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La gauche et l’euro : liquider, reconstruire – par Frédéric Lordon

Wednesday 22 July 2015 at 00:35

1. L’euro interdit radicalement toute politique progressiste possible.

2. S’il en était encore besoin, le traitement criminel infligé à la Grèce en six mois de brutalisation (rebaptisée « négociation ») prouve que l’entreprise de « transformer l’euro », ou l’hypothèse d’un « autre euro possible », sont des chimères qui, par désillusions successives, ne mènent qu’à l’impasse et à la désespérance politiques.

3. Abandonner aux extrêmes droites (qui au demeurant n’en feront rien [1]…) toute perspective politique d’en finir avec l’euro et ses institutions est une faute politique qui condamne les gauches européennes à l’impuissance indéfinie.

4. Sauf à continuer de soupirer après ce qui n’arrivera pas — un « autre euro » et l’« Europe sociale » qui va avec — le réarmement des gauches européennes passe donc impérativement par l’imagination de l’après-euro.

L’avenir de la gauche se joue entre ces quatre propositions.

Les refus « internationalistes » de penser

A ceux qui, sincèrement de gauche, se sont refusés si longtemps à voir l’impasse de l’euro, pour entretenir l’illusion d’un improbable « rapport de force » qui permettrait d’en changer la configuration, à ceux à qui il aura fallu le calvaire grec pour (commencer à) mesurer la radicalité idéologique des institutions européennes, il faut dire qu’après que cette erreur aura assommé les Grecs de Syriza, elle assommera les Espagnols de Podemos, et puis que nous y passerons tous.

Depuis tant d’années, certains secteurs de la gauche, par un mélange d’internationalisme postural et de reddition sans combattre face aux menées récupératrices du Front national, ont refusé de voir ce qui était pourtant sous leurs yeux : un despotisme économique irréductible. Despotisme, puisqu’on ne peut nommer autrement une entreprise aussi résolue de négation de la souveraineté démocratique, et ceci, d’ailleurs, indépendamment de toute considération d’échelle territoriale : soustraire la politique économique à la délibération parlementaire ordinaire pour en inscrire les orientations fondamentales dans un texte constitutionnel, en l’occurrence celui des traités, est un acte d’une telle portée qu’on s’est toujours demandé comment il pouvait se trouver des personnes pour qualifier l’Europe de « démocratique » sans aussitôt sombrer dans le ridicule. Irréductible, car c’est un despotisme sous influence, l’influence d’un pays qui joue ce qu’il se représente comme ses intérêts vitaux dans un agencement institutionnel entièrement fait à sa mesure : l’Allemagne.

On ne compte plus les intellectuels qui, sous l’emprise de leurs terreurs nocturnes, ont fini par renoncer à penser quoi que ce soit qui aille au cœur de la situation européenne, et se retrouvent au comble du dénuement face à l’extrême, mais trop prévisible, violence faite à la Grèce. Il fallait vraiment avoir perdu toute colonne vertébrale pour s’interdire de penser à ce point, de peur d’avoir l’air de penser comme le Front national, et (surtout) sans être capable de penser ce qu’il y avait à penser autrement que le Front national : penser la souveraineté en général, penser les conditions de possibilité de son redéploiement international, penser l’idiosyncrasie allemande et ses inévitables effets dans toute construction monétaire européenne.

On se demande encore en quelles interdictions ces gens-là ont pu s’enfermer pour en arriver à oublier que la souveraineté, dans son concept, c’est-à-dire comme « décider en commun », n’est pas autre chose que la démocratie même, qu’il y faut un peu plus que quelques bons sentiments universalistes pour constituer un peuple de peuples [2], ou que questionner le rapport de la société allemande à la chose monétaire n’est pas plus germanophobe que questionner le rapport de la société américaine aux armes à feu n’est américanophobe. Et plus généralement pour en arriver à un degré de cécité volontaire tel qu’il aura rendu impossible toute analyse des données réelles des compatibilités — ou des incompatibilités — qui déterminent la viabilité d’une construction monétaire et politique commune.

Il aura fallu en particulier atteindre ce niveau de brutalisation d’un pays par un autre, sans précédent en temps de paix, pour qu’enfin la question de l’Allemagne commence à échapper aux censures qui ont jusqu’ici prononcé leurs interdictions enveloppées de vertu. On reconnaît l’indigence d’une pensée à son incapacité à traiter aucun problème autrement que dans des coordonnées morales. Mais la manie de passer toute question au filtre d’une interrogation préalable de vertu est le plus sûr moyen de passer à côté de ce qu’il y a à comprendre, de toute saisie positive du réel, indépendamment de tout jugement, qui viendra à son heure. On peut, par exemple, s’interroger sur les mécanismes sociaux et les héritages historiques qui soutiennent la passion américaine pour les armes sans avoir fait connaître son opinion sur la question, ni lui soumettre entièrement l’analyse. Faute d’avoir envisagé de penser le rapport tout à fait singulier de l’Allemagne à la monnaie autrement que sous le crible débile de la germanophobie ou de la germanophilie, le refus de penser se retrouve logiquement percuté par la violence d’un fait, et reconduit à son incapacité de comprendre.

Encore un pilote enfermé dans le cockpit

Au moins les dénégations du pharisaïsme sont-elles maintenant devenues intenables, quitte d’ailleurs à se donner des formulations néo-éclairées d’une naïveté touchante : l’Allemagne est « le nouveau problème de l’Europe », écrit ainsi François Bonnet [3]. Le nouveau problème… C’est juste le problème constitutionnel de la monnaie unique, et il est consigné depuis 1991 dans le texte des traités. Un pays, l’Allemagne, a imposé ses obsessions monétaires à tous les autres. Tous les pays vivent avec les obsessions de leur roman national, c’est bien leur droit, en tout cas à court et même moyen terme il n’y a rien à y faire. C’est qu’un pays exige d’autres qu’ils vivent sous ses propres manies, quand ces manies-là ne sont pas les leurs, qui est le commencement des problèmes. Contrairement à ceux qui ne peuvent pas penser l’hégémonie allemande sans des images de Panzer ou de casque à pointe, il faut redire que l’Allemagne dans cette affaire n’a jamais poursuivi de projet positif de domination, et que ses comportements n’ont jamais été gouvernés que par la peur panique de souffrir, dans le partage communautaire, l’altération de principes qui lui sont plus chers que tout [4]. Or il ne faut pas s’y tromper : une angoisse collective, surtout quand elle est de cette intensité, ne détermine pas moins à la violence que les menées conquérantes de l’hégémonie positive. Peut-être même au contraire. C’est qu’il y a dans les projets hégémoniques un reliquat de rationalité auquel les paniques monétaires allemandes sont devenues totalement étrangères.

En témoigne la brutalité aveugle avec laquelle l’Allemagne a décidé de châtier la Grèce, mais plus encore son inaccessibilité à toute argumentation rationnelle. Quand la presse française, collée au cul de Sapin et de Moscovici, se contente pour tout récit des négociations de leur version, avec le consciencieux d’un bureau de propagande d’Etat et le label de la « presse libre » [5]), faisant à peu de choses près passer les négociateurs grecs pour des clodos égarés, des paysans du Danube ignorants des usages et des codes — pensez donc, ils n’ont même pas de cravate —, bref incapables de se tenir dans la bonne société européenne, et avec lesquels il est tout simplement impossible de discuter, Varoufakis [6] et Tsakalotos [7] ont, eux, découvert, stupéfaits, un club de l’eurozone semblable à un hôpital de jour, une réunion de grands autistes à qui il est impossible de faire entendre la moindre argumentation économique, et dont la psychorigidité terminale ne connaît plus que la conformité aux règles, fussent-elles de la dernière absurdité, et le continent entier dût-il en périr.

Que désormais la majorité des économistes, ceux du FMI en tête, et Prix Nobel compris, n’hésitent plus à hurler au fou en découvrant les dernières trouvailles de l’Eurogroupe — rajouter une dose massive de ce qui a déjà méthodiquement détruit l’économie grecque —, n’est plus d’aucun effet. On peut déjà dire, à la louche, mais sans grand risque de se tromper de beaucoup, qu’en étant certain de précipiter la Grèce dans une récession carabinée pour 2015, le « plan » supposément fait pour réduire le ratio de dette lui fera passer les 200 % de PIB, ainsi que le taux de chômage les 30 %, à horizon d’un an ou deux. Mais peu importe, l’essentiel est de les passer dans les règles. À ce moment, vient immanquablement à l’esprit l’image du cinglé enfermé dans le cockpit de l’Airbus, toutes manettes bloquées en mode descente (l’avion était un modèle européen, et le pilote allemand, on ne le fait pas exprès, c’est comme ça) ; le monde entier tambourine au-dehors (« ouvre cette putain de porte ! ») — mais comme on sait la conséquence annoncée n’était pas de nature à entamer la détermination de l’intéressé.

Comme toute métaphore, celle-ci a sa limite : l’Allemagne n’a pas le projet de pulvériser l’union monétaire. Elle est juste obsédée par l’idée de continuer à y maintenir les principes qui lui ont réussi quand elle était seule, dont elle a fait une identité nationale de substitution, et dont rien au monde ne pourra la détacher — et certainement pas le renvoi d’un peuple entier, ou de plusieurs, au dernier degré de la misère. Qu’une frange de gauche radicale en Allemagne se déclare scandalisée et se lève contre son propre gouvernement, d’ailleurs en une démonstration de ce qu’est vraiment l’internationalisme — ne pas endosser aveuglément les faits et gestes de son pays parce que c’est son pays —, demeure un fait minoritaire et n’ôte rien à la massivité du consensus social — et non politique —, transpartisan, dont la croyance monétaire allemande se soutient : pour autant qu’on puisse lui accorder quelque confiance, un sondage publié par Stern indique que la position d’Angela Merkel à l’Eurogroupe du 12 juillet est approuvé par 77 % des Verts, et 53 % des sympathisants de Die Linke — 53 % de Die Linke…

François Hollande, le « grand frère de Tsipras » ?

Mais le vrai mystère européen n’est pas en Allemagne — à laquelle, finalement, on ne saurait reprocher de vouloir vivre la monnaie selon l’idée qu’elle s’en fait, et d’après les traumas de son histoire. Il est dans d’autres pays, la France tout particulièrement, qui se sont appropriés la manie allemande hors de tout contexte propre, alors que rien dans leur histoire ne les vouait à épouser une telle particularité — alors que tout les vouait plutôt à ne pas l’épouser —, et sur un mode proprement idéologique, jusqu’à finir par y voir une forme désirable de rationalité économique — évidemment une « rationalité » assez spéciale, puisqu’elle est étrangère à toute discussion rationnelle —, un peu à la manière d’athées qui, non contents de s’être convertis au dogme de l’Immaculée conception, entreprendraient de s’y tenir par ce qu’ils croiraient être une décision de la raison. A ce stade, et l’on y verra un indice du degré de dinguerie de la chose, on ne peut même plus dire qu’il s’agit simplement de la « rationalité » du capital : le capital n’est pas fou au point de désirer la strangulation définitive, à laquelle lui-même ne peut pas survivre — et les forces capitalistes américaines, par exemple, assistent, interloquées, à l’autodestruction européenne. Mais ces considérations n’entrent pas dans la haute pensée des élites françaises, qui cultivent l’aveuglement des convertis de fraîche date à titre transpartisan, comme l’Allemagne la croyance de première main.

On reconnaît en effet le fin fond de la bêtise à ce que, non contente de se donner libre cours, elle se vante de ses propres accomplissements. François Hollande, précocement parti dans la chasse aux gogos, est désormais occupé à faire croire qu’il est de gauche, ou plutôt à faire oublier à quel point il est de droite. Aussi, avec un art du pointillisme qui fait plutôt penser à la peinture au rouleau, le voilà qui pense se refaire la cerise « à gauche » en « venant au secours de Tsipras ». Il n’en faut pas plus pour que l’éditorialisme de service, spécialement celui qui s’est donné pour vocation de ne jamais rien faire qui puisse contrarier la droite complexée en situation électorale, fait bruyamment chorus : « Hollande est devenu une sorte de grand frère européen de Tsipras », s’extasie Libération [8]…

S’il y avait la moindre lueur de vitalité dans le regard de Hollande, on pourrait à la rigueur le songer en Caïn comme grand frère tabasseur. Mais même pas : il n’y a rien d’autre à y voir que la combinaison de l’abrutissement idéologique le plus compact et de l’opportunisme électoral le plus crasse — non sans se souvenir qu’il n’y a de manœuvres opportunistes réussies que s’il y a des relais d’opinion suffisamment veules pour les proclamer réussies. Dans le cas présent cependant, les chefferies rédactionnelles n’ont pas fini de mouiller la chemise : c’est qu’il va falloir de l’imagination à la hauteur du lyrisme pour faire avaler comme épopée de gauche d’avoir si bien « aidé » Tsipras à se raccrocher à la corde du pendu. Quand se feront connaître les splendides résultats de l’équarrissage économique auquel Hollande, en grand frère, aura conduit Tsipras par la main, il nous sera donné une nouvelle occasion, plus fiable peut-être, d’évaluer la teneur réelle de « gauche » de cette forme toute particulière de la sollicitude social-démocrate.

Syriza (Tsipras), Podemos (Iglesias) : prendre ses pertes dès maintenant

Et ailleurs en Europe, du côté de la vraie gauche ? Les traders emportés dans une glissade de marché connaissent bien l’obstacle principal à la décision rationnelle, il est psychologique : la répugnance à « prendre ses pertes » (dans le langage de la finance, « prendre ses pertes » signifie accepter que ses actifs ne retrouveront pas leur valeur perdue, et consentir à les vendre à perte, sachant que toute attente supplémentaire les verra se déprécier davantage encore), et l’entêtement à vouloir se refaire. Après Syriza, ou disons plus justement après le Syriza de Tsipras, et avant Podemos, les gauches européennes en sont là.

Le souvenir est encore frais de l’« accueil » qu’avait reçu en janvier, en pleine montée électorale de Syriza, c’est-à-dire à un moment où l’emballement des espoirs ne veut plus connaître aucune contrariété, l’anticipation d’une rude alternative — la « table » [9] — dont on suggérait d’ailleurs que le terme le moins avantageux — « passer dessous » — était aussi le plus probable. De ce point de vue, on aimerait assez connaître l’avis que portent rétrospectivement certains sur leurs propres puissantes analyses, on pense en particulier à Michel Husson qui à l’époque n’avait pas manqué de critiquer « le syllogisme de la défaite », « l’absence totale de sens stratégique », « l’ânerie stratégique majeure de la sortie de l’euro », avec des arguments qui, en effet, nous font voir aujourd’hui que la stratégie est bien son affaire. En réalité, il faut voir tout son texte [10] comme un symptôme car, là où sur les autres sujets de ses interventions, le travail de Michel Husson est indispensable et d’une grande qualité, les questions de l’euro et de la souveraineté ont l’effet de lui mettre, mais comme à tant d’autres, l’entendement en erreur système, avec tout le compteur intellectuel qui disjoncte : l’analyse de l’idiosyncrasie allemande n’est qu’« essentialisation », la sortie de l’euro du « nationalisme », et tous les pont-aux-ânes de l’internationalisme-réflexe y passent les uns après les autres [11].

Podemos, le prochain prisonnier de la « croyance de l’euro »

On laissera à d’autres le soin de se prononcer sur les convolutions de l’esprit d’Alexis Tsipras, dont les divers mouvements, spécialement celui du référendum, ont parfois pu donner à espérer [12] que, réticent à la sortie de l’euro, il pouvait cependant être capable de briser ses propres limites, après avoir achevé de parcourir, comme par acquit de conscience, toutes les (im)possibilités de la « négociation ». Mais non.

On reconnaît la servitude volontaire, ou comme dirait Bourdieu la violence symbolique, à ceci que les dominés épousent fondamentalement la croyance des dominants, même si c’est la croyance constitutive d’un ordre qui les voue à la domination, parfois à l’écrasement.

Tsipras aura donc été incapable de s’extraire de la « croyance de l’euro », à laquelle, l’expérience maintenant le prouve irréfutablement, il aura été disposé à tout sacrifier : la souveraineté de son pays, l’état de son économie, et peut-être bien, à titre plus personnel, sa grandeur politique. Car la chose est désormais écrite, quelle que soit la suite des événements : il y a des places dans l’histoire politique auxquelles on ne peut plus prétendre après avoir à ce point renié les engagements qui ont porté tout un peuple — c’est qu’on voit mal derrière quelles indulgences on pourrait accommoder d’avoir consenti à un memorandum plus catastrophique que le précédent quand on a fait serment de rompre avec les memoranda, et pire encore de ne plus hésiter à aller chercher loin à droite des majorités de rechange pour le faire voter. Il est donc avéré que Tsipras était mentalement prisonnier de l’euro, et l’on sait désormais où conduit ce type d’enfermement volontaire. Disons les choses tout de suite, quitte à ce que ce soit avec rudesse : le Podemos d’Iglesias le rejoindra dans la même cellule.

Il y aurait beaucoup à dire sur Podemos, sur ses prémisses — justes — d’une perte d’efficacité du langage « classique », on pourrait même dire d’une certaine phraséologie de gauche, mais aussi sur les conclusions qu’il en tire, et qui le conduisent malheureusement, non pas à chercher les voies d’une nouvelle adresse, mais, le bébé filant avec l’eau du bain, à l’évacuation même de la catégorie de gauche, pour ne rien dire de celle de classe, si bien que ce qui devait n’être que (souhaitable) rectification de forme aboutit à une inquiétante déperdition de substance : ne plus vouloir parler, fût-ce dans des termes renouvelés, du capital parce que ça fait old school, pour livrer une vision du monde à base de « la caste contre le peuple », aller jusqu’à revendiquer la péremption de la catégorie de gauche, sont des partis pris fondamentaux, en l’occurrence tout à fait explicites, qu’il y a lieu de regarder avec quelques appréhensions, pour ne pas dire une légitime suspicion — dont se fait déjà l’écho, par exemple, la New Left Reviewquand elle interroge Iglesias [13].

On ne s’étendra pas non plus (il le faudrait pourtant) sur la mutation radicale de Podemos en parti pour le coup lui des plus classiques, et de son personnage principal en un leader charismatique qui, classique, ne l’est pas moins, au prix d’une trahison manifeste de l’esprit du mouvement des places, dont Podemos est pourtant issu — et qu’on n’aille pas faire porter à la présente analyse l’excès polémique typiquement gauchiste de la « trahison » : c’est Jorge Lago, membre de la direction de Podemos, qui assume lui-même le terme avec une déconcertante tranquillité d’âme [14].

Très logiquement, le réarmement de Podemos en machine électorale entièrement tendue vers la conquête du pouvoir est voué à l’abandon en cours de route de quelques principes et de quelques espérances… On en est presque à se demander s’il faudra mettre au compte de ses prévisibles « délestages » une déception (de plus) sur l’euro et l’Europe, déception qui en réalité n’a presque pas lieu d’être. Car au moins les choses sont claires dès le départ, elles feront même la différence, si c’est possible, entre Syriza et Podemos : là où Tsipras doit indiscutablement être crédité de s’être battu, Iglesias n’essaiera même pas. Il ne s’agit pas là d’anticipation mais de simple lecture : « Nous n’aimons pas la façon dont l’euro s’est construit, ni comment ont été mis en place les accords de Maastricht, mais nous pensons que l’euro est actuellement incontournable. Il faut certes améliorer la façon dont est gérée la monnaie unique, et nous pensons qu’il devrait y avoir à ce sujet un contrôle démocratique, mais nous ne sommes pas partisans de la sortie de l’euro pour notre pays. (…) Même si nous n’aimons pas la façon dont fonctionne la BCE, nous assumons d’être dans la zone euro » [15]. Comme toujours dans un propos politique, il y a le creux et il y a le plein. Le creux : nous n’aimons pas les choses comme elles sont, et d’ailleurs nous disons qu’il faut les changer ! Le plein : nous assumons d’être dans l’euro et nous pensons qu’il est incontournable. C’est-à-dire que ce qui précède n’est pas sérieux, car la réalité est que nous ne changerons rien. On ne devrait donc pas être davantage étonné qu’Iglesias « n’aime pas l’accord (de l’Eurogroupe), mais que c’était soit l’accord, soit la sortie de l’euro » [16].

On peut sans doute compter encore sur quelques bonnes volontés alter-européistes pour reprendre à leur compte l’argument répété en boucle par Podemos — qui en réalité n’en a pas d’autre : à 2 % de PIB européen, la Grèce n’avait pas sa chance, à 14 % l’Espagne a la masse pour tout faire basculer. Mais, supposé qu’on puisse lui prêter vraiment le projet de faire basculer quoi que ce soit, Iglesias ne fera rien basculer du tout. Ou plutôt il ferait basculer tout autre chose que ce qu’il croit. C’est bien en ce point d’ailleurs que se tient l’erreur presque « logique » des croyants de « l’autre euro possible ». Car s’il s’avérait que se crée effectivement un mouvement consistant de plusieurs pays rendant plausible une révision significative des principes de l’euro… c’est l’Allemagne, sans doute accompagnée de quelques satellites, qui prendrait le large. Si bien qu’au moment même où il serait sur le point d’être changé… l’euro serait détruit ! Il n’y aura pas d’« autre euro » dans son périmètre actuel — avec l’Allemagne —, car tout autre euro possible sera inadmissible pour elle, et se fera sans elle.

Ce n’est pas nous qui devons compter sur Podemos, c’est Podemos qui doit compter sur nous !

Aucun risque : Podemos ne veut rien de tout ça. On verra bien comment il s’arrange de ses propres contradictions : en finir avec l’austérité sans changer l’euro de l’austérité est une performance logique dont on peine toujours autant à discerner les voies, une de celles auxquelles les gauches européennes s’abonnent avec une désarmante compulsion de répétition. En tout cas, on ne pourra pas dire qu’on ne savait pas. Comment tout ça se terminera, la chose n’est que trop claire, elle est comme déjà écrite. Il ne faudra pas venir pleurer une fois de plus sur les normalisations douloureuses et les espérances (encore) déçues.

Voilà donc le drame actuel des gauches européennes. Du fin fond de la déveine où elles se trouvent, Syriza et Podemos leur ont été de puissantes raisons d’espérer, l’aliment d’un désir de croire à un possible renouveau au travers du continent — et comment ne pas le comprendre, avouons-le : comment ne pas avoir soi-même éprouvé la tentation de se laisser gagner par ce sentiment. Les stratégies politiques « de l’espoir », cependant, font fausse route quand elles prennent le parti de tout accorder à leurs affects et plus rien à la raison analytique si elle risque de venir les contredire. Malheureusement, et si douloureuse la chose soit-elle parfois, on gagne rarement à ne pas regarder les situations en face. Une vraie stratégie politique, reconnaissable à ce qu’elle fait aussi bien la part de la lucidité que celle de l’espoir, devrait tenir et l’indiscutable énergie politique que, pour toutes leurs failles, ces mouvements ont fait naître, et la claire conscience des impasses où ils s’engagent, et ce faisant nous engagent, lorsqu’ils refusent à ce point de poser la question de l’euro — dont il ne faut pas se lasser de répéter qu’elle est le verrou radical de notre temps.

S’il doit être autre chose qu’un nouveau motif de dépression, le naufrage de Tsipras doit être intellectuellement rentabilisé, et nous aider, pour enfin faire mouvement, à passer une bonne fois la paille de fer. C’est-à-dire, en l’occurrence, à d’ores et déjà « passer dans les comptes » les pertes Podemos telles qu’on peut raisonnablement les anticiper. Sauf si… Sauf si, au lieu de compter sur la défectuosité Podemos pour réanimer (défectueusement) les gauches européennes, on compte plutôt sur les gauches européennes pour réorienter Podemos — et pourquoi pas Syriza s’il en reste quelque chose (ce qu’on espère le plus au monde, faut-il le dire). Cette réorientation, où la gauche en Europe engage son sort en la possibilité d’échapper enfin à l’inanité, se joue entièrement sur la ligne de la rupture avec l’euro et ses institutions, une fois intégré — il est vraiment temps… – qu’un autre euro n’est pas possible.

Lucidité pour tout le monde

Il est bien certain que la désynchronisation des conjonctures politiques voue le plus probablement cette rupture à prendre les formes du retour à des monnaies nationales — dont trois décennies de fordisme (comme d’ailleurs la situation présente des quelque 180 nations qui n’ont pas l’immense bonheur d’appartenir à l’eurozone) devraient normalement convaincre tout esprit ayant résisté à la croyance européiste qu’elles ne sont pas la guerre.

La lucidité valant pour tout le monde, il serait irresponsable de présenter la sortie de l’euro comme l’entrée immédiate dans la lumière. Quand il s’agit de la Grèce, on peut, on doit même, dire les choses plus carrément encore : la (les ?) première année de cette sortie serait très éprouvante. C’est qu’après cinq années d’austérité ayant méthodiquement détruit la base économique du pays, sans même parler des effets de dislocation produits par la criminelle asphyxie monétaire pilotée par la BCE ces dernières semaines, n’importe laquelle des options de politique économique disponibles est vouée à commencer par d’immenses difficultés — et certaines de ces options, celles de la Troïka, à y demeurer. Tragique ironie du diktat du 12 juillet : là où la sortie de l’euro se serait immanquablement vu opposer son « échec » au bout de cinq mois (ou même cinq semaines…) — les politiques néolibérales, elles, ont le droit de durer cinq ans, ou même trois décennies sans qu’on n’en tire jamais le bilan —, là où, donc, la sortie de l’euro aurait été aussitôt agonie, c’est la politique d’austérité continuée qui portera la responsabilité du surplus de désastre que l’économie grecque va connaître immanquablement — et ça n’est que justice : c’est bien cette politique-là qui a fait un corps mort de l’économie d’un pays tout entier.

On répète ad nauseam que le peuple grec ne veut pas quitter l’euro et que, dans ces conditions, Tsipras a joué la seule carte qui était à sa disposition. Mais ceci est irrecevable. L’opinion grecque a déjà commencé à se déplacer sur cette question, et comme l’a fait justement remarquer Stathis Kouvelakis [17], le vrai sens du « non » au référendum du 5 juillet incluait évidemment l’acceptation d’une rupture avec l’eurozone : les partisans du « non » se sont entendu matraquer pendant une semaine que leur vote était synonyme de Grexit, et il est peu douteux que bon nombre d’entre eux aient persisté dans leur intention de vote en y incorporant pleinement cette possibilité, donc en l’assumant comme telle.

Il y a aussi, et surtout, que la politique est un corps-à-corps avec l’opinion. C’est entendre l’opinion et aussi lui parler. Parler à l’opinion, contre ses réticences premières, pour y faire « prendre » l’idée de la sortie de l’euro, de ses difficultés et bien sûr de ses perspectives, c’est ce que Tsipras, en cela cohérent avec lui-même — il n’y croyait pas et ne le voulait pas —, n’a (donc) jamais essayé de faire. Y compris lorsque la force propulsive du « non » lui en apportait la possibilité. Or il était bien des choses à dire pour entraîner l’opinion grecque là où elle commençait d’elle-même à se rendre. Les métaphores valent ce qu’elles valent et il faut se méfier de certaines qui sont parfois scabreuses, mais sans pousser trop loin l’analogie de la domination par les « tanks » et de la domination par les « banks » [18], il est une idée à laquelle l’opinion grecque, au point où elle en est arrivée, pourrait être sensible : de même qu’en cas d’occupation étrangère, les luttes de libération acceptent bien le supplément de destruction qui vient de se battre sur son sol, et qu’elles l’acceptent car il y va de la reconquête de la liberté, de même le surplus de difficulté qui accompagnerait immanquablement la sortie de l’euro est, dans l’impasse présente, le tribut de la reconstruction politique.

Lexit !

Or c’est peu dire qu’il y a à reconquérir et à reconstruire — par la gauche. La souveraineté, non comme talisman, mais comme condition de possibilité de toute politique progressiste — car répétons-le : la sortie de l’euro n’est jamais qu’une condition nécessaire, et certainement pas suffisante. On peut sortir de l’euro de bien des manières, et par bien des côtés — qui ne se valent pas du tout. Dans une sorte de syndrome d’autoréalisation inconsciente, la gauche européiste semble mettre tous ses efforts à ne laisser ouvert que le côté de la droite extrême, comme pour mieux se donner raison à elle-même et mieux pouvoir dire ensuite que la sortie de l’euro, « c’est le nationalisme ». Si c’est ça, ça n’est pas exactement un service qu’elle se rend, ni à tous ceux qui remettent leurs espoirs en elle. La vérité, c’est que depuis qu’elle a décidé de camper obstinément sur la ligne de l’« autre euro », elle ne rend plus service à grand monde. Comme les pouvoirs de l’analyse sont faibles — il n’y a pas de force intrinsèque des idées vraies, disait Bourdieu —, et que la lucidité du réalisme n’est pas le fort de cette gauche, il aura fallu en arriver aux extrémités du spectacle en vraie grandeur, celui d’une illusion fracassée, d’une impossibilité radicale désormais établie, du rôle spécifique qu’y joue un Etat-membre, enfin de tout un peuple sacrifié, il aura fallu en arriver à ces extrémités, donc, pour que quelques vacillements commencent à se faire connaître. Mais que de temps perdu…

Comme il n’est jamais très utile de pleurer sur le lait renversé, il vaut mieux oublier le temps perdu et songer plutôt à faire quelque chose du temps à venir. Même si elle ne le sait pas encore, la construction européenne est morte. On ne peut pas survivre à une telle infamie. Le destin de l’Union européenne est maintenant celui des entreprises devenues haïssables : elle n’est plus qu’en attente de son renversement. Faudra-t-il patienter de nouveau jusqu’à la ruine complète pour que la gauche européiste s’interroge sérieusement sur l’obstination qui l’aura conduite à se lier à une erreur historique de ce format, même sous la clause « alter » dont il est maintenant établi qu’elle n’altérera plus rien ? Ça n’est pas une autre version du même qu’il s’agit de penser, c’est de « l’autre » tout court, et pour de bon. Voilà à quoi devrait servir le temps à venir des gauches européennes : à lever enfin l’hypothèque de l’euro, à penser de concert ce qu’elles s’aideront mutuellement à faire : les unes soutiendront telle autre à qui sa conjoncture permettra de se mettre en marche indépendamment, et celle-ci les aidera en retour à accélérer leurs propres évolutions — solidarités concrètes dans un mouvement d’ensemble nécessairement mal synchronisé, mais où les effets d’entraînement par émulation jouent réellement, à l’inverse des grandes coordinations fantasmatiques de l’internationalisme abstrait.

Voilà ce qu’est un internationalisme bien compris, c’est-à-dire qui ne soit pas totalement confit en postures ni oublieux du réel, un internationalisme qui pourrait même, si l’on veut, trouver son compte dans le retour aux monnaies nationales, comme base d’un nouveau départ vers la reconstruction d’une monnaie, non plus unique, mais commune [19], un internationalisme auquel il faudrait quand même expliquer que, sauf à avoir complètement succombé à l’économicisme, il pourrait lui venir à l’idée de trouver ses réalisations ailleurs que dans l’ordre de la monnaie, fût-elle européenne…

Plaidant depuis sa situation à lui, celle d’un citoyen du Royaume-Uni, où l’on est confronté plus carrément à la question de l’appartenance non à l’eurozone mais à l’Union européenne elle-même, Owen Jones, dans un article du Guardian [20], lance une idée qui pourrait bien avoir un certain avenir : l’idée du Lexit (Left-Exit). Ça n’est plus tel ou tel pays qu’il faut faire sortir de l’euro : c’est la gauche elle-même.

Notes

[1] Voir sur ce sujet « Les tâches aveugles de l’“autre euro possible” », 1er juin 2015.

[2] Voir à ce sujet « Un peuple européen est-il possible ? », Le Monde diplomatique, avril 2015.

[3] François Bonnet, « L’Allemagne, le nouveau problème de l’Europe », Mediapart, 12 juillet 2015.

[4] Lire « De la domination allemande (ce qu’elle est, et ce qu’elle n’est pas) », 18 juin 2013.

[5] À cet égard il faut considérer comme un sommet de ce journalisme embedded le récit fait par Jean Quatremer de l’accord du 21 février, « Grèce vs. Eurozone : histoire secrète d’un bras de fer », Libération, 10 mars 2015.

[6] Yanis Varoufakis, « Our battle to save Greece », New Statesman, 13 juillet 2015.

[7] Voir le témoignage de Stathis Kouvelakis, « Greece, the struggle continues », entretien avec Sebastian Budgen, Jacobin, 14 juillet 2015. Lire aussi son texte, « Sortie de l’euro, une occasion historique » dans Le Monde diplomatique de juillet 2015, en kiosques.

[8] Grégoire Biseau, « François Hollande en coach politique », Libération, 10 juillet 2015.

[9] « L’alternative de Syriza : passer sous la table ou la renverser », 19 janvier 2015.

[10] Michel Husson, « Lordon, ou le syllogisme de la défaite », Alencontre, 21 janvier 2015.

[11] Comme il n’est pas possible ici de se défaire exhaustivement toutes les contrevérités ou de toutes les caricatures qui peuvent être dites sur ce sujet, je me contente de renvoyer au texte « Leçon de Grèce à l’usage d’un internationalisme imaginaire (et en vue d’un internationalisme réel) », 6 avril 2015.

[12] Moi y compris. Lire « L’euro, ou la haine de la démocratie », 29 juin 2015.

[13] Pablo Iglesias, « Spain on Edge », entretien, New Left Review, n° 93, mai-juin 2015. De cet entretien, Le Monde diplomatique a tiré un texte, publié dans le numéro de juillet 2015, en kiosques, « Podemos, “notre stratégie” ».

[14] Jorge Lago, « Après Syriza, jusqu’où ira Podemos ? », « Contre-courant », Mediapart, 1er juillet 2015.

[15] L’Obs, entretien avec Aude Lancelin, 17 juin 2015.

[16] Cité par Ludovic Lamant, « En Espagne, Podemos s’adapte à l’onde de choc grecque », Mediapart, 17 juillet 2015.

[17] Stathis Kouvelakis, art.cit.

[18] Une demi-plaisanterie qui fait fureur en Grèce en ce moment et qu’on a même vu Varoufakis reprendre à son compte : « On the Eurosummit statement on Greece, first thought », blog de Yanis Varoufakis, 14 juillet 2015.

[19] Voir La Malfaçon. Monnaie européenne et souveraineté démocratique, Les Liens qui Libèrent, 2014, chapitre 7, ou bien « Pour une monnaie commune sans l’Allemagne (ou avec, mais pas à la francfortoise) », 25 mai 2013.

[20] Owen Jones, « The Left must put Britain’s EU withdrawal on the agenda », The Guardian, 14 juillet 2015.

Source : Frédéric Lordon, pour la Pompe à Phynances, blog du Monde Diplomatique, le 18 juillet 2015.

Source: http://www.les-crises.fr/la-gauche-et-leuro-liquider-reconstruire-par-frederic-lordon/


[Livre pour cet été] La CIA et la torture

Tuesday 21 July 2015 at 01:05

Je vous recommande aujourd’hui vivement cet incroyable livre paru en janvier aux éditions Les Arènes, traduction du rapport sénatorial sur les méthodes de torture de la CIA.

Je remercie l’éditeur qui m’a autorisé à reproduire ici la fantastique introduction.

Le rapport de la Commission sénatoriale américaine sur les méthodes de détention et d’interrogatoire de la CIA

Préface de John R. MacArthur et Scott Horton

Après les attentats du 11 septembre, l’administration Bush déclare une guerre totale au terrorisme, « par tous les moyens ». Au coeur du dispositif : la CIA. L’Agence s’arroge des pouvoirs inconnus jusque-là, même au plus fort de la Guerre froide.

S’estimant au-dessus de tout contrôle, elle capture, séquestre et torture des suspects, au nom de la recherche d’informations. En 2009, le Sénat américain décide d’enquêter sur ses méthodes.

Après des mois de lutte d’influence, le rapport a enfin été déclassifié et rendu public en décembre 2014. Le voici. Il renferme le pire et le meilleur des États-Unis. Le pire : la torture et les criminels de bureau ; le meilleur : les moyens d’enquêtes dévolus aux parlementaires et la publication de ce rapport.

C’est la première fois que la pratique de la torture d’État est racontée et analysée avec une telle précision. Conclusion implacable : la torture est aussi délétère qu’inefficace. Les auteurs de la préface, John R. MacArthur, directeur de la revue Harper’s, et Scott Horton, avocat, journaliste et spécialiste des droits de l’homme, ont été les premiers à s’opposer à la croisade de George W. Bush en Irak et à la manipulation de l’opinion dans la « guerre contre le terrorisme ». Ils nous aident à comprendre la dérive sécuritaire américaine.

Ce rapport est un avertissement pour les démocraties victimes du terrorisme.

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Maxime Berrée, Laurent Bury, Carole Coen, Alexandra Forterre de Monicault, Dominique Haas

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L’introduction :

La CIA et la torture publié par les-crises

(Lien vers le rapport en anglais)

Source: http://www.les-crises.fr/la-cia-et-la-torture/


Hollande pour un “gouvernement et un Parlement de la zone euro”

Monday 20 July 2015 at 01:32

Tiens, qu’a-t-on lu ce we dans la presse ?


#ZoneEuro François Hollande plaide pour un gouvernement de la zone euro avec un “budget spécifique” et un “Parlement”

La France est prête à participer “à une organisation renforcée” de la zone euro et à constituer “avec les pays qui en décideront, une avant-garde”, affirme le président français dans une tribune publiée par “Le Journal du Dimanche”.

“J’ai proposé de reprendre l’idée de Jacques Delors du gouvernement de la zone euro et d’y ajouter un budget spécifique ainsi qu’un Parlement pour en assurer le contrôle démocratique“, ajoute le chef de l’Etat. (L’Obs, 19/07/2015)

C’est pas beau ça ?

Un parlement de la zone euro pour faire “démocratique”, alors que, bien évidemment, comme il n’y a pas de “peuple de la zone euro”, c’ets parfaitement anti-démocratique, puisque cela privera les Français de décider de leur propre avenir…

En tous cas, ces gens là, ils sont vraiment démocrates, respectant la volonté populaire :

En lisant les commentaires d’un billet précédent, il m’est venu cette image : vous ne trouvez-pas qu’il y a dans ses discours focialistes un vrai rappel de leurs discours des années 1950 défendant l’Algérie Française (“c’est un département !” ; bon, ok les Algériens sont archi-sous-représentés” ; mais un jour, on pourra la traiter comme un autre département français ; mais nous on est démocrates ; mais bon, là on appuie la torture, etc)

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Encore plus fort :

Sapin invente la roue carrée!, par Bruno Bertez

Sapin : la France favorable à un allègement de la dette grecque, pas à une réduction

Sapin invente la roue carrée, il veut alléger la dette grecque sans la réduire.

Ah les subtilités politiciennes. Comment alléger une dette sans la réduire, si le poids d’une dette se mesure par le ratio Dette/PIB? Il n’y a qu’un moyen , souffler dans le PIB, le faire croître, le gonfler. Or la dévaluation/déflation interne du PIB de la Grèce imposée par le nouveau plan de sauvetage va coûter au minimum 1 à 2% du PIB!

Donc il y a une astuce … de vocabulaire; destinée à ceux qui ne connaissent rien et ne comprennent rien à la chose financière. La valeur et donc la poids d’une dette est actuarielle, c’est à dire qu’elle dépend du facteur temps. On peut jouer sur la valeur d’une dette en modifiant son échéancier; si on étale, si on repousse les échéances, alors on réduit le poids, la valeur de la dette c’est à dire qu’on l’ampute, on en annule une partie.. Mais chut il ne faut pas le dire car sinon les citoyens comprendraient comment marche la finance et on ne veut surtout pas faire progresser leur intelligence. La démocratie a ses limites.

Proposez à Sapin de payer vos impots et arguez que le gouvernement n’ y perdra rien, vous verrez ce qu’il vous répondra.

Hélas pour Sapin , les Allemands sont moins idiots et il y a des intellectuels et journalistes pour leur expliquer qu’alléger une dette c’est la réduire concrètement et que c’est faire … un transfert fiscal, ce dont les parlementaires Allemands ne veulent pas .

La France est favorable à l’allègement de la dette grecque préconisé par le Fonds monétaire international (FMI), a indiqué vendredi le ministre des Finances, Michel Sapin, tout en excluant toute annulation de dette.

« Il faut alléger le poids de la dette […] faire en sorte que le poids de la dette soit moins pesant les premières années », a déclaré Michel Sapin sur Europe 1. Le dirigeant a notamment appuyé la proposition de la directrice générale du FMI, Christine Lagarde, consistant à allonger les échéances de la dette grecque, étendre la période de grâce et réduire les intérêts.

« On ne peut pas simplement demander des efforts aux Grecs sans apporter par ailleurs des éléments qui vont leur faciliter la vie », a-t-il ajouté.

De telles mesures n’impliquent pas pour autant une réduction du montant de la dette grecque et des pertes pour les créanciers, selon le ministre. « Supprimer de la dette, ça c’était quelque chose que nous ne pouvions pas accepter. Il faut que nous puissions retrouver notre argent », a déclaré Michel Sapin.  (Source ; Bruno Bertez, 17 juillet 2015)

==> Là, on a encore un concentré du focialisme :

1/ on veut priver les Français du choix de leur politique économique

2/ au prétexte du l’Europe, le peuple, la démocratie, la paix Touçatouça

3/ MAIS il est HORS DE QUESTION que tout ceci nous coute 1 € d’impôt en plus !

===> Pour les focialistes, la solidarité jusqu’à 0 €n, c’est avec plaisir, mais au delà, c’est non, désolé…

Non seulement, ils ont un projet délirant, mais en plus, ils ne sont même pas foutus de commencer à y mettre le début des moyens nécessaires… Ils vivent dans leur propre narrative intellectuelle, déconnectée de la réalité…

Quels grands hommes…

Source: http://www.les-crises.fr/hollande-pour-un-gouvernement-et-un-parlement-de-la-zone-euro/


Le choquant Rapport AIG de 2008 sur les véritables motifs derrière la « crise perpétuelle » de l’Europe et la mort de la Grèce

Monday 20 July 2015 at 00:30

Source : Zerohedge, Tyler Durden sur 15/07/2015 17:52 -0400 – Traduction Librement Adaptée © Didier ARNAUD le 16/07/2015

Source : http://www.zerohedge.com/news/2015-07-15/shocking-2008-aig-report-laying-out-motives-behind-europes-perpetual-crisis-and-deat

“Hier, Richard Koo de Nomura a présenté l’une des meilleures évaluations de la situation en Grèce, quand il a déclaré que le « FMI commence lentement à comprendre l’économie grecque », ce qui explique son revirement stratégique, à propos de celle qui exige désormais des réductions de sa dette bien plus importantes que ce que l’Europe, et l’Allemagne tout particulièrement, sont prêts à concéder.

Koo note en outre que « la raison qui explique le plongeon du PIB de la Grèce provient de ce que la consolidation budgétaire a été réalisée en plein bilan de récession, résultant d’une spirale déflationniste destructive qui a complètement dévasté la vie des Grecs ordinaires. Alors même que la nation peut donner l’impression de faire des progrès si nous prenons en considération les données en pourcentage du PIB, les données brutes nous montrent à contrario une économie en plein effondrement. Cette différence de points de vue augmente encore davantage le fossé qui sépare les créanciers européens qui estimaient que  tout allait pour le mieux, et le citoyen grec, qui a souffert d’un grave déclin de son niveau de vie. Et cet important écart de perceptions n’a peut-être été nulle part aussi évident qu’à travers les résultats du référendum national du 5 Juillet ».

L’observation de cette destruction économique grecque est absolument exacte, et ce n’est pas une surprise pour nos lecteurs : Elle a constitué notre étude de cas non seulement pour la Grèce, mais également pour le reste des pays périphériques de l’Europe qui souffrent eux aussi d’une détérioration continue de leur niveau de vie, en raison de l’absence d’un rééquilibrage externe (Merci la monnaie commune) laissant la dévaluation interne (les salaires qui plongent, la déflation, l’effondrement économique) comme seule possibilité de pouvoir rester compétitif dans la zone €uro. Mais là où notre opinion diffère de celle de Koo, c’est bien au sujet des véritables «motifs» qui seraient derrière la réticence des créanciers à interpréter honnêtement la situation sur le terrain en Grèce.

Oui, il est tout à fait exact que ce sont les mêmes créanciers qui étaient les prochains bénéficiaires de quelque 90% des différentiels du produit de la dette financée pour entrer en Grèce (pas plus de 11% des € 220 milliards du sauvetage grec n’aurait vraiment bénéficié à la population globale), et qu’en conséquence, ils peuvent avoir eu l’impression que les Grecs ordinaires appréciaient aussi beaucoup les miettes de leur plan de sauvetage.

Ce ne fut pas vraiment le cas, comme les événements du 5 Juillet l’ont démontré.

Mais alors que l’ancien économiste de la FEDva sûrement attribuer cet «oubli» à de la simple négligence ou, au mieux, à de la bêtise, même si l’ensemble d’une nation de 11 millions d’habitants souffre comme jamais dans l’histoire en raison de ce qui est, au mieux, une expérience ratée, il pourrait y avoir une mystérieuse vérité beaucoup moins avouable derrière tous ces événements en Grèce au cours de ces 5 dernières années, en particulier compte tenu de la sinistre insistance de l’Allemagne pour refuser toute annulation des dettes grecques, malgré ce qui est maintenant devenu un fait admis que, sans une décote (haircut) majeur de sa dette,la Grèce n’est tout simplement pas viable.

Faisons connaissance avec Bernard Connolly.

Bernard est un économiste britannique dont la montée en puissance a commencé quand il a travaillé pendant de nombreuses années à la CommissionEuropéenneà Bruxelles, où il était Chef de l’unité responsable du Système monétaire européen et des politiques monétaires. En d’autres termes, si quelqu’un connaît particulièrement bien ce vers quoi l’ascension de l’€uro conduirait, c’est l’un des mieux placé.

Nous disons «éventuel», parce qu’il a été licencié par la Commission en 1995. Le catalyseur peut bien avoir été son livre « Le Cœur Pourri de l’Europe: la sale guerre pour l’argent de l’Europe, un traitement négatif du mécanisme de change européen », qui a fait que les €urocrates ne l’ont pas vraiment pris à la légère.

Cependant, Bernard est beaucoup plus intéressant, non pas pour ses livres, ni pour son emploi à Bruxelles, mais plutôt à cause de l’endroit où il est allé ensuite et ce qu’il y faisait.

Après que sa relation ait pris fin avec l’Europe, Bernard est entré à la Banque AIG, à la branche financière de l’infâme AIG basée à Paris, dont l’effondrement en même temps que celui de Lehman, a été le principal catalyseur de la grande crise financière. Bernard n’a cependant pas été dans le front office (salle des marchés) et n’a pas négocié de CDS, mais il en était le stratège mondial. Voici comment l’euroscepticisme a bien prospéré pour aboutir à un rapport le 30 mai 2008, juste quelques mois avant que les GSEs (NdT : Entreprises Financières d’État) et Lehman ne fassent faillite, et qu’AIG ne soit renfloué.

Le rapport a été intitulé « Europe – pilotée ou Poussée », et il aurait mieux valu qu’il devienne une lecture incontournable pour tout Grec (et Européen) il y a environ 7 ans puisque, non seulement il explique précisément pourquoi la Grèce est maintenant sur le point d’une véritable capitulation souveraine, et de l’effondrement total, mais en plus il présente TOUT ce qui pourrait constituer les véritables motifs derrière la crise perpétuelle de l’Europe et pourquoi il apparaît presque comme si les principaux pays européens n’exigent que des hommes malades en Europe, parce quela Grèce en est tout simplement le premier de la liste, demeurer et maintenir l’Europe dans un état d’agitation perpétuelle.

Et puisque ce rapport est tout aussi pertinent aujourd’hui qu’il l’était il y a 7 ans, nous exposons à nouveau certains de ses points clés.

Du 30 mai 2008

    La crise économique mondiale et la crise de l’UEM

-       La crise mondiale est le résultat d’une mauvaise allocation inter temporelle (Greenspan, UEM).

-       En effet, elle a constitué un jeu de Ponzi.mondial

-       En Europe, cela a été renforcé par le mythe que les « comptes courants ne comptent pas dans une union monétaire » : l’UEM est la plus grosse de toutes les bulles de crédit.

-       Le traité affirme que le gouvernement devrait avoir le même statut de crédit que des emprunteurs du secteur privé.

-       L’union monétaire signifie une plus grande instabilité économique.

-       Ces deux facteurs devraient présager d’une cote de crédit aggravée au sein de l’UEM, mais les spreads (ndt : écarts des taux) des obligations d’État ont effectivement diminué dans l’UEM et les agences de notation ont de ce fait sur noté les gouvernements

    Au moment où la bulle éclate …

-       L’éclatement d’une bulle de crédit dans le monde se traduit par l’effondrement de la demande intérieure dans les pays déficitaires (par exemple, aux États-Unis, en Grande-Bretagne, dans les Balkans, dans les états Baltes – et dans plusieurs pays de la zone €uro)

-       Aux États-Unis, et dans une certaine mesure en Grande-Bretagne, la demande intérieure est soutenue par des baisses de taux et, en plus, aux États-Unis, par une relance budgétaire

-       Parmi les pays affectés de la zone €uro, ce n’est pas le cas

-       En l’absence de soutien de la demande intérieure, les pays touchés sont contraints à une amélioration de leurs exportations nettes par une meilleure compétitivité

-       Aux États-Unis et en Grande-Bretagne, cela se passe à travers la dépréciation de la monnaie – dans la zone €uro, ce n’est pas possible.

[ZH: C’est maintenant le cas, mais pour la Grèce, c’est beaucoup trop tard, plus que tout « soutien » incrémentiel qui fait que la bulle de la dette européenne grossit de plus en plus, ainsi que nous l'avons récemment montré]

Et les mouvements implicites des taux de change réels deviennent considérables …

-       Obstfeld et Rogoff ont vu un besoin pour peut-être un véritable mouvement de 65% du taux de change pour les États-Unis si l’ajustement du compte courant se produisait brusquement (par exemple, après un effondrement de l’immobilier).

-       L’effet est linéaire dans la taille du déficit du compte courant par rapport à la taille du secteur des biens échangés, de sorte que pour les quatre grands pays déficitaires de la zone €uro nous obtenons les mouvements nécessaires du taux de change réel de la manière suivante :

Grèce: 94%

Espagne: 55%

Portugal 36%

Italie: 9%

France 15%

-       … Ce qui signifie d’énormes écarts d’inflation nécessaires entre les blocs au sein de la zone €uro

-       Sila BCEtente d’éviter la dépression dans le bloc en déficit (c.-à-d., qu’elle maintient son taux inflation à, disons, 3 %) et que les pays en déficit en tant que bloc (équivalent à environ 2/3 du PIB de la zone €uro) peuvent améliorer leur compétitivité de, disons, 30 %, sur une période de cinq ans, alors cela impliquerait une dépréciation de l’€uro de 50 % et (1/3 de relais dans le Bloc allemand IPC) une hausse de 17 % (près de 3½ % par an) du niveau de prix du Bloc allemand, amenant l’inflation du Bloc allemand aux environs de 6½ % pendant cinq ans.

La BCEne l’a pas fait. Elle a plutôt choisit ce qui suit, qui est aussi l’explication du chômage des jeunes dans la périphérie aux alentours de 50 %

-       Si, à la place,la BCEavait essayé de maintenir l’inflation à 2% dans la zone €uro (et sans aucun changement dans l’€uro), tous les changements de compétitivité seraient venus du Bloc latin en déflation – ce qui aurait presque certainement déclenché une horrible dépression, un chaos financier, la multiplication des défauts, la détresse sociale et une possible instabilité politique.

-       Mais cela signifierait une importante déflation de la zone €uro, et qui aussi, frapperait la cible de la zone €uro en déclenchant obligatoirement une sévère dépréciation de l’€uro et une augmentation notable de l’inflation du Bloc allemand.

-       Ce sont tous les calculs du premier tour – ils ne tiennent pas compte des spirales salaires-prix des économies en surchauffe dans le Bloc allemand.

Et on en arrive au moment où tout arrive à domicile en Grèce :

Les choses sont encore pires pour les pays individuels

-       -Sila BCEdécide d’éviter la dépression, la déflation et le défaut dans le pays le plus faible (la Grèce), la dépréciation nécessaire de l’€uro serait énorme et l’inflation du Bloc allemand serait bien dans à deux chiffres pendant plusieurs années.

-       Si les pays faibles ont, à titre individuel, peu d’influence politique, il sera particulièrement difficile pour eux d’obtenir un renflouement dela BCE grâce à des taux d’intérêt bas et à un €uro faible.

-       Mais s’il n’y a aucun sauvetage dela BCE, les économies vulnérables devront faire face à la catastrophe.

Ce n’est pas seulement la manière dont tout cela s’est joué, mais cela a aussi conduit – comme nous avons pu le voir – la Grèce, qui avait clairement « peu d’influence politique » – à tout perdre, et elle est maintenant sur le point d’abdiquer sa souveraineté à une oligarchie de bureaucrates politiques non élus et aux intérêts industriels allemands (souvenez-vous: les exportations allemandes représentent 40% du PIB et un €uro faible est de loin, et même de très loin, beaucoup plus favorable qu’un Deutschmark fort).

Et en plus, rétrospectivement, l’estimation ci-dessus et les événements actuels sont aussi confirmés par la déclaration cryptique de Wolfgang Schäuble au Welt am Sontag dans cette interview de 2011 :

-       Schäuble : « Nous avons décidé d’en arriver à une union politique via une union économique et monétaire Nous avions l’espoir – et nous l’avons encore aujourd’hui – que l’€uro pourrait progressivement amener une union politique, mais nous n’en sommes pas encore là, et voilà l’une des raisons pour lesquelles les marchés restent méfiants. »

-       Welt am Sontag : «Alors, est-ce que les marchés vont nous forcer maintenant à une union politique ? »

-       Schäuble : «La plupart des États membres ne sont pas encore tout à fait prêts à accepter les contraintes nécessaires pour leur souveraineté nationale. Mais croyez-moi, le problème peut être résolu. »

Et, merci la Grèce, nous sommes maintenant sur le point de voir précisément comment.

Donc, il y a une autre issue ? La réponse est oui – et c’est justement la base l’énorme pari sur la « théorie des jeux » de Varoufakis au cours des 6 derniers mois, un pari qui reposait en totalité sur « qui a le plus d’effet de levier », comme nous l’expliquions en Janvier. Cependant, merci à l’arrivée du QE juste au bon moment, qui a permis àla BCE de fixer et de contrôler les prix du marché (marché qui n’espérait que la réduction des résultats indésirables et plus simplement le frontrun d’une banque centrale) d’actions et d’obligations, dans le processus d’écrasement de tout effet de levier grec.

-       Les déficits courants peuvent être soldés sans une réduction correspondante du déficit du commerce si les transferts courants sont assez puissants.

-       Le traité interdit bien une prise de contrôle de la dette publique d’un pays, mais ne prohibe pas les transferts supplémentaires pour soutenir les dépenses privées.

-      La BCEest en effet déjà en train d’aider certains systèmes bancaires en acceptant des garanties de plus en plus risquées (mais notez que ceci peut constituer une aide aux banques allemandes, néerlandaises / belges ainsi que, par exemple, aux banques espagnoles – notez le désaccord public entre Mersch et Weber).

-       Mais les chiffres résultant d’un plan de sauvetage financier complet seraient énormes: l’élimination des déficits courants au sein de la zone €uro par les renflouements fiscaux obligerait les pays excédentaires (le Bloc allemand) à effectuer des paiements équivalents à 16% des recettes totales de leur gouvernement (7% de leur PIB).

Hé oui, Varoufakis avait raison, et il aura bien raison au final : le coût d’un Grexit se serait révélé beaucoup trop grand à l’avenir. Cependant, il n’avait pas anticipé que l’Europe disposait d’une toute aussi puissante parade : le blocage des dépôts grecs indéfiniment dès maintenant.

La Grèce s’est soumise.

Ce qui nous amène à la dernière question: Qu’est-ce que veut l’Europe ?

Voici la réponse de Connolly :

Pour se servir des enjeux mondiaux en tant qu’excuses pour étendre ses pouvoirs :

-       Questions environnementales : accroître le contrôle sur les pays membres – idée avancée de la gouvernance mondiale

-       Terrorisme : utiliser l’excuse pour un plus grand contrôle de la police et des problèmes judiciaires – accroître l’étendue de la surveillance

-       Crise financière mondiale : tuer deux oiseaux (marché libre et économie Anglo-saxonne) avec une seule pierre (Organisme de Régulation à l’échelle Européenne – les tentatives de la gouvernance financière mondiale)

-       UEM : créer une crise pour forcer l’introduction du « gouvernement économique européen »

Et nous y voilà : en quatre points simples, énoncés dans une ancienne présentation d’il y a 7 ans, une prédiction qui est sur le point d’être prouvée sans contestation. Parce qu’une fois la Grècesoumise, la prochaine sera l’Italie, l’Espagne, le Portugal, et ainsi de suite, jusqu’à ce que le Gouvernement Économique Européen, également connu en tant qu’ «Empire Européen», soit contrôlé par une poignée de joueurs européens « nordiques » avec les banquiers qui les soutiennent financièrement, pour transformer sa simple vision en réalité.”

Source : Zero HedgeRapport AIG

AIG Bernard Connolly Europe (2008) publié par les-crises

Source: http://www.les-crises.fr/le-choquant-rapport-aig-de-2008/


[Vidéo] L’exploitation de la Zambie

Sunday 19 July 2015 at 04:14

On m’a signalé cet excellent documentaire, lauréat du prix Albert Londres Audiovisuel en 2012…

Zambie, à qui profite le cuivre ?

Film documentaire d’Audrey Gallet et Alice Odiot, 2011. « Ce pays devrait être très riche. C’est l’un des plus pauvres du monde… » ou comment la Zambie est dépossédée de ses richesses par les multinationales. Lorsque la Zambie accède à l’indépendance, en 1964, ses dirigeants nationalisent les mines. Le commerce du cuivre permet de financer son développement. Écoles et hôpitaux publics sont construits dans ce pays qui devient l’un des plus prospères d’Afrique. Dix ans plus tard, son PIB se rapproche de celui du Portugal, jusqu’à ce que les cours du cuivre s’effondrent, après le premier choc pétrolier. Pour compenser la baisse des revenus qui en résulte, le FMI et la banque mondiale conseillent à la Zambie d’emprunter. Mais au début des années 80, la réserve fédérale américaine hausse brutalement ses taux d’intérêt. La charge de la dette devient alors insupportable pour la Zambie. Le pays n’obtient de nouveaux crédits qu’en cédant au dictat du FMI qui l’oblige à privatiser ses sociétés d’états. Les services publics sont démantelés et les mines bradées en l’an 2000. Quelques années plus tard, le cours du cuivre est multiplié par 5. Mais les multinationales se sont déjà emparées de toutes les richesses dans le cadre d’accords secrets qui les exonèrent des taxes et de toute responsabilité sociale et environnementale.

Au pillage généralisé des ressources, s’ajoutent les drames humains, comme dans la ville de Mufulira, théâtre du documentaire, où la plus grande fonderie d’Afrique s’élève sur la mine de Mopani. Mopani appartient à une société écran basée dans les Iles vierges britanniques, qui sert de paravent à la multinationale suisse Glencore, leader mondial du commerce des matières premières et fondée par le « patron voyou » Marc Rich, partenaire privilégié de l’Afrique du Sud au temps de l’apartheid ou de l’Iran de Khomeiny mais également organisateur en 2003 de la faillite frauduleuse de la fonderie Métaleurop en France, dont la responsabilité dans la pollution au plomb de la région fut découverte par la suite. Glencore, basée dans le canton Suisse de Zoug, est une championne de l’évasion fiscale avec ses 80 filiales réparties dans le monde entier. Pourtant, en 2005 la BEI, la banque publique de l’Europe, qui gère le fond européen pour le développement, lui accorde un prêt de 48 millions d’euros pour la mine de Mopani ! Le prétexte est la modernisation de la fonderie, la réduction des émissions de dioxyde de soufre et le maintien dans l’emploi des populations locales, mais il s’agit surtout de sécuriser l’approvisionnement en matière première pour l’Europe, face à la concurrence chinoise ou indienne. Pourtant, dans les années qui suivent, le dioxyde de souffre qui s’échappe de la mine de Mopani en quantité 72 fois supérieure aux normes admises (le « centa » comme l’appellent les habitants), continue de ronger les poumons des habitants de Mufulira. En 2008, 800 personnes sont intoxiquées après avoir bu l’eau du robinet. Pas de chance pour eux, les soins de santé étant désormais payants, les dispensaires locaux n’ont que du paracétamol à leur offrir. Le fleuve kafué, qui est la principal réserve d’eau du pays et qui irrigue sa plus grande réserve naturelle avant de se jeter dans le Zambèze est lui aussi menacé par la pollution.

Car le procédé d’exploitation mis en œuvre par des ingénieurs kazakhs ou ukrainiens employés par Glencore, consiste à injecter de l’acide sulfurique dans le gisement pour collecter les métaux. Outre les pollutions qu’il génère, ce procédé permet de se débarrasser de la pauvre main-d’œuvre de Mufulira. 3000 mineurs sont ainsi licenciés en 2009, qui hantent désormais la ville sous la surveillance des vigiles de la société. Pourtant la résistance s’organise. La député européenne Eva Joly demande des comptes à la BEI, Les victimes tentent de faire entendre leurs voix, les ONG portent plainte contre Glencore pour pollution et évasion fiscale, puisqu’il apparait que 700 millions de dollars ont été dissimulés dans les livres de comptes de Mopani.

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Ici, article de RFI de 2015, pour les dernières informations sur ce pays… (je vous recommande de regarder la vidéo avant de lire ce texte)

Source: http://www.les-crises.fr/video-lexploitation-de-la-zambie/


L’Euro, raison délirante, par Jacques Sapir

Sunday 19 July 2015 at 00:54

Les différentes révélations sur les conditions dans lesquelles a été arraché l’accord, et il vaut mieux parler de diktat entre la Grèce et ses créanciers illustrent bien ce que l’on pouvait en penser à chaud. Cet accord est un véritable désastre pour l’ensemble de ses signataires, et pour la Grèce en premier lieu. La longue interview donnée le mercredi 14 juillet dans la nuit par Alexis Tsipras à la télévision d’Etat ERT le confirme[1]. Il avoue d’ailleurs que cet accord est un « mauvais accord ». L’analyse qui en est faite sur son blog par l’ex-Ministre des finances, M. Yannis Varoufakis va dans le même sens[2]. De plus, le Fonds Monétaire International a rendu publique une note d’analyse, qui avait été communiquée à TOUTES les parties en présence dès le 6 juillet et qui montre de manière irréfutable que cet accord n’est pas viable[3]. Dès lors se dévoile une autre face du drame qui s’est déroulé dans la nuit du 12 au 13 : tout ceci ne sert à rien. Un autre accord devra être trouvé rapidement, et la perspective d’une expulsion de la Grèce hors de la zone Euro reprend force[4]. Le Ministre des finances allemand, M. Schäuble l’a lui-même reconnu, ainsi que l’ancien gouverneur de la Banque Centrale de Belgique[5]. Cela rend les proclamations de succès de notre Président a faites à Bruxelles le matin du 13 particulièrement dérisoires. Le vote qui s’est déroulé au Parlement français l’est tout autant. On demande aux députés de se prononcer sur un accord que l’on sait inapplicable. Les députés du PCF, d’abord enclin à voter oui, n’est-ce pas Pierre Laurent ? pour des raisons alimentaires, se sont ainsi ressaisis et devraient voter « non ». Le drame ici se marie à l’absurde.

L’Euro avant la Grèce, l’Euro avant la France

Il faut cependant lire en détail la déclaration de François Hollande qu’il a faite le 13 juillet au matin ; mais pour cela, il faut avoir le cœur bien accroché. Remarquons, d’abord, qu’il ne parle pas de la Grèce, mais uniquement de la zone Euro. Cela montre bien quelles étaient ses priorités : « L’objectif était de faire en sorte que la zone euro puisse être préservée dans son intégrité, dans son unité, dans sa solidarité»[6]. On constate ainsi que les premiers mots réservés à la substance de ce texte ne font nullement mention des souffrances, des efforts et des espoirs du peuple grec. Non, la chose qui importe au premier chef, c’est l’intégrité de la zone Euro. Tout est dit dans ces lignes, et en particulier la préférence pour une construction bureaucratique, et que de nombreux économistes jugent non viable, sur la volonté et la vie des peuples. Ceci est corroboré par le troisième paragraphe de ce texte : « Ce que j’ai voulu, c’était plus que l’intérêt de la Grèce, c’était l’intérêt de l’Europe. Et c’était aussi l’intérêt de la France. Parce que l’intérêt de la France ne se dissocie pas de l’intérêt de l’Europe »[7]. L’ordre des priorités est ainsi établi : c’est l’Europe, puis la France et enfin la Grèce. Mais, ceci repose sur un mensonge, ou plus précisément un double mensonge : celui qui assimile la zone Euro à l’Union européenne, et celui qui assimile, ensuite, l’Union européenne à l’Europe. Les deux sont parfaitement scandaleux. La Zone Euro n’est nullement l’Union européenne. Des pays appartenant à l’Union européenne ne font nullement partie de la zone Euro. C’est le cas de la Grande-Bretagne, de la Suède, de la Pologne ou de la Hongrie. De plus, l’Union européenne n’englobe nullement l’Europe. Que ce soit la Suisse, la Norvège, ou encore la Serbie dans les Balkans, le Belarus, la Russie ou l’Ukraine, tous ces pays font partie de l’Europe, comme réalité géographique mais aussi culturelle, et ce sans faire partie de l’UE. Veut-on faire croire que Munch, l’auteur du « Cri », ou que des artistes comme Dostoïevski, Pouchkine ou Tolstoï ne sont pas européens ? Oublie-t-on que l’Union européenne est une alliance politique et économique de certains pays d’Europe ? Vouloir la faire passer pour l’Europe toute entière est un mensonge. Le fait que celui-ci soit proféré par la plus haute autorité de l’Etat ne retire rien à l’affaire. Au contraire, il l’aggrave. Il établit en dogme, mais sans pour autant en faire une vérité, ce qui se révèle un mensonge.

Ce mensonge, il le répète bien plus bas dans ce texte, en particulier quand il affirme : « La Grèce est un pays ami qui a voulu entrer dans l’Union européenne après des années de dictature ». En fait, et la date d’adhésion le montre bien, c’est aux Communautés Economiques Européennes, autrement dit au « Marché Commun » que la Grèce a adhéré après l’épisode de la dictature des colonels. Elle ne pouvait adhérer en 1981 à l’UE alors que cette dernière ne date que de 1992 et l’Acte unique européen de 1986. François Hollande bouleverse donc l’histoire et ne tient guère compte de la chronologie. Mais, là encore, il y a une logique dans le mensonge : celle de prétendre que l’UE, projet titanesque, projet inouï, a existé avant même que de naître. Si ce n’est pas de l’aveuglement idéologique on ne sait pas ce que c’est.

Euro über älles

On peut, alors, voir les conséquences de ce mensonge. Une autre citation de cette déclaration du Président Hollande est à cet égard des plus instructives. « L’objectif, c’était que l’Europe puisse être à la hauteur du défi qui lui était lancé, être capable de régler une crise qui depuis plusieurs années minait la zone euro. L’objectif était aussi de donner un espoir à la Grèce après tant d’années de souffrance, d’austérité – même si la Grèce n’en a pas terminé et qu’elle devra encore faire des efforts…[8] » Le mensonge ici en devient pathétique. Non seulement cet accord n’a pas été « à la hauteur du défi », tout simplement parce que rien n’a été réglé. On le voit bien dans les positions prises par le FMI les 14 et 15 juillet. Mais en plus cet accord ne redonne aucun espoir au peuple grec. Au contraire, ce dernier vit comme une terrible humiliation les clauses politiques de cet accord, qui imposent désormais l’aval des institutions européennes sur les lois qui seront appelées à être votées par le parlement grec. Le quatrième paragraphe est lui aussi ravageurs quant aux prétentions de notre Président : « La France a un rôle particulier à jouer : faire en sorte que ce processus, cette construction qui se sont noués au lendemain de la guerre puisse se poursuivre avec, bien sûr, des épreuves, des défis, mais en même temps toujours avec la volonté d’incarner une force, celle de la zone euro, une zone monétaire qui doit permettre la stabilité et la croissance. Il n’y a pas de stabilité sans croissance, il n’y a pas de croissance sans stabilité [9]». Retenons le mélange des genres, qui n’est certes pas accidentel. On présente la zone Euro comme venant dans la continuité du Plan Marshall et de la Communauté Economique Européenne (le « Marché Commun »). Ceci constitue une erreur flagrante, une distorsion étonnante de la vérité historique. Mais, l’affirmation sur laquelle se conclut cette citation, en associant croissance et stabilité, constitue à nouveau un impudent mensonge. Car, la zone Euro a entraîné une chute de la croissance pour les pays membres de l’Euro, et s’est accompagnée de fluctuations extrêmement importantes. Ceci est établi dans de nombreux ouvrages[10], et dans le livre que j’avais écrit en 2012 en particulier[11]. De fait, la zone Euro n’a jamais été un facteur de stabilité ni un facteur de croissance pour les pays membres.

La raison délirante d’une nouvelle religion

Mais cette idée de l’Euro a tout emporté dans l’esprit de notre Président et sous la plume de ses conseillers. Quand il revient sur ce thème dans sa déclaration, c’est pour faire cette citation : « Si la Grèce était sortie de la zone euro, qu’aurait-on dit ? Que la zone euro n’était pas capable d’assurer son intégrité, sa solidarité. Qu’aurait-on dit des Grecs ? Qu’ils n’étaient pas capables de prendre leurs responsabilités. Qu’aurait-on dit de la France, de l’Allemagne,  qui ont vocation à donner cette impulsion ? Que nous n’aurions pas été au rendez-vous. La zone euro aurait reculé alors que l’Europe doit avancer et porter un projet qui puisse protéger les peuples – car l’euro protège les pays qui sont partie prenante de cette zone monétaire. Qu’aurait-on dit sur cette dislocation de cette grande idée ?[12] ». En fait, tout est dit. Tant la croyance mystique en un Euro « protecteur » des peuples que celle qui assimile l’Euro à l’Europe. La raison, l’intelligence, le sens de la mesure, ont été balayé par une idée fixe qui tourne au délire, mais toujours mue par la même logique.

Cette raison délirante explique pourquoi et comment on peut travestir en accord librement négocié ce qui n’a été que le viol de la souveraineté de la Grèce. Un viol en réunion, perpétré par l’Allemagne, mais aussi par l’Eurogroupe et son Président M. Dijsselbloem, par la Commission européenne avec Jean-Claude Juncker. Et si la France n’y a pas participé, elle a verrouillé la porte du local où s’est tenu ce crime et elle a poussé le bâillon dans la gorge de la victime. La phrase prononcée et écrite par François Hollande prend alors un tour sinistre : « Mais aujourd’hui, même si cela a été long, je pense que ça a été pour l’Europe, une bonne nuit et un bon jour ». Car, nous savons aujourd’hui que cette torture aura été infligée pour rien. L’accord signé le 13 juillet au matin se défait désormais d’heure en heure. La perspective d’une sortie de la Grèce hors de la zone Euro est à nouveau à l’ordre du jour.

On peut commettre un crime en politique, mais s’en vanter alors que le résultat est des plus incertain n’est pas le signe d’une grande intelligence. C’est, tout au plus, le produit d’un aveuglement profond, d’un fanatisme idéologique, d’une raison délirante qui sont appelés à être sanctionnés aux prochaines élections.

[1] http://www.newgreektv.com/index.php/greece/item/16414-prime-minister-alexis-tsipras-interview-in-english-translation

[2] Varoufakis Y., « On the Euro Summit’s Statement on Greece: First thoughts » , note postée le 14 juillet 2015, http://yanisvaroufakis.eu/2015/07/14/on-the-euro-summits-statement-on-greece-first-thoughts/

[3] IMF, AN UPDATE OF IMF STAFF’S PRELIMINARY PUBLIC DEBT SUSTAINABILITY ANALYSIS, IMF Country Report No. 15/186,14 juillet 2015, Washington DC.

[4] http://www.telegraph.co.uk/finance/economics/11739985/IMF-stuns-Europe-with-call-for-massive-Greek-debt-relief.html

[5] http://trends.levif.be/economie/politique-economique/luc-coene-je -me-demande-si-un-grexit-n-aurait-pas-ete-mieux/article-normal-405469.html

[6] Conférence de Presse du Président François Hollande du 13 juillet 2015, texte provenant du site http://www.elysee.fr/declarations/article/conference-de-presse-a-l-issue-du-sommet-de-la-zone-euro-2/

[7] Conférence de Presse du Président François Hollande du 13 juillet 2015, op.cit..

[8] Conférence de Presse du Président François Hollande du 13 juillet 2015, op.cit..

[9] Conférence de Presse du Président François Hollande du 13 juillet 2015, op.cit..

[10] Voir Bibow, J., et A. Terzi (eds.), Euroland and the World Economy—Global Player or Global Drag? Londres, Palgrave, 2007.

[11] Sapir J., Faut-il sortir de l’Euro ?, Le Seuil, Paris, 2012

[12] Conférence de Presse du Président François Hollande du 13 juillet 2015, op.cit..

Source : Jacques Sapir, pour son blog RussEurope, le 15 juillet 2015.

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Leçons de la crise grecque sur l’Euro

PAR  · 16 JUILLET 2015

Le drame que vit la Grèce nous aura au moins appris deux choses : le lien qui existe aujourd’hui entre l’Euro et l’austérité et l’attachement d’une partie de la gauche à l’Euro, un attachement qui la conduit, maintenant de plus en plus rapidement, à sa perte. La première de ces choses permet de comprendre pourquoi les autorités de la zone Euro se sont montrées à ce point inflexibles. Le second nous explique pourquoi Alexis Tsipras s’est laissé poser la tête sur le billot et n’a pas choisi de rompre quand il le pouvait, c’est à dire dans la nuit du 5 au 6 juillet, après la victoire du « Non » au référendum.

L’Euro, c’est l’austérité

L’Euro est lié à l’austérité de par la logique même de la monnaie unique. Celle-ci met en concurrence des pays aux dotations en facteurs de production (que ces derniers soient matériels ou humains avec le niveau d’éducation) très différents. Pour rétablir leur compétitivité face à des pays mieux pourvus, les pays qui sont les moins bien pourvus doivent donc dégager une épargne supérieure (en pourcentage) à celle des pays les mieux pourvus. Ceci entraîne un déplacement de la consommation vers l’épargne. Comme, dans une monnaie unique, toute différence de taux d’inflation se traduit immédiatement par une perte de compétitivité, les pays les moins bien pourvus ne peuvent compter sur l’inflation comme instrument de financement de cette épargne. On perçoit alors la nature profondément austéritaire de l’Euro.

Cette nature est renforcée par le fait que le taux d’inflation d’un pays ne dépend pas que de sa politique monétaire mais est déterminé, aussi, par la structure de son économie. Un pays ayant ainsi une population dynamique aura naturellement un taux d’inflation supérieur à un pays avec une population stagnante ou décroissante. De même, le taux d’inflation a un impact important sur la création des entreprises : ces créations, et les innovations qu’elles peuvent entraîner, engendrent des mouvements de prix relatifs (le prix d’un bien ou d’un service exprimé en d’autres biens ou d’autres services) qui impliquent un certain taux d’inflation. Dès lors, l’imposition d’un taux d’inflation unifié sur des économies aux structures très différentes implique que pour certain pays la croissance sera largement inférieure à ce qu’elle pourrait être. C’est ce que l’on appelle dans la littérature économique le problème de l’output gap ou écart de production.

Enfin, politiquement, l’Euro introduit un très fort biais en faveur des politiques dites d’austérité car il conduit à la substitution d’un gouvernement où la décision est reine par un gouvernement déterminé par des règles comptables. Ces règles peuvent être internalisées par le personnel politique, ce qui est de plus en plus le cas en France, ou elles peuvent être imposées par la force comme c’est aujourd’hui le cas en Grèce.

Ainsi, il peut y avoir de l’austérité sans l’Euro mais l’Euro implique nécessairement l’austérité. C’est désormais clair pour une large majorité d’européens, qui vont être de plus en plus dégoûté par la monnaie unique. Un article publié dans le Financial Times le 13 juillet soulignait cet aspect[1].

Les raisons d’un attachement irrationnel de la « gauche »

Mais, face à ce constat, on est alors confronté aux positions d’une partie de la « gauche » qui continue de défendre, envers et contre tous, l’Euro. On l’a vu en France où le P« S », y compris les soi-disant « frondeurs », a soutenu le diktat du 13 juillet, et où même le PCF, par la bouche de Pierre Laurent, à failli le soutenir avant que de changer d’avis et de finir de voter « non » au Parlement. Il y a, il faut le reconnaître, un attachement qui semble irrationnel à l’Euro, et qui a transformé une partie de la « gauche » en bras séculier pour l’application de l’austérité[2]. Ambrose Evans-Pritchard, qui se qualifie lui-même de « libéral dans la tradition de Burke » va ainsi jusqu’à écrire : « Par un retournement du sort, la Gauche est devenue ce qui met en œuvre une structure économique qui a conduit à des niveaux de chômage qui semblaient impensables pour un gouvernement démocratique d’après-guerre avec sa propre monnaie et ses instruments de souveraineté »[3]. La lettre de démission du SPD de Yascha Mounk, une universitaire allemande, publiée dans The Nation, illustre bien ce mouvement particulièrement puissant en Allemagne et le trouble qu’il engendre[4].

Cet attachement concerne aussi une partie de ce que l’on appelle la « gauche radicale ». C’est cet attachement qui a conduit Alexis Tsipras à poser sa tête sur le billot. Le politologue Stathis Kouvelakis a cherché à analyser ce phénomène[5]. Sans vouloir engager un débat il est possible de voir plusieurs raisons dans cet attachement irrationnel et malsain à l’Euro.

  • La raison la plus bénigne est une sous-estimation du rôle de la monnaie dans le fonctionnement d’une économie capitaliste moderne. Si la monnaie ne peut exister sans d’autres institutions, et en cela il est clair qu’elle n’est pas la seule institution de l’économie, la manière dont elle est gérée a une influence considérable sur les autres institutions. Cela s’appelle tout simplement la dialectique.
  • Une vision dévoyée de « l’internationalisme » qui prétend qu’au nom d’intérêts communs (qui existent assurément) les peuples seraient Cette vision nie en réalité la notion d’internationalisme qui précise bien que le commun est entre les Nations mais ne se substitue pas à elles. Cette vision dévoyée prétend ainsi que le Libre-Echange est la forme actuelle de « l’internationalisme ». On comprend alors comment elle arrive à constituer l’Euro en fétiche, sans s’interroger sur le fait que les « unions monétaires » sont en réalité assez rares aujourd’hui dans le monde. Toute interrogation sur cette réalité forcerait ceux qui défendent l’Euro-fétiche de revenir sur terre et d’en envisager l’ensemble des coûts et pertes qu’il fait supporter aux économies de la zone.
  • Une idéologie de remplacement pour cette « gauche » qui se dit réaliste, et que l’on appelle la « deuxième gauche ». L’Euro est venu se substituer à la perspective du changement de société qui avait été défendu en 1981. Ayant abandonnée toute idée de changement social, ayant même substitué le « sociétal » au social, cette « gauche » dite réaliste s’est trouvée une idéologie de remplacement dans la construction européenne qu’elle a alors identifiée rapidement à l’Euro. C’est pourquoi toute remise en cause de l’Euro lui apparaît comme une remise en cause de cette dite construction européenne et doit être combattue avec la plus féroce énergie (et la plus grande mauvaise foi) et ce contre toutes les évidences. On a eu un exemple de ce type de comportement avec les déclarations faites par le Président de la république et par le Premier ministre depuis le 13 juillet.

Ces raisons n’épuisent pas le sujet. On dira, à juste titre, que nombre des économistes qui conseillent la « gauche » dite de gouvernement viennent des banques (ou des compagnies d’assurances) et sont donc directement intéressés au maintien de l’Euro. Mais, les raisons d’ordre symbolique et politique l’emportent largement. La conséquence de cela est que la question de l’Euro sera le grand débat des mois à venir. C’est autour de ce clivage que l’on verra se réunir la véritable gauche, celle qui entend rompre avec les logiques des politiques d’austérité et donc de l’Euro et ceux qui s’enfoncerons toujours plus dans une logique de soumission conduisant à l’acceptation totale de ces logiques austéritaires.

[1] W. Munchau, « Greece’s brutal creditors have demolished the eurozone project »,Financial Times, 13/07/2015.

[2] Ambrose Evans-Pritchard, « EMU brutality in Greece has destroyed the trust of Europe’s Left », The Telegraph, 15 juillet 2015,http://www.telegraph.co.uk/finance/comment/ambroseevans_pritchard/EMU-brutality-in-Greece-has-destroyed-the-trust-of-Europes-Left.html

[3] Ambrose Evans-Pritchard, « EMU brutality in Greece has destroyed the trust of Europe’s Left », op.cit., « By a twist of fate, the Left has let itself become the enforcer of an economic structure that has led to levels of unemployment once unthinkable for a post-war social democratic government with its own currency and sovereign instruments ».

[4] http://www.thenation.com/article/germanys-social-democrats-are-colluding-in-greeces-destruction-and-im-leaving-the-party/

[5] Sebastian Budgen et Stathis Kouvelakis, « Greece: The Struggle Continues », 15 juillet 2015, https://www.jacobinmag.com/2015/07/tsipras-varoufakis-kouvelakis-syriza-euro-debt/

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Crises

PAR  · 18 JUILLET 2015

 La crise grecque, dont on pressent qu’elle est loin d’être achevée, aura eu pour une de ses premières conséquences d’avoir exposé la véritable nature de la zone Euro et d’avoir permis au débat sur l’Euro lui-même de revenir au premier plan.

Le diktat pour rien

Il est en effet désormais clair que l’accord extorqué à la Grèce lors de la réunion de l’Eurogroupe et de Conseil européen dans la tragique nuit du 12 au 13 juillet n’a rien réglé. Non seulement le soi-disant « accord » se révèle d’heure en heure inadapté et inapte à traiter le fond du problème, mais on se rend compte que cet accord n’apportera aucun répit[1]. En effet, si lundi 20 juillet les banques grecques vont à nouveau ouvrir leurs portes, les opérations qu’elles feront seront extrêmement limitées. Les retraits de la population ne pourront toujours pas excéder 420 euros par semaine, même si cette somme pourra être retirée en une fois. Les opérations des entreprises grecques resteront toujours très limitées. En fait, cette situation de pénurie de liquidités qui a été organisée par la Banque Centrale Européenne porte un coup fatal à l’économie grecque. Le pourcentage des prêts dits « non-performants » a très fortement augmenté depuis le 26 juin dernier. Les besoins en financement des banques grecques sont passés de 7 à 10 milliards d’euros fin juin à 25-28 milliards au 15 juillet et pourraient atteindre la somme de 35 milliards vers le milieu de la semaine prochaine. En fait, le système bancaire grec a étédélibérément détruit par les pressions exercées par la Banque Centrale Européenne à des fins essentiellement politiques. Les montants qu’il faudra accorder à la Grèce simplement pour que le pays ne sombre pas dans un chaos total s’il devait rester dans la zone Euro ne sont plus désormais de 82 à 86 milliards d’euros comme estimé le 13 juillet mais plus probablement de l’ordre de 120 milliards d’euros. La dette de la Grèce n’est aujourd’hui plus « soutenable » et l’accord n’a rien fait pour en assurer la soutenabilité[2]. Si Mme Merkel, M. J-C Juncker et M. Dijsselbloem sont les « vainqueurs » d’Alexis Tsipras, ils sont en train de comprendre ce que signifie l’expression de « victoire à la Pyrrhus ».

Le coût politique de cette crise

Mais, le coût principal ne sera pas économique. Il est en réalité politique[3]. Des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent pour la dire[4]. En fait, les conditions dans lesquelles les termes de ce véritable diktat ont été imposés a fait exploser la prétention de l’Union européenne d’être un espace de coopération et de solidarité, dénué de conflits. La zone Euro s’est révélée n’être qu’un instrument de domination voulu par l’Allemagne avec l’acquiescement de la France. L’Allemagne va d’ailleurs très vite comprendre le prix politique réel de son apparente victoire. Elle a fait disparaître en quelques jours tout le capital de sympathie relative, et en tous cas de respectabilité, qu’elle avait acquis en plusieurs dizaines d’années. Il est donc désormais très probable que l’on va assister à un aiguisement des conflits au sein tant de l’Eurogroupe (la Zone Euro) que de l’Union européenne. Il est clair que les dirigeant allemands sont désormais devant l’alternative suivante : soit ils acceptent la transformation de la zone Euro en une Union de transfert, ce qu’ils ont toujours refusé depuis 1999, et ce qu’ils ne peuvent accepter d’un strict point de vue comptable, soit ils organisent la sortie de la Grèce de la zone Euro, mais dans des conditions qui entraîneront bien vite l’implosion de l’ensemble de cette zone. C’est pourquoi ils tentent désespérément de trouver une troisième voie, l’instauration d’un système à deux monnaies en Grèce pour prétendre que celle-ci fait toujours partie nominalement de la zone Euro. Mais, les systèmes bi-monétaires, quand le pays qui les subit n’a plus le contrôle de sa Banque Centrale, se révèlent extrêmement instables.

Le débat sur la viabilité de l’Euro

De plus, quelles que soient les différentes tentatives pour résoudre cette crise grecque, il est clair qu’elle ouvre de manière particulièrement violente le débat sur la viabilité de l’Euro. Il est très significatif que l’ancien économiste en chef de la BCE pose ouvertement ce problème[5]. Ici encore, les voix se multiplient. Il est donc clair que ce débat, longtemps supprimé et réprimé, est désormais en train d’éclater. Les arguments d’autorité qui sont souvent avancés, et en particulier en France, ne pourront plus convaincre. L’ouverture d’un véritable débat sur les coûts tant économiques que politiques de l’Euro est le signe évident de sa décomposition. Bien entendu, les facteurs de blocage restent important, ne serait-ce que parce qu’un tel débat remet en cause la légitimité d’une grande partie de la classe politique en France. Mais, cette classe politique désormais ne peut plus mettre son véto sur le débat lui-même et elle devra, dans les semaines qui viennent, faire face à une montée de critiques. C’est le début de la fin. Il n’y a vraisemblablement plus que notre Président, M. François Hollande, pour vouloir l’ignorer.

[1] Galbraith J., « Greece, Europe, and the United States », Harper’s Magazine, 16 juillet 2015, http://harpers.org/blog/2015/07/greece-europe-and-the-united-states/

[2] Barro J., « The I.M.F. Is Telling Europe the Euro Doesn’t Work », The New York Times, 14 juillet 2015, http://www.nytimes.com/2015/07/15/upshot/the-imf-is-telling-europe-the-euro-doesnt-work.html?_r=1&abt=0002&abg=0

[3] Comme le constate D. Tusk. Voir P. Spiegel « Donald Tusk interview: the annotated transcript », Financial Times, 16 juillet 2015,http://blogs.ft.com/brusselsblog/2015/07/16/donald-tusk-interview-the-annotated-transcript/

[4] Le Point, « DSK fait encore la leçon », 18 juillet 2015,http://www.lepoint.fr/economie/grece-dsk-fait-encore-la-lecon-18-07-2015-1949756_28.php

[5] Interview d’Otmar Issing dans Corriere della Sera, 16 juillet 2015,http://www.corriere.it/economia/15_luglio_16/crisi-greca-l-economista-issing-inutile-illudersi-meglio-fuori-euro-0b802768-2b7d-11e5-a01d-bba7d75a97f7.shtml?refresh_ce-cp

 Source

Source: http://www.les-crises.fr/leuro-raison-delirante-par-jacques-sapir/


Revue de presse internationale du 19/07/2015

Sunday 19 July 2015 at 00:01

Autour de la crise grecque, mais pas que, qui (pro)pose beaucoup de perspectives et de questions variées sur l’Europe, ou la question des poids et mesures ne lassent pas de surprendre. A noter un article traduit (du philosophe et sociologue allemand Habermas) dans la rubrique Réflexion. Merci à nos contributeurs et bonne lecture.

Source: http://www.les-crises.fr/revue-de-presse-internationale-du-19072015/


Tsipras parle aux Grecs : “J’assume un texte auquel je ne crois pas”

Saturday 18 July 2015 at 01:01

“J’assume un texte auquel je ne crois pas” : je dirais qu’on a ici toute la quintessence du socialisme (pardon, focialisme)…

Il manque un peu des fois, le général, non ?

Je suis assez fasciné par un tel manque d’ambition, cette espèce de pulsion de mort liée à cette soif d’immobilisme… C’est vrai que cela a été dur, mais plus qu’avoir signé l’accord, les réactions de Tsipras après le 13 juillet (et les révélations de Varoufakis) ont été particulièrement décevantes… L’euro ou la survie, il a choisi…

Je me rappelle une fois de Marie-France Garaud, me disant : “mais regardez que fait le renard pris au piège ? Il se ronge la patte, car il pense qu’il vaut mieux vivre libre sur 3 pattes…” C’ets bien résumé.

Alexis Tsipras s’exprime à la veille du vote crucial au Parlement grec sur l’accord, très mal accueilli par une partie de son parti de gauche radicale Syriza.

Le Premier ministre grec lors de son interview télévisée le 14 juillet 2015. (ANDREA BONETTI / PRIME MINISTER OFFICE / AFP)

Le Premier ministre grec lors de son interview télévisée le 14 juillet 2015. (ANDREA BONETTI / PRIME MINISTER OFFICE / AFP)

Il n’y adhère pas, mais il fallait le faire. Le Premier ministre grec Alexis Tsipras a reconnu mardi 14 juillet au soir que l’accord avec les créanciers pour un troisième plan d’aide financière était un texte auquel “il ne croit pas”, mais qu’il “a signé pour éviter le désastre au pays”.

Alexis Tsipras s’exprime à la veille du vote crucial au Parlement grec sur cet accord annoncé lundi à Bruxelles et qui est très mal accueilli par une partie de son parti de gauche radicale Syriza.

Voici ce qu’il faut retenir de l’interview du Premier ministre grec.

# “J’assume mes responsabilités”

“J’assume mes responsabilités pour toute erreur que j’ai pu commettre, j’assume la responsabilité pour un texte auquel je ne crois pas mais je le signe pour éviter tout désastre au pays”, déclare Alexis Tsipras lors d’une interview à la télévision publique grecque ERT.

“Quand un bateau est en difficulté, le pire pour le capitaine est de l’abandonner”, martèle-t-il en excluant des élections anticipées car “il n’a pas l’intention d’échapper à ses responsabilités”.

# “Discussions idéologique”

Alexis Tsipras explique par ailleurs “vouloir faire tout ce qu’il peut pour garantir l’unité du parti”.

“Ce n’est pas le moment pour des discussions idéologiques” mais de s’assurer de l’accord avec la zone euro.

Il a loué son partenaire de la coalition gouvernementale, Panos Kammenos, dirigeant du petit parti souverainiste Grecs Indépendants, qui l’a toujours soutenu malgré leurs différences idéologiques.

“Je suis sûr que certains se seraient réjouis si ce gouvernement était une parenthèse [politique]“, déclare Alexis Tsipras. “C’est une grande responsabilité de ne pas plier”.

# “Une mauvaise nuit pour l’Europe”

Le Premier ministre grec laisse entendre que les banques, fermées depuis le 29 juin, allaient le rester encore un bon moment :

“L’ouverture des banques dépend de l’accord final qui n’aura pas lieu avant un mois”, dit-il, pour ne pas que les Grecs risquent d’aller chercher tout leur argent. Mais il espére que la BCE augmente l’ELA, l’aide d’urgence aux banques, donc “il y aura la possibilité de retirer plus”.

Il estime que la nuit de l’accord, celle de dimanche à lundi, “a été une mauvaise nuit pour l’Europe”, marquée par “une pression sur un peuple qui s’était exprimé lors du référendum”. “La position des Européens était dure et vindicative”..

Alexis Tsipras se réjouit néanmoins du plan estimé à un montant entre 82 et 86 milliards d’euros de prêts sur trois ans que la Grèce peut obtenir si elle remplit les conditions imposées, et de l’engagement des créanciers de commencer à discuter de la dette grecque cette année.

“C’est une combinaison qui doit faire éviter le Grexit et renforcer les investissement en Grèce”, espère-t-il.

# Les cercles conservateurs

Le Premier ministre s’en est pris aux cercles conservateurs en Europe et au ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble en faveur “d’un plan B” pour la Grèce, c’est-à-dire la sortie du pays de l’euro.

“En aucun cas je n’aurais accepté ce plan” élaboré depuis mars, assure Alexis Tsipras. Il révéle qu’il a demandé “une étude sur les conséquences d’un ‘Grexit’” mais quand il l’a lu, il a jugé qu’il ne constituait pas “une solution alternative” pour la Grèce.

Il a estimé que le risque du Grexit existait toujours tant que l’accord avec la zone euro n’a pas été finalisé.

Interrogé sur la démission de l’ex-ministre des Finances Yanis Varoufakis, Alexis Tsipras l’a qualifié de “très bon économiste” mais pas forcement “un bon homme politique”.

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OB : RAPPEL : attention, en 2015, “homme politique” =”émasculé”.

Je n’ai longtemps pas trop su quoi penser de ce type là ; hélas, il a fallu que se déroule l’Histoire pour y voir plus clair…

En tous cas, il est évident que le vrai “homme politique”, c’est Varoufakis… L’Homme politique, c’est celui qui écrit l’Histoire, parfois à raisons, parfois à tort ; Tsipras (dont les réactions post-accord montrent bien la nature) restera un petit laquais à qui cette seconde citation de Marie-France Garaud va à ravir : “Je croyais qu’il [Chirac] était du marbre dont on fait les statues. En réalité il est de la faïence dont on fait les bidets.”

Le pouvoir corrompt tout.

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Les 10 “Varoufakisseries” à retenir

Source : L’Obs, le 15 juillet 2015.

Source: http://www.les-crises.fr/tsipras-parle-aux-grecs-jassume-un-texte-auquel-je-ne-crois-pas/


Revue de presse du 18/07/2015

Saturday 18 July 2015 at 00:01

Une bonne tranche de Grèce, de petits arrangements entre amis du Sénat à l’Eurogroupe, mais aussi entre ennemis ailleurs, les affaires franco-russes, le Vénézuela et l’Arménie. Bonne lecture et merci à ceux qui permettent à cette revue d’exister chaque semaine.

Source: http://www.les-crises.fr/revue-de-presse-du-18072015/


[AutoDéfense Intellectuelle] L’art d’avoir toujours raison, d’après Schopenhauer

Friday 17 July 2015 at 00:01

Petit cadeau aujourd’hui, pour nous changer !

Nous avons réalisé une synthèse du fameux livre L’art d’avoir toujours raison, d’Arthur Schopenhauer, paru en 1830 (en version intégrale ici par exemple).

Nous avons essayer d’illustrer au mieux sa pensée par quelques exemples modernes – vous vous laisserez ainsi moins prendre par ces tactiques souvent manipulatrices…

Bonne lecture !

P.S. Vous pouvez téléchargez le document en pdf ici 

Source: http://www.les-crises.fr/l-art-d-avoir-toujours-raison-d-apres-schopenhauer/