement va certainement donner un coup de fouet aux marchés des titres (en particulier les marchés d’actions) et conforter les banques et autres sociétés financières, la détention de ces titres dans les portefeuilles des ménages est limitée. Il n’y aura donc pas d’effet de richesse réel qui pourrait dynamiser la consommation.
    • Si la baisse de l’Euro par rapport au Dollar des Etats-Unis est une bonne chose, il convient de rappeler que les pays de la Zone Euro, à l’exception de la France, font entre 60% et 70% de leur commerce international au sein même de la zone Euro. La dépréciation de l’Euro face au Dollar n’aura donc pas les mêmes effets de relance de l’activité qu’une dissolution de la zone Euro avec des dévaluations plus ou moins importantes des pays d’Europe du Sud par rapport à l’Allemagne.
  • 3. Il y a une contradiction entre la déclaration faite par Mario Draghi sur la nécessité de maintenir des politiques budgétaires strictes et cet « assouplissement ». En fait, face au risque de déflation, c’est par la politique budgétaire, et non par la politique monétaire que l’on lutte contre une récession et une déflation. Le problème principal en Europe est la baisse de la part des salaires ouvriers dans la valeur ajoutée.

On constate donc que, pour spectaculaire qu’elle soit, cette annonce est une réponse à une question qui n’était pas posée. En fait, l’assouplissement monétaire est cohérent quand on est face à une crise de liquidités, comme en septembre 2008. Mais ce n’est pas le cas actuellement.

La fin de la zone Euro ?

Il y a un point qui mérite d’être analysé, c’est la décision de limiter le mécanisme de solidarité devant les risques à 20% des achats. Cela signifie que, pour 80% de ces mêmes achats de titres, le risque devra être porté par la Banque Centrale du pays considéré. Or, le principe de mutualisation est à la base du fonctionnement de la zone Euro. Il faut aujourd’hui reconnaître que l’on a régressé vers la situation de 1999, c’est à dire au moment de la mise en place de la zone Euro, en matière de mutualisation.

  • -       Il y a eu, depuis 2010, un mouvement très important de renationalisation de dettes (que l’on peut voir dans le compte TARGET-2), qui signifie la fin du marché unique des dettes au sein de la zone Euro.
  • -       Désormais, nous savons que cette mutualisation ne s’applique qu’à 20% des achats de titres à venir. Autrement dit, la Banque Centrale de l’Italie portera 80% du risque pour l’Italie, la Banque Centrale de Grèce 80% du risque pour la Grèce, et ainsi de suite.
  • -       Enfin, on n’a pas remarqué que Mario Draghi s’est bien gardé d’annoncer la mise en œuvre immédiate de son programme et qu’il l’a renvoyé au mois de mars. La raison en est simple. Il attend que la Cours de Justice Européenne lui donne le feu vert. Or, l’avis de l’avocat général, qui n’est nullement un arrêt, stipule bien que l’application d’un programme de la BCE (dans ce cas l’OMT) doit respecter le principe de proportionnalité et ne doit pas interférer avec l’établissement d’un prix de marché pour les titres qui seraient éligibles à ce programme[1].

Une possible interprétation des mesures prises par Mario Draghi est qu’elles représentent une action désespérée de la part d’une partie de la BCE qui, devant l’ampleur de la crise, cherche à tout prix à trouver une solution, ne serait-ce que provisoire. Mais, ce faisant, cette fraction de la BCE vient d’ouvrir la porte à une renationalisation de la politique monétaire par les pays membres de la zone Euro. Il est probable que tel n’était pas le but recherché. Néanmoins, il deviendra de plus en plus difficile aux politiciens de la Zone Euro de prétendre que nous nous trouvons dans un système fédéral, alors que la politique monétaire redevient désormais nationale. Pour cette raison, et pour cette raison uniquement, il convient d’accueillir les mesures d’assouplissement monétaire annoncées par Mario Draghi avec une certaine satisfaction.

Source


[1] « OPINION OF ADVOCATE GENERAL CRUZ VILLALÓN » Cas 62/14, article 263, 14 janvier 2015, http://curia.europa.eu/juris/document/document_print.jsf?doclan…eIndex=0&part=1&mode=req&docid=161370&occ=first&dir=&cid=205625

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Lire aussi dans Le Point l’interview du libéral Charles Gave :

“Il faut bien voir que les taux zéro reviennent à prélever un impôt sur les pauvres au profit des plus riches. Aux États-Unis, les dépôts bancaires, détenus en particulier par des petites gens, sont de 10 000 milliards de dollars. Si les taux étaient à 3 %, il y aurait à peu près 300 milliards de revenus supplémentaires à dépenser par an. C’est autant d’argent qui est retiré de la consommation. Ces 300 milliards sont transférés aux “Goldman Sachs” de ce monde [référence à la banque d'affaire américaine, NDLR] par les profits qu’ils réalisent grâce aux taux à zéro. Du point de vue de la justice sociale, il n’y a rien de plus abominable que des taux nuls. [...] Il y a six ans, j’avais publié un article dans lequel j’avertissais que les taux zéro allaient augmenter les inégalités et entraîner une baisse de l’investissement. “

Pour l’histoire, ce lien vars “l’analyse” du Nouvel Obs : BCE : super Mario Draghi, applaudi de toutes parts

“La presse ne tarit pas d’éloge à l’égard du président de la Banque centrale européenne, qui vient d’annoncer une décision historique : la planche à billets pour l’euro. [OB :c'ets bien pour ça que la presse crèvera à terme] [...]

Il y a au moins un banquier intelligent en Europe : Mario Draghi”, écrit Laurent Joffrin dans “Libération”, dont la Une montre le plombier de Nintendo le poing levé, entouré de pièces d’or. [...]

Quand un banquier central arrive à mettre d’accord à la fois les banquiers et les économistes militants contre l’austérité… Une fois n’est pas coutume.”

Source: http://www.les-crises.fr/comment-la-bce-se-moque-du-monde/


[Récup] François Hollande compte sur « l’esprit du 11 janvier » pour faire avancer les réformes

Friday 23 January 2015 at 00:52

Aaaaaaaah, les “réformes indispensables”

“Les deux têtes de l’exécutif, François Hollande et Manuel Valls, semblent avoir trouvé une formule magique : c’est l’esprit du 11 janvier.

Et l’esprit du 11 janvier se décline à l’envi. Avant de vous expliquer ce que cela devient dans les paroles du chef de l’État ou du Premier ministre, c’est, il faut le rappeler, près de quatre millions de Français dans les rues contre le terrorisme, contre la barbarie. L’esprit du 11 janvier, c’est aussi ce qui a fait décoller le couple exécutif dans les sondages et c’est désormais ce qui semble guider chacune de leurs actions.

Ce mardi matin, le chef de l’État a parlé, sur ces bases, d’amplifier les réformes de son gouvernement. C’est ce qu’il appelle depuis plusieurs semaines déjà : “l’audace réformatrice”. Une audace qui lui permet d’envisager des réformes qui semblaient encore impossible il y a quelques semaines. C’est le cas de la réforme du Conseil supérieur de la magistrature pour assurer l’indépendance de la justice. Cela faisait partie de ses engagement de campagne en 2012. Mais il faut, pour cela, que les 3/5èmes des assemblées soient d’accord. François Hollande espère désormais que l’union nationale, cette union post-attentats, permettra de faire adopter cette réforme.

C’est nouveau, sans être nouveau

Le chef de l’État espère dérouler un programme qui date d’avant les attentats. Il a simplement l’opportunité unique et inédite de se relancer. Il fait exactement la même chose quand il veut pousser la réforme du dialogue social. Voilà ce qu’il a dit mardi midi : “L’esprit du 11 janvier doit désormais inspirer notre action dans la durée… Ce qui exige de nous de repousser les vieilles querelles et les polémiques inutiles autour des réformes indispensables.” C’est très clair, il demande aux partenaires sociaux et au patronat de discuter au nom de l’unité nationale. Ce projet de réforme était bien sûr lancé bien avant les évènements, il y a deux semaines.

Il y aura quand même du nouveau mercredi avec l’annonce de nouvelles mesures de sécurité. Finalement, l’esprit du 11 janvier s’applique plus naturellement. D’ailleurs, c’est assez intéressant de voir que la majorité reprend des idées de l’opposition. La peine d’indignité nationale. Les députés socialistes vont reprendre l’idée. Manuel Valls confie qu’il n’est pas contre. “Il n’a rien contre les symboles“, c’est ce qu’il a expliqué après ses vœux à la presse mardi midi.

Manuel Valls espère que la politique va évoluer

D’une manière plus générale, Manuel Valls espère qu’il y aura plus souvent des points d’accords avec l’opposition et aussi une autre façon de se parler. Bref, il espère que la politique va évoluer. Il prend en exemple le service civil sur lequel vont travailler les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat. Droite et gauche ensemble pour envisager un nouveau service. Un service civil obligatoire de trois ou quatre mois. Droite et gauche seraient d’accord sur ces principes. Le président des députés PS va déposer très vite une proposition de loi.

Dans le même esprit, probablement, il y aura aussi des mesures pour l’école, pour les quartiers. Pour répondre à ce que Manuel Valls a qualifié mardi midi d’”apartheid territorial, social et ethnique”. Cela dit, le Premier ministre semble déjà bien mesurer les limites de cet esprit du 11 janvier. ” Si on manipule les français à des fins politiques…”, a-t-il expliqué à France Info,  ”ils vont très mal réagir et ils auront bien raisons… ” C’est comme toujours en politique. On ne peut jamais rien faire,  même quand ça ne le mérite pas et il ne faut jamais en faire trop.

Source : France Info

Alors du coup :

Hollande réfléchit à “un pacte” entre droite et gauche

L’INFO POLITIQUE – Le chef de l’État envisage de tendre la main à l’opposition sur tous les sujets qui font consensus.
Après l’émotion, les solutions. Mercredi, François Hollande va annoncer un plan pour enrayer la montée du radicalisme dès l’école. Mercredi toujours, les mesures de lutte contre le terrorisme promises par Manuel Valls devraient être détaillées en Conseil des ministres. Mais le chef de l’Etat réfléchit déjà à l’après. Selon les informations d’Europe1, François Hollande prépare le contenu d’une prochaine conférence de presse, marqué par l’esprit du 11 janvier.

La conférence est déjà calée au cours de la première semaine de février. L’Elysée se réserve le choix du jour pour ne pas s’enfermer dans un agenda trop précis. Comme le confie un conseiller, il y aura les figures imposées dans le contenu : la conférence climat, la politique internationale etc.

Hollande veut un “pacte” entre droite et gauche. La réalité, c’est que François Hollande n’a aucune marge de manœuvre budgétaire, aucune perspective de croissance. Et le seul levier pour être à la hauteur de l’histoire est de proposer une autre méthode de travail, de gouvernance. C’est ce que prépare en secret François Hollande. Un des ses amis de toujours raconte : “le président réfléchit à un pacte avec le pays, sur le modèle du compromis historique en Italie dans les années 70″, où droite et gauche avaient accepté de travailler ensemble.

François Hollande veut en effet tendre la main à la droite au centre, sur quelques thèmes qui peuvent faire consensus, comme la laïcité, l’école, la sécurité ou l’emploi. Ce ne sera pas “un oukaze” comme on dit à l’Elysée, mais une proposition avec un agenda, un cadre de travail de réflexion et de réforme.

Qui acceptera la main tendue ? Pour l’heure, difficile à savoir qui est susceptible de signer “le pacte”. Mais certaines personnalités d’opposition, Jean-Pierre Raffarin par exemple, pourraient se montrer volontaires. L’ancien Premier ministre UMP a d’ailleurs déjà proposé au président une “conférence nationale de priorité” sur un an, pour faire travailler majorité et opposition. Il n’y a aucun doute sur le fait qu’il trouvera des bonnes âmes, des vrais républicains, pour montrer que l’on a changé d’époque.

Source : Europe 1

Donc 3 terroristes barbares nous font “changer d’époque”, cool. Les prochains nous mèneront où ?

Bref, je propose pour ma part d’acter dans le marbre “l’esprit du 11 janvier” par une fusion du PS et de l’UMP, qui clarifierait les choses – bah oui, s’ils sont d’accord sur “la laïcité, l’école, la sécurité ou l’emploi”, ils devraient surmonter leurs différences sur le sport et les anciens combattants…

Seul vrai problème : Valls et Macron seront probablement refusés par l’UMP, car trop à droite…

Source: http://www.les-crises.fr/recup-hollande-esprit-du-11-janvier/


Pendant ce temps là en Ukraine…

Thursday 22 January 2015 at 00:10

Reportage de Graham Phillips, journaliste britannique, du 13 janvier 2015. Attention, images dures.

Donetsk, banlieue Kouybychevskiy sous les bombardements incessants depuis plusieurs jours compte ses morts…

“Toutes les 5 minutes ils parlent de la tragédie survenue à Paris. Ici toutes les 5 minutes les civils sont tués. Personne n’en a rien à faire”….

Je signale aussi ce passage mémorable où, dans une interview à la chaîne ALLEMANDE ARD, le premier Ministre Ukrainien Iatseniouk a fait une déclaration stupéfiante, relatée par Danielle Bleitrach :

“Rappelons les faits. Récemment Arseni Petrovich a donné une interview à la chaîne de télévision allemande ARD, et ce qui n’est pas surprenant, il a été question de la politique étrangère de la Russie et des négociations avec l’Ukraine dans lesquelles la chancelière allemande Angela Merkel joue un rôle clé. Il n’était sans doute pas nécessaire dans la situation actuelle d’envenimer encore plus les choses, mais Iatseniouk droit dans ses bottes, a déclaré :

« l’agression russe contre l’Ukraine est une offense à l’ordre du monde. Nous nous souvenons tous de l’invasion soviétique en Ukraine, y compris en Allemagne. Il faut éviter que cela ne se reproduise. Personne n’est autorisé à réécrire les résultats de la Seconde Guerre mondiale, ce que tente de faire le président russe Poutine « .

Ainsi, le Premier ministre a fait une déclaration fracassante concernant plusieurs découvertes dans les domaines de l’histoire et de la science politique. Pour commencer, même les critiques les plus sévères de Moscou ne parlent pas d’« agression russe contre l’Ukraine ». Bien sûr, ils signifient quelque chose comme ça, mais ne se permettent pas de l’exprimer directement. Et de ce point de vue, bien sûr, Iatseniouk les a laissés assez perplexes, parce que dans une simple phrase il a presque détruit tous leurs efforts diplomatiques.

Il faut également noter l’expression « que l’invasion soviétique en Ukraine, y compris en Allemagne. » Tout d’abord, sur la base de cette logique, nous devrions admettre que dans les années de la Grande Guerre patriotique, l’Ukraine ne faisait pas partie de l’URSS, puisqu’elle a souffert de «l’invasion soviétique». En d’autres termes, elle était une sorte de pays «tiers», qui, comme l’Allemagne, aurait été sous les coups de l’agresseur. D’ailleurs, une telle assertion peut prendre au dépourvu les ultras nationalistes, qui assurent que, en fait, pendant la guerre, l’OUN et l’UPA ont combattu sur deux fronts – contre l’Union soviétique et l’Allemagne, l’une comme l’autre aussi désireuse de conquérir l’Ukraine. D’après les paroles de Iatseniouk il s’ensuit que le seul «prédateur» était l’URSS. Et après cela il parle de l’inadmissibilité de réécrire les résultats de la Seconde Guerre mondiale? Tout cela ne serait rien si – malgré la situation politique étrangère actuelle – le discours n’avait pas été prononcé dans une interview, je tiens à le souligner une fois de plus, à une chaîne allemande. En Allemagne contemporaine on est encore très sensible à tous les sujets qui de près ou de loin touchent l’époque du Troisième Reich, ses symboles sont interdits par la loi, et pour la promotion d’opinions inappropriées on peut écoper d’une peine de prison. Il n’est donc pas surprenant que plusieurs jours après l’entrevue, le gouvernement allemand ait gardé un silence assourdissant, essayant apparemment de comprendre ce qui était arrivé. En revanche la Russie n’est pas restée sans rien dire. Ici – et tout de suite au niveau du ministre des Affaires étrangères – a été immédiatement envoyée une note aux collègues allemands pour clarifier la position officielle de Berlin à propos de l’invasion de l’Allemagne par l’URSS. ”

Source

La vidéo est ici à 1’05

Médias allemands : Freitag, Spiegel (article ironique)

P.S.  “étrange”, je n’ai pas retrouvé cette info dans les grands médias (même RFI :) ), sur un sujet qui semble quand même d’un peu d’importance, vu qu’il y a émotion diplomatique russo-allemande …

Conclusion extraite de DeDéfensa

“Le premier épisode se situe dans une déclaration faite par le PM ukrainien à la chaîne ARD, retranscrite (en allemand) le 8 janvier 2015, et fort discrètement, par le Spiegel. La chose est à peine reprise, tout juste mentionnée, parfois évoquée, – tout cela, on le comprend, dans l’atmosphère brûlante qui ébranle sismiquement la planète au nom de Charlie Hebdo qui représente alors le grand événement courant de l’histoire du monde. Pourtant, le PM devenu professeur d’histoire, Iatseniouk, présente une thèse révolutionnaire qui vaudrait le prix d’excellence annuel du révisionnisme, qui se résume comme ceci : “L’Union soviétique a déjà attaqué et envahi une fois l’Allemagne et l’Ukraine durant la Deuxième Guerre mondiale, faisons en sorte que cela ne se reproduise pas”. Par rapport aux normes de l’esquisse des très grands événements de la guerre, l’affirmation sonne haute et originale. L’opération Barbarossa du 21 juin 1941 est la seule trace d’attaque entre l’Allemagne et l’URSS qu’on trouve, et plutôt dans le sens opposé que nous en dit le professeur Iatseniouk, et la riposte soviétique qui s’ensuit qui permit de donner aux alliés la victoire sur l’Allemagne dans la Deuxième Guerre mondiale peut difficilement être tenue pour une “agression” du type dont parle Iatseniouk ; quant à l’Ukraine, elle était au début du conflit en bonne partie, pour le meilleur ou pour le pire, partie de l’URSS et se trouve donc difficilement en position d’être attaquée par qui en possède déjà cette partie-là…

Soit, Bryan MacDonald, journaliste irlandais basé à Moscou et collaborateur de RT, fait un article sur cette affaire le 10 janvier 2015 sur le même Russia Today. Nous en donnons un extrait, le reste explicitant plus en détail la situation de la Deuxième Guerre mondiale dans cette partie du monde, cherchant vainement la trace de l’événement foudroyant dont parle Iatseniouk.

«First, though, here’s what Yatsenyuk actually said. “All of us still clearly remember the Soviet invasion of Ukraine and Germany,” he told German-state broadcaster ARD. “We need to avoid [a repeat of] it.“ “Nobody has the right to rewrite the results of the Second World War,’ he also added. “Russia’s President Putin is trying to do exactly this.”

»When I saw the comments on my Twitter timeline, I was initially convinced it was a joke. So much disinformation is circulated on the platform that I automatically dismissed it as a misquote. Surely a senior politician wouldn’t say something like that? Only 24 hours later, when I saw Yatsenyuk’s words still swooshing through the Twitter-sphere, did I realize that he actually did utter those words. Arseniy Yatsenyuk, apparently handpicked for the PM post by US diplomat Victoria Nuland, believes the USSR invaded Germany in WW2. This runs contrary to the almost universally accepted narrative that Germany actually attacked the Soviets first in Operation Barbarossa. After repelling the attack, USSR forces eventually made it to Berlin where they met the other liberating powers, the USA and Britain…»

Mais la discrétion qu’on a signalée plus haut de la part du bloc BAO et des Allemands (Merkel) en particulier a, selon Mac Donald, une autre signification, plus politique, qu’il expose en fin de son article. D’autre part, les Russes, qui ne laissent rien passer si aisément, ont tout de même noté la leçon d’histoire de Iatseniouk et ont demandé à Berlin, et à Merkel, ce qu’on en pensait en Allemagne.

«This also explains the silence of German media on Yatsenyuk’s words. If the German public were made fully aware of what the visitor from Kiev had said, they would be outraged. So much so that Merkel could be forced to withdraw all support for Ukraine. If Yatensyuk’s comments were widely circulated, they would embolden revisionists in Germany and beyond – something there is, sadly, no shortage of.

»Just as it seemed the story would fade away, the Russian Foreign Ministry made a late intervention, asking Berlin to outline its official position on Yatsenyuk’s verbiage. The reply, assuming it ever arrives, will be telling.»

Eh bien, finalement, les Allemands n’ont pas vraiment répondu. Merkel s’est tenue absolument muette. L’un ou l’autre porte-parole a observé que tout le monde sait évidemment comment s’est passée la Deuxième Guerre mondiale, – sans préciser exactement “comment” et d’ailleurs c’est inutile puisque tout le monde le sait, – et donc qu’il est inutile de le répéter. Ainsi était démenti sans l’être une seconde en vérité ce qu’avait dit Iatseniouk, à moins qu’en fait il n’ait pas été vraiment démenti et que “tout le monde” sait bien que la Deuxième Guerre mondiale s’est bien passée comme chacun sait, et qu’après tout pourquoi Iatseniouk ne dirait-il pas ce que tout le monde sait très bien…

En bref, cette façon de botter en touche selon une dialectique implicite extrêmement complexe a surpris. Le silence de Merkel, ainsi poursuivi, confirmé et continué, a encore plus surpris, après l’intervention russe auprès d’elle.”

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“L’info” du jour :

MAE de Pologne : Auschwitz a été libéré par les Ukrainiens

Par La Voix de la Russie | Le camp de concentration d’Auschwitz-Birkenau à Oswiecim a été libéré par les Ukrainiens, a déclaré mercredi sur Radio Pologne le ministre polonais des Affaires étrangères Grzegorz Schetyna interrogé sur l’invitation du président de Russie Vladimir Poutine aux cérémonies consacrées au 70e anniversaire de la libération du camp par l’Armée rouge.

« Peut-être il vaut mieux dire que c’étaient le premier front ukrainien et les Ukrainiens qui l’ont libéré ? Parce qu’en ces jours de janvier ce sont les Ukrainiens qui ont ouvert la porte et ont libéré le camp », a dit le ministre polonais.

Selon lui, les dirigeants de Russie ont pris eux-mêmes la décision de ne pas participer aux commémorations. M. Schetyna a souligné que cette année aucun président n’a reçu une invitation personnelle car les cérémonies avaient été organisées par le Musée d’Auschwitz et le Conseil international d’Auschwitz.

MOSCOU, 21 janvier – RIA Novosti/La Voix de la Russie Le ministère russe des Affaires étrangères a invité mercredi la Pologne à cesser de se moquer de l’histoire et d’outrager la mémoire de ceux qui ont libéré l’Europe lors de la Seconde Guerre mondiale.

“Il faut cesser de se moquer de l’histoire et de pousser l’hystérie antirusse jusqu’à insulter la mémoire de ceux qui ont sacrifié leurs vies pour libérer l’Europe”, lit-on dans un communiqué de la diplomatie russe.

Le ministre polonais des Affaires étrangères Grzegorz Schetyna a déclaré mercredi sur Polskie Radio que le camp de concentration nazi Auschwitz-Birkenau fut libéré par des Ukrainiens lors d’une opération effectuée par le Premier front ukrainien. D’après le ministre, “en ce jour lointain de janvier, des soldats ukrainiens ont ouvert les portes du camp et libéré les prisonniers”.

Selon Moscou, “il est difficile de soupçonner d’ignorance un fonctionnaire du niveau de Grzegorz Schetyna”, car “tout le monde sait que le camp Auschwitz-Birkenau a été libéré par l’Armée Rouge”. Le communiqué souligne notamment que “tous les peuples ayant combattu au sein de cette armée ont fait preuve d’héroïsme”.

“Il est aussi à noter qu’avant novembre 1943, le Premier front ukrainien s’appelait Front de Voronej et encore plus tôt, Front de Briansk”, a conclu le ministère russe des Affaires étrangères.

Sources : ici et ici

Moi, je pense que fin 2015, il nous diront que finalement qu’Auschwitz était russe, et que les Ukrainiens ont gagné la guerre…

Source: http://www.les-crises.fr/pendant-ce-temps-la-en-ukraine/


Réponse du journaliste RFI à propos de l’article sur ELLE

Thursday 22 January 2015 at 00:01

Le journaliste de RFI dont je parlais dans le billet sur les néonazies de Elle m’a contacté pour un droit de réponse.

Comme il était ouvert au débat, je lui ai confirmé qu’il pouvait rédiger une réponse assez longue, pour nous donner le point de vue d’un journaliste – je l’en remercie…

ATTENTION : on parle bien ici du journaliste de RFI qui a rédigé le billet sur le problème ELLE – PAS du journaliste de ELLE…

Pour une de ses remarques, je précise que oui, j’aurais pu le contacter et en discuter ; cela aurait été mieux. Mais hélas, il se trouve que ce n’est pas mon métier, et que je ne peux passer 3 jours sur un petit billet comme ça. Promis, quand j’aurai 5 salariés, on le fera – mais désolé, je n’ai pas le 06 de milliardaires, et ils ont de toutes façons, je pense, peu envie de financer la liberté d’expression sur le web (juste des journaux en déficit) allez savoir pourquoi…  :)

Je suis client final du diffuseur d’information – qui est une des bases de la Démocratie – et quand je vois des choses déplaisantes, je les souligne…

Après, je ne veux pas sombrer dans le poujadisme, ce n’est pas simple d’être journaliste, primo en raison du manque de temps et des moyens, secundo en raison de l’environnement qui fait que, en général, on ne peut pas y écrire tout ce que l’on veut…

Enfin, le point principal de ma critique était justement la non critique du ton de ELLE, qui donnait dans un parti pris pro-Kiev, qui est systématique dans nos médias, entrés, comme à chaque fois, en période de propagande de guerre. (et là, c’est quand même ÉNORME : on veut nous montrer un peuple (féminin) uni, luttant courageusement contre les méchants Russes, et zou, pas de bol, on tombe sur une néonazie et une fille d’extrême droite… Mais de cela on ne tirera bien entendu aucune conclusion, c’est juste du pasdbol…)

Je conseille enfin de lire le beau livre de Halimi : L’opinion, ça se travaille – dont je ne suis pas sûr qu’il soit enseigné en école de journalisme comme il se devrait…

Merci d’abord à vous pour ce charmant savonnage pas très fairplay, ni très honnête intellectuellement, qui aura enchanté mes remontées de pistes pendant mes trop rares vacances au ski la semaine passée.

Je ne vous en tiens cependant guère rigueur car je note que vous commencez votre discours d’un enchanteur compliment à mon égard en me qualifiant de « nouvelle star du journalisme français ». Je n’oserais en revendiquer tant. Je me flatte également de votre confiance à me voir rejoindre un jour le Siècle car j’aurais autant de plaisir à dialoguer avec ces gens, qu’à venir ici débattre avec vous.

Plus sérieusement, pour en revenir à nos moutons ukrainiens, nazis et blonds, je vais répondre ici à une partie des reproches que vous et vos lecteurs m’avez adressés sur le ton pas toujours aimable de ceux qui savent tout beaucoup mieux que le con du jour, moi en l’occurrence.

 - D’abord sur le fond :

Contrairement à ce que vous laissez entendre à longueur de lignes, je ne suis pas une espèce de tir au flanc pro-Kiev avide de gagner ses émoluments à coups de moindres efforts. Je ne suis qu’un humble journaliste, indépendant, qui fait son travail du mieux qu’il le peut sans toujours avoir beaucoup de moyens.

Il ne me semble pas avoir dit ça…

Mes lecteurs ont rarement eu à se plaindre de mes travaux, que je tâche d’avoir le plus alimentés possible et le plus objectif possible, avec des sources le plus large possible. J’ai un vrai plaisir à échanger avec les individus les plus nobles comme les plus immondes, car je crois en la balance de l’homme. Je travaille ainsi régulièrement au contact de militaires de différents pays, de diplomates, de Russes, de terroristes, d’Ukrainiens, de criminels, d’islamistes, de criminels de guerre, et même de cons… Car je ne suis pas juge mais journaliste et que mon travail est de tendre mon micro aux gens qui font l’Histoire.

Cela vous étonnera peut-être mais pour faire ce boulot qui me prend 15h par jour – et pour lequel je gagne l’opportunité de me faire mépriser ici-, je gagne tout juste de quoi payer mon alcool et mes cigares. Mais je vais vous dire, je m’en cogne : je crois que parfois, des gens apprennent des choses intéressantes en me lisant, et cela me satisfait amplement.

- Erreur(s)

Malgré mes efforts, il m’arrive de commettre des erreurs. Vous en soulignez d’ailleurs une énorme : l’histoire des pseudonymes de nos charmantes néonazies. Une erreur d’autant plus inexcusable que j’avais effectivement l’information. Fatigué, biais intellectuel, connerie pure, je ne sais comment j’ai pu écrire cette bétise.

Je persiste tout de même à noter que pour les auteurs de l’article incriminé, au moment où ils ont réalisé leur reportage, cela ne change pas grand-chose : un pseudo ou un prénom, ça ne suffit pas à retrouver un compte VK. Car ils n’avaient que les prénoms et les visages de ces femmes. Oui, je crois

à leur bonne foi, car comme je le disais plus haut, je ne suis pas en mesure de les juger. Au vu de leur travail, je ne vois pas de raison de croire le contraire.

Ce type d’incidents peut arriver. Je comprends qu’ils ne demandent pas à tous les combattants ukrainiens qu’ils croisent s’ils sont des nazis. Comme je n’ai pas toujours demandé à tous les islamistes que j’ai croisés s’ils étaient des jihadistes, ou à tous les Ivoiriens croisés en 2010 s’ils étaient des Jeunes patriotes.

Font-ils l’éloge des forces de Kiev ? Je ne sais pas. Je ne crois pas. Ce type de reportage sous forme de portrait vise effectivement à donner la parole à un acteur. Il ne faut pas forcement y voir une adhésion à ses idées. Certains journalistes laissent à leurs lecteurs le choix de tirer leurs propres conclusions, apportant des pièces au puzzle avec la modestie de celui qui ne les a pas toutes. Je vous invite à regarder ce film que j’ai moi-même tourné, et dans lequel je donne la parole à des islamistes radicaux en France. Je ne crois pas que l’on puisse m’accuser de faire leur propagande. Les images me semblent parler d’elles mêmes. Au sujet des combattantes ukrainiennes, vous restez d’ailleurs parfaitement convaincues qu’elles sont des criminelles, malgré le fait que l’auteur ne le dise pas. Vous ajoutez ce reportage à votre puzzle.

Pour savoir si Elle fait la propagande de l’Ukraine d’extrême droite et des milices privées, il faudrait éplucher leur production sur la durée et avoir plusieurs exemples. Ici, on a plutôt une grosse foirade. Pour vous il est évident. Comme est évidente la culpabilité de l’autre jeune femme, Svetlana. Pourtant, un de vos lecteurs souligne une chose intéressante : quid de la chronologie des événements ? Si l’on épluche la page VK de Svetlana, elle ne poste pas grand-chose de condamnable au moment où est fait le reportage de Elle. Dans le cas de Vita, il semble que la situation soit comparable. On a découvert après coup sa vraie nature. Trop tard pour corriger le reportage. Mais suffisamment tôt pour que l’on puisse se hâter de lyncher virtuellement les auteurs de l’article. Je laisse à chacun la liberté de juger les journalistes selon ses propres convictions. Moi, je préfère comprendre.

- Désaccords ( ?)

Hormis cela, je vais me permettre de défendre le reste de mon article dans lequel je ne trouve rien à changer. Je vais tâcher de le faire de manière le plus exhaustive possible :

* Je dis à propos de « Vita » qu’elle a l’air tout juste sortie de l’enfance, presque timide, ce qui vous fait rire.

> Je persiste. Cela vous fait peut-être rire mais la posture, et donc la communication non verbale de la jeune femme, n’est pas celle d’une combattante accomplie ou encore d’une femme sure d’elle : tenue négligée, cheveux détachés, bras relâchés et croisés… Oui, elle ressemble plus sur cette photographie à une adolescente encombrée par son propre corps qu’à une guérillero. Pas besoin de voir autre chose que ce que je viens d’écrire dans ces mots, il n’y a rien à aller chercher entre les lignes.

* Vous notez dans une seconde version de votre billet (dont vous n’avez pas précisé la modification) qu’elle n’est pas la seule à poser problème et que l’autre jeune femme, Svetlana, pose problème aussi.

> Oui, sauf que cela, on l’apprend longtemps après. Vous défendez l’idée qu’Aïdar est exclusivement ou presque composé de nazis et d’extrémistes. Je respecte votre avis mais ce n’est pas ce que me disent la plupart de mes sources sur place, chercheurs, journalistes, Ukrainiens ou Français, qui les ont rencontrés. Cette approche correspond par contre effectivement à ce que disent les diplomates russes.

Je n’ai jamais dit “exclusivement”. Je ne connais pas la proportion. Maintenant, si des gens ne sont pas gênés d’aller reconquérir une partie du territoire en sécession avec des néonazies, ma foi, chacun son truc… Il y a beaucoup de communistes chez Aïdar ?

Notez, comme le journaliste qui a fait le papier, et qui connait bien la situation en Ukraine, ne les a pas détectées, je ne sais pas si vos autres sources sur place auront pu le faire mieux. (P.S. s’il y a Marie Mendras dans vos sources, enlevez d’urgence son numéro…)

* Les dérives des bataillons de volontaires

> Le mot « dérive » semble vous amuser. Mais effectivement, il s’agit de dérives puisque dans leur construction théorique, ces bataillons ont pour objectif de défendre leur patrie. Ils ne sont pas pensés en organes de rapines, de terreur et de violences. Ils ne sont pas non plus sensés être des milices privées –reproche fait à ces bataillons que vous avez oublié d’évoquer-. Mais dans les faits, ils se sont largement éloigné de cela… d’où le mot dérive. Cela valait-il débat et polémique ? Mon choix de vocabulaire vous semble-t-il si provocateur ?

Notez, “dans leur construction théorique”, les SS défendaient simplement la sûreté de l’État allemand… 1 Vous avez un bataillon, 2 il y a des néonazies dedans, en partie. 3 Il y a de graves exactions. Est-ce une dérive ou un fait inévitable, suite à la proposition 2 ?

* Apologie de la haine

> Sur ce passage comme sur d’autres, vous dites en gros que vous êtes d’accord avec moi mais que je n’en fait visiblement pas assez pour vomir ces pourritures nazies ukrainiennes. « Des soldates volontaires allant abattre leurs concitoyens », dites-vous. Et vous me reprochez de faire l’apologie d’un camp ? Pour ma part, je retiens des rapports d’Amnesty et de l’OSCE que les exécutions sont « soupçonnées » chez les pro-Kiev, qualificatif qui n’est pas accolé aux exécutions reprochées aux indépendantistes. Je ne dis pas qu’elles n’existent pas, je dis que moi, je ne peux pas avancer des choses sans en avoir la preuve. Question de rigueur intellectuelle et professionnelle.

“Des soldates volontaires allant abattre leurs concitoyens” : euh, je pense que la propagande est telle que vous ne vous rendez pas compte, que, dans les combats, elles tirent sur d’autres Ukrainiens… Cela s’appelle la guerre (civile). C’est vous qui avez interprété cette phrase comme si je parlais d’exactions, ce qui n’est pas le cas…

* Nuances de gris

> Je n’avais pas pensé à Fifty shades of grey. Non rien à voir. Le gris est la couleur de la nuance entre le blanc et le noir. Entre le bien et le mal. Car effectivement, je vois rarement des faits manichéens dans la plupart des crises et des conflits : des horreurs sont commises de chaque côté et je me refuse de résumer les situations de manière non nuancée. Comme il me semble souvent difficile de dire qui a commencé, ou qui a fait le plus de mal. Mes différentes sources me disent toutes la même chose : il y a parmi ces volontaires d’horribles raclures… mais aussi des gens courageux qui se battent pour une cause en laquelle ils croient.

Et vous avez bien raison.

Question : trouvez vous que la vision que les médias donnent de l’Ukraine ou de Poutine depuis 10 mois est tout en nuances de gris ?

* Dérives des deux côtés, extrémisme

> Vous moquez Mme Dugoin parce qu’elle affirme qu’il y a des extrémistes et des exactions dans les deux camps. Vous semblez être le seul à ne pas être au courant car c’est ce que soulignent tous les acteurs et observateurs sur place. De même vous semblez ne pas être au courant de la montée de l’extrême-droite en Russie… mais peut-être s’agit-il d’une coquille. Pourtant de nombreux ouvrages et articles s’inquiètent de la montée de formes extrêmes de nationalisme, voire d’impérialisme, en tous les cas de repli sur soit et sur son identité. Peut-être préférerez-vous parler de patriotisme. Je crois que dans tous les cas, il fait de moins en moins bon être différent dans une large bande inter-continentale incluant la Hongrie, la Roumanie, les Balkans, l’Ukraine et la Russie.

1. non, je me moque de Mme Dugoin, parce qu’elle dit “« On est en guerre, et on a toutes les réalités d’une guerre avec une vraie violence » – ce qui est profond après plsuieurs milliers de mrots (très rarement montrés, notez vous ?)

2. et car elle dit : Tous les Ukrainiens ne sont pas des nazillons non plus, mais il y en a… On va d’ailleurs avoir les mêmes dans le camp d’en face. Laisser croire qu’il y a des “nazillons” dans le Dombass est quand même énorme. On y voir aussi des députés assister à des cérémonies de ré inhumation de Waffen SS ? C’est pas de bol, car le Dombass étant le bastion communiste de l’Ukraine…

* Perte de contrôle de Kiev

> Que Kiev n’ait pas un contrôle absolu sur certains de ses pions vous semble étonnant. C’est pourtant le cas dans de nombreux conflits où la hiérarchie et le contrôle vertical sont minés par une faiblesse étatique, institutionnelle et par des phénomènes de corruption. C’est évident en Ukraine où des intérêts privés commandent, du fait de l’argent dont ils disposent –et dont manque l’Etat-, des bataillons entiers.

Donc on soutient Kiev qui a des bataillons comprenant des néonazies qu’il ne contrôle pas. Tout va bien… Mais Porochenko tétant Charlie (bien qu’interdisant les chaines russohpones), tout va bien…

* Une erreur pas évidente

> Rappelons-le, l’objet de mon article était de comprendre comment Elle a commis cette erreur. Non ce n’est pas de la propagande… croire qu’un journal comme Elle défend des néonazis… c’est ne pas avoir compris grand-chose à la culture des journalistes grand-public… qui ont tendance en général à voir des nazis partout. Et effectivement, on peut se tromper sur la nature de ses interlocuteurs dont il n’est pas écrit sur leur face qu’ils sont mauvais. Sauf si, comme vous le faites, on part du principe qu’ils sont tous, unanimement et collectivement, coupables de certains méfaits. Ce n’est pas le cas des auteurs, et ce n’est pas le mien. C’était peut-être une erreur de leur part, je ne sais pas. Notez bien le terme que j’ai employé : « erreur ». Il ne s’agit donc pas d’ « excuser » ce qu’ils ont fait (comme vous me le reprochiez dans le premier titre de votre billet, avant de remplacer par « minimiser », là encore sans préciser votre modification). Il s’agit ici de comprendre comment l’erreur a été commise. C’est moins marrant que de juste les traiter de gros cons qui ne comprennent rien à rien, mais moi, ça me semble plus intéressant. Je laisse à d’autres, très nombreux dans les médias d’ailleurs, les procès faciles et toujours menés à posteriori et souvent depuis Paris, contre les mecs qui tentent tant bien que mal d’aller démêler le vrai du faux sur le terrain.

* Propagande pro-Russe

> La définition de la propagande implique que l’on manipule volontairement une information, à des fins politiques, et souvent contre l’intérêt du public cible. Reprocher à Elle de faire de la propagande implique donc un objectif politique volontaire. Pour ce que j’en sais, ce n’est pas le cas. Cette affaire, comme je l’écris –ce qui vous amuse-, sert effectivement in fine la propagande pro-Russe. Je ne dis pas que Moscou en est à l’origine. Je dis qu’ils y trouvent une belle matière, qui servira l’argumentaire qu’ils défendent depuis de nombreux mois partout à travers le monde en insistant sur les apologies et supporters du nazisme chez les Ukrainiens… sans toujours avoir des preuves très claires. Là, ils ont un beau biscuit à exploiter en matière de guerre de l’information.

Mais pas du tout ! Vous avez lu le livre de Halimi : L’opinion, ça se travaille ? Ou Chomsky ? Ou d’Anne Morelli sur la propagande de guerre ? Ou de Michel Collon ?

* « Journalistes experts et incompétents à deux balles »

> La conclusion de votre laïus est charmante. Mais en l’occurrence, de nombreux médias –dont RFI- ont témoigné des dérives nazis de certains combattants et activistes à Maïdan, puis dans les forces pro-Kiev contre les indépendantistes. Ce sont d’ailleurs des médias aussi underground que la BBC, Channel 4, Slate, Le Figaro… Magie et charme du mainstream.

Ça, c’est l’excuse classique du journaliste (on en a parlé il y a 6 mois 12 secondes !!!) et c’est comme le pâté d’alouette : 50/50, une dose de cheval, une dose d’alouette. Si vous pensez que l’auditeur lambda a une claire conscience des dérives nazies (personnellement, le papier sur ce thème, que je suis de près, doivent représenter 10 ou 20 papiers grand maximum. A comparer au reste…)

* Articles sélectionnés sur RFI

> En conclusion de votre volée de bois verts dans mes dents de jeune dandy de l’info, vous enchaînez sur la rédaction qui m’a publié, RFI. Quelques exemples des partis pris de la radio… dont vous venez de me dire au téléphone qu’elle ne faisait pas du si mauvais travail. Bon alors c’était pour le plaisir du sport d’une bonne beigne dans la tronche ? Moi ça me va. Mais pour rétablir l’équilibre, vous auriez pu aussi mettre ce reportage d’un journaliste de RFI auprès des volontaires d’Aïdar, de leurs victimes et de leurs partisans. Il n’était pourtant pas loin, puisque le lien était dans mon article.

Je montre que des papiers de RFI sont aussi sans nuance…

Ce qui est intéressant, c’est que s’il fallait résumer mon article, on pourrait dire ceci : je raconte que Elle a commis un reportage exhibant une néo-nazie, dont je décris les frasques avec la vidéo de Vinnitsa mise très largement en évidence, et que le magazine s’excuse de la bavure. Je décris les exactions commises par Aïdar. Et effectivement, j’essaie d’expliquer comment un journaliste sur place a pu commettre cette erreur.

Y a-t-il grand-chose de si condamnable là-dedans ? Ne pas faire le procès d’Aïdar ? Désolé, mais ce n’est pas le sujet de l’article en question.

Encore une fois, je persiste à aborder les conflits et les crises à travers deux approches. Une approche analytique, dans laquelle je tâche de comprendre les enjeux globaux et transversaux. Une approche plus humaine –anecdotique ?- à travers des petites histoires, de gens, d’incidents, de drames… qui me paraissent aussi aider à la compréhension de l’incompréhensible. L’histoire de cet article de Elle en est un exemple. Visiblement, beaucoup des commentateurs de ce blog semblent convaincus de tout comprendre parfaitement à la situation. Moi, humble ignorant que je suis, je me contente de lire, d’interroger des gens et de débattre pour tâcher de démêler le fil d’une situation qui me parait sacrément complexe. Mais je confesse ne pas être d’une exceptionnelle intelligence !

Moi non plus, et, EN PLUS, je ne suis même pas journaliste :)

* Ensuite sur la forme :

Moins important mais pour le moins pas inutile, je m’étonne de votre méthode. Vous avez visiblement pris le temps d’une lecture très approfondie de mon article… et de mon CV. Vous semblez y trouver drôle que je sois doctorant et que je m’applique à développer une « expertise éclairée par des réflexions nourries par l’actualité et la connaissance ». Je ne vois pas ce qu’il y a de risible là-dedans, ma démarche me semble naïvement honnête.

Quitte à éplucher mon article et mon CV, vous auriez d’ailleurs pu me passer un coup de téléphone ou un mail. C’est par exemple ce que moi j’ai fait pour comprendre l’article de Elle : j’ai appelé les auteurs, d’autres gens connaissant le sujet, en France et en Ukraine.

Cela aurait pu être profitable à tous les deux. Moi j’aurais corrigé mon erreur à propos des pseudonymes des jeunes femmes (notez qu’après avoir apporté cette correction sur l’article, je l’ai signalé par honnêteté et parce que j’assume mes erreurs et corrections). Vous, vous auriez pu éviter ce pavé immonde qui n’apporte pas grand-chose à part nuire à ma réputation. Certains de vos lecteurs trouvent d’ailleurs l’idée de me mettre professionnellement en danger réjouissante… et j’avoue ne pas bien comprendre pourquoi.

Nous aurions pu discuter de la situation en Ukraine ou en Russie. Nous aurions pu discuter de luttes d’influences, de guerre de l’information et de propagande. Nous aurions pu discuter du travail des journalistes et de comment parfois nous nous trompons. Nous aurions pu discuter de blogs, puisque j’ai moi-même une longue expérience en la matière. Vous dites pourtant au téléphone être très enclin au débat et à l’enrichissement mutuel.

La différence entre vous et moi, Monsieur Berruyer, c’est que j’ai fait l’effort de chercher votre mail et votre téléphone pour vous contacter et vous répondre. Pas évident puisqu’il n’y a que le formulaire de contact sur votre site. Vous, Monsieur Berruyer, vous avez trouvé le formulaire sur RFI pour vous plaindre auprès de ma direction, appelant tous vos lecteurs à faire de même. Vous êtes débordé, m’avez-vous dit au téléphone, et n’avez pas pu prendre le temps de me contacter. Ce n’était pourtant pas bien compliqué à mettre en œuvre : mon téléphone et mon mail sont en évidence sur mon blog.

Vous auriez aussi pu regarder un peu mon travail. Vous auriez vu que l’on peut difficilement me faire le procès du parti pris, tant je traite de sujets divers et tant je souligne les bévues des uns et des autres, en m’acharnant à multiplier les sources divergentes.

Vous auriez pu me demander si mon appartenance à l’IPSE est aussi douteuse que vous le sous-entendez. J’aurais pu vous répondre que l’IPSE est une toute petite structure qui ne gagne pas beaucoup d’argent et qu’elle ne m’a jamais versé le moindre centime. Vous auriez pu voir en parcourant mon travail que j’interroge occasionnellement des gens de l’IPSE… mais plutôt très minoritairement, et seulement quelques uns d’entre eux, comme j’en interview dans tous les autres organismes. Vous auriez pu noter que je n’ai interviewé qu’une seule fois Mme Dugoin. Vous auriez pu du coup éviter de faire une comparaison idiote avec Fox News.

Si je suis si facilement joignable, via mon blog, mon mail, mon téléphone ou même mon Twitter, c’est parce que effectivement, j’aime discuter. J’aime me friter, m’engueuler, débattre, confronter les idées. Et oui, cela demande du temps, et de la discipline intellectuelle. Cela peut même se passer d’autant mieux lorsqu’on le fait dans le respect d’une certaine cordialité dont ni vous, ni vos lecteurs, n’avez fait preuve. Je m’en étonne d’autant plus que vous dites sur votre blog être strict en matière de modération des commentaires. Cela ne s’applique visiblement pas lorsqu’il s’agit de tirer au pigeon sur la cible du jour.

Vous m’avez proposé au téléphone d’enlever mon nom des mots clefs de votre billet. Vous avez raison, si cette affaire m’ennuie, c’est aussi que vos accusations remontent très haut sur Google.

Mais je respecte tout à fait votre avis sur ma personne. Pas la peine de faire descendre cet article dans le référencement. Pouvoir y répondre me suffit. Je répondrai dès qu’elle sera publiée aux commentaires des lecteurs.

L’un d’eux se flattait d’ailleurs de l’ambiance générale sur ce billet et sur ce blog. « On se retrouve dans une ambiance “Conseil National de la Résistance” », nous assure Krystyna le 05 janvier à 20h46. Sans me définir comme ni Gaulliste, ni communiste, l’attitude générale que vous avez dans cette discussion m’évoque plus un procès digne du War West, où l’on couvre l’accusé de goudron et de plumes, sans se soucier de ce qu’il pourrait avoir à dire. Non chers amis, l’esprit de Résistance, ce n’est pas cracher à le gueule d’un type qui tente de faire son travail le plus indépendamment et le plus sérieusement possible, pour un salaire minable au vu du temps qu’il y consacre. Non chers amis, l’esprit de Résistance, ce n’est pas d’insulter anonymement quelqu’un sans rien connaitre de son travail et de son identité. Non chers amis, l’esprit de Résistance, ce n’est pas de se baigner dans ses propres suppositions tout en méprisant ceux qui pensent différemment.

Tout cela étant dit, n’hésitez pas à ne pas suivre mon travail s’il vous parait si indécent. Dans le cas contraire, n’hésitez pas à le commenter ou à m’écrire pour en discuter. Merci, Monsieur Berruyer, d’avoir la courtoisie, finalement, de me laisser répondre après coup à tout cela. N’hésitez pas à me payer un coup à boire pour vous faire pardonner. Les lecteurs les plus agressifs sont également les bienvenus. Sans avoir mes entrées au Siècle, je bois du Talisker 18 ans et je fume des Cohibas Siglo II. Avis aux amateurs, parisiens ou de passage.

Ok pour le verre, à suivre !

R. Mielcarek, 12/01/2015

P.S. Les commentaires sont les bienvenus même critiques À CONDITION qu’ils soient constructifs et polis – on n’est pas au bistrot merci !

Source: http://www.les-crises.fr/reponse-rfi-elle/


Miscellanées du mercredi (Delamarche, Sapir, Béchade)

Wednesday 21 January 2015 at 00:15

I. Olivier Delamarche

Un grand classique : La minute d’Olivier Delamarche : Baisse du pétrole, il faut relativiser son impact! – 12/01

Olivier Delamarche VS Pascale Auclair (1/2): L’amélioration du marché de l’emploi est-elle porteuse de croissance ? – 12/01

Olivier Delamarche VS Pascale Auclair (2/2): Bourse: faut-il miser sur l’Europe ou sur les Etats-Unis ? – 12/01

II. Philippe Béchade

La minute de Philippe Béchade : Les chiffres et leur magie se jouent des marchés – 07/01

Philippe Béchade VS Stanislas De Bailliencourt (1/2): PIB: La France va perdre sa cinquième place au profit du Royaume-Uni – 07/01

Philippe Béchade VS Stanislas De Bailliencourt (2/2): La chute des cours du pétrole pourrait-elle troubler la politique monétaire de la Fed ? – 07/01

La minute de Philippe Béchade : La Russie à la recherche de 240 milliards ? – 14/01

Philippe Béchade VS Bernard Aybran (1/2): La stratégie de QE de la BCE sera-t-elle efficace pour l’économie ? – 14/01

Philippe Béchade VS Bernard Aybran (2/2): Assurance-vie: comment contourner la baisse des rendements en 2015 ? – 14/01

Bilan Hebdo: Éric Lewin et Jean-Louis Cussac – 16/01

III. Jacques Sapir

La minute de Jacques Sapir: Chute du pétrole, vers un violent rebond en septembre ? – 06/01

Jacques Sapir VS Cyrille Collet (1/2): Quelles sont les attentes des marchés pour la prochaine réunion monétaire de la BCE ? – 13/01

Jacques Sapir VS Cyrille Collet (2/2): Jusqu’où chuteront les prix du pétrole ? – 13/01


Grosse partie Charlie Hebdo, évidemment – en hommage à eux

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Images sous Copyright des auteurs. N’hésitez pas à consulter régulièrement leurs sites, comme les excellents Patrick Chappatte, Ali Dilem, Tartrais, Martin Vidberg, Grémi.

Source: http://www.les-crises.fr/miscellanees-21-01-2015/


[Annonce] Conférence de presse + réunion publique “Odessa à Paris” le 26 janvier

Wednesday 21 January 2015 at 00:01

Pour tous ceux qui veulent avoir un autre regard sur l’Ukraine, du dedans…

Communiqué de Presse 

A Odessa, des faits d’une gravité comparable aux deux massacres qui viennent d’avoir lieu à Paris se sont déroulés en mai 2014. Des proches des victimes vont venir témoigner en France.
Du 24 au 31 janvier, une délégation venue d’Odessa en Ukraine parcourra la France. Elle comprendra notamment Elena, qui est la mère de Andreï Brajevsky,  militant connu de l’organisation de gauche Borotba, âgé de 27 ans brulé vif le 2 mai 2014 dans l’incendie criminel de la maison des syndicats d’Odessa, massacre qui a couté la vie à une quarantaine d’opposants au nouveau régime ukrainien, et témoignera des difficultés d’obtenir justice dans l’Ukraine postérieure à la révolution de la place Maydan.
Elle comprendra aussi le secrétaire d’Odessa du parti communiste d’Ukraine, parti qui subit une procédure d’interdiction, et dont les militants sont persécutés, traqués, torturés et parfois assassinés. Le parti communiste d’Ukraine est une organisation démocratique qui milite pour le maintien de l’unité du pays et qui avait proposé fin 2013 une pétition pour le règlement de la question de l’accord avec l’UE par référendum, et obtenu plus de 4 millions de signatures. Si cette voie avait été choisie, le pays aurait fait l’économie d’un coup d’État et d’une guerre civile.
Une conférence de presse sera organisée le lundi 26 janvier après-midi, à l’AGECA (177 rue de Charonne, Paris 11ème), à partir de 14 heures (salle disponible jusqu’à 18 heures). Contact 06 77 97 64 68, laisser un message.
En soirée aura lieu une rencontre avec le public à la librairie Tropiques, 63 rue Raymond Losserand, Paris XIVème à 19 heures 30.
Elena sera présente aussi à la rencontre de politique internationale, organisée par le collectif Polex, à l’assemblée nationale, le mardi 27 janvier à 17 heures, sous les auspices de M Patrice Carvalho, député de l’Oise.
Le voyage de la délégation est organisé par Danielle Bleitrach (plus d’infos sur son blog) et Marianne Dunlop.
Ci-dessous voici les liens à deux textes, présentant le cas d’une autre victime du massacre, un jeune communiste de 17 ans, et le planning de la tournée en France:
Le combat de la mère de Vadim, victime du massacre d’Odessa

La douleur d’une mère qui a perdu son fils ne peut pas être décrite. La douleur brûle tout à l’intérieur. La vie perd son sens. Le Temps s’arrête. À cause de la haine humaine, du désespoir…
Antifascisme en Ukraine : tournée en France d’une délégation d’Odessa, à partir du 24 janvier 2015 (Marseille, Nord, Pas de Calais, région parisienne et Lyon)

Source: http://www.les-crises.fr/conference-de-presse-odessa-a-paris-le-26-janvier/


Le franc suisse flotte librement : point sur la controverse

Tuesday 20 January 2015 at 02:21

Point sur un événement important éclipse par la suite du drame Charlie Hebdo…

74 457e preuve que les changes fixes, ça ne marche jamais bien longtemps…

Bientôt au tour de l’euro ?

Une journée et une controverse historiques

La devise a bondi de 30 % avant que l’euro s’établisse à 1,03 franc suisse contre 1,20 la veille. La banque centrale est intervenue en catastrophe pour vendre des francs.

Stupeur et surprise, la Banque nationale Suisse (BNS) a annoncé qu’elle abandonnait le cours plancher de 1,20 franc suisse par euro, qu’elle avait établi en septembre 2011 pour lutter contre l’appréciation de la devise helvétique. Conséquence immédiate, le franc suisse est passé sous la parité avec l’euro (1 euro = 0,85 franc suisse contre 1,20 la veille) et a gagné jusqu’à 29 %. En milieu de journée, la devise gagnait 16 % à 1,03 franc suisse pour un euro et 14 % par rapport au billet vert, le dollar s’établissant à 0,89 franc suisse. Cela représente un bond de 15 % en une journée du taux de change global de la monnaie helvétique. Du jamais vu et cette séance historique va laisser de profondes traces dans la « psyche » des marchés. Les contrats à terme sur le franc suisse ont connu pas moins de 11 perturbations (arrêt de cotation pendant une minute) dans la journée compte tenu de la volatilité et des volumes très élevés. La BNS est intervenue en catastrophe pour tenter, au moins, de stabiliser sa monnaie juste au dessus de la parité. Dans l’attente d’un éventuel « plan B ». Dans une conférence de presse, Thomas Jordan a récusé toute « décision panique » estimant qu’elle avait été au contraire réfléchie et pesée. Il a aussi précisé que la BNS n’abandonnait pas tout soutien à sa devise. « La BNS continuera de prendre en compte la situation sur le marché des changes pour définir sa politique monétaire. Aussi interviendra-t-elle au besoin sur ce marché en vue d’influer sur les conditions monétaires ». Il reste à savoir sous quelle forme. La banque centrale pourrait choisir de lier le franc suisse à un panier de devises (euro, dollar, yen, …). De manière officieuse, « la BNS peut vouloir stabiliser sa monnaie autour de 1,10 franc suisse par euro, mais défendre ce niveau va être coûteux et difficile », insiste Beat Siegenthaler stratège chez UBS. Ce dernier souligne que l’intégralité du bénéfice de la BNS en 2014 s’est évaporé en moins d’une journée.

La justification de la BNS

« L’introduction du cours plancher a eu lieu dans une période d’extrême surévaluation du franc et de très forte incertitude sur les marchés financiers. Cette mesure exceptionnelle et temporaire a préservé l’économie suisse de graves dommages. « Le franc demeure certes à un niveau élevé, mais depuis l’introduction du cours plancher, sa surévaluation s’est dans l’ensemble atténuée. L’économie a pu profiter de cette phase pour s’adapter à la nouvelle situation », a justifié la BNS . « Les disparités entre les politiques monétaires menées dans les principales zones monétaires ont fortement augmenté ces derniers temps et pourraient encore s’accentuer. L’euro a nettement faibli par rapport au dollar des Etats-Unis, ce qui a également conduit à une dépréciation du franc face au dollar ». Dans ce contexte, la Banque nationale est parvenue à la conclusion qu’il n’est plus justifié de maintenir le cours plancher. Une erreur historique pour beaucoup d’économistes.

Couper les ponts avec la BCE

La banque JP Morgan souligne qu’un tel geste doit être rapproché de l’annonce par la BNS de profits très élevés en 2014 (38 milliards de franc suisses). Sans ce matelas de sécurité financier, l’envolée du franc suisse aurait causé des pertes retentissantes à l’institut d’émission, sinon sa banqueroute. Toutefois, « il est étonnant que la BNS ait laissé flotter librement sa monnaie sans mécanisme de transition. Cela risque d’entraîner des mouvements très exagérés et une hausse du franc suisse au-delà de sa valeur fondamentale », note la banque. Pour elle, la logique de cette décision est de « couper les ponts avec la BCE », c’est-à-dire de ne plus être tributaire des décisions de la BCE, dans la perspective de l’assouplissement quantitatif que devrait mener bientôt la BCE. Une action qui affaiblira l’euro. « La BNS a reculé devant la perspective de devoir intervenir massivement pour s’opposer à ce mouvement de repli de l’euro », estime Daragh Maher de HSBC, dont la banque prévoit désormais un euro à 0,95 franc suisse fin 2015. Longtemps un combattant farouche dans la guerre des changes, le franc suisse a abandonné provisoirement ce conflit planétaire face à un adversaire de taille, l’euro.

Pandémonium des spéculateurs

Ce bond du franc suisse devrait se traduire par de très lourdes pertes chez certains intervenants (banques, hedge funds, fonds spécialisés sur les devises, spéculateurs particuliers…) : les marchés étaient vendeurs de franc suisse contre des euros et dollars avant cette décision. En outre très peu positions en options avaient été mises en œuvre pour se couvrir contre un mouvement défavorable (hausse) du franc suisse. Aucun stratège n’anticipait un tel geste, ou en tout cas pas si vite. L’euro contre franc suisse est une parité, « ennuyeuse » peu volatile où il ne se passe pratiquement rien dans 99% des séances… mais 1% des journées sont historiques. La volatilité exceptionnelle va faire de gros dégâts. Quand les mouvements sont trop brusques et la nervosité extrême, les modèles de gestion des risques sont souvent pris en défaut. « L’impact négatif sur l’appétit pour le risque et la crédibilité de la BNS sont les effets les plus importants de cette décision » souligne George Saravelos de la Deutsche bank. Le geste de la BNS, pour le moins controversé, équivaut à un durcissement monétaire, même si elle a tenté de l’atténuer en abaissant aussi ses taux d’intérêt. «Il est frappant que la BNS prenne le risque que la hausse du franc suisse installe l’économie dans la déflation. Elle peut croire qu’elle est moins exposée à ce risque que les autres banques centrales compte tenu de son expérience passée, couronnée de succès, à se mouvoir dans un environnement de faible inflation voire déflation » avance Steven Englander, responsable de la stratégie sur les grandes monnaies chez Citi

Inquiétudes des industriels suisses

Passée la stupeur, les industriels suisses ont fait part de leurs inquiétudes et colère face à la dégradation prévisible de leur compétitivité du fait de l’envolée du franc suisse. Visiblement très choqué, Nick Hayek, le directeur général de Swatch a déclaré : « Les mots me manquent. Jordan n’est pas seulement le nom du président de la BNS mais aussi celui d’une rivière. Et l’action de la BNS est un véritable tsunami pour nos exportateurs, pour le tourisme et pour toute notre économie ».

N.A.-K

Source : Les Echos, 15/01/2015

Nuno Fernandes: «la BNS a perdu sa crédibilité »

Pour Nuno Fernandes, professeur à l’IMD, la Banque nationale suisse a poursuivi pendant trop longtemps sa politique peu judicieuse de taux de change

Malgré le manque de neige dans de nombreuses stations de ski en Suisse, une avalanche majeure a commencé jeudi à Zurich. La Banque nationale suisse (BNS) a mis fin à la stabilisation du franc suisse par rapport à l’euro, qui avait débuté en 2011.

Un mouvement inattendu

Cette décision était très inattendue et a provoqué la panique sur la Bourse suisse. Il y a moins d’un mois, le président de la BNS, Thomas Jordan, avait déclaré que des mesures de contrôle des taux de change de la Suisse maintenant le franc suisse à 1,20 franc par rapport à l’euro étaient «absolument nécessaires». Jordan avait alors indiqué qu’il allait mettre en œuvre la politique avec «la plus grande détermination».

Comme je l’avais prédit dans le Financial Times lorsque la BNS a commencé sa politique en 2011, le taux plancher s’est avéré extrêmement coûteux pour le pays alpin.

La BNS a poursuivi pendant trop longtemps sa politique de stabilisation du franc suisse par rapport à l’euro et ce faisant, elle a perdu sa crédibilité. La banque a cessé trop tard d’appliquer le taux plancher. La politique n’était pas viable et plus elle durait, plus les coûts étaient élevés pour l’économie suisse. La BNS n’a réagi qu’une fois l’assouplissement quantitatif dans la zone euro devenu extrêmement probable et imminent. Elle aurait dû s’apercevoir plus tôt que sa politique n’était pas viable.

Une exposition énorme

Le bilan de la BNS est maintenant surexposé en raison de l’augmentation massive des devises étrangères qu’elle a achetées pour maintenir le franc suisse à 1,20 franc. Le bilan de la BNS a doublé au cours des trois années écoulées, depuis l’introduction du taux plancher, pour atteindre un montant incroyable de 500 milliards de francs, équivalent à 100 % du PIB de la Suisse. En pourcentage du PIB, c’est trois fois plus que la moyenne des autres banques centrales comme la Banque d’Angleterre, la Banque centrale européenne, la Réserve fédérale américaine et la Banque du Japon. Cela signifie que la BNS est vulnérable et extrêmement exposée.

Au taux de change actuel de 1:1 franc par rapport à l’euro, la BNS serait officiellement en faillite s’il s’agissait d’une banque normale. Aujourd’hui, avec la réévaluation de 20% du franc, la banque a perdu près de 100 milliards de francs. Ses capitaux propres ont chuté de près de 70 milliards de francs à une valeur de marché négative d’environ 20 milliards de francs. Bien sûr, la presse à imprimer peut être activée, mais quelles seraient les conséquences pour l’inflation?

Une avalanche pour les entreprises suisses

C’est aussi une avalanche massive pour les entreprises suisses. Les revenus des sociétés ayant des activités internationales vont diminuer. Les entreprises fabriquant des produits en Suisse et comptant sur les exportations auront du mal à éviter des pertes.

Le taux plancher de la BNS a eu une implication importante pour les entreprises suisses. Les gestionnaires ont oublié de penser au risque du taux de change. Il semblait avoir disparu, et la Suisse semblait être dans l’Union européenne, avec un taux de change de 1,20 francs : 1 euro*.

Cela a créé un faux sentiment de sécurité, et les entreprises ont cessé d’effectuer des opérations de couverture et d’essayer d’améliorer leur chaîne d’approvisionnement internationale pour réduire les risques. Le taux de change était censé demeurer pour toujours, selon les récentes déclarations de la BNS. Mais le risque était toujours présent, et les entreprises suisses ont été trompées par la couverture de sécurité. Maintenant, elles sont confrontées à des pertes massives et même à des faillites.

Taux d’intérêt négatif

Le taux d’intérêt négatif également annoncé aujourd’hui par la BNS n’est à mon sens pas pertinent. Compte tenu de ces fluctuations massives, le taux négatif ne sera d’aucun secours.

En 2011, j’avais prédit dans le Financial Times que: «La Banque centrale suisse va potentiellement doubler ou tripler la quantité de devises étrangères sur son bilan et subira probablement des pertes massives».

Malheureusement, j’avais raison.

*Nuno Fernandes est professeur de finance à l’IMD, où il dirige le programme de Finance stratégique. Il est l’auteur de La finance : guide pratique à l’intention des cadres.

Source : Le Temps

Le franc suisse provoque la panique dans l’est de l’Europe

Des dizaines de milliers de ménages en Croatie et en Pologne s’inquiètent du remboursent de leurs crédits immobiliers libellés en francs suisses.

La décision de la Banque nationale suisse (BNS) d’abolir jeudi le cours plancher de sa monnaie face à l’euro a levé un vent de panique en Pologne où quelques 700’000 ménages détiennent des crédits immobiliers libellés en devise helvétique, le zloty décrochant de près de 20% face au franc.

La bourse de Varsovie chutait jeudi de quelque 2% à la mi-journée.

40% des crédits en francs suisses

A 13H00 (12H00 GMT) le franc suisse s’échangeait contre 4,20 zlotys, soit une hausse de 18,5% par rapport à mercredi. Peu après l’annonce de la banque suisse, le franc avait crevé le plafond de cinq zlotys.

Environ 40% des crédits immobiliers en Pologne sont libellés en francs suisses représentant un volume de quelque 31 milliards d’euros, selon la Commission polonaise de surveillance des banques (KNF).

Selon les experts, si la situation actuelle devait persister, la traite mensuelle pour un crédit immobilier moyen de 300’000 zlotys (69’000 euros) augmentera de quelques 200-300 zlotys (46-69 euros).

En octobre, des rumeurs sur une éventuelle hausse du franc face au zloty avaient poussé les hommes politiques, aussi bien de la coalition au pouvoir que de l’opposition à demander au gouvernement et aux banques de se pencher sur ce problème alors potentiel.

En Croatie aussi

En Croatie, autre pays de l’Union européenne, l’association Franak représentant des emprunteurs de crédits libellés en francs suisses a demandé une réunion d’urgence avec le gouvernement, mettant en garde jeudi contre une «catastrophe».

La devise croate, la kuna (HRK), a décroché de près de 17% face au franc suisse après la décision de la Banque nationale suisse (BNS).

Selon l’association Franak, quelque 60’000 particuliers en Croatie remboursent encore leurs crédits – essentiellement des prêts immobiliers -, libellés en francs suisses et cette hausse de sa valeur affectera entre 200’000 et 300’000 personnes de ce petit pays de 4,2 millions d’habitants.

La Hongrie respire

En Hongrie, le gouvernement s’est félicité que ses citoyens, dont beaucoup ont contracté des emprunts immobiliers en francs suisses, sont désormais protégés par la loi contre les effets de l’envolée jeudi de la devise helvétique.

A l’instigation du Premier ministre conservateur Viktor Orban, le Parlement hongrois a adopté en novembre une loi destinée à protéger les débiteurs en devises étrangères. Cette loi prévoit un taux de conversion fixe de 256,5 forints (HUF) pour 1 franc suisse, et de 309,5 HUF pour 1 euro.

Jeudi, après avoir brièvement chuté à 326 HUF/euro contre 318 HUF la veille, la devise hongroise s’est reprise à 321 HUF. Comme la plupart des autres devises, le forint a en revanche décroché de près de 30% par rapport au franc suisse, à 393 HUF.

La Hongrie avait souffert en 2008

La décision de la Banque nationale suisse (BNS) de laisser librement flotter le franc suisse jeudi «confirme le gouvernement dans ses efforts pour réduire la dette en devises étrangères, efforts qui ont significativement réduit la vulnérabilité de la Hongrie, tant à l’échelle du pays que pour les particuliers», estime le ministère.

Lors de la crise financière de 2008, un million de ménages hongrois avaient été confrontés à une explosion du coût de leurs emprunts immobiliers, pour la plupart libellés en francs suisses.

Selon le ministère, la mise en place de taux de conversion fixes a permis aux emprunteurs hongrois d’économiser plus de 500 milliards de forints à ce jour, soit plus de 1,5 milliard d’euros.

L’Autriche se congratule

En Autriche, les autorités monétaires se sont félicitées en revanche que Vienne ait interdit en 2008 les nouveaux emprunts en devises étrangères, en réaction à la flambée de la devise helvétique.

Le franc suisse a bondi pour atteindre la parité avec l’euro, après l’annonce par la BNS jeudi qu’elle abandonnait le cours plancher de 1,20 franc suisse pour un euro. (smk/afp/Newsnet)

Source : Tdg, 15/01

Ce “tsunami financier” déclenché par la Suisse

Après la décision prise par la Banque nationale suisse d’abandonner le taux plancher, voici l’analyse des conséquences pour l’économie helvétique et ces voisins européens.
La Suisse est en pleine tempête. La Banque Nationale Suisse (BNS) a pris les marchés par surprise en annonçant jeudi 15 janvier l’abandon du taux plancher, déclenchant une montée en flèche du franc suisse et un “tsunami financier”.

L’onde de choc provoquée par la décision surprise de la Suisse frappe de plein fouet son économie et continue vendredi 16 janvier à provoquer des vagues sur les marchés financiers.

La bourse suisse à Zurich a clos avec une chute de 5,96%, l’indice SMI passant sous la barre des 8.000 points à 7.899,59 points.

Jeudi la bourse avait plongé de 8,7%, un record depuis 1988, suite à la hausse du franc après la suppression du cours plancher avec la Banque Nationale Suisse.

En outre, pour la première fois, le taux d’emprunt à 10 ans de la Suisse sur le marché obligataire secondaire est devenu négatif, avec un taux de -0,031%, contre +0,076% la veille à la clôture.

Concrètement, cela signifie que celui veut prêter de l’argent à la Suisse doit payer pour le faire. Ces taux négatifs devraient en principe décourager les investisseurs de se placer sur le franc suisse, car ils y perdent actuellement. Les investisseurs devraient alors se tourner vers d’autres monnaies comme l’euro.

Jeudi, le franc suisse a gagné environ 20% par rapport aux autres monnaies. Il s’échange désormais autour de la parité avec l’euro, soit 1 euro = 1 franc suisse.

“Aux yeux de l’économie, cette mesure est incompréhensible au moment actuel”, affirment les patrons suisses.

Challenges.fr revient sur les questions que posent cette décision.

Qu’est-ce que le taux plancher ?

En septembre 2011, en pleine crise de l’euro, la banque centrale helvétique avait fixé un taux de change minimum à 1,20 franc suisse pour 1 euro afin de décourager les investisseurs de se retrancher derrière sa devise, une valeur refuge par excellence, alors que sa surévaluation avait lourdement impacté les entreprises exportatrices suisses.

“Cette mesure exceptionnelle et temporaire a préservé l’économie suisse de graves dommages”, a expliqué la BNS dans un communiqué.

Pourquoi le taux plancher est-il supprimé?

Ces dernières semaines, cet axe central de sa politique monétaire a cependant été malmené par la chute de l’euro face au dollar, qui a entraîné par ricochet une dépréciation du franc suisse face au billet vert.

“Dans ce contexte, la Banque nationale est parvenue à la conclusion qu’il n’est plus justifié de maintenir le cours plancher”, a-t-elle considéré.

L’an passé, le franc suisse s’était dangereusement rapproché du cours plancher alors que la BNS s’était retrouvée prise en étau entre la politique monétaire de la Banque Centrale Européenne (BCE), qui s’acheminait vers un assouplissement quantitatif, et celle de la Réserve fédérale américaine, qui s’orientait au contraire vers un relèvement des taux.

Lors d’une conférence de presse à Zurich au siège de la BNS, Thomas Jordan, son directeur général, a déclaré que compte tenu de l’évolution de la situation dans les principales zones monétaires “s’accrocher au taux plancher n’avait plus de sens à long terme”, estimant qu’il s’agissait du “bon moment” pour y renoncer.

Selon François Chevallier , responsable de la stratégie à la Banque Leonardo, contacté par Challenges.fr, cette décision “traduit une anticipation par la Suisse d’un programme de Quantitative easing (QE) que devrait annoncer la Banque centrale européenne la semaine prochaine. Si la suisse supprime ce taux plancher c’est qu’elle a des informations sur un rachat massif des dettes souveraines par la BCE. Le QE libère de l’argent pour d’autres placements. Par cette décision, la BNS veut clairement dissuader les gens de placer leur argent sur du franc suisse. C’est une mesure de protection”.

Dans la foulée la BNS a d’ailleurs annoncé qu’elle abaissait à nouveau son taux d’intérêt, à -0,75% (taux de dépôt négatif) afin de réduire l’attrait du franc suisse.

Quelles conséquences pour la Suisse ?

Cette décision a pris les investisseurs par surprise, déclenchant une véritable choc sur les marchés. “Le marché ne l’avait clairement pas vu venir”, a réagi Andreas Ruhlmann, analyste chez IG Bank, évoquant un changement “drastique” de politique monétaire.

La bourse suisse à Zurich a clos avec une chute de 5,96%, l’indice SMI passant sous la barre des 8.000 points à 7.899,59 points.

Jeudi la bourse avait plongé de 8,7%, un record depuis 1988, suite à la hausse du franc après la suppression du cours plancher avec la Banque Nationale Suisse.

Les 20 valeurs vedettes de la cote sont toutes en baisse.

“Il s’agit d’un mini krach. La crédibilité de la BNS est entamée”, a jugé Christopher Dembik, Economiste chez Saxo Banque.

La situation sur les marchés Suisses est totalement délirante après la décision surprise de la Banque Nationale Suisse. Encore un black swan

— Marc Fiorentino (@marcfiorentino) 15 Janvier 2015

#Suisse : Ce qui s’est passé hier rappelle les grandes heures du système monétaire Européen avec des dévaluations et réévaluations.

— Marc Fiorentino (@marcfiorentino) 16 Janvier 2015

Cette décision soulève d’ores et déjà de vastes interrogations quant à son impact sur l’économie suisse. “Une période de forte déflation est un risque sérieux”, a estimé Christian Schulz, économiste chez Berenberg, pointant que les secteurs d’exportations, le commerce de détail mais aussi le tourisme risquaient d’en souffrir.

La banque suisse UBS prévoit ainsi d’importants impacts négatifs pour l’économie helvétique après l’abandon du taux plancher. Dans une note, les experts d’UBS estiment que cette mesure va réduire de 5 milliards de francs suisses (5 mlds euros) les exportations suisses. Pour 2015, les experts économiques de la 1ère banque suisse tablent désormais sur une croissance de 0,5% (au lieu de 1,8%) et pour 2016 de 1,1% (au lieu de 1,7%).

Economiesuisse prévoit dès à présent que des entreprises exportatrices et que le secteur du tourisme seront obligés de “réduire la voilure”. L’organisme affirme également que le “tourisme d’achat”, soit celui des Suisses qui traversent la frontière pour faire leurs courses et qui pénalisent les commerçants locaux, risque aussi de repartir de plus belle à la hausse.

Le secteur du textile a également fait part de son inquiétude, car il exporte 75% de sa production vers l’UE. Ce secteur qui emploie plus de 12.500 personnes, s’attend à des fermetures d’entreprise, et par conséquent à des pertes d’emplois.

Secteur emblématique, l’industrie horlogère suisse voit le prix de ses montres bondir de 15% à 20% pour ses clients étrangers, alors que le Salon international de la Haute Horlogerie, qui accueille des milliers de revendeurs étrangers, va ouvrir ses portes lundi prochain à Genève.

Quelles retombées pour les voisins européens ?

L’envolée du franc suisse a levé un vent de panique en Pologne et en Croatie, où des centaines de milliers de ménages détiennent des crédits immobiliers libellés en devise helvétique.

Le zloty polonais a décroché de près de 20% face au franc et la Bourse de Varsovie chutait jeudi de quelque 3% en fin de journée.

Environ 40% des crédits immobiliers en Pologne sont libellés en francs suisses, représentant un volume de quelque 31 milliards d’euros, selon la Commission polonaise de surveillance des banques (KNF). Environ 700.000 ménages y détiennent de tels crédits.

“Ça va être douloureux, reconnaît Piotr Andrzejewski, un cadre varsovien quadragénaire. C’est plus difficile pour ceux qui doivent vendre aujourd’hui leur appartement alors qu’ils remboursent encore leur crédit. Il peut arriver que la valeur du crédit à rembourser à la banque dépasse largement celle du logement.”

Jusqu’à ces derniers temps, les crédits en francs suisses étaient ceux qui étaient les mieux remboursés en Pologne. Cependant, la KNF a publié en juin 2013 une recommandation limitant fortement l’octroi de crédits libellés en FS en raison de risques qu’elle pressentait.

Selon les experts, si la situation actuelle devait persister, la traite mensuelle pour un crédit immobilier moyen de 300.000 zlotys (69.000 euros) augmentera de quelques 200-300 zlotys (46-69 EUR).

En Croatie, autre pays de l’Union européenne, l’association Franak représentant des titulaires de crédits libellés en francs suisses a demandé une réunion d’urgence avec le gouvernement, mettant en garde contre une “catastrophe”. La devise croate, la kuna (HRK), a décroché de près de 17% face au franc suisse. Selon Franak, cette hausse de leur valeur affectera entre 200.000 et 300.000 personnes de ce petit pays de 4,2 millions d’habitants.

En Autriche, les autorités monétaires se sont en revanche félicitées que Vienne ait interdit en 2008 les nouveaux emprunts en devises étrangères, en réaction à la flambée de la devise helvétique.

William Jackson, analyste du centre de recherche londonien Capital Economics, tempère: “Il y a quelques années, une forte hausse du franc suisse aurait pu provoquer la panique sur les marchés financiers en Europe centrale et orientale. Mais il y a des raisons de penser que maintenant les retombées devrait être mieux gérables.”

Source : Challenges

Source: http://www.les-crises.fr/franc-suisse-flotte-bns/


[Annonce] Conférence des Éconoclastes en Belgique le 29 janvier 2015

Tuesday 20 January 2015 at 00:30

LES ÉCONOCLASTES

Sont heureux de vous inviter à leur première conférence en Belgique !

Le jeudi 29 janvier 2015

Université Catholique De Louvain la Neuve – UCL
Auditoire Montesquieu
32 rue Montesquieu
1348 Louvain la Neuve

Participeront à cette table ronde : Steen Jakobsen, Philippe Béchade, Nicolas Meilhan, Pierre Sabatier, Olivier Delamarche, Loïc Schmid, Benjamin Louvet

Plan >>> cliquez ici

Nous vous recevrons à partir de 17h30, la conférence débutera à 18h et se terminera vers 21H.

Le formulaire d’inscription cliquez ici

L’entrée est gratuite, mais la priorité sera donnée aux adhérents – pour devenir adhérent >>> cliquez ici !

Au plaisir de vous rencontrer sur place !

Source

 

Source: http://www.les-crises.fr/annonce-conference-des-econoclastes-en-belgique-le-29-janvier-2015/