les-crises.fr

Ce site n'est pas le site officiel.
C'est un blog automatisé qui réplique les articles automatiquement

Update

Updating database... Please wait.

Mensonges et légitimation dans la construction nationale en Ukraine (2005-2010), par Delphine Bechtel

Friday 10 March 2017 at 06:00

  1. Un révisionniste ukrainien à la Sorbonne ce week-end + ACTION
  2. Volodymyr Viatrovich : l’historien qui blanchit le passé historique de l’Ukraine, par Josh Cohen
  3. Mensonges et légitimation dans la construction nationale en Ukraine (2005-2010), par Delphine Bechtel

Source : ELH Revues, Delphine Bechtel, Octobre 2012

Résumé

Depuis son indépendance, et surtout à partir de la présidence de Viktor Iouchtchenko, l’Ukraine s’est construit un nouveau grand récit historique, appelé à fonder la grandeur héroïque de sa nation. Le mensonge ici se décline en un déni du caractère multiculturel de sa population (aux dépens en particulier de ses composantes juives et polonaises) et, concernant la part de l’Ukraine dans les événements de la Seconde Guerre mondiale, en un révisionnisme alimenté par la propagande nationaliste précédemment développée par un certain nombre d’intellectuels de la diaspora.

Plan

– La construction d’un récit nationaliste galicien en Ukraine occidentale
– L’historiographie comme entreprise étatique : les stratégies de légitimation scientifique de l’OUN/UPA
– La présidence Iouchtchenko, un passé difficile à effacer ?
  • 1 L’historiographie ukrainienne est celle d’une nation jeune, en pleine construction, dont l’histoire est discontinue et fortement liée à l’histoire russe, polonaise et, pour certaines régions, autrichienne, hongroise, tchécoslovaque, etc. Depuis l’indépendance, en 1991, les historiens s’évertuent à produire un grand narrative de la nation, la faisant remonter, en l’absence de véritable continuité chronologique, géographique et étatique, à la Rous’ kiévaine, puis à la principauté de Galicie, passant ensuite aux Cosaques zaporogues, aux deux tentatives éphémères d’indépendance en 1918-1919, et enfin à l’invasion allemande de l’URSS en juin 1941.
  • 1 C’est ainsi qu’on appelle en russe la Seconde Guerre mondiale.
  • 2 David Marples, Heroes and Villains : Creating National History in Contemporary Ukraine, Budapest/Ne (…)

2Cette production historiographique a pris naissance dès le tournant des années 1990 dans le berceau du nationalisme ukrainien, à Lviv, la capitale de l’Ukraine occidentale, avant de s’étendre progressivement au centre du pays et à la capitale, Kiev. Durant la présidence de Viktor Iouchtchenko (2005-2010), notamment, a été menée jusque par les plus hautes instances du pouvoir une relecture de l’histoire dont le but était, face à l’ancienne épopée soviétique de la « Grande Guerre patriotique1 », de créer un récit de l’histoire nationale fondé sur des stratégies d’héroïsation et de victimisation2 des seuls Ukrainiens ethniques et occultant la composante multiculturelle du pays, et de retracer les « efforts de libération » et de construction de l’État ukrainien. Cela n’est pas allé sans un certain révisionnisme, concernant notamment les périodes sombres de l’histoire, comme la Seconde Guerre mondiale.

La construction d’un récit nationaliste galicien en Ukraine occidentale

  • 3 Delphine Bechtel, « Lemberg/Lwów/Lvov/Lviv : identités d’une “ville aux frontières imprécises” », (…)

3Depuis les années 1990, les intellectuels et les édiles de Lviv, capitale de la région historique de Galicie (l’ancienne Lemberg autrichienne, puis la Lwów polonaise de l’entre-deux-guerres), ont entrepris de réinventer le passé de leur région. L’appellation « Galicie », tombée en désuétude sous l’ère soviétique, a été réinvestie avec une réactivation folklorique du mythe habsbourgeois (ouverture de cafés « viennois », marques de produits alimentaires faisant référence à la tradition « galicienne »). Ce particularisme s’est exprimé notamment à travers la revue Yi (nommée d’après la lettre ï, qui distingue l’alphabet ukrainien de l’alphabet russe), dirigée par Taras Vozniak et financée par la Fondation Heinrich Böll, qui a défendu dans les années 2000 une version douce du nationalisme local, consacrant plusieurs numéros tant aux conflits qu’à la réconciliation polono-ukrainienne et judéo-ukrainienne. Vozniak veut œuvrer en faveur d’une intégration rapide de l’Ukraine à l’Europe et a soutenu l’idée de faire de Lviv la « Strasbourg de l’Europe centrale de l’Est » et la capitale culturelle d’une Ukraine tournée vers l’Occident3.

4Dans cette région, berceau du nationalisme ukrainien, rurale et ukrainophone (contrairement à l’est du pays, industriel et russophone), gréco-catholique (contrairement à l’Est orthodoxe) et nationaliste (contrairement à l’Est, culturellement plus lié à la Russie), les fidèles de l’OUN (Organisation des nationalistes ukrainiens), mouvement ukrainien terroriste, fasciste, xénophobe et antisémite fondé en 1929, et de sa branche combattante l’UPA (Armée insurrectionnelle ukrainienne) se réveillent. Le parti UNA-UNSO (Assemblée nationale ukrainienne / Organisation national-socialiste ukrainienne), parti nationaliste ouvertement pronazi qui s’est renommé Svoboda (Liberté) après sa dissolution en 2004, et ses sbires bottés brandissant des drapeaux rouges et noirs évoquant les couleurs nazies défilent régulièrement lors des manifestations locales. Son leader, Oleh Tiahnybok, également élu député en 2002 au sein de la coalition Notre Ukraine de Iouchtchenko, dont il est l’un des soutiens, mène régulièrement campagne avec les slogans « L’Ukraine aux Ukrainiens » et « Dehors les Moscovites et les Juifs ».

  • 4 Aux élections locales de 2010, le parti Svoboda a obtenu entre 20 % et 30 % des voix en Galicie et  (…)

5Depuis les élections locales de 2009 et 2010, Svoboda dispose d’une influence déterminante dans les conseils régionaux de Lviv et de Ternopil4, tandis que les discours et les thématiques nationalistes ont gagné droit de cité dans toute la région. D’autant qu’un certain nombre de députés de l’ancienne UNA-UNSO siègent désormais sous l’étiquette d’autres partis, comme Andriy Shkil, réélu plusieurs fois député de Lviv dans le Bloc Ioulia Tymochenko. Cette radicalisation de la vie politique locale et l’acceptabilité croissante des thèses nationalistes extrémistes se sont vite traduites par la décision des conseils municipaux de la région de renommer des rues en l’honneur de nationalistes ukrainiens de l’OUN/UPA et d’ériger des monuments à ces leaders fascistes, impliqués dans la purification ethnique de la Galicie (les massacres de Polonais en 1942-1943 en Volhynie et en Galicie, ainsi que la collaboration avec les nazis dans l’anéantissement des Juifs).

6Ainsi, le musée d’Histoire de la ville de Lviv présente depuis 2006 une exposition dédiée aux « efforts de libération du peuple ukrainien » qui glorifie en réalité les bataillons Nachtigall et Roland, composés d’Ukrainiens embrigadés par les nazis, qui ont marché sur Lviv en juin 1941 en portant l’uniforme de la Wehrmacht, et la division SS-Galizien, constituée de volontaires ukrainiens ayant prêté serment à Hitler en 1943. Les théoriciens du fascisme ukrainien, tel Dmytro Dontsov, ainsi que les leaders de l’OUN/UPA, notamment Stepan Bandera et Roman Shukhevytch, deux fascistes et criminels de guerre notoires, sont célébrés à Lviv comme des figures de la quête d’indépendance ukrainienne. Relèvent particulièrement de la désinformation et du négationnisme les changements délibérés des légendes qui accompagnent les photos historiques et les objets exposés : les appellations allemandes ont disparu au profit de traductions ukrainiennes anodines, et le terme « SS » est carrément supprimé. Ainsi les bataillons Nachtigall et Roland apparaissent désormais sous la dénomination « Division des nationalistes ukrainiens », tandis que la division SS-Galizien devient l’inoffensive « Première Division ukrainienne », faisant croire à l’existence d’une armée ukrainienne indépendante des nazis. L’uniforme exposé a de surcroît été expurgé des galons, têtes de mort et insignes SS, tandis qu’une mention en petits caractères indique qu’il s’agit d’une « reconstitution ». C’est tout le passé collaborationniste de l’Ukraine que l’on cache ici aux visiteurs, afin de rendre acceptable l’héroïsation de criminels de guerre ayant collaboré avec les nazis.

Vitrine du musée d’Histoire de la ville de Lviv
Uniforme de la SS-Galizien sans les galons et insignes de la SS, présenté comme une « reconstitution ».
À l’arrière-plan : affiche de propagande antisoviétique et antisémite de 1943, publicité en ukrainien pour l’enrôlement dans la SS : « Venez combattre le bolchevisme dans les rangs de la Division galicienne ».
© Delphine Bechtel, 2007

  • Parallèlement, une véritable invention de l’histoire héroïque nationale se met en place, comme le démontre le complexe mémoriel inauguré en 2007 au cimetière Lytchakiv, à Lviv. Dominant l’ancien cimetière des défenseurs polonais de Lwów morts en combattant les indépendantistes ukrainiens en 1918-1919, les autorités locales ont construit un immense mausolée, avec un ensemble de stèles commémoratives aux « combattants pour la liberté » de l’Ukraine, ceux de 1918-1919, puis de 1941-1945 comme le bataillon Nachtigall et la SS-Galizien. Cette dernière est commémorée par une tombe du soldat inconnu, la seule au monde qui soit dédiée à un soldat de la SS5.

Stèle à la mémoire de la division SS-Galizien, cimetière Lytchakiv, Lviv
Inscription visible sur cette face de la colonne : « 1re Division “Galicie” ». Le mot « SS » a disparu de l’appellation.
© Delphine Bechtel, 2007

Tombe du soldat inconnu de la division SS-Galizien, cimetière Lytchakiv, Lviv
Inscription : « Ici repose un combattant inconnu de la Division “Galicie”, qui a donné sa vie pour la liberté du peuple ukrainien à la bataille de Brody en juillet 1944 ». La division SS-Galizien est ici commémorée comme unité ayant combattu l’Armée rouge, notamment à travers la bataille de Brody (petite ville de Galicie, à 80 % juive à l’époque – c’est la ville natale de Joseph Roth), où l’armée allemande encerclée subit une cuisante défaite.
© Delphine Bechtel, 2007

  • Comme dans les manuels d’histoire récents, on cherche à accréditer les « dates clés » de la construction de l’État ukrainien : l’éphémère indépendance de 1918-1919, puis l’« Acte du 30 juin 1941 », par lequel Yaroslav Stetsko, un des dirigeants de l’OUN proche de Bandera, proclama l’indépendance – proclamation inattendue et annulée une semaine plus tard par les nazis6.

9S’inscrivant davantage dans la tradition du martyrologe, des monuments commémoratifs aux victimes des persécutions staliniennes ont été dressés devant les prisons des rues Zamarstynivska et Lonskoho, où le NKVD avait fait abattre plus de 3 000 détenus en juin 1941, juste avant l’invasion allemande. Les Ukrainiens ethniques y sont montrés comme les seules victimes du stalinisme, alors que les déportations et la soviétisation forcée ont touché en premier lieu les élites polonaises et les Juifs. Plus encore, nulle part ne sont mentionnés les pogromes sanglants du mois de juillet 1941, perpétrés notamment par la milice et les nationalistes ukrainiens, qui ont fait près de 7 000 morts à Lviv, justement sur le terrain de ces mêmes prisons, et plusieurs dizaines de milliers en Ukraine occidentale.

  • 7 Rossolinski-Liebe, art. cit. (notre traduction).

10Si la ville de Lviv a pu être justement caractérisée à la fois de « jungle mémorielle » et de « palimpseste mémoriel7 » au vu de la valse des monuments qui a accompagné les nombreux bouleversements étatiques qu’elle a traversés, elle est aujourd’hui placée sous le signe d’une ukrainisation de plus en plus radicale et d’une politique de commémoration sélective, voire délibérément tronquée.

L’historiographie comme entreprise étatique : les stratégies de légitimation scientifique de l’OUN/UPA

  • 8 On désigne par ce mot, qui signifie en ukrainien « extermination par la faim », la grande famine qu (…)

11Tout cela n’aurait pas été possible sans la politique mémorielle menée au plus haut niveau de l’État depuis la révolution orange et l’élection du président Iouchtchenko. Ce dernier a poursuivi tout au long de son mandat une politique d’ukrainisation et de nationalisation du pays qui s’appuie sur les vues des milieux de la diaspora ukrainienne liés à l’OUN/UPA tout comme sur celles des néonationalistes d’Ukraine occidentale. Pour étayer sa politique de construction mémorielle, il s’est doté d’un appareil étatique : en 2005, il fonde l’Institut pour la mémoire nationale, créé sur le modèle de l’institut éponyme en Pologne, dont le but est de diffuser l’interprétation officielle de l’histoire. En premier lieu, par une loi de 2006, la Grande Famine ukrainienne est érigée au rang de génocide et tout négationnisme en la matière constitue désormais une infraction à la loi. L’Holodomor8, souvent appelé « holocauste », supplante le génocide des Juifs dans le discours victimaire officiel. Des chiffres fantaisistes allant jusqu’à dix millions de morts ukrainiens sont cités, tandis qu’est occultée la dimension transversale de cette Grande Famine stalinienne, qui s’est étendue jusqu’à la Volga et au Kazakhstan.

  • 9 Décrets présidentiels d’octobre 2007 no 966/2007 relatif à la commémoration du 65e anniversaire de  (…)

12Mais il s’agit surtout de fonder un discours héroïque : depuis 2005, lors des commémorations de la fin de la Seconde Guerre mondiale, Iouchtchenko met sur un pied d’égalité les vétérans de l’Armée rouge et ceux qu’il appelle « les combattants pour la liberté » de l’Ukraine. Il octroie aux vétérans de l’UPA des décorations ainsi que l’accès à une pension d’ancien combattant, et réhabilite Roman Shukhevytch, chef du bataillon Nachtigall et de l’UPA, en lui décernant fin 2007 le titre de « héros de l’Ukraine »9.

  • 10 Volodymyr Viatrovytch, Stavlennia OUN do evreiiv : Formuvannia pozytsii na tli katastrofy, Lviv, MS (…)
  • 11 « Lehenda pro Nachtigall » (en ukrainien), reproduit sur la page <memorial.kiev.ua/content/view/539 (…)
  • 12 Voir « Security Service of Ukraine reveals documents that unmask Soviet myths about the OUN », Den’(…)
  • 13 John-Paul Himka, « True and False Lessons from the Nachtigall Episode », Brama, <www.brama.com/news (…)

13Trois institutions officielles collaborent sous la présidence de Iouchtchenko à l’entreprise de blanchiment de l’OUN/UPA : l’Institut pour la mémoire nationale, le Centre pour l’étude du mouvement de libération, établi en 2002 à Lviv et dirigé par l’historien Volodymyr Viatrovytch, et surtout le SBU, le Service de la Sécurité d’État, qui a remplacé le KGB et a hérité de ses archives, sur lesquelles il dispose d’un monopole. Les trois institutions se soutiennent et se corroborent mutuellement, fonctionnant grâce à un réseau de jeunes historiens acquis à la cause de l’OUN/UPA. Viatrovytch est l’un des plus actifs : en 2006, il publie un livre fondé sur des citations tronquées qui dénie tout antisémitisme au sein de l’OUN10 ; en 2007, il tente de réhabiliter la mémoire du bataillon Nachtigall en faisant remonter la « légende autour de Nachtigall », c’est-à-dire l’accusation de massacres, notamment de pogromes, à une tentative soviétique pour déstabiliser le gouvernement Adenauer dans les années 196011. En 2008, Oleksandr Ishchuk, un autre jeune historien travaillant aux archives du SBU, déterre un texte qui exonérerait l’OUN de toute implication dans les pogromes : d’après cette « chronique » datée du 4 juillet 1941, la Gestapo aurait invité les Ukrainiens à en commettre un à Lviv, mais l’OUN aurait interdit à ses membres d’y participer12. Toutefois, selon l’historien ukraino-américain John-Paul Himka, ce document, comme bien d’autres, a probablement été écrit après 1943, à un moment où l’organisation, sentant le vent tourner, avait donné l’ordre d’expurger et de trafiquer ses archives afin de donner l’impression que c’étaient les Allemands et les Soviétiques qui étaient coupables d’actes antisémites, et non les Ukrainiens13.

  • 14 Pour plus de détails, voir Grzegorz Rossolinski-Liebe, « Celebrating Fascism and War Criminality in (…)

14Il faut rappeler que, depuis des décennies, une vaste œuvre de propagande est menée par des idéologues des milieux ukrainiens immigrés notamment au Canada, en Angleterre et en Allemagne, qui vise à présenter l’histoire de l’OUN/UPA comme celle d’organisations démocratiques, pro-occidentales, voire philosémites. Parmi les plus connus, Mykola Lebed’, ancien leader de l’OUN et fondateur de l’UPA, recruté par la CIA (qui ne répugnait pas à incorporer d’anciens nazis et fascistes), dont les archives ont été récemment transférées au Harvard Ukrainian Institute, avait détruit et redactylographié tous les originaux des années de guerre, procédant ainsi à une falsification à grande échelle ; l’équipe réunie à Toronto autour du vétéran de l’UPA Petro Potichnyj a pour sa part publié dans la longue série de volumes Litopys UPA les chroniques (soigneusement expurgées de toute mention d’antisémitisme) de l’UPA. Pour parler de la France, mentionnons Volodymyr Kosyk, docteur en histoire de l’université Paris-I – Sorbonne (!) et vice-directeur de l’Université ukrainienne libre de Munich, auteur d’un ouvrage paru en 1986 à Paris, L’Allemagne national-socialiste et l’Ukraine, qui réussit le tour de force de ne pas receler un mot sur la collaboration ou la destruction des Juifs d’Ukraine. Citons encore Petro Myrtchuk, ancien de l’OUN, dont les pamphlets nationalistes suintent l’antisémitisme primaire14. On n’hésite pas à recourir à la mystification pour présenter l’UPA comme philosémite : ainsi, le même Myrtchuk publie la pseudo-autobiographie de Stella Krentsbakh, une Juive ukrainienne qui aurait dû sa survie à l’UPA, texte qui s’est révélé être un faux mais reste fréquemment cité.

  • 15 Propos tenus par Valentyn Nalyvaytchenko, président du SBU, dans « KGB provoked Ukrainian-Jewish co (…)

15Dans le sillage de ces travaux de la diaspora, des publications et des colloques sont organisés en Ukraine afin de prouver que les Ukrainiens et les Juifs combattaient côte à côte contre le totalitarisme et le régime communiste, et que les atrocités qui ont été reportées par les témoins juifs seraient en réalité le fait du KGB, lequel aurait envoyé des agents soviétiques déguisés en Ukrainiens pour tuer des Juifs15 !

  • 16 Voir le décret présidentiel du 23 janvier 2009 relatif à la déclassification, la publication et l’é (…)
  • 17 Tarik C. Amar, Ihor Balyns’kyi, Yaroslav Hrytsak (dir.), Strasti za Banderoiu, Kyiv, Hrani-T ; voir (…)

16Enfin, en décembre 2008, le directeur de l’Institut pour la mémoire nationale, Ihor Ioukhnovskyi, attèle ses historiens à la tâche la plus ardue : la réhabilitation du chef de l’OUN lui-même, l’extrémiste fasciste Stepan Bandera. Dans ce but, Iouchtchenko déclassifie en janvier 2009 une nouvelle fournée de documents sur l’OUN/UPA conservés au SBU16 et, fin janvier 2010, juste avant de quitter le pouvoir, décerne le titre de « héros de l’Ukraine » à Bandera. Entre-temps, les historiens ont rivalisé pour célébrer le nouveau héros, à tel point que la désinformation, la manipulation des sources, le négationnisme et même la légitimation de massacres finissent par obtenir droit de cité, y compris dans les milieux universitaires. Témoigne des errances de l’époque le volume Strasti za Banderoiu (Les passions autour de Bandera), édité en 2010 par un collectif d’historiens – dont Tarik Amar et Yaroslav Hrytsak, de Lviv –, qui juxtapose sans commentaire des textes de pure idéologie glorifiant le leader fasciste et d’autres, plus nuancés17. En offrant un forum et une plate-forme respectables à ce type d’opinion antidémocratique, les deux historiens de Lviv, eux-mêmes modérés, cautionnent et légitiment hélas un discours xénophobe et dangereux.

La présidence Iouchtchenko, un passé difficile à effacer ?

17Voulant ancrer l’identité ukrainienne dans un récit héroïque fondé sur des faits d’armes et réhabiliter les chefs de guerre liés à l’OUN/UPA, Iouchtchenko a tenté de faire reconnaître des narrations historiques empreintes d’idéologie, de nationalisme ethnique, de xénophobie, et d’ériger en héros des personnages suspects et criminels. Cette tentative a échoué, ne serait-ce que parce que la moitié orientale du pays, russophone et au passé lié aux partisans soviétiques et à l’Armée rouge, l’a refusée. Les conseils municipaux de villes comme Kharkiv, Donetsk ou Lugansk ont réagi vivement contre les mesures présidentielles, et à Kharkiv, Simferopol, Sumy, etc., ont été érigés, en signe de protestation, des monuments aux victimes de l’UPA, comme il en existe aussi beaucoup en Pologne. La politique mémorielle de Iouchtchenko a donc divisé le pays en deux, isolé l’Ukraine de ses voisins et de l’Europe, et décrédibilisé la recherche et les milieux académiques ukrainiens, tout en les subordonnant à des institutions d’État chargées de produire une version gouvernementale de l’histoire.

18Certes, le nouveau président, Viktor Yanoukovytch, a annulé le titre de héros de l’Ukraine décerné à Bandera et à Shukhevytch, a fait retirer le qualificatif de génocide à la Grande Famine, a renvoyé Ioukhnovskyi et Viatrovytch de leurs postes et a placé les instituts de recherche et le SBU sous l’autorité du nouveau pouvoir.

19Toutefois, ces mesures, également antidémocratiques par ailleurs, n’effacent pas le mal fait durant l’ère de la présidence orange. L’extrême droite progresse fortement en Ukraine ; le racisme, l’antisémitisme, la xénophobie, qui se déploient jusque sur les terrains de football, où les supporters du club Karpaty Lviv arborent des drapeaux nazis, s’étalent à ciel ouvert. L’ouest du pays s’est encore radicalisé et vote désormais pour le parti Svoboda plutôt que pour les partis orange, déconsidérés par la faillite du président sortant et l’incarcération de Ioulia Tymochenko.

  • 18 Voir « Petition by historians in response to detention of their colleague Ruslan Zabily », <khpg.or (…)
  • 19 Per A. Rudling, Jared McBride, « Ukrainian Academic Freedom and Democracy under Siege », The Algeme (…)

20En face, Yanoukovytch remet de l’ordre de manière autoritaire, allant jusqu’à intimider les chercheurs nationalistes : Ruslan Zabilyi, à l’époque directeur du musée de la prison « Tiurma na Lonskoho » à Lviv, a ainsi été soumis en septembre 2010 à une garde à vue musclée de quatorze heures par le SBU, qui lui a confisqué son ordinateur18. Certes. Mais, d’un autre côté, Svoboda jouit d’une toute-puissance et d’une impunité totale : n’a-t-il pas réussi à empêcher une série de conférences de l’historien polonais Grzegorz Rossolinski-Liebe, qui vient d’achever à l’université de Hambourg une thèse sur Bandera et qui était invité en Ukraine par l’ambassade d’Allemagne et la Fondation Heinrich Böll pour parler de Bandera en tant que fasciste19 ? Quand des centaines d’extrémistes de Svoboda ont entouré l’ambassade en brandissant des panneaux traitant le jeune historien de « fasciste », « nazi », « ukrainophobe » et le comparant à… Goebbels, il y eut très peu de réactions de la part de la communauté scientifique ukrainienne et même internationale. Des jeunes chercheurs ont été intimidés, menacés de perdre leur bourse ou leur soutien institutionnel s’ils signaient la pétition en sa faveur. Personne n’ose se mesurer à Svoboda, qui gagne sur tous les plans, reléguant la critique de Bandera au rang d’une « provocation » allemande ou, comme on l’a prétendu bien à tort, d’une bravade d’un historien fantasque qui serait à la solde du Parti des régions, le parti de Yanoukovytch.

21L’entreprise de blanchiment de l’OUN/UPA et des périodes les plus noires de l’histoire ukrainienne se poursuit dans les milieux de l’émigration, et même dans les départements d’études ukrainiennes des universités d’outre-Atlantique, comme à Harvard, où Viatrovytch a trouvé un refuge comme chercheur invité. En Ukraine occidentale, les mentalités n’ont pas changé et se sont même trouvées confortées par les ennuis que le nouveau régime fait subir aux nationalistes. Dans le même temps, la recherche continue d’être assujettie au pouvoir, dans une Ukraine de plus en plus poutinisée ou rien d’approchant la liberté et l’indépendance de la recherche et de l’histoire n’existera avant longtemps…

NOTES

1 C’est ainsi qu’on appelle en russe la Seconde Guerre mondiale.

2 David Marples, Heroes and Villains : Creating National History in Contemporary Ukraine, Budapest/New York, Central European University Press, 2007.

3 Delphine Bechtel, « Lemberg/Lwów/Lvov/Lviv : identités d’une “ville aux frontières imprécises” », Diogène, no 210, 2005, p. 73-84. Voir Yi, no 29, Genius loci. Leopolis. Lviv. Lemberg. Lwów, 2003.

4 Aux élections locales de 2010, le parti Svoboda a obtenu entre 20 % et 30 % des voix en Galicie et un tiers des sièges au conseil municipal de Lviv.

5 Voir Grzegorz Rossolinski-Liebe, « Der Raum der Stadt Lemberg in den Schichten seiner politischen Denkmäler », Kakanien Revisited, 2009, accessible à partir de la page <www.kakanien.ac.at/beitr/fallstudie/GRossolinski-Liebe1/?page=2&alpha=r>, cons. août 2012.

6 Malgré les bonnes volontés collaborationnistes de Stetsko et des autres dirigeants de l’OUN face à l’invasion allemande, à laquelle ils participèrent, malgré leur antisémitisme et leur vision d’un État ukrainien fasciste sur le modèle de la Slovaquie de Tiso ou de la Croatie de Pavelic, l’indépendance de l’Ukraine ne correspondait pas aux projets d’Hitler.

7 Rossolinski-Liebe, art. cit. (notre traduction).

8 On désigne par ce mot, qui signifie en ukrainien « extermination par la faim », la grande famine qui fit entre 3 et 5 millions de victimes en Ukraine en 1932-1933.

9 Décrets présidentiels d’octobre 2007 no 966/2007 relatif à la commémoration du 65e anniversaire de la création de l’UPA ; no 958/2007 relatif à la remise de décorations de l’État ukrainien aux participants à la lutte de libération nationale ; no 965/2007 relatif à l’octroi du titre de héros de l’Ukraine à R. Shukhevytch.

10 Volodymyr Viatrovytch, Stavlennia OUN do evreiiv : Formuvannia pozytsii na tli katastrofy, Lviv, MS, 2006.

11 « Lehenda pro Nachtigall » (en ukrainien), reproduit sur la page <memorial.kiev.ua/content/view/539/149/>, déc. 2007, cons. 21 août 2012.En 1959, lors du procès de Theodor Oberländer, référent allemand de Shukhevytch dans la Wehrmacht et alors ministre en RFA, l’Union soviétique, par le biais de la RDA, a rendu publics des documents sur les atrocités commises par les membres de l’OUN.

12 Voir « Security Service of Ukraine reveals documents that unmask Soviet myths about the OUN », Den’, <www.day.kiev.ua/en/article/day-after-day/security-service-ukraine-reveals-documents-unmask-soviet-myths-about-oun>, 12 févr. 2008, cons. 21 août 2012. Sur les pogromes, voir Delphine Bechtel, « Les pogroms en Galicie, 1941 : des pages blanches de l’histoire à une histoire en pointillés ? », dans Luba Jurgenson, Alexandre Prstojevic (dir.), Des témoins aux héritiers : l’écriture de la Shoah et la culture européenne, Pétra, 2012, p. 111-130 ; John-Paul Himka, « The Lviv Pogrom of 1941 : The Germans, Ukrainian Nationalists, and the Carnival Crowd », Canadian Slavonic Papers/Revue canadienne des slavistes, vol. 53, no 2-4, 2011, p. 209-244.

13 John-Paul Himka, « True and False Lessons from the Nachtigall Episode », Brama, <www.brama.com/news/press/2008/03/080319himka_nachtigall.html>, 19 mars 2008, cons. 21 août 2012.

14 Pour plus de détails, voir Grzegorz Rossolinski-Liebe, « Celebrating Fascism and War Criminality in Edmonton. The Political Myth and Cult of Stepan Bandera in Multicultural Canada », Kakanien Revisited, 29 déc. 2010, accessible à partir de la page <www.kakanien.ac.at/beitr/fallstudie/GRossolinski-Liebe2/?page=2&alpha=r>, cons. 21 août 2012 ; Per A. Rudling, « The OUN, the UPA and the Holocaust : A Study in the Manufacturing of Historical Myths », Carl Beck Papers in Russian & East European Studies, no 2107, 21 déc. 2011.

15 Propos tenus par Valentyn Nalyvaytchenko, président du SBU, dans « KGB provoked Ukrainian-Jewish conflits : SBU publicised documents », <www.axisglobe.com/article.asp?article=1533>, cons. janv. 2010 (des trois liens vers cette information, tous ont été désactivés depuis – signe de la mystification ?), et Oleksandr Ishchuk ; cf. Sofia Grachova, « Unknown Victims : Ethnic-Based Violence of the World War II Era in Ukrainian Politics of History after 2004 », Daniyliw Lecture2008, <www.ukrainianstudies.uottawa.ca/pdf/Danyliw08%20Grachova%20Paper.pdf>, cons. 21 août 2012.

16 Voir le décret présidentiel du 23 janvier 2009 relatif à la déclassification, la publication et l’étude de documents d’archives liés au combat pour la libération nationale ukrainienne, aux répressions politiques et au Holodomor en Ukraine.

17 Tarik C. Amar, Ihor Balyns’kyi, Yaroslav Hrytsak (dir.), Strasti za Banderoiu, Kyiv, Hrani-T ; voir également la critique du livre par Franziska Bruder, <defendinghistory.com/strasti-za-banderoju-%E2%80%98bandera-passion%E2%80%99-by-franziska-bruder/25453>, 20 nov. 2010, cons. 21 août 2012.

18 Voir « Petition by historians in response to detention of their colleague Ruslan Zabily », <khpg.org/en/index.php?id=1284550630>, 15 sept. 2010, cons. 21 août 2012.

19 Per A. Rudling, Jared McBride, « Ukrainian Academic Freedom and Democracy under Siege », The Algemeiner, <www.algemeiner.com/2012/03/01/ukrainian-academic-freedom-and-democracy-under-siege/>, 1er mars 2012, cons. 21 août 2012.

Source : ELH Revues, Delphine Bechtel, Octobre 2012

Source: http://www.les-crises.fr/mensonges-et-legitimation-dans-la-construction-nationale-en-ukraine-2005-2010-par-delphine-bechtel/


La pollution aux particules en Île-de-France

Thursday 9 March 2017 at 17:40

Je vois qu’il est grand temps de continuer un peu notre série prématurément interrompue. Demain, l’origine des particules (qui sont simplement des poussières très fines pour mémoire, voir ici)… 🙂

Index de la série “Pollution de l’air”

  1. La pollution de l’air cause 48 000 morts par an en France (+ présentation des polluants)
  2. La pollution aux particules fines
  3. Les graves effets des particules sur la santé
  4. La pollution de l’air dans le monde
  5. La pollution de l’air en Europe I (+ les morts du charbon)
  6. La pollution de l’air en Europe II
  7. La pollution de l’air en France
  8. Le très polluant chauffage au bois
  9. Le choix erroné de la France pour le diesel (mais le diesel a évolué…)
  10. Arrêtons avec les “centrales à charbon allemandes”…
  11. La pollution de l’air en Île-de-France (hors particules)
  12. La pollution aux particules en Île-de-France
  13. L’origine des particules en Île-de-France
  14. Les épisodes de pollution aux particules en Île-de-France
  15. Qualité de l’air en Île-de-France et épisodes de pollution récents
  16. La pollution dans le métro
  17. La pollution de l’air à la maison
  18. Suivi en direct de la pollution
  19. Quelques suggestions…
  20. Documents
  21. Synthèse de la série Pollution de l’air

Les particules fines : des niveaux soutenus, en légère baisse

Rappelons que les particules sont constituées d’un mélange de divers composés chimiques de différentes tailles. Une distinction est faite entre les particules PM10, de diamètre inférieur à 10 μm, et les PM2.5, de diamètre inférieur à 2.5 μm. Les particules PM10 sont majoritairement formées de particules PM2.5 : en moyenne annuelle, les PM2.5 représentent environ 60 à 70 % des PM10.

Les sources de particules sont multiples. Il existe d’une part des rejets directs dans l’atmosphère (particules primaires). Les sources majoritaires de particules primaires sont le secteur résidentiel et tertiaire (notamment le chauffage au bois), le trafic routier, les chantiers et carrières et l’agriculture. Elles peuvent également être d’origine naturelle (érosion des sols).

La contribution du secteur résidentiel et tertiaire aux émissions de PM2.5 est plus importante que pour les PM10 et à l’inverse la contribution de l’agriculture et des chantiers est plus faible. Cela s’explique par la nature des phénomènes prépondérants dans la formation des particules. Les particules PM2.5 sont majoritairement formées par des phénomènes de combustion (secteur résidentiel et tertiaire et trafic routier). Les activités mécaniques, telles que le secteur agricole (labours, moissons et phénomènes d’abrasion par les engins agricoles) et les chantiers favorisent la formation de particules de taille plus importante (PM10)

La pollution aux particules fines PM2,5 à Paris depuis 2007

Voici la situation à Paris depuis 2007 en moyenne horaire :

pollution-particules-paris-06

et ici en maximum horaire :

pollution-particules-paris-05

pollution-particules-paris-02

On note que la situation semble un peu s’améliorer, les pics étant un peu moins élevés qu’en 2007-2010.

Cela est confirmé par la tendance sur Paris depuis 2000 pour les PM10 et PM2,5 :

pollution-particules-paris-01

Il est encourageant de voir que les efforts des pouvoirs publics payent ; la situation n’est pas encore parfaite : il faudrait encore arriver à diviser probablement ces chiffres par 2.

Voici la moyenne en représentant l’écart-type (= la moyenne de l’écart à la moyenne)

pollution-particules-paris-07

Voici les tendances dans différentes zones de la région :

pollution-particules-paris-06

On peut aussi regarder le nombre de jours de dépassements de certains seuils suivant les zones, comme ici en zone trafic :

pollution-particules-paris-08

On voit qu’on ne dépasse quasiment plus les 50 µg par jour, qu’on est passé de 300 à 100 jours de dépassements du seuil de 20 µg, et que la zone connait désormais 30 jours par an (contre 0 avant 2011) un niveau conforme à la recommandation de l’OMS.

Voici pour la situation dans le centre de Paris :

pollution-particules-paris-09

Là encore, l’amélioration est nette, et Paris connait un air assez satisfaisant en particules 4 mois dans l’année.

Pour les zones rurales :

pollution-particules-paris-09

Là encore, l’amélioration est nette, et le fond rural connait un air assez satisfaisant en particules 9 mois dans l’année.

La situation en 2016

Voici le détail de situation en 2016 à Paris :

pollution-paris-an-01

avec les maximums OMS en moyenne annuelle et journalière :

pollution-paris-an-02

On note bien le pic assez exceptionnel de décembre 2016, le plus fort depuis 2007.

Représentons les deux mêmes graphes pour les PM10 :

pollution-paris-an-03

pollution-paris-an-04

On voit donc que le problème est plus important pour les PM2,5 que pour les PM10.

 

Revenons donc aux PM2,5 ; voici le détail suivant les zones :

pollution-particules-paris-12

Pour mieux voir, on peut représenter par différence le fond rural (comme indiqué dans le précédent), l’ajout urbain (niveau à Paris – niveau rural) et l’ajout trafic (niveau trafic – niveau Paris) :

pollution-particules-paris-13

et ici les 3 isolés :

pollution-particules-paris-14

On voit bien la part importante des particules importées dans les deux pics de l’année, près de 100 % en mars et 50 % en décembre…

pollution-particules-paris-15

pollution-particules-paris-16

L’apport du trafic semble baisser à l’automne, mais c’est un biais dans la présentation : c’est simplement que la part urbaine parisienne augmente fortement, en raison du chauffage principalement, ce qui diminue l’écart avec la zone trafic.

Enfin, voici pour information la situation moyenne par heure à Paris en 2016, qui laisse bien voir les heures de pointe :

pollution-particules-paris-03

Étude des PM10

Rappelons bien l’effet “cumul” pour les particules :

pollution air particules

niveaux-particules-region

Les émissions de PM10

Les émissions primaires franciliennes de particules PM10 s’élèvent à 15 kt pour la région Île-de-France en 2012 :

pm-10-idf-5

On constate une diminution de 48% des émissions de PM10 en Île-de-France sur 12 ans :

pm-10-idf-6

Le trafic routier est à l’origine de 28 % des émissions franciliennes de PM10 en 2012. Ces émissions routières se répartissent ainsi :

pm-10-idf-8

En 2012, l’échappement des véhicules diesel contribue pour 16 % à l’ensemble de toutes les émissions franciliennes (9 % véhicules particuliers, 5 % véhicules légers, 2 % poids lourds) alors que la contribution des véhicules particuliers essence est inférieure à 1 %. L’usure des routes, des pneus et plaquettes de freins – contre lesquelles il est dur de lutter – est responsable de 11 % des émissions franciliennes.

Les émissions de PM10 du trafic routier ont diminué de 55 % entre 2000 et 2012 grâce à l’apparition de filtres à particules à l’échappement des véhicules diesel.

Voici un zoom plus récent pour la seule ville de Paris :

pm-paris-2

avec le détail du transport routier :

pm-paris-3

pm-paris

20 % des émissions totales sont ici dus aux abrasions du trafic routier…

Voici le niveau d’émissions de particules en 2012 par kilomètre pour différents types de véhicules :

emissions-particules-voiture

Rappelons au passage qu’il y a en Île-de-France 15,5 millions de déplacements quotidiens en voiture, d’environ 6,1 km en moyenne (Source).

 

Le secteur résidentiel et tertiaire contribue à hauteur de 26 % aux émissions franciliennes. La répartition des émissions par combustible est la suivante :

pm-10-idf-9

On constate une diminution de 49 % des émissions de PM10 du secteur résidentiel et tertiaire entre 2000 et 2012. Cette baisse est quasiment exclusivement due au renouvellement progressif des équipements de chauffage au bois. La baisse progressive de l’usage des foyers ouverts, fortement émetteurs de particules, vers l’usage de foyers fermés et de poêles à bois performants a permis de baisser fortement les émissions de particules. Cependant, le chauffage au bois en base et en appoint reste un contributeur important aux émissions primaires de particules en 2012 avec 20 % des émissions régionales de PM10 et 30 % des émissions régionales de PM2.5, alors que ce combustible ne couvre que 5 % des besoins d’énergie pour le chauffage des logements.

Les appareils à foyer ouvert, qui « émettent huit fois plus de particules qu’un foyer fermé avec un insert performant », sont stigmatisés et pour cause : ils représentent à eux seuls « plus de la moitié de ces émissions dues au chauffage au bois », selon la Driee. Selon l’Ademe, l’âge moyen des équipements est de 15 ans, et 18 % des poêles et cheminées possèdent des foyers ouverts – les plus polluants – et le taux de renouvellement n’est que de 4 % par an.

Le secteur agricole contribue à hauteur de 18 % aux émissions de particules PM10 franciliennes (labours, moissons de cultures), tout comme le secteur chantiers et carrières.

pm-10-idf-92

Les concentrations en PM10

La valeur limite journalière est de 50 µg/m3 (avec 35 jours de dépassements autorisés) et la valeur limite annuelle est de 40 µg/m3 .

pm-10-idf-97

Exposition journalière

En 2015, la valeur limite journalière a été largement respectée en situation de fond – la pire station a dépassé le seuil 11 jours. Mais les dépassements de la valeur limite journalière restent sévères à proximité du trafic routier. Le dépassement de la valeur limite journalière est ainsi constaté en 2015 sur environ 6 % des axes routiers franciliens soit environ 700 km de voirie :

pm-10-idf-98

En 2015, environ 300 000 personnes sont potentiellement exposées à un dépassement de la valeur limite journalière, soit environ 3 % de la population francilienne, contre plus de 40 % en 2007 :

pm-10-idf-95

Cela représente environ 40 km² :

pm-10-idf-94
La distribution est la suivante :

pm-10-idf-96

2007 a en effet été le record historique d’exposition.

Soulignons enfin que les teneurs en particules PM10 d’une année sur l’autre sont très impactées par le contexte météorologique. Les années 2008 et 2010 ont connu une météorologie favorable à une bonne qualité de l’air, alors qu’en 2007 et en 2009, des situations particulièrement défavorables, couplées à des émissions accrues de particules (notamment le chauffage au bois pendant les épisodes hivernaux), ont conduit à de forts niveaux en hiver et au printemps. Comme en 2014, 2015 a connu des conditions météorologiques globalement favorables à la qualité de l’air.

pm-10-idf-993

Exposition annuelle

En 2015, avec un maximum de 23 µg/m3, la valeur limite annuelle (40 µg) a été largement respectée en situation de fond, tout comme l’objectif de qualité (30 µg).

En revanche, les concentrations peuvent y être jusqu’à deux fois plus élevées (28 à 42 µg) à proximité des grands axes de trafic. Si une seule station de mesure a légèrement dépassé la limite, l’objectif de qualité est dépassé sur la majorité des axes du cœur de l’agglomération.

pm-10-idf-992

Il n’y a plus qu’une infime fraction de la population exposée au-delà de la limite légale.

pm-10-idf-99

En 2015, environ 1 % de la population francilienne, soit environ 160 000 habitants, est potentiellement exposé à un air excédant l’objectif de qualité annuel pour les particules PM10 ; c’était 30 % en 2007.

pm-10-idf-4

N.B. la recommandation OMS est à 20 µg/m3

En 2007, 86 % des Franciliens étaient soumis à des teneurs annuelles de PM10 supérieures à 24 μg/m3, alors qu’en 2015 ce niveau d’exposition potentielle ne concernait plus que 8 % des Franciliens. Les études sanitaires se fondant sur les concentrations massiques indiquent clairement qu’il n’y a pas de seuil en dessous duquel les particules ne sont pas nocives.

Voici enfin la tendance en moyenne triennale des concentrations en fond :

pm-10-idf-2

et celle près du trafic :

pm-10-idf

pm-10-idf-994

Étude des PM2,5

Comme nous l’avons déjà vu, la situation des particules fines est bien moins favorable que pour les PM10.

Les émissions de PM2,5

Les émissions primaires franciliennes de particules PM2.5 s’élèvent à 10 kt pour la région Île-de-France en 2012 :

pm-25-idf-91

Par rapport aux PM10, on note une part deux fois moindre pour les émissions de l’agriculture et des chantiers, qui émettent donc des particules plus grosses ; les particules fines sont surtout issues de processus de combustion incomplète.

pm-25-idf-92

On constate une diminution des émissions de PM2.5 en Île-de-France entre 2000 et 2012 de 55%. Les raisons sont les mêmes que celles exposées pour les PM10 : filtres à particules sur les véhicules diesel et nouveaux poêles à bois à foyer fermé.

Les concentrations en PM2,5

La valeur limite annuelle est de 25 µg/m3 , la valeur cible est 20 µg, et l’objectif de qualité de l’OMS 10 µg.

pm-25-idf-1

Rappelons que l’OMS devrait notablement baisser cet objectif de 10 µg (Source OMS 2013) :

oms-pm

La valeur limite applicable en 2015 est égale à 25 μg/m3. Elle est respectée sur toutes les stations du réseau.

En revanche, l’objectif de qualité (10 μg/m3) est dépassé sur la quasi-totalité de l’Île-de-France.

Les teneurs sont 1,2 à 1,4 fois supérieures à ce seuil en fond urbain et de 1,7 à 2,5 fois supérieures en proximité du trafic.

pm-25-idf-2

pm25-paris

depassements-3

particules-93

pm25-idf

En 2015, environ 150 000 habitants, soit moins de 1 % de la population francilienne, sont potentiellement exposés à un air excédant la valeur cible annuelle (20 μg/m3) pour les PM2.5, en grande partie dans Paris ; c’est toutefois 10 fois moins qu’en 2007.

pm-25-idf-9

De gros progrès ont donc été réalisés :

pm-25-idf-4

Mais en 2015, 11,5 millions d’habitants, soit plus de 95 % des Franciliens, sont potentiellement concernés par un dépassement de l’objectif de qualité annuel (10 μg/m3) – sachant que ce seuil reste encore probablement trop élevé :

pm-25-idf-3

Ainsi, pratiquement aucun Francilien ne bénéficie d’un air sain en particules PM2,5

Dans une vision de plus long terme, comme pour les PM10, la météo peut beaucoup influer sur la qualité de l’air en PM2,5 :

pm-25-idf-5

En s’affranchissant de ces variations météorologiques, les niveaux moyens annuels de fond de PM2.5 montrent une baisse de l’ordre de -25 % entre 2000/2002 et 2013/2015 :

pm-25-idf-6

La baisse des concentrations en PM2.5 est plus marquée sur les axes routiers, avec une baisse de l’ordre de 45 %.

Comme pour les PM10, cette baisse s’explique par la diminution des particules primaires émises à l’échappement des véhicules diesel (environ -60 % entre 2000 et 2012). La baisse est plus importante que pour les PM10 car la majorité des PM2.5 sont émises à l’échappement.

pm-25-idf-7

pm-25-idf-8

Le carbone suie

Les émissions de PM1

Les émissions primaires franciliennes de particules PM1 s’élèvent à 7,2 kt pour la région Île-de-France en 2012 :

pm-01-idf-1

La répartition sectorielle des émissions de PM1 montre une contribution quasi exclusive des secteurs émettant des particules issues de la combustion. Le chauffage au bois et les véhicules diesel à l’échappement émettent 76 % des PM1 en Île-de-France pour l’année 2012 avec des contributions respectives de 41 % et 35 % aux émissions régionales.

Les émissions de carbone suie

Les émissions primaires franciliennes du dangereux “carbone suie” appelé également « black carbon » s’élèvent à 2,8 kt pour la région Île-de-France en 2012 :

bc-idf-1

Le premier contributeur aux émissions de carbone suie en Île-de-France est le transport routier avec 66 % des émissions en 2012. Cette contribution majoritaire ainsi que la faible part importée fait du carbone suie un bon indicateur de suivi de la pollution automobile grâce à sa mesure à proximité du trafic routier. Les véhicules diesel sont à l’origine de la quasi-totalité des émissions franciliennes de carbone suie du transport routier en 2012.

Les émissions du secteur résidentiel et tertiaire représentent 23 % des émissions régionales de carbone suie en 2012. Le chauffage au bois est à l’origine de 84 % de ces émissions, soit environ 20 % du total.

Les concentrations en carbone suie

Les fumées noires sont mesurées depuis la fin des années 1950 dans l’agglomération parisienne. Le prélèvement de fumées noires s’opère sans coupure granulométrique précise. Longtemps normée, la méthode des fumées noires n’est plus une technique de référence pour la surveillance des particules. Cet indicateur permet de suivre l’efficacité de mesure de réduction des sources locales de combustion, en particulier le trafic.

Entre la fin des années 1950 et le milieu des années 1990, les niveaux moyens de fumées noires ont quasiment été divisés par 20 à Paris. Cette très forte diminution est due à la baisse importante des émissions des suies issues de la combustion du charbon, combustible alors largement utilisé en Île-de-France pour la production d’électricité et le chauffage.

suies-1

Il existe un gradient très important entre les concentrations moyennes mesurées en site trafic par rapport aux sites de fond, de 1 à 15 :

suies-2

===============================================

En résumé pour les particules

bilan-pm-10

bilan-pm-25

300 000 Franciliens sont toujours potentiellement exposés à un dépassement de la valeur limite journalière en PM10.

Des dépassements récurrents et importants des valeurs limites pour les PM10 sont toujours constatés à proximité du trafic.

Les teneurs de fond en PM2.5 sont 1,2 à 1,4 fois supérieures au seuil de l’objectif de qualité, elles sont plus de deux fois supérieures à ce seuil en proximité au trafic. Près de 95 % des Franciliens, soit 11,5 millions de personnes, sont concernés par un dépassement de ce seuil.

Une tendance à la baisse se dessine néanmoins, en particulier en proximité au trafic routier, où la valeur limite annuelle n’est pas dépassée pour la deuxième année consécutive

============================================

Synthèse générale de la pollution de l’air en Île-de-France

Pour synthétiser les deux derniers billets, voici quelques tableaux :

bilan-idf

pollution-idf-1

polluants-idf

jours-info-1

Le principal problème de pollution atmosphérique en Île-de-France est donc, de loin, les particules, suivi dans une moindre mesure du Dioxyde d’Azote puis de l’Ozone.

Voici enfin un vidéo d’AirParif dressant le bilan de 2015 :

densite-emissions

 

 

Source: http://www.les-crises.fr/la-pollution-aux-particules-en-ile-de-france/


La HATVP : une certaine idée de la transparence des élus (l’exemple Macron)

Thursday 9 March 2017 at 03:25

En regardant le site de la Haute Autorité de la Transparence de la vie politique, j’ai constaté hier que la déclaration de M. Macron avait disparu…

I. Le site de la HATVP

isf-macron

Aujourd’hui

Avant

Si je tape l’ancienne adresse :

isf-macron

Sur le moment, je me suis dit – c’est très louche. Mais en fait, non, pas du tout, vous allez voir – c’est encore pire.

J’avais déjà souligné dans mon article de la semaine dernière mon étonnement que la déclaration de M. Macron lors de sa nomination ait disparu ; il n’y avait que celle de sortie, et non plus celle d’entrée, ce qui est gênant :

Comme on voit, elle avait apparemment été mise en ligne sur le site de HATVP le 26 janvier 2017 (gardez bien cette date en tête pour la suite).

II. Que dit la loi pour les ministres ?

1/ Les déclarations

Les nouvelles obligations de transparence sont issues de l’article 4 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique (en réaction à l’affaire Cahuzac), qui indique

Chacun des membres du Gouvernement, dans les deux mois qui suivent sa nomination, adresse personnellement au président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique […] une déclaration exhaustive, exacte et sincère de sa situation patrimoniale […]

Dans les mêmes conditions, chacun des membres du Gouvernement adresse au président de la Haute Autorité, ainsi qu’au Premier ministre, une déclaration faisant apparaître les intérêts détenus à la date de sa nomination et dans les cinq années précédant cette date. La même obligation s’applique en cas de modification des attributions d’un membre du Gouvernement. […]

Les obligations de déclaration prévues aux deux premiers alinéas s’appliquent à tout membre du Gouvernement dans les deux mois qui suivent la cessation de ses fonctions pour une cause autre que le décès. Les déclarations sont adressées personnellement au président de la Haute Autorité. La déclaration de situation patrimoniale comporte une récapitulation de l’ensemble des revenus perçus par le membre du Gouvernement […] depuis le début de l’exercice des fonctions de membre du Gouvernement. Le membre du Gouvernement peut joindre des observations à chacune de ses déclarations.

Donc un ministre doit faire une déclaration à la HATVP dans les deux mois qui suivent sa nomination et dans les deux mois qui suivent son départ du gouvernement. C’est clair.

2/ La publication

C’est bien d’avoir une déclaration, mais c’est mieux qu’elle soit publique. L’article 5 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 le précise :

I. ― La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique transmet à l’administration fiscale la déclaration de situation patrimoniale […]. Celle-ci fournit à la Haute Autorité, dans les trente jours suivant cette transmission, tous les éléments lui permettant d’apprécier l’exhaustivité, l’exactitude et la sincérité de la déclaration de situation patrimoniale, notamment les avis d’imposition de l’intéressé à l’impôt sur le revenu et, le cas échéant, à l’impôt de solidarité sur la fortune.

Dans un délai de trois mois suivant la réception des éléments mentionnés au premier alinéa du présent I, la Haute Autorité rend publiques la déclaration de situation patrimoniale et la déclaration d’intérêts. Elle peut assortir cette publication de toute appréciation qu’elle estime utile quant à l’exhaustivité, à l’exactitude et à la sincérité de l’une ou l’autre déclaration, après avoir mis l’intéressé à même de présenter ses observations.

Les électeurs peuvent adresser à la Haute Autorité toute observation écrite relative à ces déclarations de situation patrimoniale et à ces déclarations d’intérêts. […]

V. ― Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, précise les modalités d’application du présent article.

OK. On récapitule :

  1. Le ministre a 2 mois pour envoyer la déclaration ;
  2. la HATVP la transmet au fisc, qui a 1 mois pour répondre ;
  3. quand la HATVP reçoit la réponse du fisc, elle a 3 mois pour tout bien analyser, valider, discuter et, enfin, publier la déclaration.

On est donc au pire à un délai de 6 mois pour publier la déclaration du ministre, à partir du jour de départ de l’intéressé.

3/ La durée de publication

Et c’est là que cela devient vraiment TRÈS intéressant, car on peut se demander : combien de temps les déclarations vont-elle rester en ligne ? Comme on l’a vu, un décret devait préciser les modalités de publicité. Il s’agit du Décret n° 2013-1212 du 23 décembre 2013 relatif aux déclarations de situation patrimoniale et déclarations d’intérêts adressées à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Et que dit son article 6 ? :

I. ― […] sont diffusés sur un site internet public unique d’accès gratuit, et dont l’autorité responsable est la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique :
a) Les déclarations de situation patrimoniale et d’intérêts des membres du Gouvernement ainsi que des modifications substantielles de celles-ci ; […] III. ― Les déclarations diffusées en application du I demeurent accessibles au public pendant la durée des fonctions ou du mandat au titre desquels elles ont été déposées. Toutefois, lorsque la déclaration est déposée après la fin des fonctions, les éléments demeurent accessibles six mois après la fin des fonctions.

Donc les choses sont très claires :

Je rappelle que le but de ces déclarations est bien de comparer le patrimoine final avec le patrimoine initial… C’est difficile si la déclaration de patrimoine initiale est retirée avant même que la finale soit déposée.

Et ça devient très très dur d’utiliser la déclaration finale si elle est retirée 6 mois après la fin des fonctions, alors que la HATVP a jusqu’à 6 mois après la fin des fonctions pour la publier – si vous voyez ce que je veux dire…

Alors tout s’éclaire pour le cas d’Emmanuel Macron, qui a parfaitement respecté la loi, vu qu’il a démissionné le 30 août 2016 :

Bref, la déclaration finale de M. Macron n’est a priori restée sur le site que 34 jours.

Vous ne devez donc cette série d’articles qu’au hasard qui a fait que les attaques que j’ai subies de certains néoconservateurs m’ont incité à re-creuser ce sujet juste à la mi-février…

La transparence quoi…

Pourtant, comme le disait le rapporteur du projet de loi sur la transparence (p. 39) – qui est le nouveau Garde des Sceaux :

P.S. Au passage la déclaration semble incorrectement remplie, il manque la date de fin de fonctions :

C’est pourtant une mention légale obligatoire (la qualité Macron quoi – bizarre que la HATVP n’ait rien dit) :

P.S. 2 : Étrange, pour la HATVP la vente de l’appartement de M. Macron pour 980 000 € et le règlement de 880 000 € de dettes ne semblent pas constituer un “évènement majeur ayant affecté la composition du patrimoine”… #VaComprendre

isf-macron

III. Action

Il semble raisonnable de demander une modification du Décret pour obtenir une réécriture indiquant, par exemple :

“Les déclarations diffusées en application du I demeurent accessibles au public pendant la durée des fonctions ou du mandat au titre desquels elles ont été déposées, puis pendant une période allant jusqu’à un an après que les déclarations de fin de fonction aient été mise à disposition du public.”

C’est une mesure vraiment minimale pour pouvoir travailler – après tout, je ne vois pas pourquoi il y aurait même une limite de temps, ce sont des données publiques.

Je vous propose donc, si vous le souhaitez, de m’aider à faire bouger un peu les choses.

Comme les droits ne s’usent que si on ne s’en sert pas, j’ai écrit à la HATVP :

pour avoir des confirmations :

Je vous propose donc de me soutenir en tweetant à la HATVP ainsi qu’au garde ses Sceaux et au ministre de l’Intérieur pour qu’ils se penchent sur la question.

Je vous propose donc d’envoyer aux comptes : @HATVP@JJUrvoas@justice_gouv

le tweet suivant :

@HATVP@JJUrvoas@justice_gouv Je soutiens les demandes du site Les-Crises http://www.les-crises.fr/hatvp-pourquoi-la-declaration-de-macron-a-disparu/ Merci de bien vouloir lui répondre

et  de le doubler par un mail à :  adel@hatvp.fr 

Je compte sur vous – merci !

Source: http://www.les-crises.fr/hatvp-pourquoi-la-declaration-de-macron-a-disparu/


Revue de presse du 09/03/2017

Thursday 9 March 2017 at 00:15

Pour rejoindre l’équipe de la revue, vous pouvez postuler via le formulaire de contact du blog.

Source: http://www.les-crises.fr/revue-de-presse-du-09032017/


Tiens, et si on validait l’étude Macron avec son ISF ? (+ Rothschild)

Tuesday 7 March 2017 at 22:29

Dernière (je l’espère) mise à jour sur le patrimoine de M. Macron (en réponse aux nombreux mails que j’ai reçus) – afin que nous passions à autre chose…

Comme on a vu que la Team Macron tentait de discréditer nos conclusions (ou interrogations, plutôt – il ne s’agit de rien d’autre), essayons d’en valider les grandes lignes par d’autres moyens. Rappelons que les 25 questions que nous nous posons à la lecture des déclarations de patrimoine de M. Macron sont consultables ici.

Comme d’habitude, s’agissant de ce blog collaboratif, nous comptons sur les spécialistes en fiscalité pour remonter en commentaire ou par mail leurs remarques et analyses.

I. L’ISF des Macron

Les déclarations portaient surtout sur le patrimoine personnel de M. Macron, pas sur celui de sa femme. Cependant, l’ISF fonctionne par foyer fiscal, en agrégeant les patrimoines des couples.

Et le 15 mai 2013, on apprenait dans l’Express une chose assez étrange :

isf-macron

Toi aussi, laisse trainer ton avis d’imposition à six chiffres au boulot…

Outre le “Président dans vingt ans” (sic), on voyait surtout que M. Macron ne payait pas l’ISF malgré ses énormes revenus passés !

Or, l’article du Canard enchaîné du 1er juin 2016 qui parlait de l’affaire s’intéressait justement à l’ISF (dernière colonne) :

Pressé de questions, M. Macron finit par répondre sur Facebook :

isf-macron

Hmm, il a donc fait bosser “plusieurs semaines” un des 5 experts de la Cour de cassation pour estimer la maison de sa femme – donc pour éviter de payer 3 000 ou 5 000 € d’ISF ? Dommage qu’il n’ait pas fait faire 5 estimations par des agences du Touquet, en en prenant la plus élevée, cela aurait été plus simple et moins cher…

isf-macron

C’est ce jour-là qu’il révélait d’ailleurs le nom de son mécène

On voit donc une chose intéressante. La maison secondaire des Macron au Touquet est propriété de la seule Brigitte Macron ; le couple l’a estimée 1 200 000 €. Et quand l’administration l’a estimée plutôt 1 450 000 €, cela a fait basculer les Macron dans l’ISF – dont le seuil est de 1 300 000 €.

Cela signifie donc que le patrimoine du couple est proche de ce seuil de 1,3 M€, mais sachant que la seule maison de Madame représente 1,2 à 1,4 M€ : cela signifie donc que le patrimoine de M. Macron est bien rachitique.

Poursuivons :

isf-macron

On note qu’en acceptant la proposition de l’administration fiscale, le couple rentre dans l’ISF en 2013 ; mais qu’en 2014, l’ISF est divisé par deux, et le couple sort de l’ISF en 2015…

Il est fascinant de voir que ce journal montre que l’ISF des Macron fond comme neige au soleil, donc leur patrimoine aussi, et que cela n’éveille aucune attention particulière des médias… (ok, il refuse aussi de fournir à l’Express – comme au Canard – les éléments demandés.)

Comme on a les montants de l’ISF, on a donc facilement le montant de l’actif net (=actif – passif, c’est-à-dire avoirs-dettes) du couple (calculette) :

isf-macron

isf-macron

Le Canard a été un peu trop généreux avec ses 1,8 million…  🙂

On connait assez bien le passif du couple – en tout cas de Monsieur, on supposera que Madame n’a pas d’autre emprunt (et qu’ils n’ont aucun placement de défiscalisation de l’ISF – vu comment ils gèrent leur patrimoine, cela m’étonnerait…) :

isf-macron

On n’a pas toutes les caractéristiques des emprunts, mais on peut faire quelques hypothèses raisonnables sur celles-ci (à confirmer, donc).

Au niveau de l’actif immobilier, on a deux biens. L’appartement de Monsieur, résidence principale, qu’il estime 935 000 € en 2014, et donc la maison de sa femme au Touquet, qui appartenait à son père (voir aussi ici ou ici) et lui appartient a priori entièrement en propre (ses frères et sœurs ont dû hériter des boutiques du père).

isf-macron

isf-macron

La maison secondaire des Macron (propriété de Madame) au Touquet

C’est cette maison que le couple a estimée à 1 200 000 € et que le fisc a redressée à 1 453 000 €. À partir des données (grossières) de l’Insee (Paris et Nord Pas de Calais), on peut estimer ainsi l’évolution des valeurs des deux biens entre 2013 et 2016 :

isf-macron

Notons au passage que Madame a environ 30 000 € de revenus fonciers par an, mais on ne sait pas quelle en est la source (location à l’année d’une partie de la maison du Touquet ? Il semble y avoir un commerce au rez-de-chaussée, je pense que ça peut être ça. Location saisonnière de toute la maison du Touquet ? Autre bien en immobilier locatif  [avec dans ce cas possiblement un emprunt, mais il faudrait en déclarer la valeur nette dans l’ISF, ce qui diminuerait encore plus la valeur du patrimoine de Monsieur, c’est assez peu plausible, mais pas impossible]).

isf-macron

À ce stade, on a donc connaissance de façon certaine de l’actif net du couple, et on a une estimation grossière mais raisonnable du patrimoine immobilier, et des dettes. Par différence, on a donc une idée du montant du patrimoine financier du couple. Celui de Madame étant d’environ 100 000 € selon la déclaration patrimoniale de 2016, on peut donc estimer le patrimoine financier de M. Macron ainsi :

isf-macron

Soit environ 550 000 €. Je rappelle que ce n’est qu’une simple estimation, pour valider des ordres de grandeur. Elle contient de plus une simplification notable : je raisonne net d’impôts. En réalité, les liquidités devaient être supérieures de 400 000 € à ce chiffre, correspondant aux impôts 2012 à payer ; somme qu’il faudrait d’ailleurs rajouter en dette pour le calcul de l’ISF – c’est donc sans impact sur l’actif net pour l’ISF. Cela n’apporte donc rien au raisonnement patrimonial, et complique les choses. On a donc raisonné comme si l’Impôt à la source avait été en place, pour une meilleure compréhension. De même, la valeur de la voiture est comprise dans les liquidités.

Il y a un autre point important à savoir : le logement principal bénéficie d’une décote légale de 30 % sur la valeur de l’actif avant prise en compte des dettes, ce qui génère une baisse de l’actif net du même niveau. (vous achetez un appartement principal un million avec un emprunt d’un million ; la valeur nette est nulle ; mais pour le fisc, vous abattez de 300 000 € l’actif, donc l’actif net du bien pour l’ISF est de – 300 000 €, qui s’impute sur le reste de l’actif net)

On arriverait donc à environ 550 000 € de liquidités (nettes d’impôts) pour M. Macron au 1/1/2013.

Or, on connait ses revenus plantureux de 2011 et 2012 (source) :

isf-macron

Si on applique un taux moyen de 40 % d’impôts, et qu’on retranche – nous sommes gentils – les annuités d’emprunt au Crédit Mutuel, on obtient le “revenu net après impôts disponible” suivant pour Monsieur (qui s’ajoute aux 50 000 € annuels de sa femme) :

isf-macron

On note qu’en 2011 et 2012, M. Macron a un revenu net disponible de plus de 1 400 000 € ; au 1/1/2013, il n’a plus que 550 000 €. Il a donc bien consommé 850 000 € ces deux années-là, soit 1 160 euros par jour, soit plus  d’un Smic par jour… Je dis consommé, mais cet argent a bien entendu pu servir à rembourser d’autres dettes antérieures (mais pas sur des postes connus à ce jour – elles auraient donc été dantesques et sans mesure avec les revenus), soit avoir tout simplement servi à réaliser des donations importantes à d’autres personnes.

S’il n’avait pas consommé ceci, ou disons juste 200 000 €, on aurait 600 000 € de plus dans son patrimoine, s’ajoutant aux 550 000 € de liquidités + les 100 000 € de sa femme – 240 000 € de valeur nette du logement principal – 330 000 € de crédit = 680 000 €. Si on ajoute à leur estimation de 1 200 000 € de leur maison, on arrive à près de 1 900 000 € de patrimoine – très au-delà des 1 300 000 € : le couple aurait dû payer un gros ISF.

Je vous refais le raisonnement différemment. Le couple a estimé la maison du Touquet 1,2 M€ ; Madame a 100 k€ de liquidités ; Madame a donc un patrimoine de 1,3 M€, exactement le seuil de l’ISF. Le couple ne l’a pas payé ni en 2012, ni en 2013, ni en 2014. Cela signifie donc que le patrimoine net ISF (avec décote de 30 %) de M. Macron a dû être constamment négatif. Or, il est constitué de liquidités (inconnues), de son appartement (-250 k€ en net, environ à cause de la décote) et d’un prêt de -350 k€. Bref, pour ne pas payer l’ISF, M.Macron a dû disposer de liquidités (nettes d’impôt) constamment inférieures à 600 k€. Or je vous ai indiqué ses revenus après paiement de ses annuités d’emprunts : 190 k€ en 2010, 820 k€ en 2011 et 600 k€ en 2012, donc environ 1,6 M€ en 3 ans, sans jamais dépasser 0,6 M€ : il aurait donc dilapidé (ou donné) forcément plus d’un million d’euros en 3 ans

Ainsi, quelles que soient les hypothèses, cet argent semble bien avoir disparu de son patrimoine taxable. Après, on peut bien entendu penser qu’il possède au 1/1/2013 des biens non soumis à ISF (tableaux, etc), mais on n’en trouve pas trace dans la déclaration de patrimoine de 2014 – ni d’eux, ni de la contrepartie de leur éventuelle vente…

Après, il y a aussi une hypothèse – peu probable – : l’investissement dans une tontine – pour éviter de payer l’ISF. Mais à mon sens il aurait fallu renseigner la déclaration de patrimoine, au moins en annexe. Ou il pourrait avoir mis ça légalement dans un trust… Ou il pourrait avoir eu des placements défiscalisants en ISF. Cela pourrait expliquer le trou – mais que M. Macron le dise alors… Nos questions sont légitimes. Et son porte-parole dit le contraire (JDD) :

macron

Autre point amusant : si on prend l’estimation qu’a fait réaliser M. Macron par un expert, à 1 200 000 € (c’est donc le calcul qu’il avait fait), on arrive à :

isf-macron

Soi pile-poil juste en dessous du seuil de taxation de l’ISF de 1 300 000 € – le hasard fait parfois bien les choses. Je comprends que le fisc ait tiqué et ait proposé un redressement. Le “J’ai préféré ne pas faire d’action contentieuse contre l’administration” (pour 4 000 € d’impôts – soit le prix de l’avocat…) du message Facebook de M. Macron prend alors tout son sel.

On peut continuer l’exercice patrimonial assez facilement, vu qu’on a l’ISF 2014, donc le patrimoine :

isf-macron

Bing, les liquidités de M. Macron passent donc de 550 000 € à 350 000 € : – 200 000 € de patrimoine dans l’année – normal.

Il faut dire qu’en 2013, à l’Élysée, ses revenus ont été divisés par 10 par rapport à Rothschild (un saint homme….), soit 100 000 € nets d’impôts, mais grevés par 75 000 € d’annuités d’emprunts. Il ne reste donc “que” 75 000 € au couple. Et donc tout est consommé, ainsi que 200 000 €, soit près de 800 euros par jour en 2013.

À ce stade, je précise qu’on a une autre petite inconnue : la date de perception exacte par M. Macron de ses revenus Rothschild en Bénéfices Industriels et Commerciaux. Il est censé avoir des avances, et j’ai donc considéré qu’ils étaient perçus l’année de leur génération (les BIC 2012 sont perçus en 2012). Il peut y avoir un décalage, mais qui décalerait simplement le rythme de consommation (il aurait un peu moins consommé en 2012 mais plus en 2013).

Car dans tous les cas, dans sa déclaration patrimoniale d’octobre 2014, il n’a plus que 280 k€ de placements financiers (+ voiture), donc tous ses revenus Rothschild (soit environ 1 500 000 €) semblent bien avoir été consommés (ou distribués) à ce moment. CQFD.

macron

On peut vérifier nos calculs, en simulant au 1/1/2015 :

isf-macron

La baisse des liquidités est telle que, en effet, le couple n’est plus soumis à l’ISF en 2015.

Au 1/1/2016, l’appartement parisien semble bien avoir été vendu, ce qui fait perdre le bénéfice de la décote de la résidence principale, et le couple est bien de nouveau soumis à l’ISF :

isf-macron

Bref, l’ISF semble bien confirmer l’incroyable rythme de dilapidation patrimonial (parfaitement légal) de M.Macron. C’est à lui, s’il le souhaite, d’en expliquer la raison – surendettement, générosité avec ses proches, prodigalité ou tempérament de flambeur ?

Comme je l’ai déjà dit, c’est sa vie privée, c’est légal, c’est de l’argent privé, mais 1/ cela peut révéler un trait de caractère important à prendre en compte pour quelqu’un qui veut diriger le pays 2/ on reste dubitatif, vu ce rapport à la dépense, sur le fait qu’il ait quitté Rothschild en 2012 pour aller à l’Élysée s’occuper d’économie et de la loi bancaire.

Donc comme d’habitude, comme ces sujets ne sont pas traités dans les grands médias, nous en parlons ici. (Et ici, on ne traite pas des sujets qui sont plutôt bien traités dans les médias – ce blog n’est pas un site d’information, il complète simplement les grands médias).

P.S. je rappelle qu’il s’agit d’un travail sans prétention, à partir de déclarations et données publiques. Tout ceci est à prendre au conditionnel et avec prudence. Il s’agit simplement d’obtenir des explications de M. Macron – sachant qu’il n’y a probablement rien d’illégal.

EDIT : dédicace à tous ceux qui pensent qu’on vous donne 3 M€ en 3 ans dans une banque d’affaires juste pour votre “talent” – lire l’indispensable Martine Orange sur Médiapart

Bon, allez, #PensezPrintemps…

II. Du côté de chez Rothschild (pour experts)

2-1 Historique du groupe Rothschild (France)

Je complète le point précédent par quelques informations sur la période où M. Macron était chez Rothschild. Ce sont des points assez pointus, pour la culture générale je dirais. J’aurais bien aimé avoir en commentaire la vision d’avocats, de fiscalistes et d’experts comptables.

Fondée en 1817 à Paris, Rothschild Frères était la banque historique de la branche française de la famille Rothschild ; elle est devenue la Banque Rothschild en 1967. Comme en 1981 les socialistes étaient encore socialistes, cette banque fut nationalisée par la Loi du 11 février 1982 avec les autres. Elle fut renommée Européenne de Banque et fut confiée dans un premier temps au Crédit commercial de France (CCF) puis revendue en 1991 à la banque Barclays qui l’absorba.

En 1983, la famille de Rothschild réagit à cette nationalisation en re-créant une banque familiale : David de Rothschild fonda alors la Banque Rothschild & Cie. Pour ce faire, il se servit de la société Paris Orléans, holding financière familiale, issue de la société de chemin de fer du même nom (dont la gare centrale était la gare d’Orsay devenue le musée d’Orsay ; cette société avait cessé l’activité ferroviaire en 1937 lors de la création de la SNCF), qui possédait donc Rothschild & Cie Banque (RCB). À la demande du gouvernement en 1983 puis de la branche suisse de la famille Rothschild (possédant le Groupe Edmond de Rothschild), le groupe ne prit alors pas le nom de Rothschild.

En 2012, David de Rothschild réorganisa la structure du groupe (lire ici et ), et en 2015 il décida de renommer Paris Orléans en Rothschild & Co – ce qui suscita la colère de la branche suisse (lire ici, ou ). Enfin, en 2017, Rothschild & Co fusionne avec la Banque Martin Maurel pour créer Martin Maurel Rothschild & Co (source).

isf-macron

isf-macron

Armoiries de la famille Rothschild

2-2 Structure du groupe Rothschild (France)

Le Groupe Rothschild a 3 principales activités : du conseil financier en fusion acquisition (=”M&A”, surtout via Rothschild & Cie et Rothschild & Cie Banque) de la gestion d’actifs (dont Rothschild & Cie Gestion) et du capital-investissement :

isf-macron

Ce groupe de 2 800 collaborateurs a “quelques” filiales :

isf-macron

Il est intéressant de noter que la loi impose désormais un reporting pays par pays, très intéressant, cela donne ceci :

isf-macron

Rien à voir, mais je vous donne aussi ici celui de BNP Paribas.

isf-macron

Intéressant, non ?

Bon, ben, c’est fini, le Conseil constitutionnel a déclaré cette “loi de transparence” inconstitutionnelle le 8 décembre 2016 :

isf-macron

Et puis c’est bien marqué “c’est une super bonne idée la transparence pour lutter contre la fraude fiscale”… mais ça va pas être possible, désolé !

Le tout au nom d’une mystérieuse “Liberté d’entreprendre”, introduite en 1982 (tiens, tiens…) face aux velléités socialistes (décédées d’ailleurs en 1984) :

isf-macron

Le Conseil Constitutionnel se fondant donc sur l’article 4 de la Déclaration de 1789. Pensée émue aux législateurs de l’époque qui, en rédigeant ça, n’imaginaient pas que deux siècles plus tard des amis de l’oligarchie financière s’en serviraient pour contredire le législateur et supprimer un reporting pays par pays des banques. (à l’époque, ils devaient trop craindre la guillotine pour exprimer ce genre d’idées…) Bref, pour la reconnaissance par le Conseil de la “Liberté de ne pas se faire entuber par les banquiers”, merci de prévoir un délai. #Hallucinant

Face à un Conseil constitutionnel qui fait désormais clairement de la politique, il va falloir prévoir une réforme du Conseil, et une possibilité d’appel.

Bref. Venons-en aux aspects financiers. Voici l’évolution du chiffre d’affaires du Groupe Rothschild :

isf-macron

et voici le résultat :

isf-macron

15 % de marge, 15 % de rentabilité (ROE) – pas mal du tout…

Mais on peut d’amuser à faire un zoom sur la Banque Rothschild & Cie (dans le fameux conseil), en regardant ses résultats (hors consolidation) :

isf-macron

On voit donc qu’on a une banque qui travaille (commissions) mais qui est aussi rentière (revenus des titres) :

isf-macron

Eh bien elle a un bénéfice supérieur au produit de son travail – ce qui est assez merveilleux. Ainsi, on constate qu’elle obtient :

Terminons par la structure du groupe :

isf-macron

Le groupe

isf-macron

 Les actionnaires de la Banque

 

isf-macron
isf-macron

Les filiales de la Banque

En synthèse de cette immense pelote inextricable, on a – de ce que je comprends – un truc dans ce genre :

isf-macron

C’est dans “Rothschild et Compagnie” (RCI) (encadrée en rouge) que sont associés les happy fews – dont Macron en 2011 –  et que remontent de gros bénéfices issus des activités de Conseil.

Terminons par dire qu’il s’agit d’une Société en Commandite Simple (SCS), forme assez rare de société. La commandite est une société où les associés sont divisés en deux catégories : les commandités, qui ont le statut de commerçants, qui apportent leur compétence et qui gèrent l’activité ; et les commanditaires, qui apportent de l’argent, mais à qui il est interdit de prendre part à la gestion de la société, et qui ne sont pas responsables au-delà de leur apport. Leur situation est assez proche de celle de prêteurs. Elle est administrée par des gérants, qui sont généralement des commandités, mais ne peuvent être des commanditaires.

2-3 Macron chez Rothschild

Si je parle de ceci, c’est qu’Emmanuel Macron a été nommé gérant de RCI au 1er janvier 2010, puis un an plus tard il devient Associé-gérant :

isf-macron

(Oh, tiens, il a bossé sur la recapitalisation du journal Le Monde…)

On obtient ainsi en 2011 cette nouvelle répartition des parts de Rothschild & Cie :

isf-macron

Spécial “journée de la femme” – Luce Gendry ayant démissionné en 2012…

Vous notez au passage qu’il a un copain de “promotion”, qui est Grégoire Heuzé.

Comme Macron est allé chez Hollande, il faut cependant faire attention qu’il ne manque pas trop de banquiers Rothschild à droite du coup – c’est résolu pour Le Maire :

isf-macron

Je parle de Macron pour un petit point intéressant qui m’a été signalé – légal, mais qui a étonné plusieurs d’entre vous. Pour devenir associé, il a acquis une part sociale, au prix statutaire de 16 €. Il a ensuite revendu 16 € cette part le 15 mai 2012 quand il a démissionné.

isf-macron

Ainsi, cette part se négocie apparemment pour presque rien (cela veut-il dire qu’il a bien vraiment acheté et revendu la part à 16 € ? ), alors qu’elle a évidemment une colossale valeur alors qu’elle devrait avoir une valeur bien plus importante vu les revenus qu’elle procure – ce qui fait parfois un peu tiquer le fisc… Mais rien d’illégal, je le répète – d’ailleurs le fisc l’a forcément vu.

Dernier point qui m’a également été remonté, cette annonce au journal officiel de 2012, datée du 4 mai 2012 pour l’AG du 8 juin (M. Macron démissionne de son mandat de gérant de Rothschildd & Cie le 15 mai) :

isf-macron

isf-macron

Du coup, je ne sais pas à quoi correspondait cette opération, si elle a finalement eu lieu (il a démissionné dans l’intervalle), et que sont devenus du coup ses 370 k€ d’actions de la Financière Rabelais…

Il semble que ce soient ces actions qui aient procuré les Revenus de Capitaux Mobiliers dantesques qu’il a perçus – 290 k€ en 2011 et 270 k€ en 2012.

J’avoue que je ne comprends pas bien, donc si des spécialistes ont un avis – sur ça ou sur le reste, c’est à vous de jouer, merci🙂

 

Source: http://www.les-crises.fr/tiens-et-si-on-validait-l-etude-macron-avec-son-isf-rothschild/


Emmanuel Todd : « En France, nous vivons l’arrivée à maturité du vide »

Tuesday 7 March 2017 at 02:40

Source : Le Comptoir, Emmanuel,Todd03/03/2017

Jeudi 9 février, Emmanuel Todd nous reçoit dans son appartement parisien pour un entretien fleuve sur l’élection de Donald Trump, les États-Unis et la situation politique mondiale, que nous vous proposons en deux parties. Si notre ligne politique peut diverger de celle du chercheur Todd et de sa promotion d’un capitalisme régulé, il demeure pour nous une référence intellectuelle contemporaine majeure. Anthropologue, historien, démographe, sociologue et essayiste, Todd est ingénieur de recherche à l’Institut national d’études démographiques (Ined). Il est principalement connu pour ses travaux sur les systèmes familiaux et leur rôle politique. En quatre décennies, le chercheur s’est notamment illustré en prophétisant l’effondrement de l’URSS (« La chute finale », 1976) et les printemps arabes (« Le rendez-vous des civilisations », avec Youssef Courbage, 2007). Il a également mis en lumière les faiblesses de la construction européenne et de la mondialisation. 

Le Comptoir : Le Brexit – défendu au Royaume-Uni principalement par des forces de droite – et l’élection de Trump présagent-ils de futures grosses surprises lors de l’élection présidentielle française et de l’élection fédérale allemande, qui se dérouleront toutes deux en 2017 ? Vous avez déclaré récemment que « François Ruffin [était] la vraie alternative de gauche à Marine Le Pen. » Un “populisme de gauche” a-t-il encore une chance d’émerger et de rivaliser avec l’extrême droite ?

Emmanuel Todd : Je pense qu’en termes moraux, Ruffin est la seule alternative possible. Le problème n’est toutefois pas la morale, mais de voir ce qui est sociologiquement possible. Mais il y a plusieurs éléments dans votre question. D’abord, il faut séparer les Français des Allemands. Ces derniers sont les grands vainqueurs de l’unification européenne. Les Allemands sont les maîtres, invisibles, mais les maîtres quand même, des donneurs de leçons, avec un excédent commercial qui n’en finit pas d’augmenter. La France, c’est une société bloquée : impuissante, bavarde pour rien, souvent ridicule quand elle n’est pas tragique. Et inconsciente de sa propre dérive. Je regardais une émission de télévision avec des “spécialistes” qui discutaient un après-midi, politologues et journalistes. C’était très drôle. Ils parlaient de Trump, toujours lui. Les commentateurs étaient choqués : un type qui applique son programme ! Ce n’est plus la démocratie, ça ! En France, nous savons ce qu’est la démocratie. Le modèle français, c’est le traité de 2005 : le corps électoral vote et on s’assied sur le résultat. Nous sommes conscients, dans l’Hexagone, qu’une présidentielle sert uniquement à parler. Nous faisons le discours du Bourget, et une fois au pouvoir, nous faisons passer la loi Travail. Aujourd’hui, nous devrions deviner ce que feraient Fillon ou Macron au pouvoir puisque nous savons d’avance qu’ils n’appliqueront pas leurs programmes. Nous avons le droit de ne pas aimer Trump, mais pour le moment, admettons qu’il tente de faire ce qu’il avait annoncé. De même, outre-Manche, nous voyons un Parlement rempli de gens qui n’étaient pas favorables au Brexit mais qui viennent de se plier à la volonté populaire et de produire le vote attendu par Theresa May. Donc il y a une nouvelle pression cruelle qui s’exerce sur le système politique français, de l’extérieur : le modèle réellement démocratique des pays anglo-saxons. Cela crée un élément supplémentaire de déstabilisation de notre système.

« Exclure de la communauté nationale les Français d’origine musulmane, c’est la garantie d’un échec économique et social si l’on tente la sortie de l’euro. »

Il y aura une deuxième pression, à plus long terme, exercée par le monde anglo-saxon. Outre-Atlantique, il y a encore une guerre civile entre les deux camps, les nationaux et les globalistes. Je pense qu’ils vont finir par négocier car aucun camp ne peut l’emporter. Mais il est évident que le virage protectionniste, déjà amorcé sous Obama avec le Buy American Provision de 2009, va s’affirmer. Et ça va marcher. L’Amérique sera donc engagée sur la voie positive de reconstruction interne opposée au libre-échangisme frénétique de l’Allemagne. Ce sera pour notre classe dirigeante une pression terrible. Je ne sais pas si cela mettra dix, quinze ou vingt ans. J’ai peur de ne plus être là pour tirer le bénéfice de cette prophétie sans risque.

Mais en France, il y a autre chose que le libre-échange. Notre situation est absurde au carré parce que l’euro aggrave les effets du libre-échange : il empêche de dévaluer et produit ce taux de chômage de 10 % dont on ne sortira jamais. La perte de notre souveraineté monétaire fait que le président de la République n’a plus aucun pouvoir effectif. En théorie, un président de la République peut tout, en termes de nomination, de dissolution, etc. Mais en pratique, il ne peut plus rien faire et avec Hollande, nous avons vu le modèle réalisé à la perfection. C’était moins visible sous Sarkozy car celui-ci entretenait un état d’agitation et de fébrilité déconcertant. Mais Hollande a mis à nu la réalité : l’absence de président en France. C’est un problème structurel. Et c’est sûrement pour cela que nous voyons une décomposition du sens de la présidentielle. Les gens font tout ce qu’ils peuvent pour mettre en scène un spectacle démocratique ou pseudo-démocratique. Ils font des primaires. Mais qu’est-ce qu’ils font dans ces primaires ? Nous voyons s’exprimer des bouts de corps électoral complètement atypiques. Prenons Fillon : plus de 50 % de gens de plus de 60 ans, retraités et riches, votent pour l’homme qui veut faire du Thatcher avec trente ans de retard. Je passe sur les suites judiciaires du “Penelopegate” qui aggravent ce ridicule démocratique particulier. Des électeurs socialistes, encore moins nombreux, désignent Hamon : arrive le style « on rase gratis ». Mais c’est pareil, ce sont des minorités qui se font plaisir. Pardon, j’oubliais celui qui incarne l’ultime vérité du système, celui qui n’a pas de programme : Macron.

C’est comme si, au fond, les candidats comme les électeurs avaient compris que la présidentielle, c’était pour rire. Alors tout le monde se lâche. Tout le monde fait n’importe quoi. Et cela n’a aucune importance. Car nous allons en réalité élire notre représentant à Berlin. D’ailleurs, Fillon, Macron et Hamon ont chacun d’une façon ou d’une autre déjà fait allégeance à l’Allemagne. Mais j’admets volontiers être, comme tout le monde, dépassé par la situation. L’Amérique me semble compréhensible, tout comme l’Angleterre, l’Allemagne, la Russie, le Japon ou la Chine. La France non. Nous sommes peut-être au bord de la crise de régime.

D’ailleurs, même le FN semble ne plus croire en rien. Un copain avec qui je dînais début février 2017 me disait que la décomposition des partis de l’establishment semblait produire par rebond la décomposition et l’amollissement du discours du FN lui-même. Privé d’adversaire intellectuel, le parti d’extrême droite ne sait plus vraiment quoi dire. Face à la réalité de Trump et du Brexit, il est lui-même confronté à l’irréalisme de ses propositions. Comment passer au protectionnisme et sortir de l’euro sans la participation de tous les citoyens à cette épreuve, salvatrice mais difficile ? Exclure de la communauté nationale les Français d’origine musulmane, c’est la garantie d’un échec économique et social si l’on tente la sortie de l’euro. Ni la monnaie ni le protectionnisme ne peuvent se passer, pour fonctionner, d’une conscience nationale englobante complète. Les dirigeants du FN savent autant que les autres qu’ils ne sont pas sérieux.

« Trump a éloigné les thématiques religieuses du Parti républicain. »

Dans votre livre Qui est Charlie ? qui, au-delà de la polémique, traite de la question religieuse, vous insistez sur les conséquences de la sortie du religieux. Vous dites que les religions doivent être particulièrement prises au sérieux quand on en sort. Vous donnez l’exemple de l’Allemagne nazie, de la Révolution française… Vous liez d’ailleurs déchristianisation et poussées nationalistes, comme dans le cas québécois. Iriez-vous jusqu’à lier la question nationale telle qu’elle se pose aujourd’hui à la question religieuse, notamment en Europe ? Dans certains cas, comme celui de la Russie, le retour du national semble s’accommoder du retour du religieux…

 

[…]

Lire la suite sur : Le Comptoir, Emmanuel,Todd03/03/2017

Kevin “L’Impertinent” Boucaud-Victoire & Adlene Mohammedi

P.S. le flot d’insultes ayant été suffisant, les commentaires sont fermés.

Source: http://www.les-crises.fr/emmanuel-todd-en-france-nous-vivons-larrivee-a-maturite-du-vide/


Emmanuel Todd : « C’est un pays en cours de stabilisation morale qui vient d’élire Trump »

Monday 6 March 2017 at 05:37

Source : Le Comptoir, Emmanuel Todd, 01-03-2017

Jeudi 9 février, Emmanuel Todd nous reçoit dans son appartement parisien pour un entretien fleuve sur l’élection de Donald Trump, les États-Unis et la situation politique mondiale, que nous vous proposons en deux parties. Si notre ligne politique peut diverger de celle du chercheur Todd et de sa promotion d’un capitalisme régulé, il demeure pour nous une référence intellectuelle contemporaine majeure. Anthropologue, historien, démographe, sociologue et essayiste, Todd est ingénieur de recherche à l’Institut national d’études démographiques (Ined). Il est principalement connu pour ses travaux sur les systèmes familiaux et leur rôle politique. En quatre décennies, le chercheur s’est notamment illustré en prophétisant l’effondrement de l’URSS (« La chute finale », 1976) et les printemps arabes (« Le rendez-vous des civilisations », avec Youssef Courbage, 2007). Il a également mis en lumière les faiblesses de la construction européenne et de la mondialisation. 

Le Comptoir : Le 8 novembre 2016, Donald Trump remportait à la surprise générale l’élection présidentielle américaine. Comme lors du référendum sur le Brexit en juin de la même année, ou du rejet français du Traité établissant une Constitution pour l’Europe (TCE) en mai 2005, les élites politico-médiatiques n’avaient rien vu venir. Pourquoi, à chaque scrutin, les élites semblent-elles de plus en plus déconnectées des électeurs ?

Emmanuel Todd : Je crois que la séparation fondamentale entre peuple et élites – c’est une image, car c’est toujours plus compliqué – a pour point de départ la différenciation éducative produite par le développement du supérieur. Au lendemain de la guerre, dans les démocraties occidentales, tout le monde avait fait l’école primaire – aux États-Unis, ils avaient également fait l’école secondaire –, les sociétés étaient assez homogènes et très peu de gens pouvaient se vanter d’avoir fait des études supérieures. Nous sommes passés, ensuite, à des taux de 40 % de gens qui font des études supérieures par génération. Ils forment une masse sociale qui peut vivre dans un entre-soi. Il y a eu un phénomène d’implosion sur soi de ce groupe qui peut se raconter qu’il est supérieur, tout en prétendant qu’il est en démocratie. C’est un phénomène universel et pour moi, c’est la vraie raison. Il y a des décalages. L’arrivée à maturité de ce groupe social se réalise dès 1965 aux États-Unis. En France, nous avons trente ans de retard et ça s’effectue en 1995. Les gens des diverses strates éducatives ne se connaissent plus. Ceux d’en haut vivent sans le savoir dans un ghetto culturel. Dans le cas d’un pays comme la France, nous avons par exemple l’apparition d’un cinéma intimiste, avec des préoccupations bourgeoises déconnectées des cruautés de la globalisation économique. Il y a des choses très bien dans cette culture d’en haut. L’écologie, les festivals de musique classique ou branchée, les expositions de peinture impressionniste ou expressionniste, le mariage pour tous : toutes ces choses sont bonnes. Mais il y a des personnes avec des préoccupations autres, qui souhaitent juste survivre économiquement et qui n’ont pas fait d’études supérieures. C’est en tout cas ce que j’écris dans mes livres, je ne vais pas changer d’avis soudainement.

Une analyse qui rejoint en partie celle de Christopher Lasch en 1994, dans La révolte des élites et la trahison de la démocratie (The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy)…

Ben écoutez, La révolte des élites, je l’ai là [il attrape un exemplaire de The Revolt of the Elites posé sur sa table]. Oui, peut-être. Honnêtement, j’avais publié le bouquin de Lasch sur le narcissisme [La culture du narcissisme, NDLR] quand j’étais jeune éditeur chez Laffont. J’avais été très attentif à ce livre, dont j’avais revu la traduction. Mais je ne suis même plus sûr d’avoir lu La révolte des élites. C’est ça, l’âge. [Rires] Mais je sais de quoi il s’agit, c’est vrai que c’est à peu près ça. Par contre, je diverge de Lasch et de gens qui dénoncent les élites pour supposer des qualités spéciales au peuple. Je l’ai cru à une époque, mais je n’en suis plus là. Les élites trahissent le peuple, c’est certain. J’estime même de plus en plus qu’il y a au sein des élites des phénomènes de stupidité induits par le conformisme interne du groupe, une autodestruction intellectuelle collective. Mais je ne pense plus que le peuple soit intrinsèquement meilleur. L’idée selon laquelle, parce qu’il est moins éduqué ou moins bien loti, le peuple serait moralement supérieur est idiote, c’est une entorse subtile au principe d’égalité. Adhérer pleinement au principe d’égalité, c’est être capable de critiquer simultanément élites et peuple. Et c’est très important dans le contexte actuel. Cela permet d’échapper au piège d’une opposition facile entre un populo xénophobe qui vote Le Pen et les crétins diplômés qui nous ont fabriqué l’euro. C’est toute la société française qu’on doit condamner dans sa médiocrité intellectuelle et morale.

En 2008, alors que presque toute la gauche se félicitait de l’élection d’un Noir à la Maison-Blanche, vous étiez l’un des rares à émettre des doutes sur ce symbole. Selon vous, Barack Obama n’avait pas de programme économique. La percée inattendue de Bernie Sanders à la primaire démocrate et la victoire de Trump sont-elles les symptômes de l’échec d’Obama ?

Je crois que c’est le symptôme d’un changement d’humeur de la société américaine dans son cœur, qui est un cœur blanc puisque la démocratie américaine est à l’origine blanche. Depuis longtemps, je suis convaincu que parce que les Anglo-Saxons ne sont au départ pas très à l’aise avec la notion d’égalité, le sentiment démocratique aux États-Unis est très associé à l’exclusion des Indiens et des Noirs. Il y a quand même 72 % du corps électoral qui est blanc. Obama a mené une politique de sauvetage de l’économie américaine tout à fait estimable dans la grande crise de 2007-2008, mais il n’a pas remis en question les fondamentaux du consensus de Washington : le libre-échange, la liberté de circulation du capital et donc les mécanismes qui ont assuré la dégradation des conditions de vie et la sécurité des classes moyennes et des milieux populaires américains. Dans les années 1950, la classe moyenne comprenait la classe ouvrière aux États-Unis. Les ouvriers ont été  “reprolétarisés” par la globalisation et les classes moyennes ont été mises en danger. Il y a eu, en 2016, une sorte de révolte.

Le premier élément qui m’a intéressé – et c’était normal puisque dans L’illusion économique (1997) je dénonçais le libre-échange –, c’est la remise en question du libre-échange, qui était commune à Trump et Sanders. C’est parce que le protectionnisme est commun aux deux que nous pouvons affirmer être face à une évolution de fond de la société américaine. C’est vrai que le phénomène Trump est incroyable : le type fout en l’air le Parti républicain pendant la primaire et fout en l’air les Démocrates ensuite. Mais jusqu’au bout, et des vidéos le prouvent, j’ai cru que c’était possible, parce que j’étais tombé sur des études démographiques largement diffusées. Je ne sais plus si je les avais vues mentionnées dans le New York Times, dans le Washington Post, ou dans les deux. Elles révèlent que la mortalité des Blancs de 45-54 ans a augmenté aux États-Unis entre 1999 et 2013. Pour les Américains, le débat sur les merveilles du libre-échange est clos. Ils ont compris. Il faut partir de l’électorat et pas de Trump. L’électorat est en révolte et les États-Unis ont une tradition démocratique plus solide que la nôtre, à la réserve près qu’il s’agit d’une démocratie blanche.

« Trump a donc foutu en l’air le Parti républicain racial avec ses thématiques économiques, pendant que le Parti démocrate est resté sur ses positions raciales banales. »

Beaucoup de commentateurs ont vu dans l’élection du milliardaire Trump une victoire des classes populaires. Or, encore une fois, celles-ci se sont majoritairement abstenues. En outre, 58 % des Blancs ont voté Trump, contre 37 % pour Clinton. Réciproquement, 74 % des non-Blancs ont préféré la candidate démocrate. L’élection de Trump ne reflète-t-elle pas le retour de la question ethnique dans une Amérique qui s’est crue post-raciale après l’élection d’Obama ?

Non, je ne le pense pas. Bien entendu, la question raciale reste lancinante. D’abord, il faut savoir que la situation des Noirs, toujours ghettoïsés, et celle des Hispaniques, pauvres mais en voie d’assimilation, n’est pas du tout la même, même si le Parti démocrate a un discours de ciblage général des minorités. Comme aux précédentes élections, les Noirs ont voté très majoritairement pour la candidate démocrate (89%), mais avec un taux d’abstention plus élevé, parce que les Clinton sont assez ambivalents dans leurs rapports à la question, contrairement à Obama. Toute la politique américaine, depuis Nixon – et ça a culminé avec Reagan –, a été marquée par un Parti républicain qui a fait fortune en devenant un parti blanc, résistant aux mesures de déségrégation et à l’affirmative action (discrimination positive). Les Républicains ont inventé la technique du dog-whistle, c’est-à-dire du “sifflet à chien”, qui agit sans qu’on l’entende. Un langage codé permet de bien faire comprendre à l’électorat blanc qu’il faut détruire le welfare (les aides sociales), censé n’aller qu’aux Noirs. C’est ce qui a permis au Parti républicain de mener une politique économique absolument défavorable à son propre électorat, c’est-à-dire de diminuer les impôts des riches et de continuer à foutre en l’air la classe ouvrière blanche par le libre-échange. Trump est à l’opposé du dog-whistle. Il avait un double discours : d’un côté, un discours xénophobe tourné contre le Mexique – et pas contre les Noirs, qui sont sur le territoire américain – et de l’autre, des thématiques économiques quasi-marxistes. Pour moi, Trump est le contraire du racialisme républicain traditionnel. Il a mené le débat sur le terrain économique, face à des Démocrates qui activaient inlassablement, sur le mode de la bien-pensance, la question raciale, en se présentant comme les défenseurs des Noirs et en expliquant que si on appartenait à tel groupe, on devait voter de telle manière. Trump a donc foutu en l’air le Parti républicain racial avec ses thématiques économiques, pendant que le Parti démocrate est resté sur ses positions raciales banales.

Justement, vous semblez voir, dans l’élection de Donald Trump, l’amorce d’une sortie de la séquence néolibérale qui avait été marquée par l’arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher et Ronald Reagan au début des années 1980. La dénonciation du libre-échange ou la volonté de rétablir le Glass-Steagall Act– aboli par l’administration Clinton – qui séparait les banques de dépôt des banques d’affaires sont effectivement en rupture avec le discours tenu à la fois par les Républicains et les Démocrates. Les premières mesures de dérégulation financière annoncées dès le lendemain de son élection, comme l’abolition de la loi Dodd-Frank – régulation timide des marchés financiers introduite sous Obama – ne sont-elles pas plutôt le signe que ce discours protectionniste et régulateur n’était qu’une façade et que le consensus de Washington continue de faire loi ?

Le problème, c’est qu’en France, nous sommes confrontés à une méconnaissance de ce qu’est le protectionnisme. C’est un certain type de régulation par l’État, mais ce n’est surtout pas une technique de régulation hostile au marché. C’est la fixation d’une limite autour d’un marché, qui doit rester capitaliste et libéral. Dans la théorie classique du protectionnisme, il n’y a pas de contradiction entre le fait de prendre des mesures de libéralisation en interne et le fait de protéger en externe. En formalisant, nous pourrions dire qu’il y a deux forces qui s’opposent aux États-Unis : un parti national et un parti globaliste. Nous pourrions dire que le parti national se caractérise par une protection aux frontières – des biens, de la circulation des personnes, le tout avec une bonne base xénophobe – mais qui n’est pas hostile au marché et qui a pour seul but de relancer un capitalisme interne qui fabrique des biens. En gros, il explique que les entreprises peuvent se faire de l’argent autrement. En face, il y a le parti globaliste qui va laisser les frontières ouvertes, en expliquant que cela va fonctionner même si la théorie économique explique que cela va générer des dégâts et des inégalités, le tout devant être compensé par de la redistribution et du welfare. J’ai obtenu la réédition de l’ouvrage classique de l’économiste Friedrich List sur le protectionnisme [Système national d’économie politique, Gallimard, 1998, NDLR], que j’ai préfacée en expliquant bien que le protectionnisme n’était qu’une branche du libéralisme. Marx détestait List. Je me suis retrouvé dans des émissions de radio face à des incultes qui me répliquaient : « Vous voulez transformer la France en Corée du Nord ? » Ce sont des ignorants qui pensent qu’en économie, le protectionnisme est une branche de l’étatisme. Évidemment, ici, je fais comme si Trump et son équipe avaient une conscience parfaite de ce qu’ils font, ce qui n’est pas le cas. J’évoque l’idéal-type wébérien du libéralisme protectionniste.

« Quand j’ai pensé que Trump pouvait être élu, j’étais au fond en train d’admettre que mon modèle anthropologique était insuffisant. »

Vous expliquez donc que Trump est le promoteur d’un capitalisme national qui va relancer la production de biens. Mais pour le moment, il a surtout annoncé des mesures de dérégulation de la finance et a manifesté son envie de revenir sur les maigres mesures de régulation de l’administration Obama !

Mais ce n’est pas cela qui est important.

La financiarisation de l’économie a généralement nui au capitalisme productif que vous défendez…

Mais l’important, c’est la protection contre l’arrivée de marchandises fabriquées par des gens sous-payés. Une économie qui se protège avec des barrières tarifaires à 30-40 % – c’est une tradition américaine, c’était ainsi avant la guerre de 1914, si mes souvenirs sont exacts –, c’est une économie qui, même si toutes les règles internes deviennent plus libérales, est soumise à des contraintes différentes. C’est une économie où les ouvriers et les ingénieurs vont redevenir nécessaires ! Alors il y aura toujours des gens – c’est le principe du capitalisme – qui voudront se faire de l’argent. Il faudra seulement qu’ils le fassent autrement. Si nous nous en tenons à une approche marxiste, et souhaitons combattre les puissances d’argent, éventuellement abolir le Capital, nous restons à côté du problème. La question, c’est de savoir s’il existe une technique qui permet que des gens s’enrichissent et que cela profite à tout le monde dans l’espace national.

Vous avez longtemps soutenu que l’acceptation par le monde anglo-saxon de la globalisation et de la montée des inégalités qui en découle renvoyait à la structure familiale de type nucléaire et individualiste, indifférente à la valeur d’égalité. Le Brexit et l’élection de Trump ne sont-ils pas, au contraire, la preuve que l’action des peuples peut échapper, du moins dans certaines limites, aux déterminations anthropologiques ?

Je suis dans un manuscrit où je suis en train de traiter justement cette question. Pour moi, c’est la vraie question. Jusqu’à présent, j’étais résigné à l’enfermement de “l’anglosphère” dans son néo-libéralisme par son indifférence à l’égalité. Dans l’ensemble, mon modèle anthropologique ne fonctionne pas mal. L’idée d’un communisme fabriqué par une famille communautaire, égalitaire et autoritaire explique très bien l’histoire russe. La famille nucléaire absolue explique très bien le modèle libéral anglo-saxon, ainsi que le développement du capitalisme. Le fait que les gens ne sont pas très sensibles aux États-Unis ou en Angleterre à l’idéal d’égalité explique pourquoi le capitalisme y fonctionne de manière bien huilée et pourquoi les individus ne sont pas choqués quand certains font du profit. Mais entre 2000 et 2015, nous avons atteint la limite du modèle. Et bien sûr, les peuples peuvent transcender leur détermination anthropologique, mais à un certain niveau de souffrance seulement. C’est pour cela que la hausse de la mortalité a été un avertisseur qui m’a permis d’échapper à mon propre modèle. Quand j’ai pensé que Trump pouvait être élu, j’étais au fond en train d’admettre que mon modèle anthropologique était insuffisant. Mais c’est finalement la même chose qui s’est passée avec la chute du communisme.

Ce que vous écriviez dans La chute finale (1976)…

Mon modèle anthropologique dit que les traditions communautaires russes expliquent très bien l’invention du communisme. Mais de même que le libéralisme a emmené la société américaine à un niveau de souffrance exagéré, qui a provoqué la révolte de 2016, le communisme avait atteint vers 1975 un niveau d’absurdité tel, avec une hausse de la mortalité infantile, qu’il s’est effondré en 1990. Par contre, ce que nous dit déjà l’existence ultérieure de la Russie, c’est que l’atteinte de ce point de rupture peut amener une modification du système économique, mais ne fait pas sortir définitivement la population de sa culture. Je pense qu’il y a une démocratie en Russie. Les Russes votent à 80 % pour Poutine. C’est une forme de démocratie autoritaire. Mais le fonctionnement de la société garde beaucoup des traditions communautaires d’autrefois. Le système américain tente de se réformer, mais il va garder ses traits libéraux et non égalitaires fondamentaux. D’ailleurs, quand je décrivais un protectionnisme qui laisse fonctionner le capitalisme en interne, c’est exactement cela que j’évoquais.

« Le retour au national promu par Trump devrait s’accompagner d’une “désuniversalisation” des problèmes. »

En 1981, vous introduisiez Christopher Lasch en France, en faisant traduire La culture du narcissisme (sous le titre Le Complexe de Narcisse). L’intellectuel américain y analysait la destruction de la structure familiale américaine et ses conséquences néfastes. Les élections que nous venons de vivre s’inscrivent-elles dans la séquence décrite par Lasch ?

Lire la suite sur : Le Comptoir, Emmanuel Todd, 01-03-2017

Source: https://www.les-crises.fr/emmanuel-todd-cest-un-pays-en-cours-de-stabilisation-morale-qui-vient-delire-trump/


Revue de presse du 06/03/2017

Monday 6 March 2017 at 02:45

Merci à nos contributeurs pour cette revue de presse. Pour rejoindre l’équipe de la revue, vous pouvez postuler via le formulaire de contact du blog.

Source: https://www.les-crises.fr/revue-de-presse-du-06032017/


Le principe du Décodex illustré par l’équipe Macron : discréditer les gêneurs

Sunday 5 March 2017 at 04:15

Fantastique illustration du danger du Décodex – ou, plus précisément, d’une liste officielle de sites “non fiables” établie par le journal Le Monde.

J’ai comparé dès le début ce Décodex avec l’Index de l’Église Catholique. Nous allons voir que les mêmes conséquences surviennent sur la liberté d’expression.

C’est la raison pour laquelle j’en parle autant, et que ce sujet ne m’a jamais fait sourire – malgré son aspect éminemment ridicule en première approche.

Comme je vous l’ai dit, beaucoup de choses se passent sur mon compte Twitter depuis une semaine – jetez-y un oeil @OBerruyer (n’hésitez pas à nous suivre)

Je rappelle que les 25 questions que j’ai posées à Macron (à partir d’un article du Canard Enchaîné et de ses déclarations de patrimoine) sont ici, avec une synthèse au début de l’article.

I. La question 18…

J’ai continué à tweeté hier certaines questions à Emmanuel Macron. À force, on est arrivé à la question 18 – évidemment plus accessoire que les autres :

macron

La TeamMacron  (“équipe Macron”) est constitué des membres de l’équipe du Leader Minimo, dont, apparemment Sylvain Maillard @SylvainMaillard son porte-parole :

CEO = PDG

Eh bien, croyez-le : j’ai obtenu une réponse officielle de l’équipe Macron ! Et du lourd (3 mars, 17h49) :

Ah, le LDD n’est pas plafonné, fichtre, il faut d’urgence changer la documentation officielle :

Mais que dit le lien de la TeamMacron vers le site du Crédit Mutuel ?

On voit pourtant clairement que le Crédit Mutuel a simplement fait du marketing et a greffé deux simples livrets bancaires sur un LDD…

EDIT : on m’a envoyé les Conditions générales du Crédit Mutuel (merci A.), ce qui confirme :

Il aurait donc fallu scinder en 3 la somme dans sa déclaration de patrimoine :

Notez que – oh surprise -, c’était bien mon hypothèse principale sur ce point accessoire, dans mon article aux 25 questions à Macron (dernière phrase) :

Le point intéressant, là, pour moi, était le manque de soin dans la rédaction de la déclaration. Déclarer 40 000 € pour un LDD, c’est comme déclarer 158 000 €sur un Livret A, il y a un problème, ça doit faire “tilt” quand on a quelques connaissances de base sur les placements – a fortiori quand on est un Inspecteur général des finances, et qu’on est ministre de l’Économie…

Mais il y a mieux. Beaucoup mieux.

II. L’Index Décodex

La Team Macron avait dit autre chose avant de se sentir obligée de faire semblant de répondre (16h57 et 17h18) :

Impressionnant, non ?

J’ai pensé dès le début (voir ce billet) qu’il arriverait très vite ce genre de choses avec l’Index du Monde, qui a pour simple objet de déconsidérer une source dans son intégralité. Ce phénomène se répand depuis sur les réseaux sociaux à mon détriment :

samuel-laurent samuel-laurent

samuel-laurent

On comprend bien que ce Décodex mine ma Liberté d’expression et de Débat : mes contradicteurs s’appuieront désormais toujours sur l’autorité du Monde pour discréditer mes propos a priori, sans même prendre la peine d’y répondre…

Et la Team Macron @TeamMacron2017 se lâche encore aujourd’hui – et passe la deuxième couche, montrant toute son honnêteté intellectuelle :

Les types ne sont pas élus, et ils se permettent déjà ça. Ca promet pour la suite…

ce que perçoivent bien les lecteurs malins :

Bon, en tous cas, avec son #AuRevoir (unique pour moi, merci), la Team espère sans doute pouvoir me congédier comme un domestique, me prenant peut-être pour un des journalistes qui le suit au quotidien.

Bref, je ne lâche rien :

Enfin, vous voyez bien que, quand on a des choses à cacher, on applique souvent une stratégie visant à attirer l’attention sur des sujets les plus accessoires possibles (genre le peu de soin mis à remplir la case LDD), loin du sujet problématique (genre avoir gagné l’équivalent d’une petite cagnotte du loto et à avoir tout dilapidé en 2 à 3 ans, en étant en plus à l’Élysée – ce qui est parfaitement légal, mais qui interroge sur la personnalité de M. Macron).

Mais comme la Team Macron aime les anecdotes, continuons… Par exemple, juste pour rire, avec l’association de financement de la campagne, déclarée au Tribunal de Commerce (archive) comme ayant une “Activité des agents et courtiers d’assurances”

Eh, Monsieur Macron, je peux avoir un devis pour l’assurance de ma voiture, svp ?

Plus sérieusement, même la simple déclaration de sa voiture pose question :

Au delà des erreurs et détails anecdotiques, peut-il 1/ confirmer qu’il a acheté à 28 ans une voiture à 40 000 € 2/ indiquer son salaire annuel l’année de l’achat…

Merci de vos réponses – on passera ensuite aux plus sérieuses – sur vos dépenses, sur l’achat de votre appartement, sur les affaires de M. Hermand, sur vos interventions sur le projet de loi de séparation des activités bancaires, etc… Et ce malgré votre proverbiale timidité :

Bref, comme on dit :

Source: http://www.les-crises.fr/le-principe-du-decodex-illustre-par-lequipe-macron-discrediter-les-geneurs/


Décodex, “fact-checking”, “post-vérité” : de quoi sont-ils le nom ? par Dany Caligula

Sunday 5 March 2017 at 03:59

Je vous propose cette vidéo de Dany Caligula sur notre sujet de prédilection…

Il est rassurant de voir que les créateurs sur Internet commencent à comprendre l’inquiétante portée de ce projet…

Allez voir la chaine Youtube de Dany, il traite de plein de sujets intéressants (Philosophie, Éthique, Politique…)  🙂

Source: http://www.les-crises.fr/decodex-fact-checking-post-verite-de-quoi-sont-ils-le-nom-par-dany-caligula/