les-crises.fr

Ce site n'est pas le site officiel.
C'est un blog automatisé qui réplique les articles automatiquement

Entraide Vidéo Propagande anti-Brexit

Wednesday 13 July 2016 at 04:06

Bonjour

J’aimerais que soit créée cet été une longue vidéo documentaire sur le traitement du Brexit par nos médias.

Pour cela, il faudrait donc :

 

Le tout en étant réellement motivé par cet important projet, et ayant un peu de temps à y consacrer…

Me contacter ici – merci d’avance

Olivier Berruyer

Source: http://www.les-crises.fr/entraide-video-propagande-anti-brexit/


Brexit : une apocalypse vite surmontée…

Wednesday 13 July 2016 at 03:15

L’annonce du Brexit a suscité le 24 juin un vent de panique :

bourse-4

brexit-43

On notera au passage que, la Bourse anglaise a bien mieux résisté que les Bourses grecque, espagnole ou française :

brexit-64

Bref, ça y était :

brexit4

Petit bilan 20 jours après…

La Livre Sterling

brexit-bourse

Source : Le Figaro, 24/06/2016

Le chiffre est vrai si on parle en dollars :

11-livre-dollar-long

Mais enfin, la baisse n’est pas si exceptionnelle par rapport au seuil de 1,4 $ pour 1 £…

Mais c’est faux si on compare la livre à l’euro – ce qui est plus pertinent au vu du commerce réalisé :

12-livre-euro-moyen

Au plus bas, et en euros, la livre s’est retrouvée à son niveau de… 2013 !

15-livre-euro-court

16-livre-euro-an

Observons par ailleurs la situation en ajoutant la valeur du change en parité de pouvoir d’achat (c’est à dire la valeur en dollar d’un panier de biens représentatif en livres ; c’est une valeur de change équitable) :

13-livre-euro-ppa

On note la fréquente surévaluation de la livre, surtout en 2015.

Malgré la forte baisse post-Brexit, à 1,18 $, elle reste encore surévaluée par rapport à sa PPA de 1,12 $…

La Bourse anglaise

Observons alors ce qui semble désormais être le juge de paix ultime (vu qu’on ne parlait presque que d’elle le 24 juin) : la Bourse

01-bourse

On note :

Vous aurez noté que la forte hausse actuelle n’intéresse pas le moindre média, contrairement à la baisse du 24 juin – alors chuuuuut…

Source: http://www.les-crises.fr/brexit-une-apocalypse-vite-surmontee/


Communiqué du Sommet de Varsovie de l’OTAN

Wednesday 13 July 2016 at 03:00

Le dernier communiqué de l’OTAN. Un bijou de novlangue, d’inversion des réalités, à étudier de près pour qui veut comprendre comment naissent les guerres.

La Russie est citée… 55 fois. La Chine, 0…

C’était bien la paix…

(je vous ai surligné les passages les plus importants)

Source : OTAN, 09-07-2016

Publié par les chefs d’État et de gouvernement participant à la réunion du Conseil de l’Atlantique Nord tenue à Varsovie les 8 et 9 juillet 2016

1.         Nous, chefs d’État et de gouvernement des pays membres de l’Alliance atlantique, nous sommes réunis à Varsovie à un moment déterminant pour la sécurité de nos pays et de nos populations. Nous nous réjouissons d’avoir été rejoints par le Monténégro, que nous avons invité à devenir le 29e pays membre de notre Alliance.

2.         La mission essentielle de l’OTAN demeure inchangée : veiller à ce que l’Alliance demeure une communauté sans pareille de liberté, de paix, de sécurité et de valeurs partagées, dont la liberté individuelle, les droits de l’homme, la démocratie et l’état de droit. Nous sommes unis dans notre attachement au traité de Washington et aux buts et principes de la Charte des Nations Unies, ainsi qu’au lien transatlantique, d’une importance vitale. Pour protéger et défendre notre sécurité, indivisible, et nos valeurs communes, l’Alliance doit continuer et continuera de s’acquitter efficacement des trois tâches fondamentales énoncées dans le concept stratégique : défense collective, gestion de crise et sécurité coopérative. Ces tâches restent pleinement pertinentes, sont complémentaires et contribuent à la sauvegarde de la liberté et de la sécurité de tous les Alliés.

3.         Nous exprimons notre profonde gratitude à tous les hommes et les femmes des pays de l’Alliance et des pays partenaires qui ont participé ou qui participent, avec bravoure, aux missions et aux opérations dirigées par l’OTAN ainsi qu’aux missions et aux opérations qui, menées par des Alliés, contribuent à la sécurité de l’Alliance. Nous rendons hommage à tous ceux et celles qui ont été blessés ou qui ont accompli le sacrifice ultime alors qu’ils servaient les objectifs et valeurs que nous partageons.

4.         Depuis notre dernier sommet, tenu au pays de Galles en 2014, nous avons pris une série de mesures pour renforcer notre défense collective, développer nos capacités, et accroître notre résilience. Nous nous sommes engagés à doter nos forces armées des ressources suffisantes, dans la durée. Aujourd’hui, face à un environnement de sécurité de plus en plus varié, imprévisible et exigeant, nous avons pris des mesures supplémentaires pour défendre notre territoire et protéger nos populations, projeter la stabilité au‑delà de nos frontières, et poursuivre l’adaptation politique, militaire et institutionnelle de notre Alliance.

5.         Un arc d’insécurité et d’instabilité s’observe à la périphérie de l’OTAN et au‑delà. L’Alliance est confrontée à toute une gamme de défis et de menaces pour la sécurité, qui émanent de l’est comme du sud, d’acteurs étatiques comme non étatiques, et de forces militaires comme d’attaques terroristes, cyber ou hybrides. Les actions agressives de la Russie, y compris ses activités militaires provocatrices à la périphérie du territoire de l’OTAN et sa volonté avérée d’atteindre des objectifs politiques par la menace ou l’emploi de la force, constituent une source d’instabilité régionale, représentent un défi fondamental pour l’Alliance, ont nui à la sécurité euro‑atlantique, et menacent l’objectif, que nous poursuivons de longue date, d’une Europe libre, entière et en paix. Par ailleurs, les conditions de sécurité au Moyen‑Orient et en Afrique du Nord, qui se sont dégradées de manière significative dans l’ensemble de la région, ont de profondes répercussions sur notre sécurité. Le terrorisme, en particulier les attaques perpétrées par le prétendu État islamique en Iraq et au Levant (EIIL/Daech), a atteint un niveau d’intensité sans précédent, il s’étend à l’ensemble du territoire des Alliés, et il constitue désormais une menace immédiate et directe pour nos pays et pour la communauté internationale. L’instabilité au Moyen‑Orient et en Afrique du Nord alimente également la crise des réfugiés et des migrants.

6.         Le nouvel environnement de sécurité, en constante évolution, exige la capacité de faire face aux défis et aux menaces de toutes sortes, d’où qu’ils viennent. Fondée sur la solidarité, la cohésion de l’Alliance et l’indivisibilité de notre sécurité, l’OTAN reste le cadre transatlantique pour une défense collective solide et le forum essentiel pour les consultations et la prise de décisions entre Alliés en matière de sécurité. La responsabilité première de l’Alliance est de protéger et de défendre le territoire et la population de ses pays membres contre une attaque, conformément à l’article 5 du traité de Washington. Ainsi, une attention renouvelée est désormais accordée à la dissuasion et à la défense collective. Parallèlement, l’OTAN doit conserver sa capacité de répondre aux crises au‑delà de ses frontières, et continuer de s’employer activement à projeter la stabilité et à renforcer la sécurité internationale en travaillant avec ses partenaires et avec d’autres organisations internationales.

7.         Les Alliés sont face à un large éventail de défis liés au terrorisme, qui représentent une menace directe pour la sécurité de nos populations et, plus largement, pour la stabilité et la prospérité internationales. Au cours des derniers mois, nous avons été confrontés à de terribles attaques terroristes sur notre sol et dans nos villes. En particulier, l’EIIL/Daech représente une grave menace pour la région du Moyen‑Orient et de l’Afrique du Nord au sens large ainsi que pour nos pays. Pour y répondre, tous les pays membres de l’Alliance ainsi que de nombreux partenaires de l’OTAN contribuent à la coalition mondiale contre l’EIIL. Grâce à cette action déterminée, la campagne de la coalition mondiale a permis des progrès considérables, s’appuyant sur l’expérience que nous avons acquise en travaillant ensemble, ainsi qu’avec les partenaires, dans le cadre des opérations, des entraînements et des exercices dirigés par l’OTAN. L’EIIL/Daech est en train de perdre du territoire, de perdre le contrôle d’itinéraires d’approvisionnement et de ressources stratégiques, et de perdre également ses chefs, ses combattants et ses partisans. Afin de garantir que l’EIIL/Daech soit vaincu pour longtemps, nos pays restent déterminés à maintenir cette dynamique et l’action de la coalition mondiale. Dans ce contexte, il importe que les autorités iraquiennes continuent de promouvoir des politiques qui garantissent l’inclusivité à tous les niveaux du pouvoir, y compris au sein des forces de défense et de sécurité. Nous sommes conscients, par ailleurs, qu’une lutte efficace et durable contre l’EIIL/Daech en Syrie ne sera possible que si un gouvernement légitime est en place, et nous soulignons la nécessité d’une transition politique immédiate et véritable dans ce pays. Nous condamnons les attaques barbares incessantes perpétrées par l’EIIL/Daech contre les populations civiles, sans distinction, en particulier le fait que des communautés religieuses et ethniques entières soient prises pour cible de manière systématique et délibérée. Nous condamnons aussi avec la plus grande fermeté les actes violents et lâches commis par l’EIIL/Daech sur le territoire d’Alliés. Si la sécurité d’un Allié est menacée, nous n’hésiterons pas à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer notre défense collective. Au vu des conséquences humanitaires dramatiques de la crise et des répercussions de celle‑ci sur la stabilité et la sécurité de la région, les Alliés apportent dans toute la région une assistance humanitaire et en matière de sécurité.

8.         La menace mondiale que représente le terrorisme ne connaît ni frontières, ni nationalités, ni religions. Nous continuerons de lutter contre cette menace dans le respect du droit international et des buts et principes de la Charte des Nations Unies, avec détermination et en étant solidaires des Alliés et des partenaires frappés par des actes terroristes. Nous sommes prêts à faire davantage pour contrer cette menace, y compris en aidant nos partenaires à assurer leur sécurité, à se défendre contre le terrorisme et à développer leur résilience face aux attaques. Tandis que nous renforçons notre coopération pour prévenir les attentats terroristes, en atténuer les effets et y faire face efficacement, y compris au travers de notre action visant à projeter la stabilité, nous sommes également conscients de la nécessité d’agir sur les conditions qui favorisent la propagation du terrorisme.

9.         Depuis plus de vingt ans, l’OTAN s’emploie à bâtir un partenariat avec la Russie, notamment au travers du mécanisme du Conseil OTAN‑Russie. Les activités et les politiques récentes de la Russie ont diminué la stabilité et la sécurité, accru l’imprévisibilité, et modifié l’environnement de sécurité. Alors que l’OTAN respecte ses engagements internationaux, la Russie a violé les valeurs, les principes et les engagements sur lesquels repose la relation OTAN‑Russie, énoncés dans le Document de base du Conseil de partenariat euro‑atlantique, de 1997, dans l’Acte fondateur OTAN‑Russie, de 1997, et dans la Déclaration de Rome, de 2002, elle a rompu la confiance au cœur de notre coopération, et elle a remis en cause les principes fondamentaux de l’architecture de sécurité tant mondiale qu’euro‑atlantique. Les décisions que nous avons prises, y compris ici à notre sommet, sont pleinement compatibles avec nos engagements internationaux, et elles ne sauraient en conséquence être considérées par quiconque comme étant en contradiction avec l’Acte fondateur OTAN‑Russie.

10.       Parmi les actions et politiques de la Russie qui nuisent à la stabilité figurent : l’annexion illégale et illégitime de la Crimée, que nous ne reconnaissons et ne reconnaîtrons pas et sur laquelle nous appelons la Russie à revenir ; la violation, par la force, des frontières d’États souverains ; l’action délibérée de déstabilisation de l’est de l’Ukraine ; la tenue d’exercices impromptus de grande envergure, contraires à l’esprit du Document de Vienne, et les activités militaires provocatrices à proximité des frontières de l’OTAN, notamment dans les régions de la mer Baltique et de la mer Noire et en Méditerranée orientale ; son concept militaire, la posture correspondante et ses discours dans le domaine nucléaire, irresponsables et agressifs ; et ses violations répétées de l’espace aérien de pays de l’Alliance. En outre, en Syrie, l’intervention militaire de la Russie, sa présence militaire importante, son soutien au régime, et l’utilisation qu’elle fait de sa présence militaire en mer Noire à des fins de projection de puissance en Méditerranée orientale sont source de risques et défis supplémentaires pour la sécurité des Alliés et d’autres pays.

11.       L’OTAN a répondu à ce nouvel environnement de sécurité en renforçant sa posture de dissuasion et de défense, y compris par une présence avancée dans la partie orientale de l’Alliance, et en suspendant toute coopération civile et militaire pratique entre l’OTAN et la Russie, tout en demeurant ouverte au dialogue avec ce pays. Nous réaffirmons ces décisions.

12.       Ainsi que nous l’avons décidé, parler à la Russie nous permet de communiquer clairement nos positions, la crise en Ukraine et alentour étant pour nous, dans les circonstances actuelles, le premier point à l’ordre du jour. Nous restons ouverts à un dialogue périodique, ciblé et substantiel avec une Russie qui soit disposée à mener des échanges au sein du Conseil OTAN‑Russie sur la base de la réciprocité, en vue d’éviter les malentendus, les erreurs d’appréciation ou les escalades involontaires, et à accroître la transparence et la prévisibilité. Nous disposons également de lignes de communication militaires. Nous sommes convenus de continuer de nous servir de tous ces canaux pour aborder les questions d’importance critique auxquelles nous sommes confrontés, et nous appelons la Russie à faire bon usage de toutes les lignes de communication.

13.       Réciproques, la transparence et la réduction des risques dans le domaine militaire pourraient améliorer la stabilité et la sécurité dans la zone euro‑atlantique. Dans ce contexte, nous appelons la Russie à prendre part de façon constructive aux discussions en cours à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) afin de moderniser le Document de Vienne, de manière à aider à combler les failles qui réduisent la transparence militaire.

14.       L’Alliance ne cherche pas la confrontation et ne représente aucune menace pour la Russie. Mais nous ne pouvons transiger et ne transigerons pas sur les principes sur lesquels reposent notre Alliance et la sécurité de l’Europe et de l’Amérique du Nord. L’OTAN continuera d’être transparente, prévisible et résolue.

15.       Ainsi que nous l’avons décidé à notre sommet du pays de Galles, nous poursuivrons notre débat stratégique concernant la sécurité euro‑atlantique et notre approche à l’égard de la Russie. Ainsi que nous l’avons également décidé au pays de Galles, nous continuons de croire qu’un partenariat entre l’OTAN et la Russie, fondé sur le respect du droit international et des engagements internationaux, y compris ceux qui sont énoncés dans l’Acte fondateur OTAN‑Russie et la Déclaration de Rome, aurait une valeur stratégique. Nous regrettons que, malgré les appels répétés que les Alliés et la communauté internationale lancent à la Russie depuis 2014 pour qu’elle change de cap, les conditions d’une telle relation ne soient actuellement pas réunies. La nature des relations de l’Alliance avec la Russie et les aspirations au partenariat seront subordonnées à un changement clair et constructif dans les actions de ce pays, démontrant le respect du droit international et de ses obligations et responsabilités internationales. En l’absence d’un tel changement, il ne pourra y avoir de retour à la normale.

16.       Une Ukraine indépendante, souveraine et stable, fermement attachée à la démocratie et à l’état de droit, est essentielle à la sécurité euro‑atlantique. Nous restons déterminés dans notre soutien à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues, ainsi qu’à son droit de décider librement, sans ingérence extérieure, de son avenir et de l’orientation de sa politique étrangère, principes inscrits dans l’Acte final d’Helsinki.  Nous condamnons fermement la Russie pour ses actions agressives contre l’Ukraine ainsi que pour le non‑respect persistant du droit international et de ses obligations internationales, lesquels ont de graves incidences sur la stabilité et la sécurité de la zone euro‑atlantique tout entière.

17.       La Russie porte l’entière responsabilité de l’importante dégradation de la situation des droits de l’homme dans la péninsule de Crimée, en particulier de la discrimination dont sont victimes les Tatars de Crimée et d’autres membres de communautés locales. Nous demandons instamment que les autorités de fait russes prennent les mesures nécessaires pour garantir la sécurité, les droits et les libertés de tous les habitants de la péninsule. Il est impératif de permettre aux structures d’observation internationales d’accomplir leur travail, essentiel, en faveur de la protection des droits de l’homme. Nous condamnons le renforcement généralisé du dispositif militaire russe en cours en Crimée, et nous sommes préoccupés par la volonté qu’affiche la Russie de renforcer encore son dispositif militaire dans la région de la mer Noire ainsi que par les efforts qu’elle déploie en ce sens.

18.       Nous sommes attachés à la recherche d’une solution pacifique au conflit dans l’est de l’Ukraine, qui a entraîné la mort de 10 000 personnes, ainsi qu’à la réintégration des zones contrôlées par les rebelles que soutient la Russie dans les régions de Donetsk et de Louhansk. Cela passera par la pleine application des accords de Minsk, sur la base d’un cessez‑le‑feu général et d’un retrait des armes vérifié à l’échelon international. Nous exhortons tous les signataires à se conformer pleinement aux engagements auxquels ils ont souscrit.

19.       En tant que signataire des accords de Minsk, la Russie porte une responsabilité importante à cet égard. Malgré son engagement déclaré en faveur des accords de Minsk, la Russie poursuit son action délibérée de déstabilisation de l’est de l’Ukraine, en violation du droit international. Elle continue de fournir des armes, des équipements et du personnel, ainsi qu’une aide financière et autre à des groupes rebelles, et d’intervenir militairement dans le conflit. Nous sommes extrêmement préoccupés par la déstabilisation et par la dégradation des conditions de sécurité dans l’est de l’Ukraine. Nous appelons la Russie à s’abstenir de toute action agressive et à user de son influence considérable sur les rebelles pour les amener à honorer la totalité de leurs engagements, et en particulier pour permettre l’observation du cessez‑le‑feu, la mise en œuvre de mesures de confiance et le désarmement.

20.       Nous appuyons sans réserve la mission spéciale d’observation de l’OSCE, qui joue un rôle clé s’agissant de contribuer à la désescalade, et nous soulignons l’importance d’un accès total et sans entrave pour ses observateurs. Les obstacles que ceux‑ci continuent de rencontrer dans leur travail, pour l’essentiel dans des zones contrôlées par les rebelles que soutient la Russie, constituent une violation des accords de Minsk et entravent gravement la fonction d’observation de la mission. Nous appelons tous les responsables à faire cesser les attaques visant les observateurs de l’OSCE, et nous demandons que les auteurs de tels actes soient amenés à en répondre. Nous saluons également le travail accompli par la Mission de conseil de l’Union européenne, qui apporte une aide à l’Ukraine dans le domaine de la réforme du secteur de la sécurité civile, notamment pour ce qui concerne la police et l’état de droit.

21.       Nous nous félicitons des efforts entrepris dans le cadre du « format de Normandie » et du Groupe de contact trilatéral pour faire progresser l’application des accords de Minsk et ouvrir ainsi la voie à la pleine réintégration des régions de Donetsk et de Louhansk. Il s’agit notamment d’adopter une loi sur les élections locales pour l’est de l’Ukraine, de tenir des élections locales, lorsque les conditions de sécurité le permettront, de manière conforme à la loi ukrainienne ainsi qu’aux normes pertinentes de l’OSCE et en présence de nombreux observateurs internationaux, de mettre en application un statut spécial et une amnistie, de procéder au retrait des forces étrangères, et de rétablir le contrôle par l’Ukraine sur le côté ukrainien de la frontière internationale. Nous condamnons le fait que les rebelles se servent de zones résidentielles pour des tirs à l’arme lourde. Nous appelons instamment toutes les parties à prendre des mesures concrètes pour réduire le nombre de victimes civiles et pour se conformer strictement aux exigences du droit international humanitaire.

22.       Nous restons déterminés à maintenir une approche internationale cohérente, en particulier entre l’OTAN et l’Union européenne. La réponse de l’OTAN vient à l’appui de cet effort global, qui comprend des sanctions, décidées par l’Union européenne, le G7 et d’autres, et qui vise à favoriser une solution pacifique au conflit et à faire face aux actions de la Russie.

23.       Nous sommes confrontés à des défis en constante évolution dans les régions de la mer Baltique et de la mer Noire, dans l’Atlantique Nord, ainsi qu’en Méditerranée, qui sont d’une importance stratégique pour l’Alliance et pour nos partenaires. La Russie continue de renforcer sa posture militaire, d’accroître ses activités militaires, de déployer des nouvelles capacités du haut du spectre, et de compromettre la sécurité régionale. Ces développements ont entraîné une plus grande imprévisibilité, qui pourrait être atténuée par des mesures réciproques de transparence et de réduction des risques. Conscients de l’indivisibilité de la sécurité des Alliés, nous continuerons de suivre de près la situation dans ces régions. Notre réponse sera adaptée aux circonstances spécifiques à chaque région. Nous travaillerons par ailleurs avec les partenaires intéressés pour améliorer notre connaissance de la situation et élaborer des approches communes à l’égard des défis en constante évolution.

Dans la région de la mer Baltique, où les conditions de sécurité se dégradent depuis 2014, l’Alliance établit des relations de partenariat mutuellement bénéfiques avec la Finlande et la Suède sur un large éventail de questions. Nous apprécions les contributions significatives que la Finlande et la Suède apportent aux opérations dirigées par l’OTAN. Nous sommes résolument attachés au processus de renforcement permanent de notre coopération avec ces partenaires « nouvelles opportunités », notamment par des consultations politiques régulières, par le partage de la connaissance de la situation, et par la tenue d’exercices conjoints, afin de répondre aux défis communs en temps voulu et avec efficacité.

Dans la région de la mer Noire, les conditions de sécurité se dégradent également depuis quelques années. Nous continuerons d’évaluer les incidences pour l’OTAN des développements dans cette région et en tiendrons compte dans les approches et politiques de l’Alliance. Nous continuerons de soutenir, comme il conviendra, les efforts que déploient les États riverains de la mer Noire à l’échelle régionale  pour assurer la sécurité et la stabilité. Nous renforcerons également notre dialogue et notre coopération avec la Géorgie et l’Ukraine à cet égard.

Dans l’Atlantique Nord, comme ailleurs, l’Alliance sera prête à assurer la dissuasion et la défense face à toute menace potentielle, y compris celles qui viseraient les lignes de communication maritimes et les voies d’accès maritimes au territoire de l’OTAN. Dans ce contexte, nous renforcerons encore notre posture maritime et notre connaissance globale de la situation.

24.       Nous continuons de soutenir le droit de tous nos partenaires de faire des choix indépendants et souverains en matière de politique étrangère et de sécurité, sans pression extérieure ni contrainte. Nous restons déterminés à soutenir l’intégrité territoriale, l’indépendance et la souveraineté de l’Arménie, de l’Azerbaïdjan, de la Géorgie et de la République de Moldova. Dans ce contexte, nous continuons d’appuyer les efforts visant à parvenir à un règlement pacifique des conflits dans le Sud‑Caucase, ainsi qu’en République de Moldova, sur la base de ces principes et des normes du droit international, de la Charte des Nations Unies et de l’Acte final d’Helsinki. Nous exhortons toutes les parties à œuvrer de manière constructive, et avec une volonté politique renforcée, au règlement pacifique des conflits, dans les cadres de négociation établis.

25.       Les crises et l’instabilité qui persistent dans toute la région du Moyen‑Orient et de l’Afrique du Nord, en particulier en Syrie, en Iraq et en Libye, ainsi que la menace que font peser le terrorisme et l’extrémisme violent dans la région et au‑delà, démontrent que la sécurité de la région a des incidences directes sur la sécurité de l’OTAN. Outre les conflits qui se propagent à partir d’États défaillants ou faillis, le terrorisme et l’extrémisme violent, nous sommes confrontés à d’autres menaces et défis de sécurité transnationaux communs, notamment le trafic des armes légères et de petit calibre, la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs, et les menaces pesant sur la sûreté maritime et les approvisionnements énergétiques. Des réseaux de trafiquants profitent de cette situation, aux dépens des personnes déplacées. La paix et la stabilité dans cette région sont essentielles pour l’Alliance. Nous insistons dès lors sur la nécessité de faire davantage pour instaurer un calme durable et faire cesser la violence.

26.       Nous adaptons notre posture de défense et de dissuasion de manière à répondre aux menaces et aux défis, y compris ceux qui émanent du sud. Dans le même temps, nous continuons de nous appuyer sur notre réseau de sécurité coopérative pour renforcer le dialogue politique, pour favoriser des relations constructives dans la région et pour accroître notre soutien aux partenaires par la coopération pratique ainsi que par le renforcement des capacités de défense et la gestion de crise. Nous explorons en outre les possibilités de contributions de l’OTAN aux efforts internationaux en faveur de la stabilité dans la région, en nous appuyant sur les décisions prises en mai par nos ministres des Affaires étrangères.

27.       Nous restons préoccupés et vigilants face à la crise actuelle en Syrie, qui a des incidences directes sur la stabilité régionale et sur la sécurité de la frontière sud‑est de l’OTAN. La dynamique de ce conflit – y compris le terrorisme et l’extrémisme violent sous toutes leurs formes et dans toutes leurs manifestations, la tragédie humaine qu’il a provoquée et le flux massif de migrants – engendre des défis et des menaces pour la stabilité, la sécurité et la prospérité à l’échelle internationale. Nous réaffirmons notre engagement et notre détermination sans réserve à défendre le territoire et les frontières de l’OTAN contre toute menace et de faire face aux défis découlant du conflit en Syrie. Nous condamnons la violence qui frappe indistinctement, sous toutes ses formes, les populations et les infrastructures civiles. Nous condamnons également avec la plus grande fermeté la campagne incessante de bombardements aveugles, y compris l’utilisation d’armes incendiaires, et la violence du régime de Bachar al‑Assad et de ses partisans, qui prennent délibérément pour cible les populations et les infrastructures civiles. Nous condamnons en outre la violence aveugle à l’encontre des civils, en particulier celle dont usent l’EIIL/Daech, le Front Al‑Nosra et d’autres groupes qualifiés d’organisations terroristes par l’ONU.

28.       Nous appelons le régime syrien à se conformer pleinement aux dispositions de toutes les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité de l’ONU et à prendre immédiatement des mesures en vue d’une véritable transition politique conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité de l’ONU et au Communiqué de Genève du 30 juin 2012. Nous soulignons que la stabilité et la sécurité ne sauraient être rétablies en Syrie sans une véritable transition politique vers un nouveau pouvoir, qui soit représentatif, sur la base d’un processus politique inclusif et dirigé par les Syriens. À cet égard, nous soutenons le processus politique conduit sous les auspices de l’ONU, ainsi que les efforts du Groupe international de soutien pour la Syrie à l’appui de ce processus. Nous demandons la mise en œuvre intégrale des dispositions de la résolution 2254 du Conseil de sécurité de l’ONU relatives à l’aide humanitaire, ainsi que de l’accord sur la cessation des hostilités. Nous condamnons fermement les violations de cet accord, en particulier celles commises par le régime et ses partisans. Ces violations entravent considérablement le processus politique. Nous appelons les parties à l’accord de cessation des hostilités à maintenir leur engagement en faveur de cet accord et de sa mise en œuvre intégrale.

29.       Nous soutenons les efforts que réalise l’Iraq pour mettre en place des institutions qui puissent rétablir la stabilité et la sécurité dans le pays. Nous saluons les résultats obtenus à ce jour par les forces de sécurité iraquiennes, qui ont réussi à repousser l’EIIL/Daech et à lui reprendre des territoires clés. La participation de tous les Iraquiens, au travers de la réconciliation nationale et d’une gouvernance inclusive, est d’une importance cruciale, et nous encourageons donc les autorités iraquiennes à continuer à mettre en œuvre des politiques permettant de dépasser les clivages ethniques, confessionnels et religieux et d’assurer la représentation de tous dans l’ensemble des institutions gouvernementales, ainsi qu’à développer les forces de sécurité du pays.

30.       Nous nous félicitons des développements politiques intervenus en Libye depuis décembre 2015 : nous soutenons l’action de l’ONU et les efforts dirigés par les Libyens, qui ont conduit à l’accord politique libyen, et nous reconnaissons le gouvernement d’entente nationale comme le seul gouvernement légitime de la Libye. Nous encourageons la pleine mise en œuvre de l’accord politique et nous exprimons notre soutien aux efforts du premier ministre et président du Conseil de la présidence en faveur d’un processus politique inclusif visant à promouvoir la réconciliation nationale, et à établir ainsi des structures étatiques qui fonctionnent. Ces efforts marquent une étape importante dans le renforcement de la transition démocratique du pays. L’unification de toutes les forces libyennes sous l’autorité du Conseil de la présidence sera déterminante s’agissant de la capacité de la Libye à lutter contre le terrorisme.

31.       Les actes terroristes ainsi que le trafic d’armes et de stupéfiants et la traite des êtres humains dans toute la région du Sahel/Sahara continuent de menacer la sécurité régionale et notre propre sécurité. Nous saluons l’action de l’ONU et de l’UE, et soulignons l’importance d’un engagement ferme de la communauté internationale à faire face aux défis complexes que connaît la région sur le plan politique et sur le plan de la sécurité. S’agissant du Mali, nous nous félicitons de l’entérinement de l’accord de paix, des mesures prises en vue de sa mise en œuvre, et du soutien de la communauté internationale en faveur de la stabilisation du pays. Nous saluons également l’engagement militaire solide de pays de l’Alliance dans la région du Sahel/Sahara, à l’appui de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des pays de la région, et au service de la sécurité de l’Alliance. Nous saluons l’action que mènent nos partenaires africains pour approfondir la coopération régionale afin de faire face aux problèmes de sécurité dans le Sahel.

32.       La posture militaire de l’Alliance est, par nature, défensive. La dissuasion et la défense sont au cœur de la mission et de l’objectif de l’Alliance : il s’agit là du moyen fondamental de prévenir les conflits, de protéger le territoire et les populations des Alliés, de préserver la liberté de décision et d’action de l’Alliance à tout moment, ainsi que de défendre les principes et valeurs consacrés dans le Traité de l’Atlantique Nord. Nous veillerons à ce que l’OTAN dispose de toute la gamme des capacités nécessaires pour assurer la dissuasion et la défense face à des adversaires potentiels et à l’éventail complet des menaces auxquelles l’Alliance pourrait être confrontée, d’où qu’elles viennent.

33.       Toutes les mesures que nous avons prises pour renforcer notre posture de dissuasion et de défense exigent des investissements appropriés dans les capacités, ainsi que la mise en place de forces très performantes et déployables. Notre sécurité et notre défense dépendent globalement tant des sommes que nous y consacrons que de la manière dont nous les dépensons. Il convient d’affecter davantage d’investissements à la réalisation de nos objectifs prioritaires en matière de capacités. Il est essentiel que les Alliés fassent preuve de la volonté politique de mettre à disposition les capacités requises et de déployer des forces lorsqu’elles sont nécessaires. Les Alliés doivent également veiller à ce que les forces soient déployables, soutenables et interopérables. L’engagement en matière d’investissements de défense que nous avons approuvé au sommet du pays de Galles constitue une étape importante dans cette direction, et nous réaffirmons aujourd’hui son importance. Par cet engagement, nous sommes convenus d’inverser la tendance à la baisse des budgets de défense, d’utiliser le plus efficacement possible les fonds à notre disposition et de favoriser une répartition plus équilibrée des dépenses et des responsabilités.

34.       Depuis le sommet du pays de Galles, nous avons franchi un cap. Collectivement, les dépenses de défense des Alliés ont augmenté, en 2016, pour la première fois depuis 2009. En deux ans seulement, une majorité d’Alliés ont enrayé ou inversé la baisse de leurs dépenses de défense en termes réels. Aujourd’hui, cinq Alliés se conforment à la directive OTAN recommandant un niveau minimum de dépenses de défense de 2 % du produit intérieur brut. Dix Alliés se conforment à la directive OTAN recommandant aux pays de consacrer plus de 20 % de leur budget de défense aux équipements majeurs, y compris la recherche et développement y afférente. Les extrants sont également importants, s’agissant en particulier de la déployabilité et de la soutenabilité des forces alliées. Les Alliés continuent de fournir d’importantes contributions aux opérations, missions et activités de l’OTAN ainsi qu’à la structure de commandement et à la structure de forces de l’OTAN. Ils investissent des ressources considérables pour préparer leurs forces, leurs capacités et leur infrastructure aux activités de l’Alliance et aux opérations qui, menées par des Alliés, contribuent à notre sécurité collective. Il reste beaucoup à faire. Les efforts se poursuivent pour parvenir à un partage plus équilibré des dépenses et des responsabilités. Les ministres de la Défense continueront d’examiner chaque année les progrès accomplis.

35.       Au pays de Galles, nous avons approuvé notre plan d’action « réactivité » (RAP) afin de répondre rapidement aux changements fondamentaux qui interviennent dans l’environnement de sécurité aux frontières de l’OTAN et au‑delà et qui sont source de préoccupation pour les Alliés. Ce plan apporte une réponse aux défis engendrés par la Russie, ainsi qu’à leurs incidences stratégiques. Il apporte également une réponse aux risques et aux menaces émanant de notre voisinage méridional, le Moyen‑Orient et l’Afrique du Nord. En moins de deux ans, ce plan a déjà contribué à une adaptation substantielle de la posture militaire de l’OTAN. Le RAP a sensiblement renforcé notre état de préparation, notre réactivité et notre souplesse, nécessaires pour faire face au nouvel environnement de sécurité. Nous nous félicitons de sa mise en œuvre.

36.       Les mesures d’assurance prévues par le plan d’action « réactivité » permettent depuis deux ans, par rotation, une présence militaire continue et une activité significative dans la partie orientale de l’Alliance. Ces mesures défensives témoignent de notre solidarité collective et de notre détermination à protéger tous les Alliés. Les mesures d’assurance répondent au besoin fondamental essentiel d’assurance et de dissuasion. En outre, des mesures d’assurance adaptées pour la Turquie, visant à répondre aux défis de sécurité croissants qui émanent du sud, contribuent à la sécurité de l’Alliance dans son ensemble, et elles seront pleinement mises en œuvre. Les mesures d’assurance sont flexibles et modulables, en fonction de l’évolution de la situation en matière de sécurité, et elles seront revues chaque année par le Conseil.

37.       Dans le cadre des mesures d’adaptation à plus long terme prévues par le plan d’action « réactivité », nous avons :

a.      renforcé la Force de réaction de l’OTAN (NRF), en relevant son état de préparation et en augmentant sensiblement sa taille, pour en faire une force interarmées plus performante et plus souple, composée d’un élément terrestre de niveau division avec des composantes aérienne, maritime et d’opérations spéciales ;

b.      créé une force opérationnelle interarmées à très haut niveau de préparation (VJTF), capable de commencer à se déployer sous deux à trois jours. Cette force a été certifiée, elle a mené des exercices sur court préavis, et elle est en phase d’alerte depuis 2015. Sept pays‑cadres¹  ont été identifiés pour la VJTF, et un plan de rotation allant jusqu’en 2022 a été établi pour cette force ;

c.       mis en place huit unités multinationales d’intégration des forces OTAN sur le territoire des Alliés situés dans la partie orientale de l’Alliance, chargées de fournir, lorsque cela sera nécessaire, une aide pour l’entraînement des forces de l’Alliance et pour la réception de renforts ;

d.      pris les mesures nécessaires pour améliorer la capacité de renforcement de l’OTAN au travers de nouveaux projets d’infrastructure et grâce à une souplesse accrue pour les mouvements rapides de forces sur le territoire des pays ;

e.      dans le cadre de la structure de forces de l’OTAN, rendu pleinement opérationnel le quartier général du Corps multinational Nord‑Est en Pologne et établi le quartier général de la Division multinationale Sud‑Est en Roumanie, qui sont chargés d’assurer le commandement des unités d’intégration des forces OTAN et qui offrent des options de commandement et de contrôle souples dans leurs régions respectives ;

f.       décidé de renforcer les forces navales permanentes de l’OTAN en les dotant de capacités supplémentaires ;

g.      établi un programme d’exercices OTAN plus ambitieux. Les exercices nationaux constituent une partie importante de ces activités. Rien qu’en 2015, l’OTAN et les Alliés ont organisé 300 exercices, dont Trident Juncture 2015, mené en Italie, au Portugal et en Espagne ; il s’agit de l’exercice le plus grand et le plus complexe qui ait été conduit par l’OTAN depuis plus de dix ans ;

h.      amélioré la planification préétablie et permis un processus décisionnel accéléré afin d’assurer la réactivité sur le plan militaire comme sur le plan politique ;

i.        adopté une stratégie concernant le rôle de l’OTAN dans la lutte contre les pratiques de guerre hybride, qui est actuellement mise en œuvre en coordination avec l’UE ;

j.        établi un cadre pour l’adaptation de l’OTAN en réponse aux menaces et aux défis croissants qui émanent du sud.

Ces mesures d’adaptation demeureront un élément déterminant de l’adaptation militaire de l’OTAN et devront être maintenues dans la durée.

38.       Au vu du nouvel environnement de sécurité, qui continue d’évoluer, l’adaptation doit se poursuivre. Par conséquent, nous avons décidé de renforcer encore la posture de dissuasion et de défense de l’Alliance. Forts du succès du RAP, nous adoptons aujourd’hui une approche large en matière de dissuasion et de défense, qui fait appel à tous les outils à la disposition de l’OTAN. Cette approche offrira à l’Alliance diverses options devant lui permettre de faire face à toutes les menaces, d’où qu’elles viennent. Compte tenu de la diversité de la nature, du type et de l’origine des menaces, nous adapterons notre réponse aux circonstances particulières. Ensemble, les mesures que nous approuvons au présent sommet permettront d’améliorer la sécurité de tous les Alliés et d’assurer la protection du territoire, des populations, de l’espace aérien et des lignes de communication maritimes, y compris transatlantiques, des pays de l’Alliance contre toutes les menaces, d’où qu’elles viennent. Dans ce contexte, notre réponse, qui traduit notre unité,  est en adéquation avec le nouvel environnement de sécurité, témoignant de notre capacité et de notre volonté de nous défendre mutuellement. Ces mesures, qui s’inscrivent dans le cadre de la posture de l’Alliance, sont de nature défensive, et elles sont proportionnées et conformes à nos engagements internationaux, et elles témoignent de notre respect à l’égard de l’architecture de sécurité européenne, fondée sur des règles.

39.       Pour prévenir les conflits et les guerres, une dissuasion et une défense crédibles sont essentielles. Dans le même temps, dans le cadre de l’approche globale de l’Alliance visant à assurer la sécurité des populations et du territoire des pays de l’OTAN, la dissuasion doit être complétée par un véritable dialogue et une réelle interaction avec la Russie en vue d’une transparence réciproque et d’une réduction des risques. Ces efforts ne se feront pas aux dépens de la garantie, par l’OTAN, d’une dissuasion et d’une défense crédibles.

40.       Nous avons décidé d’établir une présence avancée renforcée en Estonie, en Lettonie, en Lituanie et en Pologne, pour démontrer sans équivoque, dans le cadre de notre posture globale, la solidarité des pays de l’Alliance, ainsi que leur détermination et leur aptitude à réagir en déclenchant une réponse alliée immédiate face à toute agression. À compter de début 2017, la présence avancée renforcée comprendra des forces multinationales mises à disposition par des pays‑cadres et d’autres Alliés contributeurs sur une base volontaire, de façon durable, et par rotation. Ces forces seront basées sur quatre groupements tactiques de niveau bataillon capables d’opérer conjointement avec des forces nationales et présents en permanence dans ces pays, s’appuyant sur une stratégie de renforcement viable. Nous nous félicitons de ce que le Canada, l’Allemagne, le Royaume‑Uni et les États‑Unis se proposent comme pays‑cadres pour la présence multinationale robuste en Lettonie, en Lituanie, en Estonie et en Pologne, respectivement. Nous avons en outre accepté l’offre de la Pologne de mettre à disposition, comme base pour la création d’un quartier général de division multinational, un quartier général de division existant, sous réserve de l’approbation des modalités par le Conseil. Nous reconnaissons le rôle à part entière que les pays hôtes joueront pour ce qui est de la présence avancée renforcée. Nous nous félicitons également des contributions supplémentaires au sein de l’Alliance à l’appui de cette entreprise importante. Nous apprécions les engagements significatifs des Alliés en matière de ressources.

41.       Nous développerons également une présence avancée adaptée dans la partie sud‑est du territoire de l’Alliance. Des mesures appropriées, adaptées à la région de la mer Noire, notamment l’initiative roumaine visant la mise en place d’une brigade‑cadre multinationale pour aider à améliorer la formation intégrée d’unités alliées relevant du Quartier général de la Division multinationale Sud‑Est, contribueront à renforcer la posture de dissuasion et de défense de l’Alliance, à améliorer la connaissance de la situation, et à montrer en temps de paix que l’OTAN entend bien opérer sans contrainte. Elles enverront aussi un signal fort de soutien en faveur de la sécurité régionale. Des options pour une présence aérienne et maritime renforcée seront évaluées.

42.       Dans le cadre du plan d’action « réactivité » et à titre de contribution à notre posture de dissuasion et de défense, nous avons établi un cadre pour l’adaptation de l’OTAN en réponse aux menaces et aux défis croissants qui émanent du sud. Ce cadre est axé sur l’amélioration de la compréhension régionale et de la connaissance de la situation, sur l’aptitude à prévoir les crises émanant du sud et à y répondre, sur des capacités améliorées pour les opérations expéditionnaires, et sur le renforcement de l’aptitude de l’OTAN à projeter la stabilité au travers de partenariats régionaux et d’initiatives de renforcement des capacités. Nous allons avancer dans la mise en œuvre de ce cadre.

43.       Dans le cadre d’une approche plus large et des efforts concertés de la communauté internationale, nous devons aussi assurer la dissuasion et la défense face aux acteurs non étatiques qui ont des aspirations, des capacités et des ressources s’apparentant à celles d’un État et qui menacent ou affectent la sécurité des populations et l’intégrité du territoire des pays de l’Alliance. Nous avons adopté une série de mesures afin de répondre à cette menace, y compris en faisant en sorte qu’elle soit suivie et évaluée de manière appropriée et que les plans concernés soient actualisés en fonction des besoins.

44.       Nous n’accepterons pas qu’un quelconque adversaire potentiel nous impose des contraintes s’agissant de la liberté de mouvement des forces alliées dans les domaines terrestre, aérien et maritime, vers et dans toute partie du territoire de l’Alliance. Les capacités, l’entraînement et les exercices de l’Alliance contribuent à notre liberté d’action. Nous restons prêts à renforcer rapidement tout Allié qui ferait l’objet d’une menace, pour lui permettre, en cas de besoin, de faire face à toute éventualité.

45.       Nous veillerons à ce que l’OTAN dispose de toutes les capacités nécessaires à l’accomplissement de toute la gamme des missions de l’Alliance, y compris pour assurer la dissuasion et la défense face à des adversaires potentiels et à l’éventail complet des menaces auxquelles l’Alliance pourrait être confrontée, d’où qu’elles viennent. Conformément à nos priorités de planification de défense, nous sommes déterminés à mettre à disposition des forces et des capacités plus lourdes et davantage dans le haut du spectre, ainsi qu’un plus grand nombre de forces à un niveau de préparation plus élevé. Mener à bien cette tâche reste en premier lieu du ressort des Alliés, à titre individuel. Les approches multinationales peuvent être utiles pour répondre à ces besoins essentiels.

46.       Nous veillerons à ce que la structure de commandement de l’OTAN demeure robuste et agile, et apte à prendre en charge tous les éléments d’un commandement et d’un contrôle efficaces face à des défis simultanés dans tout le spectre des missions. Au vu du nouvel environnement de sécurité, qui continue d’évoluer, et de l’accroissement des besoins globaux, nous ferons en sorte qu’une évaluation fonctionnelle de la structure actuelle soit réalisée.

47.       Nous améliorerons encore notre capacité d’anticipation stratégique en développant notre connaissance de la situation, s’agissant en particulier de l’est et du sud, ainsi que de l’Atlantique Nord. Notre aptitude à comprendre, à suivre et, au final, à anticiper les actions d’adversaires potentiels grâce à des moyens de renseignement, de surveillance et de reconnaissance (ISR) et à des arrangements de large portée en matière de renseignement revêt une importance croissante. Ces éléments sont essentiels pour nous permettre de prendre des décisions politiques et militaires éclairées en temps voulu. Nous avons mis en place les capacités nécessaires pour faire en sorte que notre réactivité soit en adéquation avec celle de nos forces du plus haut niveau de préparation.

48.       La posture maritime de l’Alliance s’articule autour des quatre rôles suivants : défense collective et dissuasion, gestion de crise, sécurité coopérative et sûreté maritime, et contribue donc aussi à la projection de la stabilité. Les forces navales permanentes constituent une capacité maritime essentielle de l’Alliance et la pièce maîtresse de la posture maritime de l’OTAN. Elles sont en cours de renforcement et seront alignées sur la Force de réaction de l’OTAN renforcée, le but étant d’en faire les forces maritimes de l’OTAN ayant le plus haut niveau de préparation. Nous continuerons de renforcer notre posture maritime, en exploitant tout le potentiel de la puissance maritime globale de l’Alliance. Les travaux se poursuivent sur l’opérationnalisation de la stratégie maritime de l’Alliance, ainsi que sur l’avenir des opérations maritimes de l’OTAN, essentielles à la posture maritime de l’Organisation. Les Alliés examinent en outre des initiatives complémentaires en matière de gouvernance maritime pour contribuer à cet effort.

49.       L’interopérabilité de nos forces armées est fondamentale pour notre succès et constitue une valeur ajoutée importante de notre Alliance. De fait, les entraînements et les exercices, l’élaboration de normes de l’OTAN et la mise au point de solutions techniques communes, la Force de réaction de l’OTAN, les mesures d’assurance, la présence avancée dans la partie orientale de l’Alliance, et les opérations menées conjointement en Afghanistan, au Kosovo et en Méditerranée, sont aussi l’occasion pour tous les Alliés de renforcer leur interopérabilité au sein de l’OTAN, ainsi qu’avec les partenaires, comme il conviendra. Cela permet à nos forces armées de travailler ensemble avec efficacité, que ce soit dans le cadre d’opérations de l’OTAN, à l’échelon national, au sein de coalitions, ou encore dans le cadre de l’UE ou de l’ONU, ce qui contribue à notre sécurité commune.

50.       Nous nous félicitons des nombreuses initiatives multinationales et nationales concrètes menées de manière autonome ou dans le cadre de la défense intelligente ou du concept de pays‑cadre, qui renforcent l’Alliance. Elles contribuent directement au développement des capacités et à notre posture de dissuasion et de défense renforcée. Nous garantirons la cohérence globale et l’unité d’action entre tous les éléments du développement capacitaire et de la présence militaire des Alliés, y compris entre la présence avancée et les activités et initiatives militaires des Alliés à l’échelon multinational ou national.

51.       La responsabilité première de l’Alliance est de protéger et de défendre le territoire et la population de ses pays membres contre une attaque, conformément à l’article 5 du traité de Washington. Nul ne doit douter de la détermination de l’OTAN au cas où la sécurité de l’un de ses États membres devrait être menacée. L’OTAN préservera tout l’éventail des capacités nécessaires pour assurer la dissuasion et la défense contre toute menace pesant sur la sûreté et la sécurité de nos populations, et ce d’où qu’elle provienne.

52.       Pour prévenir les conflits et les guerres, une dissuasion et une défense crédibles sont essentielles. Aussi, la dissuasion et la défense, articulées autour d’une combinaison appropriée de capacités nucléaires, conventionnelles et de défense antimissile, demeurent un élément central de notre stratégie d’ensemble. Une posture de dissuasion et de défense robuste renforce la cohésion de l’Alliance, y compris le lien transatlantique, et ce grâce à une répartition équitable et viable des rôles, des responsabilités et des charges. L’OTAN doit continuer d’adapter sa stratégie en phase avec l’évolution de l’environnement de sécurité –  notamment en ce qui concerne les capacités et les autres mesures requises – pour faire en sorte que sa posture générale de dissuasion et de défense la rende apte à faire face à la doctrine et aux capacités d’adversaires potentiels, et qu’elle reste crédible, souple, résiliente, et adaptable.

53.       L’objectif des Alliés est de renforcer la dissuasion en tant qu’un des éléments centraux de la défense collective et de contribuer à la sécurité, indivisible, de l’Alliance. Aussi longtemps qu’il y aura des armes nucléaires, l’OTAN restera une alliance nucléaire. Les forces stratégiques de l’Alliance, et en particulier celles des États‑Unis, sont la garantie suprême de la sécurité des Alliés. Les forces nucléaires stratégiques indépendantes du Royaume‑Uni et de la France ont un rôle de dissuasion propre et contribuent à la sécurité globale de l’Alliance. Les centres de décision distincts de ces Alliés contribuent à la dissuasion, en compliquant les calculs d’adversaires potentiels. La posture de dissuasion nucléaire de l’OTAN repose également, en partie, sur les armes nucléaires des États‑Unis déployées à l’avant en Europe, ainsi que sur les capacités et l’infrastructure mise à disposition par les Alliés concernés. Ces Alliés feront en sorte que tous les éléments composant la dissuasion nucléaire de l’OTAN restent sûrs, sécurisés et efficaces. Cela exigera un maintien de l’attention des dirigeants et une excellence institutionnelle pour la mission de dissuasion nucléaire, ainsi que des directives de planification à la hauteur des exigences du XXIe siècle. L’Alliance assurera une participation aussi large que possible des Alliés concernés aux arrangements agréés pour le partage du fardeau dans le domaine nucléaire.

54.       L’objectif fondamental de la capacité nucléaire de l’OTAN est de préserver la paix, de prévenir les actions coercitives et de décourager toute agression. Les armes nucléaires sont uniques. Tout emploi d’armes nucléaires contre l’OTAN altérerait fondamentalement la nature d’un conflit. Les conditions dans lesquelles l’OTAN pourrait être amenée à recourir à l’arme nucléaire sont extrêmement improbables. Si, toutefois, la sécurité fondamentale de l’un de ses États membres devait être menacée, l’OTAN a les capacités et la détermination voulues pour imposer à un adversaire des coûts qui seraient inacceptables et largement supérieurs aux gains qu’il pourrait espérer obtenir.

55.       La défense antimissile peut venir compléter le rôle des armes nucléaires dans la dissuasion mais elle ne peut pas s’y substituer. Il s’agit d’une capacité purement défensive. La menace que représente la prolifération des missiles balistiques pour les populations, le territoire et les forces des pays de l’OTAN continue de croître, et la défense antimissile s’inscrit dans le cadre d’une réponse plus large à cette menace.

56.       À notre sommet de Lisbonne, en 2010, nous avons décidé de développer une capacité de défense antimissile balistique (BMD) de l’OTAN afin d’accomplir notre tâche fondamentale de défense collective. Cette capacité a pour but d’assurer la couverture totale et la protection de l’ensemble des populations, du territoire et des forces des pays européens de l’OTAN contre les menaces croissantes qu’engendre la prolifération des missiles balistiques, sur la base des principes de l’indivisibilité de la sécurité des Alliés et de la solidarité au sein de l’OTAN, du partage équitable des risques et des charges, ainsi que de l’effort raisonnable, compte tenu du niveau de la menace, de la soutenabilité financière et de la faisabilité technique, et en fonction des dernières évaluations communes de la menace agréées par l’Alliance. Si les efforts internationaux devaient permettre de réduire les menaces qu’engendre la prolifération des missiles balistiques, la défense antimissile de l’OTAN pourra être adaptée en conséquence, et elle le sera.

57.       À notre sommet de Chicago, en 2012, nous avons déclaré une capacité BMD intérimaire de l’OTAN, qui constituait une première étape significative sur le plan opérationnel. Au sommet du pays de Galles, nous avons pris note avec satisfaction du déploiement avancé, à Rota, en Espagne, de navires Aegis dotés de capacités BMD, qui pourraient être mis à la disposition de l’OTAN. Aujourd’hui, nous avons franchi une nouvelle étape dans le développement de la BMD de l’OTAN, et nous sommes heureux de déclarer la capacité opérationnelle initiale de la BMD de l’OTAN. Il s’agit d’une étape significative sur la voie de la réalisation de l’objectif d’une BMD de l’OTAN qui offre une capacité renforcée pour défendre les populations, le territoire et les forces de toute la partie méridionale de l’Europe OTAN contre une attaque potentielle de missiles balistiques. Le site Aegis Ashore de Deveselu, en Roumanie, représente une partie significative de cet accroissement de capacité, et le commandement et le contrôle (C2) de ce site sont en voie de transfert à l’OTAN. Nous nous félicitons en outre de ce que la Turquie héberge un radar avancé de détection lointaine BMD à Kürecik et de ce que la Pologne hébergera un site Aegis Ashore à la base militaire de Redzikowo. Nous nous réjouissons également que des contributions nationales volontaires supplémentaires aient été proposées par des Alliés, et nous encourageons l’apport d’autres contributions volontaires, sachant que toutes permettront d’accroître la robustesse de cette capacité.

58.       Comme pour toutes les opérations de l’OTAN, un contrôle politique total des Alliés est essentiel et sera assuré sur la capacité BMD. Nous continuerons de renforcer la supervision politique de la BMD de l’OTAN à mesure que la capacité se développera. Il est essentiel que les fonctionnalités du réseau C2 de l’Alliance pour la BMD correspondent à cette évolution. Dans ce contexte, le prochain jalon majeur nécessaire pour la capacité BMD de l’OTAN sera l’achèvement du prochain élément fondamental du système C2 de la BMD de l’OTAN. L’achèvement de l’ensemble du système C2 de la BMD de l’OTAN permettra ensuite de fournir les fonctionnalités supplémentaires requises pour que le système BMD atteigne sa maturité.

59.       Nous développerons plus avant notre engagement avec les États tiers, au cas par cas, afin de renforcer la transparence et la confiance, et d’accroître l’efficacité de la défense antimissile balistique. Il pourrait s’agir d’échanges d’informations, de consultations ou de coopération. La défense antimissile de l’OTAN n’est pas dirigée contre la Russie, et elle ne portera pas atteinte aux capacités russes de dissuasion stratégique. La défense antimissile de l’OTAN est destinée à assurer la défense contre des menaces potentielles n’émanant pas de la zone euro–atlantique. Nous avons expliqué à de nombreuses reprises à la Russie que le système BMD n’a pas la capacité d’atteindre le dispositif russe de dissuasion nucléaire stratégique, et qu’il n’y a aucune intention de revoir la conception de ce système pour le doter d’une telle capacité à l’avenir. Dès lors, les déclarations de la Russie dans lesquelles celle‑ci menace de prendre des Alliés pour cible en raison de la BMD de l’OTAN sont inacceptables et contre‑productives. Si la Russie devait être disposée à discuter de la BMD avec l’OTAN, et sous réserve de l’accord de l’Alliance, l’OTAN reste ouverte à la discussion.

60.       La BMD de l’OTAN s’appuie sur des contributions nationales volontaires, y compris des intercepteurs et des capteurs à financement national et des accords de stationnement, et sur l’élargissement de la capacité BMD. Les systèmes de commandement et de contrôle de la BMD de l’OTAN sont les seuls éléments de la BMD de l’OTAN qui sont admissibles au financement commun.

61.       Nous chargeons également le Conseil de faire le point régulièrement sur la mise en œuvre de la capacité BMD de l’OTAN, notamment avant les réunions des ministres des Affaires étrangères et celles des ministres de la Défense, et d’établir, pour notre prochain sommet, un rapport global sur les progrès accomplis et sur les questions à examiner pour le développement futur de cette capacité.

62.       La maîtrise des armements, le désarmement et la non‑prolifération continuent de jouer un rôle important dans la réalisation des objectifs de sécurité de l’Alliance. Tant la réussite que l’échec de ces efforts peuvent influer directement sur l’environnement de la menace pour l’OTAN. Dans ce contexte, il est extrêmement important que les engagements pris en matière de désarmement et de non‑prolifération au titre des traités existants soient respectés, y compris le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI), d’une importance cruciale pour la sécurité euro‑atlantique. Les Alliés continuent dès lors d’appeler la Russie à préserver la viabilité du Traité FNI en assurant un respect total et vérifiable de ce traité.

63.       Nous restons profondément préoccupés par la prolifération des armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive et de leurs vecteurs, qui est le fait d’acteurs étatiques ou non étatiques et continue de faire peser une menace sur les populations, le territoire et les forces de nos pays. Faire face aux graves défis liés à la prolifération demeure une priorité urgente au niveau international.

64.       Les Alliés soulignent leur ferme attachement à la pleine application du Traité sur la non‑prolifération des armes nucléaires (TNP). L’Alliance réaffirme sa détermination à tendre vers un monde plus sûr pour tous et à créer les conditions d’un monde sans armes nucléaires, de façon pleinement conforme à toutes les dispositions du TNP, y compris l’article VI, par étapes, et d’une manière vérifiable, qui favorise la stabilité internationale et se fonde sur le principe d’une sécurité non diminuée pour tous. Les Alliés réitèrent leur attachement à l’accomplissement de progrès dans la réalisation des buts et objectifs du TNP, au titre de ses trois piliers, qui se renforcent mutuellement : désarmement nucléaire, non‑prolifération et utilisations de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques.

65.       Après la fin de la Guerre froide, l’OTAN a radicalement réduit le nombre d’armes nucléaires stationnées en Europe, ainsi que la dépendance à l’égard des armes nucléaires dans sa stratégie. Nous restons déterminés à contribuer à créer les conditions pour de nouvelles réductions sur la base de la réciprocité, sachant que les progrès en matière de maîtrise des armements et de désarmement doivent tenir compte de l’environnement de sécurité international du moment. Nous regrettons que les conditions actuelles ne soient pas favorables à la concrétisation du désarmement.

66.       Nous appelons tous les États à s’engager à combattre de manière efficace la prolifération des ADM, au travers de l’universalisation de la Convention sur les armes chimiques, de la Convention sur les armes biologiques ou à toxines, et du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, par la négociation du traité interdisant la production de matières fissiles pour les armes nucléaires, ainsi que dans le cadre de l’initiative de sécurité contre la prolifération. L’utilisation persistante d’armes chimiques en Iraq et en Syrie, que nous condamnons, souligne encore le caractère évolutif et croissant de la menace ADM qui pèse sur l’Alliance.

67.       Nous sommes profondément préoccupés par les provocations qui continuent de caractériser le comportement de la République populaire démocratique de Corée (RPDC), et nous condamnons fermement l’essai nucléaire auquel a procédé la RPDC le 6 janvier 2016, le tir effectué le 7 février 2016 à l’aide de technologies de missiles balistiques, et les multiples essais de missiles balistiques effectués depuis lors. Nous demandons instamment l’application rigoureuse de la résolution 2270 et des autres résolutions pertinentes du Conseil de sécurité de l’ONU. Nous appelons Pyongyang à cesser immédiatement et à abandonner toutes les activités en cours dans les domaines du nucléaire et des missiles balistiques, de façon complète, vérifiable et irréversible, et à reprendre des pourparlers internationaux.

68.       Nous saluons la conclusion du Plan d’action global commun (JCPOA) des E3/UE+3 et de l’Iran, signé le 14 juillet 2015, ainsi que sa mise en œuvre, en cours depuis le 16 janvier 2016. Nous soulignons en outre l’importance d’une coopération totale de l’Iran, en temps voulu, avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) s’agissant de la mise en œuvre du JCPOA. Cependant, nous restons vivement préoccupés par l’évolution du programme balistique iranien et par la poursuite des essais de missiles, qui ne sont pas conformes à la résolution 2231 du Conseil de sécurité de l’ONU.

69.       Nous restons attachés à la maîtrise des armements conventionnels, élément clé de la sécurité euro‑atlantique. La mise en œuvre intégrale et le respect total des engagements pris dans ce cadre sont essentiels pour restaurer la confiance au sein de la région euro‑atlantique. Les activités militaires unilatérales de la Russie en Ukraine et alentour continuent de porter atteinte à la paix, à la sécurité et à la stabilité dans toute la région, et l’application sélective que fait la Russie du Document de Vienne et du Traité Ciel ouvert ainsi que la non‑application prolongée du Traité sur les forces conventionnelles en Europe affaiblissent les contributions positives apportées par ces instruments de maîtrise des armements. Les Alliés appellent la Russie à respecter pleinement ses engagements. Ils sont résolus à préserver, à renforcer et à moderniser la maîtrise des armements conventionnels en Europe, sur la base de principes et d’engagements clés, y compris en ce qui concerne la réciprocité, la transparence et le consentement du pays hôte. Nous soulignons l’importance d’une modernisation du Document de Vienne, notamment au travers d’une actualisation de fond en 2016, pour lui permettre de conserver toute sa pertinence dans un environnement de sécurité en mutation.

70.       Les cyberattaques représentent un réel défi pour la sécurité de l’Alliance, et elles pourraient avoir sur les sociétés modernes un effet tout aussi dommageable que celui d’une attaque conventionnelle. Au pays de Galles, nous avons décidé que la cyberdéfense relevait de la tâche fondamentale de l’OTAN qu’est la défense collective. Aujourd’hui, à Varsovie, nous réaffirmons le mandat défensif de l’OTAN, et nous reconnaissons le cyberespace en tant que domaine d’opérations dans lequel l’OTAN doit se défendre aussi efficacement qu’elle le fait dans les airs, sur terre et en mer. L’OTAN sera ainsi mieux à même d’assurer une protection et de mener des opérations dans tous ces domaines, ainsi que de préserver notre liberté d’action et de décision, en toute circonstance. Cela viendra à l’appui du cadre plus large de la dissuasion et de la défense de l’OTAN : la cyberdéfense continuera d’être intégrée dans la planification opérationnelle et dans les opérations et missions de l’Alliance, et nous travaillerons ensemble pour contribuer à leur succès. En outre, cela permettra une organisation plus efficace de la cyberdéfense de l’OTAN et une meilleure gestion des ressources, des compétences et des capacités. Cela s’inscrit dans le cadre de l’adaptation à long terme de l’OTAN. Nous continuons de mettre en œuvre la politique de cyberdéfense renforcée de l’OTAN et de consolider les capacités de cyberdéfense de l’Organisation, en tirant parti des toutes dernières technologies de pointe. Nous réaffirmons notre détermination à agir dans le respect du droit international applicable, y compris la Charte des Nations Unies, le droit international humanitaire et les droits de l’homme. Nous continuerons de respecter le principe de retenue et de contribuer à préserver la paix, la sécurité et la stabilité internationales dans le cyberespace. Nous nous félicitons des travaux sur des normes internationales volontaires de comportement responsable des États et sur des mesures de confiance pour ce qui est du cyberespace.

71.       Nous ferons en sorte que les Alliés soient équipés pour le XXIe siècle et répondent aux besoins y correspondant. Aujourd’hui, par notre engagement en faveur de la cyberdéfense, nous nous sommes engagés à faire de l’amélioration des moyens de cyberdéfense de nos infrastructures et réseaux nationaux une priorité. Chacun des Alliés assumera la responsabilité qui est la sienne d’améliorer sa résilience et son aptitude à répondre rapidement et efficacement aux cyberattaques, notamment dans des contextes hybrides. Conjugué à l’adaptation continue des capacités de cyberdéfense de l’OTAN, cet engagement renforcera la cyberdéfense de l’Alliance. Nous travaillons à accroître les capacités et le périmètre du cyberpolygone OTAN, qui permet aux Alliés d’acquérir des compétences, d’améliorer leur expertise et d’échanger leurs meilleures pratiques. Nous restons attachés à une coopération bilatérale et multilatérale étroite dans le domaine de la cyberdéfense, y compris pour ce qui est du partage de l’information et de la connaissance de la situation, ainsi que des formations, des entraînements et des exercices. Les partenariats forts jouent un rôle essentiel s’agissant de faire face efficacement aux défis dans le cyberespace. Nous continuerons d’approfondir la coopération avec l’UE, comme convenu, notamment en poursuivant la mise en œuvre de l’arrangement technique, qui aide à mieux prévenir les cyberattaques et à mieux y répondre. Nous améliorerons encore nos partenariats avec d’autres organisations internationales, avec les pays partenaires, ainsi qu’avec l’industrie et le monde universitaire dans le cadre du cyberpartenariat OTAN‑industrie.

72.       Nous avons pris des mesures pour faire en sorte de pouvoir répondre efficacement aux défis que représentent les pratiques de guerre hybride, dans le cadre desquelles des acteurs étatiques ou non étatiques, pour atteindre leurs objectifs, mettent en œuvre, selon un schéma fortement intégré, une combinaison vaste, complexe et adaptative de moyens conventionnels et non conventionnels, ainsi que de mesures militaires, paramilitaires ou civiles, dissimulées ou non. Face à ce défi, nous avons adopté une stratégie et des plans de mise en œuvre directement exploitables sur le rôle de l’OTAN dans la lutte contre les pratiques de guerre hybride. La responsabilité de répondre à des attaques hybrides ou à des menaces de ce type incombe au premier chef au pays pris pour cible. L’OTAN est prête à aider un Allié à n’importe quelle étape d’une campagne hybride. L’Alliance et les Alliés seront prêts à lutter contre les pratiques de guerre hybride dans le cadre de la défense collective. Le Conseil pourrait décider d’invoquer l’article 5 du traité de Washington. L’Alliance est déterminée à assurer une coopération et une coordination efficaces avec les partenaires et les organisations internationales compétentes, en particulier l’UE, comme convenu, dans la lutte contre les pratiques de guerre hybride.

73.       Aujourd’hui, nous avons pris l’engagement de continuer à améliorer notre résilience et à maintenir et développer encore notre capacité, individuelle et collective, de résister à toute forme d’attaque armée. La préparation du secteur civil est un pilier central de la résilience des Alliés, et elle joue un rôle critique dans la défense collective de l’Alliance. Même si ce volet reste du ressort des pays, l’OTAN peut aider les Alliés à évaluer et, sur demande, à améliorer la préparation de leur secteur civil. Nous améliorerons la préparation du secteur civil en répondant aux exigences de base de l’OTAN pour la résilience des pays, qui sont axées sur la continuité des pouvoirs publics, la continuité des services essentiels, la sécurité des infrastructures civiles critiques, ainsi que l’aptitude à soutenir les forces militaires avec des moyens civils. Dans ce contexte, nous nous félicitons des directives en matière de résilience approuvées par les ministres de la Défense en juin 2016.

74.       Nous ferons en sorte que l’OTAN reste préparée, tant sur le plan stratégique que sur le plan opératif, au travers de politiques, de plans et de capacités, à contrer un large éventail de menaces chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires (CBRN), qu’elles soient le fait d’États ou d’acteurs non‑étatiques, sur la base de la politique globale de l’OTAN, au niveau stratégique, pour la prévention de la prolifération des ADM et la défense contre les menaces CBRN, que nous avons entérinée en 2009, et nous attendons avec intérêt le rapport sur la suite de sa mise en œuvre qui nous sera soumis à notre prochain sommet.

75.       À Chicago, en 2012, nous avons lancé l’initiative sur le renseignement, la surveillance et la reconnaissance interarmées (JISR). Le JISR est une catégorie capacitaire de grande valeur, complexe, et de vaste portée. Dans le prolongement de nos engagements, nous nous félicitons de la déclaration, en février 2016, de la capacité opérationnelle initiale JISR, axée sur l’amélioration de la connaissance de la situation au sein de la Force de réaction de l’OTAN, par une maîtrise accrue des opérations de collecte et d’échange d’informations et de renseignement. Les Alliés comptent par ailleurs travailler ensemble pour promouvoir le partage du renseignement, comme il conviendra, au moyen des plateformes et des réseaux de l’OTAN et par une utilisation optimale des plateformes et des réseaux multilatéraux afin de renforcer l’ensemble des activités JISR, y compris, mais sans s’y limiter, le projet de défense intelligente dans ce domaine.

76.       Pour la suite, nous allons pérenniser les résultats obtenus et fournir les capacités JISR nécessaires à l’appui des rotations futures de la Force de réaction de l’OTAN. Nous allons également élargir la portée de notre initiative JISR, en utilisant le plus efficacement possible les contributions JISR complémentaires des Alliés pour renforcer tant notre capacité d’anticipation stratégique que notre connaissance de la situation stratégique. C’est dans ce contexte que nous prenons note également des progrès significatifs accomplis concernant la capacité alliée de surveillance terrestre (AGS). Cette capacité, qui, conformément aux prévisions, deviendra opérationnelle en 2017, sera complétée dans certains cas par les contributions en nature apportées par des Alliés.

77.       La Force aéroportée de détection lointaine et de contrôle de l’OTAN (AWACS) continue de se montrer utile non seulement à la surveillance de notre espace aérien, mais aussi en tant que composante essentielle des capacités de commandement et de contrôle de l’OTAN. La modernisation des AWACS de l’OTAN se poursuivra, et ils resteront en service jusqu’en 2035. D’ici là, l’Alliance devra s’être dotée de la capacité qui succédera aux AWACS E‑3. Sur la base de besoins militaires de haut niveau, nous avons décidé d’entamer collectivement le processus de définition des options possibles pour les futures capacités de surveillance et de contrôle de l’OTAN.

78.       Les initiatives multinationales et nationales apportent une contribution importante au développement des capacités et au renforcement de notre posture. L’OTAN continuera de coopérer étroitement avec l’UE, comme convenu, pour faire en sorte que notre initiative de défense intelligente et l’initiative UE de mutualisation et de partage soient complémentaires et se renforcent mutuellement, et pour soutenir le développement capacitaire et l’interopérabilité afin d’éviter les doubles emplois inutiles et de maximiser le rapport coût‑efficacité. Au sommet du pays de Galles, six Alliés ont lancé un projet multinational, dirigé par le Danemark, en vue de répondre à leurs besoins en munitions air‑sol à guidage de précision. Nous saluons les progrès accomplis depuis lors au sein de ce groupe, y compris son élargissement à deux autres Alliés et sa première acquisition multinationale au moyen de l’initiative d’acquisition des États‑Unis pour les pays chefs de file. Nous nous félicitons des progrès accomplis dans la mise en œuvre du concept OTAN de pays‑cadre. Un groupe de 16 Alliés travaille actuellement, sous la conduite de l’Allemagne, à la constitution de formations de plus grande ampleur afin de produire des forces et des capacités employables. Un autre groupe, composé de six pays, élabore, sous la conduite de l’Italie, des programmes et des activités visant à soutenir les engagements opérationnels de l’Alliance. Nous saluons l’Initiative de réassurance pour l’Europe lancée par les États‑Unis, avec notamment la brigade blindée, fonctionnant par rotation, et les stocks prépositionnés de l’armée de terre des États‑Unis. Nous nous félicitons de l’initiative transatlantique de formation et de renforcement capacitaire (TACET), qui favorisera le développement des capacités, l’interopérabilité et la formation, et qui améliorera la résilience de l’OTAN en réponse aux défis dans la région de la Baltique. Nous nous félicitons également de l’initiative d’entraînement interarmées multinational renforcé (CJET), qui prévoit des activités du même type avec la Roumanie et la Bulgarie. Nous saluons les progrès accomplis en ce qui concerne l’établissement de la force expéditionnaire interarmées dirigée par le Royaume‑Uni, composée de forces intégrées, souples et à haut niveau de préparation provenant de sept Alliés. Nous saluons également la validation, au travers d’un exercice mené en 2016, de la force expéditionnaire interarmées multinationale mise sur pied par le Royaume‑Uni et la France, qui renforcera l’aptitude de l’Alliance à répondre à tout défi avec rapidité. Nous nous félicitons de la décision du groupe de Visegrad d’assurer une présence par rotation dans les États baltes en 2017 afin d’y mener des exercices à l’appui des activités des Alliés. Nous nous félicitons en outre de la lettre d’intention sur une coopération multinationale pour la mise en place de moyens aériens d’attaque électronique. Nous saluons par ailleurs les efforts qu’ont entrepris les Alliés pour traiter, comme il convient, la question des dépendances qui existent à l’égard des anciens équipements militaires d’origine russe.

79.       Pour que l’Alliance soit en mesure de faire face à des menaces en constante évolution, la réforme du renseignement à l’OTAN doit être un processus continu et dynamique. L’importance du renseignement s’agissant d’éclairer notre planification, la conduite de nos opérations et notre prise de décision ne cesse de croître. Afin que l’OTAN soit mieux à même de puiser dans une vaste gamme de ressources de renseignement, nous avons décidé de créer une division civilo‑militaire Renseignement et sécurité, avec, à sa tête, un secrétaire général adjoint pour le renseignement et la sécurité. Celui‑ci dirigera les activités de l’OTAN en matière de renseignement et de sécurité, et veillera à mieux tirer parti des ressources existantes et du personnel en place, tout en optimisant l’exploitation du renseignement fourni par les Alliés.

80.       Face à un environnement de sécurité mondial de plus en plus instable, et sur la base d’une posture de dissuasion et de défense large et renforcée, nous nous employons à contribuer davantage à l’action de la communauté internationale visant à projeter la stabilité et à renforcer la sécurité hors de notre territoire, contribuant ainsi à la sécurité générale de l’Alliance.

81.       Notre action visant à renforcer le rôle de l’Alliance dans la projection de la stabilité sera guidée par les principes immuables que sont, notamment, l’approche à 360 degrés, l’attachement à la démocratie, aux droits de l’homme et à l’état de droit, la complémentarité avec des acteurs internationaux, en particulier l’ONU, l’Union européenne et l’OSCE, et axée sur la valeur ajoutée de l’OTAN, l’appropriation et l’adhésion au niveau local, l’association des partenaires, l’inclusivité, la coopération sur mesure, l’engagement à long terme, la priorisation et la soutenabilité, ainsi que la cohérence globale.

82.       L’Alliance répond déjà à ces défis et continuera de le faire, en faisant appel à son expérience reconnue et à sa gamme d’outils de gestion de crise et de sécurité coopérative. L’OTAN apporte une valeur ajoutée à l’action de la communauté internationale, notamment en ce qu’elle est à même de proposer une assistance et des avis pour la réforme de la défense de manière cohérente et en ce qu’elle possède un savoir‑faire reconnu en matière d’entraînement et de développement de forces locales, y compris dans des conditions difficiles, ainsi qu’en matière de formation à la défense. L’initiative de renforcement des capacités de défense et des capacités de sécurité s’y rapportant (DCB), que nous avons adoptée au pays de Galles, s’est révélée être un outil particulièrement important pour aider à projeter la stabilité, et elle a permis de fournir un soutien à la Géorgie, à l’Iraq, à la Jordanie et à la République de Moldova. Nous sommes déterminés à continuer d’œuvrer au renforcement des capacités et à y consacrer des ressources adéquates.

83.       Tout en conservant son aptitude à répondre aux crises au‑delà de nos frontières, l’OTAN continuera de promouvoir la sécurité coopérative au travers du partenariat avec les pays concernés et avec d’autres organisations internationales, ainsi que d’investir dans des activités de renforcement des capacités et de formation qui permettent aux pays de renforcer leur résilience et d’assurer leur sécurité.

84.       L’OTAN continuera de renforcer son rôle pour ce qui est de projeter la stabilité, notamment en améliorant la compréhension régionale et la connaissance de la situation, en continuant de s’adapter aux défis et aux menaces, d’où qu’ils viennent, en renforçant sa dimension maritime, et en développant une approche plus stratégique, plus cohérente et plus efficace des partenariats. Il s’agira de tirer parti des contributions importantes que les partenaires peuvent apporter à ces activités. L’Alliance, avec les partenaires s’il y a lieu, continuera d’aider à faire face aux défis – avant, pendant ou après un conflit – dès lors que ceux‑ci portent atteinte à sa sécurité. La mise en œuvre des politiques et des initiatives agréées de l’Alliance doit également se poursuivre. Parallèlement, nous continuerons d’examiner les incidences politiques de notre action.

85.       Nous sommes confrontés à des défis à long terme, et nous sommes déterminés à faire en sorte que l’OTAN suive une approche à long terme et pérenne pour projeter la stabilité à l’aide de ressources et de structures adéquates et durables, en faisant un usage optimal des mécanismes de financement existants. Nous chargeons le Conseil d’évaluer les progrès accomplis dans la mise en œuvre de notre action visant à projeter la stabilité, notamment dans les domaines spécifiques proposés par les ministres des Affaires étrangères en mai 2016, en montrant comment rendre cette action durable et comment mieux l’organiser et la soutenir, et d’établir un rapport pour la réunion des ministres des Affaires étrangères de décembre 2016.

86.       Dans une déclaration distincte publiée aujourd’hui, conjointement avec l’Afghanistan et nos partenaires d’opération de la mission Resolute Support, nous avons réaffirmé notre engagement mutuel à garantir la sécurité et la stabilité à long terme en Afghanistan. L’OTAN et ses partenaires d’opération se sont engagés à maintenir la mission Resolute Support au‑delà de 2016 au travers d’un modèle régional souple, afin de continuer d’offrir formation, conseil et assistance aux institutions et aux forces de sécurité afghanes, à continuer de fournir des contributions nationales pour le soutien financier dans la durée des forces de défense et de sécurité nationales afghanes, et ce jusqu’à la fin 2020, et à renforcer et à améliorer le partenariat durable à long terme. L’Afghanistan a pris un ensemble d’engagements significatifs. L’OTAN et ses partenaires d’opération continueront de jouer un important rôle de soutien dans leur concrétisation.

87.       Notre objectif, tout comme celui du reste de la communauté internationale, demeure un Afghanistan qui ne redevienne jamais un sanctuaire pour les terroristes, ni une menace pour notre sécurité, et un Afghanistan capable d’assumer sa sécurité, sa gouvernance, et son développement économique et social, tout en assurant, pour l’ensemble de ses citoyens, le respect des droits de l’homme, et notamment des droits des femmes et des enfants. Nous demeurons résolus et unis dans notre engagement en faveur d’un Afghanistan sûr et stable.

88.       Des relations de bon voisinage, et une coopération et un soutien régionaux en faveur d’un Afghanistan sûr et stable, demeurent essentiels. La voie à suivre pour un règlement durable du conflit est celle d’un processus de paix et de réconciliation inclusif, dirigé et pris en charge par les Afghans, qui respecte la Constitution afghane et les droits de l’homme, y compris, notamment, les droits des femmes. La région et la communauté internationale dans son ensemble doivent respecter et soutenir un tel processus et son résultat.

89.       Conformément à la résolution 1244 du Conseil de sécurité de l’ONU, la Force pour le Kosovo dirigée par l’OTAN (KFOR) continuera de contribuer à un environnement sûr et sécurisé et à la liberté de circulation au Kosovo, en coopération étroite avec les autorités du Kosovo et l’Union européenne. Alors que nous nous félicitions des progrès accomplis grâce au dialogue entre Belgrade et Pristina facilité par l’Union européenne, les conditions de sécurité au Kosovo restent relativement stables, même si des défis subsistent. Les changements apportés à la présence de nos troupes resteront soumis au respect de conditions et non d’un calendrier. Par ailleurs, l’Alliance continuera d’appuyer le développement des organisations de sécurité au Kosovo, y compris par l’intermédiaire de l’équipe de conseillers de l’OTAN sur le terrain et en conformité avec les décisions des Alliés, et elle gardera à l’examen la question de la nature d’un soutien complémentaire. Nous prenons note de la demande du Kosovo, qui voudrait renforcer ses relations avec l’OTAN, et nous lui apporterons, au plus tard à la réunion des ministres des Affaires étrangères de décembre, une réponse sur les possibilités de développer plus avant notre soutien.

90.       L’OTAN a apporté une contribution importante à l’action internationale de lutte contre la piraterie au large des côtes de la Somalie, au travers de l’opération Ocean Shield, qui a atteint ses objectifs militaires stratégiques. Nous constatons que le dernier acte de piraterie réussi dans l’océan Indien remonte à mai 2012. Bien que nous ayons décidé de mettre un terme à l’opération fin 2016, l’OTAN restera engagée dans la lutte contre la piraterie, en maintenant sa connaissance de la situation maritime et en continuant d’entretenir des liens étroits avec d’autres acteurs de la lutte internationale contre la piraterie.

91.       Nous avons transformé Active Endeavour, l’opération maritime que nous menons en Méditerranée au titre de l’article 5 et qui a contribué à la lutte contre le terrorisme, en une opération de sûreté maritime ne relevant pas de l’article 5, l’opération Sea Guardian, à même d’accomplir l’ensemble des tâches propres aux opérations maritimes, selon les besoins.

92.       À la suite des décisions adoptées en février 2016 par nos ministres de la Défense, les pays de l’Alliance ont rapidement contribué, par la mise à disposition de moyens maritimes, aux efforts déployés à l’échelon international pour endiguer les flux migratoires irréguliers en mer Égée, dans le contexte de la crise des réfugiés et des migrants. L’action de l’OTAN apporte une valeur ajoutée en ce qu’elle permet de fournir à la Turquie, à la Grèce ainsi qu’à Frontex, l’Agence européenne pour la gestion des frontières, des informations en temps réel sur les flux migratoires irréguliers. Cette activité est menée en coopération avec les autorités nationales concernées et par l’établissement de liens directs entre le Commandement maritime allié et Frontex au niveau opératif. Il s’agit d’une contribution efficace aux efforts existants qui visent la maîtrise de la migration irrégulière dans la région, et elle offre également de nouvelles possibilités de coopération renforcée avec l’Union européenne sur les plans tactique et opératif dans le contexte de l’action visant à endiguer la migration irrégulière. Cette activité sera évaluée en septembre et réexaminée à temps pour la réunion de nos ministres de la Défense en octobre.

93.       Nous avons donné notre accord de principe à un éventuel rôle pour l’OTAN en Méditerranée centrale afin de venir compléter et/ou, sur demande de l’Union européenne, soutenir, comme il conviendra, l’opération Sophia de l’Union européenne par la mise à disposition d’un ensemble de capacités, y compris de renseignement, de surveillance et de reconnaissance, et par la fourniture d’un soutien logistique ; par une contribution au développement des capacités des gardes‑côtes et de la marine de la Libye, si les autorités libyennes légitimes et/ou l’UE en font la demande ; et, dans le contexte de la mise en œuvre de la résolution 2292 du Conseil de sécurité de l’ONU sur la situation en Libye, en étroite coordination avec l’UE.

94.       Nous réaffirmons notre attachement à un partenariat à long terme avec l’Iraq ainsi que notre volonté d’aider le pays au travers de l’initiative de renforcement des capacités de défense et des capacités de sécurité s’y rapportant (DCB), approuvée au pays de Galles. Nous sommes déterminés à renforcer les forces et les institutions de défense iraquiennes au travers des mesures d’assistance en matière de renforcement des capacités de défense agréées en août 2015, à la demande de l’Iraq. Nous avons progressé dans la mise en œuvre du paquet DCB sur mesure pour l’Iraq, comme convenu, en profitant de la disponibilité du Centre des opérations spéciales Roi Abdallah II en Jordanie et des centres de formation et d’entraînement en Turquie.

95.       Dans le cadre des activités DCB actuellement mises en œuvre en Jordanie, lesquelles comprennent la lutte contre les engins explosifs improvisés, la neutralisation des explosifs et munitions et le déminage, ainsi que la planification civilo‑militaire et les conseils concernant la réforme du secteur de la sécurité en Iraq, l’OTAN dispense des formations aux Iraquiens dans certains domaines. Nous appuyant sur ces activités, nous avons décidé de répondre favorablement à la demande adressée le 5 mai 2016 par le premier ministre iraquien, et nous sommes d’accord pour dispenser sur place, dans les domaines agréés, des formations OTAN aux forces militaires et de sécurité iraquiennes, et notamment pour continuer, dans le cadre du programme DCB, de soutenir le renforcement des capacités institutionnelles, afin de contribuer à des structures et des politiques efficaces et efficientes, permettant d’assurer, sur le moyen et le long terme, le développement de la capacité de formation de l’Iraq. Cette activité de l’OTAN en Iraq continuera d’être menée de telle manière que soient garanties complémentarité et valeur ajoutée, inclusivité, appropriation au niveau local, soutenabilité et priorisation, cohérence globale et coopération sur mesure. Il sera d’une importance primordiale que le gouvernement iraquien et les forces de sécurité et de défense du pays restent inclusifs. Il conviendrait que la planification initiale pour la conduite de ces activités dans le pays soit achevée à temps pour que les ministres de la Défense puissent l’examiner en octobre, de sorte que les formations et le développement des capacités puissent commencer en Iraq en janvier 2017.

96.       Conscients de la menace que l’EIIL/Daech fait peser sur nos pays et nos populations, nous avons donné notre accord de principe pour renforcer la contribution de l’Alliance à l’action de la coalition mondiale contre l’EIIL par un soutien direct des AWACS de l’OTAN, afin que la coalition ait une meilleure connaissance de la situation. Il est prévu que ce soutien commence à l’automne, sous réserve d’approbation selon les procédures nationales, et les autorités militaires de l’OTAN en élaborent actuellement les modalités. En apportant un tel soutien, nous réaffirmons notre détermination à contribuer à relever les défis de sécurité émanant du sud, dont le terrorisme. Cette contribution à la coalition mondiale ne fait pas de l’OTAN un membre de cette coalition.

97.       Conformément à la décision que nous avons prise au pays de Galles, nous sommes disposés à fournir des conseils à la Libye dans le domaine de la mise en place d’institutions de défense et de sécurité, à la demande du gouvernement d’entente nationale, et à instaurer un partenariat de longue durée, qui pourrait donner lieu à une participation de ce pays au Dialogue méditerranéen, lequel constituerait un cadre naturel pour notre coopération. Toute aide de l’OTAN à la Libye serait fournie en totale complémentarité et en étroite coordination avec d’autres actions internationales, dont celles de l’ONU et de l’UE, conformément aux décisions qui ont été prises. L’appropriation par la Libye sera essentielle.

98.       Les partenariats de l’OTAN sont, et resteront, essentiels au fonctionnement de l’OTAN. Le succès des partenariats de l’OTAN est démontré par leur contribution stratégique à la sécurité de l’Alliance et à la sécurité internationale. Au cours des dernières décennies, l’Alliance a mis en place des partenariats structurés – le Partenariat pour la paix, le Dialogue méditerranéen, l’Initiative de coopération d’Istanbul, et les relations avec les partenaires dans le monde – avec des pays intéressés par l’établissement d’un dialogue politique et d’une coopération pratique, et elle a collaboré activement avec d’autres organisations et acteurs internationaux sur un vaste éventail de questions politiques et de sécurité. Ensemble, nous avons mis sur pied un large réseau de sécurité coopérative. La complexité et l’instabilité de l’environnement de sécurité soulignent la nécessité d’une approche plus adaptée, plus individualisée et plus souple afin de rendre notre coopération partenariale plus stratégique, plus cohérente et plus efficace. Nous réaffirmons notre détermination, sur la base des objectifs, des priorités et des principes de la politique de partenariat de Berlin, à élargir le dialogue politique et la coopération pratique à tout pays qui partage les valeurs de l’Alliance et notre intérêt pour la paix et la sécurité au niveau international. Nous développerons plus avant nos partenariats de sorte qu’ils continuent de répondre aux intérêts tant des Alliés que des partenaires.

99.       Nous saluons les contributions substantielles que nos partenaires continuent d’apporter  en se déployant avec les Alliés dans le cadre d’opérations et de missions, et en contribuant aux activités de coopération pratique, y compris aux fonds d’affectation spéciale et aux activités de renforcement des capacités. Des partenaires servent également aux côtés des forces armées de plusieurs Alliés hors des cadres existants, en particulier pour combattre le terrorisme. Cela a permis d’accroître notre interopérabilité et de renforcer la résilience dans un environnement de sécurité qui a changé.

100.    Au pays de Galles, nous avons entériné l’initiative pour l’interopérabilité avec les partenaires, lancé la plateforme d’interopérabilité, qui est devenue une configuration essentielle pour la collaboration avec les partenaires sur un large éventail de questions liées à l’interopérabilité et à la préparation à la gestion de crises futures. Depuis lors, le nombre d’unités de pays partenaires certifiées et évaluées aux normes de l’OTAN a augmenté, de nouveaux partenaires ont rejoint les programmes d’interopérabilité, et les possibilités de participation des partenaires à des exercices de l’OTAN ont été élargies. Ici, à Varsovie, les ministres de la Défense des pays de la plateforme d’interopérabilité ont entériné une feuille de route qui guidera nos travaux conjoints sur la préparation à la gestion de crise au cours de l’année à venir, et ils ont examiné les futures possibilités de coopération entre l’OTAN et ses partenaires en matière de projection de la stabilité.

101.    Dans le cadre de l’initiative pour l’interopérabilité avec les partenaires, nous avons également décidé, au pays de Galles, de proposer à l’Australie, à la Finlande, à la Géorgie, à la Jordanie et à la Suède de nouvelles opportunités de coopération, en reconnaissance de leurs contributions significatives aux opérations de l’OTAN. Ces partenaires sont de plus en plus associés aux travaux de l’OTAN portant sur nos défis de sécurité communs. Leur participation au présent sommet témoigne de la profondeur des liens que nous avons tissés avec eux. Nous traitons avec chacun d’eux individuellement, en fonction des besoins, des circonstances et des ambitions qui sont les nôtres et qui sont les leurs, et selon les intérêts de sécurité propres à l’OTAN. Nous avons développé notre coopération pratique à des degrés divers et dans des configurations différentes : les  partenaires « nouvelles opportunités » (EOP) ont désormais obtenu une approbation préalable pour une série d’exercices de l’OTAN, ils sont également associés aux travaux sur le renforcement des capacités de défense de l’OTAN, participent à la Force de réaction de l’OTAN renforcée et établissent avec nous les évaluations conjointes de la menace. Nous sommes prêts à envisager de proposer de nouvelles opportunités à d’autres partenaires en fonction de leurs contributions et de leur intérêt.

102.    Nous nous félicitons de l’ouverture, par plusieurs de nos partenaires, de missions diplomatiques au siège de l’OTAN, une étape importante dans notre coopération. Conformément à notre politique de partenariat de Berlin et à l’Accord de Bruxelles, nous encourageons d’autres partenaires à suivre la même voie.

103.    Nous continuerons de développer notre partenariat avec des pays de la région du Moyen‑Orient et de l’Afrique du Nord au travers de l’approfondissement du dialogue politique et du renforcement de la coopération pratique. Le Dialogue méditerranéen (DM) et l’Initiative de coopération d’Istanbul (ICI) demeurent des cadres de partenariat complémentaires mais néanmoins distincts. Nous restons prêts à accueillir d’autres pays au sein de ces deux cadres de partenariat. Nous apportons à 11 pays partenaires de la région une aide à la modernisation de leurs institutions de défense et de leurs forces militaires, dans le cadre du Dialogue méditerranéen et de l’Initiative de coopération d’Istanbul.

104.    Le DM et l’ICI sont des cadres bien spécifiques qui réunissent des partenaires clés de l’OTAN, à savoir : l’Algérie, l’Égypte, Israël, la Jordanie, la Mauritanie, le Maroc et la Tunisie, d’une part, et Bahreïn, le Koweït, le Qatar et les Émirats arabes unis, d’autre part. Les consultations politiques menées régulièrement améliorent notre compréhension mutuelle et notre connaissance de la situation. Nous avons également établi des programmes individuels de partenariat et de coopération sur mesure avec l’ensemble de nos partenaires du DM et de l’ICI. Nous continuerons de renforcer la coopération pratique, y compris par un soutien accru dans les domaines de la lutte contre le terrorisme, des armes légères et de petit calibre, de la lutte contre les engins explosifs improvisés et de la protection militaire des frontières.

105.    Compte tenu de l’importance stratégique de la région du Golfe, nous nous réjouissons à la perspective de l’établissement de relations de travail régulières entre les secrétariats internationaux de l’OTAN et du Conseil de coopération du Golfe (CCG), et du lancement de la coopération pratique avec le CCG ainsi qu’avec ses États membres. L’intensification des échanges d’informations en vue de favoriser une meilleure compréhension mutuelle de nos fonctions et de nos orientations générales serait une base solide pour un dialogue politique plus régulier et une éventuelle coopération pratique concernant les défis de sécurité communs. Nous chargeons le Conseil de faire le point, à la réunion de décembre des ministres des Affaires étrangères, sur les progrès accomplis.

106.    Nous nous félicitons du partenariat à long terme avec la Jordanie, partenaire clé au Moyen‑Orient, ainsi que des bons résultats de l’aide apportée par l’OTAN, dans le cadre de l’initiative DCB, à ce pays. Nos activités portent sur sept domaines prioritaires : protection de l’information, cyberdéfense, exercices militaires, lutte contre les engins explosifs improvisés, communication, commandement et contrôle, protection portuaire, et sécurité des frontières. Nous restons attachés à la consolidation des relations entre l’OTAN et la Jordanie au travers d’un renforcement du dialogue politique et de la coopération pratique dans le cadre du Dialogue méditerranéen, de même qu’au travers de l’initiative de renforcement des capacités de défense et des capacités de sécurité s’y rapportant et de la plateforme d’interopérabilité, notamment du programme « nouvelles opportunités ». Nous exprimons notre gratitude à la Jordanie, partenaire qui contribue depuis de nombreuses années aux opérations dirigées par l’OTAN, et qui accueille nos activités de formation DCB pour l’Iraq.

107.    Les Balkans occidentaux sont une région d’importance stratégique, comme en attestent la coopération et les opérations que nous y menons de longue date. Nous restons pleinement engagés en faveur de la stabilité et de la sécurité des Balkans occidentaux, et déterminés à soutenir les aspirations euro‑atlantiques des pays de la région. Les valeurs démocratiques, l’état de droit, les réformes internes et les relations de bon voisinage sont essentiels à la coopération régionale et au processus d’intégration euro‑atlantique. Nous saluons les progrès accomplis récemment sur la démarcation de la frontière dans la région. L’Alliance continuera de travailler étroitement avec les Balkans occidentaux afin de préserver et de promouvoir la paix et la sécurité aux niveaux régional et international. Nous chargeons le Conseil d’établir un rapport sur les activités et les relations de l’OTAN dans la région, à soumettre aux ministres des Affaires étrangères en décembre.

108.    Le renforcement des relations entre l’OTAN et la Serbie est bénéfique pour l’Alliance, pour la Serbie, et pour l’ensemble de la région. Nous nous félicitons des progrès qui continuent d’être réalisés s’agissant de bâtir le partenariat OTAN‑Serbie et soutenons la poursuite du dialogue politique et de la coopération pratique à cet effet. Nous nous félicitons également des progrès accomplis dans le dialogue Belgrade‑Pristina facilité par l’Union européenne, et encourageons les deux parties à mettre en œuvre les accords conclus et à poursuivre la réalisation de progrès constants. Nous nous félicitons en outre des aspirations du Kosovo, qui souhaite améliorer son aptitude à assurer la sûreté et la sécurité de tous ses citoyens, et aussi contribuer à la sécurité dans les Balkans occidentaux.

109.    L’invitation à adhérer à notre Alliance adressée au Monténégro en décembre 2015, et la signature du protocole d’accession qui a suivi, en mai 2016, marquent la reconnaissance des réformes que ce pays a entreprises, de l’attachement dont il fait preuve à l’égard de nos valeurs communes, et de sa contribution à la sécurité internationale. Le Monténégro, qui jouit désormais du statut de pays invité, s’intègre aux activités de l’OTAN. Nous nous réjouissons à la perspective de voir la ratification du protocole d’accession menée à bien rapidement, et de voir le Monténégro continuer d’avancer dans la réforme, avant comme après son adhésion, afin de renforcer sa contribution à l’Alliance. Nous apprécions la contribution significative que le Monténégro apporte aux opérations dirigées par l’OTAN.

110.    Aujourd’hui, nous réaffirmons notre attachement à la politique de la porte ouverte, un principe fondateur du traité de Washington et l’un des grands succès de l’Alliance. La présence du Monténégro parmi nous aujourd’hui en est la preuve tangible, et nous nous réjouissons à la perspective d’accueillir ce pays dès que possible comme nouveau pays membre. L’intégration euro‑atlantique fait progresser les valeurs démocratiques, la réforme, et le respect de l’état de droit. La liberté et la prospérité de nos sociétés reposent sur ces fondations. L’intégration euro‑atlantique ouvre également la voie à la stabilité et renforce la sécurité collective. Les vagues successives d’élargissement ont permis d’accroître notre sécurité et celle de la région euro‑atlantique tout entière. La porte de l’OTAN est ouverte à toutes les démocraties européennes qui partagent les valeurs de notre Alliance, qui sont désireuses et capables d’assumer les responsabilités et les obligations liées au statut de membre, qui sont susceptibles de favoriser le développement des principes du Traité et dont l’admission peut contribuer à la sécurité de la zone de l’Atlantique Nord. Les décisions concernant l’élargissement sont du seul ressort de l’OTAN. Nous restons pleinement attachés à l’intégration des pays qui aspirent à rejoindre l’Alliance, en jugeant chacun d’eux en fonction de ce qu’il aura accompli. Nous encourageons les partenaires qui aspirent à rejoindre l’Alliance – la Géorgie, l’ex‑République yougoslave de Macédoine2  et la Bosnie‑Herzégovine – à continuer de mettre en œuvre les réformes et les décisions nécessaires pour préparer leur adhésion. Nous continuerons de soutenir leurs efforts et attendons d’eux qu’ils prennent les mesures nécessaires pour concrétiser leurs aspirations.

111.    Au sommet de Bucarest, en 2008, nous avons décidé que la Géorgie deviendrait membre de l’OTAN, le MAP faisant partie intégrante du processus ; aujourd’hui, nous réaffirmons tous les éléments de cette décision, ainsi que les décisions prises par la suite. Nous saluons les progrès significatifs accomplis depuis 2008. La relation que la Géorgie entretient avec l’Alliance renferme tous les outils pratiques pour la préparation d’une adhésion à terme. Les élections législatives qui se tiendront cette année seront une autre étape clé sur la voie de la consolidation des institutions démocratiques. Nous encourageons la Géorgie à continuer de tirer pleinement parti de toutes les possibilités de se rapprocher de l’Alliance qu’offrent la Commission OTAN‑Géorgie, le programme national annuel, son rôle de partenaire « nouvelles opportunités », sa participation à notre initiative de renforcement des capacités de défense et le paquet substantiel OTAN‑Géorgie. L’OTAN apprécie vivement la contribution significative et continue de la Géorgie à sa Force de réaction et à sa mission Resolute Support, en Afghanistan, et elle tient à reconnaître les sacrifices et les contributions du peuple géorgien au service de notre sécurité commune.

112.    Nous saluons les progrès importants accomplis dans la mise en œuvre du paquet substantiel OTAN‑Géorgie, que nous avons adopté au sommet du pays de Galles. Plus de 30 experts de pays de l’Alliance et de pays partenaires apportent à présent une aide à la Géorgie dans divers domaines de coopération. La Géorgie contribue à ces efforts en y consacrant d’importantes ressources. Le Centre conjoint de formation et d’évaluation, qui contribue à renforcer les capacités d’autodéfense et de résilience de la Géorgie, est opérationnel. Nous continuerons de fournir les ressources nécessaires à la mise en œuvre du paquet substantiel, qui vise à renforcer les capacités de la Géorgie, ce qui l’aidera à avancer dans sa préparation en vue de l’adhésion à l’Alliance. Nous avons approuvé des moyens concrets supplémentaires d’intensifier les efforts, y compris pour ce qui est du soutien des capacités de gestion de crise de la Géorgie, de la formation et des exercices, et de l’amélioration de la communication stratégique du pays. Les Alliés apporteront un soutien au développement de la défense aérienne et de la surveillance aérienne en Géorgie. Nous accorderons aussi une attention accrue à la sécurité dans la région de la mer Noire.

113.    Nous réitérons notre soutien à l’intégrité territoriale et à la souveraineté de la Géorgie à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues. Nous nous félicitons de l’engagement de la Géorgie à ne pas recourir à la force, et nous exhortons la Russie à faire de même. Nous appelons la Russie à revenir sur sa décision de reconnaître les régions géorgiennes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie en tant qu’États indépendants, à cesser d’ériger des obstacles s’apparentant à des frontières le long des lignes de démarcation administratives, et à retirer ses forces de Géorgie. L’OTAN ne reconnaît pas les prétendus traités signés entre la région géorgienne d’Abkhazie et la Russie en novembre 2014, et entre la région géorgienne d’Ossétie du Sud et la Russie en mars 2015. Ces textes violent la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Géorgie, et ils sont en contradiction flagrante avec les principes du droit international, les principes de l’OSCE et les engagements internationaux de la Russie. Nous encourageons tous les participants aux discussions de Genève à jouer un rôle constructif et à poursuivre leur étroite collaboration avec l’OSCE, l’ONU et l’UE, à la recherche d’un règlement pacifique du conflit sur le territoire internationalement reconnu de la Géorgie.

114.    Nous réitérons la décision que nous avons prise au sommet de Bucarest en 2008 et rappelée aux sommets suivants, à savoir que l’OTAN adressera une invitation à l’ex‑République yougoslave de Macédoine à rejoindre l’Alliance dès qu’une solution mutuellement acceptable aura été trouvée, dans le cadre de l’ONU, à la question du nom.  Par conséquent, nous appelons instamment à un redoublement des efforts visant à trouver une solution à la question du nom.  Nous encourageons la poursuite des efforts visant à développer les relations de bon voisinage. Nous encourageons aussi l’instauration d’une société multiethnique qui fonctionne pleinement, sur la base de la mise en œuvre intégrale de l’accord‑cadre d’Ohrid. Compte tenu des préoccupations quant aux développements politiques dans l’ex République yougoslave de Macédoine, qui ont éloigné davantage le pays des valeurs de l’OTAN, nous invitons instamment tous les responsables politiques du pays à respecter intégralement les engagements qu’ils ont pris dans le cadre de l’accord de Przino en juin‑juillet 2015, qui constitue le cadre d’une solution durable à la crise politique. Prenant acte des premières démarches accomplies dans la mise en œuvre, nous réitérons notre appel à toutes les parties afin qu’elles entament un véritable dialogue démocratique et mettent en place les conditions nécessaires à la tenue d’élections crédibles, en renforçant l’état de droit, la liberté de la presse et l’indépendance de la justice. Nous continuerons de suivre de près les progrès de Skopje dans ces domaines, qui sont le reflet des valeurs essentielles de l’OTAN. Nous apprécions l’engagement de l’ex‑République yougoslave de Macédoine à l’égard de la sécurité internationale, tel que l’illustrent sa solide contribution à nos opérations, sa participation à des organisations et à des forums de dialogue et de coopération régionale, ainsi que son attachement au processus d’adhésion à l’OTAN.

115.    Nous réaffirmons notre attachement à l’intégrité territoriale et à la souveraineté d’une Bosnie‑Herzégovine stable et sûre, et notre plein soutien aux aspirations de ce pays à l’adhésion. Nous encourageons les dirigeants de Bosnie‑Herzégovine à continuer de faire preuve de volonté politique et à œuvrer de manière constructive et au bénéfice de tous les habitants du pays à la mise en œuvre des réformes. Nous continuerons d’apporter notre soutien aux efforts de la Bosnie‑Herzégovine dans le domaine de la réforme de la défense. Nous nous félicitons de la récente adoption, par la présidence de la Bosnie‑Herzégovine, des principes relatifs à la revue de défense, et nous appelons instamment à son achèvement dès que possible. Nous saluons les progrès accomplis s’agissant de l’enregistrement des biens militaires immeubles comme biens de l’État, mais nous attendons des dirigeants de Bosnie‑Herzégovine qu’ils redoublent d’efforts sur la voie du respect des conditions fixées par les ministres des Affaires étrangères des pays de l’OTAN à Tallinn en avril 2010, de sorte que le premier cycle du plan d’action pour l’adhésion puisse être activé dans les meilleurs délais, ce qui reste notre objectif. Les Alliés continueront de suivre activement les développements. Nous félicitons la Bosnie Herzégovine pour ses contributions aux opérations dirigées par l’OTAN et pour son engagement en faveur du dialogue, de la coopération et de la sécurité dans la région.

116.    Au pays de Galles, nous avons étendu à la République de Moldova l’initiative de renforcement des capacités de défense et des capacités de sécurité s’y rapportant. Depuis lors, les Alliés et les partenaires fournissent à ce pays une expertise et des avis à l’appui du processus de réforme de la défense déjà engagé, afin de renforcer les capacités des forces armées et du secteur de la défense de la République de Moldova. Les Alliés restent déterminés à poursuivre cette tâche de sorte que le pays puisse, à l’avenir, connaître des conditions de stabilité, de sécurité et de prospérité, conformément aux valeurs que partagent les démocraties européennes. Pour que la République de Moldova y parvienne, il importe qu’elle reste déterminée à mener des réformes qui bénéficient à tous les habitants du pays. Nous remercions la République de Moldova pour sa contribution aux opérations dirigées par l’OTAN.

117.    L’Ukraine est, de longue date, un partenaire spécifique de l’Alliance. À notre sommet, ici à Varsovie, nous nous réunissons avec le président Porochenko, et nous publions une déclaration commune. Une Ukraine indépendante, souveraine et stable, fermement attachée à la démocratie et à l’état de droit, est essentielle à la sécurité euro‑atlantique. Nous restons déterminés dans notre soutien à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues, ainsi qu’à son droit de décider librement, sans ingérence extérieure, de son avenir et de l’orientation de sa politique étrangère, principes inscrits dans l’Acte final d’Helsinki. La Russie continue de violer la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’indépendance de l’Ukraine. Malgré ces conditions difficiles, le gouvernement ukrainien progresse dans la mise en œuvre de réformes de grande ampleur sur la voie du respect des normes européennes et euro‑atlantiques, fondées sur les valeurs démocratiques et le respect des droits de l’homme, des minorités et de l’état de droit, réformes qui seront essentielles pour la prospérité et la stabilité à long terme. Nous nous félicitons des mesures que l’Ukraine a prises pour lutter contre la corruption, rester en conformité avec les conditions fixées par le Fonds monétaire international, réformer l’appareil judiciaire et avancer sur la voie de la décentralisation, mais il reste des défis de taille à relever et les efforts doivent se poursuivre. Nous encourageons vivement l’Ukraine à rester attachée à la pleine mise en œuvre de ces réformes et des autres réformes nécessaires, et à faire en sorte de pouvoir les assumer dans la durée. Gardant à l’esprit les décisions prises lors de nos sommets précédents, l’OTAN continuera d’aider le pays à exécuter son programme de réforme, y compris au travers du programme national annuel, dans le cadre de notre Partenariat spécifique.

118.    La coopération OTAN‑Ukraine est une partie importante de la contribution de l’Alliance à l’action de la communauté internationale visant à projeter la stabilité dans la zone euro‑atlantique et au‑delà. Nous saluons l’intention de l’Ukraine d’approfondir encore son partenariat spécifique avec l’OTAN, ainsi que les contributions qu’elle a apportées et apporte encore aux opérations dirigées par l’OTAN et à la Force de réaction de l’OTAN alors même qu’elle se défend contre les actions agressives de la Russie. Le choix de l’Ukraine d’adopter et d’appliquer les principes et les normes de l’OTAN, pour lequel le Bulletin de défense stratégique sert de feuille de route, favorisera une plus grande interopérabilité entre nos forces. La brigade lituano-polono-ukrainienne constitue une partie importante de cette démarche. L’Ukraine se rendra ainsi davantage à même de mieux assurer sa sécurité, grâce à des institutions de sécurité et de défense qui fonctionnent bien, sous contrôle civil et démocratique, qui soient tenues de rendre compte et qui soient soutenables et efficaces. La participation de l’Ukraine au programme de renforcement de la formation « défense » constitue un effort important à cet égard. L’OTAN continuera de donner des avis stratégiques et d’apporter un soutien pratique à la réforme du secteur ukrainien de la sécurité et de la défense, notamment comme le prévoit l’ensemble complet de mesures d’assistance que nous entérinons, conjointement avec le président Porochenko, à la réunion de la Commission OTAN‑Ukraine qui se tient aujourd’hui. Cet ensemble de mesures vise à consolider et à optimiser le soutien que l’OTAN apporte à l’Ukraine, y compris par des mesures adaptées de renforcement des moyens et des capacités pour le secteur de la sécurité et de la défense, soutien qui contribuera à l’amélioration de la résilience de l’Ukraine face à un large éventail de menaces, y compris les menaces hybrides.

119.    L’expérience acquise par l’OTAN dans le cadre des opérations ainsi que l’environnement de sécurité complexe et en mutation montrent qu’une approche politique, civile et militaire globale est indispensable à la gestion de crise et à la sécurité coopérative. De plus, une telle approche contribue à l’efficacité de notre sécurité et de notre défense communes, sans préjudice des engagements de l’Alliance en matière de défense collective. L’OTAN a mis en place une structure civile modeste mais appropriée, conformément aux décisions prises au sommet de Lisbonne. Nous continuerons d’œuvrer à la cohérence des outils et des activités de l’OTAN, d’adopter des approches concertées avec les pays partenaires et des organisations telles que l’ONU, l’UE et l’OSCE, ainsi que de dialoguer avec les organisations non gouvernementales. Nous attendons avec intérêt que le plan d’action 2011 pour l’approche globale soit revu avant d’être soumis pour examen aux ministres des Affaires étrangères en 2017.

120.    Alors que les défis qui pèsent sur la paix et la sécurité internationales se multiplient, la coopération entre l’OTAN et l’ONU revêt une importance croissante. Nous nous félicitons du développement continu du dialogue politique et de la coopération pratique entre l’OTAN et l’ONU dans un large éventail de domaines d’intérêt mutuel. Lors du sommet sur le maintien de la paix qui s’est tenu l’année dernière, l’OTAN s’est engagée à renforcer son soutien aux opérations de paix de l’ONU, y compris dans les domaines de la lutte contre les engins explosifs improvisés, de l’entraînement et de la préparation, pour ce qui est d’améliorer l’aptitude de l’ONU au déploiement rapide de troupes sur le terrain, ainsi qu’au travers de la coopération en matière de renforcement des capacités de défense dans les pays à risque. Nous maintenons cet engagement et demeurons prêts à approfondir encore notre interaction dans ces domaines comme dans d’autres, y compris au travers de la participation de l’OTAN à la conférence de suivi qui doit se tenir à Londres en septembre prochain.

121.    L’Union européenne demeure un partenaire unique et essentiel pour l’OTAN. L’intensification des consultations à tous les niveaux et la coopération pratique qui s’exerce dans le cadre des opérations et du développement des capacités ont donné des résultats concrets. Face aux défis de sécurité dans nos voisinages communs au sud et à l’est, il importe plus que jamais de renforcer notre partenariat stratégique dans un esprit d’ouverture, de transparence et de complémentarité mutuelles totales, tout en respectant les différents mandats, l’autonomie décisionnelle et l’intégrité institutionnelle de l’OTAN et de l’UE, et comme en ont décidé les deux organisations.

122.    Nous nous félicitons de la déclaration commune publiée ici, à Varsovie, par le secrétaire général de l’OTAN, le président du Conseil européen et le président de la Commission européenne, exposant une série de mesures que les deux organisations comptent prendre ensemble dans des domaines concrets, notamment la lutte contre les menaces hybrides, l’amélioration de la résilience, le renforcement des capacités de défense, la cyberdéfense, la sûreté maritime et les exercices. Nous chargeons le Conseil de faire le point sur la mise en œuvre de ces propositions et de soumettre un rapport aux ministres des Affaires étrangères pour décembre 2016.

123.    Nous nous félicitons des conclusions du Conseil européen de juin 2016, dans lesquelles celui‑ci demande que les relations entre l’OTAN et l’UE soient encore renforcées. Nous nous félicitons par ailleurs de la présentation de la stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité de l’Union européenne.

124.    L’OTAN reconnaît l’importance d’une défense européenne plus forte et plus performante, qui rendra l’OTAN plus forte, contribuera à accroître la sécurité de tous les Alliés, et favorisera un partage équitable des charges, des avantages et des responsabilités entre les pays membres de l’Alliance. Dans ce contexte, nous nous réjouissons du renforcement de la défense et de la gestion de crise européennes que nous observons depuis quelques années.

125.    Les Alliés non membres de l’UE continuent d’apporter des contributions significatives aux efforts déployés par l’UE pour renforcer ses capacités à faire face aux défis de sécurité communs. Pour le partenariat stratégique entre l’OTAN et l’UE, l’implication la plus complète des Alliés non membres de l’UE dans ces efforts est essentielle. Nous encourageons de nouvelles démarches mutuelles dans ce domaine à l’appui d’un partenariat stratégique renforcé.

126.    Nous nous félicitons du rapport sur les relations OTAN‑UE établi par le secrétaire général. Nous encourageons celui‑ci à continuer de travailler en étroite collaboration avec le président du Conseil européen, le président de la Commission européenne et la haute représentante, sur tous les aspects du partenariat stratégique OTAN‑UE, et à soumettre un rapport au Conseil pour le prochain sommet.

127.    L’OTAN et l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe jouent toutes deux un rôle important s’agissant de maintenir la stabilité et de faire face aux défis de sécurité dans la zone euro‑atlantique. Nous accueillons avec satisfaction l’approche globale de l’OSCE en matière de sécurité, laquelle couvre les dimensions politico‑militaire, économico-environnementale et humaine. Nous apprécions le rôle important que joue l’OSCE en tentant de mettre un terme à plusieurs conflits prolongés dans la zone euro‑atlantique. La crise en Ukraine a une fois encore montré toute l’utilité de l’OSCE dans le cadre des efforts internationaux en faveur du règlement pacifique des conflits et du renforcement de la confiance et de la sécurité, ainsi qu’en tant que plateforme pour la coopération et le dialogue inclusif sur la sécurité en Europe. Nous mettons également en évidence l’intérêt des mesures de confiance et de sécurité ainsi que des mesures de transparence dans le cadre de l’OSCE. Nous sommes déterminés à renforcer encore notre coopération, tant au niveau politique qu’au niveau opérationnel, dans tous les domaines d’intérêt commun, y compris par l’intermédiaire de la représentante du secrétaire général auprès de l’OSCE, qui vient d’être nommée.

128.    La coopération de l’OTAN avec l’Union africaine (UA) englobe le soutien opérationnel, le soutien logistique, le soutien en matière de renforcement des capacités et le soutien en faveur de l’opérationnalisation de la Force africaine en attente, y compris au travers d’exercices, ainsi que d’entraînements sur mesure, conformément aux demandes que l’UA adresse à l’OTAN. Nous nous réjouissons à la perspective de renforcer et d’étendre encore notre partenariat politique et pratique avec l’UA pour être mieux à même de faire face ensemble aux menaces et défis communs.

129.    L’OTAN est une alliance de valeurs, parmi lesquelles la liberté, les droits de l’homme, la démocratie et l’état de droit. Ces valeurs partagées sont essentielles à l’identité et à l’action de l’OTAN. Les intégrer davantage dans tous nos domaines d’activité rendra l’OTAN plus forte.

130.    La corruption et la mauvaise gouvernance constituent des défis de sécurité qui fragilisent la démocratie, l’état de droit et le développement économique. La mise en œuvre de mesures visant à améliorer le développement de l’intégrité, la lutte anticorruption et la gouvernance revêt de l’importance pour l’OTAN, pour les Alliés et pour les partenaires. Aujourd’hui, pour faire avancer nos travaux dans ce domaine, nous avons entériné une nouvelle politique OTAN pour le développement de l’intégrité, par laquelle nous réaffirmons notre conviction que l’existence d’institutions de défense transparentes et soumises à l’obligation de rendre compte ainsi qu’à un contrôle démocratique est fondamentale pour la stabilité de la zone euro‑atlantique et essentielle pour la coopération internationale dans le domaine de la sécurité.

131.    En donnant aux femmes un réel pouvoir d’action à l’OTAN et au sein de nos forces armées, nous rendons notre Alliance plus forte. Nous attachons une grande importance à la participation pleine et active des femmes à la prévention, à la gestion et au règlement des conflits, ainsi qu’aux initiatives et à la coopération post‑conflit. Depuis notre dernier sommet, au pays de Galles, nous avons bien progressé dans la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l’ONU sur les femmes, la paix et la sécurité et des résolutions pertinentes. Pourtant, il reste du travail à accomplir, et il faudra pour cela assurer de manière durable leadership, transparence et compte rendu. Nous nous félicitons des récentes nominations à des postes de haut niveau au sein des structures civiles et militaires de l’OTAN. Toutefois, il reste des insuffisances dans la représentation des femmes à l’OTAN, auxquelles il convient de remédier. Nous allons mettre en œuvre le plan d’action actualisé sur les femmes, la paix et la sécurité, qui a été mis au point avec nombre de nos partenaires et en concertation avec la Commission consultative de la société civile, récemment créée. L’action de l’OTAN visant à projeter la stabilité se voit renforcée par le module OTAN de formation et d’entraînement sur les questions de genre, désormais à la disposition de tous. Nos commandements stratégiques procèdent actuellement à l’opérationnalisation des directives militaires agréées visant à prévenir et à combattre la violence sexuelle et sexiste liée aux conflits. Nous soulignons l’importance cruciale de mesures solides en matière de formation et de compte rendu pour la prévention des comportements répréhensibles, y compris les abus et les sévices sexuels. Nos efforts en cours et notre détermination s’agissant d’intégrer la dimension de genre dans les activités que mène l’Alliance au titre des trois tâches fondamentales de l’OTAN contribueront à rendre l’Alliance plus moderne, plus préparée et plus réactive.

132.    Guidés par nos valeurs et par le droit international, nous sommes conscients qu’il est impératif de protéger les civils contre les effets des conflits armés. C’est pourquoi nous avons entériné aujourd’hui la politique OTAN de protection des civils, élaborée avec nos partenaires et en consultation avec l’ONU et d’autres organisations internationales. Dans cette politique, la protection des civils comprend tous les efforts déployés en vue d’éviter, de réduire le plus possible et de limiter les effets négatifs, sur les civils, d’opérations militaires de l’OTAN ou dirigées par l’OTAN, et, lorsqu’il y a lieu, de protéger les civils contre les violences physiques ou les menaces de violences physiques qui seraient le fait d’autres acteurs dans les conflits. Cette politique vient s’ajouter aux travaux que mène actuellement l’OTAN dans des domaines apparentés, et elle inclut une dimension police de stabilisation. Nous mettrons en œuvre cette politique au travers d’un plan d’action concret, qui sera revu régulièrement par le Conseil.

133.    Nous restons profondément préoccupés de constater que les enfants continuent d’être les victimes de violations graves, et en particulier des six pratiques recensées par le secrétaire général de l’ONU : meurtre ou mutilation, recrutement ou utilisation en tant que soldats, attaques d’écoles ou d’hôpitaux, viol ou autres actes graves de violence sexuelle, enlèvement et déni d’accès à l’aide humanitaire. Depuis notre sommet au pays de Galles, l’OTAN a arrêté une politique robuste, en consultation avec l’ONU, pour améliorer notre mise en œuvre de la résolution 1612 et des résolutions connexes du Conseil de sécurité de l’ONU. Cette politique enjoint à nos troupes déployées dans le cadre d’opérations ou de missions dirigées par l’OTAN de faire preuve de vigilance, de signaler les violations commises contre des enfants et de se mettre en rapport avec les autorités locales. Dans le cadre de notre mission Resolute Support, nous avons pour la première fois désigné un conseiller pour la question des enfants dans les conflits armés, chargé de contribuer à la formation des forces de défense et de sécurité nationales afghanes. De plus, l’OTAN, en coopération avec l’ONU, étoffera encore son offre d’entraînements, d’exercices et de formations. Le Conseil fera régulièrement le point sur la mise en œuvre de notre politique.

134.    Dans la lutte contre le terrorisme, l’OTAN apporte une valeur ajoutée et a un rôle à jouer, sans préjudice des législations ni des responsabilités nationales, et en cohérence avec l’UE, en particulier au travers de notre coopération militaire avec les partenaires pour renforcer leur capacité à affronter les menaces terroristes. L’OTAN continuera d’interagir avec les partenaires et avec d’autres organisations internationales, comme il conviendra, pour promouvoir une appréciation commune et favoriser la coopération pratique à l’appui de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies. En nous fondant sur notre programme de travail pour la défense contre le terrorisme et sur notre programme de travail « biométrie », nous continuerons d’améliorer nos capacités et nos technologies, notamment en matière de défense contre les engins explosifs improvisés et contre les menaces CBRN. Le terrorisme et les menaces qui y sont liées demeurant parmi les grandes préoccupations de sécurité de l’OTAN, les Alliés comptent travailler ensemble, dans le respect de leur législation nationale et du droit international, ainsi que des procédures OTAN établies, en vue de promouvoir le partage de l’information par une utilisation optimale de plateformes multilatérales, telles que le système de recueil et d’exploitation des informations du champ de bataille (BICES). Les Alliés continueront de s’efforcer d’accroître leur coopération pour ce qui est de l’échange d’informations sur les combattants étrangers rentrant dans leur pays. Le secrétaire général adjoint pour le renseignement et la sécurité, agissant dans les limites du mandat agréé, pourrait servir de facilitateur afin d’améliorer l’échange d’informations.

135.    Les développements en matière d’énergie peuvent avoir, pour les Alliés et pour l’Alliance, des incidences importantes sur le plan politique et sur le plan de la sécurité, comme le montrent les crises à l’est et au sud du territoire de l’OTAN. La stabilité et la fiabilité des approvisionnements énergétiques, la diversification des itinéraires d’importation, des fournisseurs et des ressources énergétiques, et l’interconnexion des réseaux énergétiques sont d’une importance critique, et permettent d’accroître la résilience face aux pressions politiques et économiques. Bien que ces questions soient principalement du ressort des gouvernements nationaux et d’autres organisations internationales, l’OTAN suit de près les incidences, sur le plan de la sécurité, des développements pertinents en matière d’énergie, et elle attache une importance particulière à la diversification des sources d’approvisionnement énergétique dans la région euro‑atlantique. C’est pourquoi nous améliorerons encore notre connaissance de la situation stratégique dans ce domaine, notamment au travers du partage du renseignement et du développement de nos liens avec d’autres organisations internationales, telles que l’Agence internationale de l’énergie et l’Union européenne, comme il conviendra. Nous mènerons des consultations et partagerons des informations sur les questions relatives à la sécurité énergétique présentant un intérêt particulier pour les Alliés et pour l’Alliance, le but étant de dresser un tableau complet de l’évolution du paysage énergétique, en ciblant les domaines dans lesquels l’OTAN peut apporter une valeur ajoutée. Nous continuerons par ailleurs de développer la capacité de l’OTAN à aider les autorités nationales à protéger les infrastructures critiques et à améliorer leur résilience face aux ruptures des approvisionnements en énergie qui pourraient avoir des répercussions pour la défense nationale ou la défense collective, notamment dans un contexte de menaces hybrides ou de cybermenaces. Dans ce contexte, nous intégrerons la problématique de la sécurité énergétique dans les entraînements, les exercices et la planification préétablie. Nous poursuivrons notre collaboration avec nos partenaires, selon les besoins. Nous améliorerons encore l’efficacité énergétique de nos forces armées en établissant des normes communes, en réduisant la dépendance à l’égard des combustibles fossiles et en montrant l’intérêt, pour le secteur militaire, de solutions écoénergétiques. Aujourd’hui, nous avons pris note d’un rapport d’activité sur le rôle de l’OTAN en matière de sécurité énergétique. Nous chargeons le Conseil d’affiner encore ce rôle de l’OTAN conformément aux principes et aux directives arrêtés, ainsi que d’établir un rapport d’activité pour notre prochain sommet.

136.    Une industrie de défense plus forte dans toute l’Alliance, incluant les petites et moyennes entreprises, et une coopération industrielle et technologique de défense accrue entre les deux rives de l’Atlantique et en Europe, ainsi qu’une base industrielle solide dans l’Europe et l’Amérique du Nord tout entières, restent indispensables à l’acquisition des capacités dont l’Alliance a besoin. Pour que l’Alliance conserve son avance technologique, il importe tout particulièrement de soutenir l’innovation en vue de découvrir des technologies avancées et émergentes, d’évaluer leur applicabilité dans le domaine militaire, et de les mettre en œuvre au moyen de solutions novatrices. À cet égard, l’OTAN se félicite des initiatives prises de part et d’autre de l’Atlantique pour maintenir et faire progresser l’avantage militaire et technologique des capacités alliées au travers de l’innovation, et encourage les pays à faire en sorte que de telles initiatives conduisent à une coopération accrue au sein de l’Alliance et entre Alliés.

137.    L’adaptation institutionnelle sous‑tend l’adaptation politique et militaire de l’OTAN. Elle a pour objet de rendre l’Alliance intrinsèquement capable de s’adapter, de sorte que la capacité d’anticiper les changements et d’y réagir fasse partie intégrante de notre mode de fonctionnement. Les réformes menées depuis 2010 ont contribué à améliorer l’efficacité et l’efficience de l’OTAN et ont permis d’adapter l’Organisation en vue d’en accroître la préparation et la réactivité. Ces réformes ont concerné le siège, les agences et la structure de commandement. Nous avons accru la transparence en publiant les audits financiers. Nous avons amélioré notre communication stratégique. Pour mener plus avant ce travail de réforme, nous élaborerons une approche plus résolue et plus cohérente en matière de priorisation, qui passe par l’établissement d’un lien plus solide entre les priorités politiques et militaires, d’une part, et les besoins en ressources, de l’autre, en particulier au travers d’une utilisation plus efficiente du processus de mise à disposition des capacités financées en commun. Nous continuerons d’améliorer le compte rendu, la gouvernance et la transparence. Nous chargeons le Conseil de poursuivre ces travaux, sur la base des résultats obtenus récemment et en tirant parti de l’installation dans le nouveau siège de l’OTAN, pour faire en sorte que nous restions préparés et aptes à faire face aux défis de demain au sein d’une Alliance assurée, déterminée, et capable de s’adapter ; et nous le chargeons de rendre compte, pour notre prochain sommet, des progrès accomplis.

138.    Nous saluons le rôle que joue l’Assemblée parlementaire de l’OTAN s’agissant de compléter les efforts déployés par l’OTAN pour promouvoir la stabilité dans l’ensemble de l’Europe. Nous apprécions également la contribution qu’apporte l’Association du Traité atlantique en s’employant à faire mieux comprendre l’Alliance et ses objectifs par les opinions publiques de nos pays.

139.    Nous exprimons notre gratitude au gouvernement de la Pologne, ainsi qu’à la population polonaise, pour l’accueil généreux qui nous a été réservé. Par les décisions importantes que nous avons prises à l’occasion de ce sommet, à Varsovie, pour renforcer notre dispositif de dissuasion et de défense, projeter la stabilité au‑delà de nos frontières et promouvoir nos valeurs, nous avons démontré notre unité, notre solidarité et notre force. Nous nous réjouissons à la perspective de nous réunir de nouveau en 2017, au nouveau siège de l’OTAN, à Bruxelles.

Source : OTAN, 09-07-2016

Dommage, ils n’ont pas réitéré leur prestation de 2015 :

Cout-de-l-otan

arend_2016-07-08-3325

Rappel :

otan-russie-1

Source: http://www.les-crises.fr/communique-du-sommet-de-varsovie-de-lotan/


Miscellanées du Mercredi (Delamarche, Sapir, Béchade, Brexit, ScienceEtonnante, DataGueule)

Wednesday 13 July 2016 at 02:15

I. Olivier Delamarche

Un grand classique : La minute de Delamarche: “Économiquement, le Japon est une catastrophe !” – 11/07

Olivier Delamarche VS Régis Bégué (1/2): 15 jours après le Brexit: Où en sont les marchés ? – 11/07

II. Philippe Béchade

Les indés de la finance: Les créations d’emplois flambent en juin aux États-Unis – 08/07

Philippe Béchade VS Pierre Bismuth (1/2): Le sentiment d’incertitude lié au Brexit peut-il expliquer la baisse des marchés ? – 06/07

Philippe Béchade VS Pierre Bismuth (2/2): L’Union bancaire est-elle remise en cause après la hausse des créances douteuses des banques italiennes ? – 06/07

III. Jacques Sapir

Jacques Sapir VS Ludovic Dufour (1/2): L’économie américaine est-elle en passe de traverser une nouvelle récession ? – 12/07

Jacques Sapir VS Ludovic Dufour (2/2): Avec l’arrivée de Theresa May, les négociations entre le Royaume-Uni et l’UE vont-elles s’alléger ? – 12/07

IV. Brexit

Après le référendum sur le Brexit, quelle est la suite pour les Britanniques et l’Europe ? Conférence organisée par la LSE (London School of Economics) – VO

V. ScienceEtonnante

La fourmi de Langton — Science étonnante #21

VI. DataGueule

Foot business #DATAGUEULE 9


Petite sélection de dessins drôles – et/ou de pure propagande…

kak_11072016

Images sous Copyright des auteurs. N’hésitez pas à consulter régulièrement leurs sites, comme les excellents Patrick Chappatte, Ali Dilem, Tartrais, Martin Vidberg, Grémi.

Source: http://www.les-crises.fr/miscellanees-du-mercredi-delamarche-sapir-bechade-brexit-scienceetonnante-datagueule/


[Rencontre] Mardi 12 juillet : AfterWork Spécial Brexit

Tuesday 12 July 2016 at 05:01

Vu le succès des premiers Afterworks, et pour échanger par exemple sur le Brexit, je propose aux Parisiens de nous retrouver pour manger anglais prendre un verre le mardi 12 juillet (jour de la Saint Olivier…) à partir de 19h30, dans le quartier des Halles.

L’idée est de faire connaissance, de discuter du blog et de l’actualité, de répondre à vos questions, et surtout de faire se rencontrer la communauté qui s’est créée, pleine de gens sympathiques…

 

Afin de gérer tranquillement les inscriptions, qui doivent être limitées, nous avons créé une application dédiée aux inscriptions aux rencontres du blog (qui est donc en rodage…), qui vont être plus fréquentes en 2016.

Pour cela, il faut : 1/ créer une fois pour toute un compte utilisateur, et 2/ s’inscrire ensuite à la rencontre.

Bref, les inscriptions, c’est ici

(signalez nous en commentaire s’il y a des bugs, en indiquant ce qui se passe – ça marche en général… – merci. Si vous êtes bloqué, inscrivez vous en l’indiquant en commentaire, pas de souci – désolé, on rode l’application… Choisissez déjà un mot de passe avec seulement des  lettres en minuscules pour voir)

 

Rendez-vous donc de nouveau au Café Paris Halles – Adresse : 41 Boulevard de Sébastopol, 75001 Paris – Métro Châtelet/Les Halles, ou bus 69 – Téléphone : 01 40 26 49 19 (1 conso obligatoire pour le bar svp)

En espérant vous y croiser…

Amitiés

Olivier Berruyer

cartel-ocho_ambiance

Source: http://www.les-crises.fr/mardi-12-juillet-afterwork-special-brexit/


Barroso rejoint Goldman Sachs : encore une mauvaise nouvelle pour l’Europe, par Romaric Godin

Tuesday 12 July 2016 at 02:00

Un grand succès dans la lutte contre le travail au noir !  🙂

Dire qu’après ça, certains ne comprennent toujours pas la vraie nature de l’UE…

Source : La Tribune, Romaric Godin, 08/07/2016

José Manuel Barroso rejoint Goldman Sachs comme président non exécutif. (Crédits : Reuters)

José Manuel Barroso rejoint Goldman Sachs comme président non exécutif. (Crédits : Reuters)

L’ancien président de la Commission européenne aidera la banque d’affaires américaine à gérer l’après-Brexit. Un transfert qui envoie un message négatif de plus au débit de l’UE.

Les « portes tournantes » continuent de tourner. L’ancien président de la Commission européenne, le Portugais José Manuel Durão Barroso, a été recruté par la banque d’affaires étatsunienne Goldman Sachs pour l’aider à gérer les conséquences de la sortie annoncée du Royaume-Uni de l’Union européenne après le référendum du 23 juin dernier. Il sera ainsi nommé président non exécutif de Goldman Sachs International (GSI) à Londres et, de surcroît, il aura le titre de « conseiller ».

Aider Goldman Sachs à gérer le Brexit

Selon le Financial Times, José Manuel Barroso entend « faire ce qu’il peut pour adoucir les effets négatifs du Brexit ». Les banques d’affaires américaines ont naturellement choisi Londres comme base d’opération pour leurs activités européennes. Mais si le Royaume-Uni perd son accès au marché unique européen, il leur faudra ouvrir de nouvelles filiales dans un pays de l’Espace économique européen. Quel pourrait alors être le rôle de l’ancien président de la Commission ?  Aura-t-il pour charge de faire du lobbying auprès des négociateurs européens qu’il connaît fort bien pour sauvegarder cet accès de la finance londonienne au marché unique (le fameux « passeport » européen) ? Cherchera-t-il à négocier des avantages avec un éventuel « point de chute » ? Pour le moment, il va déménager à Londres et croit que « Londres restera un centre financier mondial très important », indique-t-il au FT.

“José Manuel va apporter une analyse et une expérience immense à Goldman Sachs, et notamment une profonde compréhension de l’Europe. Nous sommes impatients de travailler avec lui alors que nous continuons à aider nos clients à évoluer au sein d’un contexte économique et de marché incertain et délicat”, ont déclaré Michael Sherwood et Richard Gnodde, codirecteurs généraux de Goldman Sachs International.

Le problème de l’indépendance

Évidemment, ce « transfert » pose une question centrale : celle de l’indépendance. Les liens entre Goldman Sachs et d’autres grandes banques et de nombreux fonctionnaires européens ou nationaux posent de véritables problèmes, notamment dans la gestion de la crise financière. Le cas le plus souvent cité est celui de Mario Draghi. L’actuel président de la BCE depuis 2011 a été vice-président de la branche européenne de Goldman Sachs de 2002 à 2005. Or, Goldman Sachs n’est pas une banque comme les autres. C’est elle qui a aidé le gouvernement grec à détourner la méthode de calcul du déficit public par des produits de « swaps » qui permettaient de reporter à plus tard une partie de ce déficit. Grâce à ce tour de passe-passe, la Grèce était entrée dans la zone euro en 2002. Ce mécanisme avait été utilisé, du reste, par l’Italie, en 1997 pour rejoindre l’union monétaire à une époque où le directeur général du trésor transalpin était un certain… Mario Draghi.

Le comportement de José Manuel Barroso durant la crise

Et pour José Manuel Barroso ? Cette nomination n’est pas neutre. En tant que président de la Commission, cet homme a été un des responsables des erreurs de gestion des années 2010-2013. Partisan d’une austérité forte et d’un ajustement féroce, il a participé à la troïka dans tous les pays touchés par la crise, de la Grèce à l’Irlande. Or, le principe de ces « sauvetages » a été de sauvegarder les intérêts des créanciers des États, principalement les banques. José Manuel Barroso a notamment participé aux pressions contre l’Irlande pour empêcher le gouvernement de ce pays de réduire le fardeau porté par sa populations en faisant participer les créanciers des banques irlandaises. L’ancien président de la Commission, qui n’a jamais vraiment eu à répondre de ces choix devant le parlement européen, a donc géré au mieux les intérêts du secteur financier dans une crise causée à l’origine par des produits vendus à la Grèce par Goldman Sachs qu’il rejoint à présent.

Un combattant contre la « mauvaise finance » ?

Certes, dans son interview au Financial Times, l’ancien premier ministre portugais, chef de file lors de la Révolution des œillets en 1974 du Mouvement révolutionnaire du prolétariat portugais (MRPP, maoïste) avant de rejoindre en 1980 le parti social-démocrate (PSD) de centre-droit, se présente comme celui qui a entamé un « effort global de régulation et de supervision » de la finance. Mais son bilan, de ce point de vue, reste contestable. Le projet Barnier de séparation bancaire, assez timide, a été abandonné. L’union bancaire n’a pas été conclue sous la direction de José Manuel Barroso et montre déjà ses limites en Italie ces derniers jours. Surtout, les lendemains du Brexit montrent clairement que le risque d’une crise financière n’est pas écarté. Qu’une banque aussi fragile que Deutsche Bank puisse continuer à menacer comme une épée de Damoclès sur l’Europe prouve aussi que les efforts de l’ancien président de la Commission ont été pour le moins insuffisant.

Effet désastreux pour l’UE

En réalité, les déclarations de José Manuel Barroso, qui se dit « très impressionné par l’engagement de Goldman Sachs pour les niveaux les plus élevés en termes d’éthique » et par la « culture d’intégrité et de responsabilité » de l’entreprise, sonnent comme les reflets un cynisme parfait. De tels engagements ne peuvent manquer de soulever des questions quant à l’action présente des dirigeants européens. Voir un ancien chef de l’exécutif de l’Union européenne chercher à aider une banque à gérer au mieux le Brexit ne peut manquer de soulever des questions sur l’engagement quant à l’intérêt général européen des dirigeants de l’UE. A l’heure où le successeur de José Manuel Barroso, Jean-Claude Juncker est très contesté et où l’UE peine à tirer les leçons du vote britannique, cette nomination est particulièrement mal venue et pourrait avoir un effet désastreux.

Source : La Tribune, Romaric Godin, 08/07/2016

==============================================

Et voici la saine réaction de Jean Quatremer à ce 14 478e scandale de l’UE, mais évidemment, qui n’est dû pour lui qu’à une personne, pas à la structure…

Jean Quatremer : “Mon billet sur le scandaleux recrutement de José Manuel Durao Barroso par Goldman Sachs est ici. Un cri de colère à l’égard de quelqu’un qui a fait plus de mal à l’Union européenne que personne avant lui. Et il continue.”

Pour ne rien arranger, la réaction de la Commission à cette affaire est désespérante de nullité et montre à quel point certains fonctionnaires sont coupés du monde réel: «Les anciens commissaires ont évidemment le droit de poursuivre leur carrière professionnelle ou politique», a déclaré à l’AFP un porte-parole de la Commission. «C’est légitime que des personnes dotées d’une grande expérience et de qualifications continuent à jouer des rôles de premier plan dans le secteur public ou privé.» Ben voyons. L’éthique, ça leur dit encore quelque chose?

barroso

Barroso chez Goldman Sachs, un bras d’honneur à l’Europe, par Jean Quatremer

L’ancien président de la Commission qui a gravement affaibli l’Europe communautaire et ses institutions se recycle dans une des banques d’affaires les plus controversées de son époque.

José Manuel Durao Barroso chez Goldman Sachs. La nouvelle est tombée vendredi : celui qui a été pendant dix ans, de 2004 à 2014, président de la Commission européenne, va rejoindre le siège londonien de la banque d’affaires – comme président «non exécutif» et conseiller – afin de l’aider à limiter les effets négatifs du «Brexit». Une fin de carrière qui n’a rien d’étonnant quand on connaît l’homme, mais qui n’en reste pas moins choquante, GS étant l’une des banques les plus impliquées dans la crise des subprimes qui a débouché sur la crise financière de 2007, et dans la crise grecque, ayant aidé à dissimuler l’étendue de son déficit avant de spéculer, en 2009-2010, contre la dette grecque dont elle connaissait évidemment l’insoutenabilité… C’est, au pire moment, un symbole désastreux pour l’Union et une aubaine pour les europhobes, un président de Commission étant censé incarner, bien au-delà de son mandat, les valeurs européennes qui ne sont justement pas celles de la finance débridée qu’incarne Goldman Sachs : tous les anciens présidents de Commission, qui bénéficient d’une pension confortable censée les préserver de toute tentation, ont, jusque-là, su éviter un tel mélange des genres.

À lire sur Libération

==============================================

Barroso : un silence assourdissant, par Daniel Schneidermann

Barroso peut remercier l’Euro. “Pluie de critiques”, titre Le Monde, après le pantouflage de l’ancien président de la commission européenne chez Goldman Sachs, la banque qui a aidé la Grèce à maquiller ses comptes, avant de spéculer contre la dette grecque. Une pluie, vraiment ? Disons une bruine, un crachin. Un seul ministre français a exprimé sa réprobation (le secrétaire d’Etat au commerce extérieur Matthias Fekl). Dans la “pluie”, on remarque aussi les eurodéputés socialistes français, qui avaient voté contre la reconduction de Barroso et, cohérents, protestent aujourd’hui contre son pantouflage.

Et, s’agissant des responsables politiques, c’est tout. Pas un seul chef de parti. Pas un ministre important. Pas un chef d’Etat européen. Pas un mot de son successeur Juncker. Pour ne pas parler du président ou du premier ministre français, fort occupés, c’est vrai, à faire les agents d’ambiance dans les fanzones. Pas un seul, pour prononcer simplement ces mots : dans les négociations à venir sur le Brexit, et quand Barroso nous appellera pour défendre les intérêts de sa banque, puisque c’est le motif assumé de son embauche, nous ignorerons Barroso. Nous ne le prendrons pas au téléphone. Barroso n’existe plus.

A l’inverse, écoutons les révoltés, les dégoûtés, les furieux. Que disent-ils ? La colère des europhiles est dirigée exclusivement…contre Barroso, que n’ont “jamais étouffé la morale et les convictions”, tonne Jean Quatremer, furieux de ce mauvais coup porté aux “valeurs européennes qui ne sont justement pas celles de la finance débridée qu’incarne Goldman Sachs”. Qu’on se le dise : le Méchant majuscule, c’est Barroso, qui prostitue “les valeurs européennes”, lesquelles, telles qu’incarnées dans les institutions, doivent rester immaculées, au-dessus de tout soupçon.

Tout de même, amis europhiles qui exprimez une sincère colère, avez-vous entendu ce silence assourdissant ? Ne vous dit-il vraiment rien ? Si ce pantouflage ne gêne en rien les silencieux, c’est qu’il est implicitement considéré dans l’ordre des choses. Dans le système mental intime des silencieux, la commission européenne et Goldman Sachs appartiennent à une même entité multiforme, obéissent à une même logique, servent les mêmes intérêts. Rien de choquant, sinon pour la galerie, à ce que l’on passe de l’une à l’autre. Ainsi semblent-ils étrangement partager les constructions mentales complotistes europhobes, en même temps qu’ils les nourrissent, et les confirment. Barroso n’est rien. Seule existe la construction politico-technocratique qui l’a sélectionné, produit, nommé et qui, encore aujourd’hui, le couvre de son silence.

Source : @si

==============================================

Ben du coup :

electrochoc

C’est fait, un bon électrochoc à 200 000 volt, ça va régler le problème…

P.S. vous noterez la manipulation du type, qui pose avec un Airbus à la main, entreprise créée en 1966, réussite des pays européens – et dont les règles de l’UE interdiraient aujourd’hui l’existence (essayez de créer une entreprise concurrentielle avec des subsides publics maintenant…)

Source: http://www.les-crises.fr/barroso-rejoint-goldman-sachs-encore-une-mauvaise-nouvelle-pour-leurope-par-romaric-godin/


Pourquoi la fermeté de Bruxelles contre l’Espagne et le Portugal est une erreur majeure, par Romaric Godin

Tuesday 12 July 2016 at 01:30

Ils sont for-mi-da-bles !

Des génies de la politique…

Source : La Tribune, Romaric Godin, 07/07/2016

La Commission européenne entame des procédures de sanctions contre le Portugal et l'Espagne. (Crédits : Reuters)

La Commission européenne entame des procédures de sanctions contre le Portugal et l’Espagne. (Crédits : Reuters)

La Commission européenne a lancé la procédure de sanctions contre la politique budgétaire de l’Espagne et du Portugal. Une décision prise sous la menace de l’Allemagne qui est lourde de risques pour l’UE et la zone euro.

Que cette décision fut difficile à prendre ! Prévu mardi 5 juillet, l’avis de la Commission européenne sur la trajectoire budgétaire de l’Espagne et du Portugal a finalement été publié deux jours plus tard. Preuve des tourments incroyables qu’a dû endurer l’exécutif européen pris entre le marteau et l’enclume. Le marteau, c’est l’Allemagne qui, depuis plusieurs jours n’hésite plus à faire passer le message de son agacement vis-à-vis d’une Commission jugée trop laxiste et qui, par son ministre des Finances Wolfgang Schäuble n’hésite plus à proposer de « court-circuiter » Bruxelles pour imposer le « respect des règles ». L’enclume, c’est le risque de contraindre le Portugal et l’Espagne à effectuer un nouveau tour de vis budgétaire alors même que, après le Brexit, l’heure est au renouveau du risque financier et économique et que l’on évoque un « renouvellement » de l’intégration européenne avec plus de solidarité.

En route vers les sanctions

Pendant deux jours, les informations les plus contradictoires ont circulé. La presse portugaise assurait que Bruxelles se montrerait magnanime, la presse espagnole parlait de l’ouverture d’une procédure de sanctions. Là encore, c’est le reflet de discussions très intenses et sans doute tendues entre les partisans de la « ligne ferme » et ceux du pragmatisme. Mais entre le réalisme économique et sa propre survie en tant qu’institution, la Commission a finalement choisi la deuxième option. Pour apaiser Berlin et les pays du nord, elle a opté pour la fermeté, estimant que le Portugal et l’Espagne n’avaient pas pris suffisamment de mesures pour corriger leur trajectoire budgétaire.

Cette décision est essentielle : elle est le premier pas pour entamer des sanctions contre les deux pays qui peuvent s’élever jusqu’à 0,2 % du PIB. Certes, il n’est pas question dans l’immédiat de sanctions. Le conseil des ministres des Finances (Ecofin) doit confirmer l’appréciation de la Commission pour lancer officiellement la procédure. Il sera ensuite demandé ensuite de “nouveaux efforts” aux pays. Mais in fine, dans le cadre des directives Two-Pack et Six-Pack, la Commission peut demander des sanctions et il faudra une « majorité inversée » pour bloquer cette décision, autrement dit, il faudra que deux tiers des voix pondérés du conseil européen contre les sanctions pour qu’elles soient abandonnées. Surtout, c’est bien un message envoyé à Madrid et Lisbonne : corrigez vos trajectoires ou vous serez sanctionnés. C’est donc bien une invitation à l’austérité.

Ceux qui, en mai, lorsque la Commission avait reporté sa décision de deux mois, après les élections espagnoles du 26 juin, avaient proclamé la « mort du pacte de stabilité et de croissance » se sont donc trompés. Bruxelles vient confirmer bel et bien que la zone euro dispose d’une politique économique fondée sur l’austérité et l’obéissance aveugle à des règles « métaphysiques » prises hors de toute réalité économique concrète. Cette obéissance aux règles est une des structures fondatrices de la pensée ordo-libérale allemande qui a enregistré ce 7 juillet une victoire importante.

Urgence à frapper ?

Certes, fin 2015, les déficits portugais et espagnols étaient respectivement à 4,4 % et 5,1 % du PIB, soit au-dessus des 3 % du PIB autorisés, mais il faut rappeler que la zone euro lutte à la fois contre une croissance et une inflation faible et que son déficit public cumulé est de 2,4 % du PIB, alors qu’elle affiche un excédent courant de 3 % du PIB. Il n’y a donc pas de problème « global » de déficit : les « déviations » portugaises et espagnoles ne mettent pas en danger la stabilité de la zone euro. Elles interviennent alors que ces deux pays ont été les victimes de violentes politiques d’austérité qui les ont entraînés dans des récessions importantes. Au final, l’ajustement unilatéral des finances publiques n’a pas permis de réduire les déficits et la dette. C’est une stratégie qui a échoué. Et dans laquelle la Commission s’entête. Sa décision de ce 7 juillet pourrait cependant être une erreur lourde de conséquence, à plus d’un titre.

Réponse inadaptée

D’abord, parce qu’elle place les deux pays dans des situations économiques difficiles. L’Espagne a certes connu depuis 2013 une croissance vigoureuse, mais cette dernière s’explique en grande partie par la fin de l’austérité et la baisse du prix de l’énergie. Le cycle de cette dernière est quasiment terminé. Si le pays doit se lancer dans un ajustement budgétaire de grande ampleur comme le veut la Commission, la croissance pourrait s’en ressentir très fortement. Au Portugal, l’austérité n’a guère permis de faire revenir une croissance forte, elle est restée inférieure à 2 % depuis 2013. Les deux pays ont vu l’émigration accélérer, les inégalités exploser et ont des taux d’inflation très bas. La cure que propose la Commission ne saurait soigner ces maux causés en grande partie par la même médication. Elle menace d’affaiblir la croissance et d’augmenter encore la dette et les déficits.

Rajouter du risque déflationniste au risque déflationniste

Du reste, en frappant fort sur les budgets espagnols et portugais, la Commission envoie un message au reste de la zone euro : le respect des règles est la seule « aiguille dans sa boussole ». Elle tire donc clairement en sens inverse de la BCE. Sans doute, une telle rigueur aurait un sens si elle s’accompagnait d’une solidarité européenne réelle permettant de soutenir l’activité de ces deux pays. Mais comme cette solidarité est réduite au fantomatique plan Juncker, l’effet risque d’être très négatif : la Commission exige en effet une politique déflationniste quand la BCE tente de raviver l’inflation à coup de centaines de milliards d’euros. Bruxelles fait donc tout pour isoler encore davantage la banque centrale et rendre sa politique inopérante.

On aurait pu imaginer que la Commission prenne acte du refus de Berlin de faire jouer ses marges de manœuvre budgétaires en laissant les pays en déficit aller leur train compte tenu des taux d’inflation faibles qui compliquent leurs tâches. Mais non, la Commission continue de ne penser qu’en termes d’ajustement unilatéral. Dès lors, ce ne sont pas seulement les Portugais ou les Espagnols qui sont visés : Français, Italiens ou Belges doivent s’attendre aussi à un tour de vis. La conséquence de cette décision est donc d’encourager les agents économiques à la prudence et à l’épargne. Exactement ce qu’il ne faut pas encourager alors que les tensions renaissent à la suite du Brexit. Pierre Moscovici, le Commissaire aux Affaires économiques, peut prétendre qu’il applique des “règles intelligentes”, cette décision est une ineptie économique dans la situation actuelle.

Risque pour le Portugal

D’autant qu’elle pose un grave danger sur le Portugal, en particulier. La dette de ce pays n’est maintenue dans l’assouplissement quantitatif (« QE ») de la BCE, son programme de rachat de titres publics, que par le fait que l’agence de notation canadienne DBRS lui attribue encore une note « d’investissement ». Avec cette décision de la Commission, l’agence sera sous pression pour abaisser la note portugaise. Or, si elle le fait, le Portugal sera immédiatement exclu du QE. Le taux de sa dette risque d’exploser. D’autant plus en ces temps de « fuite vers la qualité ». Le QE de la BCE agit comme une sorte d’assurance pour les investisseurs. Vient-il à disparaître, le Portugal risque de devoir faire face à une crise de la dette. Il devra alors accepter un nouveau « programme d’ajustement » pour bénéficier soit du QE avec une dérogation, soit du programme OMT de rachats illimités d’une dette souveraine par la BCE. Le pays risque alors de s’enfoncer dans une nouvelle récession. La décision de la Commission est grave parce qu’en pleine tourmente post-Brexit, elle prend le risque d’une nouvelle crise financière.

Décision politique

Le gouvernement portugais, dirigée par le PS avec l’appui de deux partis de gauche radicale, ne saurait survivre à une telle crise. Le président de la république conservateur ne manquera pas l’occasion de dissoudre l’assemblée pour ramener la droite au pouvoir. La décision de la Commission, imposée par Berlin, est éminemment politique, mais elle est fort dangereuse, car elle peut alimenter le courant eurosceptique. Le Bloc de Gauche et le Parti Communiste portugais ne manqueront pas alors de faire campagne contre l’UE. Ils auront d’autant plus d’arguments que, ce 7 juillet, la Commission a sanctionné l’action du gouvernement conservateur précédent sans laisser aucune chance à l’actuel gouvernement, en place depuis fin novembre 2015…

En Espagne, la Commission impose au prochain gouvernement des coupes dans les dépenses alors même que le PP de Mariano Rajoy peine à construire une coalition et que, lui-même a promis de ne pas avoir recours à de nouvelles baisses de dépenses, promettant même des baisses d’impôts. Avec cette décision, Mariano Rajoy risque d’avoir encore plus de mal à construire une majorité : qui acceptera de gouverner pour rétablir l’austérité ? De plus, ces mesures risquent de frapper de plein fouet les communautés autonomes (régions) espagnoles, dont la Catalogne. Ce sera une raison de plus pour les Indépendantistes de cette région, qui se déchirent précisément sur la question budgétaire, de retrouver leur unité contre un Etat espagnol qui sape les bases de l’Etat-providence. Politiquement, la décision de la Commission est aussi absurde qu’économiquement.

Réponse inadaptée au Brexit

Elle l’est d’autant plus qu’elle semble devoir fermer la discussion sur l’avenir de la zone euro après la terrible gifle du vote britannique sur le Brexit. Deux jours après ce vote, les ministres français et allemands des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault et Frank-Walter Steinmeier avaient proposé d’en finir avec les « ajustements unilatéraux », les jugeant « politiquement dangereux ». La leçon n’a pas été retenue par la Commission qui cherche clairement désormais à ressembler à cette « instance indépendante » chargée d’appliquer les règles sans aucune autre considération dont rêve Wolfgang Schäuble. En suivant cette voie, Bruxelles aura bien du mal, demain, de venir prétendre défendre davantage de solidarité au sein de la zone euro. La proposition Ayrault/Steinmeier semble déjà morte et enterrée. Pas besoin d’attendre le sommet de Bratislava du mois de septembre pour le savoir : il n’y aura pas de « saut qualitatif » de la zone euro avec plus de solidarité.

Ce 7 juillet 2016 marque la victoire de Wolfgang Schäuble dans la zone euro. Les règles sont certes respectées, mais ceux qui croient que ce respect sauvera la zone euro pourraient bien faire erreur. Car les déficits ne sont que le reflet des déséquilibres internes à la zone euro. Refuser de régler ces déséquilibres, de voir l’impact de l’inflation faible sur les comptes publics, de prendre en compte les effets désastreux de l’inflation passée sur le capital productif des pays touchés et de comprendre que la zone euro ne peut survivre avec un excédent courant allemand de 8 % du PIB, c’est refuser de vouloir vraiment « réformer » la zone euro. C’est s’aveugler sur une doctrine qui a fait la preuve de ses échecs. C’est pourtant le comportement de la Commission. La réponse au Brexit sera donc faible et inadaptée. Les Eurosceptiques de tous poils peuvent se frotter les mains : l’incapacité de réforme de l’UE a, aujourd’hui, été prouvée avec éclat.

Source : La Tribune, Romaric Godin, 07/07/2016

============================================

Ben ils ont confirmé !

ue-derapages

On parle encore d’euro, de Portugal et d’ Espagne mais cette fois, il n’est pas question de football. Les deux pays de la péninsule ibérique vont être déclarés mardi en dérapage budgétaire, une situation inédite. « Les membres de la zone euro vont soutenir la recommandation de la Commission européenne » en ce sens, a annoncé ce lundi Jeroen Dijsselbloem, le président de l’Eurogroupe, à l’issue d’une réunion des grands argentiers de la monnaie unique, à Bruxelles.

Il faut dire qu’en 2015, le déficit public espagnol a atteint 5 % du produit intérieur brut (PIB), bien au-delà du seuil du pacte de stabilité (3 % du PIB) et des objectifs que lui avait fixés la Commission, à 4,2 %. Il devrait aussi déraper en 2016, alors que l’Espagne, qui a déjà réalisé des efforts budgétaires considérables, n’est pas encore parvenue à former un gouvernement après les élections législatives du 26 juin, précédées de six mois de blocage politique.

Quant au Portugal, il avait affiché un déficit public de 4,4 % du PIB l’an passé alors que l’objectif fixé était de repasser sous les 3 %. En 2016, il devrait toutefois rentrer dans les clous.

Des sanctions financières à définir

Quelles sont les conséquences de la situation de dérapage budgétaire ? Essentiellement financières. Dès que les ministres auront pris leur décision, s’ouvrira « une période de 20 jours » pendant laquelle la Commission européenne évaluera les sanctions possibles à l’encontre des deux pays, a précisé le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici.

Les amendes possibles sont « au maximum de 0,2 % » du Produit Intérieur Brut (PIB) et au « minimum zéro ».

Dans le cadre de cette échéance de vingt jours, l’exécutif européen pourrait aussi proposer de couper une partie de la manne des fonds structurels européens à partir de 2017. Selon une source européenne, les fonds concernés pour l’an prochain s’élèvent pour l’Espagne à 1,3 milliard d’euros et pour le Portugal à 500 millions d’euros.

Source: 20 minutes

========================================

Alors du coup, il y en a qui ont de la chance…

uk-may

Elle n’était pas favorable au Brexit mais ne s’opposera pas à sa mise en oeuvre. Celle que l’on appelle désormais la dame de fer à cause de son caractère bien trempé est… catégorique. Theresa May, désormais seule candidate au poste de Premier ministre après le retrait de sa rivale Andrea Leadsom, a en effet affirmé lundi qu’elle ne tenterait pas de rester dans l’Union européenne, contrairement aux espoirs de certains, soulignant que les Britanniques avaient voté pour sortir de l’Union.

«Je ne saurais être plus claire: «»», a déclaré Mme May en lançant sa campagne pour succéder à David Cameron. «Il n’y aura pas de tentative de revenir par la porte dérobée». «Brexit signifie Brexit» et «nous en ferons un succès», a dit Mme May, l’une des deux candidates pour prendre la tête du Parti conservateur et du gouvernement. Mme Mays’est adressée en particulier aux «leaders économiques (du pays) qui n’ont pas préparé la possibilité d’une sortie».

Pas de nouveau référendum

Un millier d’avocats ont également écrit à David Cameron pour lui demander de peser les «avantages et les risques» d’enclencher l’article 50 du traité de Lisbonne et donc le divorce officiel avec l’UE, tandis qu’une pétition réclame l’organisation d’un nouveau référendum. Samedi, le gouvernement a exclu cette option, soulignant qu’il fallait «préparer le processus de sortie de l’UE».

Interrogée sur la manière dont elle comptait négocier un accès au marché commun européen, Mme May a affirmé que le pays avait besoin «d’avoir le meilleur contrat commercial, pour les biens et les services». «Il est clair aussi que le vote pour le Brexit était un message appelant à un contrôle de la libre circulation des personnes. Cela ne peut pas continuer comme aujourd’hui», a-t-elle dit.

Source : Le Parisien, 11/07/2016

Source: http://www.les-crises.fr/pourquoi-la-fermete-de-bruxelles-contre-lespagne-et-le-portugal-est-une-erreur-majeure-par-romaric-godin/


La fin de l’européisme, par Jacques Sapir

Tuesday 12 July 2016 at 00:51

Source : Russeurope, Jacques Sapir, 30-06-2016

Le « Brexit » jette une lumière particulièrement crue sur la stratégie de « fédéralisme furtif » adoptée par les dirigeants européens depuis le traité de Maastricht et en conséquence sur l’idéologie européiste qui sous-tend cette stratégie. C’est en réalité cette stratégie, et son instrument privilégié, l’Euro, qui ont provoqué cette réaction des électeurs britanniques, les poussant à quitter non pas « l’Europe » comme certains le prétendent mais une institution particulière, l’Union européenne. Les choix des électeurs britanniques a été largement expliqué[1]. Le fait que des personnalités du gouvernement britannique, comme le ministre de la justice Michael Gove, aient appelé à voter pour la sortie de l’UE est significatif.

Le Brexit remet donc en cause ce qui constitue aujourd’hui la colonne vertébrale de la politique qualifiée d’européiste, que ce soit celle de François Hollande ou celle d’Angela Merkel. Le choc va donc bien plus loin que celui de la sortie de l’UE d’un pays, la Grande-Bretagne, dont l’appartenance à cette dite UE était en fait des plus lâches. Cette crise de la stratégie européiste est un point de rupture. Ce n’est qu’en nous débarrassant de l’aporie européiste que nous pourrons réellement penser la construction de l’Europe.

Les bases idéologiques du fédéralisme furtif

Il convient en premier lieu de comprendre la démarche dite de « fédéralisme furtif » qui a été adoptée à partir du traité de Maastricht et qui s’incarne dans l’Euro. Cette stratégie se fonde sur un rejet des Nations, que ce rejet soit lié à une méfiance ou qu’il soit lié à une véritable haine des dites Nations. C’est pourquoi ont communié dans cette démarche à la fois des libéraux conservateurs, qui considèrent que la Nation moderne implique la Démocratie et qui restent fidèles à cette méfiance profonde envers le peuple de la pensée conservatrice, des anciens « gauchistes » (et Cohn-Bendit en est l’un des exemples) qui haïssent en la Nation cette accumulation de médiations ancrées dans l’Histoire qu’ils perçoivent comme un obstacle à leur vision millénariste et apocalyptique d’une « fin » de l’Histoire[2], ou que ce soit des sociaux-démocrates qui cherchent à transposer vers un niveau étatique supérieur ce que la mollesse de leurs politiques les empêchent de réussir dans le cadre national. Ces différents rejets de la nation s’articulent eux-mêmes de manières spécifiques compte tenu de la culture politique de chaque pays.

En France, c’est la combinaison de la démission d’une grande partie de l’élite politique en 1940 qui vient s’associer à un sentiment issu du traumatisme des guerres coloniales. En Allemagne, c’est le poids de la culpabilité collective issue du Nazisme, aggravée par le traumatisme de la division en deux de 1945 à 1990 qui explique cette montée de l’européisme dans les élites. L’Allemagne, pays objectivement dominant de l’UE ne s’autorise pas à penser sa propre souveraineté et ne peut la vivre qu’en contrebande, dans la mesure où elle prend la forme d’une souveraineté « européenne ». On ne peut comprendre autrement les fautes politiques commises tant vis-à-vis de la Grèce que sur la question des réfugiés, fautes qui aujourd’hui viennent hanter Angela Merkel. En Italie, c’est là encore la combinaison de l’épisode Mussolinien et des « années de plomb » qui ont convaincu une grande partie de la classe politique que l’Union européenne était la seule issue à la Nation italienne. Et l’on peut multiplier les exemples, en y incluant des pays qui s’aiment mal (Espagne, Portugal) ou qui se savent irrémédiablement divisés (la Belgique).

Mais, et c’est une évidence, un projet politique issu d’une haine de soi ou d’un mal-être ne peut avoir d’avenir. Telle était la première faille de l’européisme et du fédéralisme furtif. Car, engendré par une vision essentiellement négative, il ne peut être porteur d’avenir.

Le rôle politique de l’Euro

Ce projet s’est incarné essentiellement dans l’Euro. La précipitation qui vit les politiques accepter l’idée de monnaie unique, alors que les conditions nécessaires à sa réussite n’étaient nullement réunies, et qu’il eut été bien plus logique de s’en tenir à une monnaie commune, soit une monnaie venant coiffer mais non remplacer les monnaies nationales, ne peut s’expliquer que par des motifs politiques et psychologiques impérieux[3]. Ici encore, ils furent différents suivant les pays, mais ils ont tous convergé dans cette idée qu’une fois la monnaie unique réalisée, les pays de la zone Euro n’auraient d’autres choix que le fédéralisme. Ce qui avait été négligé cependant dans ce processus c’était le fait que le fédéralisme n’est pas un objectif unifiant. Il peut y avoir diverses formes de fédéralisme. Or, faute d’un débat public, débat contradictoire avec une stratégie imposant la furtivité et la dissimulation, il ne pouvait y avoir d’instance à même de trancher entre ces différentes formes de fédéralisme. Ainsi l’Allemagne conçoit le fédéralisme comme un système qui lui donne un droit de regard sur la politique des autres pays mais sans devoir en payer le prix budgétaire. C’est le fédéralisme mesquin. La France, elle, voit dans les structures fédérales la poursuite de l’histoire de sa propre construction étatique et entend imposer un fédéralisme donnant naissance à un nouvel Etat-Nation. Mais, c’est faire fi justement des spécificités de l’Histoire, et du fait que la Nation et le Peuple se sont construits en parallèle (et avec de multiples interactions) sur près de 8 siècles. De ce point de vue, seule l’Histoire de la Grande-Bretagne est pleinement comparable. L’idée implicite était de réaliser par la ruse ce que l’Empire napoléonien n’avait pu par la force. Cette idée se fondait sur les illusions de l’universalisme français qui confond des valeurs avec des principes. C’est cette énorme erreur, qui a engagé les dirigeants français, de gauche comme de droite, dans une voie sans issue.

Car, ce qui bloque dans l’option fédéraliste est à la fois une notion politique, quel serait donc le « souverain » et une question économique, celle des transferts. On sait, et on l’a dit à de nombreuses reprises, que ces transferts exigeraient le versement d’environ 10% (entre 8% et 12% selon les études) du PIB allemand au « budget fédéral »[4]. Il n’est donc pas surprenant que les Allemands ne veuillent pas car, en réalité, ils ne peuvent pas. Le refus de l’Allemagne de réviser les règles pour permettre à l’Italie de faire face à se crise bancaire montre toutes les limites de la notion de solidarité qui est essentielle dans une fédération. Or, si cette solidarité n’est pas réalisée, comment convaincre les peuples de se fondre démocratiquement dans un grand ensemble ? Et l’on retrouve ici la question politique du souverain[5].

Le « fédéralisme » est donc condamné soit à ne pas être soit à n’exister que sous la forme du fédéralisme mesquin soit un droit de regard asymétrique de l’Allemagne sur la politique des autres pays. C’est le constat que tire Joseph Stiglitz dans son dernier livre[6], dont une traduction française sortira cet été. Soit nous mettons fin à l’Euro, soit nous avançons vers un fédéralisme inclusif dont ni les Allemands ni les Néerlandais ne veulent, soit l’Euro sera la mort de l’UE mais aussi et c’est bien plu grave de l’idée de coopération en Europe.

A-01-A-stiglitz

La responsabilité des européistes

D’ores et déjà, les dégâts provoqués par l’Euro sont importants. Conçu pour rapprocher et unir l’Europe, l’Euro a fait effectivement le contraire: après une décennie sans croissance, l’unité a été remplacée par la dissidence et l’agrandissement par le risque de sorties. La stagnation de l’économie européenne et les sombres perspectives actuelles sont donc le résultat direct des défauts fondamentaux inhérents au projet de l’Euro – l’intégration économique prenant le pas sur l’intégration politique avec une structure qui favorise activement la divergence plutôt que convergence.

Mais, le plus important ont été ses conséquences politiques[7]. L’UE (et non la seule zone Euro) s’est engagée dans un processus politique où la démocratie a été progressivement retirée aux peuples. Le cas du traité « Merkozy », ou TSCG, voté par la France en septembre 2012, a été exemplaire à cet égard. Et le soulèvement démocratique de la Grande-Bretagne peut être lu comme une réaction à ce fédéralisme mesquin qui se met peu à peu en place, sous la volonté du gouvernement allemand et avec la passivité du gouvernement français.

Il est donc clair aujourd’hui qu’il faut liquider l’européisme et ses instruments si nous ne voulons pas nous retrouver d’ici quelques années, voire quelques mois, dans une situation où les conflits entre Nations, parce qu’ils auront été trop longtemps niés, ne trouveront plus d’espace où un compromis sera possible entre des intérêts divergents.

Il convient donc de dire ici quelle est la responsabilité historique des européistes, de leur idéologie de haine des Nations, et de leur instrument, l’Euro. Dans la crise que nous traversons aujourd’hui, et dont la sortie de l’UE par le Royaume-Uni n’est qu’un aspect, la crise bancaire italienne qui vient en constituant un autre, la responsabilité des européistes, et de tous ceux qui les ont laissé faire, est centrale ; elle est fondamentale.

La rupture avec l’idéologie européiste est donc un acte de salubrité public. Non qu’il soit en lui-même suffisant. Rejeter cette idéologie, tourner le dos au fédéralisme furtif, reconnaître le cadre de la Nation comme étant celui au sein duquel vit et se nourrit la démocratie, ne produira pas immédiatement de solution. Mais, cela rendra possible la recherche d’une solution, tant au niveau de la France qu’à celui de l’Europe. C’est donc une condition certes non suffisante mais absolument nécessaire. Cette solution, on l’a déjà évoquée avec cette idée de Communautés des Nations Européennes. Elle devra être certainement précisée et peut-être amendée, mais du moins est-ce dans cette direction qu’il nous faut aller.

Notes

[1] Sapir J., Brexit (et champagne)https://russeurope.hypotheses.org/5052

[2] Voir https://russeurope.hypotheses.org/5059

[3] Sapir J., Faut-il sortir de l’euro ?, Le Seuil, Paris, 2012.

[4] Sapir J., Macron et le fantôme du fédéralisme en zone Euro

http://russeurope.hypotheses.org/4291 et Fédéralisme?https://russeurope.hypotheses.org/4347

[5] Sapir J., Souveraineté, Démocratie, Laïcité, Paris, Michalon, 2016.

[6] Stiglitz J., The Euro – How a common currncy threatens the future of Europe, Pinguin, Londres, mai 2016

[7] http://www.bloomberg.com/news/features/2016-06-30/after-brexit-here-s-what-s-next-for-europe

Source : Russeurope, Jacques Sapir, 30-06-2016

=======================================

De la haine de la démocratie dans l’UE

Source : Russeurope, Jacques Sapir, 01-07-2016

Les principaux responsables de l’Union européenne se déchaînent contre la pratique des référenda, considérée comme non démocratique. Ceci peut se comprendre à la suite du référendum britannique, mais ne constitue en réalité qu’une argutie qui vise à renforcer la déclaration de Jean-Claude Juncker de janvier 2015 où il déclarait « qu’il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens ». En fait, si l’on regarde l’histoire des référenda depuis le traité de Maastricht, elle est effectivement édifiante :

Capture d’écran 2016-07-08 à 16.51.01

On constate que sur 8 référenda, seuls 2 ont été respectés. La pratique de l’Union européenne, et des gouvernements dans le cadre de cette Union européenne, se révèle donc largement anti-démocratique puisque remettant en cause dans 75% des cas un vote démocratiquement exprimé.

De la pratique à la théorie…

Cette position n’est pas seulement une pratique. Elle a été théorisée dans une critique qui s’avère parfaitement convergente avec le discours tenu par l’Union Européenne. Il convient de s’y arrêter un instant pour chercher à comprendre de quoi il retourne en la matière. Jakab, après une analyse comparée des diverses interprétations de la souveraineté, avance pour le cas français que : « La souveraineté populaire pure fut compromise par un abus extensif de referenda sous le règne de Napoléon Ier et de Napoléon III, la souveraineté nationale pure ayant été perçue comme insuffisante du point de vue de sa légitimation[1] »

C’est soutenir qu’un abus pervertirait le principe ainsi abusé. Mais il ne peut en être ainsi que si l’abus démontre une incomplétude du principe et non de sa mise en œuvre. Viendrait-il à l’esprit des contemporains de détruire les chemins de fer au nom de leur utilisation par le Nazis dans la destruction génocidaire des Juifs et des Tziganes ? Or, ceci est bien le fond du raisonnement tenu par Jakab. Pourtant, il est loin d’être évident dans l’usage politique fait du plébiscite que cet usage soit le seul possible. Si un plébiscite est bien un instrument non-démocratique, tout référendum n’est pas à l’évidence un plébiscite.

La confusion établie par l’auteur entre les deux notions est très dangereuse et pour tout dire malhonnête. La pratique qui consiste à assimiler référendum et plébiscite, car c’est de cela dont il est question dans le texte, est une erreur logique. La discussion se poursuit sur la portée qu’il faut attribuer à la décision du Conseil Constitutionnel concernant la Nouvelle Calédonie où il est dit que « la loi votée… n’exprime la volonté générale que dans le respect de la Constitution »[2]. Ici encore, on pratique de manière volontaire la stratégie de la confusion. Ce que reconnaît le Conseil Constitutionnel, en l’occurrence, c’est la supériorité logique de la Constitution sur la Loi. Ce n’est nullement, comme le prétend à tort Jakab l’enchaînement de la souveraineté. En fait, dire que le processus législatif doit être encadré par une Constitution ne fait que répéter le Contrat Social de Rousseau[3]. Ce qui est en cause est bien le parti pris de cet auteur est de refuser ou de chercher à limiter le concept de Souveraineté.

Le positivisme juridique

Pour pouvoir ainsi limiter le principe de souveraineté, il est fait appel aux travaux de Hans Kelsen[4]. On sait que, pour ce dernier, le droit d’un État est subordonné au droit international, ce dernier existant de manière implicite à travers un système de « lois naturelles » qui seraient propre à la condition humaine, servant alors de normes pour le droit des États. C’est le principe de la norme hypothétique fondamentale, dite aussi la Grundnorm (Grund désignant le fondement). On est ici en présence d’une norme de nature logico-transcendantale[5]. Kelsen est fortement influencé par la logique du néo-Kantisme et la Grundnorm apparaît au sommet de la pyramide des différents niveaux de lois. Mais, les thèses de Kelsen sont loin de faire l’unanimité. Il lui est reproché, et non sans raison, un positivisme juridique[6] qui aboutit à un aplatissement des principes du droit.

Les études de cas proposées dans l’ouvrage de David Dyzenhaus, The Constitution of Law, aboutissent à mettre en évidence une critique de ce positivisme. Elle permet de comprendre comment l’obsession pour la rule by law (i.e. la légalité formelle) et la fidélité au texte tourne bien souvent à l’avantage des politiques gouvernementales quelles qu’elles soient. À quelques reprises, l’auteur évoque ses propres analyses des perversions du système légal de l’Apartheid[7] en rappelant que cette jurisprudence avilissante tenait moins aux convictions racistes des juges sud-africains qu’à leur « positivisme»[8]. Dans son principe, ce positivisme représente une tentative pour dépasser le dualisme de la norme et de l’exception. Mais on voit bien que c’est une tentative insuffisante et superficielle. En tant que via del mezzo, le positivisme échoue car il ne prend pas l’exception assez au sérieux.

Quelle norme ?

Néanmoins, on peut aussi soutenir que la Grundnorm est une norme hypothétique, un choix épistémologique qui permet de comprendre la juridicité de la Constitution et donc de l’ensemble de l’ordre juridique. En tant que norme supposée, elle ne disposerait d’aucun contenu. La démarche kelsénienne se situerait donc, en réalité, aux antipodes de la recherche jusnaturaliste des fondements d’un droit basé sur des normes morales[9]. Mais, sur ce point, il est difficile de distinguer les différentes étapes de l’évolution de Kelsen, mais surtout de distinguer entre Kelsen et ses épigones et ses héritiers. La critique en jusnaturalisme semble ici bien pertinente à propos de l’héritage de Kelsen.

À l’inverse, on peut considérer que le Droit International découle au contraire du Droit de chaque État, qu’il est un Droit de coordination[10]. C’est la logique développée par Simone Goyard-Fabre[11]. De plus, la notion de « loi naturelle » pose un vrai problème en ceci qu’elle prétend établir une spécificité radicale de l’action humaine, un schéma dans lequel il n’est que trop facile de voir une représentation chrétienne (la « créature » à l’image de son « créateur »). Accepter ceci sans discussion reviendrait à établir le Christianisme comme norme supérieure pour la totalité des hommes, et par là même à nier l’hétérogénéité religieuse avec toutes les conséquences dramatiques que cela impliquerait.

Centralité de la souveraineté

Andras Jakab se voit alors obligé de reconnaître que : « malheureusement, du point de vue de la définition de la notion, la souveraineté comme telle n’est définie dans aucun traité international (peut-être parce qu’un accord sur cette question serait impossible »[12]. Il ajoute quelques lignes plus loin : « Mais l’acceptation totale du premier droit du souverain, c’est-à-dire l’exclusivité, n’est pas satisfaisante vu les défis nouveaux, notamment la mondialisation »[13]. Ce faisant il glisse, dans le même mouvement, d’une position de principe à une position déterminée par l’interprétation qu’il fait – et que l’on peut réfuter – d’un contexte. Cette démarche a été critiquée en son temps par Simone Goyard-Fabre : « Que l’exercice de la souveraineté ne puisse se faire qu’au moyen d’organes différenciés, aux compétences spécifiques et travaillant indépendamment les uns des autres, n’implique rien quant à la nature de la puissance souveraine de l’État. Le pluralisme organique (…) ne divise pas l’essence ou la forme de l’État; la souveraineté est une et indivisible« [14]. L’argument prétendant fonder sur la limitation pratique de la souveraineté une limitation du principe de celle-ci est, quant au fond, d’une grande faiblesse. Les États n’ont pas prétendu pouvoir tout contrôler matériellement, même et y compris sur le territoire qui est le leur. Le despote le plus puissant et le plus absolu était sans effet devant l’orage ou la sécheresse. Il ne faut pas confondre les limites liées au domaine de la nature et la question des limites de la compétence du Souverain.

La démarche de Jakab a pour objet, consciemment ou inconsciemment, de nous présenter le contexte comme déterminant par rapport aux principes. La confusion entre les niveaux d’analyse atteint alors son comble. Cette confusion a naturellement pour objet de faire passer pour logique ce qui ne l’est pas : la subordination de la Souveraineté. Or, cette subordination est contraire aux principes du droit. Il n’est guère étonnant, dans ces conditions, que l’article de Jakab ait reçu tant de distinctions des institutions de l’Union Européennes. On comprend mieux aussi pourquoi il va, dans une autre partie de son article parler de « l’ignorance [des Etats membres] par rapport au défi constitutionnel de l’appartenance à l’UE ». Cela revient à dire que la Souveraineté pourrait être mise à mal par l’existence de liens contractuels entre les États. On retrouve ici l’idée que les traités doivent s’imposer sur les choix démocratiques, autrement dit que le suffrage universel n’est plus l’expression de la souveraineté. Nous en sommes là dans la dérive que connaît aujourd’hui l’Union européenne et ses thuriféraires.

Notes

[1] Jakab A., « La neutralisation de la question de la souveraineté. Stratégies de compromis dans l’argumentation constitutionnelle sur le concept de souveraineté pour l’intégration européenne », in Jus Politicum, n°1, p.4, URL : http://www.juspoliticum.com/La-neutralisation-de-la-question,28.html

[2] Décision 85-197 DC 23 Août 1985, Voir : Jacques Ziller, « Sovereignty in France: Getting Rid of the Mal de Bodin », in Sovereignty in Transition. éd. Neil Walker, Oxford, Hart, 2003.

[3] Rousseau J-J., Du Contrat Social, Flammarion, Paris, 2001.

[4] Kelsen H., «La méthode et la notion fondamentale de la théorie pure du droit »Revue de Métaphysique et de Morale, T. 41, No. 2 (Avril 1934), pp. 183-204.

[5] Kelsen H., Théorie générale des normes, (traduction d’Olivier Beaud) PUF, 1996, Paris.

[6] A. Hold-Ferneck, H. Kelsen, Lo Stato come Superuomo, un dibattito a Vienna, édité par A. Scalone, Il Mulino, Turin, 2002

[7] Dyzenhaus D, Hard Cases in Wicked Legal Systems. South African Law in the Perspective of Legal Philosophy, Oxford, Clarendon Press, 1991.

[8] Dyzenhaus D., The Constitution of Law. Legality In a Time of Emergency, op.cit., p. 22.

[9] Troper M., La philosophie du droit, Paris, PUF, 2003,

[10] Dupuy R.J., Le Droit International, PUF, Paris, 1963

[11] Goyard-Fabre S., « Y-a-t-il une crise de la souveraineté? », in Revue Internationale de Philosophie, Vol. 45, n°4/1991, pp. 459-498.

[12] Jakab A., « La neutralisation de la question de la souveraineté. Stratégies de compromis dans l’argumentation constitutionnelle sur le concept de souveraineté pour l’intégration européenne », op.cit., p. 11.

[13] Jakab A., « La neutralisation de la question de la souveraineté. Stratégies de compromis dans l’argumentation constitutionnelle sur le concept de souveraineté pour l’intégration européenne », op.cit., p. 12.

[14] S. Goyard-Fabre, « Y-a-t-il une crise de la souveraineté? », op.cit., p. 480-1.

Source : Russeurope, Jacques Sapir, 01-07-2016

=======================================

La gauche, le Brexit et la souveraineté

Source : Russeurope, Jacques Sapir, 04-07-2016

Le « Brexit » relance question de savoir s’il y aurait une « souveraineté » de gauche et une de droite, et plus généralement montre l’extrême difficulté qu’ont nombre de militants de gauche avec la notion même de souveraineté. Pourtant, une étude réalisée par un politologue en Grande-Bretagne montre que près de 70% des circonscriptions ayant élu un député travailliste ont voté « leave »[1]et ce alors que le parti travailliste faisait quant à lui campagne pour le « remain ». Cela illustre bien la contradiction qui existe entre l’opinion défendue par les cadres d’un parti et le ressenti du militant ou du sympathisant de base. La contradiction est d’autant plus forte que l’on pouvait penser que le meurtre de la député travailliste, Jo Cox, une semaine avant l’élection, allait provoquer un mouvement de sympathie pour le « remain ». Or, si ce sentiment a pu exister, il faut insuffisant pour inverser la tendance des opinions. Ceci nous renvoie aux termes comme « Brexit de gauche » ou de « Lexit », qui est utilisé pour décrire ce que serait une sortie « de gauche » de l’Euro. En réalité, ces différents termes ne font que traduire la confusion qui s’est emparée des esprits dès lors que domine l’esprit sectaire, ou « esprit de parti » sur la question du « bien commun ».

A-01-Corbyn

Origines de la souveraineté

De fait, la souveraineté doit être dégagée des débats actuels – débats qui ont bien entendu leur importance mais qui ne situent pas au même niveau. La souveraineté n’est assurément pas un concept de droite car il y a souveraineté dès qu’il y a société. En réalité, la notion de souveraineté renvoie au plus ancien des êtres pensants. L’analyse des primates évolués, nos proches cousins comme les Chimpanzés et les Bonobos montre que la société, avec ses hiérarchies, ses procédures d’inclusions et d’exclusions, de conflit mais aussi de réconciliation, précède l’humanité au lieu d’en découler[2]. L’homme s’est ainsi humanisé de par sa vie en société[3].

Dans toute société, se pose alors la question de savoir qui commande, que ce soit à l’instant donné ou de manière permanente, et au nom de quoi commande-t-il: le pouvoir de celui qui l’exerce est-il seulement lié à la personnalité de celui qui l’exerce ? Cela s’observe dans des microsociétés, qui se défont d’ailleurs lorsque le détenteur du pouvoir disparaît. D’où la nécessité de détacher le pouvoir de celui qui l’exerce. La dépersonnalisation du pouvoir est une nécessité de son plein exercice. Mais, dans le même temps, les hommes ont toujours eu besoin d’identifier le détenteur du pouvoir. D’où cette contradiction qui fait qu’une excessive personnalisation tout comme une dépersonnalisation absolue rendent impossible le plein exercice du pouvoir. Il faut donc réconcilier ces deux pôles ce qui conduit à la solution où le pouvoir d’un (ou d’une) ne devient possible que par la délégation par tous de cette faculté à exercer le pouvoir et dans cette délégation nous avons la légitimité. Mais, le fait que « tous », et que ce tous ne concerne que quelques dizaines ou des millions d’individus implique que ce tous est souverain, détient la souveraineté. Il y a cependant une autre manière de comprendre ce problème : à partir du moment où le pouvoir peut aller jusqu’à la mise à mort d’autrui, jusqu’à exiger le sacrifice d’autrui dans le cas d’un conflit de territoire, qu’est-ce qui donne le droit d’exiger d’un homme qu’il mette à mort un ennemi au péril de sa propre vie ? On comprend qu’il y ait eu dès lors le besoin, à un moment donné, de faire référence à une dimension surnaturelle. Mais une autre lecture est possible et même nécessaire, qui consiste à dire ceci : le pouvoir distinct de celui qui l’exerce, le pouvoir d’exiger des êtres humains des actes qui ne sont pas naturels comme la mise à mort, trouve son fondement dans le bien commun – autrement dit, la survie du groupe. Cela nécessite une construction longue et pénible de cette notion de bien commun. Pendant cette construction, le surnaturel a offert un raccourci pour définir ce bien commun. Il est donc nécessaire à la fois de comprendre les raisons d’être de ce raccourci, de les admettre comme des contraintes matérielles, et de ne pas en être dupe, de ne pas les fétichiser.

Souveraineté, société et altérité

Deux problèmes se posent. Le premier : est-ce que l’individu peut exister sans liens avec d’autres individus ? C’est cela une des définitions les plus communes de l’état de nature, qui peut cependant être aussi pris comme une métaphore comme nous le verrons tout à l’heure, mais qui n’existe pas réellement. Les premiers grands primates pré-humains fonctionnaient déjà en société parce que l’une des caractéristiques des grands primates – et de l’homme – c’est qu’ils sont facilement adaptables mais qu’ils ne sont supérieurs en rien, sauf l’intellect. Les grands primates et les humains n’auraient donc pas pu survivre s’ils avaient été isolés[4]. On ne peut donc pas penser l’individu puis la société, sur le modèle des briques et du mur, comme le font certains économistes, ou sociologues : l’individu fait d’emblée partie de la société. Il faut donc faire une critique radicale des « Robinsonnades » qui posent toutes un homme isolé. Il est stupéfiant que Böhm-Bawerk, et avec lui l’école marginaliste en économie, ait usé de cette métaphore. Et l’on a tendance à oublier un peu trop souvent que Robinson Crusoë n’est pas une œuvre scientifique mais un « roman d’éducation » écrit par un des grands pamphlétaires religieux anglais, Daniel Defoe. L’idée religieuse est d’ailleurs très présente dans l’ouvrage. Si Robinson est devenu le paradigme de départ de la littérature économique marginaliste comme de certains théoriciens du politique[5], cela pose en vérité un véritable problème de logique. Si Robinson ne retourne pas à l’animalité, c’est qu’il envisage toujours sa position dans la perspective de son intégration à une collectivité, que ce soit son retour possible à la civilisation ou sa position vis-à-vis de la communauté des croyants à laquelle il appartient et qu’il espère rejoindre après son trépas. Robinson, bien avant que Vendredi ne fasse son apparition, n’est jamais seul, et l’importance de sa Bible le montre bien. C’est d’ailleurs, symboliquement, la première chose qu’il sauve du naufrage. On a là un bel exemple d’une aporie religieuse dans les sciences sociales. Or, la souveraineté doit se penser dans les termes des sciences sociales.

Se pose alors le second problème : que se passe-t-il quand deux sociétés de pré-humains ou d’humains se rencontrent ? Si nous avons une seule société existant sur un espace donné, cette société n’a pas à se poser le problème de sa souveraineté parce que, d’une certaine manière, ce groupe ne possède rien et possède tout. Mais quand ce groupe rentre en contact avec d’autres groupes, le problème va se poser. Or nous savons que ces contacts apparaissent immédiatement, sans pour autant être permanents. Nous savons aussi que tout groupe procède à des expulsions d’individus comme forme de punition – ce qui veut bien dire l’importance du groupe pour la survie. Et nous avons enfin que dans le contact entre les clans, les tribus, il s’agit de savoir ce qui est aux uns et ce qui est aux autres. Il y a de la souveraineté quand il y a de l’altérité et nous voyons apparaître un principe de communauté et un principe de distinction entre différentes communautés. On peut même dire que la souveraineté découle de l’altérité. De ce point de vue, quand j’entends des collègues qui veulent me faire une critique de la souveraineté en me disant que celle-ci implique l’homogénéité, j’avoue que je suis sidéré par ce contre-sens. Si il y a ce besoin de souveraineté, c’est justement parce que nous devons vivre avec nos différences. Si nous étions une communauté d’individus entièrement homogènes, la souveraineté ne serait pas nécessaire car nous penserions spontanément les mêmes solutions aux problèmes que nous rencontrons. Dès lors, l’action de chaque individu serait la même que l’action collective, et le conflit aurait disparu. La nécessité de trouver une solution, ne serait-ce que provisoire, au conflit n’existerait plus. Il n’y aurait donc plus ni institution ni formes de médiation. Dans cet univers on peut effectivement se défaire du concept de souveraineté.

Nécessaires médiations et souveraineté

Il faut donc revenir sur la médiation des intérêts divergents au sein d’une société, d’un Etat, d’une nation. Une manière de voir les choses consiste à dire que c’est le marché qui fait cette médiation entre les intérêts. Mais, l’affirmation de la traduction socialement harmonieuse des désirs privés n’est en réalité rien d’autre chez Adam Smith qu’un postulat métaphysique qui n’ose pas dire son nom. Il reprend, en en modifiant le sens, les thèses des jansénistes dont il tire, par un long cheminement des sources que décrypte admirablement Jean-Claude Perrot[6], une métaphysique de l’ordre harmonieux. Ainsi, l’image de Dieu perdure pour hanter certains hommes. L’économie politique classique se révèle comme une construction profondément métaphysique à la fois quant à la nature humaine et quant aux modes d’interaction. Cette image de Dieu prend alors deux formes distinctes dans la pensée économique : elle induit le modèle déterministe et mécaniste de l’École de Lausanne (Walras et Pareto) et sa forme moderne du modèle Arrow-Debreu. Les édits divins nous sont ainsi proclamés lisibles par les succès ou les échecs des acteurs. Cette lisibilité justifie alors l’hypothèse d’information parfaite et complète. On mesure les fondements métaphysiques de la pensée libérale, ou du moins néo-classique, fondement d’autant plus redoutables qu’ils ne se donnent pas comme tels et qu’il prétendent se présenter comme autant de vérités « objectives ».

Au contraire, nous devons penser non pas la traduction harmonieuse de ces intérêts mais le conflit, la revendication, la lutte gréviste, qui conduisent à des formes particulières de médiation. Il faut donc reprendre la question de la construction des institutions, et l’on va y retrouver la souveraineté. En effet, l’extension des domaines de souveraineté a été la forme prise par les luttes sociales qui, au fil du temps, ont construit les institutions. Telle est la leçon qu’il faut tirer de l’ouvrage classique de François Guizot sur la « civilisation européenne »[7]. Ses implications n’en n’ont pas été d’ailleurs pas toujours pleinement comprises. Ce que Guizot affirme, c’est non seulement la nécessité de la lutte comme principe d’engendrement des institutions, mais aussi un lien circulaire, ou plus précisément en spirale, où l’on repasse régulièrement au même point mais pas à la même hauteur, entre une institution de souveraineté, la commune bourgeoise par exemple, et le principe de la lutte des classes. En d’autres termes, il n’est de possibilité d’expression de ses intérêts quepar la conquête d’espaces de souveraineté. Mais, celle-ci implique alors l’action collective. C’est pourquoi les différentes formes d’organisations, ligues, associations, syndicats, sont non seulement légitimes mais encore absolument nécessaires au fonctionnement d’une société hétérogène. L’existence d’un intérêt commun n’efface pas ces conflits, mais doit s’enraciner dans la compatibilité de leurs modes de gestion. Cependant, une fois ces espaces acquis, ils ont tendance à influencer largement sur les représentations de ceux qui y vivent.

La « gauche » et la souveraineté

On constate ainsi que la notion se souveraineté ne se laisse pas enfermer dans les catégories de « gauche » ou de « droite ». Non que ces catégories ne soient nécessaires au débat. Mais elles recouvrent justement des appréciations divergentes sur ce qu’est le « bien commun », appréciations qui ne sont possibles que dans une société, une Nation, un Etat, souverain. Dès lors, on comprend pourquoi l’idée d’une souveraineté « de gauche » ou d’une sortie « de gauche » de l’Euro sont de dangereuses fadaises. Une porte est ouverte ou fermée et, en un sens, peu importe quelle main se pose sur la porte pour l’ouvrir ou la fermer. Par contre, une fois la porte ouverte, la question de la direction que l’on prendra se pose, et c’est là que les différences entre « gauche » et « droite » reprendront tout leur sens. Cela a déjà été dit : s’enfermer au nom d’une pureté imaginaire dans un discours sur un éventuel « Brexit de gauche » ou une « sortie de l’Euro de gauche » n’a de sens que si, en réalité, on se refuse à l’un ou à l’autre. C’est un choix que l’on peut faire, mais il implique alors d’avoir la cohérence d’en accepter les conséquences. C’est ce que j’ai dit en 2013 dans une interview au « Canard Forgeron »[8]. L’incohérence se paye toujours au prix fort. Le dirigeant du Parti travailliste, Jeremy Corbyn, est en train d’en faire l’amère expérience.

[1] Chris Hanretty, Most Labour MPs represent a constituency that voted Leave

https://medium.com/@chrishanretty/most-labour-mps-represent-a-constituency-that-voted-leave-36f13210f5c6#.c4e2o8bnl

[2] Godelier, M., « Quelles cultures pour quels primates, définition faible ou définition forte de la culture ? », in Ducros A., Ducros J. & F. Joulian, La culture est-elle naturelle ? Histoire, épistémologie etapplications récentes du concept de culture, Paris, Errance, 1998, p. 217-222.

[3] Picq P., « L’humain à l’aube de l’humanité » in Serres, M. P. Picq, J-D. Vincent, Qu’est-ce que l’Humain, op.cit., p. 64.

[4] M. Godelier, Métamorphoses de la Parenté, Paris, Fayard, 2004.

[5] Grapard U. et Hewitson G., ‪Robinson Crusoe’s Economic Man: A Construction and Deconstruction , Londres, Routledge, 2012.

[6] J-C Perrot, « La Main invisible et le Dieu caché » in J-C Galley, ed., Différences, valeurs, hiérachie. Textes offerts à Louis Dumont, Éditions de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, Paris, 1984, pp. 157-181.

[7] F. Guizot, Histoire de la civilisation en Europe, rééd. du texte de 1828 avec une présentation de P. Rosanvallon, Paris, Hachette, coll. « Pluriel », 1985, p. 182-184.

[8] On trouvera la vidéo ici : https://www.youtube.com/watch?v=mMD5CZSE6JA

Source : Russeurope, Jacques Sapir, 04-07-2016

Source: http://www.les-crises.fr/la-fin-de-leuropeisme-par-jacques-sapir/


Oubliez le Brexit, le vrai risque pour l’UE pourrait venir d’Italie… Par Romaric Godin

Monday 11 July 2016 at 01:34

Oubliez le Brexit, le vrai risque pour l’UE pourrait venir d’Italie…

Source : La Tribune, Romaric Godin,  

Matteo Renzi a fait un tel vide autour de lui au sein de son propre parti, le Parti démocratique, qu'il sera impossible de le remplacer par un autre homme à la présidence du Conseil. (Crédits : Reuters)

Matteo Renzi a fait un tel vide autour de lui au sein de son propre parti, le Parti démocratique, qu’il sera impossible de le remplacer par un autre homme à la présidence du Conseil. (Crédits : Reuters)

Matteo Renzi doit faire face à deux crises : le besoin de capitaux des banques et un référendum à haut risque en octobre sur ses réformes constitutionnelles. Sa position est très fragile sur les deux fronts qui sont un défi pour l’UE.

Le Brexit n’est peut-être pas le seul défi de grande ampleur auquel l’Union européenne va devoir faire face cette année. En octobre – la date exacte n’est pas encore fixée – les Italiens seront appelés aux urnes pour se prononcer par référendum sur la réforme constitutionnelle proposée par Matteo Renzi. Un vote crucial, car le président du Conseil en a fait un véritable vote de confiance de la population envers son action. C’est un point important, car il convient de rappeler que l’ancien maire de Florence est arrivé au pouvoir en décembre 2013 à la suite d’un « putsch » interne contre le chef de gouvernement d’alors, Enrico Letta. Matteo Renzi n’a jamais été « choisi » par les Italiens. En cas de défaite, il sera difficile pour l’hôte actuel du Palais Chigi, le Matignon italien de faire comme si de rien n’était.

Vers de nouvelles élections ?

Or, Matteo Renzi a fait un tel vide autour de lui au sein de son propre parti, le Parti démocratique, qu’il sera impossible de le remplacer par un autre homme à la présidence du Conseil. Dans ce cas, la dissolution du parlement devrait apparaître comme la seule issue possible. C’est d’ailleurs ce qu’il a indiqué : en cas de « non », il y aura de nouvelles élections législatives qui seront à très haut risque. Les derniers sondages révèlent ainsi que la formation eurosceptique du Mouvement 5 Etoiles (M5S), créée par Beppe Grillo, a pleinement profité de ses deux victoires fracassantes aux municipales de Rome et Turin. Pour la première fois, elle est ainsi donnée en tête des enquêtes avec plus de 30 %. Le sondage réalisé par EMG Acqua pour La7 lui donne 30,7 % des intentions de vote contre 30,2 % au Parti démocratique (PD) de Matteo Renzi. En cas de victoire aux législatives, le M5S risque de secouer l’Union européenne, notamment avec sa promesse de référendum sur le maintien du pays dans l’euro.

Le « non » en tête dans les sondages

Ce scénario est loin d’être impossible. Euromedia a réalisé un sondage sur le référendum constitutionnel. Il indique une forte proportion d’indécis (19,4 % ignorent ce qu’ils voteront ; 17,7 % ignorent s’ils iront voter), mais, pour le moment, le « non » au projet Renzi est en tête avec 54,1 % de ceux qui savent ce qu’ils voteront. Le « non » est en tête depuis la mi-avril et son avance semble se creuser à mesure que les indécis reculent. Bref, Matteo Renzi a de quoi trembler avant ce vote. Lui qui avait voulu faire de ce référendum un plébiscite sur son nom et sur son « action réformatrice » a sans doute, comme David Cameron au Royaume-Uni, un peu préjugé de ses forces. Les municipales de juin ont été un coup de semonce, le référendum pourrait être un coup de grâce.

Le projet de réforme constitutionnelle

Quel est le contenu de cette réforme constitutionnelle ? Elle est fort riche, mais elle tient en une ligne forte. Il s’agit de mettre fin au « bicamérisme parfait », autrement dit à l’égalité des deux chambres, la chambre des députés et le Sénat. Désormais, seule la première assemblée pourra renverser le gouvernement. Comme elle sera élue selon un  système électoral défini par une loi accordant la majorité soit au parti ayant plus de 40 % des voix au second tour, soit ayant gagné un second tour de ballottage, le gouvernement italien devrait être plus stable. Le Sénat sera réduit à une chambre composé de 100 membres (contre 351 aujourd’hui), principalement nommés par les conseils régionaux, et ne sera compétent que pour les réformes constitutionnelles et les lois territoriales.

Ce projet, qui consacre une certaine recentralisation du pouvoir (les compétences des régions sont réduites) a des raisons de mécontenter bien des Italiens, mais l’implication de Matteo Renzi dans la campagne a clairement fait basculer le projet lui-même au second rang. Or, le président du Conseil italien peine de plus en plus à rassembler en dehors de son propre camp qui, par ailleurs, se réduit comme peau de chagrin. C’est la leçon principale des élections municipales de juin : le PD a souffert de cette incapacité de réunir au deuxième tour des majorités. Du coup, dans le cadre d’un plébiscite sur le nom de Matteo Renzi, cette incapacité peut coûter fort cher.

Révolte interne au PD

L’atmosphère commence donc à devenir irrespirable au sein du PD où l’opposition interne à Matteo Renzi relève la tête. Son chef de file, Gianni Cuperlo, a estimé que « l’expérience du premier ministre a échoué ». Et de haranguer le président du conseil : « aujourd’hui, tu es vu comme un ennemi par une partie de la droite, et c’est bien ainsi, mais aussi par une partie de la gauche et, là c’est un drame. Sans changement de stratégie, la gauche va à la défaite ». Ceci est préoccupant pour Matteo Renzi à plus d’un titre. D’abord, parce que le parti, qu’il avait voulu discipliner commence à se diviser et ceci n’augure rien de bon pour la campagne référendaire. Ensuite, parce que, en cas de « non », un renversement de Matteo Renzi n’est pas à exclure. Déjà, ses adversaires évoquent le nom de Dario Franceschini, ministre de la Culture, et un des artisans du « putsch » de Matteo Renzi en 2013, comme éventuel successeur de ce dernier…

L’échec des « réformes »

L’hôte du palais Chigi, coqueluche d’une partie des « réformateurs » européens, est donc dans une position très difficile avec peu de marge de manœuvre. Car, malgré une activité législative intense et un sens inné de la communication, les Italiens ne voient pas d’amélioration notable de leur sort. L’économie italienne est fragile, sa croissance, déjà faible, semble encore s’affaiblir ces derniers mois. Le « Job Acts » tant vanté, jusqu’en France, par Matteo Renzi, a certes permis de réduire le taux de chômage, mais ce dernier demeure supérieur à 11,5 % de la population active, loin des niveaux d’avant-crise et alors même que la précarisation a encore progressé. Globalement, l’Italie reste en queue de peloton de la reprise et n’a pas vraiment profité de son entrée dans l’UE. Les Italiens semblent lassés du discours sur l’avenir radieux grâce aux « réformes », alors qu’ils font des « efforts » depuis cinq ans et que les résultats sont faibles. Le discours triomphant de Matteo Renzi se heurte à une réalité contraire et devient donc inopérant. A l’inverse, le discours de critique de l’Union européenne et de l’euro prend naturellement de l’ampleur.

Le nœud de la crise bancaire

L’ultime étape du drame italien pourrait évidemment être la crise bancaire dont est menacé le pays. Les banques italiennes sont grevées par 360 milliards d’euros de créances douteuses, fruits de la dure récession de 2011-2013 et de la faible reprise qui a suivi. Ceci conduit à un besoin de capitaux de l’ordre de 40 milliards d’euros. Or, nul ne veut prêter aux banques italiennes dans la mesure où ces besoins de capitaux pourraient augmenter en cas de nouveau ralentissement conjoncturel. La plupart des établissements de la Péninsule se dirigent donc vers une inévitable faillite (avec 20 % de pertes, une seule Unicredit serait encore solvable) et, selon les règles de résolution de l’union bancaire, créanciers, actionnaires et déposants seront mis à contribution. Mais en Italie, les créanciers des banques sont souvent des particuliers. En novembre, la restructuration de quatre petites banques avaient produit une levée de boucliers après le suicide d’un épargnant retraité. Matteo Renzi ne peut à aucun prix se lancer dans une telle opération, cela scellerait la fin de sa carrière politique.

La faible marge de manœuvre de Matteo Renzi

Aussi négocie-t-il le droit d’aider directement les banques par un soutien étatique, ce qui est désormais absolument prohibé en zone euro. Au niveau européen, et particulièrement en Allemagne, on refuse cette option qui réduirait à néant toute crédibilité d’une union bancaire déjà bien fragile. Surtout, une telle aide conduirait à une augmentation de la dette italienne, déjà à 132,7 % du PIB et conduirait à réclamer de nouvelles coupes budgétaires à l’Italie. Bref, Matteo Renzi ne dispose non seulement pas de réelles solutions, mais toutes les solutions qui se présentent semblent mauvaises et destinées à l’affaiblir. Car, sans assainissement du système bancaire italien, la croissance ne repartira pas, car la distribution de crédit restera toujours trop faible.

Dans ce labyrinthe, l’avenir politique de Matteo Renzi s’annonce très sombre. Pour reprendre la main, osera-t-il défier l’UE et l’Allemagne en imposant une recapitalisation étatique des banques en dépit des règles européennes ? Osera-t-il aussi, lors du conseil européen de septembre à Bratislava défendre contre Berlin une réforme de la zone euro allant vers davantage de solidarité ? Et cela suffira-t-il ? Rien n’est moins sûr.

Les deux crises à venir

En tout cas, dix jours après le Brexit, l’Italie est en passe de devenir un problème majeur pour l’Union européenne qui va devoir faire face à deux crises majeures qu’elle a contribué à former. La première a déjà commencé avec l’effondrement des titres bancaires en Bourse après le Brexit, c’est celle de l’union bancaire qui n’est depuis le début qu’une construction bancale, fruit d’un compromis laborieux avec l’Allemagne qui n’a jamais pris en compte la réalité italienne.

La deuxième crise à venir est celle de l’émergence d’un gouvernement eurosceptique en Italie, désormais clairement possible. Là encore, la violence du traitement de ce pays par l’Union européenne n’est pas étrangère à ce risque. Depuis le renversement du gouvernement Berlusconi en 2011 sous la pression de la BCE jusqu’aux politiques toujours renouvelées de « réformes » source d’une récession sévère et peu concluantes sous les applaudissements européens, l’UE a souvent joué le mauvais rôle pour les Italiens. Que l’on se souvienne de l’écart entre les louanges de Mario Monti avant les élections de février 2013 et le résultat du parti de ce président du conseil (8,30 %). Cette incompréhension devait déboucher sur une révolte à moins d’un changement de cap. Matteo Renzi a tenté une voie moyenne, mais il a échoué. Les Italiens sont donc désormais tentés par d’autres alternatives. Le Brexit pourrait donc n’être qu’un amuse-gueule, car l’Italie, troisième économie de la zone euro, est un gros morceau avec sa dette de 2.300 milliards d’euros…

Source : La Tribune, Romaric Godin,  

======================================

Italie, la crise qui vient, par Jacques Sapir

Source : Russeurope, Jacques Sapir, 08-07-2016

La situation des banques italiennes est aujourd’hui critique. Le dossier de leur recapitalisation occupera une bonne partie de cet été. Il met en cause directement les règles de l’Union bancaire, qui est entrée en vigueur au 1er janvier 2016. L’impossibilité pour le gouvernement italien de respecter les règles de l’Union bancaire met en lumière les dysfonctionnements toujours plus importants de la zone Euro.

La part des prêts dits « non-performants » dans le bilan des banques atteint désormais près de 18%, d’après une étude du FMI[1]. En dehors de la Grèce, où ce taux atteint plus de 34%, c’est le taux le plus élevé de la zone Euro. Le Portugal suit d’ailleurs ce mouvement, mais à un niveau bien moindre, puisque le pourcentage des mauvaises dettes n’est « que » de 12%. En montant, on estime le volume total des encours à 360-400 milliards d’euros, dont 70 à 100 milliards devront être couverts, soit par l’Etat, soit par d’autres mécanismes.

Tableau 1

Part des prêts « non-performants » dans les bilans bancaires

A-01-Bad-loans-1

Il faut ici noter que le mouvement de la part des « mauvaises dettes » peut être lié à des causes très diverses. En Irlande et en Espagne, c’était une spéculation immobilière qui avait provoqué ce mouvement. Rien de tel dans le cas de l’Italie, et c’est ce qui rend la progression des mauvaises dettes bien plus inquiétantes. Ces dernières sont issues des prêts qui ont été consentis par les banques régionales italiennes aux PME de la péninsule. En réalité, c’est bien la stagnation économique de ces dernières années qui est la cause de cette crise bancaire qui arrive aujourd’hui en Italie.

L’évolution des données macroéconomiques de l’économie italienne montre l’ampleur de cette crise, et surtout montre que sa cause est clairement l’introduction de l’Euro. Si on calcule les évolutions de l’économie italienne depuis 1990, soit en prenant en compte la décennie ayant précédée l’introduction de l’Euro, les évolutions sont très marquées et très importantes.

Tableau 2

Evolution du PIB, de l’investissement et de l’épargne en Italie depuis 1990

 

Source : données du FMI, World Economic Report Database, avril 2016

Source : données du FMI, World Economic Report Database, avril 2016

La croissance du Produit Intérieur Brut, qui était relativement forte dans la décennie 1990-2000 est désastreuse dans les années qui suivent l’introduction de l’euro. L’Italie n’a d’ailleurs toujours pas retrouvé son niveau de PIB d’avant la crise de 2007. En fait, le PIB de 2015 se situe à un indice 116% par rapport à 1990 alors qu’il avait atteint l’indice 127% en 2007. Si l’Italie avait pu poursuivre sa croissance au rythme des années 1993-1999, elle serait, en 2015, à un indice 2015. Autrement dit, l’euro a coûté 34% en niveau de PIB en 2015. En PIB par habitant, ce qui constitue une grandeur plus conforme à l’évolution de la richesse de la population, et en supposant la répartition interne de cette même richesse inchangée, l’indice n’est que de 108% par rapport à 1990. Autrement dit, en 25 ans la croissance par tête n’a été que de 8%.

Mais, l’évolution de l’investissement (tant public que privé) est encore plus inquiétante. La chute brutale de l’investissement du début des années 1990, chute qui était nécessaire pour réduire l’ampleur du déficit budgétaire a été corrigée par la suite, et l’investissement est monté à un indice 125 en 2007. Mais, depuis, il n’a cessé de baisser et il est à un indice 87. Autrement dit, l’Italie investit 13% de moins en 2015 que ce qu’elle investissait en 1990. On ne doit alors pas s’étonner si la productivité du travail régresse dans ce pays et si la qualité des infrastructures publiques, qu’elles soient nationales ou municipales, se dégrade très rapidement à l’heure actuelle.

 

Cette situation de crise économique générale se traduit donc, dans les bilans bancaires, par la montée des « mauvaises dettes ». Mais, ici, se pose le problème des règles imposées par l’union bancaire. Cette dernière impose que les banques soient recapitalisées par leurs actionnaires et par les déposants. Mais, sont considérés comme actionnaires les ménages ayant acheté des titres de dettes de ces banques. Or, ces ménages ont acheté ces titres dans une situation ou le risque de faillite des banques était largement compensé par la possibilité d’un « bail-out » par l’Etat italien. Ces ménages sont, dans une large mesure des retraités et des personnes modestes. Ils sont maintenant pris au piège par les nouvelles règles de l’union bancaire qui imposent un « bail-in » autrement dit qui font porter l’essentiel du risque bancaire sur les actionnaires et les clients. Une première recapitalisation des banques, qui a eu lieu en novembre 2015, c’est traduite par une spoliation d’une partie de ces épargnant.

Le gouvernement italien, fragilisé par le résultat des dernières élections municipales du mois de juin 2016 – élections qui ont vu le succès du M5S à Rome et à Turin – n’a nullement envi de provoquer une crise sociale gravissime dans l’année qui vient. C’est pourquoi, il cherche à imposer aux autorités européennes un « bail-out », c’est-à-dire une socialisation des pertes. Mais, sur ce point, il se heurte au refus de l’Allemagne. Ce refus n’est pas seulement dicté par des considérations financières, mais surtout parce qu’il signifierait l’échec de l’union bancaire, et ce moins d’un an après son entrée en vigueur. Dans le bras de fer qui oppose le gouvernement italien et le gouvernement allemand, il n’y aura que des perdants.

Si l’Allemagne impose sa vision, le choc social de la crise bancaire mettra l’Italie à feu et à sang, et provoquera un effondrement des partis traditionnels (PD de centre gauche et Forza Italia de centre droit) qui sont de plus rattrapé par de nombreux cas de collusion et de corruption avec les dirigeants des banques. Si le gouvernement italien passe outre à l’opposition allemande et se décide à opter pour un « bail-out », l’ampleur des sommes à engager (au minimum 70 milliards d’euros, soit 4,4% du PIB) entraînera une hausse brutale du déficit budgétaire et réduira à zéro la crédibilité des institutions de la zone Euro.

Tableau 3

Etat des finances publiques en Italie

Souce : Idem, tableau 2.

Souce : Idem, tableau 2.

La crise bancaire italienne occupera certainement une bonne partie de l’été et de l’automne. Or, il faut savoir que cette crise va se dérouler alors que la situation de la Deutsch Bank en Allemagne est des plus préoccupante, et que les recettes budgétaires de la Grèce sont en voie d’effondrement, avec en particulier une chute moyenne de 20% des recettes de la TVA, en raison de la « grève de l’impôt » qui se développe désormais dans ce pays.

Tout se paye, un jour ou l’autre. Ayant refusé le principe de solidarité dans la zone Euro l’Allemagne a imposé sa vision des règles ; mais, elle se rend compte aujourd’hui que cette vision est intenable pour les pays de l’Europe du Sud. Elle est donc coincée entre la poursuite suicidaire d’une politique qui ne marche pas et la reconnaissance de ses erreurs passées. Ce qui rend le problème d’autant plus grave est que le poids de l’Italie est bien plus considérable que celui de la Grèce. Tout le monde comprend qu’une sortie de l’Italie de l’Euro sera l’acte de décès de la monnaie unique. La crise grec de l’été 2015 n’a été que le hors d’œuvre ; la crise italienne sera LA crise de la zone Euro.

[1] IMF Financial Soundness Indicators Database

Source : Russeurope, Jacques Sapir, 08-07-2016

Source: http://www.les-crises.fr/oubliez-le-brexit-le-vrai-risque-pour-lue-pourrait-venir-ditalie-par-romaric-godin/


Hillary Clinton, un faucon ? Par Michael Brenner

Monday 11 July 2016 at 00:45

Source : Consortiumnews.com, le 17/06/2016

Le 17 juin 2016

Les faucons du département d’État et les néoconservateurs en poste à Washington ont très envie qu’Hillary soit présidente. Ils espèrent ainsi pouvoir déployer plus librement les forces américaines autour du monde, mais, selon Michael Brenner, l’avenir n’est peut-être pas si simple.

Par Michael Brenner

Hillary est-elle une va-t-en-guerre ? Eh bien, ses antécédents nous montrent que c’est certainement un faucon, quelqu’un qui croit fortement à l’utilité des forces armées et qui est prête à les utiliser.

De nombreux éléments pourraient donc nous faire pencher pour une réponse affirmative. Son action en tant que secrétaire d’État tout comme ses discours et ses déclarations de candidate donnent l’image d’une présidente présomptive qui voit dans le monde une menace inquiétante, qui est persuadée que, sur le globe tout entier, on s’en prend aux intérêts américains fondamentaux, qui préconise, avec conviction, l’intervention préventive comme en Syrie et en Libye aussi bien que l’intervention préemptive et défensive, qui tient énormément à garder des rivaux présumés comme la Chine ou la Russie dans une position de subordonné.

La candidate démocrate à la présidence, Hillary Clinton.

La candidate démocrate à la présidence, Hillary Clinton.

Toutes ces attitudes la distinguent très nettement de Barack Obama. Et en effet, au début de sa campagne, elle s’obstinait à critiquer la Maison-Blanche pour sa politique ouvertement modérée vis à vis de Bachar el-Assad, Vladimir Poutine et Xi Jinping. Et elle n’a changé de discours que lorsqu’en face des succès inattendus de Sanders, il est devenu évident qu’elle devait avaliser le bilan du président.

Les critiques spécifiques qu’adressent à Hillary Rodham Clinton (HRC) ceux qui la trouvent trop va-t-en-guerre sont bien connues. Ainsi elle a voté en faveur de la guerre en Irak, elle a soutenu avec enthousiasme la Guerre mondiale contre le Terrorisme sous toutes ses facettes, elle a collaboré avec le groupe mené par Robert Gates pour pousser le président à intensifier l’escalade en Afghanistan, elle a préconisé une action directe en Libye pour renverser Mouammar Kadhafi et en Syrie pour détrôner Assad, elle s’est montrée acharnée dans sa volonté de confiner l’Iran, même après l’accord nucléaire, elle a traité Poutine de « Hitler » après la prise de la Crimée par la Russie.

Dans son important discours sur la politique étrangère prononcé devant le Conseil des relations étrangères, elle donne encore l’impression d’être une jusqu’au-boutiste radicale surtout en ce qui concerne l’équilibre des forces. En outre, son soutien sans nuances au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou ne laisse aucune place aux réalistes, qui eux s’inquiètent de voir les États-Unis s’infliger un préjudice inutile en appuyant sans réserve tout ce que fait Israël.

Louée par les néoconservateurs

Ce n’est pas un hasard si Robert Kagan et d’autres sommités néoconservatrices la couvrent de louanges, eux qui la voient comme une présidente acquise à leur conception audacieuse et virile de la politique étrangère américaine. Un certain nombre de personnes qui ont travaillé avec Hillary Clinton au secrétariat d’État et/ou sont maintenant ses principaux conseillers font partie de ce regroupement de néoconservateurs et d’interventionnistes libéraux très zélés, qui ont très fortement incité à l’intervention en Libye, comme Samantha Power, Ann-Marie Slaughter et Susan Rice, et qui maintenant poussent à aider les Saoudiens et le Conseil de coopération du Golfe au Yémen et à attaquer la Syrie.

L'intellectuel conservateur Robert Kagan. (Photo credit: Mariusz Kubik, http://www.mariuszkubik.pl)

L’intellectuel conservateur Robert Kagan. (Photo credit: Mariusz Kubik, http://www.mariuszkubik.pl)

L’exemple le plus frappant, c’est Victoria Nuland, la porte-parole d’Hillary Clinton au secrétariat d’État, maintenant secrétaire adjointe d’État pour l’Europe, qui a mené avec beaucoup d’enthousiasme la croisade anti russe. Elle avait été auparavant la vice-conseillère en politique étrangère du vice-président Dick Cheney.

Victoria Nuland a été introduite dans l’administration Obama par Strobe Talbot qui l’avait sous ses ordres à l’Institut Brookings et dont elle était la protégée. Talbot lui-même, qui avait été vice-secrétaire d’État pendant le second mandat de Bill Clinton, avait, peu à peu, rejoint la ligne la plus belliqueuse de l’establishment de la politique étrangère. L’affiliation à Brookings d’un important néoconservateur comme Robert Kagan, le mari de Victoria Nuland, peut avoir aidé à ratifier l’accord.

Certains des défenseurs d’Hillary Clinton soutiennent qu’il faut considérer ses vues va-t-en-guerre dans un contexte politique. Ses ambitions présidentielles, expliquent-ils, l’ont forcée à trouver une façon de surmonter ses handicaps au sujet de la sécurité nationale en tant que présumée libérale. En effet, d’abord elle est censée faire partie de la dynastie Clinton qui encourageait à bâtir des ponts de coopération en politique étrangère, c’est, du moins, la façon dont cela était perçu par ses critiques républicains, et ensuite c’est une femme.

Ella a été obligée d’agir ainsi après le 11-Septembre. Ainsi l’a-t-on vue se démener en choisissant son camp lors des votes ou en prononçant des discours pour avoir l’air d’un faucon. C’est là aussi la raison de son amitié très médiatisée avec John McCain, qui s’est affichée lors des voyages tous frais payés des sénateurs dans des endroits exotiques aux noms étranges où, comme le rapportent les journalistes, elle s’est montrée l’égale de son mâle collègue en sifflant de nombreuses vodkas.

On doit garder à l’esprit que la politique étrangère n’a jamais beaucoup intéressé Hillary Clinton. Et très certainement pas la sécurité nationale. Ce qui l’intéressait, c’étaient les problèmes intérieurs qu’elle connaissait bien. Elle ne s’est penchée sur les questions de politique étrangère qu’en 2008 lorsqu’elle a décidé de se présenter à la primaire démocrate.

Conviction ou pragmatisme ?

On peut raisonnablement inférer que ce qui a commencé comme un exercice de pragmatisme politique s’est transformé en vraie conviction. Aucun élément ne vient attester qu’HRC ait élaboré une stratégie exhaustive sur le rôle des États-Unis dans le monde, encore moins une théorie sur ce que doivent être les affaires internationales.

La secrétaire d'État adjointe pour les affaires européennes et eurasiennes, Victoria Nuland, pendant une conférence de presse à l'ambassade de Kiev en Ukraine, le 7 février 2014. (U.S. State Department photo)

La secrétaire d’État adjointe pour les affaires européennes et eurasiennes, Victoria Nuland, pendant une conférence de presse à l’ambassade de Kiev en Ukraine, le 7 février 2014. (U.S. State Department photo)

En même temps, cependant, il y a de fortes raisons de croire que la dureté de ses discours et de ses propositions politiques expriment, effectivement, ses opinions, aussi nébuleuses soient elles. Ses quelques propositions concrètes sont mal conçues et irréalistes, comme, par exemple, l’idée de mettre en œuvre « une zone de sécurité » dans le nord de la Syrie. Tout ce à quoi cette mesure aboutirait serait de créer une base protégée pour al-Qaïda et al-Nosra et leurs associés salafistes, tout en comportant le risque élevé d’un clash avec les forces russes qui opèrent dans cette zone.

Est-ce que cela signifie qu’après son élection, Hillary Clinton aurait l’intention de déployer des troupes en Syrie ? Qu’on intensifierait les efforts contre l’EI ? Qu’on enverrait en Libye des forces conduites par les Américains ? Qu’on provoquerait toujours plus la Russie en Europe de l’est, en invitant, par exemple, l’Ukraine à rejoindre l’OTAN comme le lui avait déjà proposé George W. Bush ?

Il est un peu tôt pour répondre à ces questions par l’affirmative. Les discours chauvinistes, ce n’est pas difficile de les tenir quand on n’est pas au pouvoir. Quand on est celui qui doit prendre les décisions à propos des déploiements de l’armée et s’attendre à en gérer les conséquences imprévisibles, alors là on agit toujours avec une certaine prudence.

Il est plus probable qu’Hillary Clinton ait à faire face à une guerre qu’elle n’avait pas prévue plutôt qu’elle ne se mette à en engager une de façon calculée, et ce pour un certain nombre de raisons. D’abord, il n’y a pas d’endroits où intervenir massivement avec des troupes au sol, pas d’Irak bien tentant, comme en 2003. L’Iran est en haut de la liste des priorités des néoconservateurs, mais avec l’accord nucléaire, il n’y a plus de justification. L’Irak, de nouveau, et la Syrie sont aussi des candidats théoriques. Qui, cependant, est l’ennemi et quel serait la cible d’une telle intervention ?

L’EI, évidemment, mais maintenant il est confiné et perd de plus en plus d’influence. Des troupes américaines au sol amèneraient simplement une guérilla dont on ne verrait pas la fin. Quant à al-Qaïda et al-Nosra en Syrie, on ne les considère pas comme des ennemis, mais bien plutôt comme des alliés tacites à l’intérieur du camp « modéré ».

Il y a Assad. Avec des troupes russes au sol, cependant, et sans consensus occidental ou sans perspective de permettre la mise en œuvre d’une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies, une invasion pour remplacer le parti Baas par des salafistes de l’EI ou/et al-Qaïda n’aurait pas de sens, même avec l’agitation des Kagan et de Samantha Power. En outre, c’est une tâche dont, contrairement à la CIA, ne veulent pas les pontes du Pentagone. Après tout, beaucoup de sang a été versé et beaucoup d’argent a été dépensé pour immuniser l’Afghanistan contre une présence terroriste beaucoup moins importante que celle qui règne maintenant en Syrie — et pour rien du tout !

La Libye est le seul endroit où l’on pourrait envoyer des troupes en nombre important. L’argumentation pour agir ainsi nous ramènerait à un Afghanistan bis. Pourtant, en l’absence d’un événement comme le 11-Septembre, il serait difficile de faire accepter une telle décision au peuple américain.

Les risques de guerre par erreur de calcul sont plus élevés. Barack Obama lègue à son successeur un pays bloqué dans un champ de mines au Moyen-Orient, sans ami ni GPS diplomatiques. Hillary, bien sûr, porte une grande part de responsabilité dans la création de cette topographie incertaine et pour la prédominance d’habitudes hyperactives dans la politique américaine, une combinaison qui peut s’avérer fatale.

D’abord, maintenir un état de tension élevée avec l’Iran peut favoriser des incidents dans le Golfe persique. En outre, les troupes américaines et iraniennes se mêlent en Irak comme l’eau et l’huile. Il n’est donc pas tout à fait exclu qu’on voie des incidents relativement mineurs dégénérer en des combats sérieux, attisés par les fanatiques des deux côtés.

Jouer avec les allumettes en Ukraine

C’est en Ukraine que se situe l’autre foyer de conflit. Là, la belle histoire de la Russie méchant agresseur qui veut à tout prix récupérer son empire d’Europe de l’est a conduit, de la part de Washington, via l’OTAN, à une série de décisions militaires provocatrices, qui sont en train de susciter une nouvelle Guerre froide. La force des ultra-nationalistes de Kiev, encouragés par leurs soutiens dans l’administration Obama et la farouche rhétorique des commandants militaires américains, ont empêché une résolution du conflit en Ukraine de l’est grâce à l’accord Minsk II.

Le président russe Vladimir Poutine s'adresse à la foule le 9 mai 2014, lors de la célébration du 69ème anniversaire de la victoire sur l'Allemagne nazie et le 70ème anniversaire de la libération du port criméen de Sébastopol tenu par les nazis. (Photo du gouvernement russe)

Le président russe Vladimir Poutine s’adresse à la foule le 9 mai 2014, lors de la célébration du 69ème anniversaire de la victoire sur l’Allemagne nazie et le 70ème anniversaire de la libération du port criméen de Sébastopol tenu par les nazis. (Photo du gouvernement russe)

La paranoïa déferle sur les États baltes et la Pologne, de nouveau avec la connivence active du « parti de la guerre » de Washington dont Hillary Clinton est un membre fondateur. Même si l’on peut être certain qu’elle n’a pas réfléchi aux implications de cette décision et, en passant, qu’on peut être rassuré par la retenue de Poutine, le manque de prudence qui se manifeste là rend cette situation infiniment dangereuse.

Puis, il y a le facteur Bill. C’est le joker du jeu de cartes. On sait qu’Hillary a l’habitude de le consulter sur toutes les questions d’importance. Il est son confident polyvalent. Il va de soi qu’il sera une sorte d’éminence grise à la Maison-Blanche. Alors la question principale est de savoir quel rôle il va jouer et quels conseils il va donner. Il y a de bonnes raisons pour croire qu’il va tempérer les tendances va-t-en-guerre de sa femme.

Après tout, ce dont Bill Clinton a plus envie que tout à ce moment de sa vie, c’est de retourner à la Maison-Blanche où il pourra déambuler à loisir et murmurer à l’oreille de sa femme. Il savoure cette position unique dans l’histoire, il savoure le fait d’être l’objet de l’attention. C’est le statut qui compte, pas ce que l’on fait.

En tout cas, il a quelques convictions au sujet des problèmes de politique étrangère les plus importants. Ainsi son instinct lui dira d’éviter les coups de téléphone à 3 heures du matin, les crises graves et les risques qu’elles comportent. Les actes aventureux qui exigent du courage et de la force d’âme n’ont jamais été son point fort. Comme Barack Obama, ce n’est pas un héros.

Nous devrions en être reconnaissants.

Source : Consortiumnews.com, le 17/06/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Source: http://www.les-crises.fr/hillary-clinton-un-faucon-par-michael-brenner/