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[Reprise] La Folie-Système à marche forcée, par Philippe Grasset

Sunday 29 June 2014 at 02:09

2 bons articles de DeDefensa + 1 lien :) (pensez à soutenir aussi ce site si vous pouvez)

Pour mémoire, BAO = Bloc Américano-Occidental

Sapir et la chute du dollar

La radio La Voix de la Russie retranscrit, le 19 juin 2014, une interview de l’économiste français Jacques Sapir. Le thème de cet entretien est la question de l’évolution de la position de monnaie de réserve du dollar à la lumière des initiatives russes en développement, telles qu’elles ont été déclenchées par la crise ukrainienne. (Voir notamment le dernier texte sur cette dynamique, le 19 juin 2014.)

La Voix de la Russie. «La Russie et la Chine entendent se débarrasser du dollar dans leurs transactions gazières. Est-ce un projet viable d’après vous ?»

Jacques Sapir. «Il est très clair que l’initiative que comptent prendre les gouvernements russe et chinois est quelque chose de potentiellement très important ! En effet, le dollar joue 3 rôles dans l’économie internationale, à savoir : unité de compte, car beaucoup de prix sont calculés en dollars (en particulier, dans les matières premières et pas que pour le gaz et le pétrole)… C’est aussi vrai pour le blé et différentes céréales… C’est aussi une monnaie de transactions c’est-à-dire la monnaie dans laquelle se font les règlements de ces transactions internationales… Et il est également une monnaie de réserve. Ce que voudrait changer justement cet accord entre les gouvernements russe et chinois, c’est l’usage du dollar comme monnaie de certaines transactions portant en particulier sur le gaz et le pétrole. On peut penser que cela se fera mais ça impose évidemment que le rouble soit reconnu en Chine (ce qui est déjà le cas) et que le yuan soit reconnu en Russie ce qui n’est le cas, en fait, que depuis la fin de l’année dernière où il y a eu les première cotations du yuan sur la bourse de Moscou.

»D’une manière plus large, cette démarche correspond en fait à un souci assez constant de toute une série de pays – et là ça va beaucoup plus loin que la Russie et la Chine… Ca concerne les pays du Golfe Arabo-Persique et ceux de l’Amérique Latine, producteurs des matières premières ; ces pays veulent sortir de la zone dollar pour ce qui concerne la monnaie des transactions. Et ajoutons à cela encore un point. La plainte déposée par le gouvernement américain contre la banque française BNP-Paribas… Une plainte fondée sur le fait que des opérations contraires à la loi américaine ont été faites par cette banque alors que les succursales de cette banque n’étaient pas sises aux Etats-Unis, mais parce que l’on utilisait le dollar et parce que la chambre de compensation de dollar était aux Etats-Unis, le gouvernement américain considère que des lois américaines ont été violées.

»C’est une question juridique extrêmement complexe, mais on voit bien que ce précédent, au sens juridique du terme, ne peut qu’inquiéter toute une série de pays qui font leurs transactions en dollars et ne peut que les inciter à basculer vers d’autres monnaies de transaction.»

La Voix de la Russie. «Existe-t-il une vraie chance de créer une monnaie de réserve hormis le dollar ?»

Jacques Sapir. «C’est un très vieux problème ! Il faut se souvenir que le rôle de dollar comme monnaie de réserve avait été attaqué par le général de Gaulle en 1965-66. Et régulièrement, à chaque nouvelle crise monétaire internationale on reparle de ce problème. D’un côté, il est clair que le système actuel fondé sur un usage non pas exclusif mais très largement dominant du dollar comme monnaie de réserve n’est pas satisfaisant. Et d’ailleurs on le voit dans la structure des réserves de change des différentes banques centrales. On voit par exemple, qu’en plus du dollar il y a l’euro mais aussi maintenant beaucoup de nouvelles monnaies : par exemple, le dollar canadien, le dollar australien et celui de Singapour, etc. Donc il existe évidemment un besoin de diversification au minimum et peut-être plus un besoin de changer le système.

»A partir de là on voit très bien dans quelle alternative nous sommes. Pour opérer un changement complet du système monétaire international, il faudrait que la situation politique soit mûre pour une conférence internationale sur le modèle de la conférence de Bretton Woods qui s’est tenue en 1944. On peut penser qu’aujourd’hui les temps ne sont pas encore mûrs c’est-à-dire que les Etats-Unis qui bénéficient d’une certaine manière de la situation actuelle feront tout pour maintenir cette situation ou dans tous les cas pour freiner un mouvement vers le changement.

»Et donc l’autre branche de l’alternative c’est que l’on voit se développer des monnaies qui, au niveau régional, prennent de plus en plus le rôle de monnaie de réserve régionale. Je pense que c’est l’ambition de la Chine de voir la monnaie chinoise, le yuan, devenir d’ici quelques années, une monnaie de réserve au niveau de la zone Asie-Pacifique peut-être en combinaison avec le dollar australien, voire la monnaie de Singapour. On sait qu’il y a aussi le projet de constituer le rouble en monnaie de réserve pour la zone de la CEI… Et donc on va voir très probablement émerger une multiplicité de monnaies qui vont progressivement éroder la position du dollar comme monnaie de réserve internationale.»

Dans un “commentaire” rajouté en fin d’interview, Sapir précise son point de vue, ou plutôt l’élargit en le portant au niveau de la politique et des relations internationales. Il écrit notamment : «Ainsi donc le bouleversement dans le monde de la haute finance préparé de longue date par les financiers chinois et russes va torpiller la capacité américaine de projeter ses forces armées à l’étranger. Et comme on vit à l’époque de la Bourse mondiale, on ne donnerait pas cher pour la devise d’un Etat dont l’économie souffre des carences de stagnation (à ne citer que Detroit) et qui ne peut plus faire peur. Bref les Etats-Unis n’auront plus les moyens de rançonner le monde et de porter la guerre en Ukraine, en Irak, en Afghanistan et au Proche-Orient. A partir de ce moment-là l’histoire reprendra son cours naturel mais sans Washington qui sera relégué au rang des puissances régionales.»

… Il est vrai que l’on se trouve devant une situation qui devrait finalement apparaître comme paradoxale. Il ne fait aucun doute que les événements sont désormais en route pour une réduction qui s’avérera radicale du rôle du dollar, qui se fera dans la pression des crises politiques, des frustrations, des manœuvres, etc., autour de points de tension qui recèlent les plus grands risques d’explosions et de conflits. La chronologie et l’histoire très récente des trois derniers mois montrent évidemment que c’est un événement politique, – et nullement financier ou monétaire, voire économique, – qui a précipité ce qui doit devenir, sans aucun doute, la crise du dollar avec la perte de son statut privilégié de monnaie de réserve répandant son diktat impératif dans les relations internationales. Sans la crise ukrainienne, en effet, de telles manœuvres et une telle résolution politique (chez les Russes essentiellement) n’auraient sans doute pas été possibles. Il a fallu un événement déstabilisant, avec la menace de pressions encore plus déstabilisantes, sinon déstructurantes (la menace des sanctions), pour conduire sinon forcer le pouvoir russe à lancer sa conversion ouvrant la voie à une dynamique de réduction sinon de dissolution de la position privilégiée du dollar.

(Nous écrivons “pour conduire sinon forcer…“, parce que nous pensons qu’en l’absence d’une crise d’une telle intensité que l’ukrainienne, la Russie n’aurait pas choisi la voie qu’elle a choisie, de crainte de paraître trop dans une posture de confrontation avec ses “partenaires” du bloc BAO, des USA. Le système de l’américanisme, dans son aveuglement habituel, ne mesurera jamais la position de sûreté qu’il a perdue en poussant la Russie à la confrontation, notamment depuis la réélection de Poutine et, ouvertement, depuis le début de la crise ukrainienne. Le système de l’américanisme n’a jamais compris durant toutes ces années, qu’il avait, avec Poutine, un centriste ouvert à une coopération équilibrée, dont l’ambition n’était nullement de défier le Système, voire de chercher à le frapper. Mais on ne peut attendre le moindre éclair de finesse dans le jugement d’un système, celui de l’américanisme, dont on peut dire sans crainte d’être démenti que «la seule chose qu’il attend de la Russie, c’est que la Russie n’existe plus» [phrase fameuse de Leonid Chebarchine, ancien chef des SR russes].)

Il nous semble par conséquent que l’épisode montre bien l’orientation décisive qu’ont pris les événements depuis la grande rupture de l’automne 2008. Il avait été alors question de la mise en cause du dollar, d’une façon assez tranchée (voir le 27 mars 2009) et pourtant sans le moindre résultat, sans la moindre réaction du côté US, sans aucun suivi du côté des accusateurs (les Chinois, mais aussi d’autres pays de même tendance, comme le Brésil de Lula). L’épisode avait finalement montré que la question du dollar, comme toutes les questions concernant la structuration financière et économique du monde sous l’influence du bloc BAO/des USA, c’est-à-dire du Système, étaient dans l’ordre du politique et nullement dans les catégories apparemment impliquées (finance, économie, etc.), et encore dans l’ordre du politique lorsque les situations principielles et ontologiques sont en jeu, – comme dans le cas de la Russie aujourd’hui. L’épisode montre la puissance de la structure existante, autour du dollar et des autres arrangements dans d’autres domaines, structure qui renvoie au Système et qui présente la particularité d’impliquer les intérêts et la situation de ceux-là même qui pourraient s’y opposer, dans une position à la fois de victime et de complice, et cela expliquant que les tentatives pour desserrer l’étau en restant dans les domaines concernés ont jusqu’ici échoué ou même n’ont pas été sérieusement envisagées. La situation est différente, presque renversée, si l’on passe aux domaines fondamentaux. Il fallait un événement de rupture fondamentale, de l’ordre du politique le plus haut, et c’est ce qui s’est imposé avec la crise ukrainienne.

Dans cette logique, nous différons de l’analyse de Sapir pour les suites. Si le statut du dollar doit effectivement être réduit dans une sorte de dissolution diffusée par l’élargissement du rôle d’autres devises, cette opération ne se fera pas “en douceur”, loin de là et même au contraire. Les USA n’accepteront jamais d’être dépossédés de leur statut de puissance hégémonique et dominatrice, – ils le manifestent déjà en affirmant leur “exceptionnalité” au moment où ce qu’il leur reste d’exceptionnel est l’accumulation de fautes et d’erreurs réduisant à une très grande vitesse les restes de leur position qui fut effectivement exceptionnelle dans le domaine arbitraire de leur hégémonie. C’est de ce point de vue qu’il est logique d’attendre des réactions furieuses et absolument irrationnelles de leur part, et c’est en cela que la crise ukrainienne est extrêmement dangereuse et elle-même exceptionnelle ; elle ménage l’alternative qu’on a déjà vue (voir notamment le 3 mars 2014), entre la fonction de cause opérationnelle d’un conflit au plus haut niveau (spectre du nucléaire) et celle de détonateur de la phase finale de l’effondrement du Système. Il s’agit toujours de la même tendance américaniste, suivant l’équation du Système surpuissance-autodestruction, cette tendance conduisant effectivement aux deux termes de l’alternative entre la domination hégémonique et l’emportement irrémédiablement suicidaire. (Toujours la fameuse citation de Lincoln de 1838, encore rappelée le 21 mars 2014, qu’il faut toujours garder en mémoire parce qu’elle montre que le futur président, s’il était un grand politique, était d’abord un fin psychologue des événements à venir : «A quel moment, donc, faut-il s’attendre à voir surgir le danger [pour l’Amérique]? Je réponds que, s’il doit nous atteindre un jour, il devra surgir de nous-mêmes. [...] Si la destruction devait un jour nous atteindre, nous devrions en être nous-mêmes les premiers et les ultimes artisans. En tant que nation d’hommes libres, nous devons éternellement survivre, ou mourir en nous suicidant.»)

Mis en ligne le 21 juin 2014

Source : DeDefensa

En complément sur le dollar, je vous propose aussi ce billet du même site : Pour une “coalition anti-dollar”, traitant de la vision du conseiller spécial pour l’économie de Vladimir Poutine, Sergei Glaziev

 

Notes sur la folie-Système à marche forcée

28 juin 2014 – Par quoi commencer ? Par le commencement de la séquence, c’est-à-dire ce que certains jugent être “le recul de Poutine“, ce que d’autres jugent être “la manœuvre de Poutine”. Quoi qu’il en soit, il importe de ne pas prendre ce cas avec légèreté, pas plus que les autres que nous traiterons dans ces Notes d’analyse, – la “politique insinuante” de l’UE, la politique de rupture des USA.

… Il s’agit d’une dynamique générale où l’Ukraine, le détonateur de la chose, a une place importante mais qui se relativise à mesure. Elle ne rapetisse pas, non, c’est le reste, le fondamental, qui grandit avec elle en son centre, – mais centre-moteur, centre-dynamique, certainement une source d’inspiration qu’on qualifierait bien entendu de maléfique.

La dynamique de ce qui est désormais un des grands axes géographiques et psychologiques de la crise générale (orientation est-ouest, champ d’application de l’aire transatlantique à l’espace eurasiatique) échappe complètement au seul aspect ukrainien. Elle appartient à la crise générale d’effondrement du Système désormais en place et en développement opérationnel. (Quelle que soit son issue, à cette crise, guerre au plus haut niveau ou enchaînement des crises constituant l’effondrement).

(Ajoutons en complément que le “deuxième axe” de cet énorme phénomène de déstabilisation de ce qui forme l’essence des relations internationale se trouver bien entendu en Irak et alentour, sous la forme non pas d’une géographie linéaire mais d’une géographie tourbillonnante. Nous retenons cette formule de DEBKAFiles, par ailleurs utilisée dans notre Bloc-Notes du 27 juin 2014  : «The Iraqi battle arena is becom[ing] a veritable Babel of war. So far, six countries are involved in varying degrees: the US, Iraq, Iran, Syria, Jordan and Saudi Arabia.»)

Les psychologies et leur résistance

En avant pour Poutine… Nous allons nous attarder à sa pseudo “reculade”, que nous qualifierions plutôt de “manœuvre tactique désespérée”, – car aujourd’hui, toutes les “manœuvres tactiques” semblent désespérées tant la dynamique que nous devons qualifier de métahistorique est en route. Observons tout de même qu’en notant cela, nous tendons vers une des interprétations parmi celles que nous allons offrir, de l’acte symbolique (le 24 juin) de Poutine demandant et obtenant de la Douma qu’elle lui retire l’autorisation d’employer les forces armées dans la crise ukrainienne. C’est un geste qui n’est que symbolique, – Poutine reste chef des armées et donc avec le pouvoir de les utiliser si la situation l’y conduit ; mais “acte symbolique” marquant dans une situation où le système de la communication domine tout.

… Effectivement, le président russe a été l’objet de toutes les attentions, de toutes les interrogations, voire de toutes les suspicions, lorsqu’il a fait sa demande à la Douma. Entretemps, des “négociations”, – guillemets autorisés, – ont commencé entre représentants assez indirects de Kiev et représentants des révoltés du Donbass, alors qu’un “cessez-le-feu”, – guillemets fortement recommandés, – était établi jusqu’au 27 juin. (Il a été reconduit pour 72 heures, a annoncé le président-chocolat le 27 juin 2014.)

Nous allons passer rapidement en revue quelques évaluations de commentateurs que nous connaissons, pour établir combien les interprétations diffèrent. C’est une marque de la confusion dans l’évaluation qu’on peut faire de la situation. Cette confusion se retrouve partout et trouble certains esprits, quand elle en durcit d’autres. La résistance des psychologies diffère notablement selon les psychologies, selon leur résistance aux pressions du Système…

Sous l’influence du Système

D’abord, et plutôt pour l’illustration accessoire de la façon dont les psychologies peuvent varier, montrer une fermeté exemplaire de type antiSystème et soudain s’affaiblir jusqu’à céder aux narrative-Système, voici MK Bhadrakumar. Son évaluation de l’attitude de Poutine, du 24 juin 2014, est indigne de ce qu’il a écrit auparavant sur le sujet. Le chroniqueur est victime dans ce cas d’une fascination qu’il éprouve épisodiquement pour la pseudo-puissance des USA.

Dans son analyse, il souscrit essentiellement à la narrative-Système (US), malgré quelques réserves émises plus loin. Cela revient à dire que Poutine a cédé, à reculé, devant une interprétation-Système qui fait la part belle et fascinée à la soi-disant puissance US d’un Obama faisant sa grosse voix. Du coup, pour lui (Bhadrakumar), la narrative cousue de grossier fil blanc semble dire le vrai.

«Succinctly put, Russia has begun ‘de-escalating’. This follows what appears to have been a tough phone conversation US president Barack Obama had with Putin on Monday where he apparently threatened that the West will impose the so-called ’scalpel sanctions’ on Russia — focused on Russia’s energy and arms industry — unless the Kremlin took a series of measures without further delay such as abiding by the ceasefire ordered by Kiev and halting the flow of weapons across the border into Ukraine.

»In a special briefing on Friday, US state department had disclosed details of the flow of weapons, including tanks, from Russia across the border into Ukraine and hinted that the ’scalpel sanctions’ were imminent. Moscow has apparently understood that a defining moment is reaching…»

Cette façon d’accepter pour argent comptant un briefing du département d’État, cette officine devenue louche à force d’élever le mensonge en pratique quasi-ontologique et qui professe que la Russie a envahi l’Ukraine russophone, détonne de façon remarquable, par exemple, avec ce commentaire du même MK Bhadrakumar, le 1er mars 2014 : «The western politicians all the way down from US President Barack Obama are being hypocritical in calling on Russia to be ‘restrained.’ Some self-restraint on their part through the recent months could well have avoided the meltdown in Ukraine that has begun. The cracks are audible, like ice cracking, as the ethnic mosaic does not seem to able to hold together anymore. [...] In sum, the West’s fifth column in western Ukraine has created an illegitimate, unconstitutional power structure in Kiev manned by people who can be trusted as ‘pro-western’ and, more importantly, viscerally ‘anti-Russian’.»

La surprise de la démarche de Poutine

Bien entendu, la démarche de Poutine trouve d’autres commentaires qu’une simple capitulation devant une Amérique imposant sa volonté. Car cette démarche, si l’on s’y attache un instant, apparaît comme mystérieuse et complexe et certains avouent, dans un premier jet, leur stupéfaction initiale (The Saker, le 24 juin 2014, avant de faire un long développement où il envisage différentes hypothèses : «When I heard this morning that Putin had asked the Federation Council to repeal the resolution on the use of Russian armed forces on the territory of Ukraine I was frankly baffled. Truly, I had not expected such a move…»)

La commentatrice française Karine Bechet-Golovko, juriste installée en Russie et qui édite un site sur la situation russe (Russiepolitic), émet plusieurs hypothèses qui nous restituent aussi bien les interprétations manœuvrières que certaines déceptions des partisans du président russe. (Le 25 juin 2014).

«Et la Russie affirme clairement ne pas vouloir intervenir. Certains d’affirmer l’existence d’un plan caché de V. Poutine, de rappeler sa grande dextérité diplomatique et géopolitique. C’est vrai et espérons. Mais au-delà de l’espoir, plusieurs questions inquiètent. Sans oublier que sur place, ils n’ont pas l’air d’être trop au courant de ce soutien …

»Prenons les choses sous un autre angle. Je sais, on m’a déjà dit que ces choses ne sont pas liées. Et l’on me l’a tellement répété, que j’en ai des doutes. Donc imaginons une autre version, plus cynique, soit, mais qui a aussi le droit d’exister. Dans cette version, la Russie ne fait pas le pari de la paix, elle fait le choix de la tranquillité et du développement économique. Elle en a par ailleurs aussi le droit. La Russie n’est pas obligée non plus d’endosser le rôle du preux chevalier sans peur et sans reproche. Seulement, oui, c’est moins joli, moins romantique, mais cela correspond pas mal à certaines élites en place. Et au calendrier en cours …»

Le “cessez-le-feu en chocolat” et les diverses “réalités”

Quoi qu’il en soit de ce “cessez-le-feu en chocolat”, on sait parfaitement qu’il n’a pas fait pour autant cesser le feu. La faute en a été aussitôt attribué, du côté du bloc BAO, aux insupportables “terroristes”-parlant-russe de la partie russophone du pays. Rien de surprenant dans ces prolongements, sinon l’installation d’une situation d’une double “réalité”, comme la décrit la même Karine Bechet-Golovko : «Et nous avons l’impression que deux réalités parallèles se mettent en place, se font concurrence. D’un côté la réalité diplomatique, celle d’un cessez-le-feu et de la rencontre de bonnes volontés, d’un autre côté la réalité crue du quotidien dans laquelle les gens continuent à se battre, à être blessés et à mourir. Comme si la volonté politique, avec le soutien médiatique, devait permettre de faire triompher une réalité sur une autre. Bref, une guerre post-moderne, sans armée régulière, avec des opérations coups de poings sans insignes et la caméra sur l’épaule…»

Cette situation n’est pas nouvelle tant le jeu des différentes “réalités” est devenu courant dans notre époque, mais jamais elle n’a paru si polarisée, si frappante entre ses deux extrêmes, qu’avec la crise ukrainienne. Le déni de la situation opérationnelle et humanitaire dans le Donbass par le bloc BAO, notamment dans l’activité de ce bloc au sein du système de la communication par le biais de la presse-Système, est d’une telle puissance qu’il nourrit les surprises les plus fortes, les tensions souterraines les plus grandes, les explosions les plus inattendues, lorsque la réalité de la situation parvient à se faire entendre. Cela implique que la crise est là pour durer, pour croître et se multiplier dans ses effets, ce dont on se doutait ; le terrain de la communication ne sera certainement pas le moins sollicité, il constituera même le principal champ de la bataille… «I have to agree with several Russian analysts who have recently warned that we are in this conflict for the long run and that it would be the height of irresponsibility to assume that now it’s all over and all is well. For one thing, the Banderastani part of the Ukraine is guaranteed to explode before the end of the year (Russia will shield Novorussia from this explosion by direct aid and economic ties). Finally, the information war will now only heat up even if the purely military aspects might become less central.» (The Saker, dans le texte déjà cité.)

Parole d’oligarque

Pour achever de mesurer l’extrême complication du désordre ukrainien, – il y a des désordre plus “désordonnés” que d’autres, et l’ukrainien est l’un de ceux-là, sans doute le plus “performant”, – on citera cet extrait d’un texte d’Alexander Donetsky, sur Strategic-Culture.org, le 26 juin 2014. Il indique combien la fragmentation du pays que la crise a mise à jour et à nu touche également les forces dites “de Kiev”, notamment avec la présence des oligarques constitués en autant de seigneurs féodaux, ou de “seigneurs de guerre”, – on choisira l’image qui convient. La crise ukrainienne montre plus qu’aucune autre les connexions directes de la politique, de l’idéologie, de la guerre secrète, des extrémismes affichés, avec les fortunes incertaines des oligarques “profiteurs de crise”, le crime organisé, les pouvoirs parallèles..

Ici, le cas de l’oligarque Kolomoisky qui a sa fortune, sa banque, son armée, sa politique, ses projets (c’est lui qui voudrait verrouiller la frontière russo-ukrainienne d’un ouvrage composé d’une clôture électrifiée, de champs de mines, etc.) … On mesure les limites du pouvoir du président-“roi du chocolat” dans cette situation, de ce fait devenue encore plus typiquement postmoderne. «However, some of the government troops had no intention of obeying the ceasefire order. When the suspension of hostilities was announced during Poroshenko’s trip to the Donetsk region, the governor of the Dnepropetrovsk region, the oligarch Igor Kolomoisky, openly told the president that he “will never obey and his army will finish off these separatists anyway”. It was Kolomoisky who financed the creation and arming of several battalions of mercenaries (using funds from his bank, Privat) who distinguished themselves with the cruelty of their slaughter of the civilian population in many cities in the Donbass: Mariupol; Krasny Luch; Slovyansk; Schastye; and Stanitsa Luganskaya … This all goes to show that in reality Poroshenko not only has no control of the Kiev-based Maidan movement that is unwilling to either fight or release the buildings they captured six months ago, but he also has no firm grip on either the troops that were mobilized with so much effort or the regions that still profess outward loyalty to him.»

“… Se préparer à la guerre”

Finalement, pour en revenir à Poutine et quitter la seule crise ukrainienne pour passer à la big picture qui s’est constituée autour de cette crise, on retiendra également une dernière interprétation de son attitude. Elle est de Paul Craig Roberts, le 24 juin 2014, et elle se présente comme une approbation complète de les décisions du président russe de rechercher une issue diplomatique au travers des négociations ukrainiennes et de demander le retrait de l’autorisation d’intervenir militairement de la Douma.

C’est un point d’autant plus intéressant que PCR, en une autre occurrence, au début mai, avait critiqué implicitement la position attentiste et arrangeante de Poutine … (Le 2 mai 2014 : «Will Putin sit there with his hopes awaiting the West’s good will to work out a solution while Washington attempts to engineer his fall? The time is approaching when Russia will either have to act to terminate the crisis or accept an ongoing crisis and distraction in its backyard.… [...] Yet, the Russian government spokesman again expressed the hope of the Russian government that European governments and Washington will put a stop to the military strikes and pressure the Kiev government to accommodate the protesters in a way that keeps Ukraine together and restores friendly relations with Russia. This is a false hope…»)

Cette fois, PCR soutient la position de Poutine. Voit-il plus d’espoir qu’au début mai ? Au contraire, son point de vue s’est largement assombri. Sa thèse est alors que Poutine doit tenter de trouver une entente, notamment et essentiellement avec des pays européens qui finiraient par comprendre le danger de la situation (la France et l’Allemagne sont citées [voir le 26 juin 2014]). Si Poutine ne réussit pas, si les Européens cités restent fermés à une telle initiative, alors ce sera la guerre, juge Paul Craig Roberts… Cela justifie sa position : il n’y a plus rien à perdre, il faut tout tenter pour détacher des Européens des USA, dont la course est celle de la guerre, tout faire pour éviter cette guerre qui risquerait grandement et évidemment d’être nucléaire. Ainsi PCR voit-il la démarche de Poutine.

«Putin knows that the UK is a complete vassal puppet state, that Cameron is just as bought-and-paid-for as Blair before him. Putin’s hope for diplomacy over force rests on Germany and France. Both countries face Europe’s budget and employment woes, and both countries have significant economic relations with Russia. German business interests are a counterweight to the weak Merkel government’s subservience to Washington. Washington has stupidly angered the French by trying to steal $10 billion from France’s largest bank. This theft, if successful, will destroy France’s largest bank and deliver France to Wall Street.

»If desire for national sovereignty still exists in the German or French governments, one or both could give the middle finger to Washington and publicly declare that they are unwilling for their country to be drawn into conflict with Russia for the sake of Washington’s Empire and the financial hegemony of American banks.

»Putin is betting on this outcome. If his bet is a bad one and Europe fails not only Russia but itself and the rest of the world by accommodating Washington’s drive for world hegemony, Russia and China will have to submit to Washington’s hegemony or be prepared for war.»

D’un “choix de civilisation” (l’UE)…

Avec ce commentaire de Paul Craig Roberts, nous sortons du seul cadre de la crise ukrainienne pour embrasser tout son environnement, sa puissance fondamentale, son poids énorme de “crise haute ultime” (voir le 24 mars 2014). C’est là, dans un mouvement centripète caractéristique, à partir de la crise ukrainienne et hors d’elle, que sont nés et se développent les foyers qui font de la crise ukrainienne cette “crise haute ultime”.

Hier, l’UE a signé un accord d’association avec l’Ukraine, la Moldavie et la Géorgie (voir Itar-TASS, le 27 juin 2014). C’est le même accord que Ianoukovitch avait refusé de signer en novembre 2013, ce qui avait fourni le détonateur de la crise ukrainienne. Cet accord fait entrer les signataires dans l’orbite de l’UE, avec un pied dans l’OTAN par le seul fait des dispositions de sécurité glissées dans l’accord sans qu’aucune des bureaucraties concernées (celles de l’UE) n’en mesure les effets, – car, précisément, ces accords, rédigés par des spécialistes de l’économie, imbriquent mécaniquement des dispositions standard dont l’effet véritable pourrait s’avérer explosif. C’est ainsi que les détonateurs de crise, ou de relance de crise, se créent subrepticement, sans réelle volonté planifiée contrairement à l’analyse générale, mais par un mécanisme de système, ou disons plus justement “du Système”… Cela, pour le côté européen, où l’on engage à des choix dont nul ne mesure les effets.

Du côté russe, par contre, on comprend parfaitement la vérité de la situation. Avertis de ces accords d’association il y a quelques jours par des délégués de l’UE dépêchés expressément, dans un esprit de conciliation qui est véritablement et ingénument dans le chef de cette démarche de l’UE, le vice-ministre des affaires étrangères de Russie a laissé tomber : «C’est un choix de civilisation.» Il voulait dire par là qu’au-delà des termes économiques et de libre-échange, c’est bien une conception du monde, et une conception absolument mensongère du monde, que les trois pays rejoignent. Ce faisant, ils se trouvent placés en confrontation avec la Russie, quelles que soient leurs intentions à cet égard. Nous insistons beaucoup sur cet aspect d’automatisme, car effectivement la “puissance” de l’UE est fondée sur une vision totalement amputée du monde et, dans certains domaines essentiels et pérennes comme la sécurité et la souveraineté qui en découle, elle est totalement aveugle et semble raisonner selon les croyances les plus naïves … C’est de cette façon que les choses se passent, et nullement selon des conceptions et une vision intellectuelles élaborées.

… A un autre “choix de civilisation” (les BRICS)

En échange de l’avis qu’ils ont reçu de l’UE concernant les accords d’association, les Russes ont parlé à leurs interlocuteurs de la prochaine réunion des BRICS en juillet. Cette réunion apparaît d’une extrême importance, selon les Russes, et un travail intense est en cours à cet égard. Les BRICS travaillent sur deux accords fondamentaux, celui, déjà connu, d’une banque d’investissement, et celui, nouveau d’un pool de monnaies de réserve pour leurs échanges. Ce dernier point est une étape fondamentale dans la concrétisation de la dynamique de “dé-dollarisation” dont nous avons déjà beaucoup parlé (voir le 14 mai 2014 et le 19 juin 2014).

La chose a été présentée avec modestie aux délégués de l’UE, – lesquels ont l’habitude de traiter avec le plus parfait mépris les initiatives russes, et en général non-bloc BAO, de cette sorte. Les Russes ont présenté ce projet comme étant le produit d’une situation qui les a forcés à y venir. Ce n’est pas à notre sens une précaution oratoire tactique mais bien une réalité … Cette attitude correspond à ce que nous écrivions le 21 juin 2014, avec pour la compréhension du texte l’extension du “système de l’américanisme” à l’ensemble du bloc BAO :

«Nous écrivons “pour conduire sinon forcer…”, parce que nous pensons qu’en l’absence d’une crise d’une telle intensité que l’ukrainienne, la Russie n’aurait pas choisi la voie qu’elle a choisie, de crainte de paraître trop dans une posture de confrontation avec ses “partenaires” du bloc BAO, des USA. Le système de l’américanisme, dans son aveuglement habituel, ne mesurera jamais la position de sûreté qu’il a perdue en poussant la Russie à la confrontation, notamment depuis la réélection de Poutine et, ouvertement, depuis le début de la crise ukrainienne. Le système de l’américanisme n’a jamais compris durant toutes ces années, qu’il avait, avec Poutine, un centriste ouvert à une coopération équilibrée, dont l’ambition n’était nullement de défier le Système, voire de chercher à le frapper. Mais on ne peut attendre le moindre éclair de finesse dans le jugement d’un système, celui de l’américanisme, dont on peut dire sans crainte d’être démenti que “la seule chose qu’il attend de la Russie, c’est que la Russie n’existe plus” (phrase fameuse de Leonid Chebarchine, ancien chef des SR russes).»

Le suprématisme du bloc BAO

Ce que distinguent les milieux européens qui nous ont informés sur ces divers contacts avec les Russes, c’est une situation complètement bloquée d’antagonisme contre les Russes, de la part de l’UE et des USA, mais d’une façon différente. Il serait à notre sens simpliste de voir dans la situation ce qu’on dénonce habituellement comme une allégeance aveugle mais explicitement coordonnée de l’entité européenne aux USA. Il y a bien deux positions distinctes, mais caractérisées toutes les deux par une sorte de “suprématisme” commun ; on sait que ce trait psychologique constitue à nos yeux la véritable “valeur” invertie du bloc BAO, supplantant et surpassant complètement le racisme, auquel il ressemble dans ses aspects les plus vils mais dont il diffère fondamentalement, quasiment par une essence différente, par l’affirmation de la nécessité de l’abaissement, sinon de l’anéantissement de l’autre.

Il faut bien se persuader que ce sentiment joue un rôle considérable dans les politiques de ces entités bureaucratiques (l’UE comme on la voit, la bureaucratie américaniste en mode de surpuissance en l’absence d’un pouvoir politique centralisateur et disposant de l’autorité d’une légitimité, – Obama n’a plus rien de tout cela). Nous rappellerons ce que nous écrivions à ce propos le 4 juin 2014 , et à propos de l’exceptionnalisme qui est le miroir conceptuel, ou de communication, de ce suprématisme, et qui touche aussi bien l’UE que les USA ; c’est bien là la force principale qui mène le bloc BAO dans cette affaire comme dans tant d’autres, – le mépris suprématiste inconscient et réflexif pour les Russes, qui est de même nature que celui éprouvé, dans une autre occurrence, pour les Iraniens. (Cela pourrait expliquer ce fait que les directions politiques du bloc BAO ne se formalisent pas vraiment quand le Premier ministre ukrainien désigne les Ukrainiens russophones de l’Est du pays de “sous-hommes”, selon un vocabulaire générique bien connu) :

«Ainsi parlons-nous d’exceptionnalisme, et encore plus de suprématisme, en observant que l’UE, et donc les pays européens, ont endossé cette dialectique prédatrice caractérisant aujourd’hui l’Occident dans son entier, sous l’habit du bloc BAO en mode de surpuissance-autodestruction. On pourrait dire que le suprématisme est au racisme, dans l’échelle des délits éventuels, ce que l’assassinat prémédité systématique est à un homicide involontaire accidentel, pour ce qui est de l’intensité et de l’orientation de la psychologie gouvernant l’attitude qui en résulte. L’exceptionnalisme-suprématisme a complètement envahi l’UE, à visage découvert, véritablement comme une doctrine active de fonctionnement, dans tous les cas depuis le coup de force de novembre 2013 (négociations avec l’Ukraine). Ce qui était sur le moment le simple résultat d’une mécanique bureaucratique est devenue une sorte de doctrine activiste, fondée sur l’affirmation d’une sorte de supériorité morale, psychologique et technologique comme un équivalent postmoderniste à la supériorité raciale et ethnique des suprématismes des XIXème-XXème siècles. Il s’agit du plus récent avatar de l’extension du concept d’“occidentalisation” (que nous nommons plutôt “anglosaxonisation”) identifié par le philosophe de l’histoire et historien des civilisations Arnold Toynbee après 1945, qui s’est très fortement sophistiqué au niveau de la de la communication et de la perception que ceux qui l’éprouvent en ont, jusqu’à changer de nature pour devenir l’actuel et postmoderne exceptionnalisme-suprématisme…»

Différences fraternelles ou fratricides

En effet, ce suprématisme n’a plus rien de spécifiquement anglo-saxon. Il est devenu la marque d’un esprit-Système, fondé sur l’arsenal dialectique qu’on connaît bien au travers de diverses narrative, – de l’excellence en matière de “gouvernance” à la démocratie triomphante, à l’hyperlibéralisme et au marché libre, au droitdel’hommisme, au multiculturalisme et autres vertus sociétales allant jusqu’au “mariage pour tous” & Cie… A partir de ce tronc commun, l’UE et les USA diffèrent dans leurs démarches, ce qui les distingue dans leurs russophobies respectives. Les deux démarches vont dans le même sens mais sont beaucoup moins liées qu’on ne le croit ; elles ont certes souvent la vertu d’être complémentaires, de s’entendre sur des thèmes tels que les sanctions et autres moyens de coercition n’impliquant pas une attaque directe ; néanmoins, elles peuvent différer en cas de montée de la tension, comme ce pourrait être le cas face à la Russie.

• L’UE pousse les matières économiques et sociétales, l’intégration par succion, par dissolution des vertus pérennes. L’UE dissout plus qu’elle ne déstructure ceux qu’elle veut absorber, elle dilue la substance de l’autre dans sa propre substance bureaucratique, régulatrice et moralisante ; elle intervient sans aucun souci des principes de souveraineté lorsqu’il s’agit du domaine sacro-saint de l’économie, en référence à la doctrine sacré de l’hyperlibéralisme, mais prétend agir hors du camp politique et de sécurité, et hors de toute polémique trop marquée. Ainsi exerce-t-elle ses pressions sur la Russie d’une façon indirecte.

• Dans le cas ukrainien et face à la Russie, les bureaucraties-Système des USA avec leur incitatifs de la communication se sont durcies avec la crise ukrainienne et retrouvent totalement leurs réflexes de la Guerre froide sans le frein d’une diplomatie solide et prudente comme ce fut le cas durant la période. (Voir le 20 mars 2014.) Du coup, les techniques de l’“agression douce” ne sont plus l’essentiel de leur arsenal comme ce fut le cas contre Poutine, à partir de 2012 et jusqu’à la crise ukrainienne. Désormais, les USA agitent des menaces qui sont proches de l’ordre du militaire et certains de leurs relais de communication (un sénateur McCain, par exemple) ne se cachent plus de suivre la fameuse doctrine du regime change, avec tous les moyens du bord. Ils agissent seuls en ce sens, selon une ligne différente de l’UE et sans coordination avec elle, ce qui pourrait devenir un motif de désaccord dans des circonstances extrêmes.

… C’est en effet le fond du problème, déjà abordé à diverses reprises, et encore très récemment (voir le 26 juin 2014) ; c’est évidemment le fond du problème pour les Russes et pour Poutine… Il s’agit de savoir si, dans ce cadre général, et notamment en fonction de la ligne suivie par l’UE qui pourrait différer de celle des USA, des résistances ne peuvent pas s’affirmer chez certains des membres les plus importants de l’UE. Dans ce cas, on sait que les Russes se sont découverts des alliés inattendus, membres de plein droit du Système, puisqu’il s’agit du corporate power, très hostiles à cet affrontement avec la Russie à cause de ce qui peut être perdu en matière de business pour le bloc BAO. Les patronats allemands, français et italiens, mais également des groupes du patronat US sont opposés à la politique actuelle et le disent publiquement.

L’enjeu suprême

Le champ ne cesse de s’ouvrir plus largement pour un affrontement direct du bloc BAO avec la Russie, avec la perception clairement affirmée que cette bataille constitue un enjeu suprême pour la “victoire” du Système. (Le Système, qui est pourtant omniprésent, ne cesse de rechercher des actes de “victoire” supplémentaires, donnant ainsi libre cours à sa surpuissance qui est aussi proche de l’autodestruction que le Capitole de la roche tarpéienne.) Cette interprétation n’est pas ouvertement développée du côté du bloc BAO parce que cet ensemble vit dans le déni de l’aspect agressivement déstructurant de sa politique, mais elle est de plus en plus implicitement admise. Du côté russe, même à des niveaux officiels proches du pouvoir, et très largement dans des milieux politiques responsables, voire dans la population elle-même, cette même interprétation est dite ouvertement et largement acceptée. Il est aujourd’hui acquis que les perspectives les plus catastrophiques sont envisagées, comme celle qu’agite Paul Craig Roberts. Il y a quelque jours encore, le 24 juin 2014, un article (de Eric Zuess, sur le Washington’s blog) évoquait les préparatifs, sous la forme d’exercices intensifs des structures militaires russes, à la possibilité d’une attaque nucléaire US (voir le 9 juin 2014).

Il s’agit d’une évolution psychologique très rapide depuis que la crise ukrainienne a pris le cours qu’on lui connaît (voir le 3 mars 2014), et qui dépasse très largement la crise ukrainienne bien entendu. Du côté russe, nombre d’acteurs extérieurs prennent conscience de cet enjeu. Ils en seront encore plus instruits lors du prochain sommet des BRICS, où cet aspect fondamental de la crise sera évidemment évoqué. Cette situation d’extrême tension évolue sur le fond de la possibilité d’une issue catastrophique. Nous évoquions déjà cette situation de la psychologie, et, au-delà, de l’esprit, dans le texte cité du 3 mars 2014. Sa conclusion est toujours valable, parce qu’elle évoque cette issue catastrophique, non sous la forme de la fatalité d’un conflit mais sous la forme d’un dilemme entre cette possibilité de conflit et le destin du Système, qui est dans un état de tension maximale, avec sa tendance à basculer de sa dynamique de surpuissance à sa dynamique d’autodestruction en suscitant sa propre crise d’effondrement.

«Pour le conformisme de l’historiographie-Système, la Grande Guerre est “sortie de rien”, sorte d’accident monstrueux et incompréhensible. Notre thèse est exactement le contraire, comme l’on voit dans la présentation de ‘La Grâce de l’Histoire’ (“Dans ce premier tome, on analyse la séquence historique identifiée comme la dynamique conduisant à la crise actuelle, à partir de la rupture de la fin du XVIIIe siècle avec ses trois événements fondamentaux : la Révolution américaniste (guerre d’Indépendance des USA), la Révolution française et la révolution du choix de la thermodynamique engendrant le développement industriel et technologique. Dans la dynamique de cette séquence historique, la Grande Guerre de 1914-1918 occupe une place centrale, à la fois pivot de la dynamique en question, à la fois ‘réplique sismique en amont’ annonçant notre grande crise du début du XXIe siècle…”). On comprend que ce qui nous rapproche de 1914, ce n’est pas nécessairement l’événement (la guerre) mais l’esprit d’un temps perdu dans une ivresse aveuglante et qui se trouve soudain confronté aux réalités catastrophiques de lui-même. La crise ukrainienne, et la réalisation que les pressions du Système (du bloc BAO, son factotum) peuvent conduire à l’extrême catastrophique des affaires du monde, peuvent aussi bien, grâce au ‘formidable choc psychologique’ dont nous parlons et à l’immense crainte qu’il recèle, déclencher une autre dynamique d’une puissance inouïe. Notre hypothèse à cet égard, rencontrant l’idée de la formidable puissance symbolique du centenaire de la Grande Guerre (voir le 2 janvier 2014), est que cette dynamique est celle de l’effondrement du Système dont rien, absolument rien ne réclame qu’il se fasse dans l’apocalypse nucléaire, parce qu’alors elle pourrait bien être, cette dynamique, le fruit de la panique psychologique totale naissant de la perspective soudain apparue que le risque de la guerre nucléaire existe plus que jamais…»

Source : DeDefensa

Lire aussi : Notes sur la métamorphose furieuse des cloportes

Source: http://www.les-crises.fr/la-folie-systeme-a-marche-forcee/


Revue de presse internationale du 29/06/2014

Sunday 29 June 2014 at 00:07

Dans la revue internationale cette semaine, la Chine est ses métaux, le chômage des jeunes en Europe, l’espionnage de la population, des travailleurs très “malmenés”, ou encore les USA écartelés. Bonne lecture.

Source: http://www.les-crises.fr/rdpi-29-06-2014/


[Travail collaboratif] Ce we, c’est vous qui travaillez sur l’accord UE-Ukraine :)

Saturday 28 June 2014 at 17:10

Je ne le dis probablement pas assez – et ne vous remercie sans doute pas suffisamment -, mais ce blog est vraiment boosté par les apports de nombreux contributeurs, montrant la force apportée par les nouveaux réseaux d’intelligence collaborative.

En l’espèce, je n’ai pas le temps de parcourir l’intégralité du long traité d’association et de libre échange UE-Ukraine, signé hier que je joints (source).

D’autant, que, comme d’habitude, il est seulement en anglais !!  (merci l’Europe :(  )

J’aimerais donc que des volontaires se proposent de le parcourir, et d’indiquer les perles / points les plus problématiques en commentaire (dans l’idéal en traduisant en français…). Merci de vous signaler en commentaire quand vous allez vous occuper d’un document pdf, en l’indiquant, pour éviter les doublons…

Je compte sur vous ! :) Merci d’avance

P.S. désolé pour la lenteur de la modération, j’étais en congés dans la magnifique Crète. Et cela recommencera la semaine prochaine, étant à Aix en Provence, où vous pourrez me croiser durant les journées économiques et déconnomiques

Disclaimer: Please note that the documents published on this website are only for information purposes. The official version of the Association Agreement – once signed – will be published in the Official Journal of the European Union. The texts are capable of neither conferring any rights nor creating any legally binding obligations of public international law.

Text of the initialled Agreement

Preamble [149 KB]

Title I: General Principles [54 KB]

Title II: Political Dialogue and Reform, Political Association, Cooperation and Convergence in the Field of Foreign and Security Policy [73 KB]

Title III: Justice, Freedom and Security [77 KB]

Title V: Economic and Sector Cooperation [290 KB]

Title VI: Financial Cooperation, with Anti-fraud Provisions [58 KB]

Title VII: Institutional, General and Final Provisions [173 KB]

ANNEXES to the Agreement

Annexes to Title IV: Trade and Trade-related Matters

Annexes to Title V: Economic and Sector Cooperation [1005 KB]

Annexes to Title VI: Financial Cooperation, with Anti-fraud Provisions [255 KB]

PROTOCOLS to the Agreement

Protocol I (Title IV: Trade and Trade-related Matters) [2 MB]

Protocol II (Title IV: Trade and Trade-related Matters) [99 KB]

Protocol III (Title V: Economic and Sector Cooperation) [63 KB]

De nouveau, Saint Plé-Rompuy, tenant la Bible

Source: http://www.les-crises.fr/travail-collaboratif-accord-ukraine/


Revue de presse du 28/06/2014

Saturday 28 June 2014 at 01:04

Source: http://www.les-crises.fr/rdp-28-06-2014/


Accord de libre échange Ukraine-UE : ah hié !

Friday 27 June 2014 at 23:07

Eh bien, c’est fait, l’UE a donc signé le traité de libre échange (vous noterez que le mot n’apparait généralement pas dans la presse ! Sauf l’Humanité, qui met l’accent sur le vrai gros problème) avec l’Ukraine… (la partie politique avait été signée le 21 mars pour mémoire)

Belle preuve d’intégrisme et d’irresponsabilité pour un pays en proie à une guerre civile…

Tout est dans la photo…

On apprend au passage : “L’Union européenne a promis un vaste programme d’aide de 11 milliards d’euros à l’Ukraine.” (FranceTV), ce qui est beaucoup pour nous, mais dérisoire face aux besoins de l’Ukraine (et à ce que voulait donner la Russie…).

Ca vaut le coup pour avoir une nouvelle armée de pauvres à exploiter – presque chez nous en plus ! :

Les choses vont devenir intéressantes dans les mois à venir…

Surtout si on continue le délire genre :

D’autant qu’on a affaire à de vrais pro de la géopolitique :

Source: http://www.les-crises.fr/accord-de-libre-echange-ukraine-ue/


[U3-5] Le sort des juifs en Galicie (2/2)

Tuesday 24 June 2014 at 01:17

Suite du billet précédent sur l’Ukraine
Index de la série

ATTENTION : billet contenant des images très dures

Le plus grand massacre par balle de Juifs de toute la guerre eut lieu à la fin du mois de septembre 1941, près de Kiev.

Le 19 septembre 1941, la Wehrmacht entra dans Kiev, qui comptait 900 000 habitants dont 120 000 à 130 000 Juifs. Le 26 septembre 1941, Kiev est prise et plus de 665 000 soldats russes sont faits prisonniers. Les forces spéciales du NKVD présentes à Kiev connaissant la tactique d’occupation des Allemands avaient préparé un gigantesque piège. L’armée allemande avait pour habitude d’utiliser les installations officielles comme poste de commandements, symbolisant leur prise officielle de pouvoir en s’établissant dans les sièges locaux du gouvernement soviétique mais aussi dans les locaux du Parti Communiste. Ce faisant, le NKVD avait dissimulé plus d’une dizaine de milliers de charges explosives et de mines dans la plupart des bâtiments publics et laissé un commando sur place chargé de les faire sauter une fois les Allemands en position dans l’espoir de décimer le commandement de la Wehrmacht de la zone et renouvelant la longue tradition russe de politique de la terre brûlée.

Les charges furent mises à feu le 24 septembre déclenchant un gigantesque incendie qui dura cinq jours et tua des milliers de soldats allemands.

Ce sont les Juifs qui furent tenus pour responsables de cette ruse de guerre. Le 28 septembre un communiqué ordonna à tous les Juifs de Kiev et des environs de se présenter le lendemain, jour de Yom Kippour :

« Tous les Juifs de Kiev et de ses environs devront se présenter le lundi 29 septembre 1941 à 8 heures du matin à l’angle des rues Melnikovskaïa et Dokhturovska (près des cimetières). Ils devront être munis de leurs papiers d’identité, d’argent, de leurs objets de valeurs, ainsi que de vêtements chauds, de linge, etc. Les Juifs qui ne se conformeront pas à cette ordonnance et seront trouvés dans un autre lieu seront fusillés. Les citoyens qui pénétreront dans les appartements abandonnés par les Juifs et s’empareront de leurs biens seront fusillés. »

En outre, pour renforcer la propagande, les Allemands répandirent la rumeur que les Juifs seraient réinstallés dans des camps de travail. Des milliers de Juifs ont ainsi suivi cet ordre, bien plus que prévu.

Selon un rapport de Paul Blobel, commandant de l’Einsatzgruppe C (Unité mobile de tuerie), qui a préparé et conduit les exécutions : « À l’origine, nous avons estimé l’arrivée de seulement 5 000 / 6 000 Juifs, mais, en fait, environ 30 000 Juifs se sont présentés d’eux-mêmes, croyant jusqu’au moment de leur liquidation qu’ils seraient réinstallés ailleurs, en raison de la grande efficacité de notre section de propagande. »

Les forces allemandes ont été largement aidées par l’utilisation de la milice auxiliaire de police, dont les forces rassemblèrent et conduisirent les Juifs par groupes de 100 à Babi Yar (« Ravin des bonnes femmes »), un ravin près de la ville, de 150 mètres de longueur, 30 mètres de largeur et 15 mètres de profondeur. Les environs entiers du ravin avaient été clôturé par des barbelés, et ont été bouclés par trois rangées de soldats: le cercle extérieur a été occupé par la police ukrainienne, le deuxième avec la police et les Allemands d’Ukraine, et le cercle intérieur avec des Allemands seulement.


Les colonnes de Juifs furent alors brutalisées dans le ravin, forcées à empiler leurs biens puis à se déshabiller, et enfin à s’allonger contre la paroi du ravin, où des soldats allemands les tuèrent par groupe de 10 à coups de mitrailleuses – c’est la tristement célèbre « Shoah par balles », qui causa tellement de dégâts psychologiques chez les soldats que les Nazis durent créer par la suite les camps d’extermination. Parmi les 1 500 bourreaux du massacre de Babi Yar, il y avait 1 200 policiers de l’OUN et seulement 300 Allemands…

« C’était comme une migration de masse. […] Les Juifs chantaient des chants religieux en chemin. Sur le quai, on leur prenait leur nourriture et leurs biens. […] Alors les Allemands commençaient à pousser les Juifs pour former de nouvelles files, plus étroites. Ils se déplaçaient très lentement. Après une longue marche, ils arrivaient à un passage formé par des soldats allemands avec des massues et des chiens policiers. Les Juifs étaient fouettés sur leur passage. Les chiens se jetaient sur ceux qui tombaient mais la poussée des colonnes qui se pressaient derrière était irrésistible et les faibles et les blessés étaient piétinés. […]

Meurtris et ensanglantés, paralysés par le caractère incompréhensible de ce qui leur arrivait, les Juifs débouchaient sur une clairière d’herbe. Ils étaient arrivés à Babi Yar, devant eux se trouvait le ravin. Le sol était jonché de vêtements. Des miliciens ukrainiens, surveillés par des Allemands, ordonnaient aux Juifs de se déshabiller. Ceux qui hésitaient, qui résistaient, étaient battus, leurs vêtements arrachés. Il y avait partout des personnes nues, ensanglantées. L’air était empli de cris et de rires convulsifs. » [Davidowicz, What is the use of Jewish History, p. 106-107]

Dans son Histoire de la Shoah, George Benssoussan retranscrit le témoignage d’un membre du commando spécial SK4a, Kurt Werner :

« Immédiatement après mon arrivée sur les lieux d’exécution, j’ai dû descendre au fond de ces gorges avec mes camarades. Il n’a pas fallu attendre longtemps avant que les premiers Juifs soient amenés et descendent la pente. Les Juifs devaient se coucher le visage contre la paroi du gouffre. Au fond du gouffre, les tireurs avaient été divisés en trois groupes d’environ douze hommes. Les Juifs étaient tous conduits en même temps aux pelotons d’exécution. Les suivants devaient s’allonger sur les corps de ceux qui venaient d’être exécutés. Les tireurs se mettaient derrière eux et les abattaient d’une balle dans la nuque. Je me souviens encore aujourd’hui qu’ils étaient saisis d’épouvante dès qu’ils arrivaient au bord de la fosse, et apercevaient les cadavres. Beaucoup d’entre eux, terrifiés, ont commencé à crier. » [Ernst Klee, Willy Dressen, Volker Riess, Pour eux, « c’était le bon temps » la vie ordinaire des bourreaux nazis, Plon, 1990, p. 61]

En raison de leur nombre, les Allemands ne purent pas tuer tous les Juifs immédiatement. L’historien Felix Levitas écrit:

« Les bourreaux n’ont pas eu assez de temps pour terminer leur travail. Par conséquent, ils ont commencé à mettre deux personnes ensemble, tête contre tête, de sorte qu’une seule balle puisse tuer deux personnes. Les personnes blessées ont été achevées avec des pelles. Les enfants ont été jetés dans le Yar et enterrés vivants. »

Sergey Ivanovich Loutsenko, ancien gardien du cimetière Lukianovska avoisinant, a déclaré:

« Ils ont tiré sur les gens du matin au soir. La nuit, les Allemands sont allés dormir. Le reste des victimes a été enfermé dans des garages vides. Cela a continué pendant cinq jours. Les Nazis ont amenés de plus en plus de personnes avec des camions, qui repartaient chargés des vêtements des victimes. »

Iryna Khoroshunova, habitante de Kiev, écrit indique dans son journal le 2 octobre 1941 :

« Chacun dit maintenant que les Juifs sont assassinés. Non ; ils ont déjà été tués. Tous. Sans exception. Vieilles personnes, femmes, enfants. […] Les gens en parlent d’une telle façon qu’aucun doute n’est permis. Pas un seul train n’a quitté la gare de Bahnhof Lukianivka. Des gens ont vu des camions avec des foulards et d’autres objets partant de la gare. « Minutie » allemande ! Ils ont déjà trié leurs rapines ! Une jeune fille russe a accompagné son amie au cimetière et s’est glissée de l’autre côté de la clôture : elle a vu comment des gens nus ont été poussés vers Babi Yar et a entendu les rafales d’une mitrailleuse. Il y a de plus en plus de rumeurs et de nouvelles. Trop monstrueuses pour y croire. Mais nous sommes obligés d’y donner foi, car le massacre des Juifs est une réalité. Une réalité qui nous rend fous. […] Mes cheveux se dressent sur ma tête. […] Il est impossible de vivre en sachant cela. »

Selon le rapport de l’Einsatzgruppe C, en date du 7 octobre, 33 771 Juifs furent assassinés les 29 et 30 septembre 1941. Il est également avéré que les services du SD et de la SIPO de Kiev reçurent des corbeilles entières de lettres de civils ukrainiens dénonçant des Juifs.

300 prisonniers de guerre soviétiques ont ensuite travaillé à stabiliser le sol au-dessus des fosses communes et à faire le tri des affaires.

En août 1943, face à l’avancée des Soviétiques, les restes des victimes furent exhumés et brulés. Efim Vilkis, un des rares survivants, témoigne :

« Mi-aout, la SS a mobilisé une centaine de prisonniers de guerre russes, qui ont été emmenés dans le ravin. Le 19 août, ces hommes ont reçu l’ordre d’exhumer tous les corps dans le ravin. Pendant ce temps, les Allemands en ont emmené une partie dans un cimetière juif à proximité, afin qu’ils portent des pierres tombales en marbre à Babi Yar pour former la base d’un énorme bûcher. Au-dessus de ces pierres étaient entassés une couche de bois, puis une couche de corps, et ainsi de suite jusqu’à ce que le bûcher soit haut comme une maison de deux étages. Eniron 1 500 corps ont ainsi été brûlés lors de chaque opération du four, chaque bûcher prennant deux nuits et un jour pour brûler complètement. La crémation a duré 40 jours, puis les prisonniers, qui à cette époque comprenaient 341 hommes, ont reçu l’ordre de construire un autre four. Comme c’était le dernier four et qu’il n’y avait plus de corps à brûler, les prisonniers ont compris qu’il était pour eux. Ils ont alors tenté de s’évader le 29 septembre, mais seulement 14 ont survécu aux balles des mitraillettes nazies. » [NewsWeek, 6/12/1943] [Attention, violent]

Hermann Graebe, directeur d’une entreprise de construction au service de l’armée allemande en Ukraine, a décrit au procès de Nuremberg une tuerie à laquelle il a assisté :

« J’entendis alors des coups de fusil se succéder rapidement, provenant de derrière un des monticules de terre. Les gens qui étaient descendus des camions – hommes, femmes et enfants de tous âges – devaient se dévêtir sur les ordres d’un SS qui avait un fouet de cheval ou de chien. Ils devaient poser leurs vêtements à des endroits déterminés. Je vis un tas de chaussures de 800 à 1 000 paires, d’immenses piles de linge de corps et de vêtements.

Sans crier, sans pleurer, ces personnes se déshabillaient, se groupaient par familles, s’embrassaient les unes les autres, se disaient adieu et attendaient le signe d’un autre SS qui se tenait près de la fosse, également un fouet à la main. Pendant le quart d’heure que je restai là, je n’entendis ni plainte ni appel à la pitié. J’observais une famille d’environ 8 personnes, un homme et une femme d’une cinquantaine d’années avec leurs enfants d’environ 1, 8 et 10 ans et deux grandes filles de 20 et 24 ans environ (…). Le père tenait par la main un petit garçon d’une dizaine d’années et lui parlait doucement (…). À ce moment, le SS qui se trouvait près de la fosse cria quelque chose à son camarade. Ce dernier compta environ 20 personnes et leur dit d’aller derrière le monticule de terre. Parmi elles était la famille que j’ai mentionnée. Je fis le tour du monticule et me trouvai en face d’une énorme fosse. Les gens étaient étroitement serrés les uns contre les autres et les uns sur les autres, de sorte que seules les têtes étaient visibles. Presque tous avaient du sang qui coulait de leur tête sur leurs épaules. Quelques-uns de ceux qui avaient été fusillés remuaient encore… »

En 1942, les services secrets allemands ont conclu que les nationalistes ukrainiens étaient indifférents au sort des Juifs, et étaient prêts soit à les tuer ou soit à les aider, en fonction de ce qui servirait le mieux leur cause (cas des médecins juifs ou des travailleurs qualifiés par exemple, mis à l’abri par l’UPA).

Moshe Maltz, un Juif vivant caché près de Lviv, a ainsi entendu un ami polonais lui raconter « qu’environ 40 Juifs se cachaient dans les bois près de chez lui, mais que les gangs de Bandera sont venus et les ont tous tués. ». Maltz a indiqué que « Quand les gangs de Bandera trouvaient un Juif, ils considèrent que c’est une prise de haute valeur. Il en était de même pour les Ukrainiens de base. Ils voulaient tous participer à l’acte héroïque de tuer un Juif. Ils ont littéralement taillé les Juifs en pièces avec leurs machettes. »

À suivre dans le prochain billet

Source: http://www.les-crises.fr/le-sort-des-juifs-en-galicie-2/


[U3-5] Le sort des juifs en Galicie (1/2)

Monday 23 June 2014 at 01:32

Suite du billet précédent sur l’Ukraine
Index de la série

ATTENTION : billet contenant des images très dures

Les pogroms de Lviv en 1941

Le 30 juin 1941, les Soviétiques abandonnent Lviv face à l’arrivée des troupes allemandes. Le NKVD commet alors des assassinats de masse dans les 3 prisons de la ville, tuant environ 2 500 prisonniers (surtout Ukrainiens, de l’OUN, mais aussi des Polonais et des Juifs – prisonniers politiques comme droits communs).

exécution du nkvd

victimes du nkvd

Les Juifs furent publiquement accusés par les Allemands d’avoir perpétré ce massacre des prisonniers ukrainiens de Lviv. Ils enflammèrent la population avec une propagande antisémite et appuyèrent la création par l’OUN-B de la Milice Populaire Ukrainienne (UPM), dont les membres portaient des brassards blancs ou aux couleurs du drapeau ukrainien. Cette milice se lança alors dans un vaste pogrom. Cette milice était secondée par des jeunes gens ordinaires. Des milliers de juifs furent battus, fréquemment à mort. Le nombre de juifs assassinés se situe autour de 4 000 morts. Dès le 1er juillet, cette milice UPM de l’OUN fut subordonnée à la SS, et perdura jusqu’au 13 aout 1941, aidant les Allemands autant qu’elle pouvait.

Pogrom lviv Juillet 1941

Pogrom lviv Juillet 1941

Pogrom lviv Juillet 1941

Pogrom lviv Juillet 1941

Pogrom lviv Juillet 1941

Pogrom lviv Juillet 1941

Pogrom lviv Juillet 1941

Pogrom lviv Juillet 1941

Pogrom lviv Juillet 1941

Pogrom lviv Juillet 1941

[Attention, violent]

Kurt Lewin, un survivant de ce pogrom, témoigne ainsi qu’il avait particulièrement peur « d’un homme élégamment vêtu d’une belle chemise brodée [souvent porté par les membres de l’OUN], qui battait [les Juifs] avec une canne en métal. Au fur et à mesure, il ne frappait plus que les têtes. À chaque coup, il arrachait des bandes de peau. Il a fait sortir les yeux de certaines personnes, et arraché des oreilles. Lorsque sa canne a éclaté, il a immédiatement attrapé un gros morceau de bois carbonisé et fracassé le crâne de mon voisin. Le crâne a éclaté et le cerveau a éclaté, éclaboussant dans toutes les directions, y compris sur mon visage et mes vêtements. » [Kurt Lewin, J’ai survécu, Varsovie 2006, pp 58-59]

Un second pogrom a lieu durant trois jours fin 1941, tuant 2 000 Juifs et en battant 6 000 autres. À la même époque, quelques 3 000 personnes, en majorité juives furent exécutées dans le stade municipal par l’armée allemande.

Les pertes humaines

Au total, environ 20 000 juifs furent tués dans des pogroms en Ukraine occidentale en juillet 1941, et plusieurs milliers furent fusillés par les Einsatzkommandos.

Un ghetto de 120 000 Juifs est alors créé à Lviv fin 1941. Il sera entièrement liquidé en deux ans dans le camp d’extermination de Belzec. Au retour des Soviétiques en juillet 1944, il ne restait environ que 800 Juifs survivants – dont le célèbre chasseur de nazis Simon Wiesenthal.

Simon Wiesenthal

Selon un rapport du 30 juin 1943 de Fritz Katzmann, chef de la police et de la SS de Galicie, 434 329 Juifs avaient été assassinés dans son seul district. À la fin de la guerre, environ 1,5 million de Juifs ukrainiens avaient été exterminés par les Nazis et leurs supplétifs locaux. Comme il est apparu à Nuremberg, les Allemands avaient de plus tué dans la région de Lvov 700 000 Soviétiques.

Les nationalistes ukrainiens

L’implication des nationalistes ukrainiens dans ces évènements est accablante. Les membres de l’OUN-B étaient des antisémites enthousiastes. Pour eux, l’ennemi principal était les Polonais et les Russes, mais les Juifs étaient un « problème » parce qu’ils n’étaient pas Ukrainiens et parce qu’ils estimaient qu’ils aidaient les Soviétiques à envahir le territoire ukrainien.

L’Organisation des nationalistes ukrainiens avait adopté en 1929 les Dix commandements des nationalistes ukrainiens, auxquels étaient censés adhérer tous les membres de l’Organisation. Ce Décalogue indiquait : « N’hésitez pas à effectuer les actes les plus dangereux » et « Traitez les ennemis de votre nation avec haine et cruauté. ».

En mai 1941, lors d’une réunion à Cracovie la direction de l’OUN-B indiqua que « Les Juifs en URSS constituent le soutien le plus fidèle du régime bolchevique, et l’avant-garde de l’impérialisme moscovite en Ukraine. Le gouvernement moscovito-bolchévique exploite les sentiments anti-juifs des masses ukrainiennes pour détourner leur attention de la véritable cause de leur malheur et de les canaliser dans un moment de frustration dans les pogroms contre les Juifs. L’OUN combats les Juifs en tant que pilier du régime moscovito-bolchévique et, simultanément, il rend les masses conscientes du fait que l’ennemi principal est Moscou. »

Lors de cette réunion, l’OUN a adopté le programme « Lutte et l’action de l’OUN pendant la guerre » qui décrit le plan d’action lors du début de l’invasion nazie de l’URSS. Dans la section G de ce document – « Directives pour les premiers jours de l’organisation du nouvel État ukrainien », est dressée la liste des activités à mener durant l’été 1941. Dans le paragraphe « Politique envers les minorités » l’OUN-B ordonne : « Les Moscovites, les Polonais et les Juifs nous sont hostiles et doivent être exterminés dans cette lutte, en en particulier ceux qui résisteraient à notre régime : il faut les reconduire dans leurs terres, surtout : détruire leur intelligentsia qui pourrait être dans des positions de pouvoir. […] Les soi-disant paysans polonais doivent être assimilés, et il faut détruire leurs leaders. […] Les Juifs doivent être isolés, relevés de leurs fonctions gouvernementales pour empêcher le sabotage, et ceux qui sont jugés nécessaires ne pourront travailler qu’avec un surveillant. […] L’assimilation des Juifs n’est pas possible. »

Le 25 juin 1941, Stetsko – le futur « chef de l’État », donc -, dans un rapport à Bandera, écrivait déjà : « Nous créons une milice qui aidera à éliminer les Juifs et à protéger la population. ».

Stetsko avec ses anciens maîtres donne du pain et du sel aux envahisseurs allemands

Stetsko après la guerre avec son nouveau maître : George Bush responsable de la CIA

En aout 1941, le même Stetsko écrivit son autobiographie, qui contenait plusieurs passages antisémites notoires, en particulier, il y déclarait qu’il considérait le marxisme comme un produit de la pensée juive, mise en pratique par le peuple moscovite-asiatique avec l’aide des Juifs ; que Moscou et le judaïsme sont les porteurs des idées internationales des bolcheviks. Il y déclare aussi :

« Bien que je considère que c’est Moscou, qui en fait tient l’Ukraine en captivité, et non pas les Juifs, comme l’ennemi principal et décisif, je considère tout de même pleinement le rôle indéniablement nuisible et hostile des Juifs, qui aident Moscou à asservir Ukraine. Je soutiens donc la destruction des Juifs et la pertinence de l’apport des méthodes allemandes d’extermination des Juifs en Ukraine, plutôt que de tenter de les assimiler. »

Les mémoires de Stetsko

Les rapports de l’OUN ont été conservés. On y lit par exemple ceci :

« N° 82 P

Ville de Lvov, le 28 juillet 1941.

Au service de sécurité de l’OUN de Lvov, le père Tabinsky nous informe : « Notre milice procède maintenant à de nombreuses arrestations de juifs, avec les services allemands. Avant leur liquidation, les Juifs se défendent par tous les moyens, et, en premier lieu, par l’argent ».

Suivant les informations du père Tabinsky, il y a, parmi nos miliciens, certains qui, pour de l’or ou de l’argent, libèrent des juifs : ils doivent être arrêtés. Nous n’avons pas de données concrètes, mais nous vous transmettons ceci pour informations et utilisation ultérieure.

Gloire à l’Ukraine !

Organisation des nationalistes ukrainiens OUN.»

Dans un rassemblement le 6 juillet 1941, les membres de l’OUN déclarèrent : « Les Juifs doivent être traités durement. […] Nous devons en finir avec eux. […] En ce qui concerne les Juifs, nous allons adopter des méthodes qui conduiront à leur destruction. »

Après l’emprisonnement de Bandera, les bataillons ukrainiens de la Wehrmacht Nachtigall et Roland furent alors dissous fin 1941, et les activistes volontaires de l’OUN-B furent affectés à l’Ukrainian Schutzmannschaften, une milice auxiliaire de police. Cette milice comptait plus de 100 000 Ukrainiens en 1942, et s’impliqua activement dans l’arrestation et le meurtre de Juifs, communistes et résistants. Le leader militaire de l’OUN-B Roman Shukhevych devint commandant du 201st Schutzmannschaft Battalion, qui sévit jusqu’en Biélorussie.

milice auxiliaire de police , la milice comptait plus de 100 000 Ukrainiens en 1942, et s’impliqua activement dans l’arrestation et le meurtre de Juifs, communistes et résistants

Certains bataillons de police prennent directement part à l’extermination de citoyens soviétiques. Par exemple, la police du district de Raïon de Ratne, sous la direction de Logvinski et Seniok, détruit entièrement, le 23 septembre 1942, le village de Kortelisse. Il est entièrement incendié et 2 892 habitants pacifiques sont fusillés (dont 1 620 enfants). Les villages voisins de Birk, Sabaloty, Borisovka sont également détruits.

À suivre dans le prochain billet

Source: http://www.les-crises.fr/le-sort-des-juifs-en-galicie-1/


Ukraine : les Etats-Unis nous entraînent dans une guerre contre la Russie (The Guardian)

Sunday 22 June 2014 at 01:44

Pourquoi tolérons-nous la menace d’une nouvelle guerre mondiale qui se mène en notre nom ? Pourquoi tolérons-nous les mensonges qui justifient ce risque ? L’état de notre endoctrinement, comme l’a écrit Harold Pinter, est « un tour d’hypnose brillant, et couronné de succès », comme si la vérité « ne s’était jamais déroulée, même au moment où elle se déroulait ».

Chaque année l’historien américain William Blum publie son “archive actualisée du résumé de la politique étrangère des Etats-Unis” qui montre que, depuis 1945, les Etats-Unis ont tenté de renversé plus de 50 gouvernements, la plupart démocratiquement élus ; ont grossièrement interféré dans les élections de 30 pays ; bombardé la population civile de 30 pays ; utilisé des armes chimiques et biologiques ; et tenté d’assassiner des dirigeants étrangers.

Dans bien des cas la Grande-Bretagne était complice. Le degré de souffrance humaine, et encore moins la criminalité, n’est jamais reconnu en Occident, malgré la soi-disant présence des technologies de communication les plus avancées, et du journalisme le plus libre du monde. Que les victimes les plus nombreuses du terrorisme – de notre terrorisme, soient des musulmans, est imprononçable. Que le djihadisme extrémiste, à l’origine du 11 septembre, fut créé comme arme de la politique étrangère britannique (Opération Cyclone en Afghanistan) est occulté. En avril le département d’État américain remarqua que, à la suite de la campagne de l’OTAN de 2011, « la Libye est devenue un paradis pour les terroristes ».

Le nom de “notre” ennemi a évolué au fil des années, du communisme à l’Islamisme, mais il s’agissait généralement de n’importe quelle société indépendante du pouvoir de l’Occident et occupant des territoires stratégiques ou riches en ressources. Les leaders de ces nations gênantes sont généralement violemment mis à l’écart, comme les démocrates Muhammad Mossadegh en Iran et Salvador Allende au Chili, où ils sont assassinés comme Patrice Lumumba au Congo. Ils font tous l’objet d’une campagne médiatique de caricature et de diabolisation – pensez à Fidel Castro, Hugo Chavez, et maintenant Vladimir Poutine.

Le rôle de Washington en Ukraine est diffèrent seulement parce que ses implications nous concernent tous. Pour la première fois depuis l’ère Reagan, les USA menacent d’entraîner le monde dans une guerre. Avec l’Europe de l’est et les Balkans devenus des bases militaires de l’OTAN, le dernier « état-tampon » frontalier de la Russie, est dévasté. Nous, les occidentaux, soutenons des Néo-nazis dans un pays ou les Ukrainiens nazis soutinrent Hitler. Ayant dirigé le coup d’état de Février contre le gouvernement démocratiquement élu à Kiev, la tentative de Washington de récupérer la base navale historiquement russe de Crimée a échouée. Les russes se sont défendus, comme ils l’ont toujours fait contre chaque invasion occidentale depuis presque un siècle.

Mais l’encerclement militaire de l’OTAN s’est accéléré, en même temps que des attaques orchestrées par les USA sur les ethnies russes d’Ukraine. Si Poutine peut être poussé à aller les aider, son rôle préétabli de paria justifiera une guerre menée par l’OTAN qui se propagera sans doute à l’intérieur du territoire Russe.

A la place, Poutine a embrouillé ses adversaires en cherchant un terrain d’entente avec Washington et l’Europe, en retirant ses troupes de la frontière ukrainienne et en incitant les ethnies russes d’Ukraine de l’Est d’abandonner le référendum provocant du week-end. Ces gens, russophones, bilingues – 1 tiers de la population de l’Ukraine – ont longtemps souhaité l’avènement d’une fédération qui reflète la diversité ethnique du pays et qui soit à la fois autonome et indépendante vis-à-vis de Moscou. La plupart ne sont ni des « séparatistes » ni « des rebelles » mais simplement des citoyens souhaitant vivre en sécurité dans leur pays.

Comme les ruines d’Irak et d’Afghanistan, l’Ukraine a été transformé en un camp d’entrainement pour la CIA – dirigé par le directeur de la CIA John Brennan à Kiev, avec des “unités spéciales” de la CIA et du FBI qui mettent en place une “structure de sécurité” afin de superviser les attaques sauvages de ceux qui se sont opposé au coup d’état de Février. Regardez les vidéos, lisez les rapports des témoins du massacre d’Odessa. Des bandits fascistes amenés par bus ont brulé les sièges des syndicats, tuant 41 personnes bloquées à l’intérieur. Regardez la police laisser faire. Un docteur a décrit sa tentative d’aller aider les gens, « mais j’ai étais stoppé par des nazis pro-Ukrainiens. L’un deux m’a violemment poussé, en me promettant que bientôt ce serait mon tour à moi et aux autres Juifs d’Odessa… Je me demande pourquoi le monde entier reste silencieux. »

Les ukrainiens russophones se battent pour leur survie. Quand Poutine a annoncé le retrait des troupes russes de la frontière, le secrétaire à la défense de la junte, à Kiev – un des membres fondateurs du parti fasciste « Svoboda », déclara que les attaques sur « les insurgés » allaient continuer. Dans un style Orwellien, la propagande occidentale a rejeté la faute sur Moscou « qui orchestre le conflit et la provocation », selon William Hague. Son cynisme peut être comparé à la grotesque félicitation d’Obama à la junte pour leur « retenue remarquable » à la suite du massacre d’Odessa. Illégal et fasciste, la junte est décrite par Obama comme « légalement élue ». Ce qui importe ce n’est pas la vérité, a un jour dit Henry Kissinger, mais « ce qui est perçu comme vrai ».

Dans les medias Etats-Uniens les atrocités d’Odessa ont été minimisées ; une affaire « louche » et une « tragédie » dans laquelle des « nationalistes » (Néo-nazis) ont attaqué des « séparatistes » (des gens en train de collecter des signatures pour un référendum sur une Ukraine fédéral). Le Wall Street Journal de Rupert Murdoch a maudit les victimes – « Un incendie meurtrier en Ukraine probablement allumé par les rebelles, selon le gouvernement ». La propagande en Allemagne est digne de la guerre froide, avec la Frankfurter Allgemeine Zeitung (littéralement, « Journal général de Francfort ») qui met en garde ses lecteurs contre la Russie et sa « guerre non déclarée ». Pour les allemands, le fait que Poutine soit le seul leader à condamner la montée du fascisme au 21ème siècle relève de l’ironie.

Un truisme populaire dit que “le monde a changé” à la suite du 11 septembre. Mais qu’est ce qui a changé ? Selon le fameux lanceur d’alerte Daniel Ellsberg, un coup d’état silencieux a eu lieu à Washington et un militarisme rampant dirige maintenant. Le pentagone dirige en ce moment des « opérations spéciales » – des guerres secrètes – dans 124 pays. Aux Etats-Unis, une pauvreté en augmentation et des libertés hémorragiques sont les corollaires historiques d’un état de guerre perpétuel. Ajoutez à cela le risque de guerre nucléaire, et la question qui reste est : Pourquoi tolérons-nous cela ?

John Pilger

13 mai 2014

Traduction Nicolas CASAUX du Collectif 4ème singe http://4emesinge.com/

Source : http://www.legrandsoir.info

Source: http://www.les-crises.fr/les-etats-unis-nous-entrainent-dans-une-guerre-contre-la-russie/


Le fol expansionnisme russe (et aussi un peu européen…)

Saturday 21 June 2014 at 01:32

Histoire sans paroles…

(hachures = pays candidats et futurs candidats)

« On assiste à une tentative de resoviétiser la région. Cela ne s’appellera pas comme cela, cela s’appellera Union douanière, cela s’appellera Union eurasiatique. […] Ne nous y trompons pas. Nous savons quel est le but et nous essayons de trouver les moyens de le freiner ou de l’empêcher. » [Hillary Clinton, 6/12/2012] (Source : Central Asia Newswire)

Source: http://www.les-crises.fr/le-fol-expansionnisme-russe-et-aussi-un-peu-europeen/


[Reprise] L’absence de transparence sur le patrimoine des parlementaires

Saturday 21 June 2014 at 01:12

Reprise d’un article du Monde

Jérôme Cahuzac à l’Assemblée, le 5 décembre. Alors ministre, il faisait face au feu des questions au lendemain des révélations de Mediapart sur son compte à l’étranger. | Reuters/CHARLES PLATIAU

La transparence du patrimoine des députés n’est pas pour demain. Et les socialistes n’ont pas fait preuve d’une grande audace en la matière, pour dire le moins. François Hollande, après l’affaire Cahuzac, avait promis une plus grande transparence sur le patrimoine des élus, notamment des parlementaires.

Mais certaines dispositions, notamment la publication du patrimoine, ne faisaient pas plaisir aux parlementaires, menés par Claude Bartolone, dénonçant le « voyeurisme » de la mesure. Et l’Assemblée avait tout fait pour minimiser la portée de ce projet de loi, sans que le gouvernement ne mette de zèle particulier à le défendre.

Comme le relève l’association Regards citoyens, qui milite pour une plus grande transparence des activités parlementaires, l’arrêté définissant les modalités de la publication du patrimoine des élus a été publié – dans une relative discrétion – le 28 mai. Mais, comme annoncé au moment de l’adoption de la loi, ces dispositions sont loin de la transparence.

AUCUNE NOTE OU PHOTOGRAPHIE

Les modalités retenues au vote de la loi sont confirmées par l’arrêté : les déclarations de patrimoine ne pourront être ni reproduites, ni copiées, et seuls les électeurs pourront les consulter en présence d’un agent. Photos ou prise de notes seraient ainsi interdites, empêchant toute analyse globale.

En clair, pour connaître le patrimoine d’un élu, il faudra être électeur, puis prendre rendez-vous en préfecture. Une fois sur place, on pourra le consulter quelques instants, en étant accompagné, et sans pouvoir prendre la moindre note ou photographie. Rappelons aussi que personne n’a le droit de mentionner le fameux patrimoine, sous peine d’une amende.

Bref, tout est fait pour que personne n’aille jamais consulter ces fameux documents désormais « publics ». Et sous prétexte de transparence, l’Assemblée a au contraire fait en sorte qu’on sache encore moins quel patrimoine ont les élus de la République.

D’autant moins que, malgré le délai confortable entre la validation de la loi et la publication de l’arrêté, le processus de consultation ne semble pas encore très au point. Concernant les détails, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, contactée par le Monde.fr, dit ne pas en avoir la charge et le ministère de l’intérieur n’a pas encore précisé ces modalités.

A ce sujet, voir la vidéo :


par lemondefr

Source: http://www.les-crises.fr/l-absence-de-transparence-sur-le-patrimoine-des-parlementaires/