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Les Sages censurent une mesure anti-fraude fiscale. Scandaleux ?

Monday 12 December 2016 at 00:25

Voici une décision parfaitement scandaleuse du Conseil constitutionnel, qui est bien plus politique que juridique (Lire ici).

En effet, on cherchera longtemps dans la Constitution ce qui pourrait interdire cette mesure, on est en pleine création de droit par cette instance qui n’est soumise à aucun contrôle. La publicité d’un tel reporting est une mesure très importante pour que les citoyens puissent faire pression.

Un exemple, sur le fond. Si d’un côté une multinationale se plaint de devoir publier le détail de ses comptes en France et en Italie disons, il est clair qu’elle dispose de ces informations sur ses concurrents plus petits, nationaux, qui publient bien leur comptes en France pour les Français, et en Italie pour les Italiens… La décision inverse de celle prise par le Conseil constitutionnel peut donc être facilement défendue, et par là-même, face à une absence d’évidente violation de la Constitution, il ne lui revient pas de contredire le législateur élu.

En termes de réforme constitutionnelle, je défens l’idée d’une Cour constitutionnelle : 1/ composée uniquement de spécialistes du droit constitutionnel 2/ désigné par une procédure garantissant l’indépendance des membres 3/ qui ne doit se prononcer que sur des violations “manifestes” de la Constitution afin d’éviter des abus touchant aux libertés publiques, le législateur ayant une légitimité bien supérieure à celle de cette Cour. Elle ne doit pas violenter les mouches en faisant des interprétations hautement discutables…

Source : Le Nouvel Obs, Pascal Riché, 09-12-2016

PHOTO / THOMAS SAMSON / AFP PHOTO / THOMAS SAMSON

PHOTO / THOMAS SAMSON / AFP PHOTO / THOMAS SAMSON

Les Sages considèrent que la publication des comptes pays par pays, prévue par la loi Sapin 2, est contraire à la liberté d’entreprendre. Oxfam et CCFD-Terre Solidaire s’insurgent.

Le Conseil constitutionnel, qui a censuré dans la loi “Sapin 2” une disposition obligeant les multinationales à plus de transparence, a-t-il rendu une décision scandaleuse ? C’est ce qu’affirment des organisations comme Oxfam et CCFD-Terre Solidaire qui, dans un communiqué, parlent de “coup d’arrêt” à la lutte contre la fraude fiscale et de “signal désastreux” alors que la France accueille cette semaine un sommet international sur la transparence (Open Government Partnership).

La disposition visée obligeait les grands groupes à publier leur “reporting fiscal pays par pays” en vue de limiter les risques de manipulations fiscales frauduleuses : les bénéfices et les impôts qu’ils payent partout dans le monde, y compris dans les paradis fiscaux.

Pour le Conseil constitutionnel, cette disposition risque de donner trop d’information à la concurrence et donc de la favoriser. Il a donc, le 8 décembre, estimé qu’elle était “une atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre”.

Les dix Sages (dont Laurent Fabius, Lionel Jospin, Valéry Giscard d’Estaing, Michel Charasse) n’étaient pas obligés de trancher ainsi : la liberté d’entreprendre, selon sa propre jurisprudence, n’est ni générale, ni absolue. Elle peut être écornée si l’intérêt général l’exige. Ainsi, l’impôt nuit sans doute à la liberté d’entreprendre, mais il n’est pas anticonstitutionnel (dieu merci). De même, les entreprises publient leurs comptes nationaux au registre du commerce, sans qu’on ne considère cela comme une mesure attentatoire à leur liberté.

Une décision qui fragilise Paris

 

Lire la suite : Le Nouvel Obs, Pascal Riché, 09-12-2016

Source: http://www.les-crises.fr/les-sages-censurent-une-mesure-anti-fraude-fiscale-scandaleux/


[Humour] Macron disjoncte…

Sunday 11 December 2016 at 03:33

Allez, un peu d’humour… Les banquiers parlent au Français :


Macron en vrille (12/2016)

revolution

Bien sûr

Anti-système même (Source)…

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antisysteme

(on voit au passage le degré de connaissance qu’ont les journalistes de la campagne de Trump…)

Source: http://www.les-crises.fr/macron-disjoncte/


[Vidéo] Philippe Pascot dénonce « la mafia des élus » !

Sunday 11 December 2016 at 01:00

Les révélations sur le train de vie des élus sont nombreuses et choquantes, mais il y a pire, puisque certains de ces élus sont des délinquants récidivistes qui se font réélire sans grande difficulté, malgré des casiers judiciaires ultra chargés.

Voici quelques perles : – Le salaire minimum d’un député : 13500 € ! – Temps de travail moyen global : 21% du temps obligatoire. – 1 sénateur peut voter pour 100 sénateurs

Un élu a le droit de cumuler 5 retraites, sans plafonnement !

20 députés ont des salaires de 800.000 € par mois et perçoivent tout de même l’indemnité de député ! –

160 députés se sont payé des villas ou maisons particulières avec l’IRFM.

Un élu cumule actuellement 48 mandats différents !!!

Une députée PS, Sylvie Andrieux, se rend à l’Assemblée avec un bracelet électronique, étant condamnée par la justice. – …

Capture d’écran 2016-04-19 à 04.28.50

Source: http://www.les-crises.fr/philippe-pascot-denonce-la-mafia-des-elus/


Trump : Tout changer pour que rien ne change… par Richard Labévière

Sunday 11 December 2016 at 00:33

Source : Proche & Moyen Orient, Richard Labévière, 11-12-2016

Les Baux-de-Provence, le 11 novembre 2016.

Tout d’abord, prochetmoyen-orient.ch doit rendre un hommage appuyé à l’un de ses plus vieux amis, l’expert en stratégie militaire Nissim Marshall qui a bien d’autres cordes à son arc : traducteur de renommée internationale, critique littéraire, peintre reconnu, excellent cuisinier et amateur de 2/Chevaux. Depuis deux ans, Nissim Marshall explique à ses voisins provençaux que Trump va gagner, et ce pour une raison très simple. Dans son Mein Kampf, Hitler l’a écrit très clairement : quiconque veut prendre le pouvoir doit se fabriquer un ennemi. En l’occurrence, ce seront les Juifs et les communistes. On connaît malheureusement la suite…

Dès le début de son ambition présidentielle Trump a désigné très précisément son ennemi : les Mexicains, les Musulmans et les femmes… Les Bobos des Alpilles n’entendaient rien, écoutant notre ami visionnaire les yeux écarquillés en lui conseillant de lire Le Monde. Tous les jours, Nissim Marshall décrypte scrupuleusement la presse américaine. Sa carrière internationale lui a apporté une connaissance intime des Etats-Unis et, pour notre part, nous continuons à partager ses analyses toujours originales et argumentées et fondées sur les meilleures sources.

A l’unisson des tréfonds d’une société américaine en pleine déglingue, les messages haineux de Trump ont rencontré une adhésion autant immédiate que non dite parce que non avouable. La haine est un affect clandestin qui fait rarement lien social assumé et ne s’étale pas à la Une des journaux… Les ventes libres d’armes de guerre, l’exécution à répétition de Noirs par les forces de l’ordre, les attentats terroristes, la crise des subprimes qui a mis à la porte quelque 9 millions d’Américains, 15% des habitants à la soupe populaire, 5% de la population engrangeant 85% de la richesse nationale et la croissance exponentielle de homeless qui dorment dans des cartons… Les sondeurs, qui le plus souvent travaillaient exclusivement par Internet et réseaux « numériques » mal nommés « sociaux », ne pouvaient que se planter. Ne parlons pas des journalistes, qui dans leur écrasante majorité, avaient opté pour Hillary, oubliant depuis belle lurette leur métier d’informer pour verser dans un trafic d’influences, sinon une propagande obscène de classe, celle de la technostructure s’entend…

Plus profondément encore, Nissim Marshall interpelait ses incrédules lecteurs des seules Lettres de mon moulin sur l’état réel du monde : la guerre de tous contre tous, l’avènement du Léviathan dont Thomas Hobbes prédisait les ravages dès 1651… Nous y sommes depuis la chute du Mur de Berlin. Et lorsque, dans les dîners en ville, un Candide lance la conversation sur la Troisième guerre mondiale qui menace, rares sont les convives suffisamment lucides pour expliquer que celle-ci bat déjà son plein. Elle est nulle part parce qu’elle sévit partout !

La Troisième guerre mondiale ne creuse pas de tranchées et ne programme pas de débarquement massif, mais multiplie les conflits asymétriques, l’engagement clandestin de forces spéciales, de drones et de contractors et autres milices privées. Elle n’a plus d’armées nationales, de lignes de front ni de cartographie mais génère des destructions fluides et rhizomatiques, sans foi ni loi, ni d’autres logiques que celle de la course à l’argent, l’argent et l’intérêt économique à court terme, devenu la seule référence de relations internationales dominées par le chaos généralisé, la multiplication d’acteurs improbables mus par l’appât du gain. Dans ce contexte, il n’est pas très étonnant qu’un homme d’affaires prédateur et grand voyou s’impose ainsi comme l’idéal et l’incarnation de nos « démocraties ».

Nos « démocraties », parlons-en ! Pour son élection phare, la plus grande démocratie du monde commence par accumuler des fonds colossaux qui vont jusqu’à représenter dix fois le budget des Etats les plus pauvres de la planète. Depuis le début de la course à la Maison blanche, la Fondation Clinton a commencé par faire main basse sur toutes les donations à destination du Parti démocrate, empêchant ainsi l’émergence de toute candidature sérieuse autre que celle d’Hillary. Enfin, et il faut bien-sûr ici relire Tocqueville : proclamer à tout bout de champ l’égalité des droits finit par rendre encore plus insupportable les inégalités de faits, celles qui affectent quotidiennement et concrètement la vie quotidienne.

A contre-champ, Trump – homme d’affaires des plus douteux aux faillites retentissantes à répétition – s’était déjà imposé dans l’imaginaire des Américains, non seulement depuis la hauteur de sa tour impressionnante, mais surtout dans les émissions les plus débiles de télé-réalité. Incarnation du « rêve américain » ? A voir… En tout cas symbole d’une réussite par tous les moyens possibles, médiatisée par un système dans lequel les enfants comptabilisent plus d’heures de jeux électroniques (tout aussi débiles) que d’heures de lecture et d’écriture. L’écriture ? Dans la mesure où l’on considère que le progrès se réduit à installer des claviers d’ordinateur dans les classes enfantines où l’on n’apprend plus à nos chères têtes blondes ou crépues à former des lettres avec leur main mais à surfer sur Internet et dans les banques de données… Qu’on ne s’étonne pas ensuite de voir sortir des écoles des générations de crétins qui risquent de voter pour Trump ou des clones du genre…

Comme dit Labiche, « C’est fait ! C’est horrible, mais c’est fait ! » On verra, comme ce fut le cas avec Ronald Reagan, qu’aucun chambardement majeur ne surviendra et que la technostructure assurera la continuité et la reproduction des rouages essentiels de la société américaine. Après sa dernière conversation avec Barack Obama, Trump a convenu qu’il ne toucherait pas aux maigres avancées sociales arrachées de haute lutte au Congrès républicain alors qu’il avait affirmé durant sa campagne que c’est la première chose qu’il abolirait immédiatement ! Jettera-t-il Hillary en prison pour ses manquements aux procédures « confidentiel-défense » et ses nombreuses casseroles affairistes ? Rien n’est moins sûr…

Sur le plan extérieur on risque de contempler les mêmes montagnes accouchant d’autant de souris craintives. Une chose est sûre : la victoire de Trump va probablement se traduire par une politique américaine encore plus favorable à Israël, repoussant d’autant l’établissement d’un État palestinien aux calendes grecques. « Personne n’est plus pro-Israël que moi », affirmait-il en mars dernier. Il a également promis au cours de sa campagne de déplacer l’ambassade des États-Unis de Tel-Aviv à Jérusalem, un tel transfert romprait non seulement avec la politique historique de Washington, mais violerait les résolutions 242 et suivantes du Conseil de sécurité des Nations unies.

Sur la colonisation, de plus en plus critiquée par l’administration sortante de Barack Obama, le conseiller de Trump pour Israël, David Friedman, a expliqué à l’AFP le mois dernier ne pas croire que son candidat considérait les colonies juives établies dans les territoires palestiniens de Cisjordanie occupée comme illégales. Il ajoutait également que Trump était « extrêmement sceptique » concernant l’idée d’une solution « à deux États » israélien et palestinien vivant côte à côte dans la paix et la sécurité. Et David Friedman concluait que Trump « ne mettrait jamais Israël sous pression pour promouvoir une solution à deux États ou toute autre contre la volonté du peuple israélien ».

Dans l’immédiat, Benjamin Netanyahou, dont le gouvernement est considéré comme le plus à droite de l’histoire d’Israël, peut être satisfait. En toute logique, Benjamin Netanyahou a félicité Trump mercredi dans un communiqué avant de lui téléphoner. « Les deux dirigeants, qui se connaissent depuis de nombreuses années, ont eu une conversation chaleureuse et sincère », selon un communiqué du bureau de Netanyahou. « Ils ont également discuté des questions régionales. Le président élu Trump a invité le Premier ministre Netanyahou à une réunion aux États-Unis à la première occasion », conclut le communiqué. Dans tous les cas de figures, le Premier ministre israélien aura un homologue à Washington qui ne lui sera pas instinctivement opposé, ni à ses politiques », dit-on à Tel-Aviv.

Ajoutons que l’un des autres conseillers Middle-East de Trump n’est autre que le Libanais Walid Farès (ou Pharès). Autant dire que ce client n’est pas vraiment rassurant puisqu’il fut l’un des proches conseillers du Serial Killer Samir Geagea et de ses milices d’extrême-droite durant la guerre civilo-régionale du Liban (1975 – 1990). A l’époque, Walid Farès s’occupait de la propagande, multipliant « conférences » et brochures vantant la guerre contre les Musulmans et l’épuration ethnique pour la formation d’un micro-Etat chrétien au Liban. L’une de ces brochures – Le Peuple chrétien – a curieusement disparu de la bibliographie du conseiller Middle-East du nouveau président des Etats-Unis.

Sur le dossier iranien là-aussi, pas grand-chose de nouveau sous le soleil puisque le Congrès républicain a fait systématiquement obstruction à la reprise des investissements étrangers dans ce marché de 80 millions d’habitants depuis la conclusion de l’accord du 14 juillet 2015 sur le nucléaire. De manière générale, il suffira à Trump et à son administration de poursuivre la gestion intrusive d’Obama en accentuant les obstacles et les outils propices à l’extraterritorialité du droit américain au nom du libre marché, des droits de l’homme et de la lutte contre la corruption pour une Transparency International encore plus transparente.

Restent les « engagements extérieurs ». En bonne logique, et dans la mesure où Trump a affirmé vouloir s’occuper d’abord du bien-être des Américains avant de prétendre sauver la planète, il devrait effectivement réduire la voilure militaire. Effectivement Trump rompt avec le wilsonisme ordinaire (partagé, depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, par les administrations successives tant démocrates que républicaines). Il ne croit pas que les Etats-Unis doivent dépenser de l’argent pour imposer la démocratie et les droits de l’homme sur l’ensemble de la planète. Sur ce plan aussi, l’impulsion est déjà donnée : plus discrètement, Barack Obama a déjà amorcé un certain repli militaire en renonçant aux opérations conventionnelles lourdes pour privilégier l’engagement clandestin des drones et des forces spéciales. De manière plus spectaculaire Trump s’est adressé aux pays de l’OTAN, leur demandant de financer leur propre défense, l’avertissement concernant aussi la Corée du Sud et le Japon.

Les Européens auraient tout intérêt à saisir l’opportunité d’une telle demande pour mettre, enfin, en chantier ce fameux « pilier européen de la défense » que Messieurs Sarkozy et Kouchner notamment, nous avaient promis pour faire passer la pilule du retour de la France éternelle dans le Commandement intégré de l’OTAN en 2008. Effectivement, les Européens pourraient en profiter pour relancer leur machine en matière de Défense et de Sécurité plutôt que de multiplier les directives kafkaïennes sur la taille des ampoules électriques et la consistance des fromages. En outre, cette re-légitimation de l’Europe par une réforme d’un système Schengen qui marche et par la mise en œuvre d’un système de sécurité collective associant la Russie de Vladimir Poutine, reste une question cruciale qui se posait bien avant l’élection de Trump. Elle se repose aujourd’hui dans une conjoncture internationale plus favorable, mais régionalement plus difficile où Bruxelles reste enlisé (grâce à Madame Merkel) dans la crise migratoire et les promesses irréalistes faites à Recep Erdogan, lui-même embarqué dans une dérive fascisante. Par conséquent, on ne voit pas qui, aujourd’hui en Europe, aurait le poids politique suffisant pour prendre Trump au mot et lui dire : « remettons effectivement l’OTAN à plat pour faire autre chose… afin de retrouver plus de souveraineté, sinon d’indépendance ».

C’est au pied du mur qu’on voit le maçon ! Normalement, c’est en décembre prochain que les sanctions internationales contre la Russie devraient être reconduites ou levées. On verra si Trump trouve toujours Vladimir Poutine aussi merveilleux et s’il veut en faire son principal allié contre Dae’ch en Syrie, en Irak et ailleurs !

Quoiqu’il en soit, et cela est à inscrire sous la colonne des « dégâts collatéraux », il était assez choquant d’entendre les « journalistes » de France-Inter et France-Culture (deux chaînes de service public) se lamenter en commentant l’élection d’un « homme aussi vulgaire et inculte, s’exprimant de la manière la plus primitive avec seulement deux cents mots de vocabulaire… ». Tellement persuadé du triomphe annoncé d’Hillary, notre service public n’avait invité que des partisans de la Dame, sans même songer à équilibrer un peu leurs plateaux en donnant la parole à quelque Républicains présentables… Une grande leçon de journalisme qui va renforcer la crédibilité de nos médias !

Mais le pompon revient sans doute à Gérard Araud, notre ambassadeur de France aux Etats-Unis tweetant plus vite que son ombre… En fait, il a bombardé deux Tweets : « Après le Brexit et cette élection, tout est désormais possible. Un monde s’effondre devant nos yeux. Un vertige ». Puis : « C’est la fin d’une époque, celle du néolibéralisme. Reste à savoir ce qui lui succédera ». Chapeau à ce grand diplomate, qui quoiqu’il arrive devrait penser toujours aux intérêts de la France ! Après cette brillante prestation, comment Gérard Araud peut-il poursuivre correctement sa mission à Washington ? La question reste posée. Non seulement, le Quai d’Orsay aurait dû vertement l’engueuler, mais sa dignité d’Ambassadeur de Francedevrait lui être retirée sans plus tarder ! On verra si Jean-Marc Ayrault, notre actuel ministre des Affaires étrangères, aura le courage de sanctionner le protégé de son prédécesseur Laurent Fabius…

En définitive, l’élection de Trump ne constitue-t-elle pas la dernière illustration de l’adage que Tomasi di Lampedusa met dans la bouche de son Guépard : « tout changer pour que rien ne change… » A tout le moins, le nouveau président américain pourrait remettre en cause le dernier accord international sur le réchauffement climatique et chercher à bloquer celui sur le nucléaire iranien. Pour le reste, le Congrès veillera au grain. Les pairs républicains de Trump, qui ne partagent pas toutes ses outrances, disposent de tous les moyens institutionnels pour le sortir du jeu au cas où il deviendrait insupportable, c’est-à-dire s’il cherchait à mettre en œuvre ses « promesses électorales » les plus loufoques.

Ainsi, si Trump « pétait un plomb » en cherchant vraiment à vouloir changer les choses – hypothèses d’ores et déjà envisagées par plusieurs constitutionnalistes émérites -, les procédures d’impeachment (déjà prêtes) sonneraient immédiatement la charge. Les marchés, eux-aussi veillent au grain ! Aujourd’hui les pouvoirs exécutifs n’ont plus de réelle marge de manoeuvre face au remboursement de la dette dont les taux sont fixés par les marchés financiers. La remarque vaut pour les Etats-Unis, comme pour la France et toutes les autres vieilles « démocraties-témoins ». Ce qui exaspère leurs électeurs, c’est qu’ils n’ont pas le courage de le dire, ni de s’attaquer aux dossiers sur lesquels ils peuvent intervenir comme, par exemple la réforme de l’Etat…

Par conséquent, comment prévoir l’évolution du monde avec Trump ? La mondialisation et ses grands bénéficiaires vont continuer à casser les Etats-nations, les services publics et les outils de redistribution sociale. Le malheur de l’histoire : les plus pauvres qui ont voté Trump deviendront encore plus pauvres et se sentiront trahis, accélérant ainsi l’agonie de nos vieilles démocraties désormais impuissantes à endiguer le fascisme qui vient… Celui-ci est d’ores et déjà au travail. Evidemment, il ne prend pas les traits hideux d’un nouvel Hitler, mais agit plus subrepticement par « réseaux sociaux » et algorithmes interposés, ce que le philosophe Bernard Stiegler appelle La Disruption : par la diffusion d’une information calibrée, de connaissances normées, de contrats d’assurances de plus en plus contraignants parce que sous contrôle continu, de voyages et déplacements tout aussi tracés, de nourritures imposées, de sexualités gérées… c’est-à-dire par l’imposition d’une intelligence artificielle généralisée pour laquelle le Libre arbitre cartésien sera remisé dans les grottes de Lascaux… Avec ou sans Trump, on ne va pas se marrer…

Richard Labévière

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Source: http://www.les-crises.fr/trump-tout-changer-pour-que-rien-ne-change-par-richard-labeviere/


En Autriche, les inquiétudes économiques pèsent aussi sur l’élection présidentielle, par Romaric Godin

Sunday 11 December 2016 at 00:01

Article d’avant l’élection.

J’ai adoré les commentaires de propagande : TOUT VA BIEN, l’extrême-droite en Autriche ne recueille que 47 % des voix !

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Source : La Tribune, Romaric Godin, 30/11/2016

En Autriche, le risque de pauvreté est certes un des plus faibles d'Europe avec seulement 18,3% des ménages concernés, mais c'est encore 1,6 point de plus qu'en 2007. (Crédits : Statista*)

En Autriche, le risque de pauvreté est certes un des plus faibles d’Europe avec seulement 18,3% des ménages concernés, mais c’est encore 1,6 point de plus qu’en 2007. (Crédits : Statista*)

Les Autrichiens votent à nouveau pour élire leur président fédéral dimanche. L’ancien Vert Alexander van der Bellen et le candidat de l’extrême-droite Norbert Hofer sont toujours au coude-à-coude dans un duel où l’économie ne sera pas absente.

Ce dimanche 4 décembre sera un jour décisif pour l’Union européenne. Outre le référendum constitutionnel italien, l’Autriche vote à nouveau pour élire son président fédéral. La Cour constitutionnelle autrichienne a en effet annulé le 1er juin dernier le deuxième tour de l’élection du 22 mai où l’Indépendant et ancien président des Verts Alexander van der Bellen l’avait emporté contre le candidat du parti d’extrême-droite FPÖ Nobert Hofer avec 50,35% des suffrages. Cet écart de 30.863 voix sur 4.637.046 suffrages exprimés n’avait été obtenu qu’à l’issu du décompte des votes par correspondance, ce qui a donné lieu à une contestation de la FPÖ finalement acceptée par la justice constitutionnelle. Le deuxième tour devait initialement se tenir le 2 octobre, mais en septembre, il a été remarqué que certaines enveloppes de vote ne se fermaient pas. Suite à ce « Uhu-gate » comme l’a appelé le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung en référence à la marque de colle, le gouvernement a alors demandé une vérification et a repoussé le scrutin au 4 décembre.

Sondages indécis

La campagne a été assez rude entre les deux concurrents. Alexander van der Bellen a mis en garde contre la victoire de l’extrême-droite et contre une éventuelle sortie de l’UE qui en serait la conséquence, tandis que Norbert Hofer a attaqué les élites et dénoncer l’accueil des migrants. Les deux candidats tentent de convaincre les derniers indécis ou ceux tentés de ne pas participer au vote. En attendant, comme en mai dernier, l’élection s’annonce extrêmement serrée et c’est la seule leçon qu’il est possible de tirer de sondages où les écarts demeurent très faibles. La dernière enquête Unique Research publiée le 18 novembre donne 51% à Alexander van der Bellen contre 49% à Norbert Hofer avec une marge d’erreur de 3%… La veille du reste un sondage Gallup attribuait 52 % à Norbert Hofer. Bref, l’élection reste entièrement incertaine.

Les pouvoirs du président

Le président fédéral autrichien dispose de pouvoirs très limités, le chancelier, chef du gouvernement, devant valider la plupart de ses prérogatives. Il ne peut ainsi pas dissoudre la chambre basse du parlement, le Conseil national (Nationalrat) sans l’accord du gouvernement fédéral. De même, la dissolution d’un parlement régional (Landtag) n’est possible qu’avec l’accord de la chambre haute du parlement fédéral. Il n’est cependant pas une simple figure symbolique ou représentative, comme peut l’être le président fédéral allemand. La Constitution lui donne ainsi le droit de renvoyer, de son propre chef, le gouvernement fédéral. Il nomme aussi le chancelier fédéral et peut donc jouer un rôle important en cas de crise politique (ce que ne peut faire le chef de l’Etat allemand, par exemple). L’élection de Norbert Hofer est donc crainte par une grande partie de la classe politique autrichienne, car son rôle ne sera pas neutre.

Poussée de l’extrême-droite

Au-delà des incertitudes, cependant, un élément demeure certain. Désormais l’extrême-droite autrichienne est capable de fédérer autour d’elle près de la moitié de l’électorat. Alors que l’ensemble des partis du centre et de la gauche (SPÖ social-démocrate, Verts, Libéraux de Neos) appellent à voter Alexander van der Bellen et que la droite (ÖVP et Team Stronach) ne donnent pas de consignes de vote. Lors de la précédente élection présidentielle, en 2010, la candidate FPÖ, Barbara Rosenkranz, n’avait mobilisé que 482.000 électeurs, un million de moins que Norbert Hofer au premier tour de 2016. Du reste, ce dernier, avec ses 1,5 million de voix au premier tour a, lors de ces élections, quasiment doublé le meilleur score présidentiel de la FPÖ, celui de 1992, avec 761.390 voix. Il a aussi gagné 500.000 voix par rapport au score de la FPÖ aux élections fédérales de 2013. La FPÖ connaît clairement un regain depuis le début des années 2010, tant en voix qu’en pourcentage. Avec plus de 35% des voix au premier tour de la présidentielle et 49,7 % au second, le parti d’extrême-droite atteint un nouveau plus haut que les sondages semblent confirmer puisqu’il est donné entre 33% et 34% des intentions de vote contre 20,7% en 2013.

Une prospérité troublante

Comment expliquer une telle progression ? Les observateurs ont souvent été frappés par l’écart entre la prospérité de l’Autriche et cette montée de l’extrême-droite. Il est vrai que la République alpine est fort loin d’être un pays en ruine. Le taux de chômage harmonisé y est de 6,3% de la population active, bien en deçà des 10% de moyenne dans la zone euro. En parité de pouvoir d’achat, le PIB par habitant autrichien se situe en troisième position de la zone euro, derrière le Luxembourg et l’Irlande, avec un niveau supérieur de 27% à la moyenne de l’UE. On est donc loin d’une paupérisation avancée. D’autant que le pays se caractérise par un niveau d’inégalité faible : l’indice de Gini calculé par l’OCDE est ainsi le sixième plus faible des 35 pays de l’organisation, à 0,28 contre 0,292 pour l’Allemagne, 0,294 pour la France, 0,358 pour le Royaume-Uni ou encore 0,394 pour les Etats-Unis. On est donc loin de la situation de ce dernier pays, par exemple, qui a pu porter l’élection de Donald Trump au début de ce mois.

Explication « culturelle »

L’explication la plus fréquemment avancée est donc « culturelle ». Elle repose sur l’existence d’une tendance de fond de la société autrichienne à voter pour des partis nationalistes qui a été renforcée par l’arrivée, à l’automne 2015, de nombreux réfugiés. Plusieurs éléments tendent à renforcer, dans le cas autrichien, cette explication. Le travail sur la responsabilité autrichienne dans la seconde guerre mondiale a longtemps été réduit, à la différence de l’Allemagne, au profit de la théorie d’une victimisation de l’Autriche annexée par les Nazis. Ceci a conduit à la persistance d’un mouvement nationaliste qui a toujours été présents dans la FPÖ, parti « libéral », parfois allié aux Sociaux-démocrates, mais fondé par d’anciens dignitaires nazis. Au début des années 1990, la FPÖ a rejeté sa composante libérale pour se concentrer sur sa composante nationaliste portée par Jörg Haider, et ceci a été le prélude à la forte poussée de ce parti. La preuve de cet élément culturel est que, dans un contexte économique différent, au législatives de 1999, la FPÖ avait déjà obtenu 1,3 million de voix, soit presque autant que Norbert Hofer en avril 2016.

Terreau économique

Néanmoins, cette explication fait sans doute un peu trop bon marché des facteurs économiques. Sans nier le facteur « culturel », il semble qu’il existe un terreau économique qui favorise le passage vers le vote FPÖ. Du reste l’analyse sociologique du vote du 22 mai dénote que les ouvriers ont voté en faveur de Norbert Hofer à 86%. Cette prédominance du vote d’extrême-droite chez ceux qui constituaient jadis l’électorat de gauche ne saurait s’expliquer que par un élément « culturel ». D’autant que l’on voit une progression de cet électorat également dans d’autres couches de la société : employés, travailleurs indépendants ou même fonctionnaires qui ont attribué entre 40 et 45% de leurs voix à Norbert Hofer.

Un chômage qui remonte

Pour comprendre l’insatisfaction des Autrichiens sur le plan économique, il n’est pas utile de la comparer à ses voisins ou d’observer la situation du pays dans l’absolu. Les Autrichiens n’ont que faire de savoir que leur taux de chômage est beaucoup plus faible que celui de la France. En revanche, il leur importe beaucoup de constater que le taux de chômage harmonisé est passé dans leur pays de 4% à 6,3%. En 5 ans, le pays compte plus de chômeurs, dans un pays où, avant la crise, on se vantait de disposer, en raison notamment du système de formation d’une « recette miracle » contre le chômage. La martingale semble s’être enrayée et cela, naturellement inquiète une grande partie de la population la plus exposée au risque de chômage. On notera ainsi que selon les statistiques de l’AMS, l’assurance chômage autrichienne, le nombre de chômeurs de plus de 50 ans est passé en 5 ans de 65.662 à 97.928, soit une augmentation de près de 50% qui fragilise toute une classe d’âge. D’ailleurs, le 22 mai, les 35-60 ans ont voté Norbert Hofer à 52%.

Un autre élément mérite d’être souligné : la faiblesse du taux de chômage en Autriche s’explique par l’importance du temps partiel. En 2015, 28,2% des salariés autrichiens travaillaient à temps partiel, soit 1,172 million de personnes. Dix ans plus tôt, ce taux n’était qu’à 21,3% et 719.000 personnes. Et ce taux augmente très rapidement : il était de 29% au premier trimestre 2016. Ceci conduit à une précarité et à une insécurité croissante.

Une tendance à la stagnation des revenus

Un autre élément joue. Si l’Autriche demeure un pays où la croissance est relativement forte, avec une progression de 5,4% entre 2010 et 2015, soit plus que le moyenne de l’UE (5,3%) et que la zone euro (+3,6%), cette croissance est inférieure à celle des périodes précédentes et notamment à la période 2000-2005 (près de 9%), époque au cours de laquelle le pays a profité largement de l’ouverture des marchés d’Europe centrale. Conséquence : le gâteau est moins gros à se partager compte tenu de la croissance démographique et de la répartition des revenus. Par habitant, le PIB a nettement brisé sa tendance à partir de 2008. Depuis 1995, le PIB par habitant a progressé de 1,4% par an en moyenne. Il a reculé de 0,5% en 2013, de 0,3% en 2014 et il est resté stable en 2015. Le sentiment de coup d’arrêt se traduit par un recul annuel moyen du revenu par habitant de 0,6% depuis 2009. En 2015, ce revenu se situait ainsi sous le niveau de 2006. La consommation des ménages a évolué dans le même sens.

Une prospérité qui ne doit pas faire illusion

Autrement dit, la prospérité autrichienne ne doit pas faire illusion. Elle est clairement à l’arrêt. Le risque de pauvreté est certes un des plus faibles d’Europe avec seulement 18,3% des ménages concernés, mais c’est encore 1,6 point de plus qu’en 2007. Ceci explique un malaise croissant dans la population autrichienne, notamment dans les régions les moins dynamiques du pays, celles qui ont majoritairement voté pour Norbert Hofer.

Lire le rapport : Comment va l’Autriche ? (“Wie Geht’s Österreich ?”) de Statistik Austria (en allemand).

D’autres éléments d’explication à cette poussée d’extrême-droite peuvent se trouver dans la longue domination d’une « grande coalition » qui a souvent conduit à une certaine inertie, comme dans le cas de la crise de la banque Hypo Alpe Adria, tout en laissant l’extrême-droite en position de seule opposition. Au final, l’élément culturel semble cependant insuffisant pour comprendre la situation autrichienne. La crise de 2008 dans un pays très fortement bancarisé a conduit à freiner fortement les revenus et la croissance. Elle a laissé des traces, malgré une reprise plus timide. La force de la poussée d’extrême-droite est sans doute le fruit du cas particulier autrichien, mais cette poussée ne peut être compris sans constater l’effet de cette crise.

Source : La Tribune, Romaric Godin, 30/11/2016

Source: http://www.les-crises.fr/en-autriche-les-inquietudes-economiques-pesent-aussi-sur-lelection-presidentielle-par-romaric-godin/


[Vidéo] La mondialisation nous a-t-elle tous rendu plus pauvres ?

Saturday 10 December 2016 at 05:59

Source : Boursorama, 06/12/2016

Face à ce que certains dénoncent comme les ravages du libre échange et de la globalisation sauvage, quel regard porter sur la mondialisation ? Quels sont les gagnants et les perdants ? Qui s’est appauvri depuis 25 ans ? L’analyse d’Olivier Berruyer, auteur du blog les-crises.fr. Ecorama du 6 décembre 2016 présenté par David Jacquot, sur Boursorama.com.

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Source : Boursorama, 06/12/2016

Source: http://www.les-crises.fr/video-la-mondialisation-nous-a-t-elle-tous-rendu-plus-pauvres/


Il y a 55 ans, les médias et le massacre du 17 octobre 1961 par Henri Maler

Saturday 10 December 2016 at 00:59

Source : ACRIMED, Henry Maler, 18-10-2016

Le 17 octobre 1961 la fédération de France du Front de libération nationale (FLN) organise une manifestation à Paris. La répression policière est d’une extrême violence : outre l’internement de milliers de manifestants et l’expulsion de centaines d’entre eux, plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines d’Algériens sont portés disparus – nombre d’entre eux ont été tués et jetés dans la Seine. Comment la presse a-t-elle rendu compte de ce massacre ? [1]

À notre connaissance, la meilleure étude publiée à ce jour sur le traitement médiatique du 17-Octobre est due à Mogniss H. Abdallah : dans un article paru dans la revue bimestrielle Hommes & migrations de novembre-décembre 2000, sous le titre « Le 17 octobre 1961 et les médias. De la couverture de l’histoire immédiate au “travail de mémoire” » [2]. Notre contribution doit être comprise comme une incitation à lire cet article de référence.

L’auteur examine ce traitement médiatique jusqu’en 2000. Mais qu’a-t-on pu lire dans la presse dans les quelques jours qui ont suivi ?

De droite…

« La presse populaire de droite, écrit Mogniss H. Abdalllah, à l’instar du Parisien libéré, de L’Aurore ou de Paris-Jour, reprend la version de la préfecture de police. Elle évoque de “violentes manifestations nord-africaines”, emmenées par des “meneurs” et des “tueurs”, “déferlant vers le centre de la ville” […] »

Voici, par exemple, la « une » du Parisien libéré du 18 octobre, qui attribue les violences aux manifestants :

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Et en pages intérieures, on peut lire en tête de la page consacrée à la manifestation, cet encadré (extrait) qui résume le journalisme dont il s’agit.

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Le 19 octobre, Le Parisien libéré « explique » ainsi les manifestations, et en particulier la manifestation de femmes et d’enfants qui s’est déroulée la veille.

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Le Figaro, de son côté, commence par s’en tenir à une version pro-gouvernementale, en attribuant la violence aux « musulmans algériens ». À la « une », le 18 octobre…

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Mais, dans les jours suivants, Le Figaro (même Le Figaro…) ne peut dissimuler totalement la vérité. Ainsi, relève Mogniss H. Abdallah, «  Le Figaro du 23 octobre se départit quant à lui de son soutien initial à la police pour dénoncer des “scènes de violence à froid” dans les centres d’internement, au Palais des sports ou au stade de Coubertin. »

À France-Soir, qui est alors un grand quotidien populaire qui affecte de n’épouser aucun parti pris, on commence, là aussi, par avaliser la version policière et renvoyer dos à dos « les extrémistes de l’OAS et du FLN »…

Comme on peut le voir dans ce commentaire de page intérieure (extrait) :

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Mais au fil des jours France-Soir recueille également des témoignages sur l’ampleur et la violence de la répression.

 

… à gauche

La presse de gauche sera plus audacieuse. Certes, elle commence par afficher une certaine prudence, qu’elle attribue, non sans raison, à la censure, comme le fait L’Humanité le 18 octobre, ainsi qu’on peut le lire dans cet encadré de page intérieure (extrait) :

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Les jours suivants, en dépit de cette compréhensible prudence [3], dans l’ensemble de la presse que l’on peut classer à gauche le ton change et les informations filtrent.

Changement de ton, avec par exemple, cette « une » de Libération (il s’agit du quotidien issu de la Résistance…), le 20 octobre (extrait) :

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Comme le relève encore Mogniss H. Abdallah, «  Libération, Témoignage chrétien ou France Observateur publient sous la forme interrogative “est-il vrai que… ?” ou “y a-t-il eu… ?” de multiples informations sur les exactions policières et leur caractère systématique (hommes frappés et jetés à la Seine ou retrouvés pendus dans les bois, décompte du nombre des morts et des disparus qui discrédite le bilan officiel faisant état de 3 morts et 55 blessés…) “Si tout cela est exact, et nous avons de bonnes raisons de le croire, qui sont les auteurs de ces crimes ?” demande Libération du 19 octobre 1961 ».

Pendant toute la semaine qui suit, les témoignages s’accumulent et convergent. Et le 27 octobre, bien que la grève des cheminots fasse leur principal titre de « une », L’Humanité et Libération interrogent ou, plutôt, interpellent, sur la base de nouveaux témoignages.

Ainsi, L’Humanité  :

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Même question, le même jour, dans Libération, qui invoque des témoignages convergents dans cet encadré (extrait) :

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Enfin, des photos d’Élie Kagan (1928-1999), prises lors de manifestation du 17 octobre sont publiées par Témoignage chrétien : elles sont accablantes.

 

Les « petits médias »

Pourtant, comme le souligne Mogniss H. Abdallah, c’est surtout aux « intellectuels-journalistes » (comme Paul Thibaud ou Claude Bourdet) et aux « petits médias » que l’on doit, dès 1961, le combat le plus acharné pour la vérité : outre les exactions en tous genres, c’est un véritable massacre qui a été perpétré :

 « Les “petits” médias, dont la revue Les Temps modernes, les journaux Témoignages et documents ou Vérité-Liberté, ou encore la maison d’édition François Maspero, publient de multiples documents qui permettront de faire une synthèse sans concession des événements du 17 octobre 1961. Droit et liberté, journal du Mrap, fournit des informations sur d’autres pogroms ailleurs en France (Metz, Nancy). Côté images, le biologiste Jacques Panijel va entreprendre une enquête caméra au poing qui donnera le film “Octobre à Paris”. Beaucoup de ces publications vont être saisies, le film sera interdit, mais paradoxalement, leur contenu diffusé “sous le manteau” va marquer toute une génération, ce qui ne semble pas le cas de la grande presse et son information éphémère, volatile. »

Mais, en ce mois d’octobre 1961, aucune mobilisation de solidarité ne sera suscitée. Il n’en ira pas de même, quelques mois plus tard, à la suite de la tuerie du 8 février 1962 au métro Charonne. Pis : la mémoire collective et la commémoration de cette tuerie ont longtemps occulté le combat pour la vérité et la reconnaissance du massacre du 17 octobre 1961. Ce combat, qui est d’abord un combat pour l’information, n’est pas fini.
Henri Maler

Source : ACRIMED, Henry Maler, 18-10-2016

Source: http://www.les-crises.fr/il-y-a-55-ans-les-medias-et-le-massacre-du-17-octobre-1961-par-henri-maler/


La cruauté des sanctions économiques américaines, par David Smith-Ferri

Saturday 10 December 2016 at 00:28

Source : Consortium News, le 08/11/2016

Le 8 novembre 2016

De nos jours, la propagande à propos de la Russie et de la Syrie s’invite dans les médias dominants américains, comme ce fut le cas, il y a des années, à propos de l’Irak, et elle justifie les dommages infligés aux populations civiles, qu’il s’agisse de bombes ou d’étranglement économique, affirme David Smith-Ferri.

Par David Smith-Ferri

Ici, en Russie, où j’ai effectué un voyage en tant que membre d’une petite délégation emmenée par Voices for Creative Nonviolence, les gens avec qui nous avons parlé sont sans illusion sur la guerre et ses effets.

« Nous savons ce qu’est la guerre, nous a dit Nikolaï, un scientifique et homme d’affaires. Nous avons une mémoire génétique, » en référence à des proches : parents, grands-parents, qui ont transmis leur expérience de la Grande Purge et/ou du siège de Leningrad, pendant lequel près d’un million de Russes sont morts de faim ou de maladie car l’Allemagne avait bloqué les importations et les exportations.

Quelques-uns des 12 millions estimés de Russes qui ont pris part aux parades du Régiment immortel à travers le pays durant trois jours. (Photo RT)

Quelques-uns des 12 millions estimés de Russes qui ont pris part aux parades du Régiment immortel à travers le pays durant trois jours. (Photo RT)

“Trois des frères de ma grand-mère et quatre des frères de mon grand-père sont morts à la guerre. Ma mère est née en 1937. Elle a eu la chance de survivre à la guerre. Elle vivait dans un village que les Nazis ont envahi durant leur approche sur Moscou. Ils l’ont bombardé et incendié. La moitié du village a brûlé. Elle se trouvait juste dans l’autre moitié quand ils ont mis le feu. Beaucoup de ses amis sont morts.

Lors de notre dernière soirée à Saint-Pétersbourg, nous avons eu le plaisir de diner dans un restaurant géorgien avec une jeune femme russe rencontrée la veille chez un ami. Alina est intelligente, ouverte et généreuse. Elle parle anglais comme une mitraillette, avec un léger accent britannique. Elle a évoqué, avec passion, les rudes conséquences de la dégradation de l’économie russe et ses causes.

« La chute du prix mondial du pétrole et les sanctions contre la Russie font du mal à notre économie et font souffrir la population. Surtout les gens âgés qui perçoivent un revenu fixe. Et c’est pire encore en dehors des villes, où les salaires sont vraiment bas mais où le coût de la vie n’est pas si différent de celui des villes. Vous avez vu seulement Moscou et Saint-Pétersbourg, mais en province, ça va vraiment mal. Si vous y alliez, vous auriez du mal à croire ce que vous verriez. »

Ces propos confirmaient ce que nous avions entendu de la bouche de travailleurs sociaux russes que nous avions rencontrés quelques jours plus tôt. Alina nous dit : « La nourriture est bon marché pour les étrangers et chère pour les Russes et ça empire. Je dépense presque la moitié de mon salaire en nourriture. Et les transports et le logement sont vraiment chers aussi. »

Le précédent irakien

Cette situation me rappelle un voyage en Irak au milieu des années 1990, quand un petit nombre d’Américains et de Britanniques s’étaient rendus dans ce pays au mépris de la loi fédérale et en opposition à un embargo international brutal. On nous dépeignait comme des idiots qui faisaient le jeu de l’«ennemi ».

Un missile de croisière Tomahawk lancé depuis le USS Shiloh contre des cibles de défense anti-aérienne en Irak, le 3 septembre 1996, dans le cadre de l'opération Desert Strike, un engagement militaire américain limité contre les forces gouvernementales d'Irak, similaire à ce que l'on observe aujourd'hui en Syrie. (Photo DOD)

Un missile de croisière Tomahawk lancé depuis le USS Shiloh contre des cibles de défense anti-aérienne en Irak, le 3 septembre 1996, dans le cadre de l’opération Desert Strike, un engagement militaire américain limité contre les forces gouvernementales d’Irak, similaire à ce que l’on observe aujourd’hui en Syrie. (Photo DOD)

Les médias dominants  ont convaincu le public que Saddam Hussein constituait non seulement une menace pour les intérêts vitaux des États-Unis dans la région, mais qu’il avait des ambitions impérialistes et qu’il était prêt à tout pour les concrétiser. On le comparait à Hitler, comme si les moyens à sa disposition étaient comparables, et ce même si l’armée irakienne, y compris sa garde républicaine tant vantée, s’était effondrée en quelques semaines lors de l’invasion de l’Irak par les États-Unis en 1991, et que l’embargo économique avait étranglé l’économie irakienne et anéanti la capacité du pays à simplement pourvoir à ses propres besoins, alors comment aurait-il pu essayer de dominer la région.

Les médias étatsuniens, bien sûr, comprenaient parfaitement la situation, mais cela ne les empêchait pas de présenter, avec un enthousiasme implacable, Saddam Hussein comme une menace crédible pour le monde. Et ainsi les citoyens étatsuniens, pourtant sûrement capables de comprendre une analyse plus complexe, finirent-ils par accepter l’analyse des médias et par y croire. Bien plus, ils en venaient à considérer la guerre économique comme une affaire d’honneur, les États-Unis travaillant de nouveau pour le bien commun du monde, même si le monde ne leur en était pas reconnaissant, travaillant aussi pour le peuple irakien qu’il fallait manifestement aider à se débarrasser d’un dictateur cruel et dangereux.

Cet échec des médias étatsuniens à se libérer de l’emprise de la propagande gouvernementale a fourni une couverture nécessaire aux politiques étrangères des États-Unis qui ont provoqué la mort de centaines de milliers d’enfants de moins de cinq ans. Ceux-ci ont succombé à des maladies qui auraient pu être évitées, et étaient dues surtout à des infections transmises par l’eau. Ils sont morts, si nombreux, jour après jour, mois après mois, année après année. Ils sont morts dans les bras de leurs parents désespérés, alors que des médecins épuisés ne pouvaient rien faire pour les sauver, puisqu’ils ne pouvaient plus se procurer les antibiotiques et les solutions de réhydratation dont ils disposaient autrefois.

Malgré l’ampleur de l’hécatombe en Irak, malgré des scènes à fendre le cœur qui se déroulaient quotidiennement dans les hôpitaux et les foyers, malgré un accès facile à des images et des informations nombreuses et dignes de confiance, les médias dominants, avec certes de notables exceptions dans les dernières années, ont détourné les yeux et n’ont pas abandonné leurs obsessions partisanes. Et les enfants sont morts.

Dès 1996, l’UNICEF a publié un rapport selon lequel 4500 enfants irakiens de moins de cinq ans mouraient chaque mois, victimes d’une guerre économique brutale et mortelle.

Début d’une politique visant « un changement de régime » en Russie

Les États-Unis ont décrété des sanctions contre la Russie en 2014, en soutenant que c’était une réponse aux actions militaires russes en Ukraine, et aujourd’hui la Maison-Blanche explique ouvertement que l’aggravation des sanctions serait une réaction au soutien russe du gouvernement syrien.

Le secrétaire d'État américain John Kerry écoute le président russe Vladimir Poutine dans une salle de réunion du Kremlin, à Moscou, Russie, au début d'une rencontre bilatérale, le 14 juillet 2016. [State Department Photo]

Le secrétaire d’État américain John Kerry écoute le président russe Vladimir Poutine dans une salle de réunion du Kremlin, à Moscou, Russie, au début d’une rencontre bilatérale, le 14 juillet 2016. [State Department Photo]

Les médias américains n’ont fait alors aucun cas des effets des sanctions sur les citoyens irakiens ordinaires, de la même façon ils échouent aujourd’hui à considérer la situation pénible des Russes ordinaires quand ils analysent le succès des sanctions.

Selon un article du 26 octobre du Chicago Tribune, les sanctions ont des incidences sur le ralentissement de 3,7% de l’économie russe en 2015, et un ralentissement plus marqué est attendu en 2016, mais l’auteur n’évoque pas les éventuelles souffrances que subit le peuple russe, comme si les économies n’affectaient que les recettes publiques, non la vie des citoyens.

Même si le système actuel des sanctions semble, peut-être, au public étatsunien une politique légitime, modérée, non-violente, il élude cependant de nombreuses questions, et surtout la question essentielle : Qui donne aux États-Unis le droit de faire cela ?

C’est, bien sûr, une question interdite. Le droit des États-Unis d’établir des sanctions contre la Russie et de faire pression sur les pays européens pour qu’ils y participent est aussi sacro-saint que son droit de construire des bases militaires dans les pays qui ont une frontière commune avec la Russie.

Qui, dans les médias, émet des doutes à propos de ce droit ? C’est un droit aussi sacro-saint apparemment que celui des États-Unis à s’engager dans une action militaire en Syrie, en Afghanistan, en Irak et partout où ils le souhaitent. Alors, si la Russie mérite d’être sanctionnée pour ses actions en Europe, est-ce que les États-Unis ne méritent pas, eux aussi, d’être sanctionnés pour l’établissement de ces bases et la participation à des exercices militaires de l’OTAN dans des pays qui ont une frontière commune avec la Russie ?

Pourquoi les actions militaires russes en Syrie sont-elles différentes des actions militaires étatsuniennes en Syrie et ailleurs dans la région ? [Soit dit en passant, la Russie, elle, contrairement aux États-Unis, a été invitée pour aider le gouvernement souverain syrien.]

Qui était là pour sanctionner les États-Unis pour leur rôle dans l’horrible bombardement de l’hôpital de MSF en Afghanistan et celui des hôpitaux du Yémen ? Qui sanctionne les États-Unis quand leurs drones bombardent un mariage ou un convoi civil ou quand des meurtres ciblés tuent des civils innocents, comme ils le font souvent ? Ou quand les frappes aériennes étatsuniennes tuent des civils, comme cela est arrivé, il y a quelques jours à Kunduz, en Afghanistan ?

Nous, les Américains, nous pouvons apprendre quelque chose d’important de nos homologues russes : les Russes ordinaires sont au moins aussi opposés à la guerre que nous. Ils comprennent, semble-t-il, le système de deux poids deux mesures qui fonctionne dans les médias et le danger qu’il constitue.

Toutefois, jusqu’à ce que nous nous en rendions compte et que nous nous mettions à poser des questions embarrassantes, nous risquons d’être les dupes, non pas de Vladimir Poutine mais de notre propre gouvernement.

Source : Consortium News, le 08/11/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Source: http://www.les-crises.fr/la-cruaute-des-sanctions-economiques-americaines-par-david-smith-ferri/


Les drôles de « médiations » du médiateur de Radio France, par Sarah Bourdaire

Saturday 10 December 2016 at 00:01

Source : ACRIMED, Sarah Bourdaire, 08-09-2016

Pour prendre en compte les réactions de leurs lecteurs, spectateurs et auditeurs, nombre de médias mettent en place divers canaux d’expression, parmi lesquels « le médiateur ». Comme son nom l’indique, celui-ci est censé recueillir en toute impartialité les réactions et critiques du public, solliciter les explications des journalistes et in fine instaurer un (semblant de) dialogue avec les rédactions.

Sur les antennes de Radio France, on compte ainsi pas moins de trois « Rendez-vous » avec le médiateur, Bruno Denaes, qui intervient chaque semaine sur France Info, tous les 15 jours sur France Culture, et une fois par mois sur France Inter. Un médiateur qui semble donc particulièrement sollicité – ce qui se conçoit aisément sur le service public –, mais qui semble parfois avoir une curieuse conception de sa mission.

À de multiples reprises ces derniers mois, et sur les sujets les plus divers (compteurs électriques Linky, mobilisations contre la loi travail, terrorisme, Brexit), Bruno Denaes s’est livré à une critique en règle des auditeurs eux-mêmes, évacuant de ce fait toute critique à l’égard du travail des journalistes [1].

1. Haro sur les auditeurs « irrationnels » et « complotistes »

Sur le site de Radio France, c’est en ces termes que le rôle du médiateur est résumé : « Le poste de médiateur a été créé pour offrir aux auditeurs/internautes de Radio France la possibilité de se référer à une instance impartiale ».

Une impartialité que les auditeurs de France Inter ont pu apprécier dans le « rendez-vous » du 22 avril, finement intitulée « Linky le compteur qui rend fou »… La présentation de l’émission sur le site de France interrésume bien l’état d’esprit du médiateur et des journalistes présents :

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Une présentation dont l’impartialité saute aux yeux et que Bruno Denaes reprendra mot pour mot à l’antenne :

– Sonia Devillers (s’adressant au médiateur) : « Vous vouliez pour commencer interroger Bruno Duvic avec les questions de Mélanie. »
– Bruno Denaes : « Exactement, Mélanie et puis quelques autres militants qu’on peut considérer peut-être un peu aveuglés par leur combat, qui demandent : “Comment… combien avez-vous été payé par ERDF pour faire votre émission et la promo de ce compteur ?” »

Après avoir sélectionné et mis en exergue les critiques outrancières de quelques auditeurs, les journalistes, encouragées sur cette voie par le médiateur, ramènent celles des autres à des peurs irrationnelles ou à du complotisme. Ce sont d’abord les réseaux sociaux, et singulièrement Youtube, qui sont mis en cause :

– Sonia Devillers : « Alors pour que tout le monde comprenne bien, il faut aussi savoir que derrière il y a les réseaux sociaux, qu’il y a le web, que ce sujet est devenu extrêmement épineux et qu’il y a d’autres relais d’influence que les journalistes, que les médias traditionnels, je vous propose d’écouter une youtubeuse très, très regardée. »
– Extrait sonore de la vidéo (voix de femme en pleurs) : « L’obligation a été votée d’installer pour tout le monde des compteurs Linky et il y a des gens qui essayent de prévenir que c’est hyper dangereux, ils le savent depuis le début ceux qui ont déployé tout ça. On est face à un crime contre l’humanité ».
– Sonia Devillers : « Alors, il faut bien qu’on vous précise que ceci n’est pas un sketch, ce n’est pas un numéro d’humoriste sur Youtube. Bruno Denaes, vous vouliez interroger à ce sujet Anne Brunel. »
– Bruno Denaes : « Exactement, c’est d’ailleurs Anne Brunel qui l’a découverte en quelque sorte sur Youtube. Qui est cette personne, c’est une spécialiste de Linky ? »

À ce moment de l’émission, on ne sait trop pourquoi la journaliste choisit de présenter une vidéo (outrancière) vue moins de 40 000 fois, comme l’inspiratrice des auditeurs ayant interpellé la rédaction de France inter… Puis Anne Brunel explique peu ou prou qu’elle a débusqué un complot d’auditeurs complotistes :

– Sonia Devillers : « Et des complotistes il y en a derrière ces réactions sur Linky ? »
– Anne Brunel : « […] Il y a des gens qui sont, je dirais, imprégnés d’un discours complotiste, c’est-à-dire convaincus qu’il y a quelque part, dans la société, au-dessus de ce qu’on appelle “le peuple”, donc le grand public, un certain nombre de forces maléfiques, dont les médias, disent-ils, “mainstream” je dirais, les grands médias grand public, mais aussi les grandes institutions mais aussi l’élite dirigeante des pays sont donc l’incarnation de ces pouvoirs maléfiques. Et les personnes qui sont en butte à l’institution, les personnes qui craignent les grands forces commerciales par exemple, “Big Pharma”, les grands labos pharmaceutiques, donc tous les gens qui vont être très craintifs vis à vis des médicaments, vis-à-vis de l’obligation vaccinale, vis-à-vis de la médecine classique, chimique, vont avoir cette tendance à s’imprégner d’un discours de nature complotiste parce que ça va recouper leurs propres inquiétudes. »

Après une telle série d’amalgames et de généralités, on reste coi, mais pas Bruno Denaes qui estime visiblement sa mission de médiation accomplie et préfère analyser, sans doute en sa qualité d’expert ès « gens », cette tendance généralisée au complotisme : « Se faire peur, on a l’impression que les gens adorent ça ». Oui, car « les gens », renchérit Anne Brunel, « adorent trouver des réponses qui correspondent à ce qui les convainc déjà ».

Quoi que l’on pense de la cause et des arguments des opposants au compteur Linky et des protestations qu’ils ont émises à la suite des émissions de France Inter, on peut se demander si c’est bien le rôle d’un médiateur, qui devrait être un facilitateur de dialogue, d’exposer de la sorte ses parti-pris en faveur du travail de ses collègues, et surtout de disqualifier en bloc et par tous les moyens, voire de tourner en ridicule les auditeurs qui s’adressent à lui.

Une manière de procéder d’autant plus contestable que Bruno Denaes semble coutumier du fait, puisqu’il récidive dès lors que les interpellations se font un peu trop critiques à son goût.

 

2. Les « oreilles militantes » des auditeurs, le travail irréprochable des journalistes

Voici comment il introduit l’émission de France Info du 7 mai sur France Info : « Alors beaucoup de réactions en effet, et de questions liées à l’actualité sociale, des réactions, il faut quand même le préciser, souvent partisanes. Je le constate d’ailleurs régulièrement, beaucoup d’auditeurs ont tendance parfois à écouter avec des oreilles un peu militantes. »

Puis un peu plus loin dans l’émission, alors que Grégory Philipps, directeur adjoint de la rédaction de France Info, met en cause la bonne foi des auditeurs, comme cela semble être une habitude dans les émissions du médiateur, Bruno Denaes le coupe pour surenchérir :

– Grégory Phillips : « Je pense que ce qui est intéressant dans cette période c’est qu’on est dans une période de crispation, on le voit bien, de la société française, et j’ai envie de dire que les auditeurs entendent un petit peu ce qu’ils ont envie d’entendre, et que comme vous le disiez tout à l’heure, Bruno, selon… [il est interrompu] »
– Bruno Denaes : « Oui moi je le constate aussi en effet en tant que médiateur. »

Cette critique de la partialité des auditeurs semble même être un élément récurrent des émissions du médiateur. Elle s’accompagne logiquement d’une disqualification systématique des critiques émises, de rappels laudateurs de l’exemplarité du travail des journalistes de Radio France, ainsi que de la nécessité du médiateur… Sur bien des sujets, le procédé est similaire.

Ainsi, le 18 juin, sur France Info, le « Rendez-vous du médiateur » est censé porter sur les réactions des auditeurs au traitement des récents attentats. Ce jour là, Grégory Philipps aura moins de 3 min pour s’expliquer sur les remarques envoyées par les auditeurs avant que Bruno Denaes n’intervienne pour relativiser aussitôt leur portée critique, et surtout réorienter la discussion vers un tout autre terrain : l’excellence de France Info !

Bruno Denaes : « Alors, précisons que bien souvent dans les réactions, bien souvent ce sont des gens qui sont très, très sensibilisés ou militants à certaines causes. Parlons aussi maintenant de l’organisation à France Info. Alors, les auditeurs se sont félicités de la réactivité de votre antenne. Alors, vous avez commencé déjà à en parler un petit peu, comment ça s’est passé dimanche et comment vous avez réagi ? »

S’ensuit une explication de l’organisation de France Info qui ne répond en rien aux remarques des auditeurs, mais qui occupera tout le reste de l’émission, permettant à Bruno Denaes et Gregory Philipps, qui ne veut pourtant pas « lancer des fleurs [aux] équipes » de la chaîne, d’insister sur la « prudence », la « responsabilité » et la « réactivité » dont elles auraient fait preuve.

Une médiation exemplaire que Bruno Denaes réitérera le 2 juillet lors d’un autre « Rendez-vous », consacré cette fois au traitement du « Brexit » par France Info. Là encore, le médiateur introduit les critiques des auditeurs avec un sens de la contextualisation qui n’appartient qu’à lui :

Bruno Denaes : « Alors, soyons précis pour commencer, ce sont des auditeurs parmi les plus anti-européens qui nous ont principalement écrit. À les lire, France Info n’aurait diffusé que des opposants au retrait du Royaume-Uni. Alors que répondez-vous Isabelle [Labeyrie], vous qui étiez d’ailleurs à Londres au moment du vote ? »

Une impartialité manifeste que confirmera la suite de l’émission, Bruno Denaes appuyant sans retenue les proclamations de vertu des deux journalistes, quand il ne donne pas, simplement, son avis sur la question :

– Edwige Coupez : « Et tout cela sans parti pris de votre part ou des journalistes qui étaient sur le terrain ? »
– Isabelle Labeyrie : « C’est le travail d’un journal que de ne pas prendre parti, mais de refléter ce qu’il entend et ce qu’il voit sur le terrain. »
– Bruno Denaes : « Et je confirme parce qu’en effet j’ai entendu tous ces reportages ; alors, on reproche aussi, concernant les invités français sur l’antenne : “Vous n’avez choisi que des politiques ou des spécialistes pro-européens”, nous dit Gaël. Alors je pense qu’hormis le Front National, la plupart d’ailleurs des hommes politiques français sont plutôt pro-européens [sic]. »
[…]
– Bruno Denaes : « Alors plusieurs auditeurs s’attaquent également à la présentation des conséquences du Brexit. “Vous n’avez présenté que les aspects négatifs et non les bienfaits”, écrit Jean. Alors, en étant peut-être un peu provocateur, il y a des bienfaits ? [re-sic] »

Sans doute cette dernière remarque rassurera-t-elle les auditeurs à l’origine de ces accusations de parti-pris…

***
Dans ces émissions, la mise de côté et le dénigrement de la critique des auditeurs est toujours solidaire d’une idéalisation du travail journalistique qui fait de toute critique, fut-elle constructive, une attaque contre la profession elle-même. Une idéalisation qui veut que les journalistes, parce qu’ils ne font que « relate[r] des faits ou les explique[r] », fassent preuve d’une relative objectivité ou impartialité. Pointer des biais dans le traitement de l’information est dès lors insupportable ou inaudible en ce que cela risque de mettre au jour l’écart (souvent béant) entre cette mythologie qui est aussi une idéologie professionnelle et la réalité du travail de journaliste, mais aussi et surtout, les véritables causes de cet écart.
Finalement, cette attitude du médiateur face aux interpellations des auditeurs rejoint le constat fait à de maintes occasions par Acrimed : la critique des médias n’est tolérée dans les médias dominants – Bruno Duvic ne reconnaît-il pas qu’« il est toujours bon d’avoir un regard critique sur son travail quand on est journaliste » ? –, que lorsqu’elle provient de l’intérieur du système médiatique, c’est-à-dire lorsqu’elle est, par définition, préalablement contrôlée et neutralisée. Et peut-être est-ce là le véritable rôle du médiateur ?
Sarah Bourdaire

Source : ACRIMED, Sarah Bourdaire, 08-09-2016

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Le médiateur de Radio France répond à Acrimed : mépris, condescendance et autosatisfaction

Source : ACRIMED, Blaise Magnin, 26-09-2016

l y a quelques semaines, nous publiions un article intitulé « Les drôles de “médiations” du médiateur de Radio France », dans lequel nous pointions le manque d’impartialité récurrent de Bruno Denaes qui, à au moins quatre reprises au cours des derniers mois, s’est appliqué à éluder voire à discréditer les remarques des auditeurs, préférant prendre le parti des journalistes mis en cause ou leur opposer ses propres opinions.

Notre article n’a pas échappé et a visiblement déplu à Bruno Denaes qui a entrepris de nous répondre dans un long billet mis en ligne sur le site de Radio France. Une réponse exemplaire des procédés mis en œuvre par Bruno Denaes dans ses « médiations » lorsque les critiques des auditeurs heurtent trop frontalement ses convictions.

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Mépris et condescendance

Avec pour commencer une bonne dose de mépris et de condescendance à l’endroit d’Acrimed et de l’auteure de l’article. Ainsi, Bruno Denaes, qui se dit « attaqué par un site qui se veut “observatoire des médias”  », ne daigne pas même citer Acrimed, ni renvoyer vers notre site – craignant peut-être que les internautes trop curieux préfèrent notre critique des médias à sa pédagogie molle et autosatisfaite. Le médiateur de Radio France croit bon d’ajouter que notre « attaque » aurait été, perfidie suprême, « relayé[e] par le réseau Twitter » – réseau sur lequel, effectivement, Acrimed est activement suivi par un nombre notoirement plus conséquent d’internautes que… le médiateur de Radio France, par exemple !

Il se contente ensuite de mentionner « un article publié sur internet », tout en omettant soigneusement – deux précautions valent mieux qu’une – d’insérer le lien qui renverrait à l’article en question, évitant que le lecteur qui aurait souhaité se faire une idée de son contenu par lui-même puisse le consulter trop aisément [1]. Des procédés plus que douteux et un brin mesquins pour un journaliste qui, deux lignes plus loin, se targue de s’appuyer « sur son expérience, sur les principes d’éthique et de déontologie ». Mais ce n’est pas tout.

Bruno Denaes évoque succinctement le contenu de ce mystérieux article : « Un article totalement à charge se fondant sur trois exemples précis ». On s’attendrait donc à ce que le médiateur de Radio France revienne en détail sur chacun de ces trois exemples et démontre en quoi nos critiques sont « totalement à charge ». Pourtant, de ces trois exemples il ne sera quasiment jamais question dans la suite de l’article.

Autosatisfaction

On appréciera d’abord la morgue avec laquelle Bruno Denaes introduit son premier point : « Revenons tout d’abord sur le rôle du médiateur que j’aurais été heureux d’expliquer à l’auteure de l’article me mettant en cause. » On ne voit pas bien en quoi ces explications seraient nécessaires, puisque notre critique ne portait en aucun cas sur le « rôle » du médiateur, difficilement contestable en lui-même, mais bien sur la façon dont Bruno Denaes l’incarne. Un contresens entrainant un hors sujet, voilà qui pourrait prêter à sourire sous la plume d’un journaliste qui affiche volontiers des postures professorales…

Après une fastidieuse typologie des remarques qu’il reçoit et des réponses qu’il y apporte, Bruno Denaes se lance dans un nouvel exercice de pédagogie qu’il intitule : « Expliquer nos fonctionnements ». En guise d’explications, deux paragraphes de mise en cause des auditeurs et de leurs critiques « infondées ou militantes ou liées à une méconnaissance de nos fonctionnements ». S’il revient bien sur l’émission consacrée aux compteurs Linky, que nous critiquions dans notre article, c’est pour ne pas en démordre : ces compteurs sont inoffensifs, les remarques des auditeurs nulles et non avenues. Ce faisant, il ne répond en rien à notre critique qui ne consistait évidemment pas à prendre position dans cette controverse scientifico-technique, mais à regretter que le médiateur ait presque constamment cherché à tourner en ridicule les auditeurs qui l’avaient contacté [2].

Pour le reste, Bruno Denaes persiste et signe, se contentant d’une position de principe, sans revenir sur les émissions auxquelles nous nous référions précisément (sur le terrorisme, le mouvement social ou le Brexit) : selon lui, les auditeurs ont des « oreilles militantes », « nous écoutons la plupart du temps avec le prisme de nos opinions, en manquant singulièrement d’objectivité et de recul. Et c’est aussi le rôle du médiateur de le rappeler », comme de rappeler que « les antennes recherchent en permanence un équilibre ». En résumé, les auditeurs seraient consubstantiellement aveuglés par leur partialité, les journalistes et les rédactions seraient par essence impartiaux et objectifs, et le rôle du médiateur serait de rappeler ces vérités simples et incontestables aux premiers. Une bien étrange conception du public, du journalisme et de la « médiation ». Et Bruno Denaes de conclure en célébrant, en toute modestie, « le travail méticuleux et acharné du médiateur ».

***
Dans cette réponse comme dans les émissions que nous critiquions, le médiateur de Radio France semble confondre médiation et autojustification, explication et plaidoyer pro domo, neutralité et parti-pris, tout en esquivant les remarques les mieux étayées. Bref, une médiation, même « méticuleuse et acharnée », ne suffirait sans doute pas pour dénouer les désaccords entre Bruno Denaes et Acrimed !
Blaise Magnin

Source : ACRIMED, Blaise Magnin, 26-09-2016

Source: http://www.les-crises.fr/les-droles-de-mediations-du-mediateur-de-radio-france-par-sarah-bourdaire/


[Vidéo] Les Nouveaux Chiens de Garde, par Gilles Balbastre et Yannick Kergoat

Friday 9 December 2016 at 01:50

Tout simplement IN-DIS-PEN-SABLE…

Source : Vimeo, Gilles Balbastre et Yannick Kergoat

En 1932, l’écrivain Paul Nizan publiait Les chiens de garde pour dénoncer les philosophes et les écrivains de son époque qui, sous couvert de neutralité intellectuelle, s’imposaient en véritables gardiens de l’ordre établi.

Aujourd’hui, les chiens de garde sont journalistes, éditorialistes, experts médiatiques, ouvertement devenus évangélistes du marché et gardiens de l’ordre social. Sur le mode sardonique, LES NOUVEAUX CHIENS DE GARDE dénonce cette presse qui, se revendiquant indépendante, objective et pluraliste, se prétend contre-pouvoir démocratique. Avec force et précision, le film pointe la menace croissante d’une information produite par des grands groupes industriels du Cac40 et pervertie en marchandise

Voir aussi :

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Source: http://www.les-crises.fr/video-les-nouveaux-chiens-de-garde-par-gilles-balbastre-et-yannick-kergoat/