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L’orage est imminent, par Victor Davis Hanson

Sunday 30 October 2016 at 02:05

L’article cité par le Général Mark Milley dans son discours martial…

Une illustration de la préparation de populations à la guerre.

Source : Townhall, le 22/09/2016

Victor Davis Hanson | Publié le 22 septembre 2016

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Cet été, le président Obama jouait souvent au golf. Hillary Clinton et Donald Trump promettaient de laisser aller le monde. L’été semblait s’achever dans la torpeur et le monde paraissait plutôt calme.

L’été 1914 en Europe paraissait calme, lui aussi. Mais le 28 juillet, l’archiduc François-Ferdinand d’Autriche fut assassiné à Sarajevo par Gavrilo Princip avec l’aide de ses complices séparatistes serbes. Cet acte isolé a déclenché la Première Guerre mondiale.

Pendant l’été 1939, la plupart des observateurs pensaient qu’Adolf Hitler en avait enfin fini avec ses intimidations en série. On supposait que les politiques d’apaisement avaient permis de rassasier ses immenses appétits territoriaux. Mais, le 1er septembre, l’Allemagne nazie envahissait soudain la Pologne et déclenchait la Seconde Guerre mondiale, qui allait engloutir quelque 60 millions de vies.

Les guerres paraissent souvent venir de nulle part, alors que des événements imprévus transforment en embrasements planétaires des tensions qui couvent de longue date.

Les boutefeux sont souvent des agresseurs plus faibles qui croient naïvement que les nations plus puissantes qu’eux souhaitent la paix à tout prix et qu’elles ne réagiront pas à une agression opportuniste.

Malheureusement, notre tranquille fin d’été 2016 a dissimulé beaucoup de tensions latentes qui maintenant émergent, en grande partie en raison du désengagement des États-Unis qui seraient, paraît-il, fatigués.

La guerre, elle, à la différence des États, ne dort pas.

La Russie a massé des troupes à sa frontière avec l’Ukraine. Le président russe Vladimir Poutine semble croire que l’Europe est plongée dans le désarroi et il croit que la principale préoccupation du président Obama est de présenter des excuses aux étrangers pour les fautes passées des États-Unis. Poutine parie qu’au sein des puissances occidentales fatiguées, il ne s’en trouvera aucune pour pouvoir ou vouloir endiguer sa réintégration de l’Ukraine — ou ensuite des États baltes. Quel branché d’Amsterdam se soucie de ce qui pourrait arriver à la lointaine Kiev ?

L’Iran a échangé des otages américains contre une rançon. Il n’y a pas longtemps, un missile iranien a manqué de peu un porte-avions américain. Des Iraniens ont piraté un bateau américain et ont harcelé nos navires de guerre dans le golfe Persique. Téhéran promet régulièrement de détruire soit Israël, soit les États-Unis, soit les deux. C’est un drôle de dividende de paix de « l’accord avec l’Iran » !

La Corée du Nord n’est pas simplement délirante. Les récents essais nucléaires et tirs de missiles en direction du Japon donnent l’impression que l’homme fort de Corée du Nord, Kim Jong-Un, croit vraiment qu’il pourrait gagner une guerre − et obtenir ainsi d’encore plus grandes concessions de la part de l’Occident et de la part de ses voisins asiatiques.

De manière analogue, les islamistes radicaux semblent décidés à mener de nouvelles attaques en postulant que l’Occident ne répondra probablement pas par un déploiement de puissance écrasant. Le week-end dernier nous a confrontés à des explosions de bombes artisanales à Manhattan et dans le New Jersey, ainsi qu’à une attaque à l’arme blanche dans un centre commercial du Minnesota − et à la frustration des Américains.

L’Europe et les États-Unis ont été déstabilisés par un déferlement de migrants − principalement de jeunes hommes − venus du Moyen-Orient déchiré par la guerre. Le politiquement correct a figé les dirigeants occidentaux, les empêchant de ne serait-ce que formaliser la menace et, bien sûr, d’y répondre.

Pendant ce temps le gouvernement américain semble plus préoccupé par la fermeture du centre de détention de Guantanamo, par le souci qu’aucun représentant de l’État ne prononce les mots « terreur islamique » et par la diffusion de mises en garde des Américains contre tout excès dû à leurs préjugés supposés innés.

Les agresseurs sont également encouragés par d’importantes coupes dans le budget de la défense des États-Unis. Le canard boiteux de la présidence Obama, les politiques menées dans l’ombre et la division culturelle et raciale des États-Unis reflètent la lassitude des électeurs vis-à-vis des engagements internationaux.

Ce serait une erreur de croire que la guerre est impossible parce qu’elle ne bénéficie à personne, ou qu’elle est surannée en notre XXIe siècle si sophistiqué, ou qu’elle serait insensée dans un monde nucléarisé.

La nature humaine est immuable et reste irrationnelle. Le mal est éternel. Malheureusement, l’apaisement est souvent vu par les malfrats non comme de la magnanimité à charge de revanche mais comme de la timidité à exploiter.

Quelqu’un devra bientôt dire aux Nord-Coréens qu’un ordre mondial stable ne peut tolérer leurs tirs de missiles et essais nucléaires répétés.

Quelqu’un pourrait rappeler à Poutine que les anciennes Républiques soviétiques ont droit à l’auto-détermination.

Quelqu’un pourrait informer les Chinois que personne ne peut installer des îles artificielles et des bases militaires pour contrôler les voies maritimes commerciales.

Quelqu’un pourrait faire entendre aux terroristes islamistes qu’il y a une limite à la patience occidentale face à leurs bombardements permanents, leurs meurtres et leurs destructions.

Le problème est qu’il n’y a pas de « quelqu’un » (et sûrement pas les Nations Unies ou l’Union européenne) qui possède l’autorité et la puissance requises, en dehors des États-Unis. Mais pendant longtemps, les États-Unis ont accompli plus que leur part du maintien de l’ordre international, et leur peuple est las des coûteuses chasses aux dragons à l’étranger.

Le résultat, en cette date tardive, est que la thérapie lourde qui consisterait à restaurer la dissuasion à long terme est presque aussi dangereuse que la maladie du sempiternel apaisement à court terme.

Obama semble convaincu de pouvoir quitter ses fonctions avec l’aura d’un porteur de paix avant que ses brebis apaisées ne finissent par s’unir dans une réaction violente. Il nous a assuré que le monde n’avait jamais été aussi calme et paisible.

D’autres ont affirmé la même chose au cours des dernières semaines des paisibles étés 1914 et 1939.

Les nuages de la guerre s’accumulent. L’orage est imminent.

Source : Townhall, le 22/09/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Source: http://www.les-crises.fr/lorage-est-imminent-par-victor-davis-hanson/


Le projet de déclaration belge pour le CETA : ce que les Wallons ont obtenu

Saturday 29 October 2016 at 02:54

Comme vous l’avez vu, la Wallonie a cédé, mais en ayant fait avancer nos intérêts – comme quoi elle a pu faire ce que n’a pu faire la Commission…

Mais il faut maintenant que les 28 Parlements ratifient, on va voir, surtout aux Pays-Bas…

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Source : RTBF, Johanne Montay, 26-10-2016

Le projet de déclaration belge pour le CETA: ce que les Wallons ont obtenu - © Tous droits réservés

Le projet de déclaration belge pour le CETA: ce que les Wallons ont obtenu – © Tous droits réservés

Ils se démènent comme des diables, à nouveau réunis en comité de concertation depuis ce mercredi matin. C’est la pause jusqu’à 15 heures, mais ils ont bon espoir d’engranger un accord. Les ministres du gouvernement wallon PS-cdH pensent avoir obtenu un certain nombre d’acquis, notamment sur des thèmes particulièrement chers au cdH comme la défense de l’agriculture. Mais ils ne veulent pas acheter un chat dans un sac : tout devra être encore validé par les experts et les juristes, une fois que les textes seront déposés par la Commission et le Fédéral.

Voici les points essentiels :

  1. Clause de sauvegarde générale permettant à la Belgique ou une entité fédérée de se retirer du CETA : cette demande a été pleinement acceptée.
  2. Le mécanisme de règlement des différends doit évoluer vers une cour internationale publique. Cette demande est pleinement intégrée et des engagements clairs sont pris à cet égard. L’accès aux PME sera facilité.
  3. Dans le domaine agricole, des mécanismes de sauvegarde particuliers sont prévus pour les consommateurs et les agriculteurs permettant l’activation de mesures de protection et soutien, y compris lorsqu’un déséquilibre de marché est identifié pour un seul produit.
  4. Les services aux personnes au sens large (y compris associatif) et les mécanismes d’assurance sociale sont pleinement protégés et exclus du champ d’application du CETA.

Nous vous livrons en exclusivité le projet de Déclaration de la Belgique (Etat fédéral et entités fédérées) pour la signature du CETA.

Parmi les aménagements notables, les points suivants :

1. Au cas où l’une des entités fédérées informerait l’Etat fédéral de sa décision définitive et permanente de ne pas ratifier le CETA, l’Etat fédéral notifiera au Conseil au plus tard dans un délai d’un an à compter de la notification par ladite entité de l’impossibilité définitive et permanente pour la Belgique de ratifier le CETA. Les dispositions nécessaires seront prises conformément aux procédures de l’UE.

2. La Belgique a pris acte de ce que l’application provisoire du CETA ne s’étend pas à diverses dispositions du CETA, notamment en matière de protection d’investissement et de règlement des différends (ICS), conformément à la décision du Conseil relative à l’application provisoire du CETA. Elle a en outre pris acte du droit de chaque partie à mettre fin à l’application provisoire du CETA conformément à son article 30.7.

La Région flamande et la Communauté flamande saluent en particulier la déclaration conjointe de la Commission européenne et du Conseil de l’Union européenne à propos de l’Investment Court System.

3. Les autorités concernées procéderont, chacune pour ce qui les concerne, à intervalles réguliers à une évaluation des effets socio-économiques et environnementaux de l’application provisoire du CETA.

Si, sur base de leur analyse globale et substantielle des effets sociaux, économiques et environnementaux observés de l’application provisoire du CETA, l’une ou plusieurs d’entre elles notifient à l’Etat belge leur volonté définitive et permanente de mettre fin à cette application provisoire, l’Etat belge notifiera au Conseil, au plus tard dans un délai d’un an à compter de cette notification par la ou les entités concernées l’impossibilité définitive et permanente de la Belgique de ratifier le CETA. Les dispositions seront prises subséquemment en conformité avec les procédures de l’Union européenne.

4. La déclaration du Conseil et des Etats membres traitant des décisions du Comité conjoint du CETA en matière de coopération réglementaire pour des compétences relevant des Etats membres confirme que ces décisions devront être prises de commun accord par le Conseil et ses Etats-membres.

Dans ce contexte, les gouvernements des entités fédérées indiquent que, pour les matières relevant de leurs compétences exclusives ou partielles au sein du système constitutionnel belge, elles entendent soumettre toute coopération en matière de réglementation à l’accord préalable de leur Parlement, de même que toute décision réglementaire qui en découlerait.

5.  L’Etat fédéral ou une entité fédérée compétente en matière agricole se réserve le droit d’activer la clause de sauvegarde en cas de déséquilibre de marché, y compris lorsque ce déséquilibre est identifié pour un seul produit. Des seuils précis seront déterminés au conseil européen endéans les 12 mois qui suivent la signature du CETA déterminant ce que l’on entend par déséquilibre de marché.

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Source : RTBF, Johanne Montay, 26-10-2016

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Le combat n’est pas terminé ! par No-Transat

L’origine du combat

En 2011, lorsque nous lancions la plateforme No Transat ! pour alerter des dangers de possibles tractations politiques entre l’Union européenne et les états-Unis (tractations faites à la demande de puissantes multinationales), on pouvait nous prendre pour des illuminés (le TTIP n’avait pas encore d’existence officielle) ou de doux rêveurs (comment allions-nous intéresser l’opinion publique ET les acteurs politiques aux enjeux démocratiques, écologiques et sociaux de tels accords négociés en secret dans de hautes sphères ?).

En 2013, le lancement officiel des négociations sur le TTIP nous donnait raison sur le 1er point (non, nous n’étions pas des illuminés…) tandis que de nombreux mouvements sociaux – à commencer par l’Alliance D19-20 – décidaient d’entrer dans la danse militante contre l’austérité et le TTIP. Quant au CETA, le « petit » frère du TTIP, on doit sa découverte à la vigilance du CNCD. Tous ensemble, nous avons milité durant ces années pour faire sortir de l’ombre les enjeux citoyens de ces traités, sans jamais ménager ni notre peine intellectuelle (analyse et décryptage des textes) ni notre temps militant (conférences et formations, actions et manifestations, auditions parlementaires…). Récemment, le collectif www.stopttip.be a vu le jour, incluant en son sein tout ce que la société civile belge (francophone et néerlandophone) compte comme organisations militantes (syndicats, mutuelles, ONG, asbl défendant les droits de l’homme, le social ou l’environnement).

Oui mais… Tout ça pour conduire à quoi ?

Quels résultats concrets ?

La 1ère avancée obtenue par la mobilisation anti-CETA/TTIP fut de convaincre la presse d’arrêter de copier/coller les déclarations lénifiantes de la Commission européenne, pour laisser place à quelques arguments contradictoires. Certes, les médias n’ont jamais vraiment parlé de nos griefs à l’encontre du shopping législatif ou de la coopération réglementaire prévue par le CETA et le TTIP, mais ils ont quand même abondamment parlé du problème des Tribunaux d’arbitrage privés, découvert le principe des listes négatives (libéralisant par défaut tout secteur non protégé par un gouvernement au moment de la signature de l’accord) et donné du crédit aux risques de nivellement par le bas de normes sociales, sanitaires et écologiques.

Une 2ème avancée obtenue par la mobilisation anti-CETA/TTIP fut d’imposer à la Commission européenne une première réforme – certes cosmétique – des Tribunaux d’arbitrage, le RDIE (Règlements des Différends Investisseurs-états) laissant place à l’ICS (Investment Court System) avec davantage de transparence dans la procédure et la possibilité d’aller en appel des décisions. Le système n’en reste pas moins une « justice sur mesure » trop favorable aux multinationales.

Autre victoire sur la Commission européenne : poussés dans le dos par leur opinion publique, plusieurs états (dont l’Allemagne) ont fait savoir qu’ils voulaient que le CETA soit reconnu comme un accord « mixte » (c’est-à-dire mettant en jeu des compétences européennes ET nationales). La mort dans l’âme, la Commission européenne s’est résignée à cette proposition (qui impliquait ipso facto de prendre en compte l’avis des Parlements nationaux) sans s’imaginer un seul instant que cela pourrait bloquer la procédure de ratification dès son arrivée en Conseil européen. Mais voilà : alors que l’unanimité des états-membres était requise pour dire oui à cet accord mixte, plusieurs entités fédérées belges (Parlement wallon, Parlement bruxellois, Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles) ont fait savoir que leur opposition au CETA, exprimée de longue date, n’avait pas changé d’un iota.  Et ce fut l’ouverture d’un psychodrame…

Côté officiel, les pleurs et lamentations ont côtoyé les pressions, ultimatums et autres couteaux sous la gorge de l’entité honnie entre toutes : le gouvernement wallon. Pour nous, ce fut une sacrée victoire : alors que les traités bilatéraux d’investissements passaient généralement le cap du Conseil européen comme une lettre à la poste, un gouvernement élu s’opposait enfin à la ratification du CETA ! Et provoquait un débat public qui a fait la une des journaux du monde entier… C’est, en soi, une immense victoire pour nous tous qui mobilisons contre le CETA, TTIP et autres TISA depuis des années. 

Mais, aujourd’hui, que penser de l’accord « CETA bis » négocié par la Région wallonne avec le Canada, la Commission européenne et les autres entités décisionnelles belges ?

Qu’a obtenu le gouvernement wallon (et les autres entités fédérées) ?

Négocié par le gouvernement wallon avec le Canada, un « Instrument interprétatif commun » va être annexé au CETA. Valable pour toutes les parties prenantes de l’accord, ce document important va limiter la casse « libéralisation / privatisation / mise en concurrence » dans des secteurs importants : marchés publics, secteur de l’eau, services publics et (pour la seule Belgique) sécurité sociale. Dans tous ces domaines, le gouvernement wallon semble avoir obtenu[1] de sérieuses garanties pour les autorités publiques à pouvoir réguler (y compris en renationalisant des secteurs privatisés) en fonction de l’intérêt général. De même, les tristement célèbres Tribunaux d’arbitrage privés vont devoir être revus, dans le but d’en faire des Tribunaux pleinement publics, priés de ne pas accepter les plaintes abusives des multinationales (face à des législations sociales ou environnementales). Si on doit saluer cette avancée, le problème de base n’a pas changé : on crée un système judiciaire spécialement dédié aux conflits états-Investisseurs, et seuls ces derniers peuvent déposer plainte en prenant pour référence juridique les traités commerciaux internationaux (dont l’ADN est bien plus favorable aux investisseurs que celui des Constitutions nationales). Enfin, l’accord belgo-belge stipule que la Belgique demandera à la Cour de Justice européenne de se prononcer sur la légalité des nouvelles procédures d’arbitrage, tandis que les Régions pourront imposer à la Belgique de ne pas ratifier définitivement le CETA en cas d’évaluation négative dans les mois ou les années qui viennent.

Que reste-t-il comme problèmes ?

Ces aménagements du texte ne sont pas rien. Ce sont des « avancées » qui limitent sérieusement la « casse sociale » initialement promise par le CETA. Ce dernier est-il pour autant un bon accord politique qu’on devrait s’empresser de ratifier ? Plusieurs raisons nous poussent à dire « pas si vite ! ».

Premièrement, c’est durant une petite dizaine de jours que les négociateurs bruxellois et wallons ont cherché à aménager un texte négocié durant plusieurs années et… long de 1.600 pages. Il est difficile, dans un tel contexte, de modifier en profondeur les lignes de force initiales du CETA.

Sans rentrer dans tous les détails, on peut dire que les enjeux suivants restent problématiques :

1)      Le « shopping législatif » sort renforcé : aujourd’hui, le marché unique européen met déjà en concurrence les systèmes fiscaux, sociaux et environnementaux non harmonisés à l’échelle européenne. Plutôt que de solutionner ce problème crucial en optant (par exemple) pour une harmonisation fiscale, l’Union européenne va élargir le shopping législatif au Canada en ratifiant le CETA (et à d’autres pays au fur et à mesure que de nouveaux accords de « libre-échange » seront engrangés) ;

2)      Le problème des listes négatives demeure : si certains domaines importants (sécurité sociale, services publics, marchés publics) ont été préservés grâce aux négociations imposées par la Région wallonne, il n’en reste pas moins que le principe des listes négatives (qui font de la libéralisation et de la mise en concurrence le principe de fonctionnement « par défaut » de l’économie) reste acté dans le CETA. Ce qui constitue un important recul par rapport aux anciens traités internationaux ;

3)      La coopération réglementaire fait toujours du CETA un accord vivant : même si elle n’a pas stricto sensu force de loi, la coopération réglementaire ouvre une sorte de droit de négociation permanent à des instances technocratiques UE-Canada dans de nombreux domaines ayant un impact sur l’emploi, l’environnement ou notre alimentation. Qui plus est, des principes telle que l’évaluation « coût-bénéfice » des « obstacles non-tarifaires » (sic) au commerce ou la volonté de traquer les « coûts inutiles » de recherches scientifiques menées séparément en Europe et au Canada poussent clairement à confier davantage d’initiatives, de discussions et de négociations à des instances transatlantiques, opaques et non élues, loin de tout contrôle démocratique ;

4)      L’enjeu climatique : alors qu’il faudrait réduire de toute urgence l’empreinte écologique de l’humanité et le réchauffement climatique (qui créent déjà des drames sociaux et des réfugiés climatiques), le CETA continue d’internationaliser des secteurs d’activités (notamment l’agriculture) au détriment de l’emploi local et du contrôle des émissions de CO2. C’est, en soi, parfaitement absurde !

Quel bilan, quel avenir ?

On doit saluer le travail fait par les Parlements wallon et de la Fédération Wallonie-Bruxelles, et les gouvernements qui s’en sont faits les porte-parole, car ils ont été les seuls à oser mettre le doigt sur certaines « questions qui fâchent », quitte à s’attirer moult critiques et pressions diplomatiques, affairistes, médiatiques…

À l’inverse, les « avancées obtenues » n’empêchent pas le CETA de porter certains défauts et déséquilibres inhérents à son acte de naissance (des années de négociations opaques, menées par des technocrates à la demande de firmes multinationales).

En 2011, nous avons été parmi les premiers à lancer l’alerte.

Aujourd’hui, nous continuerons à faire un travail d’analyse et de vulgarisation, notamment pour expliquer de façon simple et accessible les enjeux démocratiques, écologiques et sociaux de ce « CETA bis ».

Demain, avec toutes celles et tous ceux qui le désirent, nous continuerons à mobiliser pour obtenir davantage de changements et de meilleures réformes dans la manière d’organiser le commerce mondial. Ce qui, en l’état, continue de passer par le refus des CETA, TISA et autres TTIP.


[1] La formulation se veut prudente… étant donné le peu de temps pour prendre connaissance des documents (et leur articulation juridique avec le Traité en lui-même…).

Source : No-Transat

Faut-il avoir peur du Ceta ? 6 exemples concrets pour vous faire une idée

On lire aussi ceci sur l’Obs

LE CETA NE FERA PAS JURISPRUDENCE DANS LE SENS SOUHAITÉ ! par François Leclerc

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Accord belge sur le CETA : quelles leçons pour les sociaux-démocrates?

À lire chez Blog Mediapart

 

Source: http://www.les-crises.fr/le-projet-de-declaration-belge-pour-le-ceta-ce-que-les-wallons-ont-obtenu-par-johanne-montay/


Se distraire à en mourir (BD : Aldous Huxley & George Orwell par Neil Postman)

Saturday 29 October 2016 at 01:42

Source : Partage-le.com, traduit par Jessica Aubin, le 26 Août 2016.

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Source: http://www.les-crises.fr/se-distraire-a-en-mourir-bd-aldous-huxley-george-orwell-par-neil-postman/


Racines historiques profondes des valeurs, des institutions et de l’identité européennes, par Peter Turchin

Saturday 29 October 2016 at 00:38

Source : euromind, le 16/09/2016

Peter Turchin

Le grand projet d’intégration européenne est un échec. Les signes de dysfonctionnement abondent : de la débâcle de la dette grecque à la crise de l’immigration et maintenant le “Brexit”. La tendance à la désintégration au niveau européen se reflète dans les États constituants : pensez aux envies d’indépendance des Écossais et des Catalans, ou à l’incapacité de la Belgique à former un gouvernement national depuis des années. Dans un renversement spectaculaire de la tendance d’Après-guerre, les Européens ont apparemment perdu leur capacité à coopérer au travers des différentes entités nationales et entre les différents groupes ethniques.

Pour mettre cet échec en perspective, amener les gens à coopérer dans de très grands groupes comme l’UE est difficile. La science qui tente de comprendre comment les humains peuvent être en mesure de former d’énormes sociétés coopératives comptant des dizaines ou des centaines de millions de membres en est encore à ses balbutiements. Les sociologues ne disposent pas vraiment d’expériences impliquant des centaines de millions de personnes. Néanmoins, beaucoup de progrès ont été accomplis en adoptant une approche scientifique pour l’analyse des données historiques. [Voir Turchin, Peter. 2016. Ultrasociety: How 10,000 Years of War Made Humans the Greatest Cooperators on Earth (Comment 10 000 ans de guerre ont fait des Hommes les plus grands coopérateurs sur Terre), Chaplin, CT: Beresta Books.]

Ce que nous avons appris nous montre que la capacité des gens à former de grands groupes coopératifs est conditionnée par l’Histoire lointaine – des événements qui ont eu lieu  des centaines et parfois des milliers d’années auparavant. Les analyses historiques ont identifié un facteur particulièrement important : l’influence durable du passé et des empires maintenant disparus depuis longtemps. Pourquoi ?

Une coopération réussie exige que les gens partagent des valeurs, des institutions et une identité sociale. Les valeurs nous disent pourquoi nous voulons coopérer : quel bien public voulons-nous produire collectivement ? Les normes et les institutions nous disent comment organiser cette coopération. L’identité partagée aide les gens à œuvrer ensemble pour surmonter les obstacles à la coopération (comme la tentation de profiter des efforts des autres). A titre d’exemple, le premier principe de la gestion de l’action coopérative, identifié par le politologue et prix Nobel Elinor Ostrom, était de définir des limites claires pour les groupes. Des valeurs, institutions et identités incompatibles condamnent souvent tout effort de coopération avant même qu’il puisse se développer.

L’expérience historique de la vie dans un même État se traduit souvent par la diffusion de valeurs, d’institutions et d’identités communes au sein de groupes initialement disparates. Des éléments de culture changent progressivement, y compris ceux qui influent sur la coopération, mais souvent persistent encore longtemps après la désintégration de l’empire.

Nous pouvons utiliser les données de la World Values Survey (WVS) pour visualiser ces « fantômes des empires passés ». Depuis 1981, la WVS a recueilli des données sur les croyances des gens dans de nombreux pays. Les chercheurs ont découvert qu’une grande partie des variantes entre les populations des différents pays peuvent être définies en seulement deux dimensions : (1) les valeurs traditionnelles par rapport à des valeurs laïques et rationnelles, et (2) les valeurs de survie par rapport aux valeurs d’expression personnelle. Lorsque les valeurs de chaque pays de l’échantillon sont représentées dans un espace à deux dimensions définies par ces deux axes, nous obtenons ce qu’on appelle la carte culturelle Inglehart-Welzel. J’ai pris les données du WVS pour les pays européens de la dernière (sixième) enquête et mis la légende en fonction de l’histoire partagée au sein des anciens États : les empires carolingien, des Habsbourg, ottoman, britannique et russe. « Nordique » se réfère aux empires danois et suédois (attendu que le Danemark à certaines périodes de l’histoire incluait la Norvège, l’Islande et une partie de la Suède, tandis que la Suède incluait la Finlande).

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Comme le montre la figure, les pays modernes, qui partagent le même passé et le même empire disparu depuis longtemps, sont groupés très étroitement. Il y a peu de chevauchements. Et quand il y en a, cela peut refléter l’influence d’empires encore plus anciens. Par exemple, l’Espagne, l’Italie, la Grèce et les Balkans étaient tous au cœur de l’Empire romain.

Le groupe des pays qui faisaient partie de l’Empire carolingien (qui a atteint son apogée en 800 sous Charlemagne) est d’un intérêt particulier. Il est remarquable que le groupe initial de six États européens qui ont signé en 1957 le traité instituant la Communauté Economique Européenne, précurseur de l’Union européenne (France, Allemagne, Italie et Benelux), étaient également au cœur de l’empire de Charlemagne.

Ce n’est pas une coïncidence. L’empire carolingien était la forme embryonnaire de ce que nous appelons aujourd’hui la civilisation occidentale, à savoir la majeure partie de la chrétienté latine, cette partie de l’Europe médiévale qui était catholique, plutôt qu’orthodoxe ou non-chrétienne, composée des États qui ont succédé aux Carolingiens (par exemple, la France et l’Empire allemand, aussi appelé « saint Empire romain »). Plus tard, à ce noyau, on a ajouté des régions qui ont été conquises par des non-chrétiens (par exemple, la plus grande partie de l’Espagne, la Prusse) ou des terres anciennement carolingiennes converties (par exemple, le Danemark et la Pologne). Bien que jamais unis politiquement après l’éclatement de l’Empire carolingien, les habitants de la chrétienté latine savaient qu’ils partageaient un certain sens supranational. Ils étaient unis par leur foi commune, dirigée par le pape à Rome, par une culture partagée et par le langage commun de la littérature, de la liturgie, et de la diplomatie internationale latine. Comme l’historien Robert Bartlett nous le dit dans The Making of Europe: Conquest, Colonization and Cultural Change, 950-1350, les étrangers étaient également conscients de cette identité supranationale, et désignaient les chrétiens latins sous le nom de “Francs” (“Faranga” en arabe, “Fraggoi” en grec). Le ménestrel Ambroise a écrit à propos de la première Croisade : « Quand la Syrie a été reprise dans une autre guerre et Antioche assiégée, l’une de ces grandes guerres et ces combats contre les Turcs et les mécréants, dont beaucoup d’entre eux ont été abattus, il n’y avait pas de conspirations ou de querelles, personne ne demandait qui était Normand ou Français, qui était Poitevin ou Breton, qui était du Maine ou de Bourgogne, qui était Flamand ou Anglais… tous ont été appelés « Francs », qu’ils fussent bruns ou blonds ou roux ou blancs. » La chrétienté latine a été le précurseur direct de la civilisation occidentale, et même le schisme religieux de la Réforme, malgré le sang versé, s’est avéré n’être qu’une querelle de famille. Il n’a pas détruit l’identité globale dont les racines remontent aux Carolingiens, et qui a servi de base pour le projet d’unification européenne actuelle. [Pour en savoir plus sur cette histoire, voir Turchin, Peter. 2006. War and Peace and War: The Life Cycles of Imperial Nations. NY: Pi Press.]

Rétrospectivement, cependant, l’expansion bien trop rapide de l’UE à partir du groupe de base des six pour arriver à 28 membres a clairement contribué à son dysfonctionnement. Premièrement parce qu’il est plus facile à six personnes (ou six chefs d’État) de se mettre d’accord sur une façon de procéder, que de le faire à vingt-huit. Deuxièmement, et tout aussi important, l’expansion au-delà du noyau carolingien (les cercles rouge dans la figure) a réuni des gens (et des politiciens) de diverses cultures, détenant des valeurs différentes, et prenant des chemins incompatibles avec la coopération. Ceci peut être vu dans la façon dont les cercles représentant les 22 pays supplémentaires sont largement dispersés dans la figure. Un tel décalage dans les normes et les institutions a créé des obstacles supplémentaires à une action collective efficace.

L’intégration européenne serait-elle mieux servie par une approche « modulaire » plus progressive ? Par exemple, les pays nordiques ont déjà leur propre « noyau d’intégration », le Conseil nordique. Le groupe Visegrad (Pologne, Hongrie, Slovaquie et République tchèque) en est un autre. Peut-être l’UE fonctionnerait-elle mieux comme ensemble imbriqué de ces groupes, plutôt qu’en étant un seul vaste groupe qui repose sur des arrangements informels entre les États les plus puissants ?

Dans un article récemment publié dans la revue scientifique internationale Nature, [Turchin, Peter. 2016. Mine the past for Patterns. Nature 535: 488-489.] je demandais davantage de recherches pour étudier ces pistes, de manière empirique et systématique, en utilisant de nombreuses bases de données historiques  qui analysent méticuleusement le dossier historique (par exemple, voir Seshat: Global History Databank). Voici quelques-unes des questions que nous pourrions poser : quels arrangements et quelles institutions politiques administratives ont aidé la coopération dans les grands empires (qui ont souvent commencé comme des confédérations), tels que Rome, ou la Confédération Maratha, aux États-Unis ? Que pouvons-nous apprendre du sort de l’Empire des Habsbourg, que nous considérons comme une tentative antérieure (qui a échoué) d’« Union européenne », mis en place par une série de mariages entre dynasties ? Est-ce qu’une construction graduelle et progressive aurait pour résultat une union plus durable ? Avec quel type de hiérarchie les unités politiques fonctionnent-elles le mieux : l’horizontale avec un seul niveau, ou l’imbriquée, à plusieurs niveaux ? Quelle est l’importance du sentiment d’identité pour préserver l’unité de grands groupes humains ?

C’est une tendance marquée chez les décideurs politiques de considérer les crises économiques et politiques actuelles comme si elles étaient totalement sans précédent, ce qui les conduit à répéter les vieilles erreurs. Mais alors que nous choisissons d’ignorer les leçons de l’Histoire, l’Histoire, elle, ne nous ignore pas.

Source : euromind, le 16/09/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Source: http://www.les-crises.fr/racines-historiques-profondes-des-valeurs-des-institutions-et-de-lidentite-europeennes-par-peter-turchin/


L’artisan de la guerre d’Irak exprime son soulagement de voir que le Brexit a détourné l’attention de l’enquête sur le rôle de la Grande Bretagne en Irak

Saturday 29 October 2016 at 00:01

Source : The Intercept, le 13/09/2016

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Zaid Jilani

Le 13 septembre 2016

Des emails récemment divulgués révèlent comment un des grands artisans anglais de la guerre contre l’Irak a déclaré être soulagé que le vote du Brexit pour quitter l’UE réduise la couverture des médias sur les résultats dévastateurs de l’enquête concernant le rôle de la Grande Bretagne dans cette guerre.

Le 4 juillet, l’ex-ministre des Affaires étrangères Jack Straw a écrit à l’ex-Secrétaire d’État américain Colin Powell pour évoquer la prochaine publication du rapport Chilcot, un document qui détaille l’enquête du gouvernement britannique. Le rapport explore, entre autres, l’ampleur de l’implication et du soutien britannique à la guerre menée par les États-Unis en Irak.

Anticipant la couverture médiatique à venir, Straw a demandé à Powell de relire un premier brouillon de déclaration sous la forme d’un document Word. Il écrivait que le seul effet positif du Brexit serait, à court terme, de réduire l’intérêt porté au rapport Chilcot, même si cela n’empêcherait pas de le placer en situation inconfortable lors de sa publication.

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——-Forwarded message——-

De: Jack Straw

Date: Lundi 4 juillet 2016, 7:36 AM

Sujet: Confidentiel, Chilcot 6 juillet

À: CP

Cher Colin,

J’espère qu’Alma et toi vous portez bien.

Comme vous le savez certainement, Chilcot publie ce mercredi à 11:00 BST [British Summer Time, NdT] (04:00 ET) [Eastern Time – Est américain, NdT]. J’ai une bonne idée de ce qu’il contient – et je serais heureux d’en discuter avec toi, si cela peut être utile. S’il te plaît, tiens-moi informé et dis-moi quand ce serait possible de te téléphoner. Toutefois, je ne verrai pas le rapport avant 08:00 BST, soit juste trois heures avant sa publication. Il comprend 2 600 000 mots, 15 gros volumes. Le résumé fait plus de 100 pages.

Je joins un document avec ce que j’ai déjà pu glaner, et ceci est bien évidemment sujet à modifications quand je lirai le vrai rapport. Mais, comme tu es mentionné dans mon ébauche, j’ai pensé que tu devrais le lire. Si tu as des commentaires sur le sujet, je serais très heureux d’en prendre connaissance. Je pense aussi l’envoyer à Condi [Condoleeza Rice, NdT] – OK ?

Entretemps, comme tu as vu, la politique en Angleterre est dans une phase des plus extraordinaires, je n’ai jamais vu cela. La seule bonne chose à propos du Brexit c’est que cela détourne l’attention des médias de Chilcot. Mais cela ne changera rien au malaise le jour de la publication.

Amicalement

Jack.

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Powelll a dit à Straw qu’il devrait également partager cette déclaration avec Condoleeza Rice et qu’il contacterait Richard Armitage, deux autres responsables du gouvernement Bush qui étaient impliqués dans la planification et l’exécution de la guerre.

Il s’est montré sceptique vis-à-vis d’une partie de la déclaration de Straw qui affirmait qu’une résolution supplémentaire des Nations Unies préalable au conflit aurait évité l’invasion. Il a écrit à Straw « Je ne peux être ni pour ni contre ton jugement comme quoi une seconde résolution aurait empêché le conflit. J’en doute, mais je ne sais pas. » (Dans la déclaration finale de Straw à la presse, cette affirmation est demeurée.)

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De: CP<>

Envoyé le: Lundi 4 juillet 2016 08:10:16-0400

À: Jack Straw <>

Sujet: Re: Confidentiel, Chilcot 6 juillet

Merci, Jack. Je le passerai aussi à Armitage. Ça ne me gêne pas que tu fasses référence à moi au sujet de la décision de Bremer. Bremer soutiendrait que la décision était la bonne et qu’elle était approuvée par Rumsfeld. Bremer pense que nous tous étions au courant. Ce n’est pas le cas. Rumsfeld, Feith et compagnie ont des versions différentes. Les pontes militaires et de l’agence étaient également surpris. Je pense que tu devrais aussi le montrer à Condi. Je regarderai dans son livre pour voir ce qu’elle a écrit.

Je ne peux être ni pour ni contre quand tu juges qu’une seconde résolution aurait prévenu le conflit. J’en doute, mais je n’en sais rien.

Je suis à la maison aujourd’hui jusqu’à environ 17 heures (heure de la côte Est). Je reste ici toute la journée de mardi. Je ne suis pas sûr qu’il y ait quelque chose à discuter entre nous. Je n’ai pas d’information sur Chilcot et on n’en parle pas dans nos médias. Si tu veux appeler, envoie un courriel d’abord pour être sûr que je ne sois pas sorti.

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Près d’un mois plus tard, le 3 août, Powell envoya un mail à Straw lui disant que le rapport Chilcot « n’a pas donné grand-chose ici » et qu’il supposait que l’enquête s’était simplement « évanouie ».

« Oui, l’affaire Chilcot a complètement disparu ici aussi. C’était désagréable sur le moment mais presque toute l’attention s’est portée sur Tony [Blair], » a répondu Straw. Il a noté que « il y a quelques trucs à propos de familles de soldats tués en Irak qui essaient de monter un procès contre Tony sur cette base, mais il est difficile d’envisager comment ça pourrait marcher. »

Il a vite changé de sujet, en demandant à Powell s’il allait venir à Londres bientôt. « J’ai rencontré quelqu’un dernièrement qui t’a entendu en conférence et qui pensait que tu étais sensationnel, » a fanfaronné Straw.

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Cher Colin. Merci beaucoup ! Mais qu’est-ce que c’est que cette affaire de “vieille branche”, de la part de quelqu’un qui aura 80 ans en avril prochain ? (La seule réponse d’Alice à ça est que tu “les portes vraiment bien” !).

Oui, l’affaire Chilcot a complètement disparu ici aussi. C’était désagréable sur le moment mais presque toute l’attention était sur Tony.

Mais même pour lui c’est déjà passé. Il y a quelques trucs à propos de familles de soldats tués en Irak qui essaient de monter un procès contre Tony sur cette base mais il est difficile d’envisager comment ça pourrait marcher.

Est-ce que tu prévois de venir à Londres ? J’ai rencontré quelqu’un dernièrement qui t’a entendu en conférence et qui pensait que tu étais sensationnel.

Amitiés d’Alice de HG et moi, à Alma et toi.

Jack

Envoyé depuis mon smartphone Samsung Galaxy

——–message original——–

De: CP <>

Date: 03/08/2016 11:22 (GMT+00)

À: Jack Straw <>

Sujet: Hey

Bon anniversaire vieille branche. Tu as été bien silencieux depuis le Brexit. Je suppose que le rapport a disparu sous l’avalanche des autres nouvelles. Ça n’a pas donné grand-chose ici. Parlé beaucoup de Tony pendant un court moment. Amitiés à Alice de HG. Colin

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Les courriels privés de Powell ont été dévoilés par DCLeaks.com, un site web qui, par le passé, a diffusé des courriels dérobés de personnalités américaines politiques et militaires. DCLeaks est en relation avec Guccifer 2.0, un hacker dont beaucoup affirment qu’il est lié aux services de renseignement russes. DCLeaks a donné accès aux courriels de Powell à certains journalistes mardi, dont The Intercept.

Photo du haut : Jack Straw et Colin Powell à Camp David en mars 2003.

Source : The Intercept, le 13/09/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Source: http://www.les-crises.fr/lartisan-de-la-guerre-dirak-exprime-son-soulagement-de-voir-que-le-brexit-a-detourne-lattention/


Pourquoi l’“émodiplomatie” française n’est ni crédible, ni constructive, par Maxime Chaix

Friday 28 October 2016 at 00:40

Source : Blog Mediapart, Maxime Chaix, 26-10-2016

Depuis les Printemps arabes, le moralisme diplomatique à géométrie variable de Nicolas Sarkozy et de son successeur s’est imposé dans la politique étrangère française, en particulier à l’égard de l’« axe chiite » (sous Sarkozy) et de la Russie (sous Hollande).

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Depuis les Printemps arabes, le moralisme diplomatique à géométrie variable de Nicolas Sarkozy et de son successeur s’est imposé dans la politique étrangère française, en particulier à l’égard de l’« axe chiite » (sous Sarkozy) et de la Russie (sous Hollande). Justifiées par le pilonnage et le siège d’Alep-Est par les forces de Bachar el-Assad et leurs alliés russes, les récentes hésitations et menaces de l’Exécutif français contre Vladimir Poutine en sont un exemple paroxystique, tandis que la France et ses alliés soutiennent clandestinement des rebelles islamistes en Syrie, et qu’ils appuient la « coalition arabe » qui bombarde avec des armes occidentales des milliers de civils yéménites depuis plus d’un an et demi – avec des conséquences humanitaires désastreuses. Cette diplomatie de l’indignation sélective est irrationnelle et contre-productive, pour ne pas dire irresponsable et contraire à nos intérêts nationaux, en ce qu’elle cherche à satisfaire en priorité les objectifs maximalistes de nos alliés pétromonarchiquesisraéliens et américains, en particulier ceux des néoconservateurs. Nous pourrions la qualifier d’« émodiplomatie », une contre-politique étrangère de l’émotionnel qui nie le réel, et dont l’une des principales figures est la députée PS Élisabeth Guigou.

Régis Le Sommier face à Élisabeth Guigou : des vérités dérangeantes pour l’État français

Récemment, dans l’émission Ça vous regarde d’LCP, le grand reporter Régis Le Sommiers’est risqué à évoquer ouvertement la politique clandestine de la France en Syrie, suscitant l’indignation puis le déni de cette influente parlementaire. En effet, le directeur adjoint de Paris Match – qui revient d’Alep-Ouest en rapportant que sa population subit quotidiennement les attaques de l’opposition –, a déclaré durant cette émission avoir « du mal à comprendre avec le gouvernement français [ce que l’on] va chercher comme rebelles [à soutenir]. La plupart des rebelles modérés sont partis avec les Turcs [pour les] aider dans leur offensive contre les Kurdes », soulignant que les combattants retranchés à Alep-Est sont donc « essentiellement des islamistes ». Lorsqu’Élisabeth Guigou confirma ce fait, elle avança que la radicalisation des rebelles était due aux actions militaires du gouvernement syrien et de ses alliés. Régis Le Sommier lui répondit que ces opposants extrémistes étaient financés par « l’argent de l’Arabie saoudite et puis aussi aidés par les Français, quelque part. Voilà. Cette radicalisation, en leur donnant des armes en plus, en leur permettant de mener une lutte jusqu’au bout, on a quand même largement favorisé cette guerre civile syrienne, dont on est [co-]responsable, et dont on paye les conséquences avec le flux de réfugiés aujourd’hui ». Cette prise de position de Régis Le Sommier tranche avec les opinions de la majorité des journalistes français, qui désignent fréquemment Bachar el-Assad et ses alliés comme les principaux responsables du désastre syrien, et qui refoulent l’implication clandestine de l’État français et de ses alliés occidentaux dans ce conflit.

Manifestement indignée par ces propos, Élisabeth Guigou déplora inexplicablement que « l’on saute au Yémen ! » Régis Le Sommier lui répondit qu’il ne parlait pas du conflit yéménite, mais bel et bien de la guerre en Syrie, rappelant que « nos alliés » d’Arabie saoudite avaient « largement mis [leurs] mains dans la guerre civile syrienne en armant les rebelles, c’est une réalité ». Après s’être agacée du fait qu’on lui coupait la parole, Élisabeth Guigou démentit les arguments de Régis Le Sommier, en prétendant que l’État français n’« est pas là à chercher des [rebelles à aider], à soutenir un camp contre l’autre ; on est là à chercher la paix, et chercher la paix, on ne demande qu’une chose, c’est qu’il puisse y avoir à la fois un dialogue, mais un dialogue responsable, et qu’on arrête les bombardements, et qu’on ait un cessez-le-feu, et qu’on aille sortir ces malheureux [civils d’Alep-Est], et qu’on organise des couloirs humanitaires, et évidemment que les discussions (…) doivent aussi avoir lieu avec Monsieur Poutine, mais encore faut-il qu’il soit ouvert à la discussion, et malheureusement, malheureusement, ça ne se passe pas comme ça ».

Derrière le déni de Madame Guigou, le jeu trouble de la France vis-à-vis des rebelles en Syrie

Dans cet argumentaire, Élisabeth Guigou a omis quelques réalités dérangeantes qu’il semble nécessaire de rappeler. Tout d’abord, elle nia le fait que le gouvernement français appuie « un camp contre l’autre » dans le conflit syrien. Pourtant, François Hollande a lui-même reconnu en août 2014 qu’il avait ordonné à ses services d’armer ce qu’il nomma la « rébellion syrienne démocratique », malgré le risque avéré que ces armements tombent dans de mauvaises mains. En décembre 2015, l’auteur de ces lignes avait interrogé le député LR et ancien juge antiterroriste Alain Marsaud sur la politique clandestine de la France en Syrie. Ce dernier avait alors déclaré sans ambages qu’« il n’est pas sérieusement contesté qu’à un moment ou un autre l’État français a facilité les actions d’al-Nosra qui, je vous le rappelle, est une filiale d’al-Qaïda [en Syrie]. J’ai eu l’occasion de montrer à l’Assemblée Nationale des photos de combattants d’al-Nosra en possession de fusils d’assaut français. Il n’y avait bien évidemment aucune volonté du gouvernement français de voir mis en évidence une telle collaboration avec un groupe terroriste. Ainsi fut rejetée toute idée d’enquête parlementaire. » Récemment interrogé sur cette question, le député PS Gérard Bapt me confirma un « soutien clandestin de l’État français en faveur des différentes mouvances islamistes en Syrie, au regard de la porosité et de la proximité entre ces groupes alliés sur le terrain. Or, l’aide française aux rebelles en Syrie, et plus généralement le soutien occidental en leur faveur, se sont poursuivis y compris après les attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Casher, pourtant revendiqués par al-Qaïda. »

En décembre 2012, le ministre des Affaires étrangères français Laurent Fabius relaya les arguments des alliés pétromonarchiques de la France, déclarant que le Front al-Nosra faisait du « bon boulot sur le terrain », alors que le Département d’État plaçait cette milice sur la liste onusienne des organisations terroristes. Cette démarche de la diplomatie américaine était en totale contradiction avec la politique clandestine de la CIA et de ses partenaires occidentaux et proche-orientaux, qui soutenaient depuis janvier 2012 le Front al-Nosra en Syrie, c’est-à-dire bien avant le déclenchement de l’opération Timber Sycamore au printemps 2013. Relayée par le journal Le Monde, cette déclaration stupéfiante du locataire du Quai d’Orsay sur le « bon boulot » de la branche syrienne d’al-Qaïda ne fut pas reprise dans la presse francophone. Elle avait été prononcée par Laurent Fabius alors que l’État Islamique d’Irak (EII), qui allait s’autoproclamer « califat » en juin 2014 après la prise de Mossoul, faisait partie intégrante d’al-Nosra. En avril 2013, cette organisation et l’EII décidèrent de se séparer à l’issue d’une importante rencontre entre commandants jihadistes. L’EII se rebaptisa alors « EIIL » (État Islamique en Irak et au Levant), et absorba la grande majorité des combattants, des armes, des munitions, de la logistique et des centres de commandement du Front al-Nosra dans le Nord de la Syrie. De ce fait, le soutien clandestin d’al-Nosra par les services spéciaux occidentaux et leurs alliés proche-orientaux a favorisé la montée en puissance du futur « État Islamique » dans le conflit syrien – un risque anticipé en 2012 par le Renseignement militaire du Pentagone (DIA).

En mars 2016, le magazine Marianne révéla que la direction de la prospective du Quai d’Orsay avait, dès octobre 2012, alerté le ministre des Affaires étrangères et l’Élysée sur le fait que l’Arabie saoudite et le Qatar finançaient les groupes extrémistes en Syrie – ce qui vient d’être confirmé par des propos d’Hillary Clinton rendus publics par Wikileaks. Dans une note qui fut ignorée par leur hiérarchie, ces experts du Quai d’Orsay soulignèrent que le « piège [venait] du Golfe », et que « nous [risquions] d’y tomber ». Finalement, à partir de 2014, plusieurs députés de l’opposition accusèrent le gouvernement français d’avoir soutenu le Front al-Nosra, rappelant qu’il s’agissait de la branche d’al-Qaïda dans le conflit syrien. Au vu de la gravité de ces allégations, on aurait pu s’attendre à un scandale national. Il n’en fut rien, les médias français n’ayant pas repris ces arguments. Présidente de la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée Nationale depuis juin 2012, Élisabeth Guigou pouvait-elle ignorer ces politiques clandestines ? Contactée durant l’écriture de cet article, la députée n’a pas répondu à ma sollicitation.

Embargo en Syrie, guerre au Yémen, bataille de Mossoul : le moralisme français n’est pas crédible

Durant ce débat télévisé sur LCP, d’autres vérités dérangeantes ont été passées sous silence par Élisabeth Guigou. Cette dernière, à l’instar du gouvernement français, persiste à nier le réel et à mener une diplomatie moraliste et manichéenne qui met en péril nos relations avec la Russie, un acteur incontournable dans le conflit syrien, un important fournisseur de gaz pour l’Europe et une puissance nucléaire stratégique. Or, ce positionnement irrationnel nécessite d’entretenir l’illusion d’un État français irréprochable, donc de dissimuler le fait que le gouvernement soutient non seulement des islamistes en Syrie – comme nous venons de le rappeler –, mais également une guerre illégale frappant les civils yéménites depuis le printemps 2015, ainsi qu’une véritable guerre économique contre le peuple syrien. En effet, le site TheIntercept.com a récemment dévoilé un rapport interne de l’ONU démontrant que les sanctions unilatérales des pays de l’Union Européenne et des États-Unis contre la Syrie punissent collectivement la population. En effet, ces mesures bloquent ou complexifient l’accès à de nombreux médicaments, au carburant ou à des équipements susceptibles de réparer les infrastructures détruites par la guerre – dont les hôpitaux, les stations d’épuration ou les centrales électriques. Considérant la sévérité de ces sanctions approuvées par l’État français – qui d’après ce rapport perturbent grandement les opérations humanitaires de l’ONU et des ONG dans ce conflit –, les préoccupations du gouvernement vis-à-vis du sort de la population syrienne semblent toutes relatives.

L’implication clandestine de l’armée et des services de renseignement français dans la guerre au Yémen suscite la même impression déplaisante. En effet, comme l’a souligné Régis Soubrouillard en avril 2015, le Pentagone, la Direction du Renseignement Militaire (DRM) et la DGSE aident l’Arabie saoudite à planifier ses bombardements et à sélectionner ses cibles, notamment au moyen de renseignements satellitaires. Citant un article du Canard Enchaîné, mais ne mentionnant pas le rôle des Britanniques dans ce conflit, Régis Soubrouillard a rapporté que « les “militaires américains supervisent cette guerre en tant qu’associés”, (…) les opérations [étant] supervisées par le CENTCOM, qui pilote toutes les opérations américaines dans le Moyen-Orient et en Asie centrale. » Il ajouta que, « selon la lettre Intelligence online, “les services de renseignement français ont ouvert en grand les vannes des transferts de renseignement pour soutenir l’opération ‘Tempête décisive’ au Yémen. La Direction du Renseignement Militaire (DRM) et la DGSE ont ainsi reçu l’ordre express de l’Élysée de soutenir par tous les moyens l’offensive de Riyad contre les rebelles houthis ». La « coalition arabe » est donc une expression qui masque, intentionnellement ou non, le rôle central des gouvernements américain, français et britanniquedans cette guerre aux conséquences humanitaires désastreuses – notamment en termes d’accès à l’eau potable.

En effet, comme l’a rapporté Amnesty International en février dernier, « j’ai été témoin de ce que les Yéménites endurent – voir des corps tirés des décombres à Sanaa ou des restes humains parmi les gravats jonchant le site d’une station d’épuration visée par une frappe aérienne à Hajja [,] ou assister à une réception de mariage qui se transforme en funérailles ». En janvier 2016, l’UNICEF expliquait que « les enfants représentent au moins la moitié des 2,3 millions de personnes déplacées de leur foyer, et au moins la moitié des 19 millions de personnes qui s’efforcent chaque jour de trouver de l’eau potable ; (…) Les services publics de santé, d’eau et d’assainissement ont été décimés et ne peuvent pas répondre aux besoins toujours croissants d’une population désespérée. » Ainsi, des millions de civils yéménites subissent les conséquences des bombardements massifs d’infrastructures civiles par la coalition « arabe ». Ces opérations militaires aggravent le manque chronique d’eau potableau Yémen, ce qui engendre des épidémies de maladies diarrhéiques et de choléra.

Le blocus de la coalition « arabe » et le pilonnage délibéré des fermes et de l’industrie agricole yéménites constituent également un problème majeur dans ce pays, « plus de la moitié des 28 millions de Yéménites [étant] à court de nourriture [, avec] les enfants (…) en première ligne ». Selon l’UNICEF, 3 millions de personnes ont besoin d’une aide alimentaire immédiate, et 1,5 million d’enfants souffrent de malnutrition. Avec la reprisedes opérations de la coalition « arabe » en août dernier, il est difficile d’être optimiste sur l’issue d’une guerre totale qui, contrairement au conflit syrien, attire nettement moins l’attention des citoyens et des médias français. Or, selon le spécialiste du Moyen-Orient Mathieu Guidère, « le Yémen est en train de devenir une nouvelle Syrie ». Dans un tel contexte, le quasi-silence du Quai d’Orsay et de l’Élysée sur la guerre au Yémen est compréhensible, la France étant discrètement impliquée dans le soutien de la coalition « arabe » aux côtés de nos alliés américains et britanniques, tout en aidant clandestinement des rebelles islamistes dans le conflit syrien en coordination avec les principaux services secrets occidentaux et proche-orientaux. Parallèlement, la reconquête de Mossoul par les forces locales et les puissances de l’OTAN a été lancée le 16 octobre, l’ONU craignant « une crise humanitaire sans précédent » et de lourdes pertes humaines au sein de la population. Ces risques ne dissuadent aucunement l’État français d’engager notre armée dans ces opérations en Irak, tout en dénonçant des bombardements à Alep-Est qui ont pourtant le même objectif qu’à Mossoul : libérer une grande métropole d’une force d’occupation islamiste.

Face au risque d’escalade militaire globale, la lucidité diplomatique doit s’imposer

La France étant donc loin d’être irréprochable sur la scène internationale, il faudrait abandonner cette « émodiplomatie » qui n’est pas crédible, qui est souvent contraire à nos intérêts nationaux, qui accentue dangereusement les tensions Est-Ouest, et qui ne suffit plus à dissimuler l’engagement inavouable de l’État français dans des guerres par procuration au Yémen et en Syrie. Et si des « bavures » sont perpétrées par la coalition durant la bataille de Mossoul, nos partenaires russes – dont le Président a exhorté les forces occidentales à épargner les civils irakiens –, accuseront à leur tour la France et ses alliés de commettre des crimes de guerre, amplifiant les tensions et les risques d’escalade militaire entre grandes puissances au Proche-Orient, voire au-delà.

Par conséquent, les dirigeants français et européens ne doivent plus céder à la russophobie excessive qui s’est imposée à Washington, et ainsi faire preuve de lucidité diplomatique. Ils devraient donc s’opposer à toutes nouvelles sanctions contre la Russie, et tenter de trouver des solutions constructives avec nos partenaires du Kremlin – comme lors des négociations ayant abouti aux accords de Minsk II. Ne décourageant point les ambitions géopolitiques de Vladimir Poutine, les sanctions frappant l’économie russe depuis 2014 devraient être abandonnées, du moins par l’Union Européenne. Ce revirement diplomatique pourrait enclencher un processus de désescalade, qui semble impératif dans le contexte actuel. En effet, nous observons chaque jour des tensions exacerbées entre la Russie et l’Occident, à tel point que le Financial Times, le Spiegel ou le ministre allemand des Affaires étrangèresnous mettent en garde contre un risque réel de guerre mondiale. Pour ne citer qu’une seule de ces sources, les propos du chef de la diplomatie germanique sont alarmants : « C’est une illusion de croire qu’il s’agit de l’ancienne guerre froide. Les temps actuels sont différents, plus dangereux. (…) Le danger d’une confrontation militaire est considérable. Ce danger n’a jamais été aussi important depuis des décennies, et la confiance entre l’Ouest et l’Est jamais aussi faible ». Lorsque l’on observe la situation géopolitique mondiale, ce constat se traduit dans les faits, et la Russie est en train de préparer activement sa population à cette sinistre éventualité. Est-ce donc le temps du moralisme, des hésitations et des menaces diplomatiques irréalistes ? On peut légitimement en douter.

Maxime Chaix

Source : Blog Mediapart, Maxime Chaix, 26-10-2016

Source: http://www.les-crises.fr/pourquoi-lemodiplomatie-francaise-nest-ni-credible-ni-constructive-par-maxime-chaix/


L’Amérique de Trump, par Emmanuel Todd

Friday 28 October 2016 at 00:20

Source : France Culture, Emmanuel Todd, 25-10-2016

La Grande Table reçoit l’historien et démographe Emmanuel Todd pour discuter des présidentielles américaines à travers la figure de Donald Trump.

23 octobre en Floride• Crédits : JOE RAEDLE / GETTY IMAGES NORTH AMERICA - AFP

23 octobre en Floride• Crédits : JOE RAEDLE / GETTY IMAGES NORTH AMERICA – AFP

“Il y a deux enjeux : une Amérique qui aspire à une sorte de recentrage démocratique et une Amérique de la globalisation qui domine jusque-là.” Emmanuel Todd, La Grande Table

“La source de la montée des inégalités dans le monde occidental vient de cette nouvelle stratification éducative.” Emmanuel Todd, La Grande Table

Source : France Culture, Emmanuel Todd, 25-10-2016

Source: http://www.les-crises.fr/lamerique-de-trump-par-emmanuel-todd/


[Vidéo] Les Funambules de 2016…

Thursday 27 October 2016 at 02:33

Sans commentaire…

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Source: http://www.les-crises.fr/video-les-funambules-de-2016/


Revue de presse du 27/10/2016

Thursday 27 October 2016 at 02:30

Petite revue de milieu de semaine… Bonne lecture.

Source: http://www.les-crises.fr/revue-de-presse-du-27102016/


Visualiser les divergences des valeurs dans l’Union européenne, par Peter Turchin

Thursday 27 October 2016 at 00:30

Source : Cliodynamica, Peter Turchin, le 20/07/2016

Le 20 juillet 2016, par Peter Turchin

Dans mon post du 1er juillet, le Brexit comme destruction créative, j’ai argumenté qu’une des causes principales du dysfonctionnement de l’Europe avait été le choix fait par les élites européennes d’étendre l’Union trop vite, trop loin. Pourquoi je pense que c’était une erreur ?

Comme je l’ai dit à de nombreuses occasions (sur ce blog et dans mes autres écrits), il est difficile de faire coopérer les gens, notamment au sein d’importants groupes sociaux. Une coopération réussie impose que les gens partagent des valeurs et des institutions. Les valeurs nous disent pourquoi nous voulons coopérer : quel bien public voulons-nous créer collectivement ? Les normes et les institutions nous disent comment nous allons organiser cette coopération. Une inadéquation entre les valeurs et les institutions peut condamner tout effort de coopération avant même qu’il ne se mette en place.

De mon point de vue, l’agrandissement de l’Europe à partir des six pays à l’origine (Benelux, France, Allemagne et Italie, que je regrouperai sous la dénomination de “cœur” des nations européennes), pour atteindre actuellement 28 États fut une grosse, une très grosse erreur. Nous pouvons utiliser les données rassemblées par le World Values Survey (WVS) (Étude des Valeurs dans le Monde) pour comprendre l’énormité de l’erreur.

Depuis 1981, le WVS a enregistré des données sur les croyances des populations de nombreux pays. Un résultat intéressant tiré de ces données est que l’essentiel des variantes entre les populations de différents pays peuvent être cartographiées en deux dimensions : 1) les valeurs traditionnelles face aux valeurs laïques et rationnelles, et 2) les valeurs de survie face aux valeurs d’expression individuelle. Quand les valeurs moyennes de chaque pays dans l’échantillon sont placées sur une représentation en deux dimensions autour de ces deux axes, nous obtenons ce qui est connu sous le nom de carte culturelle Inglehart-Welzel. La voici dans sa dernière édition (la sixième) :

cultural_map_wvs6_2015

Inglehart-Wetzel groupe les pays de culture similaire selon : “Europe catholique”, “Europe protestante”, “Anglophones”, etc.

Mais j’ai choisi d’analyser cette cartographie à partir d’un autre point de vue. J’ai donc  mis en légende les pays selon les catégories suivantes :

Le cœur (rouge) : les six pays à l’origine de la Communauté Economique Européenne

UE (marron) : les 22 autres membres de l’Union Européenne

Europe (vert) : deux pays de l’Europe de l’ouest qui ne font pas partie de l’UE

Postulant (jaune) : postulants actuels à l’entrée dans l’UE

Monde (gris) : le reste de la planète (j’ai omis le nom des pays par souci de clarté)

Note : la raison pour laquelle l’Italie a un astérisque est que, pour différentes raisons, les données ne viennent pas de la 6e mais de la 5e édition.

Et voici à quoi cela ressemble…

wvs_seshat

Le tracé est si frappant qu’il n’a pratiquement pas besoin de commentaires, mais analysons-le cependant. Les six pays d’origine (le “cœur” de l’Europe) sont très rapprochés. Il n’y a que deux autres pays qui font partie du même groupe: l’Autriche et la Suisse. De façon remarquable, les espaces géographiques modernes de ces deux ensembles englobent les limites de l’empire carolingien (est-ce le début de la fin de l’Union européenne ?). Il semble que le “fantôme” de l’empire de Charlemagne ait plus d’influence sur les valeurs culturelles d’aujourd’hui que des différences plus récentes comme catholicisme vs protestantisme.

D’autre part, les 28 pays actuels de l’Union européenne ne forment pas du tout un groupe. Au contraire, ils couvrent les trois-quarts des variantes des valeurs mondiales. Seuls les pays africo-islamiques et l’Amérique centrale se retrouvent en dehors de l’ellipse englobant les 28 membres de l’Union européenne.

Avec une telle disparité normative, est-il si surprenant que l’Union européenne, dans sa composition actuelle, soit une organisation en dysfonctionnement ?

Source : Cliodynamica, Peter Turchin, le 20/07/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Source: http://www.les-crises.fr/visualiser-les-divergences-des-valeurs-dans-lunion-europeenne-par-peter-turchin/