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L’hypothèse d’un “GREXIT”, par Jacques Sapir

Friday 27 February 2015 at 01:32

La possibilité d’une sortie de la Grèce de la zone Euro, qu’elle soit voulue ou qu’elle soit subie, devient de plus en plus vraisemblable d’ici le début du mois de juillet prochain. Le fait que le gouvernement grec et l’Eurogroupe aient pu trouver un accord pour les quatre mois nous séparant de cette date ne change rien à l’affaire. Il faudra poser la question soit de l’annulation d’une partie de la dette, soit de sa transformation (en réalité un moratoire sur près de trente ans). Or, l’on sait que ces deux hypothèses sont également rejetées par l’Allemagne. Il convient donc de regarder un certain nombre de paramètres de la Grèce pour se faire une idée réelle de ce qu’un « GREXIT » signifierait.

La question fiscale

Le premier point concerne la question fiscale. On affirme que la Grèce a vécu « au dessus de ses moyens » et qu’elle doit « payer » pour ses errements passés. En réalité, quand on regarde les recettes publiques on constate d’une part que la situation de la Grèce n’était pas en 1995 différente de celles du Portugal et de l’Espagne, et qu’elle a fait un effort important de 1995 à 2000 arrivant au niveau des Pays-Bas.

Graphique 1
A - FiscaGr1
Source : FMI

Cet effort s’est relâché de 2000 à 2004, mais il a repris par la suite et aujourd’hui la Grèce se trouve avec un même niveau de recettes que l’Allemagne, et un niveau légèrement supérieur au Portugal et aux Pays-Bas, et même très nettement supérieur à celui de l’Espagne. Bien sur, elle reste en-deçà de pays comme l’Italie et la Finlande. Mais rien n’autorise à dire que l’effort fiscal des grecs ne fut pas important, même si on peut penser qu’il est mal réparti et que proportionnellement la partie la plus pauvre de la population paye le plus.

Par contre, les dépenses publiques sont toujours restées très importantes, voire excessive. C’est en partie le problème des JO de 2004, mais pas seulement.

Graphique 2

A - FiscaGR2
Source : FMI

En fait, les dépenses publiques explosent de 2007 à 2009 sous l’influence de trois facteurs : d’une part des mesures anti-crises en 2008, mais aussi (et surtout) des libéralités du gouvernement (conservateur) pour gagner les élections de 2009 (ce qui fut politiquement un échec) et d’autre part la montée des taux d’intérêts qui commencent à créer un « effet Ponzi » de la dette. Alors que la croissance économique se ralentit et que la croissance nominale (croissance du PIB réelle x taux d’inflation) diminue, la hausse des taux, sur un volume élevé de dettes publiques, rend insupportable le poids des intérêts. En fait, ce mécanisme Ponzi (appelé ainsi car il évoque les pyramides financières où les intérêts des premiers déposants sont payés par de nouveaux souscripteurs) explique largement la montée régulière de la dette publique à partir de 2009, et une très large part de l’excès des dépenses publiques.

On sait que la Grèce a atteint un excédent budgétaire primaire (soit hors les remboursements de la dette). Cela veut dire que si la Grèce faisait défaut sur sa dette, estimant que les intérêts payés depuis 2009 ont éteint une grande partie de cette dernière, elle pourrait financer sur ses propres bases ses dépenses publiques. En d’autres termes, si la Grèce fait défaut, et si elle sort de l’Euro, elle n’a plus besoin d’emprunter pour boucler son budget. C’est un premier point qu’il faut avoir à l’esprit quand on parle d’un possible GREXIT. La Banque Centrale de Grèce n’aurait pas à monétiser des sommes importantes, ce qui exclut le risque d’hyperinflation qui est souvent avancé par les adversaires de la solution du Grexit.

Epargne et investissement.

Mais, dira-t-on, la Grèce a besoin d’emprunter pour investir. Elle ne peut se couper des marchés financiers, ce qui arriverait en cas de sortie de la zone Euro. En fait, la chute des investissements a été telle que, depuis 2013, l’épargne interne est supérieure à l’investissement.

Graphique 3

A - InvEpGR
Source : FMI

Si l’on part de l’idée que les recettes fiscales seront égales aux dépenses (et qu’il ne faudra pas emprunter pour couvrir un déficit budgétaire) ce point, bien montré dans le graphique 3 est important. En fait, jusqu’en 1994, l’écart entre les investissements et l’épargne est peu important. Cet écart devient par contre considérable à partir de 1999, très certainement à cause des investissements décidés dans le cadre de la préparation des JO de 2004, mais il continue à croître par la suite. En 2009, le flux d’épargne annule n’est que de 15 milliards alors que les investissements atteignent 37,5 milliards. Aujourd’hui, on est revenu à une situation ou la Grèce exporte son épargne. Ceci est lié à la contraction brutale de l’investissement mais cela signifie AUSSI que la Grèce peut parfaitement vivre « en circuit fermé » d’un point de vue financier. C’est un facteur important quand on cherche à évaluer la possibilité d’un GREXIT.

La question de la balance courante.

On rappelle ici que la balance courante confronte les importations et les exportations de biens et de services. On voit que la situation de la Grèce se caractérise par un léger déficit, le pays exportant environ 20-25% de son PIB. Par contre, par la suite, le déficit de la balance courante se creuse de manière astronomique, en particulier de 2004 à 2007, soit sous le gouvernement conservateur. Cette situation s’explique aussi par l’étouffement des exportations grecques du fait du renchérissement de l’Euro. La Grèce exporte à plus de 60% en dehors de la zone Euro. La hausse de l’Euro que l’on constate alors étrangle les industries et services exportant. La Grèce est, en 2013-2014, revenue à l’équilibre mais au prix d’une contraction dramatique des importations.

Graphique 4

A - BalComGR
Source : FMI

On voit ici qu’une dévaluation de 20% à 30%, rendue possible par une sortie de l’Euro aurait des effets extrêmement positifs sur l’économie1 . L’effet d’accroissement sur le volume du PIB serait important. La Grèce pourrait donc accroître ses importations (en biens d’équipements notamment) sans compromettre l’équilibre de la balance courante.

Ceci confirme donc une analyse intuitive. La Grèce est AUJOURD’HUI bien plus prête à une sortie de l’Euro qu’elle ne l’était en 2009 ou 2010. Une telle sortie, accompagnée d’un défaut sur la dette et d’une dévaluation de 20% à 30% aurait pour effet de dynamiser rapidement et profondément l’économie grecque. Ceci conduirait très certainement à des gains de productivité du travail importants, qui permettrait, dès 2016, des hausses de salaire importante sans compromettre la compétitivité retrouvée de l’économie grecque.

Source : Jacques Sapir, pour son blog RussEurope, le 24 février 2015

  1. Artus P., « Dévaluer en cas de besoin avait beaucoup d’avantages », NATIXIS, Flash-Economie, note n°365/2012, 29 mai 2012

Source: http://www.les-crises.fr/lhypothese-d-un-grexit/


Fin de partie pour Syriza ? Pas si vite…

Friday 27 February 2015 at 00:30

Devant le Parlement à Athènes, le 20 février 2015. REUTERS/Yannis Behrakis.
Devant le Parlement à Athènes, le 20 février 2015

Les commentaires sur l’accord entre la Grèce et l’Eurogroupe ont transformé la défaite provisoire de Syriza en déroute définitive. Il faudra pourtant plusieurs mois pour savoir si c’est vraiment le cas.

Depuis l’arrivée de Syriza au pouvoir en Grèce, deux logiques s’affrontent au sein de la zone euro, sur les plans à la fois économique et politique.

D’un côté, les membres de l’Eurogroupe conditionnent leur soutien financier à une consolidation budgétaire drastique et à des «réformes structurelles» allant dans le sens d’une déréglementation des marchés des biens et du travail. De plus, les autorités européennes affirment que les choix démocratiques d’un peuple ne peuvent pas contrevenir aux traités européens, ni aux exigences des créanciers publics d’un pays. En somme, quels que soient les choix politiques du peuple grec, il lui est dénié la possibilité de rester dans la zone euro et d’y mener des politiques alternatives, sous peine de blocus financier et monétaire.

De l’autre côté, face à ce que l’économiste Cédric Durand et le sociologue Razmig Keucheyan n’ont pas hésité à qualifier de «césarisme bureaucratique», le nouveau gouvernement grec a pour priorité de mettre fin aux conséquences désastreuses de l’austérité qui ravage le pays depuis plusieurs années. Syriza veut éviter de déprimer l’activité par une politique budgétaire trop restrictive et entend réformer son Etat et son économie d’une manière qui ne pénalise pas davantage les citoyens ordinaires. En outre, le parti conteste que la souveraineté nationale puisse être circonvenue par des autorités européennes sans véritable mandat populaire. Autrement dit, son rejet de «l’austérité permanente» cible à la fois sa rationalité économique et sa légitimité démocratique.

La logique du «tout ou rien» nécessite d’être nuancée.

Attendu, le choc entre ces deux logiques s’est bien produit, alimentant le suspense de négociations tendues tout au long du mois de février. Plusieurs économistes, dont Frédéric Lordon, avaient prévenu que le gouvernement Tsipras n’aurait d’autre choix que de se soumettre ou de se démettre, en raison de l’intransigeance prévisible de la position allemande. Et de fait, l’Allemagne, en position de domination géo-économique dans la zone euro, a bien cherché à anéantir tout programme alternatif aux mémorandums imposés par la fameuse Troïka (UE, BCE, FMI) à Athènes.

Cette logique du «tout ou rien» nécessite cependant d’être nuancée.

Premièrement, la position allemande recèle plus de nuances qu’il n’y paraît. La ligne du ministre des Finances Wolfgang Schäuble semble manifestement plus dure que celle d’Angela Merkel ou des sociaux-démocrates de sa coalition, ces derniers hésitant manifestement à assumer le risque énorme que représenterait la fin de «l’irréversibilité» de l’euro.

Deuxièmement, un autre acteur à prendre à compte est justement la Banque centrale européenne, dont l’existence est liée à la zone euro. Malgré son coup de force du 4 février dernier, la perspective d’un démembrement de l’Union économique et monétaire (UEM), fut-il circonscrit, n’est certainement pas dans son intérêt.

Troisièmement, au directoire de la BCE comme dans l’Eurogroupe, les représentants n’ont pas de droit divin, et doivent convaincre de leur ligne les autres Etats membres.

Une défaite relative, un bras de fer à plus long terme

L’accord trouvé samedi 20 février, dont le détail a été bien décrit par Romaric Godin dans La Tribune, semble pourtant donner raison à ceux pour qui la victoire d’un camp et la défaite de l’autre seraient forcément totales. Tandis que des voix, à l’extrême-gauche, ont crié à la trahison de Syriza (qu’elles avaient prophétisée, car elles prophétisent les trahisons de tout gouvernement non révolutionnaire), des journalistes sensibles à la conception allemande de la zone euro n’ont pas manqué non plus de savourer la supposée capitulation du gouvernement grec.

Cette interprétation de l’accord n’est cependant pas la seule possible. Sans partager, faute d’informations et de conviction intime, la thèse d’un savant calcul de Alexis Tsipras et Yanis Varoufakis pour mieux faire exploser le consensus de Bruxelles dans quatre mois, plusieurs observations peuvent être faites.

(1) Le nombre et la nature des concessions faites par Athènes consistent bien en une défaite face à la logique de l’Eurogroupe. Aucune restructuration de la dette n’est envisagée, des impératifs draconiens d’excédents budgétaires s’imposeront à nouveau à partir de 2016 et les réformes souhaitées par Syriza feront toujours l’objet d’une forme de surveillance de ses créditeurs. Wolfgang Schäuble a eu ce qu’il voulait: la poursuite du programme d’aide existant, moyennant quelques aménagements.

(2) Toutefois, un certain nombre de différences avec une extension à l’identique de ce programme sont notables. Le gouvernement grec retrouve une autonomie dans la définition des mesures qu’il souhaite mettre en œuvre pour respecter ses engagements. L’approbation de sa politique par ses créditeurs s’apparente certes à une forme de «souveraineté limitée», mais c’est déjà un progrès. De plus, le pays obtient de respirer pendant quelques mois: il pourra faire face à ses engagements immédiats sans que ses banques se voient couper l’accès au refinancement, et les exigences d’un excédent primaire pour 2015 seront revues à la baisse.

(3) Surtout, chacun des acteurs a «acheté du temps» plutôt que remporté une victoire ou une défaite irréversible. En effet, dans quatre mois, les deux logiques mentionnées plus haut risquent bien de rentrer à nouveau en collision. Or, tout le monde avait besoin d’une trêve de quelques semaines (dont il faudra déjà voir si elle tient jusqu’à la fin de la semaine, Athènes devant présenter son programme d’action mardi).

Les dirigeants de la zone euro souhaitaient en effet ce répit. Ils ont d’ailleurs pris l’habitude, depuis la crise, de repousser sans cesse la résolution des contradictions de l’UEM. Ces compromis imparfaits ne renvoient pas tant à un caractère vélléitaire des élites européennes qu’à une erreur de diagnostic profonde sur les maux de la zone euro.

Se gausser de «l’impréparation» et de «l’arrogance» de Syriza revient à exiger d’un pestiféré de la cour d’école qu’il se rallie sa classe en quelques jours

Le gouvernement grec, plus encore, avait un besoin vital de cette trêve. Il a en effet entamé les négociations avec pour perspective une éventuelle panique bancaire en cas d’échec; pour appui une opinion solidaire, mais toujours acquise à la monnaie unique; pour interlocuteur un Eurogroupe dont aucun des membres n’a véritablement appuyé sa cause; et pour instrument une administration pas forcément favorable, dont il est à la tête depuis un mois à peine. Dans ces conditions, il y a beau jeu de se gausser de «l’impréparation» de Syriza et de se scandaliser de «l’arrogance» de son ministre des Finances, qui n’a pas eu la décence de respecter l’étiquette des réunions européennes. Cela revient un peu à exiger d’un nouveau venu et déjà pestiféré de la cour d’école qu’il se rallie sa classe en quelques jours, tout en lui imposant une nouvelle façon de jouer à la récréation.

Pourquoi l’Allemagne a provisoirement pris le dessus

En résumé, les marges de manœuvre obtenues par Syriza sont minces, tandis que son affrontement  avec la logique de l’austérité permanente n’est pas terminé. Une bataille a été perdue dans un conflit qui se joue en fait à plus long terme. Certains économistes, au premier rang desquels Jacques Sapir, estiment d’ailleurs que la respiration obtenue par Athènes doit maintenant être utilisée par le gouvernement à préparer le pays à une sortie de la zone euro.

S’il semble finalement que Syriza devra bien se démettre brutalement ou se soumettre totalement, sa mise au pas est-elle pour autant certaine? Non, et c’est pourquoi les nuances que nous avons apportées plus haut n’étaient pas vaines. Si l’orientation «ordolibérale» de Berlin domine dans l’Eurogroupe, et si la ligne dure de Schäuble pèse très fortement dans l’orientation de Berlin, les seules règles écrites de la zone euro ne permettent pas de le comprendre.

D’une part, il faut prendre en compte des facteurs internes à l’Allemagne, qui incitent ses représentants à camper sur une position d’intransigeance. Depuis les élections générales de 2013, un parti conservateur anti-euro baptisé AfD a surgi dans le paysage allemand, et sa dynamique et sa capacité de nuisance électorale inquiètent la chancelière. Toute concession aux pays du Sud serait du pain bénit pour cet adversaire.

D’autre part, les dirigeants allemands ont procédé à une neutralisation de tous les adversaires potentiels à sa ligne. Berlin a su s’allier les riches Etats exportateurs du nord de la zone, mais aussi les Etats «périphériques», dont les exécutifs n’ont aucun intérêt à accorder des concessions que réclament des partis oppositionnels de leur propre pays. Enfin, la France et l’Italie sont tenues en respect par l’examen de leurs budgets par la Commission, elle-même obligée de ne pas heurter la première économie de l’UE. Où l’on voit les effets du traité «Merkozy», que François Hollande a renoncé à renégocier à son arrivée au pouvoir…

Au passage, tout ceci signifie que plusieurs des récits construits ces derniers mois n’avaient aucun rapport avec la réalité. Ainsi, «l’offensive rose» du centre-gauche, annoncées après les européennes de 2014, aurait dû venir appuyer les dirigeants de Syriza, repeints en paisibles sociaux-démocrates peu avant les élections de janvier. Cela ne s’est évidemment pas produit.

Ce que ces événements révèlent de la zone euro

De façon plus essentielle, ce diagnostic oblige à reconnaître qu’une politique alternative dans le cadre de la zone euro est devenue quasi impossible, du moins pour les Etats périphériques de cet ensemble. C’est ce que n’ont pas manqué de relever des responsables de l’aile gauche de Syriza, comme Stathis Kouvélakis.

Certains des obstacles dressés devant les espoirs d’un «bon euro» sont déjà connus. Il s’agit de la difficulté de modifier les traités dès lors que l’unanimité des 28 Etats membres est requise, du poids grandissant acquis par les institutions communautaires indépendantes dans le système européen, de la domination allemande dans le rapport de force économique et politique à l’intérieur de l’eurozone.

Mais le bras de fer engagé par Syriza a aussi illustré que le cadre des négociations lui-même pousse à des compromis insatisfaisant et peu durables. En effet, l’accord trouvé le 20 février est typique de ceux qu’a l’habitude de produire le système institutionnel européen. Faute de pouvoir trouver une solution satisfaisante pour tous, mais faute aussi d’assumer l’irréductibilité des logiques qui s’opposent, les acteurs négocient en défendant non pas leurs intérêts positifs, mais leurs intérêts négatifs: ils tracent alors des lignes rouges en tentant de rapprocher ensuite leurs positions respectives.

Le résultat final ne peut donc ni correspondre à la position exacte de quiconque, ni résoudre durablement les problèmes de fond. Alors qu’on passe d’un «sommet de la dernière chance» à un autre, jamais ne sont traitées les véritables contradictions de la zone euro, dont la crise grecque n’est qu’un sous-produit.

De fait, l’utilisation d’une même monnaie par un ensemble de pays aussi hétérogènes, en l’absence d’un puissant mécanisme de transferts des pays riches vers les pays pauvres, entraîne nécessairement la migration des capacités productives des seconds vers les premiers, de l’Europe du Sud vers l’Europe du Nord.

Ce processus, qui s’est déroulé tout au long des années 2000, a été renforcé par la politique de compétitivité menée par l’Allemagne à partir de la fin des années 1990. Le déséquilibre a été provisoirement compensé par une forte baisse des taux d’intérêts dans les pays du Sud de la zone. En contrepartie, une véritable bulle de l’endettement, public comme privé, s’est alors formée.

La Grèce est la pointe avancée de la décomposition d’une union monétaire insoutenable dans son architecture actuelle

A cette crise de désindustrialisation et à cet endettement insoutenable, les autorités européennes ont répondu par des politiques d’austérité et des «réformes structurelles». Comme si, au-delà du  caractère pro-cyclique de ces mesures tant de fois dénoncé, on pouvait créer des usines en se contentant d’abaisser le coût du travail et de diminuer la dépense publique! Sans politique de monnaie faible, sans soutien actif de l’Etat aux entreprises pour l’innovation et la recherche, de tels remèdes aboutissent forcément à une chute de l’investissement et de la productivité.

La Grèce est donc la pointe avancée de la décomposition d’une union monétaire insoutenable dans son architecture actuelle, que les acteurs les plus puissants sont pourtant décidés à conserver, puisqu’elle sert jusqu’à présent leurs intérêts. Du temps est sans cesse acheté, mais en imposant des politiques économiques poussant dangereusement à la déflation. Ce n’est que dans les prochains mois que nous saurons si Syriza se conformera à cette logique, ou s’il finira par s’y dérober.

Source : Fabien Escalona et Nicolas Gonzales, pour Slate, le 24 février 2015.

Fabien Escalona est Enseignant à Sciences Po Grenoble
Nicolas Gonzales est Ancien élève de Sciences Po Grenoble, mémorant à l’EHESS.

Source: http://www.les-crises.fr/fin-de-partie-pour-syriza-pas-si-vite/


[Ségolène pire que la droite anglaise !] Le Sénat a voté le retour des coupures d’eau – avec l’accord de la ministre !

Thursday 26 February 2015 at 06:55

Nous en avions parlé la semaine passée dans ce billet, que je vous suggère de relire.

Eh bien le Sénat a voté le retour du principe des coupures d’eaux en cas de non-paiement, qui avaient été supprimées en 2013.

Rappelons bien que la loi dit qu’on ne peut plus couper l’eau en cas de non-paiement, MAIS que bien sûr on peut (et on ne se gêne pas pour) envoyer les huissiers pour recouvrer l’argent, qui est dû (et/ou on passe au tribunal).

Ce vote n’est pas définitif, mais la cerise sur le gâteau est que Ségolène Royal à donné son accord !

Rappel ! la loi actuelle depuis 2013

Article L115-3 du Code de l’action sociale et des familles

Du 1er novembre de chaque année au 15 mars de l’année suivante, les fournisseurs d’électricité, de chaleur, de gaz ne peuvent procéder, dans une résidence principale, à l’interruption, y compris par résiliation de contrat, pour non-paiement des factures, de la fourniture d’électricité, de chaleur ou de gaz aux personnes ou familles. Les fournisseurs d’électricité peuvent néanmoins procéder à une réduction de puissance, sauf pour les consommateurs mentionnés à l’article L. 337-3 du code de l’énergie. Un décret définit les modalités d’application du présent alinéa. Ces dispositions s’appliquent aux distributeurs d’eau pour la distribution d’eau tout au long de l’année.

Le projet de loi voté au Sénat

L’amendement des 7 sénateurs UMP (MM. CAMBON, REVET, P. LEROY, PIERRE et J. GAUTIER, Mme PROCACCIA et M. de NICOLAY, le premier étant proche du lobby de l’eau, tellement probe…) a été adopté :

La dernière phrase du troisième alinéa de l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles est complétée par les mots : « à la résidence principale de toute personne ou famille mentionnée au premier alinéa du présent article ».

Le fameux premier alinéa indique :

Dans les conditions fixées par la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement, toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, au regard notamment de son patrimoine, de l’insuffisance de ses ressources ou de ses conditions d’existence, a droit à une aide de la collectivité pour disposer de la fourniture d’eau, d’énergie et de services téléphoniques dans son logement.

La loi n° 90-449 du 31 mai 1990 indique :

Toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, en raison notamment de l’inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d’existence, a droit à une aide de la collectivité, dans les conditions fixées par la présente loi, pour accéder à un logement décent et indépendant ou s’y maintenir et pour y disposer de la fourniture d’eau, d’énergie et de services téléphoniques.

L’accord de Ségolène Royal

Magnifique, Ségolène a soutenu cet amendement (c’est le G de Gouvernement) :

Discussion

Si le texte est voté par l’Assemblée (dossier législatif ici), on passera donc d’une interdiction générale à une interdiction pour “toute personne éprouvant des difficultés particulières”.

Finalement, vu rapidement, cela peut sembler très logique – on ne pourra couper l’eau qu’au “mauvais payeur de mauvaise fois qui a plein d’argent” tant fantasmé.

Qui pourrait être contre ça ?

SAUF QUE le diable est évidemment dans l’application.

Car, primo, déjà dans le cadre actuel, beaucoup de compagnies continuaient à couper l’eau, de façon illégale !

ALORS comment diable le fournisseur d’eau pourra-il connaitre la situation de la personne ne payant pas ???

Vous êtes VEOLIA&Co, vous envoyer les factures ce mois ci, vous avez 210 000 impayés. VOus faites quoi exactement ? Vous envoyez 6 000 assistantes sociales pour connaitre la situation des gens ? Si c’est le cas, je veux bien, sinon, eh bien ils couperont l’eau à beaucoup de monde – peu probable que le sans-dents fasse un procès…

Et secundo, ça veut dire quoi “toute personne éprouvant des difficultés particulières” ??? Qui est visé ?

Tous les pauvres qui n’ont pas d’argent ? Sans doute !

Tous les déficients mentaux, Alzheimers, psychotiques et autres ministres, ayant de l’argent, mais ne comprenant pas qu’il faut payer ? Surement aussi !

MAIS ALORS, si j’enlève toutes ces personnes du nombres de clients ne payant pas leur eau, MAIS IL RESTE QUI EXACTEMENT à qui on pourra couper l’eau ?

3 millionnaires anarchistes farceurs à Neuilly ?

Il y en a combien alors des personnes de pure mauvaise foi qui décident volontairement de ne pas payer leur eau alors qu’elles ont de l’argent ? Et qui vont donc se voir poursuivies au tribunal pour non-paiement, et qui vont donc être condamnées très durement (par hypothèse vu qu’elles sont de mauvaise foi !) et qui devront au final payer l’eau + leur avocat + l’avocat de Veolia + les huissiers + les dommages et intérêts + les frais de justice ?? Parce que vu comme ça, c’est pas super rentable leur jeu…

Bref, on est comme d’habitude dans la paralysie de la solution de bon sens (vu le caractère indispensable de l’eau) et pragmatique, au profit de la solution pour combattre une narrative issue de fantasmes… Et donc qui pénéalisera des milliers de pauvres en difficulté qui se verront couper l’eau…

À suivre…

Proposition

D’abord, comme c’est comme ça chez les Anglais, testons donc ainsi pendant 3 ans, et faisons un bilan – avec des vrais statistiques venant des distributeurs d’eau…

Sinon, établissons au moins des critères objectifs, pour mettre dans la cible les 7 à 10 millions de pauvres en France (en fonction des revenus, de l’aide au logement reçue, etc). Mais bon, vu le niveau de revenu médian de la population, je persiste à penser que cela ne sert pas à grand chose…

Les riches qui ne paient pas leur factures, c’est comme les poissons volants : ça existe mais ce n’est pas la majorité de l’espèce :) (Audiard…)

Agir

En attendant, si vous voulez leur écrire pour qu’il ne valide pas la modification du Sénat, je vous donne le mail :

du président de la commission, qui est en plus à l’origine de la modification de 2013 :

des rapporteurs du projet de loi à l’Assemblée :

MAIS, beaucoup plus efficace, je vous conseille un rapide coup de fil rapide à leur secrétariat, via le standard de l’Assemblée : 01 40 63 60 00

La réponse du Sénateur

Comme vous avez été nombreux à répondre à l’appel du blog, le Sénateur Cambon a posté une réponse ici, que je vous donne :

J’ai pris connaissance avec étonnement de votre interprétation de mon amendement. Je me demande si vous avez pris la peine de le lire ! En effet, cet amendement vise au contraire à protéger les personnes les plus modestes : ne risqueront les coupures d’eau les seuls consommateurs de mauvaise foi qui ont les moyens de payer et profitent d’une mauvaise rédaction de la loi. Donc, cet amendement ne concerne évidemment pas les personnes en difficultés ou relevant des dispositifs d’aides sociales pour lesquelles l’interdiction de couper l’eau est valable toute l’année (dispositif du code de l’action sociale et des familles).

Si ceux qui ont les moyens de payer refusent de régler leur facture d’eau, cela aura pour conséquence de renchérir le prix de l’eau pour tout le monde. Ainsi, les locataires de grands ensembles sociaux qui eux, ne reçoivent pas de facture d’eau individuelle, supporteront des charges plus élevées parce que les opérateurs d’eau répercuteront évidemment les pertes sur tous les consommateurs. Donc paradoxalement, cet amendement protège les plus modestes.

Comment aurais-je pu déposer un amendement à l’encontre des personnes en difficultés alors que je suis l’auteur d’une loi, la loi Cambon entrée en vigueur en 2012, qui a permis à plus de 20000 familles par an, soit déjà plus de 60000 familles, de bénéficier d’un dispositif d’aides financières leur permettant de s’acquitter de leurs factures d’eau…

Est-ce que les mauvais payeur qui ont des moyens financiers doivent faire supporter leurs incivilités à tous les citoyens y compris les plus modestes ? Je vous pose la question.

Christian Cambon

Ma réponse :

Merci d’intervenir ici

Oui, bien sûr qu’on l’a lu, il est dans le corps du texte – j’ai même commenté votre exposé.

“ne risqueront les coupures d’eau les seuls consommateurs de mauvaise foi qui ont les moyens de payer ”

Non, ce n’est nullement ce qui est écrit. Vous en dispensez certes les plus pauvres (merci) mais ce n’est pas le cas pour les “moins pauvres” dont beaucoup ont néanmoins des difficultés, comme indiqué dans l’article.

“Si ceux qui ont les moyens de payer refusent de régler leur facture d’eau, cela aura pour conséquence de renchérir le prix de l’eau pour tout le monde.”

Euh, seulement si les entreprises ne lancent pas de contentieux, non ? Et je vois mal pourquoi elles ne le feraient pas…

Je rappelle que, face à de telles personnes de mauvaise foi, elles obtiendront le remboursement total des frais de justice + des dommages et intérêts (très mauvaise affaire pour le “mauvais payeur” donc).

Donc plus de profits pour l’entreprise et plus de PIB au passage pour le pays, n’est ce pas miraculeux le contentieux ?

Je termine par plusieurs billets repris sur le site de http://eau-iledefrance.fr qui a alerté sur ce sujet.

Les sénateurs UMP votent la réintroduction des coupures d’eau avec le soutien du gouvernement contre les sénateurs de Gauche

Ce jeudi 19 février au soir, l’amendement présenté par M. Christian CAMBON afin de rétablir les coupures d’eau a été adopté par un recours au vote public, demandé par l’UMP. C’est donc par un vote des groupes mais dans une salle vide que cet amendement a été retenu par 196 voix pour et 138 contre.

À notre grande surprise, le groupe PS et l’ensemble des partis de gauche ont été désavoués par Madame la Ministre Ségolène Royal qui a soutenu l’amendement. Malgré les décisions de justice et contre l’avis du Ministère public, le gouvernement défend une position au profit des distributeurs d’eau qui se félicitent de cet amendement autorisant leurs pratiques illégales.

Et pourtant, les 500 témoignages reçus depuis maintenant 8 mois et les 4 jugements condamnant des opérateurs de l’eau – Suez, Veolia, Noréade et la SAUR – et les 3 en cours, auraient dû permettre au gouvernement de se rendre compte de la situation des victimes des coupures d’eau. Il est catastrophique de sanctionner des familles en précarité qui se battent pour s’en sortir et qui sont mises à mal par des distributeurs d’eau qui ne pensent qu’à leur équilibre économique et oublient l’essentiel de leur service public : l’accès à l’eau pour tous.

Une réalité fantasmée au service des puissants !

L’argumentaire du Sénateur Cambon est le même que celui des multinationales de l’eau qui n’appliquent pas la loi : la fin des coupures d’eau entraînerait une explosion des impayés qui mettrait en danger le service public. Sur quelle base peuvent-ils soutenir cette position ?

En Angleterre, les coupures d’eau sont interdites et les impayés sont de l’ordre de 3% ce qui est un niveau tout à fait normal. Il doit être mis en rapport avec le niveau de précarité des populations démunies anglaises beaucoup plus nombreuses qu’en France. Le gouvernement anglais de droite a récemment refusé de ré-autoriser les coupures d’eau en motivant que cette pratique était d’une autre époque.

La FNCCR s’est empressée hier soir de publier un communiqué de presse pour se féliciter de l’amendement Cambon tout en notant les dysfonctionnements des pratiques aujourd’hui. Si des dysfonctionnements existent, ils auraient dû être corrigés par la simple application de la loi Brottes. Comment des élus peuvent-ils défendre des pratiques illégales, immorales et inhumaines et se féliciter d’un changement de la loi qui va permettre de continuer les abus dont sont victimes les plus démunis ?

Nous allons continuer notre combat avec le soutien de nombreux députés de Gauche au sein de l’Assemblée nationale pour le rejet de cet amendement quel que soit l’avis du gouvernement. Nous allons continuer nos actions devant les tribunaux pour faire appliquer la loi qui est chaque jour bafouée au nom du profit.

Les mensonges du sénateur Cambon

Retrouvez ci-dessous le débat in extenso concernant l’amendement Cambon au Sénat pour réintroduire les coupures d’eau dans la loi. Il est accompagné d’une désintox permettant de mettre en lumière les erreurs ou les manipulations de certains ainsi que les risques pour les plus démunis en France.

Mme la présidente. – Amendement n°146 rectifié, présenté par MM. Cambon, Revet, P. Leroy, Pierre et J. Gautier, Mme Procaccia et M. de Nicolaÿ.

Après l’article 60

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La dernière phrase du troisième alinéa de l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles est complétée par les mots : « à la résidence principale de toute personne ou famille mentionnée au premier alinéa du présent article ».

M. Christian Cambon. – Voilà un amendement de bon sens : en étendant la trêve hivernale, la loi Brottes a interdit les coupures d’eau pour tous les foyers, qu’ils soient en difficulté ou mauvais payeurs. Ce n’était pas l’intention du législateur. Rectifions cette erreur.

Faux : il ne s’agit pas d’une erreur mais de l’intention d’étendre à toute l’année l’interdiction des coupures d’eau dans le cadre de la loi Dalo de 2007. Les débats parlementaires de l’époque sont clairs. Ce n’est pas parce que les députés n’ont pas débattu de ce point en 2013 qu’il s’agit d’une erreur. La loi est claire et les juges l’ont confirmé à 4 reprises.

En Grande-Bretagne, le montant des impayés a été multiplié par cinq après l’interdiction en 1999 des coupures d’eau dans les habitations principales, ce qui a renchéri le prix de l’eau par trois.

Faux : le taux d’impayé en Angleterre est de 3%, ce qui ne correspond pas à une multiplication par 5. Le prix de l’eau en Angleterre n’a évidemment pas triplé. Il s’agit d’une jolie blague du Sénateur Cambon pour tenter de faire peur. La vérité est que le prix de l’eau en Angleterre a augmenté de 19 % en dix ans et que le Gouvernement anglais a dû intervenir auprès des distributeurs pour empêcher de nouvelles augmentations injustifiées de prix.

Cet amendement a suscité beaucoup de réactions, car il a été mal compris. Je veux dissiper tout malentendu : les plus modestes restent protégés – et le prix de l’eau aussi. Laisser le droit en l’état reviendrait à faire payer par les plus modestes les manquements de quelques-uns.

Faux : les plus modestes ne sont pas protégés. Nous avons reçu plus de 500 témoignages de victimes de coupures d’eau illégales qui touchent les plus démunis. Les distributeurs d’eau sont hors-la-loi et vont profiter de cet amendement pour faire perdurer des pratiques détestables et inhumaines.

Mme la présidente. – Veuillez conclure.

M. Christian Cambon. – On ne peut pas me suspecter… Je suis moi-même l’auteur d’une loi qui a aidé 20 000 foyers modestes à payer leur facture d’eau.

Vrai : c’est d’autant plus surprenant de la part du Sénateur Cambon de proposer un tel amendement qui laissera dans les mémoires son action contre les plus démunis.

M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. – Une erreur a été effectivement commise à l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles. Merci pour votre correction, avis favorable.

Mme Ségolène Royal, ministre. – Avis favorable.

M. Michel Le Scouarnec. – Le groupe CRC votera contre cet amendement. Quels sont vos chiffres sur les impayés ? Vous n’avez pas de statistiques fiables, les factures d’eau n’ont pas explosé. Tandis que votre proposition est fondée sur la défiance, nous faisons confiance à nos citoyens. Rares sont les fraudeurs. L’eau, comme l’énergie, est un bien essentiel. Chacun y a droit alors que la crise sévit. Cet amendement est synonyme de recul social. Notre modèle social va-t-il voler en éclats ?

Vrai : aucune statistique n’est disponible sur les coupures d’eau et nous le demandons instamment sans avoir de réponse à ce jour. La défiance plutôt que la confiance permet tous les abus et alimente le business des coupures d’eau de plus de 10 millions d’euros par an.

M. Roland Courteau. – Cet amendement recentre le dispositif sur les seules familles bénéficiant des tarifs sociaux. Or certains foyers refusent les aides ou ignorent qu’ils peuvent y prétendre. Quelques 30 % des personnes éligibles au RSA socle ne le demandent pas, 70 % pour les personnes au RSA activité. Et les travailleurs pauvres ? Et les personnes victimes d’un accident de la vie ? Je préfère un bouclier à une passoire.

Vrai : la grande majorité des témoignages que nous recevons concernent des familles en difficulté qui ont la volonté de payer mais se voient refuser tout échéancier par les distributeurs d’eau. Ils sont aussi confrontés à des services sociaux débordés qui n’arrivent pas à les soutenir et à traiter les dossiers avec suffisamment de rapidité. Nous aussi préférons un bouclier à une passoire.

M. Ronan Dantec. – Cet amendement a suscité beaucoup d’émoi. D’après les associations, beaucoup de personnes fragiles ne correspondent pas aux critères sociaux. Couper l’eau est d’une extrême violence. Je ne crois pas que passer par un amendement soit la solution. Le gouvernement doit engager une concertation avec les associations. Sans quoi on prend le risque de mettre des gens que les structures sociales n’ont pas repérés en grande difficulté. Ce n’est peut-être pas l’intention des auteurs de l’amendement. Le groupe écologiste votera contre.

Vrai : la concertation a commencé mais l’amendement vient contrecarrer notre travail pour convaincre les distributeurs d’améliorer les pratiques largement abusives à ce jour.

M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. - Vous faites une erreur d’appréciation : nous ne faisons que corriger une erreur de rédaction dans la loi Brottes. (Mme Éliane Assassi proteste) La protection des précaires demeure.

Faux : les différents jugements rendus récemment démontrent que les précaires n’étaient même pas protégé par la loi Brottes puisque les pratiques de coupures d’eau illégales n’ont jamais cessées et qu’il faut aller devant les tribunaux pour les faire respecter.

Cependant, en l’état actuel, si nous ou Mme la ministre ne payons pas notre facture d’eau, on ne pourra rien nous demander !

Faux : le recouvrement des impayés n’est en rien lié à la coupure d’eau et Mme la Ministre se retrouverait avec un huissier à sa porte si elle ne payait pas sa facture.

Mme Éliane Assassi. – Cet amendement amalgame familles modestes et mauvais payeurs.

Vrai : les clients qui ne payent pas sont tous de mauvaise foi pour les distributeurs et c’est bien le problème de départ. Aucune famille ayant témoignée auprès de France Libertés ne refuse de payer, ils veulent simplement de l’aide pour étaler la dette et un appui des services sociaux s’ils sont éligibles.

La justice a condamné la Lyonnaise des eaux dans l’Aisne, Véolia-Eau ailleurs et une régie publique dans le nord pour avoir procédé à des coupures d’eau à des personnes démunies… (MM. Christian Cambon et Rémy Pointereau protestent)

M. Christian Cambon. – En ce cas, la loi s’applique !

Vrai : mais pourquoi les distributeurs n’appliquent pas eux-mêmes la loi pour éviter d’encombrer les tribunaux ?

Mme Éliane Assassi. – … inconnues des services sociaux. Il y a d’autres moyens de lutter contre les impayés que la coupure d’eau. Par exemple, des poursuites. Cet amendement est très dangereux.

Vrai : les moyens de lutter contre les impayés sont nombreux. Le premier est de proposer un échéancier de paiement, ce qui n’est quasiment jamais fait par les distributeurs d’après les témoignages que nous recevons. Ils appliquent la loi du plus fort, c’est effectivement plus simple.

À la demande du groupe CRC, l’amendement n°146 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente - Voici le résultat du scrutin n° 105 :

Nombre de votants 334

Nombre de suffrages exprimés 334

Pour l’adoption 196

Contre 138

Le Sénat a adopté.

L’article additionnel est inséré.

Mme Éliane Assassi. – C’est bien dommage. Où est la gauche ? Vous avez donné un avis favorable madame la ministre…

Mme Ségolène Royal, ministre. – On ne supprime rien !

Faux : malheureusement si, Madame La Ministre, vous supprimez la protection que devrait recevoir toute personne démunie non connue des services sociaux et vous supprimez aussi la pression faite notamment sur les multinationales de l’eau pour qu’elles changent leurs pratiques violentes et inhumaines pour plus de 100.000 familles en France chaque année. La coupure d’eau n’est pas la solution dans une société de droit. La droite anglaise l’a bien compris, il est dommage que notre gouvernement de gauche ne le comprenne pas !

Expérience faite, les Anglais sont toujours contre les coupures d’eau

L’Angleterre, souvent utilisée comme modèle en France, a interdit il y a 16 ans les coupures d’eau pour impayés avec pour conséquence que les usagers démunis ne doivent plus se priver de nourriture pour payer leur eau dans les délais. Après 10 ans sans coupure, le gouvernement anglais a évalué les effets réels de cette décision et a conclu qu’il ne fallait pas rétablir les coupures d’eau malgré les aspects négatifs associés à leur suppression.

L’abolition des coupures d’eau est parfois présentée comme devant mener à une explosion du nombre de ménages avec des dettes d’eau. En Angleterre, cette explosion n’a pas eu lieu et le nombre de ménages endettés a peu varié.

La suppression des coupures d’eau est une mesure à visée sociale introduite par un gouvernement soucieux de protéger les ménages des mesures trop expéditives des distributeurs d’eau. Elle a pour effet de réduire la pression sur les usagers ayant à payer leur facture d’eau, ce qui leur permet de retarder le paiement des sommes dues mais pas d’échapper au paiement. Il est faux de prétendre comme le fait le Sénateur Poniatowski que « Quiconque a les moyens de payer sa facture d’eau mais qui s’y refuse, ne pourra être inquiété. » . En réalité, les distributeurs anglais sont tellement efficaces pour inquiéter les usagers qu’ils n’ont pas subi d’augmentation sensible des créances irrécouvrables depuis qu’ ils ont perdu l’arme redoutable des coupures. En revanche, en 10 ans, ils n’ont pas hésiter à augmenter le prix réel de l’eau de 19% .

Les distributeurs anglais ont observé une croissance des délais de paiement des factures d’eau et ils ont identifié quatre causes à ce phénomène, dont une seule est liée aux coupures d’eau. Comme prévu, les retards de paiement sont dans une large mesure liés aux difficultés économiques des usagers qui doivent payer une eau de plus en plus chère alors qu’ils ont des revenus en baisse. Certains impayés sont dus au manque d’informations des distributeurs sur les usagers qui ont de l’eau sans avoir jamais signé un contrat. La loi anglaise a été finalement amendée en 2010 pour permettre les poursuites des mauvais payeurs par les voies classiques, pas par la voie des coupures.

Tout le monde souhaite lutter contre les usagers de mauvaise foi mais pas en coupant l’eau de tous les usagers qui ont un simple retard de paiement. La coupure d’eau doit rester une mesure de dernier recours à n’utiliser que sous le contrôle du juge. Cette solution qui respecte les droits de chacun, a été mise en œuvre avec succès depuis de nombreuses années en Belgique.

Puisse l’Assemblée nationale donner sa préférence au droit des usagers à l’eau plutôt qu’au droit des distributeurs à couper l’eau des ménages. La proposition du Sénat est une mesure de régression sociale tout à fait malvenue en cette période de crise.

Henri Smets

Président de l’Association pour le développement de l’économie et du droit de l’environnement (ADEDE).

Veolia condamnée à 9 620€ d’amende pour coupure d’eau illégale ! (2014)

La justice vient de condamner Veolia pour coupure d’eau illégale : le Tribunal d’Instances de Bourges donne raison à une famille privée d’eau pendant 83 jours, à Aubigny-sur-Nère. En France, il est interdit par la loi de couper l’eau pour impayé. Cette interdiction est valable pour tous et toute l’année, comme le stipule la loi Brottes n°2014-274 dont le décret d’application date de février 2014.

Dans son jugement, la juge d’instance rappelle ainsi que « ces dispositions s’appliquent à la distribution d’eau tout au long de l’année ». C’est pourquoi, dans le cas de M. Husson et Mme. Doisne et au regard de la loi Brottes, la juge déclare qu’ « une interruption de leurs fournitures en eau n’aurait jamais dû intervenir. » Veolia est condamnée à verser 6620€ au titre de préjudice moral et matériel.S’agissant du préjudice moral, le juge d’instance déclare :

« Il est manifeste que le trouble dans la vie quotidienne résultant de l’impossibilité d’accéder à l’eau potable dans les conditions habituellement pratiquées dans notre pays, est venu accroître les préoccupations d’une famille déjà éprouvée puisqu’elle se trouvait dans une situation financière précaire, génératrice d’anxiété et de difficultés sociales. »

À cela s’ajoute l’interdiction de procéder à toute « coupure du branchement en eau sous astreinte de 100€ par jour de retard en cas de violation de cette interdiction et pendant une durée de deux ans ».

Loin d’être dupes des tentatives de défense de Veolia, le juge se permet même une pointe de d’ironie :

« Quand bien même la société Veolia n’aurait pas, de mauvaise foi, interrompu les fournitures en eau de la famille Husson-Doisne, il n’en reste pas moins que ses graves négligences ont entrainé pour cette dernière un préjudice moral d’autant plus conséquent qu’il a perduré plus de deux mois »

France Libertés et la Coordination Eau – Ile-de-France reçoivent chaque jour de nombreux témoignages qui contredisent la version de Veolia, qui non content d’avoir attendu l’assignation en justice pour rouvrir l’alimentation en eau des plaignants, continuent à couper aujourd’hui encore de nombreuses familles partout en France.

France Libertés et la Coordination Eau – Ile-de-France exigent que la loi soit respectée par les distributeurs publics et privés de l’eau. Nous réclamons également une prise de conscience urgente des pouvoirs publics et des élu-e-s afin que cessent ces coupures d’eau illégales.

Notre combat pour le droit à l’accès à l’eau est long mais l’horizon s’éclaircit. Nous saluons donc ce jugement, de même que celui de Soissons, qui renforcent notre lecture de la loi. Nous restons mobilisés à Valenciennes contre Noréade et à Amiens contre la Saur dont le jugement est attendu pour le 28 novembre prochain.

Lire le jugement du tribunal d’instance de Bourges

Autres jugements

OB : comme il y en a plusieurs sur le site de la Coordination Eau Ile-de-France, voici quelques jugements.

En introduction, je précise que les marchands d’eau ont fait semblant de ne pas comprendre la modification de la loi de 2013, interdisant toute coupure d’eau.

MAIS je précise que, dans sa rédaction antérieure, la loi interdisait déjà les coupures d’eau, mais limitée aux plus pauvres :

Du 1er novembre de chaque année au 15 mars de l’année suivante, les fournisseurs d’électricité, de chaleur, de gaz ne peuvent procéder, dans une résidence principale, à l’interruption, pour non-paiement des factures, de la fourniture d’électricité, de chaleur ou de gaz aux personnes ou familles mentionnées au premier alinéa et bénéficiant ou ayant bénéficié, dans les douze derniers mois, d’une décision favorable d’attribution d’une aide du fonds de solidarité pour le logement. Un décret définit les modalités d’application du présent alinéa. Ces dispositions s’appliquent aux distributeurs d’eau pour la distribution d’eau tout au long de l’année. Article L115-3 (2007 à 2013)

Les jugements, pour bien voir qui est concerné par les coupures :

TI Soissons 09/2014

“Mauvais payeur” en situation de surendettement, dette colossale de 646 €… Divorcée avec 2 enfants à charge, ressources mensuelles de 1 690 €, charges mensuelles de 2 000 €..

La Lyonnaise des Eaux demande en plus à la justice de la condamner à 1 500 € d’indemnités – en plus de la facture….

TI Bourges 11/2014

“Mauvais payeur” en situation précaire, dette colossale de 593€… Ce couple, bénéficiaire du Fonds de Solidarité Logement, après avoir versé 200 € avait demandé à pouvoir payer en 2 fois le solde… Pas d’eau pendant 60 jours.

La Lyonnaise des Eaux demande en plus à la justice de la condamner à 1 500 € d’indemnités – en plus de la facture….

TGI Valenciennes 11/2014

“Mauvais payeur” en situation précaire, dette colossale de 18 € + 524 €, soit 613 € avec les frais de relance… Mère divorcée avec 4 enfants à charge…

Noréade demande en plus à la justice de la condamner à 3 000 € d’indemnités – en plus de la facture….

Malaise chez Veolia après l’interdiction des coupures d’eau pour impayés

Le directeur adjoint de Veolia Eau IDF, justifie les coupures : « la coupure est l’unique arme dont nous disposions contre les mauvais payeurs. Si elle est utilisée à mauvais escient, contre des usagers en difficulté sociale, cette arme est mauvaise et se retourne contre l’entreprise. Il convient de distinguer les différentes situations. Nous souhaitons conserver cette arme, qui est la seule efficace contre les mauvais payeurs. Si l’interdiction de coupure se confirme, nous en souffrirons (…) Nous n’abandonnerons pas l’unique arme efficace contre les mauvais payeurs sans nous défendre.»

Tous les cas que nous avons collectés, montrent qu’il ne s’agit pas de « mauvais payeurs » mais de personnes en grande difficulté pour régler leur facture. Nous avons des témoignages de personnes handicapées, de familles monoparentales, de familles nombreuses comprenant des bébés, de personnes âgées isolées, etc. Toutes ont subi des coupures d’eau sans considération pour leur situation et souvent sans avertissement préalable. Nous avons même eu le cas d’une femme qui a retrouvé son domicile sans eau, en revenant chez elle après un accouchement ! Les litiges (causés par une fuite d’eau, un changement de compteur, etc.) sont aussi « résolus » par Veolia au moyen d’une coupure d’eau. L’entreprise utilise cet argument choc pour éviter toute discussion et toute négociation avec l’usager.

La DRH de Veolia Eau pour tout le Nord de la France, reconnaît que le groupe Veolia a monté « une opération de lobbying » pour éviter que la loi Brottes ne soit appliquée.

Le sénateur Cambon

Christian Cambon est le plus ancien vice-président du SEDIF où il a assuré, aux côtés de M Santini, le renouvellement du contrat de délégation au bénéfice de Veolia ; il est maire de Saint Maurice ; son adjoint aux finances appelé à lui succéder, Igor Semo est directeur des relations extérieures de la Lyonnaise des Eaux (Suez) et trésorier de Fédération professionnelle des entreprises de l’eau (FP2E). (Source)

Pour les Nations Unies, couper l’eau en cas d’impayés est une violation des droits de l’homme

En juin 2014, les experts des Nations Unies pour l’eau et l’assainissement, pour le logement et pour la pauvreté extrême ont exprimé leur préoccupation concernant les coupures d’eau pour impayés, pratiquées sur une grande échelle à Détroit aux Etats-Unis dans une ville touchée par le chômage et la pauvreté. Ils ont officiellement déclaré que « les coupures d’eau pour impayés causés par un manque de ressources constituent une violation du droit de l’homme à l’eau et d’autres droits de l’homme ».

Selon Catarina de Albuquerque, l’Experte des Nations Unies pour l’eau et l’assainissement, « de telles coupures ne sont tolérables que si l’usager est en mesure de payer l’eau mais ne la paye pas. Dès lors qu’il a une réelle impossibilité de payer l’eau, les droits de l’homme interdisent toute coupure d’eau ». Selon les experts des Nations Unies, si une coupure injustifiée a eu lieu, l’alimentation en eau doit être rétablie sans délai.

Les coupures d’eau que pratiquent encore certains distributeurs français constituent donc à la fois une violation des engagements internationaux de la France et une violation d’une disposition nouvelle du droit français (CASF L 115-3, loi Brottes). De telles coupures affectant des personnes en situation de précarité apportent la preuve que certains distributeurs français se moquent de la loi qu’ils ont pourtant mission de respecter.

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Au Royaume-Uni, la loi interdit les coupures d’eau pour impayés depuis 1999. En France, la loi Brottes (avril 2013) a introduit la même interdiction. Il en est de même en Ecosse, Irlande, Russie et Suisse. En France1, en Belgique2 et aux Pays-Bas3, les tribunaux se sont prononcés contre les coupures d’eau.

Les tribunaux français ont condamné les coupures avant même qu’elle soient interdites. Voir Henri Smets : La prise en charge des dettes d’eau des usagers démunis en France, Johanet, Paris, 2008, p. 185.

2 En Belgique, avant une coupure, il faut une autorisation préalable d’un Tribunal En 2009, il y a eu 1 712 coupures pour impayés en Belgique, soit moins de 1.5 pour dix mille habitants.

3 Voir « Le droit à l’eau potable et à l’assainissement en Europe », Johanet, Paris, 2012, étude de JP. Haumont, p. 233 étude de H. Smets, p 383, de M. van Rijswick, p.566.

Coupure d’eau à La Réunion : le témoignage d’une jeune citoyenne française indignée

Nous avons reçu récemment le témoignage saisissant de Mme A qui signale la coupure d’eau intervenue chez sa sœur, habitante de Saint Leu à l’île de La Réunion, desservie en eau par la Cise, filiale de la Saur (témoignage ci-bas).

Pour aider sa sœur, Mme A contacte la presse locale et voici l’article publié >>> ici. On y apprend que la Cise prend l’initiative de conditionner l’application de la loi à l’ouverture d’un dossier auprès des services sociaux ! Et comme les autres fournisseurs qui enfreignent la loi Brottes, elle facture des frais de fermeture et d’ouverture des compteurs très élevés.

Le témoignage de Mme A :

« Chère Fondation, Bonjour,

Merci à vous pour tout ce que vous faites pour les petits êtres humains que nous sommes. C’est grâce à votre site que j’ai eu connaissance de la loi Brottes. Il faut dire qu’à la Réunion les médias et associations de consommateurs n’ont pas diffusé la promulgation de cette loi. Je tenais à vous informer du cas de ma sœur. Je prends la parole à sa place car je suis révoltée du comportement de son distributeur d’eau. Elle m’a donnée son accord pour cette démarche.

Ma sœur, mère célibataire de deux enfants (1 et 5 ans) et en situation de précarité, a des difficultés pour payer ses factures comme pas mal de monde en France. Depuis la sortie de la loi Brottes, son distributeur a interrompu la distribution en eau chez elle au moins 4 fois. A chaque fois elle devait payer l’intégralité de la facture pour avoir de nouveau de l’eau. Une des coupures a même duré plus d’un mois. La 4ème fois c’était le 3 février 2015. Étant au courant de la loi, j’ai décidé de contacter la Cise pour elle. Dans mon imaginaire, je croyais en la bonne foi des gens qui y travaillent. Et ce fut la désillusion totale. J’ai pris contact par téléphone avec M. C du service recouvrement pour défendre le cas de ma sœur, et lui rappeler que nul n’est censé ignorer la loi. Au départ l’échange s’est bien passé mais dès que j’ai commencé à citer la loi, il m’a interrompu pour me dire que les gens lisent parfois n’importe quoi sur Internet. Pendant tout le reste de l’échange, il a été hostile et à la limite du grossier, m’interrompant sans cesse lorsque je voulais lui parler des dispositions de la loi. Je vais vous résumer à peu près ce que M. C m’a dit:

-La Cise est autorisée a couper l’eau chez une personne sauf quand cette personne a sollicité une aide spéciale auprès des services sociaux.
-Il s’est lui même renseigné sur cette loi et les « gens » croient ce qui les arrange.
-Aucune réouverture ne sera effectuée tant que m’a sœur n’aura pas payé l’intégralité de sa facture.
-Les gens font appel à cette loi alors qu’ils n’y connaissent rien. S’ils avaient lu l’intégralité de la loi, ils se rendraient comptent que la loi n’interdit pas les coupures d’eau en cas d’impayés.
-Cette loi ne concerne pas les fournisseurs d’eau mais uniquement les distributeurs de gaz, de chaleur et d’électricité.
-Le service juridique de la société s’est intéressé à cette loi. Selon ce service, la Cise a le droit d’interrompre la fourniture en eau chez les gens en cas d’impayés.

Voilà le compte rendu de ce que Mr C m’a dit. A la suite de notre échange, j’ai été sidérée d’une telle mauvaise foi. Je lui ai dit que moi aussi je me suis renseignée. J’ai cité « France libertés ». J’avais déjà contacté Energie info, allo service public, un avocat, une association de consommateurs pour me confirmer la promulgation de la loi. Ils m’ont tous confirmé que les coupures d’eau pour impayés sont illégales. Rien à faire, il m’a superbement ignorée et a été désagréable.

J’ai été moi même dans le même cas que ma sœur en août 2014. J’ai été privée d’eau pendant 5 semaines, jusqu’à ce que je tombe par hasard sur votre site. J’ai suivi les démarches. J’ai écris à mon fournisseur (Veolia) et au maire comme indiqué dans l’Aide mémoire. Veolia m’a appelé dès le lendemain et ma fourniture en eau a été rétablie. Le maire de ma commune lui ne m’a jamais répondu. Au vue du succès de ma démarche, j’ai voulu la réitérer pour aider ma sœur. Vu l’urgence de sa situation, j’ai décidé d’appeler directement la Cise pour faire avancer les choses. Ça n’a pas marché. A ce jour, ma sœur et ses enfants se retrouvent sans eau pour une facture de plus de 200 euros. Facture d’ailleurs qui présente des irrégularités. Les services sociaux refusent de l’aider car elle a déjà bénéficié d’une aide.

Les demandes d’aide ne sont pas renouvelables autant que l’on veut.

Ma sœur le vit très mal et n’en peut plus de toutes ces coupures. C’est dans le but de faire avancer les choses en France que je vous écris.
A l’île de la Réunion, les coupures pour impayés sont courantes, il est dommage que les distributeurs ne respectent pas la loi par pure cupidité et nous privent d’une vie digne.

En espérant que mon témoignage pourra faire avancer votre combat,
je vous souhaite une bonne continuation pour les actions que vous entreprenez à travers le monde entier.

Bien cordialement

A, une jeune citoyenne française indignée.

Source: http://www.les-crises.fr/le-senat-a-vote-le-retour-des-coupures-deau-avec-laccord-de-segolene-royal/


[Vidéo] Puissante et incontrôlée : la troïka

Thursday 26 February 2015 at 02:05

Excellent reportage d’Arte du mardi 24 février. A revoir encore quelques jours sur son site.

Pour obtenir les prêts dont ils ont besoin pour faire face à la crise, les Etats européens doivent se soumettre aux exigences de trois institutions phares qui forment la troïka : le Fonds monétaire international (FMI), la Commission européenne (CE) et la Banque centrale européenne (BCE). Voici une enquête édifiante sur le rôle controversé de cette troïka.

Cinq ans déjà que les États en crise de la zone euro vivent les affres du surendettement. Pour obtenir les prêts dont ils ont besoin d’urgence, il leur faut se soumettre aux exigences – les fameux mémorandums – de trois institutions phares qui forment la troïka : le Fonds monétaire international (FMI), la Commission européenne (CE) et la Banque centrale européenne (BCE). Les mesures d’austérité qu’elles ont imposées n’ont jusqu’à ce jour pas eu les effets positifs escomptés, bien au contraire.

Ce sont des hauts fonctionnaires, agissant sans aucun contrôle parmementaire, qui prennent les décisions, que les gouvernements doivent ensuite exécuter. Pour mieux comprendre ce processus, le journaliste économique allemand Harald Schumann (auteur de Quand l’Europe sauve ses banques, qui paye ? diffusé par ARTE en 2013) s’est rendu en Irlande, en Grèce, au Portugal, à Chypre, à Bruxelles et aux États-Unis. Au cours de ce passionnant travail d’investigation, il a interrogé des ministres, des économistes, des avocats, des banquiers, des victimes de la crise, ainsi que le Prix Nobel d’économie 2008, Paul Krugman, qui explique pourquoi cette politique de restriction ne fonctionne pas.

Source: http://www.les-crises.fr/video-puissante-et-incontrolee-la-troika/


Actu’Ukraine 26/02

Thursday 26 February 2015 at 00:35

Actu Ukraine – semaine du 16 au 22 février 2015

Lundi 16 février 2015 (Anniversaire du coup d’état J- 6)

• Le gouvernement ukrainien devient de plus en plus géorgien… voire saakashvilien ! David Sakvarelidze, un proche de Saakashvili,  est nommé au bureau du procureur d’Ukraine pour s’occuper des réformes (Kyiv Post).

Victoria “Fuck the EU” Nuland fait un petit tour en Europe de l’est (Azerbaidjan le 16, Georgie le 17 et Armenie le 18) en évitant soigneusement l’Ukraine… (state.gov)

• Pour bien montrer que Debaltsevo et sa poche sont encerclés, Life News fait un reportage sur le site même de la “route de la mort”, l’autoroute allant  de Debaltsevo à Artemovsk (FortRuss, Youtube)

C’est logique (d’une certaine façon) ! Les russes sont jugés responsables de la guerre, donc l’UE les sanctionne… Les russes sont jugés responsables de l’accord de cessez-le-feu de Minsk2… donc l’UE les sanctionne… (RT, Les Crises, Sputnik News). En fait, il faut sans doute voir là un épisode de l’opposition de plus en plus importante entre les pays de l’UE (France et Allemagne en tête) et la direction de l’UE, Donald Tusk en tête, sur le dossier ukrainien.

• Interview d’Alexandr Zakharchenko dans les rues de Debaltesvo : “C’est notre Stalingrad…”  (Youtube). L’analogie avec Stalingrad est à prendre au sens russe : celle d’une bataille très dure et meurtrière qui a décidé de l’issue de toute la seconde guerre mondiale en Europe. Après Stalingrad, L’Allemagne nazie ne fera que reculer jusqu’à la capitulation finale. Le symbole est donc très fort côté russe… et ukrainien.

• Point des opérations militaires et des pertes des deux côtés lors de la campagne d’hiver (Youtube)

Mardi 17 février 2015 (Anniversaire du coup d’état J- 5)

Dans la poche de Debaltsevo, la ville même de Debaltsevo est entre 50 et 80% aux mains des novorusses (Kyiv Post, Youtube, Youtube, Fort Russ) et les soldats ukraniens commencent à ce rendre en nombre (FortRuss, Youtube, ZeroHedge).



Le porte-parole de l’état-major ukrainien indique de le QG des forces ukrainiennes dans la poche a été détruit et que les soldats sont maintenant livrés à eux-mêmes (FortRuss). Il leur est demandé de tenter individuellement de s’enfuir de la poche (FortRuss). Outre le matériel militaire lourd (chars, artillerie, transport de troupes) dont le nombre est inconnu, il y a, selon les sources, entre 5000 et 8000 soldats et gardes nationaux ukrainiens encerclés dans cette poche.

Combat de rue à Debaltsevo (Youtube)

• Vote d’une résolution préparée par la Russie pour “soutenir les accords de Minsk” au conseil de sécurité de l’ONU (RT, Sputnik News)

• La Géorgie demande officiellement l’arrestation et l’extradition de Saakachvilii à l’Ukraine (Korrespondent.net). D’abord annoncée comme rejetée, cette requête de la Géorgie est “à l’étude” (Lenta.ru). Elle est de nouveau annoncée comme “rejetée”, le lendemain (VZ).

Mercredi 18 février 2015 (Anniversaire du coup d’état J- 4)

La poche de Debaltsevo est sous le contrôle des Novorusses. Les Ukrainiens parlent d’une retraite tactique ordonnée, presque d’une victoire, les novorusses parlent de reddition en masse (RT) Propagande des deux côtés en somme… Au sujet de la propagande, Les Crises a sorti un article sur le cas de Debaltsevo (Les Crises).

Conférence de presse novorusse sur la situation à Debaltesvo (Youtube)

Evacuation plus ou moins concertée entre ukrainiens et novorusses de la poche de Debaltsevo. Environ 2475 soldats et 200 véhicules selon UNIAN (l’agence de presse officielle ukrainienne) (UNIAN) sont arrivés à Artemosk à l’arrière de la ligne de front. Cela  arrange tout le monde, l’Ukraine récupère une partie de ses soldats et une infime partie de son matériel, Les novorusses n’ont pas à réduire  par la force le reste de la poche évitant pertes humaines et  destructions… et renvoient en Ukraine des milliers de personnes qui se  chargeront soit de démoraliser le pays soit de militer pour la paix.  Enfin, Porochenko sauve la face avant le premier anniversaire de tous les dangers pour lui du coup d’état de Maidan (Sputnik News). A noter que sur les quelques 2500 soldats évacués, il y a environ  2132 soldats et 158 gardes nationaux… et que sur les 200 “véhicules”,  il n’y a que 6 chars.

• Et le Debaltsevo Blame Game commence ! Sergei Caplin , un député du parti de Porochenko rappelle la responsabilité de Iatsenouk et Tourtchnivov dans le déclenchement du conflit avec le Donbass, et dédouane Poutine ! c’est de la trahison ca non ? (TASS) : “Il est très facile de blâmer le Président de la Russie a propos du déclenchement des hostilités dans le Donbass, mais il est temps de dire la vérité aux gens. Les responsables de cette guerre sont ceux qui étaient au pouvoir après le renversement de M. Ianoukovitch, ils responsables de la guerre dans le Donbass. Ce sont Yatseniuk et Turchynov “- a déclaré Caplin.

C’était mieux avant ! Lyashko  se lâche et dénonce la censure de Porochenko, suite a l’annulation d’un  talk show politique (Vesti). Rappelons que Lyashko n’est pas un tendre au  niveau de la censure, il est plutot du type fasciste, pratiquant le  kidnapping.

tire de son FB (Facebook) aujourd’hui : La  chaine  “Canal 24″ a abandonné la diffusion de “Shuster en direct”. La  chaine a expliqué sa décision par la nécessité de “créer leurs propres  projets de production.” Selon mes informations, la chaine a cede au  Conseil national de la télévision, qui menaçait de retirer sa licence si  la chaine continuait de diffuser Schuster. La demande venait de  l’Administration du Président Porochenko. … Cela se appelle la  censure. Sous Ianoukovitch, il y avait plus de liberté de parole que sous Porochenko ! Ben oui, en démocratie on est plus libre que sous un régime de junte fasciste…

• Fallait oser !  Lors d’une interview télévisée, l’ambassadeur ukrainien en Allemagne justifie, sans que cela ne lui pose le moindre problème, qu’une partie des forces armées de l’Ukraine soit constituée de combattants néo-nazis…  (Les Crises, Youtube). N’oublions pas que selon la logique ukrainienne (dixit Yatseniuk) c’est l’URSS qui a envahi l’Ukraine et l’Allemagne nazie durant la seconde guerre mondiale…

• Le chef des services secrets russes est à Washington pour un sommet sur l’”extrémisme” (Washington Times)

Jeudi 19 février 2015 (Anniversaire du coup d’état J- 3)

Les Novorusses conduisent des opérations de “nettoyage” de la poche après l’évacuation des forces ukrainiennes (UNIAN) et la prise de la dernière poche de résistance de Chernukhin (DNR News ). C’est une défaite sans appel pour les Ukrainiens qui se servaient de Debaltsevo pour bombarder les villes de Donetsk et Gorlovka ainsi que comme point d’appui pour scinder le territoire novorusse en deux (Sputnik News ). Pour les Novorusses, outre les territoires et la consolidation de la ligne de front, ils récupèrent un important noeud routier et ferroviaire, ce qui va faciliter les déplacements entre les républiques de Lougansk et Donetsk et libèrent toutes les troupes mobilisées autour de la poche qui vont pouvoir se reporter sur la ligne de front. Les pertes en matériel de l’armée ukrainienne sont très importantes (http://fortruss.blogspot.fr/2015/02/quantitative-analysis-of-uaf-losses-at.html). Pour ne parler que des chars de combat : 6 sont sortis de la poche le 18 février, 80 ont été récupérés par les novorusses en état de marche ou “réparable” sur une estimation, selon les sources, de 270-320 chars (9 bataillons) engagés (FortRuss).

• Les combattants ukrainiens qui ont eu la chance de sortir de la poche de Debaltsevo sains et saufs parlent de commandement incompétent, de pertes importantes et de retraite désordonnée (New York Times, FortRuss, Sputnik News) après les premiers prémices de mutinerie (Independent).

• Les novorusses mettent à la disposition des autorités ukrainiennes et des familles les corps des 3000 à 3500 soldats ukrainiens (selon les novorusses) tués dans la poche de Debaltsevo (Sputnik News, Sputnik News). Les autorités de Kiev reconnaissent , de leur côté, la perte de 179 soldats seulement (Focus)… et de 3000 miliciens novorusses tués ! (UNIAN). Bon ! Quelqu’un ne dit pas “toute la vérité” (j’ai une petite idée de qui…)…car si tel était le cas, nos médias pro-Kiev titreraient tous sur la grande victoire de Debatslevo.

• La même journée, les autorités de Donetsk indiquent, qu’à la requête de Kiev, ils ne donneront pas le nombre des pertes ukrainiennes aux journalistes (DNR News). Sans doute pour ne pas risquer un coup d’état nationaliste à Kiev lors de l’anniversaire de Maidan, dimanche et lundi prochain, ce qui ne conduirait qu’à la reprise des combats sur tout le front.

Le nouveau maire de Debaltsevo indique que la reconstruction de la ville et de ses infrastructures commence dès aujourd’hui” (FortRuss, Sputnik News).

Porochenko appelle au déploiement de casques bleus (mais pas russes) sur la ligne de front… et à la frontière entre la Novorussie et la Russie…(FortRuss, VZ, Sputnik News), ce qui contraire à un des points des accords de Minsk 2 : “pas de troupes étrangères en Ukraine”. La perte de Debaltsevo libérant beaucoup de troupes novorusses, l’Ukraine craint sans doute une nouvelle offensive novorusse à la faveur d’une rupture de cessez-le-feu, notamment autour de Marioupol par des bataillons ayant rejetés les accords de Minsk 2.

• Debaltsevo : exploration des positions abandonnées à la hâte par les Ukrainiens (Youtube)

• Debaltsevo :  opérations de nettoyage et de mise en sécurité de prisonniers ukrainiens (Youtube)

• Debaltsevo : conférence de presse d’un prisonnier ukrainien membre du bataillon Azov (Youtube)

La Russie commence à livrer du gaz aux deux républiques de Novorussie après la décision ukrainienne, mercredi 18, de couper, en plein hiver, l’alimentation en gaz des régions rebelles  (french.cri.cn, Novorossia Today, UNIAN, Inosmi) Kiev se justifie en arguant la destruction des infrastructures permettant la livraison mais fait savoir qu’elle ne payera pas le gaz livré par la Russie. Les rebelles dénoncent de leur côté une énième manoeuvre politique contre le peuple après l’arrêt de versement des salaires et pensions des résidents des républiques de Donetsk et Lougansk.

Vendredi 20 février 2015 (Anniversaire du coup d’état J- 2)

Il y a un an, la place Maidan à Kiev était le cadre d’un massacre, les fameux “snipers de Maidan”, qui a fait basculer l’Ukraine. Les Crises publie un article de synthèse sur cet événement (Les Crises). A Kiev, les commémorations oscillent entre recueillement mêlé de propagande (Kyiv Post, Youtube, Youtube)…

et hostilité envers Porochenko (FortRuss,Sputnik News, Youtube). Dans la vidéo, lorsque le président se dirige vers la tribune, la foule scande : “ганьба” ce qui veut dire  “honte, humiliation, infamie, ignominie, disgrâce”.

• Propagande ukraino-européenne : Allocution de Porochenko sur la place Maidan (Youtube)

• Propagande novorusse : video sur les combattants novorusses et rap engagé (Colonel Cassad, Youtube, Youtube)

• La commission européenne rejette l’idée de déployer des casques bleus en Ukraine (Deutsche Wirtschafts Nachrichten)

La ville de Donetsk est de nouveau bombardée par les troupes ukrainiennes (Novorossia Today). Les deux républiques de Novorussie indiquent qu’elles ne se sentiront plus liées par les accords de Minsk si les bombardemnts de zones civiles de cessent pas (Novorossia Today).

Le poids du FMI pour l’approbation d’un nouveau plan de sauvetage de 17,5 milliards de dollars se fait sentir sur la population ukrainienne. Outre l’augmentation “préconisée” du prix du gaz de 264% (TASS, Sputnik News, Korrespondent.net) et de l’électricité pour les usagers, le gouvernement ukrainien déclare vouloir fermer ou privatiser les mines de charbon “sous son contrôle” (35 privatisations et 32 fermetures) et de licencier 25000 mineurs sur 3 ans (FortRuss). Ajoutons à cela le chômage explose (nombreuses sociétés en faillite ou à l’arrêt, toutes celles qui travaillaient avec la Russie par exemple ou celles dépendant pour fonctionner de la fourniture de fortes quantités de gaz comme les aciéries), une inflation prévue de 26% pour 2015 (Korrespondent.net), des revenus réels qui chutent de 15 a 25%, une devise qui s’effondre (Exchangerates.org.uk)  et les prix qui flambent. Electricité : + 40%  (Korrespondent.net), denrées alimentaires : + 5 a 15% pour les produits locaux, transport en commun  : +21% (Korrespondent.net).

• Porochenko ratifie la création d’une brigade Lituano polono ukrainienne devant être opérationnelle en 2015. (RT, Sputnik News, Kyiv Post, , Nouvel Obs, Fort Russ). A signaler que ces trois pays sont les plus hystéro-russophobes d’Europe. Si  l’initiative aboutissant à cette loi date de 2009, sa ratification  actuelle porte un coup sérieux aux espoirs de cessez-le-feu, les accords de Minsk 2 stipulant clairement l’interdiction de forces armées  étrangères en Ukraine. Rappelons quand même que la Russie dispose d’un  droit de veto au conseil de sécurité de l’ONU, et on voit mal pourquoi  elle se refuserait de l’utiliser, d’autant moins après l’application litigieuse de la résolution 1973 sur la Libye en 2011.

• Jacques Attali, invité de Bourdin Direct, a une illumination ! : “Je pense que nous avons fait une erreur majeure avec la Russie depuis le début… la première erreur a été d’annuler la présence de l’occident au G8 de Sotchi et d’avoir isolé la Russie, la Russie déteste être isolée…”  (BFMTV à 14mn16).

 

Samedi 21 février 2015 (Anniversaire du coup d’état J- 1)

• Petit tour dans le monde enchanté des oligarques ukrainiens. Alors que les grands oligarques russophiles sont au bord de la banqueroute, comme par exemple Sergey Taruta, gouverneur du Donbass, en faillite (LB.ua). Deux oligarques “kievistes” continuent de se battre pour prendre le dessus :  Porochenko bien sur (qui n’a vendu aucune de ses entreprises, contrairement a ses promesses) et Kolomoisky (qui finance les bataillons de volontaires). Le procureur général Yarema avait demissionné recemment (peut-être parce qu’ il avait osé parler des enquêtes sur le Maidan…) et a été remplace par Victor Shokin (Citizen Side). Yarema était mal vu par Kolomoisky, en effet le procureur avait eu le culot de fouiller dans ses affaires. Yarema avait meme menace Kolomoisky de lui faire perdre son poste de gouverneur (Gordonua.com). Victor Shokin est un ancien procureur general, il a deja occupe ce poste et surtout en 2005, il avait lance une enquête contre … Kolomoisky (RBC.ua). La suite au prochain épisode…

En fait, l’augmentation du gaz en avril 2015 ne sera pas de 264% comme préconisé par le FMI mais de 400% selon le Ministre de l’Energie et de l’industrie du Charbon, Volodymyr Demchyshyn. Petit calcul, cela met le m3 de gaz à 4,138 hryvnia (soit 0,147 dollars) soit, à la louche, 5 dollars par mois pour un appartement moyen correctement isolé, soit environ 3% du salaire ukrainien moyen actuel qui est de 150 dollars contre 261 dollars en décembre 2014 et 384 dollars en janvier 2014… (Sputnik News, VICE)

• Le monde merveilleux de l’Ukraine. Alors que le magazine allemand Focus indique que l’armée ukrainienne est trop faible pour contrôler les régions de l’Est (Sputnik News, Focus), un haut-diplomate ukrainien déclare au Canada  que l’Ukraine se prépare à une guerre totale… et insiste pour que le Canada lui fournisse de l’aide “léthale” (Sputnik News.). Pour comprendre les relations particulières entre le Canada et Ukraine, il faut savoir que le Canada abrite une forte minorité d’origine ukrainienne très influente et issue pour une bonne partie de réfugiés nationalistes/nazis dans l’après-guerre. Ce qui explique que le Canada ait été très actif en Ukraine depuis… 1991.  (Sans Langue de Bois, CBC.ca)

• Interview de l’exprésident ukrainien Yanukovich (Video Youtube, Transcript anglais FortRuss)

• L’Ukraine supend l’accédition de 115 médias russes. Quoi attendre d’autre d’un pays qui a un ministère de la politique d’information ? (Sputnik News, UNIAN)

• Premier échange très médiatisé de prisonniers. Rusvesna.su, New York Times, Daily Mail).  La république de Donetsk a relaché 37 prisonniers  (1 a refusé d’être échangé) et reçu en échange 36 des leurs. La république de Lougansk a relâché 103 prisonniers et reçu en échange 16 des leurs. Un journaliste russe, Andrew Zakharchuk,  détenu par les ukrainiens, faisait partie de l’échange (Life News).  Les prisonniers novorusses relâchés étaient pour la moitié des civils et non des combattants (DNR News). D’une manière générale, ce qui génère une forte inquiétude sur le devenir des combattants novorusses fait prisonnier par les ukrainiens. En terme uniquement d’information, alors que les novorusses communiquent régulièrement sur les bons traitements réservés aux prisonniers ukrainiens, il n’y a aucune information officielle sur ce qui se passe côté ukrainien…

• L’Ukraine ferme les postes frontières avec la Russie, du moins ceux qu’elle contrôle (Kyiv Post)

• Rare témoignage d’un officier ukrainien après la défaite de Debaltsevo (Youtube)

Dimanche 22 février 2015 (Anniversaire du coup d’état)

• Début du retrait des armes lourdes de la ligne de front côté novorusse.  Selon les accords, le retrait devrait être effectué, des deux côtés, en deux semaines et supervisé par des observateurs de l’OSCE (Sputnik News).

•  Les bombardements de la ville de Donetsk par les Ukrainiens continuent (Sputnik News)

La marche de la dignité… ou de la honte (c’est selon). Plusieurs chefs d’état ont confirmé leur présence à la “Marche de la Dignité” cette après-midi à Kiev. Sans surprise les hystéro russophobes :  le président polonais, Bronislaw Komorowski, la présidente de la  Lituanie Dalia Grybauskaite, le leader de la Géorgie Giorgi  Margvelashvili, le président du Conseil européen, Donald Tusk… et en guest star le président de l’Allemagne Joachim Gauck. Les deux autres pays baltes devraient envoyer leurs premiers ministres (Youtube, Demotix).

Un attentat a eu lieu à Kharkov, au moment de la “Marche de la Dignité” locale qui a réuni environ 500 personnes (sur une population de 1,4 millions d’habitants). ll y a eu 2 morts et environ 11 blessés dont 2 dans un état critique (l’un des deux décèdera le lendemain) (Sputnik News, Youtube, Youtube, VZ, UNIAN).

Kharkov (Oblast de Kharkov) est la deuxième ville la plus peuplée d’Ukraine, derrière Kiev, et la plus grande ville de l’est de l’Ukraine. Bien que plutôt russophile, elle avait renoncé au printemps 2014 à organiser, comme Donetsk et Lougansk, un référendum sur la fédéralisation de l’Ukraine (Sputnik News). Kharkov est aussi le lieu d’implantation de l’usine de véhicules blindés Morozov (Wikipedia) et donc à ce titre une ville stratégique. Igor Tolmachev, le dirigeant local d’Euromaidan est décédé dans l’attentat ainsi que le lieutenant-colonel de police Vadym Rybalchenko, le troisème victime est un adolescent de 15 ans. Les partisans pro russes de Kharkov nient en être l’auteur et accusent le ministère de l’intérieur ukrainien de l’avoir organisé pour justifier une opération anti-terroriste d’envergure dans la ville (Lenta.ru, Youtube). La police arrête des suspects l’après-midi même.

• L’Allemagne annule une livraison de véhicules blindés à la Lithuanie (Sputnik News).

Source: http://www.les-crises.fr/actuukraine-26-02/


[Débat] USA, Europe, LuxLeaks : Le grand marché des inégalités

Wednesday 25 February 2015 at 01:30

Nouveau débat organisé par l’excellente chaîne youtube Thinkerview :

Il dure 1h45, avec moi-même, Delamarche et Béchade, ainsi qu’Hervé de Carmoy, ancien grand banquier et ancien vice-président de la Commission trilatérale…

Source: http://www.les-crises.fr/debat-usa-europe-luxleaks-le-grand-marche-des-inegalites/


Les critiques et les 5 questions au gouvernement de K. Lapavitsas, économiste et député Syriza

Wednesday 25 February 2015 at 01:20

Kostas Lapavitsas est professeur d’économie à l’Université de Londres et a été élu député Syriza lors des dernières élections. Dans un article publié sur son blog le 23 février, il critique les dernières négociations de son gouvernement avec les créanciers du pays et considère que cela ne va pas dans le sens des engagements pris lors du discours de Thessalonique qui présentait le programme économique en cas de victoire. Il pose également 5 questions importantes sur la dette, l’austérité, le Plan national de reconstruction et l’avenir des négociations.

Kostas Lapavitsas
Kostas Lapavitsas

L’accord de l’Eurogroupe n’est pas complété, en partie parce que nous ne savons pas encore quelles sont les ‘réformes’ que le gouvernement grec proposera aujourd’hui (lundi 23 février) et quelles sont celles qui seront acceptées.

Mais, nous qui avons été élus sur la base du programme de Syriza et qui considérons que les propositions de Thessalonique sont un engagement que nous avons pris envers le peuple grec, nous sommes profondément préoccupés. Et il est de notre devoir de consigner nos préoccupations.

Le contour général de l’accord est le suivant :

  1. La Grèce demande la prorogation de l’accord courant qui est fondé sur une série d’engagements.
  2. Le but de la prorogation est de permettre d’achever l’évaluation de l’accord courant et de donner le temps d’élaborer un nouvel accord probable  ;
  3. La Grèce soumettra immédiatement une liste de ‘réformes’ qui seront évaluées par les ‘institutions’ et sur lesquelles un accord sera conclu au mois d’avril. Si l’évaluation est positive, les fonds qui n’ont pas encore été donnés au titre de l’accord courant seront dégagés, de même que seront restitués les bénéfices réalisés par la BCE ;
  4. Les fonds disponibles au Fonds de stabilité financière (ESF) serviront exclusivement à couvrir les besoins des banques et ne seront plus sous contrôle grec.
  5. La Grèce s’engage de remplir pleinement et en temps utile toutes ses obligations financières envers ses partenaires.
  6. La Grèce s’engage à assurer les excédents ‘adéquats’ afin de garantir la viabilité de la dette sur la base des résolutions de l’Eurogroupe de novembre 2012. L’excédent 2015 tiendra compte de la conjoncture économique de 2015.
  7. La Grèce ne révoquera pas de mesures, ne procèdera pas à de changements unilatéraux susceptibles d’avoir un effet négatif sur les objectifs budgétaires, la reprise économique ou la stabilité financière tels qu’évalués par les ‘institutions’.

Sur cette base, l’Eurogroupe entamera les procédures nationales en vue d’une prorogation de quatre mois de l’accord en cours et invite les autorités grecques à engager immédiatement la procédure en vue de la réalisation de son évaluation.

Il est difficile de discerner comment, au travers de cet accord, il sera possible de réaliser les mesures annoncées à Thessalonique qui incluent l’annulation de la majorité de la dette et le remplacement immédiat des mémorandums par le Plan national de reconstruction.

Nous qui avons été élus avec Syriza, nous nous sommes engagés pour la réalisation de ce Plan indépendamment des négociations concernant la dette car nous estimons nécessaire de relancer l’économie et de soulager les souffrances de la société. Il est donc nécessaire à présent d’expliquer comment cela sera réalisé et comment le nouveau gouvernement sera en mesure de changer la situation tragique dont il a hérité.

Pour être plus précis, le Plan national de reconstruction incluait quatre piliers représentant, pour la première année, le coût suivant :

  1. Lutte contre la crise humanitaire (1,9 milliards).
  2. Relance de l’économie par le biais d’allègements fiscaux, le remaniement des ‘prêts au rouge’, la création d’une banque de développement, la restauration du salaire minimum à la somme de 751 euros (total : 6,6 milliards).
  3. Plan pour l’emploi public, impliquant 300.000 emplois (3 milliards pour la première année et 2 autres milliards à la seconde).
  4. Changement du système politique par le biais d’interventions dans les collectivités locales et au Parlement.

Les sources de financement prévues pour la première année, étaient les suivantes :

  1. Liquidation des dettes envers le fisc (3 milliards)
  2. Lutte contre l’évasion fiscale et le trafic de marchandises (3 milliards)
  3. Fonds de stabilité financière (3 milliards)
  4. Cadre national stratégique pour le développement et autres programmes communautaires (3 milliards)

Compte tenu de la communication de l’Eurogroupe, je pose les questions suivantes :

Plan national de reconstruction

Comment le Plan national de reconstruction sera-t-il financé si les 3 milliards du Fonds de stabilité financière sont dorénavant hors du contrôle grec ? Ces fonds n’étant plus disponibles, il sera d’autant plus impérieux de collecter des sommes importantes grâce à la lutte contre l’évasion fiscale et à la liquidation des dettes envers le fisc, dans un très bref délai. Combien cette perspective est-elle réalisable ?

Annulation de la dette

Comment l’annulation de la dette pourra-t-elle avancer si la Grèce s’engage à rembourser intégralement et en temps utile toutes ses obligations financières envers ses partenaires ?

Levée de l’austérité

Comment pourra-t-il y avoir une levée de l’austérité si la Grèce s’engage de réaliser des excédents primaires ‘adéquats’ afin de rendre ‘viable’ l’énorme dette courante ? La ‘viabilité’ de la dette –telle qu’estimée par la troïka – était précisément la raison de la chasse absurde aux excédents primaires. Étant donné que la dette ne sera pas significativement réduite, comment arrêterons-nous d’avoir des excédents primaires qui sont catastrophiques pour l’économie grecque et qui constituent l’essence de l’austérité ?

Surveillance et coût budgétaire

Comment sera-t-il possible de réaliser des changements progressistes dans le pays si les ‘institutions’ exercent une surveillance stricte et interdisent les actions unilatérales ? Les ‘institutions’ permettront-elles de réaliser les piliers du programme de Thessalonique étant donné qu’ils ont un impact budgétaire direct ou indirect ?

La négociation future

Qu’est-ce qui aura précisément changé dans les quatre mois de la ‘prorogation’ pour que la nouvelle négociation avec nos partenaires ait lieu à partir de nouvelles positions meilleures ? Qu’est-ce qui évitera la dégradation de la situation politique, économique et sociale du pays ?

Les moments sont absolument cruciaux pour la société, la nation et, bien entendu, pour la Gauche. La légitimité démocratique du gouvernement est fondée sur le programme de Syriza. La moindre des choses est d’avoir un débat ouvert dans les organes du parti et dans le groupe parlementaire. Nous devons fournir immédiatement des réponses pertinentes à ces questions pour conserver le soutien et la dynamique que le peuple grec nous imprime. Les réponses qui seront données dans les jours qui suivent jugeront de l’avenir du pays et de la société.

Source : OkeaNews, repris et traduit depuis le blog de K. Lapavistas, le 23 février 2015.

Source: http://www.les-crises.fr/les-critiques-et-les-5-questions-au-gouvernement-de-k-lapavitsas-economiste-et-depute-syriza/


Miscellanées du mercredi (Delamarche, Béchade)

Wednesday 25 February 2015 at 00:01

I. Olivier Delamarche

Un grand classique : La minute d’Olivier Delamarche: “Dès que vous parlez d’arrêter l’euro, on vous traite de fasciste !”

Le point sur les “i”: Olivier Delamarche – 23/02

II. Philippe Béchade

La minute de Philippe Béchade: Grèce: “Avec un accord de prêt, on ne voulait pas aller au clash!”

Philippe Béchade VS Serge Négrier (1/2): La hausse du CAC 40 va-t-elle durer ? – 18/02

Philippe Béchade VS Serge Négrier (2/2): Les publications d’entreprises confirment-elles le retour de la croissance en zone euro ? – 18/02


 

Images sous Copyright des auteurs. N’hésitez pas à consulter régulièrement leurs sites, comme les excellents Patrick Chappatte, Ali Dilem, Tartrais, Martin Vidberg, Grémi.

Source: http://www.les-crises.fr/miscellanees-du-mercredi-delamarche-bechade/


[Reprise] Grèce : la liste des réformes concédées à Bruxelles

Tuesday 24 February 2015 at 13:17

L’essentiel :
Un accord a été validé, à l’issue de longues tractations, vendredi entre la Grèce et les créanciers internationaux pour la poursuite d’un plan de sauvetage au pays.
L’initiative des réformes est désormais laissée à Athènes, puis approuvée par les créanciers. La Commission estime qu’il s’agit d’un « point de départ valide » à des discussions.
L’aile gauche du parti Syriza fustige un accord qui prolongerait, selon elle, les mesures d’austérité imposées au pays, que le parti de gauche radicale s’était pourtant engagé à supprimer.

Jusqu’au bout, le processus aura été laborieux. Le gouvernement d’Alexis Tsipras n’a envoyé sa liste de réformes exigées par l’Eurogroupe en échange d’une prolongation du plan d’aide à la Grèce qu’à la toute dernière extrémité, lundi 23 février peu avant minuit, quelques heures avant la tenue d’un Eurogroupe (réunion des dix-neuf ministres des finances de la zone euro), mardi. « La liste nous semble assez adéquate pour être un bon point de départ dans la négociation », réagissait, à chaud, une source européenne, mardi matin.

Un « draft » de ce texte a fait de multiples allers-retours entre Athènes et Bruxelles, le week-end et le lundi précédant l’échéance : il a dû être retravaillé pendant de longues heures afin d’être assez étayé pour espérer « passer » la barre de l’Eurogroupe. Puis, en fin de semaine, celle d’au moins quatre parlements nationaux, dont le Bundestag en Allemagne – comme son équivalent aux Pays-Bas, en Estonie ou en Finlande, il est consulté sur tout ce qui engage l’argent public du pays.

La liste tant attendue des réformes grecques parvient à Bruxelles

Des réformes nécessaires au déblocage d’une nouvelle tranche de l’aide financière dont Athènes aura besoin dans quatre jours. Encore faut-il que les créanciers les plus inflexibles, tels que l’Allemagne et l’Espagne, valident la série de mesures du gouvernement dirigé par le parti de gauche Syriza. Les Grecs, eux, ne sont pas tendres avec les principaux négociateurs de la troïka. ‘L’Allemagne a essayé par tous les moyens d’imposer ses convictions et son hégémonie à l’Europe. Leur première expérience est la Grèce, nous sommes leur cobaye.’ ‘Il est inconcevable que l’Allemagne ait tiré tant de profit de l’Union européenne. C’est la seule économie qui se soit enrichie à ce point et maintenant, ils sont si intransigeants.’ Athènes devrait tenir certaines de ses promesses, comme la distribution de coupons alimentaires pour les plus modestes. Le gouvernement s’engage également à lutter contre la corruption, mais devrait s’opposer à la saisie de résidences principales.

L’enjeu est considérable : si cette liste de réformes n’est pas validée par l’Eurogroupe, le programme d’aide, qui se termine normalement le 28 février, ne pourra pas être prolongé de quatre mois.

Six pages très denses

Dès lors, l’Etat grec se retrouvera sans soutien financier de ses créanciers – la Banque centrale européenne (BCE) et l’Union européenne (UE) – au 1er mars. Selon plusieurs sources, ses banques, qui ont subi de forts retraits de capitaux ces dernières semaines, pourraient vite se retrouver insolvables.

Sur six pages très denses, la fameuse « liste » exigée lors d’un énième « Eurogroupe de la dernière chance », vendredi 20 février, pour trouver un compromis entre les Grecs et leurs créanciers, reprend pour une large part les exigences de Bruxelles. La plupart des réformes figuraient déjà sur le document établi par la « troïka » des créanciers – il faut dire désormais les « institutions » pour ménager la susceptibilité grecque –, qui a imposé une sévère politique de rigueur au pays depuis 2010.

Les mesures « humanitaires » pour venir en aide aux Grecs les plus touchés par l’austérité figurent en toute dernière page de la liste. Le gouvernement de la gauche radicale, élu sur son programme anti-austérité, prévoit de « répondre aux besoins liés à la progression de la grande pauvreté grâce à l’accès à la nourriture, à un logement, aux soins », mais sans entrer dans les détails, et en précisant que ces politiques seront menées « en veillant à ce qu’elles n’aient pas d’impact budgétaire négatif ».

Le gros de la liste concerne la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales, censée répondre aux principaux problèmes de l’administration grecque (corruption, fiscalité défaillante). Ces réformes sont réclamées par la troïka depuis 2010, mais aucun gouvernement, ni les socialistes du Pasok ni les conservateurs de Nouvelle démocratie (ND), n’ont eu le courage politique jusqu’ici de les mettre sur les rails. L’objectif est ici la modernisation poussée de l’administration fiscale (avec la poursuite de l’informatisation des déclarations), le renforcement de son indépendance, la recherche d’une plus grande justice fiscale – en Grèce, les grandes fortunes et l’Eglise orthodoxe échappent encore largement à l’impôt.

Le message de l’Eurogroupe a été compris

Athènes s’engage aussi sur un vaste programme anti-corruption dans l’administration, « une priorité nationale ». En réduisant, entre autres, le nombre de ministères (de seize à dix), de « conseillers spéciaux » et les frais des députés ; en durcissant la réglementation en matière de financement des partis politiques…

Ces réformes anti-corruption étaient préconisées par Syriza. En revanche, concernant les privatisations, pourtant la bête noire du parti d’ultra-gauche, M. Tsipras s’engage à ne pas revenir sur celles qui ont été engagées sous la pression de la troïka (dont celle du port du Pirée sur laquelle Athènes menaçait de revenir), et « à étudier les privatisations qui n’ont pas encore été lancées, de manière à maximiser les revenus que l’Etat pourrait en tirer ».

Le gouvernement Tsipras évoque bien l’augmentation du salaire minimum – une de ses principales promesses de campagne –, mais sans avancer de chiffres (les fameux 751 euros promis aux Grecs), ni d’échéance (d’ici à 2016). Le gouvernement s’engage « à une approche intelligente de la négociation collective sur les salaires. Cela inclut une volonté d’augmenter le salaire minimum, en préservant la compétitivité (…). L’augmentation de ce salaire minimum et son timing seront décidés en concertation avec les institutions européennes et internationales ».

Athènes a visiblement compris le message d’une partie de l’Eurogroupe, pas du tout prêt à financer une augmentation du smic grec. Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, qui a beaucoup travaillé, en coulisses, à la conclusion d’un accord entre les Grecs et les Européens, avait prévenu lundi, dans un entretien à l’hebdomadaire allemand Wirtschaftswoche : si le gouvernement Tsipras passe à l’acte, « il y aura six pays en Europe qui auront un salaire minimum inférieur », entre autres la Slovaquie et l’Espagne, tout en devant continuer à soutenir Athènes financièrement. Politiquement invendable…

L’aile gauche de Syriza se sent flouée

En toute vraisemblance, l’Eurogroupe, mardi, devrait valider cette liste. Le gouvernement grec ne sera pas pour autant au bout de ses peines, lui qui a été contraint, moins d’un mois après son arrivée aux commandes, de se plier aux contraintes européennes, mais qui doit déjà composer avec l’aile gauche de Syriza, qui a de plus en plus le sentiment de s’être fait flouer…

D’ici à la fin avril, les Grecs et les Européens vont devoir affiner la liste, étudier sa faisabilité, disséquer ses moyens de financement. Puis, jusqu’à fin juin, ils auront deux mois pour mettre les réformes sur les rails… Ce n’est qu’à l’issue d’une « revue » des institutions sur place, que le pays pourra recevoir la dernière tranche d’aide qui lui revient dans le cadre du plan d’aide (environ 7 milliards d’euros).

Source : LeMonde.fr, 24.02.2015

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Athènes a transmis à Bruxelles, mardi 24 février, une liste d’engagements sur les réformes que le pays doit engager. Ce plan a reçu un premier accueil positif et sera examiné dans l’après-midi par la zone euro, qui devrait, sauf coup de théâtre, accorder une prolongation jusqu’à l’été du programme de financement et éviter au pays l’asphyxie financière.

Le document, rendu public par le gouvernement grec, insiste à plusieurs reprises sur “la concertation avec les institutions” (Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international) dans l’élaboration détaillée de ses projets, alors que le gouvernement d’Alexis Tsipras s’était montré, après son élection, beaucoup moins disposé à composer avec ses créanciers.

La liste transmise mardi adoucit le ton et comporte beaucoup de mesures de renforcement de l’efficacité fiscale et des structures de l’Etat, mais aucune des réformes n’est chiffrée.

# Un salaire minimum atténué

“L’ampleur et le calendrier” de la progression du salaire minimum, une promesse centrale du gouvernement, “se feront en consultation avec les partenaires sociaux et les institutions européennes et internationales”, selon le document et “de manière à préserver la compétitivité et les perspectives d’emploi”. Le montant envisagé (751 euros) et la date (2016) ne figurent pas explicitement dans la liste.

# Faire travailler les salariés plus longtemps

Athènes veut “éliminer la pression sociale et politique pour partir en pré-retraite”, qui conduit beaucoup de Grecs à arrêter très tôt de travailler, notamment en mettant en place “un soutien ciblé des salariés entre 50 et 65 ans”.

# Soutenir les plus pauvres

Elément central du programme de Syriza, le parti de gauche radicale d’Alexis Tsipras, elles figurent en fin de document sous le titre de “crise humanitaire”. Athènes veut mettre en place des mesures “très ciblées” pour améliorer la couverture sociale, l’accès aux soins, l’approvisionnement en énergie, l’accès au logement et à la nourriture des plus pauvres, par exemple avec des bons d’alimentation alimentaires et de transport. L’ensemble de ce dispositif avait été évalué par Syriza, avant les législatives du 25 janvier, à 1,8 milliard d’euros.

Au programme également, la dépénalisation du surendettement pour les petites sommes, le soutien aux “plus vulnérables” ne pouvant rembourser leurs emprunts et une collaboration avec les banques pour “éviter les mises aux enchères de résidences principales en-dessous d’un certain seuil” de défaut de paiement.

# Lutter contre l’évasion fiscale

Comme ses partenaires le lui réclamaient, le gouvernement grec s’engage à faire “de robustes efforts” dans la collecte des impôts et la lutte contre l’évasion fiscale en “utilisant pleinement les moyens électroniques et autres innovations technologiques”. Le tout doit cibler “particulièrement les plus nantis [afin de] les faire participer de manière juste au financement des politiques publiques [et se faire] sans impact négatif sur la justice sociale”.

Le code fiscal doit être modernisé, l’indépendance de l’administration centrale des impôts renforcée, ses moyens élargis. Le gouvernement prévoit aussi un dispositif de lutte contre la contrebande d’essence et de cigarettes, un renforcement de la lutte contre la corruption et la mise en place d’un système permettant le paiement rapide des arriérés fiscaux et de contributions à la sécurité sociale.

# Couper dans les dépenses de l’Etat

Les dépenses de l’Etat vont être réduites. Le nombre de ministères doit passer de 16 à 10, les avantages et primes des ministres, parlementaires et haut fonctionnaires être réduits, la grille des salaires dans la fonction publique remaniée.

L’Etat veut aussi monnayer “aux prix du marché” l’utilisation par les médias des fréquences de radio-télévision et réformer les règles d’attribution de marchés publics.

# Pas de remises en cause des privatisations

Les privatisations déjà réalisées ne seront pas remises en question, pour celles qui sont déjà lancées “le gouvernement va respecter les processus en conformité avec la loi”. Celles qui sont prévues doivent être “examinées avec pour objectif de maximiser les bénéfices à long terme pour l’Etat”.

Des ministres du gouvernement Tsipras avaient annoncé peu après leur élection leur intention de revenir sur plusieurs ventes en cours, comme celles du terrain de l’ancien aéroport d’Athènes et de 14 aéroports régionaux.

“En finir avec l’austérité”

Dès mardi matin, la Commission européenne a estimé que cette liste de réformes était “un point de départ valide” pour que la Grèce et ses créanciers s’entendent sur la poursuite du financement au pays. L’exécutif européen trouve notamment encourageant l’engagement d’Athènes à combattre l’évasion fiscale.

Les autorités grecques auront ensuite jusqu’à fin avril pour finaliser cette feuille de route, en échange de laquelle elles veulent obtenir un assouplissement de l’austérité tout en maintenant le pays sous perfusion financière, avec le versement de plus de 3,5 milliards d’euros côté européen.

Le gouvernement grec est très sérieux dans sa volonté de réformes” a estimé le président de la zone euro, Jeroen Dijsselbloem. “Mais il s’agit juste d’un premier pas”, la finalisation des réformes présentées par la Grèce “devra être faite en coopération étroite” avec ses créanciers.

Athènes s’était résignée à demander cette extension vendredi dernier, après plusieurs réunions extrêmement houleuses avec ses partenaires de la zone euro, qui avaient ravivé les craintes d’une sortie du pays de la zone euro, le “Grexit”.

Le premier ministre grec, Alexis Tsipras a pour sa part convoqué un conseil des ministres en milieu de journée pour étudier avec son gouvernement la mise en œuvre de ce programme. “Nous avons décidé d’en finir avec l’austérité en pilotage automatique”, a martelé le ministre des Finances grec Yanis Varoufakis.

Les créanciers d’Athènes – qui lui ont consenti depuis 2010 quelque 240 milliards d’euros de prêts – exigent que ce programme ne remette pas en cause la stabilité des finances publiques et ne détricote pas les réformes engagées par les précédents gouvernements. Cela force Alexis Tsipras à un délicat exercice d’équilibre entre son électorat et les partenaires du pays, alors que les premières dissonances se font entendre dans l’aile gauche de son parti.

Source : Nouvel Obs

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Pour ceux qui lisent l’anglais : voici une comparaison point par point entre le draft de déclaration de l’Eurogroupe du 16 février que Varoufakis a rejeté et l’accord réellement passé quelques jours plus tard.

link to norberthaering.de

Summary assessment:

Was it worth the hassle to reject the draft of 16 February, just to accept the statement four days later? For Athens it most certainly was. It got the promise that no self-defeating, excessive austerity would be asked of it any more, the assurance that it could devise its own economic and social policies, as long as htey did not impact negatively on the interests of its partners, rather than having to execute and leaving in place all the measures accepted by the former government and strongly rejected by the people. These are huge improvements for Athens, with no significant counterbalancing downside compared to 16 February. 

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Via zeroHedge, la lettre du jour :



(Source : Nicolas Vadot)

Source: http://www.les-crises.fr/grece-la-liste-des-reformes-concedees-a-bruxelles/


Manolis Glezos : “Je demande au Peuple Grec de me pardonner d’avoir contribué à cette illusion”

Tuesday 24 February 2015 at 03:00

Okeanos nous donne la traduction de ce brulot de Manolis Glezos (Wikipédia), député européen Syriza, 92 ans, et héros de la résistance grecque…

Depuis Bruxelles, Manolis Glezos foudroie le gouvernement à propos des manœuvres durant les négociations avec les créanciers et du changement de discours de SYRIZA. Il rappelle qu’ »entre l’oppresseur et l’oppressé, il ne peut être question de compromis, tout comme cela est impossible entre l’occupé et l’occupant. La seule solution c’est la liberté ».

Par un article qu’il signe depuis Bruxelles où il se trouve, le député européen SYRIZA, Manolis Glezos, critique de manière particulièrement acerbe les manœuvres gouvernementales.

Changer le nom de la troïka en « institutions », celui du mémorandum en « accord » et celui des créanciers en « partenaires », ne change en rien la situation antérieure“, écrit le cadre historique de la Gauche qui apparaît déçu des derniers développements entre la Grèce et ses créanciers.

Plus d’un mois est passé et la promesse n’est toujours pas transformée en acte. Dommage et encore dommage. Pour ma part, je demande au Peuple Grec de me pardonner pour avoir contribué à cette illusion“, écrit-il en invitant les amis de SYRIZA à participer dans les plus brefs délais à un dialogue sur le parcours du parti et les manœuvres en cause.

L’article de Manolis Glezos a été publié aujourd’hui sur le site du Mouvement ‘Citoyens Actifs’  :

Changer le nom de la troïka en « institutions », celui du mémorandum en « accord » et celui des créanciers en « partenaires », ne change en rien la situation antérieure.

L’on ne change pas non plus, bien entendu, le vote du peuple Grec aux élections du 25 janvier 2015.

Il a voté pour ce que SYRIZA avait promis : abolir le régime d’austérité qui n’est pas seulement une stratégie de l’oligarchie allemande mais aussi de celle des autres pays créanciers de l’Union européenne et de l’oligarchie grecque.

Nous abolissons les mémorandums et la troïka, nous abolissons toutes les lois de l’austérité.

Au lendemain des élections, d’une seule loi, nous abolissons la troïka et ses effets.

Un mois est passé et cette promesse n’est toujours pas transformée en acte.

Dommage et encore dommage.

Pour ma part, je demande au Peuple Grec de me pardonner d’avoir contribué à cette illusion.

Mais, avant que le mal ne progresse.

Avant qu’il ne soit trop tard, réagissons.

Avant toute chose, par le biais d’assemblées extraordinaires, dans toutes les organisations, quel qu’en soit le niveau, les membres et les amis de SYRIZA doivent décider s’ils acceptent cette situation.

D’aucuns prétendent que, pour obtenir un accord, il faut savoir céder. En tout premier lieu, entre l’oppresseur et l’oppressé, il ne peut être question de compromis, tout comme cela est impossible entre l’occupé et l’occupant. La seule solution c’est la liberté.

Mais, même si nous acceptions cette aberration, ce que les gouvernements antérieurs ont fait avec le chômage, l’austérité, la pauvreté, les suicidés, en soutenant les mémorandums, va bien au-delà de toute limite de compromis.

Manolis Glezos, Bruxelles, le 22 février 2015

Source : Okeanews, 22/02/2015

Source: http://www.les-crises.fr/manolis-glezos-je-demande-au-peuple-grec-de-me-pardonner-davoir-contribue-a-cette-illusion/