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[Reprise] ISRAEL. La loi sur “l’Etat nation du peuple juif” qui a mis le feu aux poudres

Sunday 21 December 2014 at 02:04

“Etat-nation du peuple juif” ou ”Etat juif et démocratique” ? Des mots qui divisent un pays. Au point de mettre fin à deux ans de coalition gouvernementale.

“Dans l’état actuel des choses et avec ce gouvernement, il m’est impossible de gouverner”. Par ces quelques mots prononcés lors d’une conférence de presse mardi soir, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a mis fin à deux années de gouvernement de coalition avec les partis centristes. Accusant les ministres Yair Lapid et Tsipi Livni d’être à l’origine d’un putsch, Netanyahou a ajouté ne pouvoir “tolérer d’opposition au sein même de son gouvernement”.

Principal point de friction au sein de la formation gouvernementale : le projet de loi soutenu par Bibi destiné à définir Israël comme “l’Etat nation du peuple juif”.

Le Premier ministre avait en effet exigé le soutien de Yair Lapid à ce projet de loi auquel s’oppose le ministre de l’Economie ainsi que la ministre de la Justice Tzipi Livni, chef du parti centriste HaTnuha.

Mais pourquoi ce texte a-t-il mis le feu aux poudres ?

Que prévoit le projet de loi ?

Ce projet de loi définit l’État d’Israël dans les Lois fondamentales, qui font office de Constitution, comme “l’État-nation du peuple juif” et non plus comme un “État juif et démocratique”.

Une acception interprétée par les opposants au projet de loi comme la désormais primature de la dimension identitaire juive sur le caractère démocratique du pays. Une vision quelque peu démentie par Netanyahou qui a précisé lors de la présentation de la loi :

Il y a ceux qui veulent que la démocratie l’emporte sur le caractère juif et il y a ceux qui veulent que le caractère juif l’emporte sur la démocratie. Dans les principes de la loi que je présente aujourd’hui, ces deux principes sont égaux”.

Mais ce texte décrié prévoit pourtant bien de réserver les droits collectifs en Israël aux juifs seulement, limitant la communauté arabe du pays à des “droits personnels… conformément à la loi.”

Un projet d’ailleurs rédigé à l’origine par le député du Likoud (droite) Zeev Elkin et adopté par le Premier ministre dans un format édulcoré. Dans la version originale de Elkin le texte allait en effet jusqu’à définir l’hébreu comme seule langue nationale d’Israël réduisant ainsi l’arabe à un état secondaire.

Pourquoi est-il refusé par le centre, la gauche mais aussi une partie de la droite ?

Les adversaires au projet de loi estiment que celui-ci va à l’encontre de la démocratie et institutionnalise les discriminations contre les minorités.

Ce projet est une “inscription du racisme, déjà présent dans la rue, dans la Loi et au cœur du système politique”, a accusé Majd Kayyal, d’Adalah, le Centre juridique de défense des droits de la minorité arabe. “La démocratie garantit que tous les citoyens ont les mêmes droits et sont égaux face à l’Etat, mais cette modification raciste introduit une distinction sur la base de la religion”, selon lui.

Le procureur général Yehouda Weinstein, conseiller juridique du gouvernement, a lui aussi critiqué ce projet, estimant qu’il affaiblissait le caractère démocratique d’Israël.

Même le président Reuven Rivlin, issu du parti de Netanyahou, le Likoud, a déclaré ne pas “comprendre l’intérêt de cette loi”. “Mettre en avant le caractère juif de l’Etat d’Israël aux dépens de son caractère démocratique remet en question les principes de la Déclaration d’indépendance qui affirmait que “juif et démocratique” sont des valeurs de la même importance”, a-t-il souligné.

Est-il désormais relégué aux oubliettes ?

Le texte de loi n’est pas rayé des tablettes de Benyamin Netanyahou. Il devrait même être mis en avant durant la campagne des législatives désormais prévues le 17 mars prochain.

Cependant, si la législation israélienne prévoit que le Parlement peut continuer à voter des lois même après l’adoption d’une loi de dissolution entraînant l’élection de nouveaux députés, ce texte n’a pratiquement plus aucune chance d’être adopté avant les élections en raison de l’absence de soutien des députés centristes, désormais expulsés du gouvernement.

C. L.

Source : Le Nouvel Obs

Source: http://www.les-crises.fr/reprise-israel-la-loi-sur-letat-nation-du-peuple-juif-qui-a-mis-le-feu-aux-poudres/


On a un système qui marche à la guerre en détruisant son armée…, par Emmanuel Todd

Saturday 20 December 2014 at 03:00

Emmanuel Todd donnait une conférence à Montluçon le 11 décembre 2014.

Le thème choisi était : “Difficile d’être prophète en ce moment”. Il est interrogé par bernard Vasseur, professeur de philosophie.

Source: http://www.les-crises.fr/todd-guerre/


Revue de presse du 20/12/2014

Saturday 20 December 2014 at 00:02

La revue de presse, avec cette semaine notamment divers renoncements convergents du côté de l’UE (les élections sont peut-être assez loin maintenant…), alors que côté géopolitique ça s’agite du grand nord jusqu’à l’Afrique, et que divers accords économiques, de plus ou moins bons augures, fourbissent leurs armes. Bonne lecture.

Source: http://www.les-crises.fr/rdp-20-12-2014/


Sanctions suicidaires pour l’UE : la Russie enterre le South Stream

Friday 19 December 2014 at 01:16

Fin de South Stream : le gaz rapproche Poutine et Erdogan

En annonçant, le 1er décembre, depuis Ankara, l’abandon du projet de construction du gazoduc South Stream, Vladimir Poutine confirme l’éloignement économique de la Russie par rapport à l’Europe et scelle un rapprochement inattendu avec la Turquie.
En juin 2014 au nord de Belgrade, la capital serbe - AFP / Andrej ISAKOVIC
En juin 2014 au nord de Belgrade, la capitale serbe – AFP / Andrej ISAKOVIC

“Dans les conditions actuelles, la Russie ne peut poursuivre la construction du gazoduc South Stream, a déclaré Vladimir Poutine, le 1er décembre, lors de sa visite à Ankara, rapporte le quotidien russeGazeta.ru. “Puisque la Commission européenne n’en veut pas, eh bien nous ne le ferons pas, et nous réorienterons nos ressources énergétiques vers d’autres régions du monde”, a-t-il souligné.Bruxelles, en effet, freine le projet depuis plusieurs années. La Commission refuse de donner son feu vert, considérant que le projet contrevient à la législation européenne antimonopole. Lancé par Gazprom, le gazoduc, d’une puissance de 63 milliards de m3 par an, devait relier Anapa (en Turquie) à Varna (en Bulgarie) par le fond de la mer Noire, puis Baumgarten (en Autriche), où se trouve le hub, par voie de terre, (après avoir desservi la Hongrie et la Serbie), explique le quotidien.

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Il devait permettre de réduire les risques, lors de la livraison du gaz russe à l’Europe, liés au transit par le territoire ukrainien. Gazprom détient 50 % des parts du projet, la compagnie italienne ENI 20 %, la compagnie française EDF et l’allemande Wintershall 15 % chacune. Le coût avait été récemment évalué à 23,5 milliards d’euros.

Ankara fait fi de Washington et Bruxelles

Le quotidien turc Milliyet titre à la une : “Un geste vis-à-vis de la Turquie, défiance à l’égard de l’Europe”. “En effet, explique le titre, du sommet entre le président Erdogan et le leader russe Poutine sont sorties des décisions surprenantes en matière d’énergie. Poutine, qui a annoncé au passage une baisse des prix de 6 % du gaz naturel vendu à la Turquie, a expliqué qu’à cause de l’attitude de l’Union européenne, il renonçait au projet South Stream, ajoutant qu’un nouveau site de distribution pourrait être installé à la frontière turco-grecque. Erdogan a alors précisé qu’ils étaient arrivés à un accord sur le nouveau tracé du gazoduc”.

“Malgré son statut de membre de l’Otan et la poursuite du processus de son intégration à l’UE, la Turquie est fermement décidée à conserver et développer ses relations avec la Russie, analyse un chercheur à l’Institut oriental de l’Académie des sciences de Russie, Stanislav Ivanov, cité parle quotidien russe Nezavissimaïa Gazeta. La Turquie n’a pas l’intention d’y renoncer uniquement pour satisfaire Washington et Bruxelles”. Par ailleurs, la Turquie, comme la Russie, cherche à surmonter un certain isolement sur la scène internationale. “La visite de Poutine a lieu au moment où la Russie subit les sanctions de l’Occident, tandis que la Turquie perd des partenaires économiques au Moyen-Orient”.

Tenir tête à Poutine

“La saga South Stream”, titre de son côté le quotidien bulgare en ligneDnevnik, sans toutefois préciser si l’annonce par la Russie de l’arrêt du projet est bien le dernier épisode de ce feuilleton, qui tient depuis plusieurs années en haleine la presse de Sofia. Pour le politologue libéral Ognian Mintchev, il s’agit d’une “bonne nouvelle” pour le Vieux continent car, selon lui, l’Union européenne a ainsi démontré qu’elle était capable de “tenir tête à Poutine”. “La Bulgarie n’a rien à avoir dans cette affaire, il s’agit d’un problème entre Moscou et Bruxelles”, a-t-il précisé. L’ancien ministre de l’Energie, le socialiste (ex-communiste) Roumen Ovtcharov, a pour sa part estimé à 600 millions de dollars par an les pertes pour Sofia [Vladimir Poutine avait évalué cette perte à 400 millions], sans parler des “pertes politiques et géostratégiques”.

L’hebdomadaire économique Kapital voit, quant à lui, “des problèmes internes à l’économie” russe pour expliquer cette décision, rappelant la dévaluation du rouble et les effets de plus en plus palpables des sanctions occidentales.

Beaucoup de commentateurs bulgares affirment également que cet arrêt ne sera certainement pas définitif, rappelant que le projet a été “gelé” à plusieurs reprises avant de repartir de plus belle. Certains y voient même une “manoeuvre” de la part du Kremlin pour tester la réaction de ses partenaires.

“Mauvaise nouvelle” pour la Serbie“L’annonce de l’abandon du projet South Stream n’est pas une bonne nouvelle pour la Serbie”, a déclaré, selon le quotidien serbe Politika, le Premier ministre serbe, Aleksandar Vucic, depuis Jerusalem, où il se trouve en visite d’Etat. C’était un bon projet, la Serbie y a investi sept ans de travail, refusant d’y renoncer malgré les pressions. A présent, les europhiles et les russophiles s’accuseront mutuellement de cet échec. La Serbie, quant à elle, n’y est pour rien”. Il a tenu à rassurer ses compatriotes quant à l’approvisionnement en gaz : “On va payer cher l’abandon de South Stream, mais on fera tout pour que les Serbes n’en souffrent pas cet hiver”.

Source: Courrier International, 2/12/2014

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ZéroHedge :

Poutine met fin au gazoduc « South Stream » ; il construira à la place un nouveau gazoduc de grande capacité vers la Turquie

Rétrospectivement, on réalise que cela aurait dû être évident en août.

À l’époque nous écrivions que le pays le plus pauvre de l’UE, la Bulgarie, avait été un partisan enthousiaste du projet de gazoduc « South Stream » soutenu par les Russes, dont la construction attisait les tensions entre l’Occident et Moscou car elle permettait la livraison de gaz en contournant l’Ukraine agitée de troubles (et donc en obligeant cette économie désespérée à retourner dans le giron russe). Début juin, le Premier ministre bulgare, Plamen Orecharski, avait ordonné un premier arrêt (après que l’Europe eut offert une bouée de sauvetage au système bancaire lors de son effondrement soudain). Par la suite, le ministre de l’énergie, Vassil Chtonov, a ordonné au conglomérat financier bulgare de l’énergie de cesser toute action concernant ce projet, car il ne satisfaisait pas aux exigences de la Commission Européenne.

Et alors, histoire de faire comprendre très clairement à Poutine à qui cet ancien pays satellite de la sphère soviétique devait faire allégeance, l’OTAN a déployé 12 F-15 et 180 militaires sur la base aérienne bulgare de Graf Ignatievo.

Le colonel Steve Warren, porte-parole du Pentagone, a annoncé lundi qu’une douzaine de F-15 et approximativement 180 personnes de la 493ème escadrille de la Royal Air Force basée à Lakenheath, Angleterre, ont été déployées sur la base de Graf Ignatievo, afin de participer à un exercice conjoint avec l’armée de l’air bulgare.

L’exercice a commencé lundi et continuera jusqu’au 1er septembre.

L’objectif de ce déploiement est de « mener des entraînements se concentrant sur l’entretien d’un état de préparation commun tout en développant l’interopérabilité », a déclaré Warren.

La décision intervient à un moment où les partenaires de l’Est européen, alliés de l’Amérique, s’inquiètent d’une possible intervention militaire russe en Ukraine. Ils craignent que Moscou tente de déstabiliser d’autres pays de la région.

« C’est le reflet de notre inébranlable engagement à améliorer la sécurité dans la région », dit Warren à propos de l’exercice.

Nous avions conclu par la question : « On se demande quelle sera la réaction de Poutine ? »

Nous avons maintenant la réponse : plus tôt aujourd’hui, dans une annonce stupéfiante, Poutine a annoncé la fin du projet South Stream. Comme le rapporte le Wall Street Journal, « Poutine a annoncé que Moscou mettait fin au projet South Stream de Gazprom, qui devait fournir du gaz naturel à l’Europe par un pipeline sous-marin vers la Bulgarie, rendant l’Union Européenne responsable du sabordage du projet ».

« Nous n’avons pas pu obtenir les autorisations nécessaires de la Bulgarie, et nous ne pouvons donc poursuivre ce projet. Nous ne pouvons pas faire tous les investissements pour être stoppés à la frontière bulgare, a dit M. Poutine. Bien sûr, c’est le choix de nos amis européens. »

« Nous pensons que la position de la Commission européenne n’était pas constructive, a déclaré M. Poutine. Si l’Europe ne veut pas le réaliser, il ne sera pas réalisé. »

Poutine a raison : l’Europe – à l’exclusion de l’Autriche – a vu des résistances grandissantes à South Stream ces derniers mois, à mesure de l’intensification de la crise en Ukraine. L’UE craint que ce projet ne conforte la position dominante de la Russie en tant que fournisseur de gaz naturel. La Russie répond déjà à presque 30% des besoins annuels de l’Europe.

Que fait alors Poutine ? Il signe un accord stratégique avec la Turquie, un membre de l’OTAN, le seul pays d’Europe a être tout sauf européen (à cause de l’éternel veto de l’Allemagne, qui en refuse l’intégration par peur d’une vague migratoire de travailleurs au rabais) et qui, dernièrement, a été de plus en plus anti occidental, pour construire un nouveau méga-pipeline vers la Turquie. Comme le rapporte RT, Aleksey Miller, le président de Gazprom, a dit que le géant de l’énergie construira un pipeline qui partira de la Russie, traversera la Turquie et s’arrêtera à la frontière grecque – donnant par là à la Russie accès au marché du sud de l’Europe. Dans les faits, la Russie gardera son accès aux marchés de South Stream.

Le pipeline aura une capacité annuelle de 63 milliards de mètres cubes. Un total de 14 milliards de mètres cubes sera livré à la Turquie, le deuxième plus gros client de Gazprom de la région après l’Allemagne.

Le ministre russe de l’énergie, Alexandre Novak, a dit que le nouveau projet comprendra une plate-forme de distribution spécialement construite sur la frontière turco-grecque pour des clients du sud de l’Europe.

Dans une conférence de presse conjointe de Poutine et du leader turc Erdogan, le Russe a dit que l’approvisionnement en gaz russe à la Turquie sera augmenté de 3 milliards de mètres cubes, à travers le pipeline déjà opérationnel Blue Stream. L’année dernière, 13,7 milliards de mètres cubes ont été fournis à la Turquie via le Blue Stream, selon Reuters.

Et un bénéfice additionnel accompagne le fait de devenir un allié privilégié de la Russie : Moscou réduira la facture de gaz de la Turquie de 6% à partir du premier janvier 2015, selon Poutine. Par la suite, Novak a dit que la réduction pourrait atteindre 15%, à négocier. Pauvre Ukraine.

Et pauvre Bulgarie, qui malgré sa dépendance totale au gaz russe pour ses besoins commerciaux, industriels et résidentiels, a décidé de se mettre du côté de l’Union Européenne en train de sombrer, devenant ainsi le dernier état vassal insolvable d’une zone euro qui coule, ce que Poutine a bien fait comprendre au cours de la conférence d’aujourd’hui.

  • POUTINE : La Bulgarie incapable d’agir en tant qu’état souverain sur la connexion gazière inter-états.
  • POUTINE : La Russie en passe de réorienter ses ressources énergétiques vers d’autres marchés. Source : IFX

La Bulgarie peut désormais s’attendre à ce que les coûts de son gaz prennent hardiment le chemin qu’avaient auparavant si hardiment suivi les prix de l’énergie de l’Ukraine.

Quant à la Turquie, le pays qui relie l’Europe à l’Asie n’est que la dernière expansion de l’alliance anti-dollar de Poutine.

Ou, comme Obama le dirait, la Russie vient juste de se retrouver encore plus « isolée ».

Source : Zero Hedge, le 01/12/2014

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

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L’Europe pourrait faire face à un désastre du fait de l’annulation de South Stream, déclare une compagnie tchèque 

L’annulation du projet de gazoduc South Stream est synonyme de désastre pour les pays baltes, ainsi que pour la Bulgarie, la Serbie, la Hongrie et l’Autriche, a déclaré le directeur de marketing d’une compagnie de gaz tchèque.

Moscou, le 2 décembre (Sputnik) – Les conséquences du retrait du projet de gazoduc South Stream pourraient s’avérer désastreuses pour certains états européens, a déclaré mardi le directeur de marketing de la compagnie de gaz tchèque Vemex.

« L’annulation du projet [South Stream] se traduira par un désastre pour les pays baltes, la Bulgarie, la Serbie ainsi que pour la Hongrie et l’Autriche », a dit Hugo Kyselka.

« Je parle avant tout des actions du gouvernement bulgare et de ses “associés” européens, qui ont délibérément “coulé” le projet [South Stream]. Ils ont fait une bourde énorme et ont causé un dommage réel à la sécurité énergétique européenne », a-t-il ajouté.

Selon Kyselka, il est « très dangereux de compter sur des ressources en matières premières situées à des milliers de kilomètres de celui qui les utilise sans prendre en compte la situation politique des pays où elles se trouvent. »

Le directeur de marketing de Vemex a aussi souligné que « Bruxelles a prouvé que les besoins des gens ordinaires ne l’intéressaient pas, que seuls ses buts politiques comptaient » et « a entamé avec les électeurs un jeu très dangereux. »

Kyselka a noté que « la Russie et la Turquie ont sans aucun doute gagné la partie du South Stream, tandis que l’Union Européenne a fait un mauvais choix et a tout perdu. »

Plus tôt ce lundi, le président russe Vladimir Poutine a dit, après une réunion avec son homologue turc, que la Russie augmenterait bientôt les livraisons de gaz à la Turquie de trois milliards de mètres cubes par an via le Blue Stream, un pipeline déjà opérationnel traversant la mer Noire. Le dirigeant russe a aussi annoncé que la Russie ne souhaitait plus mettre en œuvre le projet South Stream, à la lumière de la position « non-constructive » de la Commission Européenne sur cette question.

En 2012, le géant de l’énergie Gazprom avait annoncé la construction d’un pipeline à travers la mer Noire pour réduire les risques d’interruption de la livraison du gaz russe en Europe du Sud et en Europe centrale à travers l’Ukraine. Le pipeline devait être entièrement opérationnel avant 2018.

Cependant, la Commission Européenne a eu une position critique sur le projet, arguant qu’il est illégal de simultanément posséder un pipeline et de produire le gaz naturel qui y circule.

Moscou a insisté sur le fait que la construction du pipeline n’entre pas en contradiction avec les règles en vigueur.

Source : Sputnik News, le 02/12/2014

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

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South Stream bloqué, la « claque » des États-Unis à l’Union européenne

par Manlio Dinucci, Géographe et géopolitologue. 5/12/2014

Contrairement à l’idée répandue dans les médias européens, montre Manlio Dinucci, le renoncement à la construction du gazoduc South Stream n’est pas simplement un coup dur pour la Russie qui y perd 4,5 milliards de dollars, mais surtout pour les membres de l’Union européenne. Ceux-ci perdent de gigantesques contrats de construction, les royalties qu’aurait occasionnées le passage du gazoduc sur leur territoire, et le développement économique facilité par une énergie bon marché. Il s’agit sans aucun doute de la pire catastrophe économique que l’UE ait jamais connue.

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« La Russie pour le moment est obligée de se retirer du projet South Stream, à cause du manque de volonté de l’Union européenne de le soutenir et du fait qu’elle n’a toujours pas reçu l’autorisation de la Bulgarie de faire passer le gazoduc sur son propre territoire » : voilà comment le président russe Vladimir Poutine a annoncé l’arrêt du projet South Stream, le gazoduc qui aurait dû amener le gaz russe dans l’Union européenne à travers un corridor énergétique méridional, sans passer par l’Ukraine. De cette façon, écrit l’agence Ansa, Moscou « donne une claque à l’Europe ». En réalité c’est Washington qui donne une autre forte claque à l’Europe, en bloquant un projet de 16 milliards d’euros qui aurait pu être de grande importance économique pour les États de l’UE, en commençant par l’Italie où aurait dû être construit le terminal du gazoduc.

Pour comprendre ce qui s’est passé, il faut reprendre l’histoire du South Stream. Le projet naît de l’accord de partenariat stratégique, stipulé par la compagnie publique russe Gazprom et par l’italienne Eni en novembre 2006, pendant le gouvernement Prodi II. En juin 2007 le ministre pour le développement économique, Pierluigi Bersani, signe avec le ministre russe de l’industrie et de l’énergie le mémorandum d’entente pour la réalisation du South Stream. Le projet prévoit que le gazoduc sera composé d’un tronçon sous-marin de 930 km à travers la Mer Noire (en eaux territoriales russes, bulgares et turques) et par un tronçon sur terre à travers la Bulgarie, la Serbie, la Hongrie, la Slovénie et l’Italie jusqu’à Tarvisio (Province d’Udine). En 2012 entrent aussi dans la société par actions qui finance la réalisation du tronçon sous-marin la société allemande Wintershall et la française EDF à hauteur de 15 % chacune, alors qu’Eni (qui a cédé 30 %) détient 20 % et Gazprom 50 % des actions. La construction du gazoduc commence en décembre 2012, avec l’objectif de lancer la fourniture de gaz pour 2015. En mars 2014, Saipem (Eni) s’adjudique un contrat de 2 milliards d’euros pour la construction de la première ligne du gazoduc sous-marin.

Entre temps, cependant, éclate la crise ukrainienne et les États-Unis font pression sur les alliés européens pour qu’ils réduisent les importations de gaz et de pétrole russes. Premier objectif états-unien : empêcher la réalisation du South Stream. À cet effet Washington exerce une pression croissante sur le gouvernement bulgare pour qu’il bloque les travaux du gazoduc. D’abord il le critique pour avoir confié la construction du tronçon bulgare du gazoduc à un consortium dont fait partie la société russe Stroytransgaz, sujette à des sanctions états-uniennes. Puis l’ambassadrice US à Sofia, Marcie Ries, avertit les hommes d’affaires bulgares d’éviter de travailler avec des sociétés sujettes à des sanctions de la part des USA. Un grand coup de main est donné à Washington par le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, qui annonce l’ouverture d’une procédure de l’Union contre la Bulgarie pour de présumées irrégularités dans les appels d’offre du South Stream. Le moment décisif est celui où, en juin dernier, arrive à Sofia le sénateur états-unien John McCain, qui rencontre le premier ministre bulgare Plamen Oresharski en lui transmettant les ordres de Washington [1]. Immédiatement après Oresharski annonce le blocus des travaux du South Stream, dans lequel Gazprom a déjà investi 4,5 milliards de dollars.

En même temps la compagnie états-unienne Chevron commence les perforations en Pologne, en Roumanie et en Ukraine pour extraire les gaz de schiste bitumineux, par la technique de fracturation hydraulique : on injecte dans les strates rocheuses profondes des jets d’eau et de solvants chimiques à haute pression. Cette technique est extrêmement dangereuse pour l’environnement et la santé, à cause surtout de la pollution des nappes phréatiques. Le projet de Washington de remplacer le gaz naturel russe, importé par l’UE, par celui extrait des schistes bitumineux en Europe et aux États-Unis, est un véritable bluff, à la fois par ses coûts élevés et par les dommages environnementaux et sanitaires de cette technique d’extraction. Et, en effet, en Pologne et en Roumanie plusieurs communautés locales se rebellent.

À la suite du blocus de South Stream, a annoncé Poutine, la Russie est obligée de « réorienter ses fournitures de gaz ». Celles destinées à la Turquie vont augmenter, à travers le gazoduc Blue Stream. Et vont augmenter surtout celles vers la Chine. Gazprom lui fournira, d’ici 2018, 38 milliards de mètres cubes de gaz par an, c’est-à-dire environ un quart de celui qu’elle fournit aujourd’hui à l’Europe. Se servant aussi d’investissements chinois prévus pour 20 milliards de dollars, Moscou projette de potentialiser l’oléoduc entre la Sibérie orientale et le Pacifique, en l’accompagnant d’un gazoduc de 4000 km pour approvisionner la Chine. Pékin est aussi intéressé pour des investissements en Crimée, notamment pour la production et l’exportation de gaz naturel liquéfié.

Les perdants sont les États de l’UE : la Bulgarie, par exemple, devra renoncer à des droits de transit de l’ordre de 500 millions de dollars annuels. En Italie, à peine annoncée l’arrêt du projet South Stream, l’action Saipem en bourse a subi, à la suite des ventes, une chute continue, descendant au niveau le plus bas des six dernières années. Avec le blocus de South Stream, Saipem perd, outre le contrat pour la construction de la première ligne du gazoduc sous-marin, un autre contrat pour les travaux de support de la seconde ligne, pour une valeur totale de 2,4 milliards d’euros, auxquels se seraient ajoutés d’autres contrats si le projet avait été poursuivi.

On prévoit de lourdes répercussions sur l’emploi. À la suite de l’effacement du projet South Stream seront annulées ou re-dimensionnées les nouvelles embauches que Saipem prévoyait pour augmenter ses propres effectifs en Italie. On n’exclut pas non plus une coupe dans les effectifs actuels. L’effacement du projet South Stream assène donc un coup dur non seulement à Saipem mais à d’autres secteurs de l’industrie et des services, au moment critique où chute la production et, en conséquence, l’emploi. Il suffit de penser que le terminal de Tarvisio, prévu dans le projet originaire, aurait pu être le hub de distribution du gaz russe et donc source de fortes recettes et d’augmentation de l’embauche.

Tout cela est à présent devenu vain. Tandis que tirent avantage de cet arrêt du South Stream les compagnies états-uniennes comme Chevron, engagées à remplacer le gaz russe fourni à l’UE.

Il ne reste qu’à remercier « l’ami américain ».

Manlio Dinucci

Traduction : Marie-Ange Patrizio

Source : Il Manifesto (Italie)

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L’observation des réactions à l’annulation du projet South Stream a été jubilatoire, mais elle nécessite d’être expliquée très attentivement. Afin de comprendre ce qui est arrivé, il est d’abord utile de revenir sur la façon dont les relations russo-européennes se sont développées au cours des années 1990.

À l’époque, il ne faisait aucun doute que la Russie deviendrait le grand fournisseur d’énergie et de matières premières de l’Europe. C’était la période de la grande ruée vers le gaz, quand les Européens anticipaient des fournitures russes illimitées et infinies. L’accroissement du rôle du gaz russe dans le mélange énergétique européen a permis à l’Europe de se défaire de son industrie au charbon, de diminuer ainsi ses émissions de CO2 et par ailleurs d’intimider et donner des leçons au monde entier, pour qu’il fasse pareil.

Cependant, les Européens n’imaginaient pas que la Russie ne leur fournirait que de l’énergie. Ils croyaient fermement que cette énergie russe serait extraite pour eux, et par les sociétés énergétiques occidentales. Après tout, c’était la tendance générale dans la plupart des pays en cours de développement. L’Union européenne qualifie cette méthode de sécurité énergétique (un euphémisme pour justifier l’extraction énergétique dans d’autres pays, sous le contrôle de ses propres entreprises).

Mais cela ne s’est pas passé ainsi. Bien que l’industrie pétrolière russe ait été privatisée, elle est néanmoins restée principalement entre les mains de Russes. En 2000, peu après l’arrivée de Poutine au pouvoir, la tendance de privatiser l’industrie pétrolière s’est inversée. Une des principales raisons de la colère de l’Ouest a été l’arrestation de Khodorkovski, la fermeture de Ioukos, puis le transfert de ses actifs à la société pétrolière d’État Rosneft, marquant ainsi l’inversion de la politique de privatisation de l’industrie pétrolière.

Dans l’industrie gazière, le processus de privatisation n’a jamais vraiment démarré. Les exportations de gaz ont continué à être contrôlées par Gazprom, préservant sa position de monopole d’État dans l’exportation de gaz. Depuis l’arrivée de Poutine au pouvoir, la position de Gazprom comme monopole d’État a été complètement sécurisée.

Une grande partie de la colère de l’Ouest à l’égard de Poutine s’explique par le ressentiment européen et occidental, de son refus, ainsi que de celui du gouvernement russe, d’éclater les monopoles énergétiques russes et d’ouvrir (c’est un euphémisme) l’industrie aux avantages des entreprises occidentales.

Un bon nombre d’allégations de corruption, portées régulièrement contre Poutine personnellement, ne sont destinées qu’à insinuer qu’il s’oppose à l’ouverture de l’industrie russe de l’énergie, ainsi qu’à l’éclatement et à la privatisation de Gazprom et de Rosneft, parce qu’il a un intérêt personnel investi en eux, et, dans le cas de Gazprom, qu’il en est en fait le propriétaire. Si l’on examine en détail les allégations spécifiques de corruption portées contre Poutine (comme je l’ai fait), cela devient évident.

L’ordre du jour visant à forcer la Russie à privatiser et à briser ses monopoles énergétiques n’a jamais disparu. C’est pourquoi Gazprom, malgré le service essentiel et fiable qu’elle assure à ses clients européens, est assujettie à tant de critiques. Quand les Européens se plaignent de la dépendance énergétique de l’Europe à la Russie, ils expriment leur ressentiment d’avoir à acheter du gaz à une seule société d’État russe (Gazprom), et non pas aux sociétés occidentales opérant en Russie.

Ce ressentiment est lié à la conviction, très ancrée en Europe, que la Russie est, en quelque sorte, dépendante de l’Europe, aussi bien comme client énergétique, que comme fournisseur de finances et de technologie.

C’est cette combinaison de ressentiment et d’excès de confiance qui se cache derrière les tentatives européennes répétées de légiférer sur les questions énergétiques, afin de forcer la Russie à ouvrir son secteur de l’énergie.

La première tentative a été ladite Charte de l’énergie, que la Russie a signée, mais a finalement refusé de ratifier. La dernière tentative de l’Union européenne était ledit Troisième paquet énergie. Ce paquet a été présenté comme un développement de la loi anti-concurrence et anti-monopole de l’Union européenne. En réalité, comme chacun le sait, il s’adressait à Gazprom, qui est un monopole, mais bien évidemment pas européen.

Tel est l’arrière-plan du conflit sur South Stream. Les autorités de l’Union européenne ont insisté pour que South Stream se conforme au troisième paquet énergie [1], bien que celui-ci n’ait vu le jour qu’après que les accords-cadres ont été conclus.

Conformément au troisième paquet énergieGazprom devait fournir le gaz, mais n’aurait eu ni la propriété de celui-ci, ni le contrôle du gazoduc destiné à l’acheminement.

Si Gazprom avait accepté cela, il aurait reconnu de fait l’autorité de l’Union européenne sur ses opérations, ce qui aurait constitué, sans aucun doute, le précédent d’une série de futures exigences de changement de ses méthodes d’opération. En fin de compte, cela conduirait à des exigences de changement dans les structures de l’industrie de l’énergie, en Russie même.

Ce qui vient d’arriver est que les Russes ont dit non. Plutôt que de poursuivre le projet en se soumettant aux exigences européennes, comme s’y attendaient les Européens, les Russes, à l’étonnement de tout le monde, se sont retirés de l’ensemble du projet.

Cette décision était complètement inattendue. Alors que j’écris cet article, l’air est surchargé de plaintes colériques de la part des pays de l’Europe du Sud-est, qui n’ont pas été consultés, ni même informés à l’avance de cette décision. Plusieurs hommes politiques en Europe du Sud-Est (Bulgarie en particulier) s’accrochent désespérément à l’idée que l’annonce russe n’est qu’un bluff (ça ne l’est pas) et que le projet peut encore être sauvé. Du fait que les Européens s’agrippaient à l’idée d’être la seule alternative comme clients pour les Russes, ils ont été incapables de prévoir cette décision et ils sont maintenant incapables de l’expliquer.

Il est primordial d’expliquer pourquoi South Stream est important pour les pays de l’Europe du Sud-est et pour l’économie européenne dans son ensemble.

Toutes les économies du Sud-est européen sont en mauvais état. Pour ces pays, South Stream était un projet d’investissement et d’infrastructures vital, assurant leur avenir énergétique. En outre, les frais de transit qui s’y rattachaient auraient assuré une importante source de devises étrangères.

Pour l’Union européenne, le point essentiel est qu’elle est dépendante du gaz russe. D’intenses discussions ont eu lieu en Europe sur la recherche d’autres approvisionnements. Les progrès dans ce sens se sont révélés, tout au plus, médiocres. Tout simplement, les fournitures alternatives n’existent pas en quantité nécessaire pour remplacer le gaz que l’Europe reçoit de la Russie.

On a courageusement évoqué la livraison de gaz naturel liquéfié venant des États-Unis, pour remplacer le gaz fourni par gazoduc de la Russie. Non seulement le gaz étasunien est de manière inhérente plus coûteux que le gaz russe, ce qui frapperait durement les consommateurs européens et affecterait la compétitivité européenne, mais il est peu probable qu’il soit disponible en quantité suffisante. Mis à part les probables effets modérateurs de la récente chute des prix du pétrole sur l’industrie de schiste des États-Unis, compte tenu de ses antécédents de consommateur d’énergie vorace, ce pays consommera la plus grande partie sinon la totalité de l’énergie de schiste qu’il produira. Par conséquent, il est peu probable que les États-Unis puissent exporter grand-chose vers l’Europe. Il n’y a même pas les installations pour le faire, et si jamais elles devaient être construites, il faudrait un bout de temps.

Les autres sources possibles de gaz de l’Union européenne sont pour le moins problématiques.

La production de gaz en mer du Nord est en baisse. Les importations de gaz d’Afrique du Nord et du golfe Persique sont peu susceptibles d’être disponibles dans les quantités nécessaires, tant s’en faut. Le gaz iranien n’est pas disponible pour des raisons politiques. Bien que cela puisse éventuellement changer, il est probable que les Iraniens (comme les Russes) décideront de diriger leur flux d’énergie vers l’Est, l’Inde et la Chine, plutôt que vers l’Europe.

Pour des raisons évidentes de géographie, la Russie est la source de gaz la plus logique et la plus économique pour l’Europe. Toutes les autres options impliquent des coûts économiques et politiques qui les rendent rédhibitoires.

Les difficultés de l’Union européenne à trouver d’autres sources alternatives de gaz ont été cruellement exposées dans la débâcle de l’autre projet de gazoduc, Nabucco, qui devait acheminer du gaz du Caucase et d’Asie centrale vers l’Europe. Bien que le projet ait fait l’objet de discussions pendant des années, sa construction n’a jamais démarré, car, économiquement, il n’était pas rationnel.

Pendant ce temps, alors que l’Europe parle de diversifier ses approvisionnements, c’est la Russie qui matérialise des accords.

La Russie a scellé un accord clé avec l’Iran pour l’échange de pétrole iranien contre des produits industriels russes. La Russie a également accepté d’investir massivement dans l’industrie nucléaire iranienne. Si les sanctions contre l’Iran sont levées, ce jour-là les Européens trouveront les Russes déjà sur place. La Russie vient de conclure un accord massif de fourniture de gaz avec la Turquie (dont nous parlerons plus loin). Éclipsant ces accords, la Chine et la Russie ont conclu cette année deux énormes contrats de fourniture de gaz.

Les ressources énergétiques de la Russie sont énormes, mais pas infinies. Le deuxième accord avec la Chine et celui qui vient d’être conclu avec la Turquie, fait pivoter vers ces deux pays le gaz qui était précédemment affecté à l’Europe. Les volumes de gaz impliqués dans l’accord turc correspondent presque exactement à ceux précédemment destinés à South Stream. L’accord turc remplace South Stream.

Ces offres démontrent que la Russie a pris cette année la décision stratégique de réacheminer son flux énergétique à l’écart de l’Europe.

Même si les effets prendront du temps avant de se faire sentir, les conséquences pour l’Europe seront sombres. L’Europe cherche à combler un sérieux déficit énergétique. Elle ne sera en mesure de le faire que par l’achat d’énergie à un prix beaucoup plus élevé.

Les accords passés par la Russie avec la Chine et la Turquie ont été critiqués, et même ridiculisés en raison du faible prix obtenu par la Russie pour son gaz, par rapport à celui payé par l’Europe.

La différence réelle du prix n’est pas aussi importante que d’aucuns le prétendent. Cette critique ne tient pas compte du fait que le prix ne constitue qu’une partie des relations d’affaires.

En redirigeant son gaz vers la Chine, la Russie cimente les liens économiques avec le pays qu’elle considère désormais comme son allié stratégique clé, et qui a (ou qui aura bientôt) l’économie la plus importante et la croissance la plus forte du monde. En redirigeant son gaz vers la Turquie, la Russie consolide une relation naissante avec la Turquie et devient maintenant son plus important partenaire commercial.

La Turquie est un allié potentiel clé pour la Russie, consolidant la position de cette dernière dans le Caucase et la mer Noire. C’est aussi un pays de 76 millions d’habitants, avec un produit intérieur brut de 820 milliards de dollars en 2013 et une forte croissance, qui, ces deux dernières décennies, s’est de plus en plus aliénée et éloignée de l’Union européenne et de l’Ouest.

Par contre, en déroutant son gaz loin de l’Europe, la Russie s’éloigne d’un marché gazier économiquement stagnant et qui lui est (comme les événements de cette année l’ont démontré) irrémédiablement hostile. Personne ne devrait être surpris que la Russie renonce à une relation qui a été pour elle la cause d’un torrent ininterrompu de menaces et d’injures, combinés avec des leçons moralisatrices, des ingérences politiques et maintenant des sanctions. Aucune relation, d’affaires ou autre, ne peut fonctionner de cette façon et celle existant entre la Russie et l’Europe n’y fait pas l’exception.

Je n’ai rien dit à propos de l’Ukraine, parce que, à mon avis, cela a peu d’incidence sur ce sujet.

South Stream était au départ conçu pour répondre aux continuels abus de l’Ukraine, de par sa position de pays de transit (abus qui vraisemblablement continueront). Ce fait a été reconnu par l’Europe, autant que par la Russie. C’est parce que l’Ukraine a de manière persistante abusé de sa position de pays de transit que le projet South Stream a obtenu, bien qu’avec réticence, l’approbation officielle de l’Union européenne. Fondamentalement, l’Union européenne, tout autant que la Russie, avait besoin de contourner l’Ukraine, pour sécuriser ses approvisionnements en énergie.

Les amis de l’Ukraine à Washington et à Bruxelles n’ont jamais été heureux à ce sujet, et ont constamment fait pression contre le projet South Stream.

Il faut souligner que c’est la Russie qui a torpillé South Stream, tout en ayant le choix d’aller de l’avant, en acceptant les conditions des Européens. En d’autres termes, par rapport à South Stream, les Russes considèrent les problèmes posés par le transit à travers l’Ukraine comme un moindre obstacle que les conditions imposées par l’Union européenne.

South Stream aurait pris des années à construire et son annulation n’a par conséquent aucune incidence sur la crise ukrainienne actuelle.

Les Russes ont décidé qu’ils pouvaient se permettre d’annuler le projet, estimant qu’il était plus avantageux pour leur pays de vendre ses ressources énergétiques à la Chine, à la Turquie et à d’autres pays en Asie (des projets gaziers sont en cours avec la Corée et le Japon, et peut-être aussi avec le Pakistan et l’Inde) plutôt qu’à l’Europe. Considérant la question ainsi, pour la Russie, South Stream a perdu de son intérêt. C’est pourquoi, avec la manière directe qui les caractérise, les Russes, plutôt que d’accepter les conditions des Européens, ont préféré saborder le projet.

Ce faisant, les Russes ont pris les Européens au mot. En l’occurrence, la Russie loin de dépendre de l’Europe comme client énergétique, a été contrariée, peut-être irrémédiablement, par l’Europe, dont elle est le partenaire clé économique et le fournisseur d’énergie.

Avant de terminer, j’aimerais dire quelque chose sur ceux qui pâtissent le plus de toute de cette affaire. C’est le cas des pygmées politiques corrompus et incompétents qui prétendent gouverner la Bulgarie. Si ces gens avaient eu un minimum de dignité et de fierté, ils auraient dit à la Commission européenne, quand elle a soulevé le Troisième paquet énergie, d’aller se faire voir. Si la Bulgarie avait clairement affiché son intention d’aller de l’avant avec le projet South Stream, il aurait sans aucun doute été construit. Il y aurait eu évidemment une sacrée bagarre au sein de l’Union européenne, parce que la Bulgarie aurait ouvertement bafoué le Troisième paquet énergie, mais elle aurait agi selon ses intérêts nationaux et n’aurait pas manqué d’amis au sein de l’Union européenne. Au bout du compte, elle aurait eu gain de cause.

Au lieu de cela, sous la pression de personnes comme le sénateur John McCain, les autorités bulgares se sont comportées comme les vassaux qu’ils sont, et ont essayé de courir après deux lièvres à la fois, l’Union européenne et la Russie.

Le résultat de cette politique imbécile a été d’offenser la Russie, son allié historique. Ainsi, le gaz russe, au lieu d’approvisionner et de transformer le pays, s’écoulera désormais vers la Turquie, son ennemi historique.

Les Bulgares ne sont pas les seuls à avoir agi d’une façon si timorée. Tous les pays de l’Union européenne, même ceux qui sont historiquement liés avec la Russie, ont soutenu divers paquets de sanctions de l’Union européenne contre les Russes, malgré les doutes qu’ils ont exprimés au sujet de cette politique. L’année dernière, la Grèce, un autre pays avec des liens étroits avec la Russie, est sortie d’un accord, pour vendre sa société de gaz naturel à Gazprom (qui offrait le meilleur prix), parce que l’Union européenne l’a désapprouvé.

Ceci appelle une morale plus générale. Chaque fois que les Russes agissent comme ils viennent de le faire, les Européens réagissent avec perplexité et colère. Et c’est assez fréquent ces jours-ci.

Les politiciens de l’Union européenne, qui prennent les décisions à l’origine des actions russes, semblent agir convaincus que c’est très bien pour l’Union européenne de sanctionner à volonté la Russie, mais que cette dernière ne fera jamais la même chose à l’Union européenne. Quand la Russie le fait, il y a de l’étonnement, toujours accompagné d’un flot de commentaires mensongers à propos du comportement agressif de la Russie, qui agit contrairement à ses intérêts ou affirmant qu’elle aurait subi une défaite. Rien de tout cela n’est vrai, comme la colère et les récriminations qui se propagent actuellement dans les couloirs de l’Union européenne (dont je suis bien informé) en témoignent.

En juillet 2014, l’Union européenne a cherché à paralyser l’industrie pétrolière russe en sanctionnant l’exportation de la technologie de forage pétrolier. Cette tentative échouera certainement, car la Russie et les pays avec qui elle négocie (dont la Chine et la Corée du Sud) sont parfaitement capables de la lui fournir.

En revanche, par le biais des accords conclus cette année avec la Chine, la Turquie et l’Iran, la Russie a porté un coup dévastateur à l’avenir énergétique de l’Union européenne. Dans quelques années les Européens commenceront à découvrir que faire la morale et de l’esbroufe a un prix. Peu importe, en annulant South Stream, la Russie a imposé à l’Europe la plus efficace des sanctions que nous ayons vues cette année.

Alexander Mercouris, www.globalresearch.ca

[1] Présenté en janvier 2007, le troisième paquet énergie a été adopté le 13 juillet 2009. Il concerne notamment, dans le domaine du gaz et celui de l’électricité (Wikipédia, français) 

Source: http://www.les-crises.fr/sanctions-suicidaires-pour-lue-la-russie-efface-le-south-stream/


Halte à la chasse aux “prorusses” !, par Roland Hureaux

Thursday 18 December 2014 at 04:38

Tribune de Roland Hureaux* du 28/11 dans Marianne

Il y a quelques jours, Libération annonçait en première page une grande « enquête sur les réseaux Poutine en France ». Disons tout de suite qu’il vaut mieux ne pas en être si on ne veut pas côtoyer Marine Le Pen, Aymeric Chauprade ou Alain Soral. Ou, si l’on tient à sa peau, Christophe de Margerie, disparu dans un accident d’avion, qui figure sur la liste noire de Libé. Comme Enrico Mattei en 1962, qui s’en était pris aux « sept sœurs », les grandes sociétés pétrolières américaines. Le pétrole est un métier dangereux, surtout si l’on s’avise de dire, comme le PDG de Total : « Nous ne devons pas nous laisser convaincre que la Russie est un ennemi. [...] Si les Américains veulent attiser le conflit pour des raisons historiques, c’est leur décision. Nous, Européens, devons résoudre cette crise [celle de l'Ukraine]autrement, sans prendre les choses en noir et blanc. » Circonstance aggravante, l’intéressé avait déclaré lors des dernières Rencontres économiques d’Aix-en-Provence (en juillet 2014) que le commerce du pétrole ne devait pas se faire seulement en dollars !

Le ci-devant journal maoïste, qui ne fera pas d’enquête approfondie sur les raisons du décès de Christophe de Margerie, préfère cibler des universitaires comme Hélène Carrère d’Encausse ou Jacques Sapir, des hommes politiques comme Jean-Pierre Chevènement ou Thierry Mariani, ainsi que Gérard Depardieu et Serge Dassault dont le journal n’est pourtant pas furieusement prorusse : l’avionneur a seulement eu le tort d’avoir accepté une invitation du président de la Douma de passage à Paris !

Les personnalités épinglées ont en commun de penser que l’intérêt de la France n’est pas nécessairement de faire la guerre, fût-elle économique, à la Russie. A aucun moment n’est envisagée la possibilité que les intéressés aient pu faire là un choix de raison respectable. Parler de « réseaux », c’est déjà les situer dans le sulfureux. La plupart des personnalités citées sont supposées n’avoir pris des positions prorusses que pour des intérêts mercantiles des plus vils. Et les autres, notamment Depardieu, sont taxés de naïveté. On ne dit pas encore idiots utiles, mais ça viendra.

Il n’est d’ailleurs jamais question que de Poutine, guère de la Russie : comme si s’allier avec un régime qu’on n’approuve pas n’était pas de la diplomatie, et de la plus classique : celle de Delcassé, inaugurant le pont Alexandre-III avec le tsar de Russie, dont le régime se trouvait pourtant aux antipodes de la IIIe République. De même, de Gaulle se rapprochant du Kremlin au temps du communisme. Mais ne s’était-il pas déjà trouvé alors des imbéciles, de la mouvance américaine, pour soupçonner alors le Général d’être devenu communiste !

Parler de Poutine et de lui seulement tend à flétrir les dissidents de la pensée unique internationale, puisqu’on rappelle complaisamment qu’il a « beaucoup de sang sur les mains ». Plus que Staline, plus que Bush ? Plus que les dirigeants actuels de la Chine ? Plus que Kagamé que Libé a toujours défendu ?  S’il avait existé en 1914, il aurait mis, n’en doutons pas, Jaurès dans les « réseaux du kaiser ». Certains le disaient d’ailleurs à l’époque : nous savons où cela a mené. Et encore y avait-il alors bien plus de raisons de stigmatiser le camp du compromis puisque les Allemands nous avaient pris l’Alsace et la Lorraine et campaient à la frontière du Rhin, prêts à l’invasion. Rien de semblable avec la Russie, notre ancienne alliée. Rien qui justifie donc ce processus insidieux de diabolisation.

Pour déconsidérer l’idée d’amitié franco-russe, Libération précise que la France n’a pas toujours été du côté des Russes,  en rappelant les guerres de Napoléon (1811-1814) et celle de Crimée (1854-1855). On oublie de préciser que dans les deux cas c’est nous qui avions été les agresseurs, à 3 000 km de nos frontières ! Les alliances décisives pour notre survie de 1914-1917 et 1941-1945 ne pèsent-elles pas bien plus ?

Le seul tort des Russes est sans doute d’avoir, au temps du communisme, été les premiers à développer des réseaux d’influence destinés à façonner l’opinion, le fameux soft power. Orwell avait montré comment la majorité de l’intelligentsia anglaise après la guerre était prosoviétique. Mais, depuis la chute du communisme, il est clair que les Russes ont perdu la main : nous n’en voulons pour preuve que le petit nombre d’« agents » cités dans le dossier. Les Etats-Unis, qui avaient du retard en la matière, durent se mettre à leur école pour leur faire pièce. Ils le firent si bien qu’ils se trouvèrent, après la chute du communisme, à la tête d’une immense machine d’influence qui est aujourd’hui bien plus à redouter que celle de Poutine.

* Roland Hureaux est essayiste et élu local.

Source : Marianne, 21/11

Source: http://www.les-crises.fr/halte-a-la-chasse-aux-prorusses-par-roland-hureaux/


[Propagande] Autopsie du corps d’un député anti-Poutine

Thursday 18 December 2014 at 02:58

Sans commentaire – une information qu’il était urgent de communiquer au public français…

Un tribunal allemand a ordonné une autopsie du corps du député conservateur Andreas Schockenhoff, l’un des élus du Bundestag les plus critiques envers la politique du Kremlin, décédé subitement samedi à l’âge de 57 ans, a-t-on appris aujourd’hui auprès du parquet.

Nous ne connaissons pas les causes du décès“, a déclaré à Reuters Karl-Josef Diehl, du parquet de Ravensburg. “Afin de les établir clairement et de balayer les doutes et les spéculations, notamment liés aux anciennes fonctions du défunt en tant que coordinateur de la politique du gouvernement envers laRussie, une autopsie a été réclamée et obtenue par le tribunal.” Cette autopsie est censée être pratiquée aujourd’hui et ses résultats seront annoncés demain.

Selon la presse allemande, il s’agit d’une “mort naturelle”. En 2011, après un accident de voiture, le député avait reconnu souffrir d’un problème d’alcool et avait suivi une cure de désintoxication.

Andreas Schockenhoff a été le coordinateur de la politique allemande envers la Russie de 2006 jusqu’au début de cette année. Il y a deux ans, il avait suscité la colère de Moscou après la publication d’un rapport parlementaire très critique envers la politique de Vladimir Poutine.

Le mois dernier, dans un entretien à la radio Deutschlandfunk, il avait plaidé pour de nouvelles pressions sur la Russie qu’il accusait de mener une “guerre hybride” contre l’Ukraine et l’Occident.

Source : Lefigaro.fr avec Reuters

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Finalement… (bien entendu,  le Figaro n’a pas jugé utile de reprendre la dépêche…)

Rien de suspect dans la mort du député allemand Schockenhoff

Reuters le 17/12/2014 à 13:20

BERLIN, 17 décembre (Reuters) – L’autopsie du député conservateur allemand Andreas Schockenhoff, un critique virulent de la politique de Vladimir Poutine décédé subitement samedi à l’âge de 57 ans, n’a rien révélé de suspect, a annoncé mercredi le parquet de Ravensburg.

Selon les examens effectués, Schockenhoff a été victime d’une crise cardiaque ou d’un coup de chaud excessif après s’être endormi au sauna. “Rien ne laisse supposer un acte de violence ou l’intervention de qui que ce soit”, a déclaré le procureur Karl-Josef Diehl, se fondant sur les résultats préliminaires de l’autopsie. Le rapport toxicologique sera disponible dans quelques jours. Un tribunal allemand avait ordonné une autopsie “afin d’établir clairement les causes du décès et de balayer les doutes et les spéculations, notamment liés aux anciennes fonctions du défunt en tant que coordinateur de la politique du gouvernement envers la Russie”.

En 2011, après un accident de voiture, Andreas Schockenhoff avait reconnu souffrir d’un problème d’alcool et avait suivi une cure de désintoxication. Le député de la CDU a été le coordinateur de la politique allemande envers la Russie de 2006 jusqu’au début de cette année. Il y a deux ans, il avait suscité la colère de Moscou après la publication d’un rapport parlementaire très critique envers la politique de Vladimir Poutine. Le mois dernier, dans un entretien à la radio Deutschlandfunk, il avait plaidé pour de nouvelles pressions sur la Russie qu’il accusait de mener une “guerre hybride” contre l’Ukraine et l’Occident.

(Erik Kirschbaum, Guy Kerivel pour le service français, édité par Tangi Salaün)

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Si le titre du Figaro était déjà pas mal, celui du Telegraph était encore mieux:
“Was German MP killed by Russia?” link to telegraph.co.uk

Un commentaire à la suite de cet article :

“Il est évident que Poutine l’a tué, tout comme il avait déjà assassiné Elvis dès 1977 et le Pharaon Amenhotep IV en 1334 av JC. IL y a plein de preuves.
Et quiconque pense le contraire est un troll payé par Poutine”

Source: http://www.les-crises.fr/propagande-autopsie-du-corps-dun-depute-anti-poutine/


Les effets de la propagande de guerre…

Thursday 18 December 2014 at 00:49

Très court billet : reprise d’un commentaire du blog posté lundi : tout est dit. C’est quand même fascinant…

“Ma fille 15 ans vendredi dernier, un peu inquiète: “au lycée on dit que Poutine veut la 3ème guerre mondiale”

(on fait peur et on nomme le coupable, rapide, efficace, beaucoup plus simple qu’une étude comparative de Kerry et Lavrov dans le texte…)

Quelle propagande ?”

Source: http://www.les-crises.fr/les-effets-de-la-propagande-de-guerre/


Point sur la chute du rouble, par Jacques Sapir

Wednesday 17 December 2014 at 02:05

Articles de Jacques Sapir du 16/12

Je suis toujours fasciné de voir ainsi les États attaqués par la spéculation interne et externe sans réagir.

Pourtant il ne serait pas si compliqué de leur tordre le cou en interdisant (ou limitant fortement) la capacité pour un acteur à acheter des devises.

Il suffirait de vérifier que les devises demandées servent à ce qu’un acteur de l’économie réelle achète un bien ou un service – sinon, niet pour que la Banque centrale serve la monnaie demandée…

Le rouble a été durement attaqué hier, lundi, et a connu une nouvelle baisse importante. En réaction, la Banque Centrale de Russie a monté son taux directeur de 10,5% par an à 17%. Cette réaction, dont on peut comprendre la logique, risque d’être insuffisante. Compte tenu de la nature des attaques spéculatives dont le Rouble est l’objet, seul des mesures de contrôle des capitaux sont en mesure de ramener le calme sur le marché des changes.

I. Un mouvement clairement spéculatif.

Il est clair désormais que le rouble fait l’objet d’attaques spéculatives. Les causes structurelles de sa baisse sont connues :

Ces causes sont connues. Mais il est aussi clair que l’on est en présence d’un mouvement spéculatif. Les effets de ce derniers peuvent être lus dans les graphiques suivants.

Graphique 1

Volumes sur le marché des changes – Marché au comptant

 A - Rubl Compatnt

Graphique 2

Volumes sur le marché des changes – Marché à terme

 A - Rub Lendemain

Sources : graphiques 1 et 2 – Banque Centrale de Russie et Marché Interbancaire des Changes (MICEX-MMVB)

On sait aussi que les pressions à la baisse devaient se ralentir, voire s’inverser, au début de 2015. Les remboursements des entreprises russes doivent baisser fortement en 2015 et l’on peut penser que le prix du baril de pétrole va remonter à partir de février, en raison de risques que cette baisse fait courir à l’économie américaine. Rien ne peut justifier les mouvements récents, rien sauf le spéculation. L’ampleur des mouvements récents traduit en réalité une spéculation de la part d’acteurs russes mais aussi étranger (des fonds spéculatifs). C’est cette spéculation à la baisse qui a provoqué la chute brutale du Rouble lundi 15 décembre.

Graphique 3

Mouvement des remboursements

A - PaiementsTrim - copie

Source: Banque Centrale de Russie. Estimation du solde positif de la balance commerciale de la Russie à 10 milliards de dollars par mois.

II. Une réaction logique mais sans doute inefficace.

Dans ce contexte, la décision prise dans la nuit du 15 au 16 par la Banque Centrale de Russie se comprend parfaitement. Pour casser la spéculation elle monte fortement les taux afin de rendre le rouble plus cher. Les agents qui contracteraient des emprunts en roubles pour les transformer en dollars devront payer bien plus cher. Mais, un taux de 17% par an n’est pas dissuasif pour ce genre de spéculation où les positions prises le sont à la journée voire, au plus, à la semaine. La BCR devra alors soit continuer de faire monter ses taux soit noyer le marché par des ventes massives de dollars afin de faire remonter brutalement le Rouble et de prendre les spéculateurs à contre-pied, leur faisant perdre beaucoup d’argent.

C’est donc une stratégie possible, les réserves en devises de la BCR sont largement suffisantes, mais c’est une stratégie couteuse. Les montants que la BCR devra accepter de dépenser pourraient atteindre les 100 milliards de dollars en quelques semaines si elle veut faire du mal aux spéculateurs. Par ailleurs, cette très forte hausse des taux aura des conséquences très négatives pour l’économie, au moment ou de nombreuses entreprises russes cherchent à investir pour développer des productions de substitution aux importations. Dans ces conditions, soit il s’agit d’une politique de court terme, et on verra ce qui se passe sur le marché des changes très vite, soit la BCR devra se résoudre à introduire un contrôle des capitaux comme nous le lui avons conseillé depuis plusieurs mois.

III. Des mesures de contrôles sont plus efficaces.

Il est en effet connu que des mesures de contrôle des capitaux sont des armes efficaces face à un marché qui est l’objet de mouvements spéculatifs. L’ampleur de cette spéculation conduit à des mouvements de capitaux importants, qui sont parfaitement identifiables et qui peuvent être interdits ou qui peuvent donner lieu à des pénalités dissuasives. Par ailleurs, un contrôle des capitaux a pour effet de déconnecter les taux d’intérêts internes et ceux des marchés internationaux. Il devient possible de baisser les taux d’intérêts, ce qui est profitable pour l’industrie et les entrepreneurs.

Des mesures de ce type ont été appliquées avec succès dans plusieurs pays. Elles sont désormais recommandées dans ce type de situation par le FMI et par de nombreux économistes. Mais, il est clair que c’est une décision politique. La BCR avait exclu en octobre le recours à des mesures de ce type. Elle va devoir prouver très rapidement que l’arme des taux peut être efficace. Dans le cas contraire, il faudra qu’elle mette très rapidement (d’ici à la semaine prochaine) en place un mécanisme efficace de contrôle des capitaux.

Source : http://russeurope.hypotheses.org/

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Extrait de cet entretien au Figaro :

Cela modifie-t-il la donne sur le plan géopolitique?

Il est frappant de voir que cette crise frappe la Russie alors que cette dernière, après avoir signé d’importants accords pétroliers et gaziers avec la Chine, a passé des contrats importants en Inde (construction de 12 centrales nucléaires d’ici 2030) et avec le Mexique. En fait, la Russie était en train de rééquilibrer la structure de ces exportations et s’affirmait de plus en plus comme un acteur important dans le développement des pays émergents. Cette crise, si elle ne peut remettre en cause ces contrats, pourrait néanmoins freiner le processus commercial.

Cette crise pourrait aussi accélérer le processus de rapprochement entre la Chine et la Russie. La Chine, rappelons-le, a toujours un système de contrôle sur les capitaux et elle contrôle aussi le taux de change du Yuan. Si la Russie se décide à mettre en place un contrôle des capitaux, cela voudra dire qu’elle se rapprochera encore un peu plus de son grand voisin. Telle pourrait être en définitive l’issue de cette crise.

Peut-on parler définitivement de nouvelle guerre froide?

Le terme de guerre froide est inapproprié car la situation actuelle n’a plus rien à voir avec celle des années cinquante à quatre-vingt. Il n’est d’ailleurs plus possible d’isoler la Russie. Ses relations avec la Chine, mais aussi l’Inde, les pays d’Amérique Latine et les pays du Moyen-Orient sont qualitativement et quantitativement d’une nature bien différente que les relations que pouvait avoir l’URSS avec les autres pays. Mais, le conflit entre la Russie et les Etats-Unis pourrait bien dégénérer. En particulier, si la Russie acquiert l’intime conviction que les Etats-Unis sont à l’origine de la crise spéculative actuelle, les répercussions sur les relations entre ces deux pays pourraient être importantes et de longue durée.

Source: http://www.les-crises.fr/point-sur-la-chute-du-rouble-par-jacques-sapir/


Miscellanées du mercredi (Delamarche, Sapir, Béchade)

Wednesday 17 December 2014 at 00:20

I. Olivier Delamarche

Un grand classique : La minute d’Olivier Delamarche: Draghi ne serait-il que l’hôtesse d’accueil de la BCE ? – 08/12

Olivier Delamarche VS Marc Riez (1/2): Marchés: La zone euro est-elle en danger ? – 15/12

Olivier Delamarche VS Marc Riez (2/2): Hausse du dollar: quels impacts sur la croissance mondiale ? – 15/12

II. Philippe Béchade

La minute de Philippe Béchade : “Apple pourrait racheter la Grèce” – 10/12

Philippe Béchade VS Bernard Aybran (1/2): Le cas grec fait-il réapparaître un risque systémique pour la zone euro ? – 10/12

Philippe Béchade VS Bernard Aybran (2/2): Prévisions chocs de Steen Jakobsen pour 2015 : la probabilité que Draghi quitte la BCE est-elle fondée ? – 10/12

Bilan Hebdo: Philippe Béchade et Jean-Louis Cussac – 12/12

III. Jacques Sapir

La minute de Jacques Sapir : L’arnaque politique grecque – 09/12

Jacques Sapir VS Jean-François Robin (1/2): Les marchés vont-ils terminer l’année à la hausse ? – 16/12

Jacques Sapir VS Jean-François Robin (2/2): L’économie chinoise est-elle en train de ralentir ? – 16/12

III. Stupid wars ! La Guerre contre le Terrorisme 2.0 (vostfr)


 

 

 

 

 

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Source: http://www.les-crises.fr/miscellanees-17-12-2014/


[Insider] Moi, ancien directeur financier industriel…

Wednesday 17 December 2014 at 00:01

Aujourd’hui, un témoignage d’un insider, lecteur du blog…

Voici l’histoire d’un directeur financier qui a quitté son emploi après plus de dix ans de carrière au sein d’une entreprise industrielle multinationale.

Au cours de cette période, j’ai pu constater la dérive de la société qui m’employait vers une logique de plus en plus de court terme. La cause de ce phénomène est la financiarisation et en corollaire l’évolution de l’attitude des dirigeants. Par dirigeants, j’entends le comité de direction du groupe (CET : Corporate Executive Team) et le conseil d’administration (Board of Directors).

Avant de poursuivre, je souhaiterais évoquer brièvement mon parcours. Après des études de gestion et de finance, j’intègre un cabinet d’audit. Après quelques années d’expérience, l’absence de perspective me conduit à élaborer un nouveau projet professionnel. Il devra être en phase avec mes valeurs et me permettre d’avoir un travail au sein duquel je pourrais construire quelque chose. Mes critères sont stricts. De fait, plus d’une année se passe avant de trouver une entreprise dans laquelle je souhaite travailler et qui souhaite m’engager.

Une entreprise qui a des valeurs et une vision à long terme

Au début des années 2000, je rejoins donc une belle entreprise industrielle multinationale. Elle est présente sur les cinq continents. Elle a un actionnariat familial et une longue histoire puisque qu’elle fêta ces 150 ans en 2001. Ce groupe est à cette époque, le résultat d’acquisitions externes faites au cours des années 1990. Ces acquisitions ont été faites à des valorisations raisonnables permettant un retour sur investissement raisonnable entre sept et dix ans. Les sociétés rachetées sont aussi en parfaite cohérence avec la stratégie du groupe.

Ce groupe fait des profits qui lui permettent d’autofinancer ses investissements, de distribuer des dividendes réguliers à ses actionnaires et d’augmenter les salaires de ses employés chaque année.

J’intègre comme contrôleur de gestion une de leur usine. Le directeur financier qui m’a embauché est alors âgé de 55 ans. Il me présente un plan d’investissement de 10 ans ayant démarré en 1995 et courant jusqu’en 2005. Ce plan couvrait des augmentations de capacité de production mais aussi des dépenses sans retour sur investissement rapide comme une nouvelle chaudière à gaz, plus économe et moins polluante que celle au fuel, et une nouvelle station d’épuration biologique et non plus physico-chimique, ayant permis de réduire les rejets polluants. Le groupe vient aussi de terminer de lourds investissements informatiques.

Il est plaisant de travailler avec des gens de tous âges. Plusieurs jeunes cadres âgés entre 25 et 30 ans ont été embauchés récemment. En effet, les responsables quinquagénaires pensent à former une génération montante. Ils préparent tout simplement leur départ à la retraite qu’ils envisagent entre 60 et 65 ans.

Je réalise que je viens de rejoindre une entreprise avec beaucoup d’histoire et des hommes engagés, respectueux et respectables. Cette entreprise est gérée avec bon sens. Les investissements sont continus pour maintenir sa compétitivité et évoluer avec le monde qui l’entoure.

Au bout d’un an, une opportunité m’est présentée. La mission est de partir à l’étranger dans une usine qui perd de l’argent pour la redresser. Dans le même temps, je deviens aussi responsable du contrôle de gestion de deux autres sites. Mon nouveau patron est une nouvelle recrue du groupe. Il a 46 ans et possède une forte culture industrielle. Il possède une vision de long terme tout en étant respectueux et respectable.

Les choses basculent

En 2004, une vague de quinquagénaires se fait licencier dont le directeur financier qui m’avait embauché. L’idée est de réduire les coûts annuels récurrents. Tant pis pour l’expérience perdue. Certains jeunes loups arrivistes grimpent fortement dans la hiérarchie. Leur valeur est l’argent. Leur motivation est le bonus.

Les investissements sont gelés. La dernière phase du plan décennal d’investissement de l’usine dans laquelle j’ai démarré, est ajournée. Les trois usines pour lesquelles je travaille, en sont réduites au pain sec et à l’eau en ce qui concerne leurs investissements pour le plan stratégique 2005-2007 que nous élaborons au cours du printemps 2004.

Mais pourquoi tous ces changements si soudains me demanderez-vous. La réponse est simple : le groupe prépare son introduction en Bourse pour l’année 2006. La raison officielle est de lever des capitaux pour pouvoir faire plus d’investissements. La raison officieuse est de permettre à certains gros actionnaires familiaux de céder leurs actions plus facilement sur les marchés financiers.

De mon côté, je me suis bien intégré dans mon nouveau poste. L’ambiance de travail est géniale. L’équipe parvient à redresser les comptes du site. Cela est rendu possible grâce à une simplification de la gamme de produits, des gains de productivité provenant de meilleures méthodes de travail, des actions commerciales et aussi une forte motivation des troupes autour du projet qui consiste à sauver cette usine. Nous progressons sans investissement. Nous évitons aussi un plan social. Quelques licenciements sont faits à la marge liés à quelques cas individuels problématiques.

Le groupe change de PDG et de conseil d’administration en 2005. Il est introduit en Bourse l’année suivante. Une augmentation de capital est réalisée. Une grosse ligne de crédit est mise à disposition par les banques pour des investissements.

Après deux années sans investissement, il faut maintenant investir. Il faut le faire vite et bien. Il faut montrer aux marchés financiers ce dont le groupe est capable.

Plusieurs centaines de millions d’euros d’investissement sont programmés dans les deux ans. L’argent est réservé aux divisions et lignes de produits rentables. La logique est que ce qui est rentable aujourd’hui le sera forcément demain. Les autres doivent continuer à se serrer la ceinture.

La frénésie d’investissement démarre. Les ressources humaines sont augmentées à la marge. On fait place aux jeunes parce que les vieux sont lents. Les retours sur investissement doivent tous être inférieurs à cinq ans. On n’écoute ni les ouvriers, ni les ingénieurs, ni les commerciaux. Quelques directeurs généraux et de division sont la fleur au fusil pour dépenser tout cet argent pour le groupe. Miraculeusement, tous les investissements ont des retours sur investissement de cinq ans maximum…enfin sur le papier.

La dernière phase d’investissement de l’usine de mes débuts revient à l’ordre du jour. Dans les coulisses, je sais qu’un retour sur investissement est impossible en cinq ans. Pourtant on y va à fond en dépensant le minimum pour gagner le maximum sur le papier toujours.

De désastre en désastre

Les hausses des matières premières portées par le boom économique de la Chine et la spéculation érodent les marges du groupe dès 2006. Pourtant aucun investissement sérieux d’économie d’énergie ou de matières premières n’est programmé.

On se focalise sur les grands plans où on vendra toujours plus et toujours plus cher. Il est prévu que la croissance soit infinie. La prudence des anciens est mise au placard où se trouvent effectivement quelques quinquagénaires.

L’année 2007 est terrible. Les premiers investissements ont été réalisés. Ils ne génèrent pas les retours prévus. Des millions commencent à être perdus sur de nombreux sites qui étaient pourtant florissant auparavant. C’est le cas de l’usine de mes débuts dont le budget d’investissement initial est fortement dépassé et qui enregistre de lourdes pertes d’exploitation chaque mois.

La panique commence à s’emparer de nos dirigeants. Ils craignent pour leur bonus et leur poste. Leur responsabilité sociétale est le cadet de leur souci.

Il faut faire quelque chose pour rassurer les marchés. Une action rapide et un bon plan de communication suffiront. Il est décidé à la hâte la fermeture de plusieurs usines et des plans de licenciement.

Dans la liste des usines figurent celle où je travaille. Pourtant les comptes de cette-dernière ont été redressés. Elle ne gagne certes pas d’argent essentiellement à cause des contributions qu’elle verse au groupe, mais elle n’en perd pas non plus. Qu’importe, il faut agir. On ferme. La décision est prise début septembre. La production est arrêtée fin octobre. Tout le personnel est licencié courant janvier y compris le directeur général, mon patron, qui avait trop de bon sens aux yeux de certains dirigeants. Mon contrat de détachement m’évite le licenciement. Je suis rapatrié en France. Pourtant j’ai perdu mon travail et tous mes collègues. C’est un choc et une blessure. Je suis abasourdi d’une telle stupidité, d’un tel manque de logique économique et de l’absence totale de respect des personnes.

Bien évidemment, ces décisions ne résolvent en rien les pertes récurrentes du groupe. En effet, les problèmes de fond sont toujours là à savoir l’inefficience totale des nombreux investissements réalisés trop vites.

En revanche, les bonus et les plans de stock-options atteignent des niveaux record en cette année 2007 bien que le groupe ne réalise quasiment aucun profit pour la première fois depuis que j’ai commencé à travailler pour cette entreprise.

Devant une telle débâcle et autant d’erreurs, le PDG est débarqué au début de l’année suivante. Il est remplacé par un vieux loup en interne pour assurer l’intérim sans faire de vague. En revanche, le conseil d’administration qui a pourtant poussé et approuvé tous ces investissements désastreux, reste en place. Les rouages de la politique sont merveilleux et excluent toute logique.

Changement de cap … vraiment ?

Au cours de l’année 2008, une nouvelle division est créée à partir de la scission d’une division existante. Cette division regroupe un beau paquet hétérogène d’entreprises achetées à prix d’or et en toute hâte entre 2006 et 2007. C’est une partie des fameux investissements devant donnés un retour sur investissement de 5 ans maximum. Cette nouvelle division perd 1 million d’euros par mois. Son directeur est choisi parmi la vieille école à savoir bon sens et vision industrielle à long terme.

Il devient mon patron puisqu’il me choisit pour devenir le directeur financier de la division. Une nouvelle équipe se forme. Ce challenge fait revenir la motivation. Cependant la situation est très difficile. Des plans de restructuration sont nécessaires. L’effectif de la division est réduit de 700 à 550 personnes. Les lignes de production sont rationalisées. Les cadres incompétents sont remerciés. La division est redressée malgré la crise : 4 millions de profits en 2009 contre 12 millions de pertes en 2008.

Entre temps, un nouveau PDG est arrivé à la tête du groupe. Il nous accompagne et nous soutient dans le redressement de cette division. Il semble avoir une bonne attitude d’industriel.

Malheureusement, c’est bien un de ces PDG de la nouvelle génération, un peu beaucoup mégalo avec plein de théories dans la tête et aussi un salaire bien plus élevé que celui de son prédécesseur. Il est surprenant de voir combien les entreprises peuvent dépenser en communication et en honoraires de consultants, tout en réduisant les investissements et les charges de R&D au minimum. Le bon sens est définitivement une relique du passé. Cela en hypothèque d’autant plus le futur.

Une nouvelle stratégie est décidée. La division à laquelle j’appartiens est alors mis en vente. Je vous laisse apprécier. Quatre ans auparavant, environ une centaine de millions d’euros ont été investis pour racheter des entreprises. Le retour sur investissement doit être rapide. Au bout de quelques mois, c’est un désastre financier qui perd un million d’euros par mois. Une nouvelle équipe est mise en place. Elle redresse la division pour mieux la vendre un an plus tard. Pendant ce temps, il n’y a ni investissements productifs, ni développements de nouveaux produits. La concurrence se comporte, au mieux comme nous, à savoir qu’elle achète et revends à long terme sachant que le long terme signifie désormais plusieurs mois et non plus plusieurs années ; au pire, en investissant et se développant à notre détriment.

Au cours du processus de vente, nous rencontrons des fonds d’investissement. Un en particulier semble avoir une vraie approche industrielle de création de valeur en investissant dans des entreprises pour une durée minimum de 8 ans. Au final, nous sommes revendus à un autre groupe également côté en Bourse qui surpaye cette division. Nous comprenons que les jeux de pouvoirs au sein des conseils d’administration ont été plus forts que les logiques économiques et le respect des personnes, encore une fois.

En 2011, le groupe fait de lourdes pertes. Pourtant un dividende exceptionnel est distribué. C’est en fait juste un enfumage pour les actionnaires, comme nous le verrons en conclusion, qui sert à masquer les plus grosses rémunérations jamais versées aux dirigeants au cours des dix dernières années.

Conclusion : 10 ans plus tard … les chiffres sont têtus

Entre 2002 et 2012, comment les chiffres ont évolué grâce à l’introduction en Bourse, aux super investissements et aux nouvelles stratégies ?

Source: http://www.les-crises.fr/insider-directeur-financier/